#sihame_assbague

  • Retour sur le procès Nick Conrad

    Puisque cet article, pourtant excellent, donne de l’urticaire à certains (cf https://seenthis.net/messages/769829), je le publie ici aussi ( #effet_Streisand oblige ) et j’y ajouterai en commentaires un extrait du live-tweet de #Sihame_Assbague, dont il est fait mention, ainsi qu’un renvoi vers le taf de #Nick_Conrad et des interviews, vu qu’il a interjeté la condamnation de la Justice en appel et que marquer son soutien pour l’œuvre qu’il réalise peut être une bonne idée par les temps qui courent trop vite. Petite précision quand même : si vous n’avez jamais été confronté à l’inconscience blanche tellement nous sommes formaté-e-s, je vous conseille de commencer par un vieux clip de Nick Conrad pour rencontrer d’abord l’artiste. Le clip « Pendez les blancs » fait très mal, et choque très fort quand on n’a rien déconstruit. Et c’est le but. Et on peut clairement dire qu’il a rempli sa fonction au delà de ses espérances...

    https://lundi.am/Retour-sur-le-proces-Nick-Conrad

    « Pendez l’Agrif »

    Mercredi 9 janvier a eu lieu le procès d’un rappeur de Noisy-le-Grand, Nick Conrad, pour un clip intitulé « PLB » (« Pendez Les Blancs »). L’occasion pour l’#AGRIF (l’Alliance générale contre le Racisme et pour la défense de l’Identité Française et chrétienne) et la LICRA de se retrouver du même côté de la barre à défendre l’idée d’un « #racisme #anti-blanc ». Celui-ci a fait l’objet d’un live-tweet édifiant par Sihame Assbague, revenant notamment sur la dimension idéologique de l’audience.

    L’histoire de la pénalisation politique du #rap est longue. Cependant la question du « racisme anti-blanc », catégorie forgée par le Front National en 1978, n’avait jamais été posée aussi frontalement, malgré les tentatives passées de l’AGRIF. Même lors des procès #Saïdou/#Bouamama pour « Nique la France » - où l’on retrouvait le même avocat de l’AGRIF côté partie civile, ce qui en dit long sur les ravages de l’oisiveté – la jurisprudence avait finalement tranché dans le sens d’une distinction (logique) entre « anti-blancs » et « anti-français ». La circonstance aggravante de #discrimination raciale, prévue par l’article 132-76 a donc été écartée. Or ce procès d’un rappeur, sauf son respect, quasi-inconnu, traduit un enjeu politique qui dépasse le cas particulier. La question est celle de l’imposition du « racisme anti-blanc » non seulement dans le débat public mais aussi dans le droit. Pour rappel, c’est après 2005, à travers d’autres rappeurs, que le député feu-UMP Grosdidier avait suggéré que dans l’article de régulation de la liberté d’expression soit ajouté, aux côtés de discrimination en raison de l’origine, la précision « que le groupe soit majoritaire ou minoritaire ». Il s’agissait de se servir du formalisme du droit – aveugle aux asymétries structurelles de la société – pour renverser complètement l’esprit de la législation, créée justement pour protéger les minorités. La saisie des parties civiles s’inscrit clairement dans cette logique, cette fois avec l’aide de la #LICRA qui depuis plusieurs années reconnaît l’existence du « racisme anti-blanc ».

    • extrait du live-tweet de Sihamane Assbague à retrouver en intégralité ici :
      https://twitter.com/s_assbague/status/1082985427777277953

      Lors de son audition, lue par le juge, #NickConrad a déclaré : « j’ai voulu créer un choc, faire réaliser ce que l’homme noir a subi. Les Noirs ont la mémoire de la violence subie en eux, c’est ce que je voulais montrer. J’ai voulu inverser la situation. Je ne suis pas raciste. »

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      #NickConrad explique que c’est « la vie » qui l’a amené à produire le morceau "Pendez les Blancs ». Il s’est renseigné sur l’Histoire très tôt, a commencé à s’intéresser à l’histoire de l’esclavage, des oppressions & voulait dédier un son à cette « souffrance », en inversant.

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      « L’esclavage, la ségrégation, c’est ancien mais on continue à subir les effets. C’est ma vie qui m’a amené à écrire ça. Comment je suis perçu, je dois faire 2 x plus d’efforts. Je ne suis pas né esclave, je suis né libre mais on nous met sur le dos trop de choses » #NickConrad.

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      « On sait que le rap est + violent, + revendicatif dans sa forme. On n’attend pas d’un clip de rap qu’il soit un article du Monde, ça d’accord. Mais votre clip fait référence aux USA, comment être sûr que ce soit pris comme qq chose de fictionnel ? » demande le juge. #NickConrad

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      #NickConrad explique qu’il y a plein de choses dans son clip qui pouvait permettre de comprendre que c’est une fiction : les réf. culturelles & historiques, les citations, le style vestimentaire, les sous-titres, le générique, etc. « C’est une inversion. Regarde ce qu’on a vécu. »

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    • Côté Nick Conrad maintenant.
      Promo & monde marchand obligent, ses albums ne sont dispo que sur des supports payants, tel son nouvel album : https://wiseband.lnk.to/Nick-Conrad-REVOLUTION-2-0

      On peut retrouver pas mal de ses clips par là https://www.youtube.com/user/jazzconrad1/videos côté officiel et par là https://www.youtube.com/watch?v=TBnnRtNIaSk&list=PLweGDUnD-Tikrxe31kfaq0yfa1VDoEVG0

      (mais il vaudrait mieux commencer par le milieu)
      Il n’y a, hélas, absolument rien de Nick Conrad sur Peertube :/

      Sur le pseudo « racisme anti-blancs » de Nick Conrad, j’orienterai en priorité vers les clips « 130 cercueils » en hommage aux victimes des attentat du 13 novembre :https://youtu.be/ylNL3ismboU

      et vers ce clip sur sa vision de l’amour (cis) : « The Light » : https://youtu.be/gwT245Q6rYg
      mais en vrai ça me saoule un peu de devoir passer par un justificatif-qui-lave-plus-blanc...

      Concernant le clip « Pendez les blancs », le souci est que le voir seul est absurde, il fait partie d’un album très sombre qu’il a écrit en partie à l’hosto (il est, comme beaucoup, atteint de #drépanocytose, cette maladie-marqueur qu’utilisent les fachos pour trouver des « chiffres » à manipuler dans leur fantasme de #grand-remplacement... Voir d’ailleurs ce qu’il en dit dans un des premiers articles, pas encore trash, sur cette #polémique : https://www.rtl.fr/culture/musique/nick-conrad-drepanocytose-jazz-identite-noire-itineraire-d-un-rappeur-clivant-77

      Je crois que j’ai eut le déclic de la compréhension avec ce clip : « King Bell » :https://youtu.be/WJ08kJPR7fU

      sur lequel, pendant un moment, j’me suis dit « nan mais là ça va trop loin ce truc de on est des rois, je peux pas cautionner un truc qui prône l’ascendance sur les autres » pour découvrir à la fin que c’est un hommage au roi Rudolph Duala Manga Belle, dont il n’y a évidemment aucune trace dans wikipedia, et encore plus évidemment aucune connaissance dans ma culture. On trouve son histoire par ici http://afroculture.net/rudolf-duala-manga-bell-martyr-heros-camerounais (je ne sais pas si le site fonctionne chez tout le monde, il est parasité par la publicité)
      Bref je me suis sentie très conne... comme je l’ai été quand on m’a mis le nez un peu plus fermement dans mes habitudes de « blanche » lors de mon voyage au Mexique...

      Ca a été le déclic pour comprendre à quel point tout l’album est « en même temps » une fiction, puisque Nick Conrad vit AVEC son temps et sa géographie, mais aussi une sorte d’éternel testament, de témoignage de sa lignée de souffrance, une manière de dire aux ancêtres : « je sais d’où je viens et ce qui nous a fait ». Et face à ça, je ne peux que me taire en étant consciente de la chance d’assister à cette « cérémonie » de passation.

    • Le théorème rappologique indique que si ton nom tourne plus vite qu’un joint en soirée, si les machines à café assistent impuissantes à la question fatidique : « T’as vu le Noir qui chante Pendez les Blancs (PLB) ? », alors sortir-vite-un album-tu-dois. Quelques jours après la parution de son opus Révolution 2.0, nous rencontrons le rappeur Nick Conrad, la clope au bec au Jardin d’acclimatation.

      https://next.liberation.fr/musique/2019/04/05/nick-conrad-langue-bien-pendue_1719634

    • Suivi du procès en appel de Nick Conrad par Sihame Assbague :

      Nick Conrad est de nouveau devant la justice pour son clip “Pendez les Blancs”. Il avait fait appel après avoir été condamné par le tribunal de Paris à 5000 € d’amende avec sursis. L’audience devant la Cour d’appel a commencé…et c’est plutôt tendu. Live-tweet à dérouler
      Pour rappel, le rappeur Nick Conrad avait été jugé en janvier 2019 pour son clip “Pendez les blancs”. Il était accusé de “provocation au crime” avec une circonstance aggravante : des propos “racistes” (anti-blancs donc.) Vous pouvez retrouver ici une partie du live-tweet de 2019. https://web.archive.org/web/20210624201258/https://twitter.com/s_assbague/status/1082985427777277953
      L’audience a commencé par la diffusion de 3 vidéos : le clip “Pendez les blancs” de Nick Conrad, un extrait du film “American History X” & un de “Get Out”. Des scènes de ces 2 films ont en effet inspiré une partie du clip du rappeur. Elles ont donc été diffusées pour le contexte.
      Nick Conrad est appelé à la barre. Il explique qu’il a perdu son travail suite à la polémique nationale qui a suivi la diffusion de son clip. Il rappelle que “l’ensemble de l’échiquier politique a fait bloc” contre lui, “pour rien, pour une chanson” & qu’il n’a reçu aucun soutien
      “Je me retrouve devant la justice pour une chanson qu’un petit de CM2 aurait compris” dit Nick Conrad. Il explique qu’il n’est “pas dupe” & que c’est “autre chose qui est en jeu. Ce n’est ni mon procès ni celui de PLB, on veut juste empêcher la critique du racisme institutionnel”
      Nick Conrad rappelle l’Histoire esclavagiste de la France. Il explique que l’un de ses ancêtres a été pendu par des blancs à la veille de la seconde guerre mondiale mais que cette Histoire-là n’est “pas finie”, qu’elle continue de faire “des ravages dans le monde entier”.
      “Je ne comprends pas” dit Nick Conrad “la France a obtenu tout ce qu’elle a par la violence et aussi par le racisme qu’elle a institutionnalisé…mais vous êtes tous choqués par un clip, de simples paroles, une simple inversion fictive. Il n’est pas dans mon clip le vrai sang”.
      Le Président de la Cour s’impatiente. Il demande à Nick Conrad d’adopter un “ton + modéré”, de ne pas “crier”. Le rappeur dit que “de toute façon”, il ne “peut pas respecter cette justice, votre justice. Elle permet des choses terribles. C’est un des rouages du système raciste.”
      Le président demande à Nick Conrad “pourquoi un clip si violent ?”
      Le rappeur explique qu’il a voulu inverser la situation, donner à voir ce que vivent les noirs, qu’il est parti de situations historiques ou existantes.
      Réponse du juge : “mais ça ne concerne pas la France ça.”
      Nick Conrad répond “bien sûr que si ça a à voir avec la France. Avec ce qu’elle a fait & ce qu’elle continue de faire. C’est ce que je vous ai expliqué au début.”
      C’est assez hallucinant. Le président parle comme si le racisme, l’esclavage, etc., étaient étrangers à la France.
      L’un des avocats de Nick Conrad intervient. Débat historique en cours. Il demande au juge : “pourquoi vous dites que l’esclavage n’a rien à voir avec nous ?! Je vous rappelle que le territoire des USA a été colonisé par l’Europe & pas l’inverse. C’est l’Europe qui amène cela.”
      Pour le juge, le racisme dont il est question, le racisme anti-noir donc, est “d’inspiration américaine”.

      Ah.

      L’avocat de Nick Conrad le reprend à nouveau. Le président répond alors que “toutes les sociétés ont été racistes & esclavagistes”, qu’il ne faut pas focaliser.

      Ah.

      Le président reprend ses questions. Il demande à Nick Conrad “pourquoi vous dites votre justice, votre France…vous ne vous sentez pas intégré ?”

      Le rappeur répond “c’est la France qui ne m’intègre pas. C’est elle qui me catalogue et me traite différemment parce que noir.”

      C’est au tour de l’avocate de la LICRA de poser des questions. Oui car, pour rappel, la LICRA & l’AGRIF se sont constituées parties civiles contre Nick Conrad.

      L’avocate demande à Nick Conrad s’il considère que “sale noir” est raciste”.
      “Oui” répond-il.
      “Et sale blanc donc ?”

      Nick Conrad répond qu’il sait où l’avocate veut l’amener mais “ce n’est pas pareil. Il n’y a pas la même histoire, ni en France, ni dans le monde, pour les blancs & pour les noirs. Tout est différent.”

      L’avocate de la LICRA enchaîne “vous connaissez Dieudonné ? Et Kémi Séba ?”

      L’avocate de la LICRA demande à Nick Conrad s’il est d’accord pour dire qu’il y a gens “qui sont un peu - noirs & d’autres un peu + noirs que les autres” et s’il sait “qu’il y a des blancs qui peuvent venir d’Afrique”
      Conrad répond que “quand on est noir, on est noir, c’est tout”

      J’avoue que je ne sais pas trop où elle veut en venir avec ces questions. Visiblement, incompréhension de ce que sont les races sociales & de comment ça fonctionne. Le président demande désormais à Nick Conrad s’il considère les métisses “comme des noirs ou des blancs ?”

      Sur la question des métisses, Nick Conrad répond que ce n’est pas lui qui décide de qui est noir ou pas, mais les processus de racialisation. Il précise que les métisses n’étant pas “tout à fait blancs, ils sont donc traités comme des noirs. C’est ça le sujet.”

      Désolée, on m’a empêchée de live-tweeter le procès aujourd’hui. Assez compliqué du coup. J’ai raté une partie des plaidoiries de l’avocate de la LICRA & de l’avocat de l’AGRIF…mais leurs propos & stratégies d’attaque sont les mêmes qu’en 2019. Cf. ce thread. https://web.archive.org/web/20210624201258/https://twitter.com/s_assbague/status/1083026943975571456

      Et je reprends !

      Durant sa plaidoirie, l’avocat de l’AGRIF a expliqué - entre autres inepties - que les poings levés de Tommie Smith & John Carlos, lors des JO de 1968, étaient des gestes de “suprémacistes noirs”. Comme le morceau de Nick Conrad. Et il a évidemment parlé “racisme anti-blanc”, etc
      https://web.archive.org/web/20210624201259im_/https://pbs.twimg.com/media/E4qYxfPXMAACPU-.jpg

      L’avocate générale a requis une condamnation plus sévère qu’en première instance contre Nick Conrad : 10 000€ d’amende dont 5000€ avec sursis. C’est au tour des avocats du rappeur de prendre la parole.

      L’avocate de Nick Conrad commence en disant qu’elle n’a jamais été victime de “racisme anti-blanc” & que les seules insultes racistes qu’elle a reçues sont en lien avec ce procès. Elle évoque “des dizaines & dizaines” de menaces & insultes “pute à n****”. Parce qu’elle le défend.

      L’avocat de Nick Conrad explique qu’il ne peut pas commencer sa plaidoirie sans revenir sur les “énormités qui ont été proférées durant ce procès”. Il pense notamment aux propos de l’avocat de l’AGRIF qui a qualifié les sportifs Tommie Smith & John Carlos de “suprémacistes noirs”

      “Je ne peux pas laisser dire que Tommie Smith était un suprémaciste noir parce qu’il a levé le poing. Ils l’ont fait pour protester contre la ségrégation raciale, contre le sort réservé aux noirs aux USA. Il ne faut pas raconter n’importe quoi” explique l’avocat de Nick Conrad.

      L’avocat de Nick Conrad revient également sur la persistance à vouloir dire que la France n’a rien à voir (ou presque) avec l’esclavage. Il tacle aussi l’avocat de l’AGRIF qui a dit que les principaux responsables de la traite négrière étaient…les africains eux-mêmes.

      L’avocat de Nick Conrad rappelle donc que l’esclavage et le racisme font partie intégrante de l’Histoire de France. Et que ce pays en a largement profité. “Si Bordeaux est l’une des villes les plus riches, par exemple, c’est parce qu’elle a bénéficié de l’esclavage !” dit-il.

      L’avocat de Nick Conrad continue “et si les noirs occupent les statuts les + précaires dans la société, c’est pr les mêmes raisons. Il faut en avoir conscience quand même. C’est lié à cette Histoire.” Il montre la Cour & les avocats et dit “regardez-nous ! Vous voyez bien, non ?”

      “Je comprends que ce soit désagréable qu’on nous renvoie cette image-là, cette Histoire” dit l’avocat de Nick Conrad “surtout quand on a l’impression d’avoir avancé. C’est gênant, difficile, mais ça n’en fait pas pour autant de l’incitation à commettre un crime contre les blancs”

      “Vous pensez vraiment que des Noirs allaient entendre ce rap & se dire oui, bonne idée, allons pendre des Blancs ? Vous pensez ça possible ? Mon confrère (l’avocat de l’AGRIF) a parlé de la bêtise dans les cités…sérieusement ? Qui y croit ?” demande l’avocat de Nick Conrad.

      Pour l’avocat de Nick Conrad, il ne peut y avoir aucune comparaison, aucune confusion possible : d’une part, vu l’Histoire & les rapports de force, “la situation des noirs & celle des blancs n’ont absolument rien à voir” & d’autre part, “il est clair que PLB est une fiction”.

      L’avocat de Nick Conrad revient au texte de PLB “franchement, il suffit de le lire. Les références sont explicites. Il dit pendez-les, fouettez-les, vendez-les…à quoi font référence ces termes ? Qui a subi ça ? Quel peuple ? L’inversion est évidente.”

      L’avocat de Nick Conrad répond désormais à l’avocate de la LICRA qui a regretté que ce clip ne soit pas "un message de paix & d’amour."

      "En gros, ce que avez dit à NC, c’est que son rap n’est pas comme il faut, que c’est du rap méchant & que c’est pas gentil d’être méchant"

      C’est, au fond, l’un des enjeux de ce procès. C’était le cas en 2019 & ça l’est aujourd’hui. On rappelle à l’ordre les rappeurs, les militants. On leur dit comment rapper, comment militer, comment ne surtout pas froisser les blancs, comment ne surtout pas irriter l’ordre raciste.

      L’avocat de Nick Conrad ne s’y est pas trompé. « Est-ce que vous pensez vraiment que des gens qui dénoncent et militent contre le racisme, que ceux qui agissaient pour les droits civiques, veulent être sympathiques à tout prix ? Franchement…Ce n’est pas ça la question. »

      « Ce qu’on a dit à Nick Conrad, c’est qu’il faut être sympa, et produire des messages de paix et d’amour, sinon ça va créer encore plus de racisme » explique l’avocat du rappeur.

      (Oui, et c’est classique pour neutraliser la lutte. Les victimes sont les bourreaux & vice versa.)

      L’avocat de Nick Conrad demande à la Cour de replacer ce morceau dans un contexte historique, politique, plus large & de ne pas oublier qu’il s’agit d’une œuvre artistique, une fiction.

      Fin de la plaidoirie & du live-tweet.
      Le délibéré sera rendu fin septembre.

      Merci à tous !

      Source : https://twitter.com/s_assbague/status/1408078777922555905
      Archive : https://web.archive.org/web/20210624201258/https://twitter.com/s_assbague/status/1408078777922555905

  • Au camp d’été décolonial, les « racisés » plaident pour l’autonomie
    https://www.mediapart.fr/journal/france/270816/au-camp-dete-decolonial-les-racises-plaident-pour-lautonomie

    Le camp d’été décolonial s’est ouvert à Reims le jeudi 25 août malgré les polémiques qu’il a suscité en raison de la non-mixité demandée par les organisatrices. Cette formation est réservée « uniquement aux personnes subissant à titre personnel le racisme d’État en contexte français ».

    #France #antiracisme #discriminations #Fania_Noël #islamophobie #Sihame_Assbague

  • « Quand nous disons "je", c’est à nous tou-te-s que nous pensons » - Contre-attaque(s)
    http://contre-attaques.org/magazine/article/tribune

    Laurence Rossignol, Manuel Valls, Gilles Clavreul, Laurent Joffrin...ces dernières semaines ont été marquées par les déclarations outrancières de plusieurs responsables politiques et éditorialistes. Qu’elles insultent la mémoire des déportés de l’esclavage, le libre-arbitre des femmes voilées ou les pratiques militantes des antiracistes politiques, ces déclarations n’ont qu’un seul effet : renforcer les stigmates visant une partie de la population. Plusieurs acteurs associatifs ont ouhaité réagir à cette sombre actualité ; nous publions ici leur tribune.

    Nous assistons avec un triste amusement à la déchéance de rationalité d’un État en roue libre. Et avec lui, les hérauts d’une élite désuète qui, face à la remise en cause de ses privilèges, est prête à faire brûler la maison France qu’elle dit tant aimer.
    Comme chaque jour apporte son lot de nouvelles polémiques autour de l’islam et des musulmans, des Noirs et des Arabes, des migrants et des Roms, hier pas plus que demain ne déroge à la règle.

    Douce France, cher pays en pleine souffrance, que nous réserves-tu aujourd’hui ? Quel foulard, quelle barbe, quelle couleur, quelle culture te posera problème ? Quel sujet naitra, sinon de ton ennui, du moins de tes errances ou stratégies racialistes ?

    Sur nos écrans s’affichent les tensions du jour qui, dans nos rues comme dans nos institutions, dans nos écoles comme dans nos entreprises, portent leurs fruits amers, construisant et légitimant le rejet de l’autre, son exclusion. La violence des mots, souvent. La violence des gestes, aussi.

    Et face à cela, un État coupable de lui-même, non plus uniquement de ses renoncements face aux racismes, mais également de ses discours et de ses actions ; une puissance publique qui, plutôt que d’apporter la rationalité de l’analyse, l’humanisme de l’écoute et la fraternité dans l’action, est incapable d’offrir un autre visage que celui du mépris.

    L’antiracisme d’État n’est et ne sera pas la grande force issue de tous les secteurs et de tous les paysages de la société française, permettant à chacun-e de ne plus faire face à l’exclusion de part sa couleur de peau, son origine ou sa religion supposée. Au contraire, il aura été l’obstruction des institutions, empêchant les premiers intéressés d’accéder aux moyens politiques et institutionnels de changer positivement leur condition. Il aura été la domination d’une élite, produisant un discours vertical descendant, à l’attention des populations cibles du racisme que l’on aura voulu « civiliser » et « pacifier », sans jamais dépasser ses réflexes post-coloniaux. Il aura été 30 ans de retard, en donnant à voir l’illusion d’une France fraternelle, signalant sur le plan du marketing ce que nous avons été incapables de faire vivre dans le réel de l’action institutionnelle. Une France pourtant rescapée, sauvée au quotidien par l’expérience humaine de gens qui veulent tout simplement vivre ensemble, bien loin des outrances politiques de ceux qui nous gouvernent. 

Au Président de la République comme au Premier Ministre, au Délégué interministériel prétendument contre le racisme et l’antisémitisme comme aux polémistes qui les soutiennent, aux videurs de l’antiracisme patenté comme aux racistes de tout poil qui se sentent soudainement pousser les ailes d’un républicanisme jacobin, à cette infime minorité qui truste l’espace médiatique névrosé tout en poussant des cris d’orfraie à chaque fois qu’on contredit leurs certitudes, nous disons simplement : 



    Votre antiracisme est un racisme, puisqu’il revient à nous imposer la manière dont nous devrions vivre et les mots que nous devrions choisir pour nous exprimer, juste par notre différence.
    Votre féminisme est un sexisme, puisqu’il aboutit à dicter aux femmes ce qu’elles devraient ou non porter, tout en confisquant la parole des premières intéressées.
    Votre progressisme est une régression, puisqu’il valide le passage de nouvelles lois qui, en son nom, viennent restreindre toujours plus les droits et les libertés de chacun-e.
    Votre liberté d’expression est une censure, puisque asymétrique, elle vous permet d’insulter les autres tout en leur interdisant de vous répondre.

    Fuyez donc les miroirs, vous risqueriez de vous y voir.

    Quand des ministres s’érigent en défenseur des droits tout en convoquant, comme l’a fait Mme Rosignol, la mémoire de l’esclavage pour mieux ostraciser les Noir-e-s et les femmes musulmanes, sans qu’aucun responsable politique de premier plan ne la condamne mais plutôt la défende, on prend la mesure de l’ancrage raciste dans notre société. 

Quand un premier ministre en exercice se sert, une fois de plus, des femmes musulmanes comme bouc émissaire de ses échecs, couvrant le trou béant du chômage et les échecs de l’anti-terrorisme par des déclarations toujours plus abjectes, on a envie de lui rappeler que le premier « asservissement » que les premières intéressées dénoncent est celui de leur exclusion de l’éducation et du travail, auquel Manuel Valls a si ardemment participé.

    Et lorsque le directeur d’un journal dit de Gauche, comme Laurent Joffrin, prend la plume pour donner des leçons sur la manière de bien lutter contre un racisme qu’il n’a lui-même jamais vécu, en s’arrogeant le droit de dicter qui sont les bons et les mauvais, on serait presque tentés de rire si la situation n’était pas si grave, pour finalement lui dire :
    Promis, à la minute où on aura besoin de la permission de qui que ce soit pour savoir comment lutter contre les problèmes qui NOUS affectent, on vous fera signe. D’ici là, vous pouvez prendre un ticket et rejoindre la chorale de ceux qui, dans leur long sanglot, pleurent un antiracisme jusque là garant de leurs privilèges.

    De la même manière, si on a besoin de conseils sémantiques pour savoir comment qualifier la négrophobie, l’islamophobie ou le racisme dont NOUS sommes la cible, nous saurons que nous pouvons compter sur des experts en linguistique sélective qui ont a cœur de préserver la pureté et la conformité d’une langue qui, républicaine ironie, est la notre tout autant que la leur.

    D’ici là, nous continuerons notre travail.

    Nous continuerons à dénoncer le racisme là où il se trouve, comme un système et non un accident, sans hésiter à parler de la responsabilité de l’État dans son institutionnalisation, au travers des discriminations, des pratiques policières abusives ou encore de l’accès aux services publics.

    Nous continuerons à nous organiser en toute indépendance et à choisir nos mots, nos moyens, nos causes, nos stratégies autonomes pour préserver nos droits à tou-te-s.
    Et si votre dernière défense est de nous accuser de communautarisme, quand vous avez été le groupe de reproduction sociologique des élites le plus stable de notre histoire, c’est que vous ne concevez d’égalité que soumise à vous :

    Quand vous dites « nous », c’est à vous seuls que vous songez. 
Quand nous disons « je », c’est à nous tou-te-s que nous pensons. Comme vos discours, votre universalisme est en perpétuelle rotation, autour de votre nombril.

    Nous sommes libres, comme des êtres humains dans toute leur dignité.

    Et si cela vous pose problème, c’est qu’il vous faudra apprendre à vivre avec vous-mêmes, de vos indignations sélectives à votre égalité incantatoire, de votre vision civilisatrice et raciste à votre cécité lorsqu’il s’agit de faire face à vos propres biais et mécanismes d’exclusion. Atteints d’une fracture de l’œil à la vue d’un foulard ou d’une femme noire s’exprimant librement, menacés par une barbe ou un turban troublant votre aseptisé paysage, traumatisés par la mémoire d’un pain au chocolat arraché à votre enfance, vous pourrez trouver une oreille attentive et réconfortante auprès de ceux qui pensent comme vous. Si seuls, vous pourrez vous tenir chaud et évoquer les souvenirs d’antan... vestiges révolus d’un temps où vous pouviez encore nous dominer.

    Mais comme nous ne vous ressemblons pas, nous n’avons pas de revanche à prendre ni de souffrance à projeter sur les autres. C’est pourquoi notre lutte sera toujours et uniquement celle de la justice et de la dignité, pour tou-te-s. Accrochez-vous bien.

    Sihame Assbague, activiste et journaliste par obligation
    Houria Bouteldja, porte-parole du Parti des Indigènes de la République
    Ismahane Chouder, membre du Collectif des Féministes Pour l’Égalité
    Nabil Ennasri, essayiste et président du Collectif des Musulmans de France
    Amadou Ka, président des Indivisibles
    Leyla Larbi, membre du Labo Décolonial
    Marwan Muhammad, directeur exécutif du Collectif Contre l’Islamophobie en France
    Fania Noël, militante afroféministe