• Meloni, Musk et Michael Ende
    https://www.heidi.news/monde/en-italie-elon-musk-se-fait-le-porte-voix-de-l-extreme-droite

    Sujet d’enquête : quel relation existe entre le monde inventé par le gentil auteur anthroposophe Ende (en français : la fin) et le nouveau fascisme néolibéral ?

    Depuis la transformation de l’avocat de gauche et anthroposophe Otto Schily en ministre d’intérieur de la RFA on se doutait qu’il y a un lien bizarre entre anrhroposophes, fascistes et l’impérialisme états-unien. Depuis le triomphe de l’idéologie « objectiviste » d’Ayn Rand, une sorte d’anti-humanisme plus radical que l’anti-semitisme éliminatoire nazi, au sein de l’élite de la silicon valley on voit un peu plus clair.

    Toujours est-il un mystère que cache l’auteur pacifiste et anti-raciste de sombre et avide de sang dans son oeuvre. Il doit bien y avoir in élément dans son idéologie qui encourage sa récupération par les fratelli d’Italia.

    A Rome, Elon Musk se fait le porte-voix de l’extrême droite

    Le milliardaire était l’invité d’honneur de la fête annuelle du parti de la Première ministre italienne Giorgia Meloni. L’occasion de mettre en garde contre la crise de la dénatalité ou le wokisme. Et de se faire une nouvelle fois le porte-voix des idées portées par l’extrême droite.

    C’était l’invité star de l’événement. Samedi 16 décembre, le milliardaire Elon Musk est monté sur la scène du festival « Atreju », la fête annuelle à Rome des jeunes militants de Fratelli d’Italia, le parti de la Première ministre italienne Giorgia Meloni. Un an après la montée au pouvoir de la leader d’extrême droite, l’événement était particulièrement attendu. Et le parti s’est payé un invité de marque.

    Pendant quatre jours, cette grande kermesse – qui emprunte son nom au héros du roman fantastique « L’histoire sans fin » – réunit des personnalités politiques, des sportifs et des journalistes. Cette année, le Premier ministre conservateur britannique Rishi Sunak et le leader de Vox, l’extrême droite espagnole, Santiago Abascal étaient aussi sur la liste des invités.

    Pourquoi c’est important ? Dans le monde de la droite conservatrice radicale, Elon Musk est un personnage « prestigieux », observe Fabio Chiusi, journaliste et auteur de « L’uomo che vuole risolvere il futuro », un ouvrage dans lequel il livre une analyse de la pensée du patron de Tesla et SpaceX.

    Il partage avec l’extrême droite « l’idée d’une liberté d’expression [absolue], la bataille contre la crise démographique et contre le wokisme », continue le journaliste. Créé à partir du mot anglais woke (éveillé), ce terme a été galvaudé depuis quelques années par des courants de droite conservatrice pour décrédibiliser les militants de gauche.

    Et peu importe si le patron de Tesla et SpaceX prospère avec les voitures électriques détestées par Matteo Salvini, chef de la Lega, ou s’il est en faveur de la gestation pour autrui que Giorgia Meloni tient en horreur. L’extrême droite évite les sujets qui fâchent. Et pour le reste, elle « peut dire que ses idées sont partagées par celui qui change le monde », commente Fabio Chiusi.

    La survie de l’humanité. C’est qu’Elon Musk en est convaincu : le politiquement correct, la dénatalité ou encore un certain usage de l’intelligence artificielle mettent en péril le futur de l’humanité. Et la vision politique incarnée par les partis conservateurs, comme Fratelli d’Italia, peut en assurer la survie.

    Samedi, c’est donc avec l’un de ses onze enfants dans les bras qu’il s’est présenté devant le public italien. « Faire des enfants permet de créer une nouvelle génération. Et il n’y en aura pas si les gens ne font pas d’enfants », a-t-il déclaré depuis la scène du Château Saint-Ange, à Rome, provoquant une vague d’applaudissements. En 2022, l’Italie a atteint un record historique en descendant sous la barre des 400’000 naissances. Un an après son arrivée au pouvoir, Giorgia Meloni assurait avoir fait de la dénatalité une « priorité absolue ».

    Et à l’instar de la Première ministre italienne, Elon Musk estime que l’immigration n’est pas une solution à la crise démographique. « Il faut faire plus d’Italiens pour sauver la culture d’Italie », a-t-il insisté.

    Ensuite, le milliardaire a mis en garde contre le « virus de l’esprit woke » qui, selon lui, s’empare des États-Unis et bientôt de l’Italie. Avant de ravir son audience en affirmant que « le changement climatique ne constitue pas une menace si grave à court terme ». Et s’il a assuré être « écologiste », il estime qu’il n’est pas possible de « se passer du pétrole et des énergies fossiles dans un avenir immédiat ».

    Un porte-voix des droites conservatrices et radicales. Ce n’est pas la première fois qu’Elon Musk s’affiche aux côtés de responsables politiques de droite conservatrice. En juin, il avait d’ailleurs déjà rencontré la Première ministre italienne, mais aucun détail n’avait filtré de leur entretien.

    Début novembre, il avait été interviewé par le Premier ministre britannique en personne, sur la réglementation, les risques et les opportunités de l’IA, à l’occasion d’un grand sommet sur le sujet. Un entretien que la presse britannique avait qualifié de « gênant ». Considéré par beaucoup comme un « gourou », Elon Musk est traité comme « un chef d’Etat » sauf que le milliardaire ne sert que ses intérêts, observe Fabio Chiusi. Contrairement aux politiques, « la Constitution ne l’oblige pas à servir les intérêts de la collectivité », continue-t-il.

    Outre-Atlantique, Elon Musk a également exprimé son soutien au nouveau président argentin Javier Milei. « La prospérité est sur le point d’arriver en Argentine », a-t-il écrit après sa victoire le 19 novembre.

    Enfin, c’est lui qui a permis à Donald Trump de faire son grand retour sur le réseau X (ex-Twitter), dont il avait été banni juste après les violents affrontements du Capitole, en janvier 2021. Selon Le Monde, « Elon Musk a dérivé vers une haine des démocrates et des progressistes et se trouve désormais aux confins de l’extrême droite complotiste et antisémite ».

    Parfois il suffit de consulter d’autres versions de Wikipedia pour obtenir des indices.
    https://de.m.wikipedia.org/wiki/Die_unendliche_Geschichte

    Andreas von Prondczynsky sah Die unendliche Geschichte als „im Netz bürgerlicher Moral und ökonomischer Zweckrationalität“ befangene Mischung von „christologischem Mystizismus“ und „Sozialkritik in der Orientierung romantischer Denkweise“. Ende übe Kritik am Vernunft-Mythos, wie er sowohl der technologischen Rationalität als auch einer ökonomisierten Subjektivität zugrunde liege. Im Widerspruch dazu verfolge er jedoch in diffusen „Mysterien der Alten“ vernunftorientierte bürgerliche Tugenden.

    Hermann Bausinger deutete die beiden Bücher Michael Endes, „Die unendliche Geschichte“ und „Momo“, als Eskapismus, der von narzisstischen, an der Zukunft zweifelnden Jugendlichen begierig aufgenommen wird und ihnen zur Flucht in die Unverbindlichkeit verhilft. Die präzise Trennung von Gut und Böse in Endes Phantastik ließe eine geschlossene Welt entstehen, in der nichts sinnlos, alles von Bedeutung erscheine und fern realistischer Konflikte zu folgenloser Identifikation einlade. Er sprach in Zusammenhang mit Endes Werken von „Placebo-Effekten“. Die Leser sähen in Endes Erzählungen ihr Bedürfnis nach positiven Weltentwürfen befriedigt, so dass sie ihnen Wirkungen zuschrieben, deren Muster im Text gar nicht angelegt seien.

    Von ihm und anderen Kritikern wurde Die unendliche Geschichte als Aufforderung zur Weltflucht angesehen. Dem widerspricht Růžena Sedlářová. Das Buch mache deutlich, dass der Autor nicht die Phantasie der realen Welt überordnen, sondern beide in Einklang bringen wolle, etwa indem Koreander zu Bastian in Kapitel XXVI. sagt: „Es gibt Menschen, die können nie nach Phantásien kommen […] und es gibt Menschen, die können es, aber sie bleiben für immer dort. Und dann gibt es noch einige, die gehen nach Phantásien und kehren wieder zurück. So wie du. Und die machen beide Welten gesund.“ Hier sehe man die Lehre von der Harmonie der Gefühle und der Vernunft, oder der Phantasie und der Realität, oder des Unbewussten und Bewussten. Ohne Kenntnis beider Ebenen sei es nicht möglich, zur Ganzheit zu gelangen. Bastian hätte so in dieser Geschichte seine Schattenseiten kennenlernen und sie auch überwinden und dadurch ein besserer Mensch werden können.

    Andere Literaturkritiker warfen Ende die scheinbare Naivität seiner Botschaft vor. In seinem Roman Momo etwa fände man eine ärgerliche „Romantisierung der Armut“. Darüber hinaus mündeten alle kritischen Befunde Endes in der Empfehlung, mit Selbstfindung, Selbsterkenntnis und Selbstveränderung als vorbildlichen Lebensmustern die Schäden der Zivilisation zu beheben.

    Ces citations fournissent quelques informations sur le mécanisme qui relie le monde imaginaire d’inspiration anthoposophique de Michael Ende aux besoins d’une organisation de jeunesse neofasciste. Tout le monde aime bien s’enfuir dans des psysages fantaisistes et c’est là ou les joueurs de flute fachos récupèrent les jeune âmes sans défense. Les lacunes intellectuelles de Ende induit par son penxhant pour le Steinerisme en font apparamment un outil propice. Le choix des neoconnard italien est dans doute tombé sur Ende plutôt que sur Tolkien à cause de la proximité historique et culturelle de l’Italie et de l’Allemagne. Harry Potter aurait pu faire l’affaire mais les coùts de la licence nécessare et les choix politique de son auteure ont protégé l"apprenti sorcier de cette mésalliance.

    Et non, Ende et ses romans ne sont pas fascistes, seulement un peu kitsch :-)

    #USA #Italie #anthoposophie #fascisme #silicon_valley #objectivisme

    • Je n’associe pas l’œuvre de Michael Ende au fascisme.

      C’est par Périphéries que j’ai découvert son roman Momo :

      À la recherche des heures célestes
      https://www.peripheries.net/article320.html

      Il faut croire que Michael Ende, plus ou moins consciemment, partageait la foi de Thierry Fabre dans l’héritage méditerranéen : sa Momo est une petite fille solitaire qui a élu domicile sous les ruines d’un amphithéâtre romain à l’abandon, en périphérie d’une grande ville du Sud. Pauvre et sans instruction, elle dispose pourtant d’un trésor inestimable : elle a du temps à profusion. Du jour où ils font sa connaissance, les habitants de la ville s’attachent profondément à elle. Ils viennent la voir pour lui parler, et, même si elle ne dit rien, elle écoute avec une telle intensité qu’ils voient leurs problèmes résolus. Les enfants adorent se retrouver à l’amphithéâtre pour jouer, car ils ne jouent jamais aussi bien que quand elle est avec eux. C’est que le don d’écoute de Momo va de pair avec une imagination puissante, qui n’est pas sans lien avec sa capacité à écouter l’univers entier :

      « Certains soirs, après le départ de tous ses amis, elle restait assise, longtemps encore, seule au milieu de son vieil amphithéâtre au-dessus duquel, telle une coupole, s’étendait le ciel étoilé : elle écoutait le grand silence. Elle avait alors l’impression d’être assise au milieu d’une immense oreille cherchant à capter les bruits dans le monde des étoiles. C’était comme si elle écoutait une musique très douce et très puissante à la fois qui lui allait mystérieusement droit au cœur. »

      Autrement dit, Momo possède comme personne le secret de cette « musicalité de l’être » dont parle aussi Thierry Fabre. Mais un jour, d’étranges « hommes en gris » commencent à hanter les rues de la ville. Peu à peu, ils persuadent les habitants que leurs occupations quotidiennes - bavarder avec les clients quand ils sont coiffeurs ou restaurateurs, chanter dans une chorale, s’occuper de leur vieille mère, rendre visite à une amante secrète, jouer, dormir, rêvasser en regardant par la fenêtre... - représentent des « pertes de temps ». Ils leur proposent d’ouvrir un compte dans leur « caisse d’épargne du temps ». Dès lors, Momo ne reconnaît plus ses amis : ils désertent l’amphithéâtre, passent leur vie à courir sans savoir derrière quoi, n’ont plus de temps à se consacrer les uns aux autres. L’obsession de la rentabilité et de la réussite matérielle, le repli sur soi, l’acrimonie, dominent les relations sociales.

    • Justement, c’est complètement kitsch , on aime ou on n’aime pas.


      Je préfère La Cité des dragons qui est davantage terre à terre malgré l’histoire de la transformation de la mechante institutrice dragon en dragon blanc de la sagesse.
      C’est aussi kitsch mais moins ésothérique, et c’est plein d’ironie et d’éléments de parodie.
      Enfin, l’héroïne pricipale est un petite locomotive à vapeur. C’est imbattable.
      Puis dans le deuxième volume il y a une parodie des fascistes, les 13 corsaires voleurs d’enfants qui sont tellement bêtes qu’ils ne comprennent pas qu’ils ne sont que 12. Dans ces histoires simples l’auteur se passe de prèsque tout élément surnaturel et ésothérique, au contraire même les dragons sont comme tout le monde. Seulement les forces de la nature sont folles, un peu comme dans la physique quantique.

  • Adrian Daub, La Pensée selon la tech. Le paysage intellectuel de la Silicon Valley
    https://journals.openedition.org/questionsdecommunication/32235

    https://cfeditions.com/pensee-tech

    La Pensée selon la tech est un livre passionnant pour qui s’intéresse aux influences intellectuelles et philosophiques des gourous de la tech américaine et aux stratagèmes des entreprises du secteur de la Silicon Valley. Il montre par quels procédés communicationnels la Silicon Valley transforme à son avantage une réalité souvent peu brillante. Elle n’invente pas nécessairement les idées mais les absorbe de manière très superficielle pour servir ses intérêts. Des lieux communs teintés d’académisme s’enracinent dans des traditions américaines anciennes et le tissu local. Leur banalité facilite leur recyclage, tandis que la passivité dispense de toute discussion. Entrepreneurs, bailleurs de fonds, leaders d’opinion, journalistes continuent à exporter les théories et le style de la Silicon Valley, grâce aux enseignements de la contre-culture des années 1960.

    Observateur clairvoyant, A. Daub livre un témoignage vivant issu de son vécu professoral dans le campus de Stanford. Des anecdotes servent d’accroches à des propos plus généraux tout en les illustrant. Le lecteur est fréquemment pris à partie. L’essai tire sa dynamique de ces effets de style et de sa liberté de ton. Il est loin d’être neutre : l’auteur livre un regard sans concession sur des pratiques qui ont droit de cité mais qui sont tout sauf égalitaires. On devine une certaine indignation sous la dénonciation de la casse sociale qui touche les femmes et tout un pan invisibilisé de travailleurs démunis. C’est pourquoi A. Daub montre la voie vers une pensée critique sur cette partie du monde que beaucoup de pays envient et cherchent à copier sans prendre garde à ses spécificités et ses côtés sombres. Son livre sonne comme un avertissement à ne pas reproduire le modèle tel quel. Il pousse à faire évoluer la représentation que l’on s’en fait et la vision des professionnels du secteur.

    #Adrian_Daub #Silicon_Valley

  • The Last Town - une ville contre la Silicon Valley (1/3) - Une ville assiégée - Regarder le documentaire complet | ARTE
    https://www.arte.tv/fr/videos/105698-001-A/the-last-town-une-ville-contre-la-silicon-valley-1-3

    Antonio, Laura, Ofelia, JT… Les habitants d’East Palo Alto sont les héritiers d’une longue tradition militante. Ils font front commun face aux géants du numérique et aux promoteurs immobiliers qui entendent redévelopper toute une partie de la ville et menacent d’expulsion les habitants les plus modestes. Peuvent-ils résister et faire entendre leur voix ?

  • Who Is BasedBeffJezos, The Leader Of The Tech Elite’s ‘E/Acc’ Movement?
    https://www.forbes.com/sites/emilybaker-white/2023/12/01/who-is-basedbeffjezos-the-leader-of-effective-accelerationism-eacc/?sh=80470f87a13f

    ndreessen Horowitz cofounder Marc Andreessen says @BasedBeffJezos is a “patron saint of techno-optimism.” Garry Tan, who cofounded the venture firm Initialized Capital before becoming CEO of Y Combinator, calls him “brother.” Sam Altman, who founded OpenAI — the company that finally mainstreamed artificial intelligence — has jokingly sparred with him on Twitter. Elon Musk says his memes are “🔥🔥🔥.”

    Andreessen, Tan, and several dozen other Silicon Valley luminaries have also begun aligning with a movement that “Jezos” claims to have founded: “effective accelerationism,” or e/acc. At its core, e/acc argues that technology companies should innovate faster, with less opposition from “decels” or “decelerationists” — folks like AI safety advocates and regulators who want to slow the growth of technology.

    At first blush, e/acc sounds a lot like Facebook’s old motto: “move fast and break things.” But Jezos also embraces more extreme ideas, borrowing concepts from “accelerationism,” which argues we should hasten the growth of technology and capitalism at the expense of nearly anything else. On X, the platform formally known as Twitter where he has 50,000 followers, Jezos has claimed that “institutions have decayed beyond the point of salvaging and that the media is a “vector for cybernetic control of culture.”

    So just who is the anonymous Twitter personality whose message of unfettered, technology-crazed capitalism at all costs has captivated many of Silicon Valley’s most powerful?

    Forbes has learned that the Jezos persona is run by a former Google quantum computing engineer named Guillaume Verdon who founded a stealth AI hardware startup Extropic in 2022. Forbes first identified Verdon as Jezos by matching details that Jezos revealed about himself to publicly available facts about Verdon. A voice analysis conducted by Catalin Grigoras, Director of the National Center for Media Forensics, compared audio recordings of Jezos and talks given by Verdon and found that it was 2,954,870 times more likely that the speaker in one recording of Jezos was Verdon than that it was any other person. Forbes is revealing his identity because we believe it to be in the public interest as Jezos’s influence grows.

    In a wide-ranging interview with Forbes, Verdon confirmed that he is behind the account, and extolled the e/acc philosophy. “Our goal is really to increase the scope and scale of civilization as measured in terms of its energy production and consumption,” he said. Of the Jezos persona, he said: “If you’re going to create an ideology in the time of social media, you’ve got to engineer it to be viral.”

    At its core, effective accelerationism embraces the idea that social problems can be solved purely with advances in technology, rather than by messy human deliberation. “We’re trying to solve culture by engineering,” Verdon said. “When you’re an entrepreneur, you engineer ways to incentivize certain behaviors via gradients and reward, and you can program a civilizational system."

    He expects computers to eventually solve legal problems too: "At the end of the day, law is just natural language code for how to operate the system, and there’s no reason why technology can’t have impact there in terms of social problems.”

    Not everyone agrees that engineering is the answer to societal problems. “The world is just not like that. It just isn’t,” said Fred Turner, a professor of communications at Stanford University who has studied accelerationism. “But if you can convince people that it is, then you get a lot of the power that normally accrues to governments.”

    E/acc is also a reaction to another Silicon Valley movement: effective altruism (or EA). While it was originally focused on optimizing each person’s ability to help others (and is known for some of its most famous adherents’ willingness to engage in fraud), EA has also become a hotbed for people concerned about whether AI might become sentient and murder humans — so-called “doomers” that Jezos says “are instrumental to forces of evil and civilizational decline.”

    “We’ve got to make sure AI doesn’t end up in the hands of a single company.”
    Guillaume Verdon

    “If we only focus on the end of the world, bio weapons, [artificial general intelligence] ending us all, then … we might engender our own doom by obsessing over it and it demoralizes people and it doesn’t make them want to build,” Verdon said.

    #Accelerationisme #Jezos #Religion #Intelligence_artificielle #Silicon_Valley

  • Adrian Daub, La Pensée selon la tech. Le paysage intellectuel de la Silicon Valley | Cairn.info
    https://www.cairn.info/revue-questions-de-communication-2023-1-page-441.htm

    La Pensée selon la tech est un livre passionnant pour qui s’intéresse aux influences intellectuelles et philosophiques des gourous de la tech américaine et aux stratagèmes des entreprises du secteur de la Silicon Valley. Il montre par quels procédés communicationnels la Silicon Valley transforme à son avantage une réalité souvent peu brillante. Elle n’invente pas nécessairement les idées mais les absorbe de manière très superficielle pour servir ses intérêts. Des lieux communs teintés d’académisme s’enracinent dans des traditions américaines anciennes et le tissu local. Leur banalité facilite leur recyclage, tandis que la passivité dispense de toute discussion. Entrepreneurs, bailleurs de fonds, leaders d’opinion, journalistes continuent à exporter les théories et le style de la Silicon Valley, grâce aux enseignements de la contre-culture des années 1960.


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    Observateur clairvoyant, A. Daub livre un témoignage vivant issu de son vécu professoral dans le campus de Stanford. Des anecdotes servent d’accroches à des propos plus généraux tout en les illustrant. Le lecteur est fréquemment pris à partie. L’essai tire sa dynamique de ces effets de style et de sa liberté de ton. Il est loin d’être neutre : l’auteur livre un regard sans concession sur des pratiques qui ont droit de cité mais qui sont tout sauf égalitaires. On devine une certaine indignation sous la dénonciation de la casse sociale qui touche les femmes et tout un pan invisibilisé de travailleurs démunis. C’est pourquoi A. Daub montre la voie vers une pensée critique sur cette partie du monde que beaucoup de pays envient et cherchent à copier sans prendre garde à ses spécificités et ses côtés sombres. Son livre sonne comme un avertissement à ne pas reproduire le modèle tel quel. Il pousse à faire évoluer la représentation que l’on s’en fait et la vision des professionnels du secteur.

    #Adrian_Daub #Pensée_tech #Silicon_Valley

  • L’économie capitaliste entre ravin et précipice

    https://mensuel.lutte-ouvriere.org//2023/04/02/leconomie-capitaliste-entre-ravin-et-precipice_588676.html (Lutte de classe, 27 mars 2023)

    «  La Fed entre ravin et précipice  », titrait le 14 mars un éditorialiste du journal Les Échos, pour qualifier les incertitudes des banquiers centraux, confrontés d’un côté à l’inflation qui flambe et de l’autre aux menaces de faillites en chaîne des banques, après celle de la #Silicon_Valley_Bank (#SVB). Ceux qui prétendent réguler le système financier international seraient avec des «  lampes frontales dans le brouillard  », hésitant à choisir entre les deux seuls remèdes qu’ils connaissent  : jeter des milliards dans le système, ou fermer le robinet du crédit. Dans tous les cas, les classes populaires en paient déjà le prix fort.

    Le rôle officiel des #banques_centrales est de réguler le système financier en adaptant la masse monétaire en circulation aux besoins du #marché_capitaliste, c’est-à-dire aux volumes de production et de circulation des marchandises. En fixant les divers taux d’intérêt auxquels les banques privées peuvent se refinancer, les banques centrales encouragent ou freinent les emprunts des entreprises comme des particuliers, ce qui est supposé se répercuter sur les investissements productifs et la croissance économique. Mais ce sont les capitalistes, et d’abord les plus puissants d’entre eux, qui décident de l’usage qu’ils font des capitaux disponibles, en fonction des profits qu’ils escomptent et de l’idée qu’ils se font de l’avenir de leur propre système (...)

    De la baisse des taux à leur remontée

    SVB, #Crédit_suisse  : le spectre de 2008

    Vers une #crise de la dette publique  ?

    L’#inflation et ceux qui la déclenchent

    L’agonie du #capitalisme et les tâches des révolutionnaires

  • Chaos du capitalisme : la seule perspective est celle que les travailleurs en lutte ouvriront

    https://lutte-ouvriere.be/chaos-du-capitalisme-la-seule-perspective-est-celle-que-les-travaille
    Dernier éditorial de LO-Belgique

    Après l’effondrement aux USA de la #Silicon_Valley_Bank le 10 mars dernier, la plus grosse faillite bancaire depuis 2008, les banquiers centraux se sont empressés de déclarer que « tout était sous contrôle ». La #banque_centrale (#Fed) a ouvert un nouveau fonds de financement d’urgence et les banques lui ont emprunté au moins 164 milliards de dollars. En Europe, les banquiers centraux ont vite annoncé qu’il n’y avait pas de risque de contagion !

    Quelques jours plus tard, le #Crédit_Suisse, une des trente plus grandes #banques du monde était au bord de la faillite. La banque centrale de Suisse décida elle aussi d’ouvrir les robinets : en quelques heures plus de 50 milliards d’euros ont été mis à disposition du Crédit suisse, puis 200 milliards… avant que ne soit décidé son rachat par UBS, la plus grosse banque du pays. La banque est « sauvée », les milliards des capitalistes sont sauvés, mais pas les 10 000 employés en doublon que les banques ont prévu de licencier…

    Le 24 mars, les actions de la première banque allemande #Deutsche_Bank chutaient, ravivant la menace d’une crise financière internationale. Les dirigeants politiques ont à nouveau répété qu’ils n’avaient aucune inquiétude, pour tenter d’enrayer la panique. En réalité, ils sont bien incapables de faire la moindre prévision. Depuis des années, les krachs financiers, les crises, se succèdent, et l’économie capitaliste s’enfonce toujours plus dans le chaos. À chaque fois, les gouvernements répondent en inondant les capitalistes de liquidités, en faisant tourner la planche à billets, creusant ainsi les déficits publics. Et les capitalistes font payer aux travailleurs le prix de leur fuite en avant !

    Et plutôt deux fois qu’une. D’un côté tout cet argent emprunté gratuitement, les banques et les financiers l’utilisent pour acheter des actions en espérant les revendre plus cher, engendrant ainsi des profits faciles. Avec le déclenchement de la #guerre_en_Ukraine, les spéculateurs ont ainsi parié sur l’augmentation des #prix_du_gaz, achetant et revendant les cargaisons au point de faire exploser les prix de l’énergie puis tous les autres prix… Ils ont ainsi aggravé la pauvreté partout sur la planète, plongeant une large proportion des ménages des classes populaires dans des situations intenables où il faut choisir entre se chauffer et manger à sa faim.

    D’un autre côté, les capitalistes font pression sur leurs États pour faire payer aux travailleurs l’argent dépensé en sauvetage de banque, en subsides aux entreprises ou en armes pour la guerre en Ukraine ! Les gouvernements s’empressent alors d’imposer toutes les mesures nécessaires pour pressurer davantage les travailleurs. Tout y passe : de la crèche communale où une puéricultrice doit faire le travail de trois collègues car « il n’y a pas assez de financement » jusqu’au passage en force par Macron de l’augmentation de l’#âge_de_départ_à_la_retraite de 62 à 64 ans car « les retraites coûtent trop cher dans une population vieillissante ».

    Mais ces mensonges prennent de moins en moins, et la situation s’aggravant de plus en plus pousse inévitablement à des révoltes.

    En France, depuis le 19 janvier, il y a des #manifestations massives presque toutes les semaines, accompagnées de grèves dans quelques secteurs. Si les manifestations ont été aussi massives, c’est que la coupe est pleine. Elle l’est pour les plus âgés, cassés par le travail, et à qui on promet une pension réduite ou pour celles et ceux qui n’auront jamais de pension vu qu’un nombre important de travailleurs en France meurent avant la #retraite ! Elle l’est pour tous les ménages populaires confrontés à l’explosion des prix de l’alimentation et de l’énergie et pour celles et ceux qui voient bien que tout s’aggrave, en particulier la guerre économique qui fait craindre que les guerres actuelles se généralisent en une troisième guerre mondiale. C’est un ras-le-bol général.

    Malgré la #répression_policière, les gardes à vues et les fouilles en sous-vêtement, les mobilisations contre le recul de l’âge de la retraite continuent. Dans cette lutte qui dure depuis deux mois, le camp des travailleurs mesure ce que peut être la force du nombre. Car si certains députés de droite n’ont finalement pas voté la loi et que #Macron a dû faire recours au 49.3 (en se passant du vote des députés) c’est que la pression des grèves leur a fait penser à leur prochaine élection !

    La force du nombre peut peser sur le monde politique, mais c’est seulement si la #grève se généralise et s’étend aux grandes entreprises privées que le rapport de force s’inversera réellement et que la loi pourra être repoussée.

    #réforme_des_retriates #capitalisme #régression_sociale #lutte_de_classe #inflation #pouvoir_d'achat

  • How Many Crises Before It All Collapses?

    The Spark, #editorial, Mar 12, 2023

    On Wednesday, March 8, Silicon Valley Bank (#SVB) notified its shareholders that it would issue new shares of stock to cover a loss in the value of its investments. SVB is a very specialized local bank. Its clients inhabit Silicon Valley: IT and medical technology start-ups, and the so-called venture capital firms that advance money to them.

    On Thursday, the venture capital firms pulled out their deposits. By the end of the day, a run on deposits emptied the bank of all its cash. On Friday morning, the state of California declared the bank insolvent and shut it down. The FDIC, government insurer of bank deposits, took it over.

    #Silicon_Valley_Bank is not a typical bank. Over 90% of its clients had more than $250,000 deposited, even though the limit of FDIC insurance is set at $250,000.

    So now what? Some financial “experts” insist that government must find a way to reimburse these companies for all their losses, despite the limit. If not, they warn, the failure of SVB could end up bringing down the whole financial system.

    Other “experts” declare that this is an isolated situation. A spokesperson for Fidelity Investment blames it on risky banking practices, in which, Fidelity brags, it never engages.

    In fact, at this point, no one knows what’s going to happen. But one thing is sure: Silicon Valley Bank is not the only one with risky behavior.

    If the collapse of SVB leads to a wider #financial_collapse, it will happen for the same reason that the whole global economy nearly collapsed in 2008: the whole capitalist system is engaged in “risky behavior.” In 2008, the bankruptcy of one Wall Street trading firm, engaging in “risky behavior,” soon threatened all the biggest banks in the country.

    Since 1970, there have been crises, one after another, each one deeper and more serious than the one before: the monetary crisis and the first “oil shock” it led to; the second “oil shock,” which led to the “third world debt crisis"; the 1987 stock market crash; the collapse of the “dot.com bubble"; followed by the “sub-prime real estate” crisis. With each crisis, problems in the financial system spilled over into the productive economy, leading to unemployment and disruption—and to a worsening of the lives of laboring people around the world, including here.

    Each of these crises was alleviated by a government bailout. Government printing presses threw more money into the financial system to bail it out, but governments went into more debt to do so. And each bailout created a greater overhang of money circulating in the system, leading to more #speculation, which erupted into the next crisis.

    In fact, #capitalism does not use the money it already has on hand to invest in production unless it can make more profit there than elsewhere. This new money thrown into the financial system found its outlet in greater financial speculation, driving up prices in the stock markets of the world and on real estate... or on eggs and used cars!

    The financial system is a great big casino, where all the chips are paid for with government debt, which absorbs more and more of the value produced in the productive economy. Government, burdened down by more and more debt, cuts back on society’s collective needs. Schools degrade, as do roads, bridges, tunnels, railroad right-of-ways, dams, levees, and so on.

    Yes, there is a risk the whole financial system could suddenly collapse. That risk exists because crisis is endemic to the capitalist system, and it has been since the beginning. In 1920, in the midst of another crisis, #Leon_Trotsky, the Russian revolutionary, described the situation in this way: “So long as capitalism is not overthrown by the proletarian revolution, it will continue to live in cycles, swinging up and down. Crises and booms were inherent in capitalism at its very birth; they will accompany it to its grave.” The answer to capitalism’s crises remains, as it did in Trotsky’s day, with the working class, the only force that has the capacity to overthrow capitalism, and replace it with a society beneficial for the whole population.

  • « La Silicon Valley est le microcosme des excès du capitalisme »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/03/13/la-silicon-valley-est-le-microcosme-des-exces-du-capitalisme_6165325_3232.ht

    La faillite de la Silicon Valley Bank est loin d’émouvoir l’opinion publique américaine, tant la vallée californienne est vécue, avec ses puissantes entreprises de tech et ses milliardaires, comme un laboratoire de la reproduction des inégalités, raconte Corine Lesnes, correspondante du « Monde » à San Francisco, dans sa chronique.

    91 000 habitants ont quitté la Silicon Valley

    A l’opposé, 220 000 foyers ne possèdent pas plus de 5 000 dollars en portefeuille. Près d’un quart (23 %) des résidents vit sous le seuil fédéral de pauvreté, une augmentation de trois points par rapport à 2019. Et 22 000 personnes n’ont pas de compte en banque. Vu le coût du logement, le rapport juge « impossible » pour quiconque ne gagne pas au moins sept fois le seuil de pauvreté d’assurer ses besoins quotidiens sans s’endetter. Ainsi, 91 000 habitants ont quitté la Silicon Valley ces deux dernières années. « Nous avons l’écart le plus grand du pays, regrette Russell Hancock, le président de Joint Venture Silicon Valley. Le capitalisme a certains attributs grotesques. L’un d’entre eux est qu’il crée ces fossés. »

    Le livre de "photosociologie" de Mary beth Meehan, au travers des récits de vie de celles et ceux qui vivent là bas est une autre manière de comprendre ce qui se joue actuellement, et entre en résonnance avec cet article.

    #Silicon_valley #Inégalités #Mary_Beth_Meehan

  • Review of “Palo Alto” by Malcolm Harris - The Washington Post
    https://www.washingtonpost.com/books/2023/02/09/palo-alto-malcolm-harris-review

    Here’s an enchanting myth: In Northern California lies a new Olympus, a metaphorical summit whose rarefied air sustains flip-flopped geniuses as they change the world with their brilliant, unconventional ideas. They’ve done it this way since they were LSD-dropping hippies, or maybe since they bailed out of Harvard and set up shop in their parents’ garages. This is their kingdom now, Palo Alto, with Stanford University at its core, the beating heart of Silicon Valley, a site of pilgrimage for aspiring disrupters, where the misunderstood can find room to grow.
    (Little, Brown and Company)

    Too good to be true? Malcolm Harris’s “Palo Alto: A History of California, Capitalism, and the World” cuts past the deceit, examining the histories the fable dresses up in heroic garb. Doing for Palo Alto — population 70,000 — what Mike Davis’s classic “City of Quartz” did for Los Angeles, Harris reconsiders 200 years of history that many in the town would rather forget. Over more than 600 concussive pages, Harris narrates the town’s evolution and influence throughout the 19th and 20th centuries. He theorizes, above all, that it is defined by its distinctive approach to capitalism and profit, known as the “Palo Alto System”: a rapacious, violently exploitative mode of capitalism that generations of would-be moguls have perfected. “Palo Alto” is a skeptic’s record, a vital, critical demonstration of Northern California’s two centuries of mixing technology and cruelty for money.

    Harris, born and raised in Palo Alto, home to one of the most unequal and competitive school districts in the country, understands the consequences of a town obsessed with achievement and built on destruction. Most accounts of U.S. tech culture, like Stanford professor Fred Turner’s “From Counterculture to Cyberculture” or Richard Barbrook and Andy Cameron’s landmark essay “The Californian Ideology,” follow technology’s trail to the military-industrial complex of the 1940s and ’50s and to the counterculture of the 1960s. Historians of California, for their part, have written extensively about the importance of the railroad and other technologies to the state’s brutal regimes of exploitation that catalyzed its furiously accelerated early development. Harris is interested both in the ideology of tech entrepreneurs and in the labor practices that underlie their ideas, ultimately rooting the dynamics that built Silicon Valley in practices old as the United States itself.

    A Montana cowboy, troubled by the violence that ’won’ the West

    In the 1830s, the region’s Anglophone settlers rebelled and declared themselves part of the United States instead of Mexico. Subsequently, the region’s Indigenous populations — named the Ohlone by anthropologists and settlers though there were dozens of distinct groups in the area — were nearly exterminated as the United States reneged on treaties, enslaving, displacing and slaughtering entire communities in the process. By 1850, in the throes of the Gold Rush, mass migration populated the West with Americans and spurred the Golden State’s first technological innovations. “California engineers,” experts in maximizing mining yields for the already wealthy who could afford to assemble large-scale, mechanized operations, were soon in demand the world over. Harris distills the settlers’ formula: “Anglos rule; all natives are Indians; all land and water is just gold waiting to happen.”

    As easily accessible gold ran out, those lucky (or cutthroat) enough to survive the bust mostly pivoted to other endeavors. Here, Harris spots an incipient pattern that continues to play out: Wealthy investors pile their money into “promising” endeavors after being charmed by enchanting visionaries who grow fabulously rich — almost always before the venture has succeeded (or even begun operations). The investments raise the valuation of the business and facilitate further cycles of capitalization, so that executives need not worry about generating profits or revenue, or having a workable project. Environmental destruction, resource depletion and worker exploitation ensued in 19th-century California, Harris shows, and those same consequences recur in our time.

    Criminals thought crypto was untraceable. They sure were wrong.

    Even while attending to larger patterns, “Palo Alto” studiously works through the town’s history by focusing on its most famous and influential residents. Our first star is Leland Stanford, railroad baron and university founder. Stanford got his start by managing the Sacramento location of his brother’s dry-goods business, and expanded quickly throughout the area. Through sheer persistence and wealth, he became governor of California and a senior adviser to President Abraham Lincoln, whom he persuaded to greenlight a railroad linking California with the East Coast. The venture left Stanford one of the world’s wealthiest men, though not, Harris suggests, by his own merit, especially “given the amount of financial chicanery going on” and his reputation as a “big oaf.”

    As time went on, disgruntled former employees kept protesting at Stanford’s San Francisco manor, so he bought a farm off the Santa Clara County train tracks called Mayfield Grange and renamed it Palo Alto after an imposing sequoia tree nearby. Racehorse breeding was Stanford’s passion, and he built out the facilities to host a top-level stable, with genetic optimization as his priority. Harris suggests that “the Palo Alto Stock Farm was really in the business of intellectual property,” like a Google or Apple of equine genetics. Stanford even hired photographer “Helios” (Eadweard Muybridge), whose groundbreaking visual experiments served as promotional materials affirming Stanford’s place on the cutting edge.

    Stanford’s commitment to “disruptive” logic — efficiency uber alles — lives on as Palo Alto’s guiding principle, the aforementioned “Palo Alto System.” The system matured as West Coast capitalists emancipated themselves from Eastern funds and companies that financed the early generations of entrepreneurs. To this day, entrepreneurs and investors prioritize start-ups’ capacity to scale rapidly over profits, revenue or even functionality. Harris shows that monopoly, in Palo Alto’s imagination, is the only acceptable possibility. Latter chapters of “Palo Alto” feature failures such as Pets.com, as well as familiar giants such as Amazon and Facebook, all of which relied heavily on this system. (Amazon founder Jeff Bezos owns The Washington Post.) With destructive conditions for factory workers, and payment systems that distribute stock options instead of wages to employees, highly valued start-ups often lumber on for years without profits or, sometimes, even a product.
    A general view of White Plaza at Stanford University campus in Stanford, Ca., 1988. In the background is Hoover Plaza. (AP Photo)

    Leland Stanford left his mark on the region in other ways, too. After his son, Leland Jr., died young, the former governor and his wife, Jane, founded Leland Stanford Junior University, and the institution soon became Palo Alto’s epicenter. In exploring Palo Alto’s history, Harris has an eye for scandals, often emerging out of the university itself — like the murder of Jane Stanford, in which the school’s first president, David Starr Jordan, was apparently involved — and hypocrisy, particularly around eugenics and military funding. Many of Stanford’s early luminaries, Jordan chief among them, were obsessed with eugenics, and Harris suggests that their inheritors — including Frederick Terman and William Shockley, regarded as the founders of modern-day Silicon Valley — kept up the game to varying degrees.
    Herbert Hoover signs unemployment and drought relief bills in 1930. (AP Photo)

    No alum better symbolizes Stanford, for Harris, than its first U.S. president: Herbert Hoover, “a representative of the worldwide ruling class, super-imperialism personified.” Hoover studied geology and graduated near the bottom of Stanford’s first class, but quickly became a world-renowned “California engineer” specializing in mining. Rising to the presidency, he perfected another Palo Alto trademark that Harris calls the “associative model” — “the free, voluntary association of businessmen in their common interest,” ensuring profits for the select few in the loop and freezing out everyone else. Hoover was Stanford’s perfect man, a relentless, self-made capitalist elitist who remained massively influential after the ignominious end of his presidency thanks to his membership in the San Francisco Bohemian Club, where he functioned as a “global kingmaker” until his death.
    Malcolm Harris. (Julia Burke)

    “Palo Alto” continues onward, ranging from San Francisco’s Black beat poet laureate Bob Kaufman to MK-Ultra, the Black Panthers, the Homebrew Computer Club, Sun Microsystems, Elon Musk, Amazon warehouses and beyond. Famous names give way to dark histories, including the redlining and subsequent ghettoization of East Palo Alto, but also stretching beyond the region to encompass the Iran-contra affair and more. Harris’s fervent argumentation sometimes feels repetitious or meandering, but conviction and research burn through the page and give coherence and urgency to a daunting subject. Alas, a concluding call for the restitution of Palo Alto to the descendants of its original inhabitants, the Muwekma Ohlone Tribe, feels underwhelming, partly because their struggle remains marginal throughout a book that more frequently focuses on the oppression of Latin American, Asian and Black workers and residents.

    Harris demonstrates that the charming story with which we began, in which hippies freed the world by virtue of their genius and creativity, was always a convenient deception. That narrative avoids mentioning decades of profiteering in U.S. imperial pursuits, from Vietnam to Nicaragua to Iraq; the nepotism and exploitation that built these would-be saviors’ fortunes; and, above all, the murderous displacements that created present-day Palo Alto. Though the town’s ideologues aspire to sun-soaked ascension above earthly clouds, their Olympus was always shrouded in shadows. Only by acknowledging its failings can the damage be repaired — if it’s not too late.

    Federico Perelmuter is a writer from Buenos Aires.
    Palo Alto

    A History of California, Capitalism, and the World

    By Malcolm Harris

    Little, Brown. 708 pp. $36

    #Silicon_Valley #Stanford #Palo_Alto

  • L’ « altruisme affectif », une philosophie de merde pour les plus débiles des possédants. Donc, si vous entendez parler d’« #altruisme_affectif », sortez votre révolver.

    #Sam_Bankman-Fried, accusé de fraude à l’encontre des 9 millions de clients de #FTX, se réclamait de l’altruisme effectif, un mouvement philosophique utilitariste. La chute du fondateur et son arrestation entraînent une remise en question au sein du mouvement, très apprécié des #milliardaires de la #Silicon_Valley.

    L’altruisme effectif se retrouve, bien malgré lui, sous les feux des projecteurs. Sam Bankman-Fried, le fondateur de FTX, qui se réclamait de cette philosophie, attend son procès dans la maison de ses parents à Palo Alto. Il est soupçonné d’avoir commis « l’une des plus grandes fraudes financières de l’histoire des Etats-Unis », selon les autorités.
    Avant l’effondrement de sa plateforme de cryptomonnaies, les portraits élogieux abondaient pourtant dans les médias outre-Atlantique. « Sam Bankman-Fried a amassé 22,5 milliards de dollars avant ses 30 ans en profitant du boom des cryptomonnaies - mais il n’y croit pas vraiment. Il veut juste que sa fortune subsiste assez longtemps pour tout donner », écrivait le magazine « Forbes » en 2021. « Mon objectif est d’avoir de l’impact », répétait l’entrepreneur. A l’époque, il n’avait donné qu’une fraction de sa fortune, 25 millions de dollars, soit 0,1 %. Mais il espérait donner bien davantage un jour, disait-il. Depuis sa chute, l’ex-milliardaire a laissé entendre - dans une conversation qu’il croyait privée avec une journaliste de Vox - qu’il jouait surtout un rôle pour soigner son image.
    L’implosion de FTX remet en cause les fondements de l’altruisme effectif. Ce mouvement, né à la fin des années 2000 au Royaume-Uni, s’inspire largement des travaux de Peter Singer, un philosophe australien. Mais c’est aux Etats-Unis, dans la Silicon Valley en particulier, qu’il remporte ses plus francs succès.
    L’altruisme effectif s’inspire de la théorie économique classique. Il reprend notamment la notion d’utilité, qui correspond au bien-être d’un individu, et la transpose au domaine de la philanthropie. L’altruisme effectif s’efforce de maximiser le bonheur collectif, en distribuant l’argent de la façon la plus efficace possible. Il considère que cet impact peut être mesuré précisément, en années de vie ajustées en fonction du bien-être ressenti. Parmi les solutions privilégiées par les altruistes effectifs figurent notamment des ONG qui distribuent des moustiquaires imprégnées d’insecticide dans des pays en développement. Une façon d’améliorer la qualité de vie du plus grand nombre de personnes possibles à moindre coût. Mais les altruistes effectifs se laissent parfois aller à des débats abscons : ils débattent par exemple de l’impact exact du déparasitage sur la qualité de vie. Faut-il financer le déparasitage dans les pays pauvres, ou financer des études pour mesurer sa traduction en années de vie prospère ?
    Dans un libre publié l’été dernier, « What We Owe the Future », William MacAskill expose des idées long termistes. Le livre a été partagé par #Elon_Musk sur Twitter avec pour commentaire : « Cela vaut la peine de le lire. C’est très proche de ma philosophie. » Il n’est pas le seul, parmi les milliardaires de la tech, à se passionner pour ces idées.
    « Il y a une religion dans la Silicon Valley (long termisme, altruisme effectif et autre) qui s’est persuadée que la meilleure chose à faire ’pour l’humanité’ est de mettre autant d’argent que possible dans le problème de l’AGI », l’IA générale, relève Timnit Gebru, spécialiste de l’éthique dans la tech. « C’est la religion des milliardaires, elle leur permet de se sentir vertueux. La plupart sont des hommes blancs, très privilégiés » poursuit la chercheuse, qui a quitté #Google en l’accusant de censure.
    Les altruistes effectifs consacrent des sommes folles à des projets qui ne porteront leurs fruits que dans des dizaines d’années, au mieux. Ils investissent ainsi dans l’#IA ou la recherche médicale pour réduire les chances d’extinction de l’humanité. Ce qui donne lieu à des calculs très hypothétiques. « Si des milliers de personnes pouvaient, avec une probabilité de 55 %, réduire les chances d’extinction de l’humanité de 1 %, ces efforts pourraient sauver 28 générations. Si chacune de ces générations contient chacune 10 milliards de personnes, cela représente 280 milliards de personnes qui pourraient vivre des vies florissantes », écrit l’association 80.000 Heures sur son site.
    Sam Bankman-Fried, étudiant, était convaincu par l’altruisme effectif. Végan, il envisage d’abord de consacrer sa vie au bien-être animal, mais une rencontre avec #William_MacAskill le persuade d’aller dans la finance. Il commence comme #trader à Wall Street, avant de créer Alameda Research, qui tire profit des différences de prix entre le bitcoin en Asie et en Amérique.
    Frustré par les inefficacités sur les marchés des cryptos, il fonde FTX en 2019, toujours obsédé par l’impact. « Pour moi, ce que signifie [l’altruisme effectif], c’est gagner le maximum d’argent pour donner le maximum à des organismes charitables parmi les plus efficaces au monde », déclare-t-il à CNBC en septembre 2022. Depuis la faillit, William MacAskill a pris ses distances : « S’il a fait un mauvais usage des fonds de ses clients, Sam n’a pas écouté attentivement. » La fondation 80.000 Heures, qui prenait en exemple la carrière de Sam Bankman-Fried, écrit : « Nous sommes ébranlés [...], nous ne savons que dire ni penser. » Au-delà du manque à gagner pour les organisations liées à l’altruisme effectif, la chute de FTX risque de remettre le mouvement en question. Il était temps, disent les détracteurs de cette #philosophie un peu trop sûre d’elle-même.

    (Les Échos)
    #fraude_financière #intelligence_artificielle #cryptomonnaie

  • « Le travail a remplacé la religion dans la Silicon Valley » - Numerama
    https://www.numerama.com/tech/1222956-le-travail-a-remplace-la-religion-dans-la-silicon-valley.html

    Si l’heure est à la grande démission dans beaucoup de secteurs professionnels aux États-Unis, les grandes firmes américaines de la Tech semblent en partie épargnées par ce mouvement. Mais comment expliquer l’attachement des travailleurs qualifiés à leurs entreprises dans la Silicon Valley ? Une sociologue américaine, Carolyn Chen, apporte une réponse : selon elle, le travail est devenu une religion pour les salariés des grandes firmes de la vallée.
    « Techtopie », c’est le terme que Carolyn Chen a imaginé pour qualifier le mode d’organisation qui semble prévaloir dans la baie de San Francisco, lieu de résidence des plus grandes firmes technologiques du monde telles qu’Apple, Facebook ou Google. La « Techtopie », est une société dans laquelle les travailleuses et travailleurs qualifiés se dévouent entièrement à leurs professions et à leurs entreprises, encouragés par leurs responsables, désormais prêts à prendre en charge leur bien-être spirituel pour accroître leur productivité. 

    Carolyn Chen est sociologue des religions, professeure à l’Université de Berkeley en Californie. Elle publie en 2022 un essai intitulé Work Pray Code : When Work Becomes Religion in Silicon Valley (Priceton University Press, 2022).

    #économie_de_la_connaissance #travail #religion #silicon_valley #management #culture_d'entreprise

  • Comprendre les origines de la pensée tech : Plongée dans l’idéologie de la Silicon Valley avec Adrian Daub | Philonomist.
    https://www.philonomist.com/fr/entretien/comprendre-les-origines-de-la-pensee-tech
    https://www.philonomist.com/sites/default/files/styles/opengraph_preview/public/2022-12/Apple+Silicon%20Valley.jpg

    Dans la Silicon Valley, on cultive, outre les start-up à succès, une certaine forme d’idéologie qui revisite à sa sauce l’œuvre de nombreux intellectuels, de Schumpeter à René Girard. Plongée au cœur de la pensée des acteurs de la tech californienne en compagnie d’Adrian Daub, enseignant à Stanford, auteur de La Pensée selon la tech (C&F éditions, 2022).

    Propos recueillis par Nils Markwardt.

     

    Dans ses premiers temps, la Silicon Valley était fortement marquée par la contre-culture. Comment s’est installée cette étrange liaison entre le mouvement hippie et l’industrie de la tech ?

    Adrian Daub : Cette liaison forte entre les deux a, d’un côté, des raisons régionales en Californie du Nord, mais elle est aussi marquée par une culture d’entreprise spécifique. On trouve dans la Silicon Valley de nombreuses entreprises qui puisent largement dans cette éthique anti-autoritaire et anti-élitaire des années soixante, qui tenta de recréer la Corporate America selon les règles de la commune hippie. Et la plupart des entreprises s’en nourrissent encore aujourd’hui. Par exemple en soulignant l’élément horizontal, coloré et anticonformiste.

    Cela dit, l’héritage de la contre-culture n’apparaît pas seulement dans le style de ces entreprises. En contraste avec les soixante-huitards en Allemagne, la contre-culture californienne a eu pour spécificité de fonder un nombre étonnant d’entreprises et d’avoir fait du commerce. Ce qui tenait au fait que l’économie était considérée comme un contrepoids potentiel à un État américain à l’époque surpuissant, ainsi qu’au complexe militaro-industriel. Quand on dit, donc, que le libéralisme radical qu’on rencontre dans la Silicon Valley est un ajout tardif à l’héritage hippie proprement dit, ce n’est pas vrai. Le libéralisme radical était déjà inscrit dans les communes hippies, dès lors qu’on attribuait un plus grand potentiel progressiste à l’entreprise qu’à l’État.

     

    “McLuhan a tourné au positif la supposition que les nouveaux médias allaient totalement transformer la vie des gens”

     

    Vous décrivez dans votre livre toute une série de penseuses et de penseurs qui – souvent aussi par des chemins sinueux – ont exercé une influence sur la Silicon Valley. Vous commencez par le spécialiste canadien des médias et de la littérature Marshall McLuhan (1911-1980), qui a forgé la célèbre formule « The medium is the message ». Comment ses théories se sont-elles développées pour devenir une sorte de rayonnement d’arrière-plan de l’industrie tech ?

    À l’instar d’Ayn Rand ou de Hermann Hesse, McLuhan fait partie de ces penseuses et penseurs qui ont été absorbés par la contre-culture californienne et ont ensuite souvent été interprétés d’une manière un peu différente de l’image qu’ils avaient d’eux-mêmes. Dans le cas de McLuhan, deux raisons expliquent pourquoi il est devenu important pour la branche de la tech. D’une part, parce qu’il a ôté aux hommes la peur des nouveaux médias en masquant l’élément conservateur de la critique culturelle. Ou plus exactement : il a tourné au positif la supposition, relevant du pessimisme culturel, que les nouveaux médias allaient totalement transformer la vie des gens. Alors que les hippies avaient vainement tenté, pendant une dizaine d’années, de créer des contenus pour bâtir une meilleure société, le message que leur adressait McLuhan leur paraissait tout à fait séduisant. Car celui-ci porte en lui la promesse suivante : au lieu de se contenter de ne fournir aux hommes que des contenus auxquels ils ne réagissent pas, on pourrait changer la polarité des gens pour l’orienter vers le média lui-même. Que les hommes soient retournés par les médias n’a donc, dans cette lecture, rien de mauvais. Au contraire.

    La deuxième raison : si l’on veut réellement comprendre ce qui se passe, il faut, selon McLuhan, se détourner du contenu et aller vers la forme – ou, justement, vers la plateforme. Chez McLuhan lui-même, ce fut dans un premier temps plutôt une intervention méthodologique. Il a souligné le fait que les spécialistes des médias comme lui ne devraient pas se concentrer autant sur les contenus, mais plutôt analyser comment sont transmis ces contenus, quels messages véhicule le média lui-même. Pourtant, cela aussi avait déjà chez McLuhan une composante légèrement morale. Selon le principe : celui qui regarde trop les contenus est naïf. Or, cela a des conséquences très concrètes dans la Silicon Valley. Seul est considéré comme du travail ce qui crée des plateformes et des médias. Les contenus, en revanche, sont là pour tous ceux qui ne sont pas assez géniaux pour écrire des codes. C’est-à-dire par exemple les « consommateurs » qui approvisionnent gratuitement Yelp en évaluations sur les restaurants, ou Facebook en posts.

     

    Un autre penseur sur lequel vous travaillez est René Girard (1923-2015), anthropologue français de la culture et ancien professeur à Stanford. Il s’est surtout fait connaître avec sa « théorie mimétique », selon laquelle tous nos souhaits sont, dans une certaine mesure, des copies : nous voulons toujours avoir ce qu’ont les autres. Il va de soi que c’est intéressant, par exemple, pour les fondateurs des réseaux sociaux. Vous décrivez tout de même le fait que l’influence de Girard repose aussi sur la nature de sa pensée. Pourquoi ?

    Ce qui est important, chez Girard, c’est le niveau formel, et avant tout l’élément contre-intuitif. Car sa théorie ne signifie pas que la majorité du désir humain est d’ordre mimétique – ça n’aurait en soi rien qui puisse susciter la controverse –, mais plutôt que cela concerne chaque désir, c’est-à-dire que tous nos souhaits sont des souhaits copiés. Or c’est justement ce caractère absolu, que beaucoup de personnes commenceraient par rejeter parce qu’ils considèrent que certains de leurs souhaits sont authentiques, qu’on considère comme une force dans la Valley. De cette manière, la théorie de Girard devient une forme de contre-savoir et de doctrine secrète, et Girard lui-même une sorte de prophète de la radicalité gratuite.

     

    Dans quelle mesure ?

    Si l’on en croit Girard, le monde est constitué d’une tout autre manière que nous le percevons en général. Et il est surtout beaucoup moins intéressant. Car avec l’idée du désir mimétique, le monde paraît tout à coup beaucoup plus homogène. Ce qui est amusant, naturellement, c’est que l’unique lieu auquel s’applique effectivement la théorie de Girard – où, donc, tous veulent la même chose –, serait une start-up de diplômés de Stanford, de jeunes gens qui sont issus du même segment très spécifique du système éducatif et d’une région spécifique. Mais ces mêmes personnes peuvent paradoxalement s’expliquer, avec l’œuvre de Girard, que l’humanité est en réalité comme eux, ce qui leur permet de dire à l’humanité ce dont elle a réellement besoin. Si l’on demandait à ces diplômés de Stanford combien d’autres personnes ils connaissent réellement, ils pourraient répondre qu’ils n’ont aucun besoin de les connaître, puisqu’ils ont leur Girard. Cette radicalité, et cette universalité en réalité intenable de la théorie de Girard, permet de tirer, à partir du cercle formé par un petit groupe homogène, des conclusions concernant la grande masse.

     

    “Tout ce qui existe mérite à présent d’être ‘disrupté’”

     

    L’une des notions centrales de la Silicon Valley est la disruption. Sur le plan de l’histoire des idées, cela remonte au concept de la « destruction créatrice », qui a été forgé par l’économiste Joseph Schumpeter (1883-1950). Si ce n’est que Schumpeter partait de l’idée que la « destruction créatrice » menait au bout du compte au socialisme, dès lors que la disruption permanente provoquait chez les hommes un besoin croissant de régulation économique. Aujourd’hui, toutefois, la disruption n’est pas un argument contre, mais pour le capitalisme. Comment en est-on arrivé là ?

    S’il s’agit de savoir quelles conséquences a le capitalisme, Marx et Engels pensaient qu’il déboucherait sur la révolution. Schumpeter croyait au contraire que le capitalisme serait de plus en plus encerclé par des réformes et déboucherait ainsi peu à peu sur le socialisme. Il ne portait même pas un regard particulièrement positif sur ce phénomène, mais à son époque, dans les années 1940, il partait justement du principe qu’on ne pourrait pas l’empêcher. Ensuite, dans les années 1980, le concept de « destruction créatrice » a été peu à peu tourné dans le sens positif et s’est élevé plus tard, dans l’industrie de la tech, au rang de véritable théodicée de l’hypercapitalisme [une théodicée est un récit permettant d’expliquer la contradiction apparente entre la bonté et la toute-puissance de Dieu d’une part, et l’existence du mal de l’autre, ndlr]. Tout ce qui existe mérite à présent d’être « disrupté ».

    Ce cas montre aussi, cependant, que ce que la Valley appelle penser ne vient pas seulement des entreprises. Car il est certes vrai que si une entreprise comme Uber maintient à un niveau élevé le culte de la disruption, c’est que ce dernier lui sert à légitimer son modèle économique. Mais il est tout aussi vrai que de telles entreprises ne pourraient pas le faire sans soutiens dans les médias, la politique et les universités, qui prolongent ce culte de la disruption. Combien de fois avons-nous dû par exemple entendre, ces quatre dernières années, que Donald Trump ne détruisait pas seulement les normes, mais qu’il était un disruptive president, ce qui présentait aussi des avantages ? Le modèle de la disruption a été transposé à tous les domaines possibles de la société, on en a fait une variante spéciale de la gouvernementalité néolibérale, variante qui permettait de tout expliquer et de tout remettre en ordre – qu’il s’agisse des sociétés de taxi ou des universités.

     

    Une métamorphose douteuse analogue a été infligée, dans la Silicon Valley, à la fameuse phrase de Samuel Beckett « Déjà essayé. Déjà échoué. […] Échoue mieux. » Dans sa nouvelle Cap au pire, publiée en 1983, l’écrivain avait formulé cette phrase pour exprimer l’idée mélancolique que l’échec est une partie intégrante de la vie, au terme de laquelle attend toujours la mort inéluctable. Dans la lecture qu’on en fait en Californie du Nord, cette sentence est au contraire devenue un impératif d’auto-optimisation.

    Tout à fait. Ici, on met l’accent sur le « mieux ». Mais ça n’a pas toujours été le cas. Après l’éclatement de la première bulle internet [bulle spéculative liée aux secteurs de l’informatique et des télécommunications à la fin des années 1990, ndlr], beaucoup de personnes dans la Valley se sont consciemment demandé ce qui leur était arrivé et quelles leçons ils pouvaient en tirer – même s’il ne devait pas y avoir de prochaine fois. Cela a changé à partir de la crise financière de 2008. Après cette date, on a en quelque sorte universalisé l’échec. Et ce, dans une situation dans laquelle rien ne pouvait en réalité échouer dans la Silicon Valley. Alors que tout s’effondrait autour de la Valley, à commencer par les banques et les compagnies d’assurances, là-bas, les choses continuaient leur ascension.

     

    “Dans la Valley, la possibilité d’échouer et manière dont on le fait dépendent fortement de qui l’on est déjà”

     

    Le culte de l’échec ne fonctionnait plus à présent que rétrospectivement. Les gens qui réussissaient racontaient qu’eux aussi avaient un jour subi un atterrissage en catastrophe. Des gens, donc, venus dans la Valley en provenance de Stanford ou de Harvard, avaient un jour eux grillé un million, en avaient reçu un autre et étaient ensuite devenus d’une richesse incroyable. C’est bien entendu un affront pour tous ceux pour qui l’échec signifie tout autre chose. Que l’on puisse échouer, et comment, dépend fortement, dans la Valley, de qui l’on est déjà. L’échec n’est rien de définitif, mais constitue uniquement un point intéressant sur notre CV.

    Je cite dans le livre l’exemple de Theranos, une start-up du secteur de la biotech qui s’est retrouvée en 2019 impliquée dans un scandale d’escroquerie. Dans sa centrale de Palo Alto se trouvait une citation du basketteur Michael Jordan dans laquelle celui-ci disait qu’il avait fait plus de 9 000 mauvais lancers dans sa carrière, perdu plus de 200 matchs et raté 26 fois le dernier jet, c’est-à-dire qu’il n’avait pas cessé d’échouer, mais que c’était la seule raison pour laquelle il y était arrivé. C’est exemplaire. Car les gens pour lesquels l’échec est intéressant ne sont jamais que des personnes comme Jordan, J. K. Rowling ou Mark Zuckerberg. Et ce, parce que cela apparaît comme le prélude d’un succès inconcevable.

     

    Vous écrivez pourtant aussi dans le livre qu’au moins, Mark Zuckerberg admet en termes résolus à quel point il a été privilégié de ce point de vue.

    Oui, cela m’a effectivement surpris de manière très positive. Dans le discours qu’il a tenu devant des diplômés d’Harvard, il a reconnu en 2017 que Facebook avait certes constitué un risque pour lui, mais pas au sens où il l’aurait été pour beaucoup d’autres. Si l’affaire avait capoté, il aurait pu revenir à Harvard et tout aurait été en ordre. Mais ça n’aurait pas été le cas pour beaucoup d’autres personnes de sa connaissance. On peut certes douter qu’il connaisse réellement autant de gens répondant à ce critère. Mais il était important qu’il le dise aussi ouvertement. Car il reconnaissait ainsi à quel point le culte de l’échec met entre parenthèses les éléments social et physique. Des facteurs comme l’appartenance ethnique, le genre ou l’âge. Car de tout cela dépend par exemple qui a la possibilité et le droit d’échouer – et qui ne l’a pas.

    #Adrian_Daub #Silicon_Valley #Disruption #Pensée_Tech

  • Crise et licenciements à la Silicon Valley, les géants de la tech dans la tourmente Feriel Mestiri - RTS
    https://www.rts.ch/info/economie/13613479-crise-et-licenciements-a-la-silicon-valley-les-geants-de-la-tech-dans-l

    Chutes en bourse, licenciements collectifs et investissements fantasques, les géants de la Silicon Valley, que l’on disait plus puissants que des Etats, vivent une période agitée. Faut-il craindre une crise structurelle ?

    La région de San Francisco est sous le choc après les licenciements collectifs des géants de la Silicon Valley. Le premier à faire les gros titres était Twitter, début novembre. L’entreprise, qui perdait quelque 4 millions de dollars par jour, selon son nouveau patron Elon Musk, a renvoyé la moitié des employés. Soit 3700 personnes au total.

    Même les concierges se retrouvent sur le carreau. La RTS a rencontré Juana Laura Chavero Ramirez, une ex-concierge chez Twitter, parmi des manifestants devant le siège du groupe. Selon elle, la nouvelle entreprise de nettoyage les a remplacés par des travailleurs non-syndiqués : « Nous sommes 87 employés à nous retrouver sans travail dans cette période de Noël », déplore-t-elle dans le 19h30.

    Licenciement brutal
    Du côté des « cols blancs », Melissa Ingle est l’une des rares ingénieurs de Twitter à accepter de parler. Elle a compris qu’elle était licenciée juste avant Thanksgiving, lorsqu’une alerte est apparue sur son téléphone lui indiquant que son code d’accès avait été supprimé.

    Même pour la Silicon Valley, la méthode est brutale : « Des licenciements étaient sans doute inévitables. Mais d’autres entreprises le font de manière prudente et bien gérée. Ce que Monsieur Musk a fait, c’est sabrer la moitié des effectifs, sans réfléchir aux fonctions et aux talents des employés », souligne-t-elle.

    Chez Meta, des milliards mal investis
    Il n’y a pas que Twitter qui dégraisse ses effectifs. Meta, l’entreprise qui possède Facebook, Instagram et WhatsApp, congédie 11’000 personnes. Cela représente 13% de ses employés.

    En cause, notamment, des investissements hasardeux. Depuis le début de la pandémie, l’entreprise de Mark Zuckerberg a investi quelque 26 milliards de dollars, dont 10 dans le Metavers, un monde virtuel qui peine à séduire.

    Le boom temporaire d’Amazon durant la pandémie
    Amazon annonce également des coupes dans son personnel, de l’ordre de 10’000 licenciements. Tout comme ses congénères, ce géant de la vente en ligne vit une période d’ajustement, après la croissance qui a suivi le Covid.

    Selon Russell Hancock, le président de Joint Venture Silicone Valley, un bureau d’analyse sur l’économie de la Silicon Valley, « quand le monde entier s’est confiné, cela a créé une demande énorme pour les services des géants des nouvelles technologies. Ils ont pensé que ce serait la nouvelle norme. Mais aujourd’hui, alors que la pandémie se dissipe, on réalise que cette demande était temporaire », note-t-il.

    Crainte d’une perte de talents
    Pour San Francisco et sa région, on est loin du krach qui a succédé à l’explosion de la bulle internet du début des années 2000. La situation n’en reste pas moins critique, particulièrement pour les travailleurs expatriés.

    L’avocate Sophie Alcorn est en contact avec des ingénieurs indiens qui risquent l’expulsion : « S’ils sont renvoyés par leur employeur, ils ont une fenêtre de 60 jours pour trouver un nouvel emploi. S’ils n’y parviennent pas, ils doivent quitter le pays. »

    Cette vague de départs pourrait être dommageable pour les Etats-Unis, qui perdent des cerveaux parmi les plus brillants du monde.

    Un repli à relativiser
    A lire les gros titres annonçant des dizaines de milliers de licenciements, on pourrait craindre des faillites de géants de la tech à venir. Mais selon Benoît Bergeret, directeur exécutif du Metalab for data, technology and society à l’ESSEC Business School en France, la crise n’est pas d’une magnitude qui soit inquiétante sur le plan structurel :

    « Finalement, les 20’000 à 40’000 licenciements identifiés, sur les 900’000 emplois de la tech dans la Silicon Valley, ne représentent pas un pourcentage énorme », affirme-t-il, dans une interview accordée au podcast Le Point J.

    Si Twitter a effectivement sabré la moitié de ses effectifs, les 11’000 emplois supprimés chez Meta ne représentent « que » 13% des postes, tandis que les 10’000 personnes licenciées chez Amazon ne constituent qu’un petit pour cent des équipes.

    En d’autres termes, il ne s’agit pas d’un effondrement, mais bien d’un ralentissement du secteur, qui voit la fin d’un cycle d’hyper croissance.

    Entre les rentrées publicitaires en baisse, un contexte macroéconomique fragile, l’inflation et la concurrence de nouveaux acteurs comme le chinois TikTok, les entreprises de la Silicon Valley veulent désormais gagner en rentabilité pour rassurer les investisseurs. Alors elles écrèment.

    #économie #rentabilité #tech #silicon_valley #start-ups #Twitter #paradis_fiscaux #startup #méta #Metavers #multinationales #crise #bourse #multinationales #croissance #dividendes #rentabilité #San_Francisco #concierges #Amazon #cerveaux

  • L’art selon la « tech » - Nonfiction.fr le portail des livres et des idées
    https://www.nonfiction.fr/article-11364-lart-selon-la-tech.htm

    Par Christophe Camus

    L’usage de l’art par les GAFAM n’a sans doute rien à voir avec le mécénat des grandes entreprises du siècle dernier.

    C’est dans le prolongement de ses précédents ouvrages analysant les liens entre culture, politique et économie qu’il faut lire le dernier livre de Fred Turner venant questionner les usages de l’art au cœur des grandes entreprises de la Silicon Valley
    . Plus précisément, ce petit ouvrage du spécialiste des sciences de la communication nous propose deux explorations de ces pratiques : la première se penche sur les liens existants entre Google et le festival Burning Man ; la seconde s’intéresse à « L’art chez Facebook ».

    De l’art dans la Silicon Valley

    Avant de commencer, l’auteur se demande si la Silicon Valley ne serait pas « restée étrangement sourde au chant des sirènes du marché traditionnel de l’art », si les grandes fortunes du numérique ne devraient « pas acheter peintures, sculptures et installations multimédias », comme leurs prédécesseurs fortunés, et s’il faut en déduire « que les programmateurs informatiques ne s’intéressent pas à l’art » (p. 6-7)
    .

    La réponse à ces questions n’est évidemment pas si simple. Dans la continuité de ce qu’il a précédemment montré dans sa biographie extensive de Stewart Brand
    , Turner revient sur une « longue tradition de collaboration entre industries technologiques et art, en Californie et au-delà » (p. 8). Sans remonter trop loin dans l’histoire de l’art, il nous ramène aux années 1960, auprès d’artistes imprégnés d’une culture cybernétique, utilisant la vidéo. Ses exemples nous entraînent de la Raindance Corporation à György Kepes, du Bauhaus au MIT, en insistant sur le rôle de quelques « entreprises comme AT&T ou Teledyne [qui] offraient des résidences et des bourses aux artistes »
    .

    Une histoire dans laquelle le Palo Alto Research Center (PARC) de l’entreprise Xerox occupe une place de choix : ce centre de recherches californien conçoit l’interface graphique des ordinateurs modernes tout en collaborant avec des artistes de la baie de San Francisco « dans l’espoir qu’ils puissent explorer ensemble de nouveaux horizons ». Une démarche qui a finalement « donné naissance, entre autres, à des sculptures multimédia, des récits multi-écrans, et les premiers exemples d’art algorithmique »
    .

    #Fred_Turner #Usage_art #Silicon_Valley

  • Que sommes-nous prêts à sacrifier pour aider les États-Unis à gagner une guerre de propagande contre Poutine ?
    https://caitlinjohnstone.com/2022/04/16/how-much-are-we-prepared-to-sacrifice-to-help-the-us-win-a-propaga

    Il y a une question très importante que nous devons tous nous poser à ce stade de l’histoire, et cette question est la suivante : que sommes-nous prêts, en tant que société, à sacrifier pour que le gouvernement américain puisse gagner une guerre de propagande contre Vladimir Poutine ?

    Laissez-moi vous expliquer.
    Un aspect très peu discuté de la dernière escalade de censure par la Silicon Valley, qui a commencé au début de la guerre en Ukraine, est le fait qu’il s’agit d’un niveau de censure sans précédent. Bien qu’elle puisse ressembler à toutes les autres vagues de purges sur les médias sociaux et aux nouvelles catégories de contenus interdits que nous connaissons depuis que la doctrine dominante, après l’élection américaine de 2016, est que les plateformes technologiques doivent réglementer strictement les discours en ligne, les justifications qui en découlent ont pris une déviation drastique par rapport aux modèles établis.


    Ce qui distingue cette nouvelle escalade de censure de ses prédécesseurs, c’est que cette fois personne ne prétend qu’elle est faite dans l’intérêt du peuple. Avec la censure des racistes, l’argument était qu’ils incitaient aux crimes haineux et au harcèlement racial. Avec la censure d’Alex Jones et de QAnon, l’argument était qu’ils incitaient à la violence. Quant à la censure des sceptiques du Covid, l’argument était qu’ils promouvaient une désinformation qui pouvait être mortelle. Même avec la censure de l’histoire de l’ordinateur portable de Hunter Biden, on a fait valoir qu’il était nécessaire de protéger l’intégrité des élections contre une désinformation d’origine potentiellement étrangère.

    Avec la censure relative à la guerre en Ukraine, il n’y a aucun d’argument pour prétendre qu’elle est faite pour aider le peuple. Rien ne prouve que le fait de laisser les gens dire des choses fausses sur cette guerre tue des Ukrainiens, des Américains ou qui que ce soit d’autre. Il n’y a aucune raison de penser que la contestation des allégations de crimes de guerre russes portera atteinte aux processus démocratiques américains. Le seul argument restant est « Nous ne pouvons pas laisser les gens dire des choses fausses sur une guerre, n’est-ce pas ? ».

    Plus d’escalade dans la censure en ligne
    « YouTube a supprimé des vidéos contestant le discours du gouvernement américain sur les crimes de guerre russes à Bucha. https://t.co/M7zupF8AMa
    Caitlin Johnstone (@caitoz) 15 avril 2022

    Demandez à un libéral au cerveau correctement lavé pourquoi il soutient la censure de quelqu’un qui conteste les récits américains sur les crimes de guerre russes à Bucha ou à Marioupol et il vous répondra probablement quelque chose comme « Eh bien, c’est de la désinformation ! » ou « Parce que c’est de la propagande ! » ou « Combien Poutine vous paie-t-il ? » . Mais ce qu’ils ne seront pas capables de faire, c’est d’articuler exactement quel préjudice spécifique est causé par un tel discours de la même manière qu’ils pouvaient défendre la censure des sceptiques du Covid ou des factions responsables de l’émeute de l’année dernière dans le bâtiment du Capitole [en référence aux partisans de Trump ayant pénétré au Capitole pour contester le résultat des élections présidentielles étasuniennes, NdT]

    Le seul argument que vous obtiendrez, si vous insistez vraiment sur la question, est que les États-Unis sont engagés dans une guerre de propagande contre la Russie et qu’il est dans l’intérêt de notre société que nos institutions médiatiques aident les États-Unis à gagner cette guerre de propagande. Une guerre froide est menée entre deux puissances nucléaires parce que la guerre chaude risquerait d’anéantir les deux nations, ce qui ne laisse d’autres formes de guerre que la guerre psychologique. Rien ne permet de dire que cette nouvelle escalade de censure sauvera des vies ou protégera des élections, mais il est possible de dire qu’elle peut contribuer à faciliter les programmes de guerre froide à long terme des États-Unis.

    Mais qu’est-ce que cela signifie exactement ? Cela signifie que si nous acceptons cet argument, nous consentons sciemment à une situation où tous les principaux médias, sites web et applications que les gens consultent pour s’informer sur le monde sont orientés non pas pour nous dire des choses vraies sur la réalité, mais pour battre Vladimir Poutine dans cette étrange guerre psychologique. Cela signifie qu’il faut abandonner toute ambition d’être une civilisation fondée sur la vérité et guidée par les faits, et accepter au contraire de devenir une civilisation fondée sur la propagande et visant à s’assurer que nous pensons tous des choses qui nuisent aux intérêts stratégiques à long terme de Moscou.

    Et c’est absolument effrayant que cette décision ait déjà été prise pour nous, sans aucune discussion publique pour savoir si oui ou non c’est le genre de société dans laquelle nous voulons vivre. Ils sont passés directement de « Nous censurons les discours pour vous protéger de la violence et des virus » à « Nous censurons les discours pour aider notre gouvernement à mener une guerre de l’information contre un adversaire étranger ». Et ce, sans la moindre hésitation.

    Ceux qui fabriquent le consentement de la population ont contribué à ouvrir la voie à cette transition en douceur avec leurs appels incessants et continus à toujours plus de censure, et depuis des années, nous voyons des signes qu’ils considèrent comme leur devoir de contribuer à faciliter une guerre de l’information contre la Russie.

    En 2018, nous avons vu un journaliste de la BBC réprimander un ancien haut fonctionnaire de la marine britannique pour avoir émis l’hypothèse que la prétendue attaque aux armes chimiques à Douma, en Syrie, était un faux-drapeau, une affirmation dont nous avons maintenant des montagnes de preuves qu’elle est probablement vraie grâce aux lanceurs d’alerte de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques. La raison invoquée par la journaliste pour justifier son objection à ces commentaires est que « nous sommes dans une guerre de l’information contre la Russie » .

    « Étant donné que nous sommes dans une guerre de l’information avec la Russie sur tant de fronts, ne pensez-vous pas qu’il est peut-être déconseillé d’affirmer cela si publiquement étant donné votre position et votre profil ? Ne risquez-vous pas de brouiller les pistes ? » a demandé Annita McVeigh, de la BBC, à l’amiral Alan West après ses commentaires.

    Vous savez que vous avez des problèmes lorsque le militaire essaie de faire le travail du journaliste en posant des questions et en demandant des comptes au pouvoir… et que le journaliste essaie de l’en empêcher. « https://t.co/DVxR3JQ6S2
    Caitlin Johnstone (@caitoz) 18 avril 2018

    Nous avons vu une indication similaire dans les médias de masse quelques semaines plus tard, lors d’une interview de l’ancienne candidate du Parti vert, Jill Stein, qui a été admonestée par Chris Cuomo de CNN pour avoir souligné le fait totalement incontestable que les États-Unis sont un contrevenant extrêmement flagrant en matière d’ingérence dans les élections étrangères.

    « Vous savez, ce serait à la Russie de faire valoir cela, pas à un point de vue américain » , a déclaré Cuomo en réponse aux remarques tout à fait exactes de Stein. « Bien sûr, il y a de l’hypocrisie en jeu, beaucoup de grands acteurs étatiques différents font beaucoup de choses qu’ils ne veulent peut-être pas que les gens sachent. Mais laissons la Russie dire que les États-Unis nous ont fait ça, et voici comment ils l’ont fait, donc c’est fair-play. »

    Ce qui revient à dire : « Oubliez ce qui est factuellement vrai. Ne dites pas de choses vraies qui pourraient aider les intérêts russes. C’est le travail de la Russie. Notre travail ici sur CNN est de dire des choses qui nuisent aux intérêts russes. »

    On peut retracer la généralisation de l’idée que c’est le travail des médias occidentaux de manipuler l’information dans l’intérêt du public, plutôt que de simplement dire la vérité, à la victoire présidentielle de Donald Trump en 2016. Dans ce qui était sans doute le moment politique le plus important aux États-Unis depuis le 11 septembre et ses conséquences, ceux qui fabriquent le consentement ont décidé que l’élection de Trump n’était pas due à l’échec de la politique du statu quo, mais un échec du contrôle de l’information.

    En octobre 2020, pendant le scandale des ordinateurs portables de Hunter Biden, Stephen L Miller, du Spectator, a décrit comment le consensus s’est formé au sein de la presse grand public depuis la défaite de Clinton en 2016, selon lequel il était de leur devoir moral de cacher au public des faits qui pourraient conduire à la réélection de Trump.

    « Depuis presque quatre ans maintenant, les journalistes ont fait honte à leurs collègues et à eux-mêmes sur ce que j’appellerai le dilemme ‘mais ses emails’ », écrit Miller. « Ceux qui ont rendu compte consciencieusement de l’enquête fédérale inopportune sur le serveur privé d’Hillary Clinton et la divulgation d’informations classifiées ont été exclus et écartés de la table des journalistes cool. Le fait de se concentrer autant sur ce qui était, à l’époque, un scandale considérable, a été considéré par de nombreux médias comme une gaffe. Ils pensent que leurs amis et collègues ont contribué à placer Trump à la Maison Blanche en se concentrant sur le scandale de Clinton, alors qu’ils auraient dû mettre en avant les faiblesses de Trump. C’est une erreur qu’aucun journaliste ne veut répéter ».

    Une fois que les « journalistes » ont accepté que leur travail le plus important n’est pas de dire la vérité mais d’empêcher les gens d’avoir de mauvaises pensées sur le statu quo politique, il était inévitable qu’ils commencent à encourager avec enthousiasme une plus grande censure d’Internet. Ils considèrent que c’est leur devoir, et c’est pourquoi les principaux partisans de la censure en ligne sont maintenant des journalistes de médias grand public.

    Dénoncer Radio Sputnik. Une tâche intéressante pour un journaliste. https://t.co/JP8NNFxvI1
    Tim Shorrock (@TimothyS) 16 avril 2022

    Mais il ne devrait pas en être ainsi. Il n’y a aucune raison légitime pour que les mandataires de la Silicon Valley et du gouvernement le plus puissant de la planète censurent les gens qui ne sont pas d’accord avec ce gouvernement au sujet d’une guerre, et pourtant c’est exactement ce qui se passe, et de plus en plus. Nous devrions tous être alarmés par le fait qu’il devient de plus en plus acceptable de faire taire les gens, non pas parce qu’ils font circuler de la désinformation dangereuse, ni même parce qu’ils disent des choses qui sont fausses de quelque manière que ce soit, mais uniquement parce qu’ils disent des choses qui sapent la propagande de guerre américaine.

    Les gens devraient absolument être autorisés à dire des choses en désaccord avec l’empire le plus puissant de l’histoire à propos d’une guerre. Ils devraient même être autorisés à dire des choses effrontément fausses sur cette guerre, parce que sinon seuls les puissants seront autorisés à dire des choses effrontément fausses à son sujet.

    La liberté d’expression est importante, non pas parce qu’il est agréable de pouvoir dire ce que l’on veut, mais parce que la libre circulation des idées et des informations permet de contrôler les puissants. Elle donne aux gens la possibilité de demander des comptes aux puissants. C’est exactement pourquoi les puissants travaillent à l’éliminer.

    Nous devrions considérer comme un énorme, énorme problème le fait qu’une si grande partie du monde ait été regroupée sur ces plateformes d’expression monopolistiques géantes qui pratiquent une censure en parfait accord avec la structure de pouvoir la plus puissante du monde. C’est l’exact opposé de la mise en place d’un contrôle du pouvoir.

    Combien sommes-nous prêts, en tant que société, à abandonner pour que le gouvernement américain et ses alliés gagnent une guerre de propagande contre Poutine ? Sommes-nous prêts à nous engager à être une civilisation pour laquelle la considération première de toute donnée n’est pas de savoir si elle est vraie ou non, mais si elle contribue à saper la Russie ?

    C’est une conversation qui devrait déjà avoir lieu dans les cercles traditionnels depuis un certain temps maintenant, mais elle n’a même pas commencé. Commençons-la.

    Caitlin Johnstone 16 avril 2022

    #censure #convormisme #propagande #manipulation #médias #histoire #russie #syrie #ukraine #politique #journalisme #racisme #guerre #fake_news #facebook  #presse #silicon_valley #youtube #vérité officielle

    • Explications sur le rappel massif de chocolats provoqué par une bactérie en @israël
      Information sans rapport avec le post précédent

      Le plus grand rappel de produits de l’histoire d’Israël est en cours, car de nombreuses lignes fabriquées par son plus grand producteur de confiseries, Elite, sont soupçonnées de contenir des salmonelles.

      Au moins deux enfants et deux adultes auraient consulté un médecin pour suspicion d’intoxication aux salmonelles après le rappel de produits Strauss, la société mère d’Elite, a annoncé le rappel dimanche. Aucun cas n’a été signalé chez les personnes âgées, chez qui les conséquences graves des salmonelles sont plus probables que chez les autres, et peuvent même être mortelles.

      Le ministre de la Santé, Nitzan Horowitz, a déclaré mardi que l’incident ferait l’objet d’une enquête approfondie et que l’usine ne serait pas autorisée à reprendre ses activités avant d’avoir été entièrement désinfectée. « La chocolaterie d’Elite-Strauss ne reprendra pas sa production tant que nous n’aurons pas l’assurance qu’elle est en mesure de fabriquer des produits sains, sans danger pour les consommateurs », a déclaré M. Horowitz.

      Les produits soupçonnés d’être contaminés sont le chocolat, la crème glacée, le pudding et les biscuits. Comment une telle contamination peut-elle se produire ? Est-il certain que la consommation de chocolat contaminé rend malade ? Et quels peuvent être les effets de la salmonelle ? Le Times of Israel s’est entretenu avec le professeur Daniel Cohen de la School of Public Health de l’Université de Tel Aviv, expert en épidémiologie et en médecine préventive.

      lA SUITE https://fr.timesofisrael.com/explications-sur-le-rappel-massif-de-chocolats-provoque-par-une-ba

      #salmonelle #empoisonnement #industrie_alimentaire #confiseries #Elite-Strauss

    • Shufersal rappelle des biscuits qui contiendraient des fibres de nylon

      Cette annonce suit un autre rappel du groupe Strauss, dont certains produits auraient été contaminés par des salmonelles
      La chaîne de supermarchés Shufersal a fait savoir, dimanche, qu’elle rappelait des biscuits commercialisés sous sa propre marque en raison de soupçons sur la présence de fibre de nylon dans ses produits de boulangerie.

      La chaîne a expliqué craindre que les fibres ne soient accidentellement entrées dans les biscuits pendant le processus de production et elle a préféré rappeler les produits « par mesure de précaution ».

      Les produits en question sont les biscuits de type « petit beurre » (paquet de 500 grammes) et de type « petit beurre au chocolat » (paquet de 500 grammes), dont la date limite de consommation est comprise entre le 1er et le 23 octobre 2022.

      « Les produits présentant d’autres dates d’expiration sont parfaitement sains et ils peuvent être consommés sans inquiétude », a déclaré l’entreprise.

      Ce rappel survient après un autre rappel qui avait été lancé par le groupe Strauss, l’un des plus importants producteurs de produits alimentaires israéliens.

      Certains produits du géant alimentaire avaient été contaminés à la salmonelle. La première annonce a été faite lundi et d’autres ont été faites les jours suivants, demandant aux clients de ramener une large gamme de chocolats, gaufres, biscuits, glaces, chewing-gums et autres caramels.

      Ce rappel serait l’un des plus importants de toute l’Histoire d’Israël.

      L’usine que possède le groupe Strauss à Nof Hagalil serait à l’origine de cette contamination. Jeudi dernier, le directeur général du ministère de la Santé, Nachman Ash, a annoncé que l’usine fermerait pendant trois mois, le temps qu’une enquête soit menée et que les mesures nécessaires soient prises pour assurer la sécurité alimentaire des clients.

      Dans un rapport publié dimanche, le ministère de la Santé a critiqué Strauss pour une série d’omissions et de défaillances responsables, selon lui, de la contamination à la salmonelle dans l’usine.

      Selon le ministère de la Santé, sur 300 échantillons prélevés jusqu’à présent dans l’usine en question, une trentaine contenaient des traces de salmonelle.

      Le ministère a évoqué une série de problèmes, parmi lesquels des travaux qui sont actuellement en cours à l’usine et qui ont été entrepris sans réfléchir à leur impact sur la production, la présence de pigeons dans l’usine, susceptibles d’avoir joué un rôle dans cette contamination, l’absence d’un directeur chargé de s’assurer de la salubrité des aliments et des conditions de décongélation inadéquates pour les matières grasses utilisées dans la production de chocolat.

      Il a également noté que dimanche matin, 21 personnes en Israël avaient signalé des symptômes de salmonellose suite à la consommation de produits affectés. Le ministère a déclaré avoir pris les tests de 16 de ces personnes dans l’attente des résultats, dans les prochains jours. Il a également déclaré que seulement six de ces 21 personnes avaient nécessité un traitement médical pour leurs symptômes.

      Le ministère de la Santé a déclaré qu’il n’y avait aucun lien entre la contamination aux salmonelles à l’usine Strauss et une contamination similaire en Belgique affectant les œufs en chocolat Kinder.

      L’article gratuit : https://fr.timesofisrael.com/shufersal-rappelle-des-biscuits-qui-contiendraient-des-fibres-de-n

  • Faut-il se méfier du parler tech ?
    https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2022/04/22/faut-il-se-mefier-du-parler-tech_6123298_4500055.html

    « Révolution », « autonomie », « disruption »… Ces termes « trustés » par l’univers des nouvelles technologies sont détournés de leur sens premier et infusent les conversations du quotidien. Plusieurs universitaires relèvent les risques de ce galvaudage.

    Par Nicolas Santolaria

    Depuis que nous vivons dans une « start-up nation », nous nous sommes habitués à voir fleurir dans les discours, voire dans les conversations de tous les jours, des termes issus de l’univers des nouvelles technologies, sans en interroger la portée. On ne parle pas ici de ces expressions qui traduisent une porosité croissante entre notre vision de l’humain et celle de la machine (être « en mode veille », par exemple, utilisable aussi bien à propos de votre OS que de vous-même), mais bien de termes que les zélateurs des nouvelles technologies diffusent volontairement dans la sphère publique, tout en en modifiant parfois subrepticement leur sens. Ainsi, depuis Steve Jobs et ses harangues en col roulé, la « révolution » n’est plus ce terme qui désigne le renversement populaire du pouvoir, mais le mot-clé servant à qualifier la sortie d’un nouvel iPhone.

    « Ces concepts et idées se veulent novateurs, mais ne sont en réalité que des thèmes éculés revêtus de sweats à capuche », estime Adrian Daub, de l’université Stanford

    Dans son ouvrage Servitudes virtuelles (Seuil, 320 pages, 21 euros), l’universitaire spécialiste des nouvelles technologies Jean-Gabriel Ganascia dresse un constat similaire, qu’illustrent bien les expressions « voitures autonomes » ou « armes autonomes ». L’autonomie, cette liberté de la volonté, se trouve ici réduite à l’idée d’une tâche à accomplir, constituant un « abus de langage ». Car si la voiture était réellement autonome, note avec humour Jean-Gabriel Ganascia, elle « ne vous conduirait pas nécessairement où vous le souhaitez, mais là où elle le déciderait ».
    Opération rhétorique

    Dans La Pensée selon la tech. Le paysage intellectuel de la Silicon Valley (C&F Editions, 184 pages, 22 euros), Adrian Daub, professeur de littérature comparée à l’université Stanford, avance que l’actuelle révolution numérique est aussi, en grande partie, une opération rhétorique assurant la promotion « de concepts et d’idées qui se veulent novateurs, mais qui ne sont en réalité que des thèmes éculés revêtus de sweats à capuche ». L’exemple le plus drôle que l’on trouve dans le livre est le mot mantra « disruption », utilisé à tout bout de champ pour désigner l’innovation de rupture, mais dont la genèse conceptuelle remonte en réalité au milieu du XIXe siècle.

    « La généalogie de l’idée de disruption est assez étrange. Ses plus vieux ancêtres sont probablement Karl Marx et Friedrich Engels, qui ont écrit dans Le Manifeste du Parti communiste (1848) que le monde capitaliste moderne se caractérise par “ce bouleversement continuel de la production, ce constant ébranlement de tout le système social” de sorte que, selon eux, “tout ce qui avait solidité et permanence s’en va en fumée”. » On le voit ici, le terme de disruption laisse imaginer une nouveauté radicale dans les manières de faire, là où il y a en réalité une continuité.

    « Généralement, les concepts présentent de l’intérêt parce qu’ils nous aident à établir des distinctions importantes », souligne Daub, mais les concepts mis en avant par la tech, eux, « servent souvent à brouiller ces distinctions ». Le terme de « contenu », par exemple, s’il désigne une matière indispensable à l’existence des plates-formes, s’accompagne de l’idée qu’il ne s’agit pas là d’un vrai travail (donc n’implique pas de rémunération en bonne et due forme, ni de contrat).

    Le fait de jouer ainsi sur les mots n’est pas fortuit, mais procède d’une véritable stratégie : les changements impulsés au travers du vocable sont frappés du « sceau de la loi naturelle », estime encore Daub, ce qui a pour effet de suspendre momentanément la critique, et de paralyser le régulateur, trop occupé à essayer de s’orienter dans ce nouveau brouillard sémantique. Si la production de contenu est un simple hobby, pourquoi alors la réguler ? Influencée entre autres par René Girard, Ayn Rand ou encore Marshall McLuhan, cette pensée de la tech nous invite in fine à voir le monde comme un univers empli de « problèmes » qui appellent une pressante réponse technologique ; « solutionnisme » univoque qui est déjà, en soi, problématique.

    Nicolas Santolaria

    #Adrian_Daub #Language #Disruption #Silicon_Valley

  • What Is It About Peter Thiel ? | The New Yorker
    https://www.newyorker.com/news/letter-from-silicon-valley/what-is-it-about-peter-thiel

    ilicon Valley is not a milieu known for glamour and charisma. Still, Peter Thiel has cultivated a mystique. A billionaire several times over, Thiel was the first outside investor in Facebook; he went on to co-found PayPal, the digital-payment service, and Palantir, the data-intelligence company that has worked with the U.S. government. He has co-written a business best-seller, “Zero to One,” and launched a hedge fund; he now runs three venture-capital firms. But Thiel’s aura emanates not so much from these achievements as from a more general fish-out-of-water quality. In 2018, citing a regional intolerance of conservative perspectives, he moved from Silicon Valley to Los Angeles; he recently purchased a mansion in Miami Beach. He served on Donald Trump’s transition team and, in an address before the Republican National Convention, declared, “I am proud to be gay.” He has invested in efforts to “cure” aging, and also in libertarian organizations that hope to create floating cities in international waters. He publishes long, winding essays on politics, globalization, economics, and the nature of humanity that often contain Biblical epigraphs and references to the philosophy of his late mentor and friend, the anthropological theorist René Girard. Thiel also has side projects: Frisson, a now shuttered lounge and restaurant in San Francisco; American Thunder, a short-lived conservative publication geared toward Nascar fans; and the bankrolling of a lawsuit launched on behalf of the wrestler Hulk Hogan, which culminated in the 2016 bankruptcy of Gawker Media.

    Thiel has fans who follow him in his peregrinations. He has become a center of gravity in the culture of Silicon Valley, and his infrequent talks and essays are circulated and analyzed by both admirers and critics. In “The Contrarian: Peter Thiel and Silicon Valley’s Pursuit of Power,” the Bloomberg journalist Max Chafkin argues that Thiel “has been responsible for creating the ideology that has come to define Silicon Valley: that technological progress should be pursued relentlessly—with little, if any, regard for potential costs or dangers to society.” Thiel’s devotees see him differently—as a techno-libertarian who associates technological advancement with personal freedom, scientific progress, and even salvation.

    Thiel arrived at Stanford in 1985. He played speed chess, discovered Ayn Rand, and gravitated toward the work of Girard, a professor at the school. Thiel was particularly taken with Girard’s concept of mimetic desire. “Man is the creature who does not know what to desire, and he turns to others in order to make up his mind,” Girard wrote. “We desire what others desire because we imitate their desires.” Mimetic desire involves a surrender of agency—it means allowing others to dictate one’s wants—and, the theory goes, can foster envy, rivalry, infighting, and resentment. It also, Girard wrote, leads to acts of violent scapegoating, which serve to preclude further mass conflicts by unifying persecutors against a group or an individual. Thiel would later use this framework to develop his own theories about politics, tech investing, and culture.

    He started a hedge fund, Thiel Capital, with money raised from family and friends, and then, in 1998, met a young cryptographer, Max Levchin, and invested in his startup. Within a year, Thiel was the C.E.O. of Levchin’s company, Confinity, which offered a money-transfer service called PayPal. For Thiel, the service had revolutionary potential: a digital wallet, he said, could lead to “the erosion of the nation-state.” Confinity went on to hire four former Review editors, and half a dozen former staffers.

    PayPal was not registered as a bank, and did not collect information about its users; as a result, Chafkin writes, it could be used for illicit transactions that many banks and credit-card companies did not tend to support (porn, gambling), and which the company later banned. Meanwhile, Levchin created an eBay bot that contacted sellers, expressed interest in their wares, and then asked that they implement PayPal in order to be paid. (The company donated the items that it bid for and won to the Red Cross.) Thanks to these ethically dubious techniques—which might now be referred to as “growth hacking”—PayPal’s user base boomed.

    Dodge the rules, skirt the law, shiv your business partner, abandon your friends: Chafkin argues that the Silicon Valley edition of this playbook was written at PayPal. Perhaps for this reason, the company’s early executives and employees became known as the “PayPal mafia.” A group portrait made in 2007, for a story in Fortune, suggested that they embraced the moniker. In the photograph, twelve former PayPal employees sit in a restaurant. They are styled like the Corleone family, in plush tracksuits and back-room casual. Musk is conspicuously absent; Thiel sits center stage, at a two-top covered in neat towers of poker chips. With his high forehead, deep-set blue eyes, and faint smile, he looks placid and amused.

    Chafkin writes that, following September 11th, Thiel became “increasingly consumed by the threat posed by Islamic terrorism,” and grew skeptical “of immigration, and of all other forms of globalization.” While working at his new hedge fund, Clarium Capital, Thiel bankrolled a project called Palantir—its name was inspired by a “seeing stone” from J. R. R. Tolkien’s “Lord of the Rings” trilogy—which sought to collate and analyze an abundance of government data, from financial records to cell-phone logs. Palantir reportedly used software developed at PayPal to identify criminal networks and mitigate fraud; the idea was that, if the software was good enough to identify money launderers, it could probably identify terrorists, too. (Thiel says that Palantir used no PayPal tools whatsoever.) “It was assumed that this would violate certain pre-9/11 privacy norms, but that would be totally fine in a post-9/11 world,” Chafkin writes. Then as now, it can be hard for outsiders to get a handle on how well the software works: Chafkin claims that, at least at first, Palantir’s intelligence offerings were “effectively useless” and “more a demo than a real product.” (Thiel denies this characterization.) The C.I.A. invested through its venture-capital arm, and the N.Y.P.D. was a customer. Palantir, which went public last year, is now valued at more than fifty billion dollars.

    In 2004, Thiel invested in Facebook, loaning it what would later translate to a ten-per-cent stake in the company. Around the same time, he organized a small symposium at Stanford on “Politics and the Apocalypse.” Thiel’s contribution, later published as an essay titled “The Straussian Moment,” was built on the premise that September 11th had upended “the entire political and military framework of the nineteenth and twentieth centuries,” demanding “a reexamination of the foundations of modern politics.” The essay drew from a grab bag of thinkers—it meditated on Thomas Hobbes and John Locke, then combined ideas from the conservative political theorists Leo Strauss and Carl Schmitt, who wrote about the inadequacies of liberal democracy, with the work of Girard—to offer a diagnosis of modernity. “A religious war has been brought to a land that no longer cares for religious wars,” Thiel wrote. “Today, mere self-preservation forces all of us to look at the world anew, to think strange new thoughts, and thereby to awaken from that very long and profitable period of intellectual slumber and amnesia that is so misleadingly called the Enlightenment.”

    Whether the future would be utopian or apocalyptic, Thiel positioned himself to profit. In 2005, he established a venture-capital firm, Founders Fund, which announced that it would be seeking “riskier, more out-of-the-box companies that really have the potential to change the world.” He developed an interest in life-extension and anti-aging technologies—one of the firm’s early investments was Halcyon Molecular, a startup that sought to defeat aging through the development of genomic-sequencing technology—and in defense contractors, including SpaceX, Musk’s aerospace company. Around this time, Valleywag, a new Silicon Valley gossip blog owned by Gawker Media, began making Thiel a regular subject. A 2006 post, “Three Valley Moguls Dabble in Humanity’s Future,” noted that Thiel—a “Valley exec investing in weird dreams of a super-intelligent race”—had joined the board of the Singularity Institute for Artificial Intelligence (now the Machine Intelligence Research Institute). In a later post, Valleywag mentioned a rumored million-dollar donation Thiel had made to the Federation for American Immigration Reform, a group affiliated with NumbersUSA, a far-right anti-immigration nonprofit. A 2007 post, titled “Peter Thiel Is Totally Gay, People,” was particularly upsetting to Thiel: although many of his friends and colleagues had known that he was gay, he saw the post as an outing.

    As the decade drew to a close, Thiel befriended Patri Friedman, a computer programmer and grandson of Milton Friedman, who had written about so-called seasteading communities—hypothetical libertarian utopias floating in international waters. Thiel offered Friedman half a million dollars to start a seasteading nonprofit. He also gave money to the SENS Research Foundation, an anti-aging nonprofit, and to the Methuselah Foundation, an organization dedicated to life extension. In 2009, he wrote an essay for Cato Unbound, an online libertarian journal published by the Cato Institute, in which he stated that he no longer believed “freedom and democracy are compatible,” and that “the vast increase in welfare beneficiaries” and the extension of voting rights to women had “rendered the notion of a ‘capitalist democracy’ into an oxymoron.” (Following backlash to the essay, Thiel put out an addendum of sorts: “While I don’t think any class of people should be disenfranchised, I have little hope that voting will make things better.”) All of this only served as more fodder for Gawker.

    Does Thiel’s world view make any sense? Critics see a tangle of unprincipled hypocrisies—intellectual ground cover for banal shamelessness and techy self-interest. Admirers perceive depth, and an enthralling, novel framework for the future. Thiel’s involvement with Trump alienated some followers, but for others it deepened his mystique, raising the possibility that he knew something his contemporaries did not.

    Most prominent Silicon Valley executives have historically identified as liberal, but one might ask whether their companies and products have actually advanced progressive values or causes; today, privately owned platforms touted as democratizing are arguably among the most centralized and anti-democratic. Inasmuch as Thiel’s approach to technology acknowledges Silicon Valley’s roots in the military-industrial complex, he may be the tech industry’s most honest representative. It is often remarked that he is a villain out of central casting.

    #Peter_Thiel #Néo_conservatisme #Extrême_droite #Libertariens #Silicon_Valley

  • Polluer avec Elon Musk et les « mineurs » de bitcoin chinois Philippe Mabille

    Ne dites plus « je spécule sur les cryptos » mais « je pollue avec Elon Musk dans une « mine » à charbon chinoise ». Depuis que le fondateur de Tesla s’est rendu compte que sa proposition de payer sa voiture électrique en bitcoin avait un bilan carbone désastreux, rien ne va plus pour la monnaie digitale. Coup de com’ du trublion ou, comme l’affirme dans notre interview un expert acquis à la cause, les conséquences des « pressions » menées par les anti-bitcoins ? Preuve, s’il en est, que le bitcoin, qui représente déjà la consommation énergétique de l’Italie, devient un problème macro et politique.

    Que s’est-il passé entre le 24 mars, lorsque le fantasque milliardaire a lancé sur Twitter son « you can now buy a Tesla with bitcoin » et son changement de pied de cette semaine ? Réponse : 1 milliard de dollars de gains sur son investissement de 1,5 milliard dans la crypto-vedette et surtout une volée de bois, vert évidemment, de la part de quelques détracteurs qui ont fait les comptes : comme le mix énergétique en Chine utilise principalement des centrales à charbon, il y a là de quoi remettre en cause la lutte contre le réchauffement de la planète. Tout cela en quelques clics... . . .

    La suite : https://www.latribune.fr/opinions/editos/polluer-avec-elon-musk-et-les-mineurs-de-bitcoin-chinois-884652.html

    #tesla #elon_musk #électricité #énergie #spacex #bitcoin #espace #silicon_valley #intelligence_artificielle #voiture_électrique #en_vedette #technologisme #automobile #capitalisme #transhumanisme #technologie #énergie #ia

  • Les serfs du numérique
    https://laviedesidees.fr/Durand-Techno-feodalisme.html

    À propos de : Cédric Durand, Techno-féodalisme. Critique de l’économie #numérique. Zones. Cédric Durand analyse les conséquences de l’essor de l’économie numérique sur les structures économiques en matière de dynamisme concurrentiel et de rapports sociaux, dont les caractéristiques s’apparenteraient à une nouvelle forme de féodalisme.

    #Économie #exploitation
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20210208_durand.pdf
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20210208_durand.docx

  • ‘Competition Is for Losers’ : How Peter Thiel Helped Facebook Embrace Monopoly
    https://onezero.medium.com/competition-is-for-losers-how-peter-thiel-helped-facebook-embrace-mo

    The roots of Big Tech’s antitrust problem can be found in his bestselling 2014 business book, ‘Zero to One’ “Only one thing can allow a business to transcend the daily brute struggle for survival,” Peter Thiel wrote in his bestselling 2014 book, Zero to One. That one thing, Thiel stated outright, is “monopoly profits.” In the book, which was embraced as a business bible in Silicon Valley and beyond, Thiel made the case for monopoly as the ultimate goal of capitalism. Indeed, “monopoly is the (...)

    #Palantir #Facebook #domination

  • Facebook’s Little Red Book | Office of Ben Barry
    https://v1.benbarry.com/display.php?id=4

    As the company of Facebook grew, we faced a lot of challenges. One of them was explaining our company’s mission, history, and culture to new employees. Over the years, a lot of formative company discussions and debates had happened in Facebook Groups, over email, or in person. Those who had been present at the time had context, but for new employees that information was difficult to find, even if you knew what you were looking for. We wanted to try to package a lot of those stories and ideas in one place to give to all employees.

    #Facebook #Little_Red_Book #Art #Silicon_Valley #Fred_Turner

  • Le #monde_d’après : les #États-Unis « courent au précipice », avertit Noam Chomsky
    https://www.lapresse.ca/international/etats-unis/202005/25/01-5274889-le-monde-dapres-les-etats-unis-courent-au-precipice-avertit-noam

    Q. : De nombreux pays utilisent la #technologie pour #surveiller leur population afin de combattre le #virus. Sommes-nous dans une nouvelle ère de #surveillance #numérique ?

    R : Il y a des sociétés qui développent des #technologies qui permettent aux employeurs de voir ce que leurs employés ont sur leur écran d’ordinateur, de vérifier vos frappes sur le clavier, et, si vous vous éloignez de votre écran, de comptabiliser ça comme une pause. L’« #internet_des_choses » est en marche. Tout objet domestique contient de l’électronique. C’est pratique […], mais l’information va aussi à Google, Facebook et au gouvernement. Cela donne un potentiel énorme de #contrôle et de #surveillance, et c’est déjà là, ce n’est pas dans le futur.

    Si on laisse ces géants technologiques contrôler notre vie, c’est ce qui se passera. Ça ressemblera à la Chine, où il y a des systèmes de +crédits+ sociaux, de la technologie de reconnaissance faciale partout. Tout ce que vous faites est surveillé. Vous traversez au mauvais endroit, vous pouvez perdre des crédits. 

    Ce n’est pas inévitable, de même que le changement climatique n’est pas inévitable. On peut laisser ça se produire, ou l’arrêter.

    #GAFA #silicon_valley