• Pegida aussi est Charlie.
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    Et pour revenir sur les caricatures et la censure américaine.

    "Reste que les caricatures de Mahomet et les réactions qu’elles entraînent, au-delà de l’enjeu religieux ou de celui de la liberté d’expression, posent d’autres questions. Ces caricatures visent la croyance. Elles pourraient s’inscrire dans le champ anticlérical. Mais l’objectif politique qui les sous-tend les différencie des caricatures diffusées par les républicains et les libres-penseurs de la fin du 19e siècle en France. Les caricatures danoises n’ont pas pour but affiché de libérer d’une oppression religieuse. C’était a contrario le cas, à l’époque de la Révolution française, de la Commune de Paris, des lois laïques de 1905. Les rationalistes attaquaient alors la religion majoritaire qui avait un rôle déterminant et premier dans tous les rouages de l’Etat, dans la vie civile, dans l’enseignement, et dont les lois formaient un carcan insupportable. Ils attaquaient les membres de l’Eglise, soulignant leur immoralité, leur caractère réactionnaire et antirépublicain. Les dessinateurs se faisaient fort de rappeler qu’à quelques siècles de là, l’Eglise chrétienne brûlait les hérétiques et les libres-penseurs.
    Les anticléricaux les plus résolus visaient la religion dans son ensemble. L’Ancien et le Nouveau Testament faisaient l’objet de parodies et caricatures. On se moquait alors de Dieu, de Jésus, du pauvre Joseph affublé d’immenses cornes de cocu, on recourait à l’arme du trivial ou de la scatologie. Un mouvement populaire se déchaînait contre la pression religieuse, et la caricature jouait un rôle progressiste.
    Vu les tensions mondiales actuelles, le choix des caricaturistes danois d’attaquer la seule religion musulmane équivaut à alimenter l’islamophobie ambiante. En refusant de voir cela, la presse européenne manque hélas de mesure. Rien ne justifie aucune censure de la presse ni les menaces contre les journalistes. Mais les caricaturistes, même au nom de la liberté, ne peuvent s’extraire des contradictions du monde." Le Monde de religions paywall "

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    "Les auteurs de la vidéo, des chrétiens occidentaux, se cachent quelque part (ce qui est indispensable pour une bonne publicité) pendant que des innocents sont asphyxiés, ont la tête tranchée et sont tués d’une manière ou d’une autre - la vengeance des Musulmans outragés venant par la même « prouver » que les colporteurs d’ordures racistes ont raison quand ils disent que l’Islam est une religion violente.

    Les provocateurs savent bien que la politique et la religion ne font pas bon ménage au Moyen-Orient. Ils sont pareil. Christopher Stevens, ses collègues diplomates de Benghazi, les prêtres d’Afrique et de Turquie, le personnel de l’ONU en Afghanistan ; Ils ont tous payé à la place de ces « prêtres chrétiens », ces « caricaturistes » ces « cinéastes » et ces « auteurs » - les guillemets marquent la différence entre ces illusionnistes et les authentiques prêtres, caricaturistes, cinéastes et auteurs - qui ont décidé de provoquer 1,6 milliards de Musulmans en toute connaissance de cause.

    Quand une caricature danoise montrant le Prophète Mohamed avec une bombe dans son turban a été publiée dans un journal jusqu’alors inconnu, l’ambassade danoise à Beyrouth a été incendiée. Quand un pasteur texan a décidé « de condamner le Coran à mort », on a sorti les couteaux en Afghanistan -je laisse de côté le petit incident du Coran brûlé « accidentellement » par le personnel étasunien de la base de Bagram. Et maintenant un film délibérément insultant provoque le meurtre d’un des meilleurs diplomates du Département d’État.

    A beaucoup d’égards, nous somme en terrain familier. Dans l’Espagne du 15ième siècle, des caricaturistes chrétiens ont représenté le Prophète en train de faire des choses innommables. Et -juste pour qu’on ne s’imagine pas que soyons nous-mêmes blancs comme neige- quand un cinéma parisien a sorti un film dans lequel le Christ faisait l’amour à une femme, le cinéma a été incendié, un spectateur a été tué et l’assassin s’est révélé être chrétien.
    Grâce à nos merveilleuses technologies nouvelles, cependant, il ne faut plus qu’une paire de malades pour déclencher une guerre miniature dans le monde musulman en quelques secondes

    Ironiquement, les temps sont mûrs pour un débat sérieux entre les Musulmans, sur une réinterprétation du Coran par exemple ; mais la provocation occidentale -et hélas elle est bien occidentale - ne permet pas à ce débat de s’instaurer. Et nous pendant ce temps, nous nous glorifions d’être des champions de la « liberté de la presse ». Un rédacteur en chef de Nouvelle Zélande m’a dit un jour avec fierté que son propre journal avait aussi publié la caricature du Prophète avec une bombe dans le turban. Mais quand je lui ai demandé s’il avait l’intention de publier une caricature d’un rabbin avec une bombe sur la tête la prochaine fois qu’Israël envahirait le Liban, il m’a tout de suite répondu que ce serait de l’antisémitisme.

    C’est là où le bats blesse évidemment. Certaines choses dépassent les bornes à juste titre. Mais pour d’autres, il n’y a pas de bornes du tout. Plusieurs animateurs de radio m’ont demandé hier si l’agitation au Caire et à Benghazi avait été programmée pour « coïncider avec le 11 septembre ». Il ne m’est tout simplement pas venu à l’idée de me demander si les provocateurs avaient délibérément choisi cette date pour diffuser leur vidéo."

    * Robert Fisk est le correspondant du journal The Independent pour le Moyen Orient.
    Article original http://www.independent.co.uk/voices/comment/the-provocateurs-know-politics-and-religion-dont-mix-8131297.html

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