• Fair play

    Sur le terrain de foot où s’entraine mon fils de 9 ans, en Norvège, on trouve en plusieurs endroits, bien en vue, cette affiche :

    « Fair Play : ça veut bien dire "respect", n’est-ce pas ? »

    Histoire de rappeler aux gamins qu’ils ne sont pas là pour s’arracher les yeux et les mollets, mais pour jouer, socialiser et prendre du plaisir. Dans la réalité, les entraineurs sont très attentifs à ce qu’il n’y ai pas de « mobbing » ou de violence. Et il n’est pas rare, en fin de match, que les enfants félicitent les joueurs de l’équipe adverse pour les belles actions qu’ils ont menées.

    #espoir #éducation #socialialisation #football #fair_play #respect

    • Il y a quelque chose qui me gêne dans ce mot « respect ».
      Est-ce parce que tenir en respect , sent déjà le gun sur la tempe.
      J’essaie souvent de lui substituer quelque chose qui parle de l’échange ou de l’empathie, un mot qui élève tout le monde. Je ne trouve pas.

    • @touti, c’est une subtilité de la langue française (tenir en respect). Ce possible double sens n’existe pas en norvégien, langue dans laquelle le mot « respect » a bien la signification de « considérer » les gens ou les choses.

    • @touti d’ailleurs, j’en profite pour dire que dans l’utilisation de cette terminologie en norvégien, il y a non seulement le sens de ne pas agresser ou violenter l’autre, mais encore celui de ne rien faire qui puisse potentiellement mettre l’autre en situation désagréable ou d’humiliation. Enfin, le mot est attaché à un autre mot important ici, celui de « consentement », notion qui est largement débattu ici sur seenthis et qui est très importante dans la culture norvégienne.

    • Raison pour laquelle j’ai posté cette photo : je pense que réfléchir sur la question du respect, du consentement, de l’attention à l’autre (dans le sens faire attention aux vulnérabilités et protéger) est un débat fondamental.

    • c’est aussi ce que je garde des années passées au Canada.... qu’apprendre à respecter (j’utilise aussi le mot ’respect’) les autres est aussi important que de savoir ce qu’est un adjectif épithète... on ne rigole pas avec ça à l’école ! ils apprenaient à respecter les autres, à les écouter (’on ne coupe pas la parole quand quelqu’un parle’). De retour en France, j’ai l’impression que mon fils doit ’apprendre à se faire respecter’ passe au dessus de tout...
      quand ils faisaient du sport, il fallait respecter son adversaire (et plus encore l’arbitre... ça me fascine toujours quand je regarde les matchs de Hockey de voir ces colosses se plier à la décision de l’arbitre, qu’elle soit juste (’fair’) ou pas)
      Ils ont baigné dans ce moule, au Canada, et j’étais fier d’eux, quand on rentrait en France... mais maintenant qu’on est rentré (depuis un an), tout cet apprentissage semble être un souvenir... c’est vraiment dommage...

    • Même sentiment quand on rentre en France et que les enfants font des activités sportives dans la banlieue sud... j’ai toujours le sentiment d’être précipité dans un monde différent, beaucoup plus « compétitif » et beaucoup moins « respectueux » comme si « gagner à tout prix » était un enjeu vital et la chose la plus importante au monde.

    • le plus déprimant est que ça quitte le monde du sport pour arriver à l’école... il ne s’agit pas seulement d’être bon, mais d’être meilleur, et d’écraser les autres... ici (en France) je découvre une philosophie incroyable en 5ème (2ème année du secondaire) : la prof de français va faire trois groupes de niveau, les ’bons’ auront plus de devoirs, et les ’mauvais’ moins. Les ’bons’ ont vocation à devenir meilleurs (et bien sûr, il faut creuser l’écart autant que possible). Au primaire, au Canada, ceux qui avaient fini les premiers (qu’une vision rapide appellerait les ’bons’, même s’ils n’étaient jamais désignés ainsi) étaient obligés d’aller aider ceux qui avaient du mal... la solidarité était imposée !

      bon je vais arrêter là, sinon je vais finir par aller racheter des billets d’avion !

    • Quand j’ai commencé l’escrime, il y a maintenant un certain temps…, j’avais un maître d’armes « à l’ancienne », très attaché au respect.

      Cf. Escrime — Wikipédia#Les_valeurs
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Escrime

      Les valeurs
      Philosophiquement, le respect de l’autre, le respect des règles et le courage sont des valeurs primordiales de l’escrime : les tireurs se saluent avant l’assaut, et puis une fois l’assaut terminé ils se remercient l’un l’autre et se serrent la main avant de se quitter. D’ailleurs si l’un des tireurs ne respecte pas cette règle (jette son masque, ne salue pas son adversaire, etc.) il risque une exclusion pour toute la saison.

      Avec le temps, et le discours publicitaire sur les « valeurs sportives » en général et les vertus de « la compétition », la réalité s’est un peu éloignée de ces beaux principes. Pour s’en convaincre, il suffit d’assister quelques instants aux compétitions enfants et d’écouter les encouragements des parents…

      Bon, peut-être que depuis le temps que je n’ai pas assisté à une compétition, les choses ont changé dans le bon sens…

    •  :-) c’est marrant, c’est le sport qu’a choisi mon fils, à Montréal...

      mais même là, au Canada les valeurs sont naturelles, et donc c’est détendu... son prof, c’était Steve, et c’est tout. Ici, en France, c’est plus formel, tout le monde parle de son « maître d’arme »... Et il adorait le sabre, mais en France, on lui dit qu’il est trop jeune, qu’il doit faire ses preuves avant... bref, il abandonne l’escrime cette année...

      et oui, ce qu’on peut entendre, en France, dans les combats est assez déprimant... à Montréal, les compétitions étaient bien plus cool... je me souviens quand il est arrivé en finale aux Jeux de Montréal, Steve lui a dit « eh, c’est cool, t’es en finale, t’auras forcément une médaille... on s’en fout laquelle, amuse toi... ».

      oui... c’est tellement différent la philosophie du sport...

      après, pour revenir à ce que disait @reka, je me demande s’il y a un esprit « nord ». Quand j’ai bossé pour la conférence qu’on avait fait ensemble sur le pôle nord, j’ai lu pas mal, sur la ’norditude’, et j’ai l’impression que les pays du nord véhiculent des ’valeurs’ fortes de solidarité... C’est mal écrit, mais formalisé, mais j’ai une impression de cet ordre... Je ne sais pas si c’est historique, et que pour lutter contre le froid, tu n’as pas le choix... Je suis preneur de tout élément de discussion sur cette impression diffuse que j’ai...

    • Je vais ressortir Le Nord, c’est l’Est de Cédric Gras (coucou @reka :-D

      En Mongolie, cette solidarité est une évidence sociale : un jour tu dépannes quelqu’un, un autre quelqu’un te dépannera. De ce point de vue, la grande virée que j’avais faite juste après l’ouverture du pays et en plein effondrement des anciennes structures du Comecon était riche d’exemples : véhicules embourbés, essence inexistante, routes impraticables. On avait la chance d’avoir eu — pour rien — un ancien camion tracteur d’artillerie soviétique abandonné par l’Académie des sciences de l’URSS qui passait partout. Ce qui n’était pas rien, en revanche, c’était la consommation d’essence…

      Je ne sais pas ce qu’il en est aujourd’hui, après 20 ans de paupérisation massive et d’effondrement des liens sociaux (avec aujourd’hui plus de 50% de la population dans la capitale) amorcés par le triomphe du libéralisme marchand.

    • Quand mon fils avait 6 ans, il a voulu faire du sport... Comme les copains ! J ai ete effarée de constater que l une des premières choses qu’on lui ai apprises c est à ne pas se faire voir de l arbitre et à contourner les règles... Heureusement au bout de deux mois cette compétition pourrie l a gavé et il a arrêté ( j ai rien fait pour le retenir).
      Aujourd’hui on fait de l’escalade (apres etre passe par le tir à l arc’ deux sports qui ont l avantage de pouvoir se faire en famille). L escalade me semble être le sport ou l écoute de l autre, le respect sont fondamentaux. Celui qui assure a ta vie entre ses mains, littéralement, et tu sais que tu auras la sienne entre les tiennes apres. Du coup, le côté compétition devient très secondaire. Si tu n as pas une confiance absolue en l autre, tu ne peux pas grimper sereinement. Je me souvient d une nana qui m assurait mais regardait tout sauf moi... Notre collaboration s est vite arrêtée tellement elle m a fait flipper.
      J ai aussi eur un prof de boxe française excellent, qui avait pour politique qu on frappait à la hauteur de la force de son adversaire et que seul un coup parfaitement réalisé avait de l importance et non sa force. Il faisait de la compétition de son côté, avait quelques personnes dans le cours qui en faisait aussi, mais il ne poussait pas du tout à ça.
      Bref, je me demande si cet esprit compétition au mépris de l autre ne tiens pas avant tout au prof mais aussi au fait que les fédération ont de l argent public aussi en fonction de leurs résultats départementaux, régionaux, etc... Le club ou on faisait du tir à l arc avait perdu ses subventions municipales au prétexte qu’il n avait pas assez d adhérents (on devait etre 40 à tout casser) même si il y avait un champion de France junior, un jeune sélectionné en équipe de France et un champion et une championne de France senior... Mais bon face au foot...

    • Voila, « #considération », c’est mieux pour évoquer ce que contient une partie du respect. Merci @reka pour la distinction en Norvégien, je ne savais pas, c’est intéressant ces différences de perception que vous évoquez entre france/Norvège et Canada. J’avais pensé à « conscient de l’autre » ou « attentif à … » (mais non maintenant que la RATP nous houspille de cette injonction anti terroriste, je n’y arrive plus).
      Le respect implique des codes à suivre que l’on n’est pas toujours à même de connaitre si l’on n’appartient pas au groupe qui les édicte. Des lois, règles culturelles sportives ou militaires qui permettent de distinguer les groupes humains qui s’y reconnaissent et les respectent, si je pousse le bouchon c’est comme une nouvelle forme de nationalisme +/- masqué qui émerge, une construction de frontières et d’espaces « à respecter » dont on nous abreuve. La considération de l’autre, la joie, le partage, me paraissent des notions universelles qui ne requièrent pas de règles. Et puisque l’on parle de sport, celui-ci ressemble de plus en plus à une simulation d’entrainement militaire (tiens on reparle d’arts martiaux) parallèle au respect d’une société capitaliste qui demande d’en imposer de tuer l’autre symboliquement, mais quand même avec des règles qui sont parfois à l’inverse de la solidarité. voila voila …