• Ma vie, ma mort, mon choix !

    Un émission de radio campus Lille, avec aux micros, Nadine, Monique, Anick, Frédérique, Véronique.

    Mourir, est le dernier acte de notre vie. Nul ne doit pouvoir en décider à notre place.

    https://www-radio-campus.univ-lille1.fr/ArchivesN/LibrePensee/LP240309.mp3

    Pourquoi la France a-t-elle toujours 20 ans de retards en Europe pour légaliser les pratiques de liberté humaine ?


    Une majorité de Français attendent ce droit nouveau, la convention citoyenne l’a montré. Mais est-ce forcément signe de progrès pour notre société ? Ne sommes-nous pas de plus en plus individualistes, l’attente des français ne traduit-elle pas cet esprit du siècle ? Et la solidarité dans tout ça ?

    On se plaint des conditions d’accueil des malades et personnes âgées indignes dans un système de santé en panne, la priorité n’est-elle pas de restaurer notre service public et de financer les SP ?

    Parlons des médecins, qui sont ou seraient opposés au droit à l’AMM.

    Vous faites référence au combat des femmes pour le droit à l’IVG, dans les décennies 60/70, diriez vous qu’il y a une filiation avec le combat que vous menez aujourd’hui pour l’AMM ?

    Quels sont nos moyens et modes d’action ?
    . . . . .
    Le Choix-citoyens pour une mort choisie, est une association laïque, apolitique et pluraliste dans les convictions philosophiques, spirituelles, religieuses de ses membres. Le respect de la liberté de conscience est le fondement de son combat. Il concerne tous ceux qui défendent la laïcité, c’est à dire un monde de tolérance.
    . . . . .
    Antenne Nord Pas de Calais : MDA 27 rue Jean Bart 59000 Lille 
lechoix5962@laposte.net tel : 06 70 31 56 94 https://choisirmafindevie.org

    Source : http://federations.fnlp.fr/spip.php?article2292

    #Santé #liberté #décès #santé #mort #mort_choisie #acharnement_thérapeutique #AMM #souffrances #femmes #radio #Hôpital #soins_palliatifs

    • Dans un monde égalitaire, choisir sa mort pourrait être une option. Mais nous ne vivons pas dans ce monde. Le problème de considérer que l’euthanasie est “juste un choix individuel”, c’est que les personnes ne prennent pas leurs décisions hors contexte social. Nos choix sont le fruit de circonstances sociales que nous ne maîtrisons pas, pour la plupart, quoiqu’en dise la méritocratie.

      Le suicide assisté n’est pas juste une question personnelle. Il existe des politiques publiques de prévention du suicide. Où se situe la ligne de démarcation entre les personnes qui méritent une prévention du suicide et les autres ?

    • Il se pose dans ce contexte la question de l’ #iatrocratie, parce que l’euthanasie est la forme la plus radicale du règne des médecins sur notre vie et notre mort.

      Après l’époque nazie et l’octroi massif de l’euthanasie par les médecins on ne peut que s’opposer à toutes ses formes. Je revendique mon droit à ma propre mort mais sans intervention extérieure. L’euthanasie par contre c’est systématiquement du meurtre.

      Personnellement je suis furieux car on m’oblige plus ou moins à commettre des actes illégaux si je veux bien préparer ma mort comme moi je l’entends. A mon avis il faudrait revenir au statut d’avant 1900 et se libérer du contrôle de l’état sur l’accès à toute sorte de substance.

      Côté technique il n’y a pas vraiment de problème quand on veut se donner la mort. C’est d’ailleurs enseigné dans les écoles militaires et de navigation. Bref il faut lire les fiches techniques de diverses substances et gazes qu’on peut toujours acheter librement. On y trouve la déscription des dangers qu’on recherche. Les diabétiques possèdent généralement tout ce qu’il faut.

      Il y a des procédés à éviter. Par mon père je sais qu’en 1945 pendant les derniers jours avant l’entrée de l’armée rouge dans Berlin les capsules de cyanure trainaient sur le tables de l’office du parti nazi comme les smarties sur une table d’anniversaire des gamins. N’en prenez pas. C’est bon pour les Göring et Goebbels car c’est efficace et rapide mais ce n’est pas une belle mort.

      Il faut du courage et de l’imagination pour entreprendre les préparatifs nécessaires pour le moment quand on sera en situation de vouloir partir en toute liberté. Sans doute c’est à cause de ce défi que les esprits moins libres souhaitent le soutien d’un médecin. Le curé ne fera pas l’affaire.

      Il y a une solution technique pour tout, alors il faut surtout défendre la liberté de vivre à sa guise, dans un contexte solidaire, sans exclusion sociale et à l’abri de la pauvreté. Après, la mort c’est facile et on y n’échappe pas de toute facon.

      Enfin je constate qu’on a encore inventé un néologisme pour nous désolidariser. Le « validisme » est le petit frère mal coiffé du « classissme » qui nie les forces révolutionnaire qui sont le résultat de l’antagonismes des classes sociales.

      Nous ne sommes pas des victimes d’ « ismes » particuliers mais nous font tous partie de classes dont les relations conflictuelles s’expliquent par des intérêts économiques et de pouvoir et se résolvent par la lutte des classes. Dans ce contexte on voit bien que l’euthanasie est la manière la plus radicale d’éliminer ce qui reste de de l’homme quand on ne peut plus en tirer profit en l’exploitant au travail ou se remplir les poches par les soins coûteux.

      L’euthanasie est un crime et une forme particulièrement brutale de la lutte des classes à la fois. La notion de « validisme » cache cette vérité dans un brouillard de baratin idéoligique.

      Gedenkstätte #Hadamar
      https://www.youtube.com/channel/UC6BAw-6yJBeKYDwr33qeYXA

      #suicide #euthanasie #justice_sociale #maladie #idéologie

    • Côté technique il n’y a pas vraiment de problème quand on veut se donner la mort. C’est d’ailleurs enseigné dans les écoles militaires et de navigation. Bref il faut lire les fiches techniques de diverses substances et gazes qu’on peut toujours acheter librement. On y trouve la déscription des dangers qu’on recherche. Les diabétiques possèdent généralement tout ce qu’il faut.

      A ma connaissance le livre « suicide mode d’emploi » est toujours interdit et le problème qu’il soulevait, à savoir que les connaissances en la matière sont très parcellaires et conduisent à des ratés catastrophiques (souffrance avant de mourir ou bien handicap à vie), est toujours d’actualité.

    • Qui référence Christine Boutin ? On peut pas dire que ça saute aux yeux… Les références réelles centrales de l’article étant :
      https://www.editionsladecouverte.fr/de_chair_et_de_fer-9782348067778
      – l’ONU https://www.ohchr.org/en/press-releases/2021/01/disability-not-reason-sanction-medically-assisted-dying-un-experts
      – plusieurs associations d’handicapés, France et Canada https://tvndy.ca/a-propos/faq-2

    • Un peu hypocrite de s’en remettre à la « sédation profonde et continue ». Ça signifie laisser crever la personne de faim et de soif.

      Edit pour la suite :
      L’aspect idéologique religieux n’est pas soulevé. Souvent le suicide d’un proche était masqué car la morale religieuse dit que la mort ne nous appartient pas et que le suicide est interdit.
      Pour les amis que j’ai accompagné dans leur longue descente dans la souffrance et qui m’ont demandé de les aider à partir, j’ai refusé cet acte qui m’aurait hanté. N’empêche que pour S. on a fini par lui trouver sa #trousse_de_liberté que lui a glissé son médecin après qu’on ait fait le siège de son bureau à l’hôpital. C’était un soulagement
      pour elle de savoir qu’elle détenait son choix (même si elle ne l’a pas exercé), et aller en Suisse était trop cher.

      Après ce n’est pas être « pour » l’avortement ou « pour » l’euthanasie mais bien pour le droit inconditionnel à l’avortement et à (EDIT) <strike>l’euthanasie</strike> au droit à mourir dignement et définitivement à la phrase « mon corps m’appartient ».

    • @touti : Oui, c’est ce que j’ai vu aussi : l’autrice dit s’opposer à l’euthanasie et développe tout un argumentaire, pour conclure qu’en fait on n’en aurait même pas besoin, puisqu’on peut déjà :

      En appliquant les directives anticipées, en développant les soins palliatifs et la sédation profonde et continu jusqu’au décès, a-t-on besoin de recourir au suicide assisté ou à l’euthanasie ?

      Et plus haut, il est même indiqué, sous forme de citation :

      “La loi reconnait que l’évolution des évènements peut certainement être influencée par la sédation sans que le contrôle absolu du moment du décès ne fasse tomber cette pratique dans le champ de l’euthanasie. La nutrition artificielle et l’hydratation constituent un traitement et pourront donc être arrêtés comme tout autre traitement.”

      Bref : non à l’euthanasie, qui ne serait pas « de gauche », mais oui à la sédation profonde et controlée et en te laissant mourrir sans eau ni nourriture, parce que pour le coup c’est un « soin palliatif » donc « de gauche ».

      –-----

      Plus globalement, je suis mal à l’aise avec cette posture (que je vois souvent revenir ici) : l’idée serait qu’en fait, les gouvernements (et les assureurs privés !) qui souhaitent légaliser l’aide active à mourir, ce qu’ils veulent en vrai, c’est euthanasier massivement les handicapés et les gens qui coûtent trop cher ; il y a là dans ces raisonnements des assertions borderline.

      Sinon, il y a des gens qui souhaitent une mort digne, parce que leur vie quotidienne est déjà une torture. L’idée qu’on leur oppose une lecture théorique qui concerne d’autre qu’eux-mêmes, au motif que ce ne serait « pas de gauche », ça me semble problématique (si on tient à recourir aux « -ismes », c’est pas loin d’une forme de validisme en soi).

    • Sinon, il y a des gens qui souhaitent une mort digne, parce que leur vie quotidienne est déjà une torture. L’idée qu’on leur oppose une lecture théorique qui concerne d’autre eux-mêmes, au motif que ce ne serait « pas de gauche », ça me semble problématique.

      C’est justement là qu’il y a une lecture politique : avoir une vie quotidienne pourrie peut avoir des facteurs individuels… et beaucoup sociaux. Dans une société très inégalitaires (et de plus en plus inégalitaire), on ne peut pas sortir tous les facteurs sociaux qui pourrissent la vie quotidienne des gens. Et que si c’était égalitaire ou tout du moins moins inégalitaire, beaucoup de gens pensant au suicide n’y penseraient plus. Il en resterait bien sûr toujours, mais beaucoup beaucoup moins. C’est pas une nouveauté que le suicide est considéré comme un fait social et non un choix individuel… ça fait partie des sujets d’origine de la sociologie.

    • Alors on est à deux doigts de vouloir ré-interdire le suicide en général, parce que c’est un fait social provoqué par nos société inégalitaires. Le suicide provoqué par une souffrance mentale ou sociale, c’est le principe même du suicide, et généralement sans besoin d’une assistance médicale. (Comme le fait remarquer @alexcorp, ça ne veut pas dire non plus que c’est facile et que ça se passe correctement.)

      Parce qu’on pense que le suicide, qui existe déjà, de manière massive, et sans assistance médicale, que ce suicide est « social » et « politique », on veut maintenir l’interdiction d’une aide à mourir pour les personnes dont la fin de vie est une torture interminable, et qui voudraient avoir la liberté de partir dignement. Sans que cela change grand chose, par ailleurs, au suicide qui se pratique déjà sans aide médicale.

      À un moment, la tumeur qui dévore ton cerveau, c’est pas un fait social abstrait et tu devrais avoir le droit à ton choix individuel à ce propos.

    • La lecture politique est complètement nécessaire.

      C’est comme l’avortement : les bourgeoises pouvaient avorter dans de bonnes conditions, pas les gueuses.

      Actuellement, les bourgeois qui le désirent accèdent à l’assistance médicale nécessaire. Dans les milieux médicaux, c’est un secret de polichinelle.

      Mais justement, parlons-en des milieux médicaux, prompts (par exemple, encore) à jeter certaines qui ne souhaitent pas avoir d’enfants, tout en stérilisant de force celles dont ils estiment qu’elles ne devraient pas se reproduire.

      Les doubles standards riches/pauvres, blanc·he·s/racisé·e·s, valides/hadicapé·e·s sont légions et on veut me faire avaler que les macronistes — qui saccagent systématiquement la solidarité, l’éducation et la santé publiques — veulent étendre le pouvoir médical sur la fin de vie des « déconsidérés » de la macronie par pure bonté d’âme ou empathie ?

      Bien sûr que c’est politique.

      La vraie question, pour la tumeur en fin de vie, c’est de savoir si ça se passe différemment selon qui tu es et comment le corps médical considère ton groupe d’appartenance.

      Sur des cancers équivalents, l’accès aux traitements et aux type de traitements n’est pas équivalent selon qui tu es et d’où tu viens. Ce qui fait que les populations qui se confrontent à des fins de vie pourries ne sont pas équivalentes. Et ça me pose problème dans le cadre d’une politique générale qui aggrave délibérément les conditions de vie de larges pans de la population.

      Je pense que dans ce débat qui n’a pas eu lieu (bah oui, le gus annonce son truc tout seul comme d’hab’ et rien que ça, ça participe à la suspicion fondamentale d’insincérité sur tout ce qu’il touche), il est aussi important de savoir d’où parle les uns et les autres.

      Tu ne vois pas l’affaire de la fin de vie du même œil selon que tu sais que tu auras une vieillesse potable ou une vieillesse de merde, de sacrifices et de manque de tout. Selon que tu sais parler au corps médical ou que tu sais que tes douleurs ne sont pas entendues, niées, voire dénigrées et donc pas prises en charge assez tôt.

      J’aimerais bien voir les profils sociaux des prises en charges tardives des maladies et de leur répercussion sur l’espérance de vie ou le confort de fin de vie.

      Et tout ça sur fond de service public de la santé en mode dégradé depuis des années.

      Sérieusement ?
      Comment évacuer tous ces paramètres ?

    • C’est comme l’avortement : les bourgeoises pouvaient avorter dans de bonnes conditions, pas les gueuses.

      Oui mais la réponse « de gauche » dans le cas de l’avortement n’est pas : « puisque l’accès à l’avortement est inégalitaire, maintenons l’interdiction de l’avortement ». Ce qui est pourtant la position de ce texte pour l’euthanasie. (En suivant cette même logique, on peut parfaitement prétendre que l’avortement est un outil d’eugénisme social, et donc « pas de gauche ».)

    • La vraie question, pour la tumeur en fin de vie, c’est de savoir si ça se passe différemment selon qui tu es et comment le corps médical considère ton groupe d’appartenance.
      Sur des cancers équivalents, l’accès aux traitements et aux type de traitements n’est pas équivalent selon qui tu es et d’où tu viens.

      Alors voilà qui me rappelle un évènement survenu il y a une petite vingtaine d’années dans ma famille. Le gars, la soixantaine, récidive d’un cancer dermatologique survenu dix ans auparavant. Le truc incurable finit par s’attaquer à sa colonne vertébrale. Après moults opérations toutes plus ou moins hasardeuses, il lâche l’affaire mais s’entête à vouloir mourir chez lui et non à l’hôpital. Il a fini sa vie sur son lit en hurlant de douleurs pendant des jours, son médecin « de famille » (c’est comme ça qu’on disait à l’époque) ne lui ayant prescrit que des patches à la morphine alors qu’il était tout à fait envisageable même contre sa « volonté » de le faire hospitaliser en soins palliatifs (puisque il y avait encore une unité à l’hosto du coin à l’époque). je vous prie de croire que, avant d’endosser le costume en sapin, le mec en a chié et ses « derniers instants » ont laissé un traumatisme durable parmi les personnes de son entourage proche.
      Donc avant de se demander quoi que ce soit, ce serait bien de savoir non seulement à quoi mais surtout à QUI on a affaire.

    • > On peut pas dire que ça saute aux yeux…

      J’ai lu l’article en diagonale, et ce qui m’a sauté aux yeux immédiatement c’est la question crypto-complotiste ("Demandez-vous pourquoi les mutuelles plaident pour l’euthanasie.") Suffit de cliquer pour voir qu’on est chez les anti-avortement—le nom de domaine déjà évente la chose. (Quand je parle de Boutin ça n’est pas pour faire un raccourci, elle y est citée nommément comme fondatrice.)

      Le simple fait d’employer le mot « euthanasie » dans ce débat est une manipulation.

    • Euh, d’où que ça vienne, ça me rassure un peu sur le fondement de mes idées :)

      Mais pourquoi donc une personne de @rezo a marché dedans et a référencé cet article ?

    • J’ai retranscrit le texte.
      (ouais, Insta, c’est nul.)

      Pourquoi être contre le projet de
      loi surl’euthanasie active, par @valeriereyrobert

      En mai 2024, l’Assemblée Nationale débattra du projet de loi sur la fin de vie.
      Un-e patient-e pourra faire une demande d’euthanasie, qui, sous 15 jours, sera validée ou non par une équipe médicale.
      lel aura alors une prescription pour un médicament létal qu’iel pourra absorber seul-e.

      – Les personnes grosses sont moins bien soignées (revue Obesity, 2021)
      – Les personnes atteintes d’une pathologie mentale ont une espérance de vie inférieure de 15 ans dues à des pathologies pourtant détectables (cancers, problèmes cardio vasculaires). En 2020, en France, les malades du Covid schizophrènes ont été moins admis en soins intensifs et ont connu une mortalité supérieure. (Guillaume Font, 2021).
      – Aux États-Unis, les femmes noires sont autant atteintes par le cancer du sein que les femmes blanches mais en meurent bien davantage.

      – Une étude française a montré qu’aux urgences, à symptômes identiques, les hommes sont pris plus au sérieux que les femmes et les blanc-he-s davantage que les non blanc-he-s. (Fabien Coisy, 2023)
      – Les personnes handicapées ont souvent des parcours de soins qui ne sont pas adaptés et qui donc peuvent diminuer leur espérance de vie. Ils subissent des discriminations et des soins forcés.

      Un rapport de la Cour des Comptes de juin 2023 montre combien le budget consacré aux soins palliatifs est insuffisant.

      La moitié des patient-es concerné-es n’a pas accès aux soins palliatifs et la majorité des soins proposés sont à l’hôpital, ni en ehpad, ni à domicile.

      20 départements français n’ont aucun service de soins palliatifs.

      L’Aide Médicale d’État va encore être réformée ce qui entraînera une moindre qualité de soins pour les concerné-es. Des médicaments et des offres de soins sont régulièrement déremboursés.

      Les exemples pourraient être multipliés.
      La race. la classe et le genre (liste non exhaustive et cumulative) jouent un rôle important dans l’accès aux soins.
      Si l’on est moins bien soigné-e, on est également moins bien accompagné-e dans l’agonie.

      En 2019, ma mère a déclaré un cancer du pancréas et est morte 9 mois plus tard, à domicile, après une agonie extrêmement douloureuse. Elle a demandé à mourir lorsque les doses d’antidouleurs n’étaient pas adaptées mais aussi lorsqu’elle jugeait ne plus être « digne » (problèmes d’incontinence par exemple).

      « Mourir dans la dignité » est un construit social et doit être interrogé.

      A nous répéter qu’il y a des vies qui valent d’être vécues et d’autres non, des situations physiques “indignes”, nous poussons aussi celles et ceux qui y sont confronté-es à considérer que leur vie ne vaut pas la peine d’être vécue.

      Lorsque nous aurons mis à plat le validisme, la grossophobie, le sexisme, le racisme, l’homophobie ou encore la transphobie, alors nous pourrons discuter de l’euthanasie.

      Lorsqu’un-e malade se sera vu-e proposer toute l’offre de soins disponibles pour le soulager de ses douleurs physiques et psychiques alors iel sera en pleine capacité de décider si oui ou non iel souhaite encore être euthanasié-e.

      Dans un système capitaliste, sexiste, validiste et
      raciste, toute loi sur l’euthanasie est eugéniste.

    • Et cet article et son autrice n’a pas de rapport à priori avec l’asso de Boutin, c’est UN des liens dans son article qui pointe sur ça, et il se peut plutôt (bénéfice du doute par défaut) que ce soit elle qui n’ait pas été regardante.

      Tous les autres liens comme déjà dit c’est un rapport de l’ONU (défavorable), et des assos handi, anti-validistes. On ne voit pas le rapport avec des pro-vies cathos donc.

      L’autrice est une communicante/marketeuse parisienne, qui tient un podcast sur l’écologie et l’effondrement.

    • Lorsque nous aurons mis à plat le validisme, la grossophobie, le sexisme, le racisme, l’homophobie ou encore la transphobie, alors nous pourrons discuter de l’euthanasie.

      @monolecte Ce qui revient à écrire que tant que nous ne vivrons pas dans une société parfaite, la possibilité de se faire aider pour mourir dignement devra rester interdite. Tant pis pour les gens torturés à mort par un cancer en phase terminale.

    • J’ai tendance à penser que le problème principal, comme l’évoque @monolecte, c’est que cette (peut-être) future loi est portée par quelqu’un de parfaitement cynique et incapable de la moindre empathie, et autant dire que je comprends la méfiance généralisée... Mais pour le coup, le sieur en question a parlé « d’aide à mourir » et non pas d’euthanasie. Et cela fait des années que le sujet est là, on ne peut pas dire qu’il amène ça comme un cheveu sur la soupe (le problème, encore une fois, est que tout ce qu’il touche se transforme en merde). Or tout le débat actuel (à gauche) porte sur grosso modo une peur de « l’euthanasie des handicapés » (et à ce stade on n’est donc plus très loin du point godwin) et on voit donc maintenant des arguments dignes de la famille de Vincent Lambert nous être opposés.
      J’ai 2 auteurs en tête qui me viennent sur le sujet : Martin Winckler et Claude Guillon (le fameux auteur de « suicide mode d’emploi ») et pour moi le droit à mourir est fondamentalement une idée de gauche, profondément humaniste et anti-religieuse.

      Lorsque nous aurons mis à plat le validisme, la grossophobie, le sexisme, le racisme, l’homophobie ou encore la transphobie, alors nous pourrons discuter de l’euthanasie.

      Moi aussi ça me fait tiquer. Exactement du même tonneau que « quand on aura réglé le problème de la lutte des classes alors on pourra parler sexisme, racisme etc. ».

    • Le livre est peut-être interdit mais accessible : Claude Guillon, Yves Le Bonniec, Suicide, mode d’emploi : Histoire, technique, actualité, 1982, ISBN : 9782852090002,2852090007

      Après l’euthanasie c’est du meurtre institutionnalisé, c’est son essence.

      Sichten und Vernichten - Psychiatrie im Dritten Reich
      https://www.youtube.com/watch?v=SpRYvOkIfkI

      Phrase clé du film documentaire : Jamais le pouvoir des médecins n’a été aussi total que sous le nationalsocialisme allemand.

      Actuellement on nous prépare un retour à l’époque guerrière et fasciste qui verra resurgir ce type d’extermination sous un prétexte ou un autre. Vous avez dit Gaza ? N’exagérez pas, les arguments des meurtriers se ressemblent, mais ceux d’aujourd’hui agissent à une autre échelle. Je le répète : En comparaison avec les SS-Totenkopfverbände Tsahal et Hamas ne leur arrivent pas à la cheville.

      Voilà pour la dimension politique. Sur plan individuel les questions se posent d’une manière assez différente.

      Après ces constats nous sommes dans l’obligation morale de défendre notre liberté de vivre dignement.

      L’euthanasie c’est mal, le suicide par contre se justifie objectivement dans plusieurs situations :

      – A la fin d’une longue et bonne vie on se sent heureux mais fatigué.
      – On est moribond et souffrant.
      – On veut échapper à la torture.
      – On veut éviter une mort plus horrible que le suicide bien fait.
      – On est con.

      La souffrance toute seule par contre ne justifie jamais le suicide. Elle peut nous entraîner dans un état où on ne souhaîte que de mourir, mais c’est un leurre si on ne peut pas exclure la moindre possibilité d’amélioration aussi temporaire qu’elle soit.


      Épicure et son tetrapharmakos (τετραφάρμακος)

      J’avoue que c’est un jugement moral suivant le principe que nous ne sommes pas sur terre pour ne pas souffrir. Des plus épicuréens que mois abandonneront la vie plus facilement ;-)

      Une dernière remarque : Il ne faut jamais oublier que le fascisme et le libéralisme partagent la même idée de l’homme qui est un loup pour l’homme. Puis l’impérialisme et le colonialisme avant lui ont fourni toutes les preuves nécessaires pour les appeller ce qu’ils sont : des systèmes meurtriers façonnés par des hommes prêts à sacrifier des peuples entiers sur l’hôtel de l’idéologie de la prospérité pour quelques élus. Heureux qui sait encore faire la différence entre responsabilité individuelle et forces historiques. Les autres niais seront les bourreaux de leurs semblables au service des seigneurs qui ont déjà malmené leurs ancêtres.

  • Récit d’une #fin_de_vie face aux insuffisances de l’#hôpital : « Je m’épuise dans des démarches qui n’aboutissent pas. Mon père, lui, s’enfonce »
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/01/16/recit-d-une-fin-de-vie-face-aux-insuffisances-de-l-hopital-je-m-epuise-dans-

    Vanessa Schneider, grand reporter au « Monde », raconte les derniers mois de son père, l’écrivain et psychanalyste Michel Schneider, #mort d’un cancer en juillet 2022. A l’heure où la question de la fin de vie s’impose dans le débat public, ce récit en dit long sur la faillite de la prise en charge des patients condamnés.

    #santé #soins_palliatifs #médecins #soignants #société_d'abandon

    • attention : récit terrorisant

      Il rappelle la chronologie des soins : l’ablation de la tumeur, puis les douze séances de chimiothérapie, la rechute, les essais d’immunothérapie, le traitement expérimental de chimiothérapie injectée directement dans le foie. Mon père détient le record de séances de chimio de Paul-Brousse, et cette « performance » lui arrache un sourire. L’oncologue explique ce qu’il va se passer dans les jours et les semaines à venir : une jaunisse va probablement se déclarer, les organes vont lâcher les uns après les autres, les atteintes neuronales vont se multiplier. Il me glisse : « Il ne passera pas l’été. »
      J’insiste, puisqu’il est déjà debout pour nous dire au revoir : « Et maintenant, on fait quoi ? » Et c’est là, à cet instant précis, que la folie commence.

      « Il rentre chez lui », répète le médecin. Comme ça, sans rien, ni médicaments ni soins à domicile ? Mon père ne peut quasiment plus se lever ni marcher sans aide, il dort presque toute la journée, il a perdu énormément de poids, son ventre est gonflé par l’eau car les reins ne font plus leur travail, il manifeste des signes de confusion, s’emmêle dans les jours et les dates. L’oncologue finit par proposer une consultation par téléphone quinze jours plus tard. « En cas de problème, appelez les #urgences. »

      https://justpaste.it/6l32s
      edit par chance, Godard était suisse et pas fauché

    • Les folles économies de la famille Ciotti au détriment de la Sécurité sociale
      https://www.mediapart.fr/journal/france/160123/les-folles-economies-de-la-famille-ciotti-au-detriment-de-la-securite-soci

      Depuis plus de 18 ans, la mère d’Éric Ciotti occupe une place dans un hôpital de la vallée de la Vésubie pourtant réservé à des soins de courte durée. Conséquence : la prise en charge est entièrement assumée par la Sécurité sociale, avec au moins 500 000 euros d’économies à la clé pour la famille Ciotti. Le nouveau patron des Républicains n’a pas répondu à nos questions.

    • Le récit terrorisant correspond peu ou prou a ce que j’ai vécu cet été en accompagnant la fin de vie de mon père. Merci pour la version complète.

      « Autant sa maladie a été admirablement traitée, autant sa fin de vie aura été honteusement négligée. »

      C’est exactement ce que je ressens aujourd’hui.

  • Faire les deuils - Crêpe Georgette
    http://www.crepegeorgette.com/2020/09/23/faire-les-deuils

    J’ai beaucoup hésité à écrire sur ce sujet (la maladie de ma mère, son agonie puis sa mort en juillet) et à le publier. Si j’ai l’habitude de prendre la colère comme moteur d’écriture, je ne suis pas sûre que les sentiments qui m’animent aujourd’hui me réussissent tout autant. Je ne suis pas non plus habituée à parler publiquement d’évènements aussi intimes. Mais je me dis que cracher tout cela publiquement me permettra de, peut-être, enfin réussir à dormir au lieu de ressasser ce qu’il s’est passé.

    Je me dis également que lorsque j’ai appris la maladie de ma mère et que j’ai cherché à me préparer à sa mort (ce fut un échec), j’aurais voulu (et non pas aimé) lire ce que je vais écrire là. Dans tout ce merdier, si je peux en tirer quelques analyses, si cela peut être utile à quelqu’un, toute cette souffrance n’aura peut-être pas été totalement vaine.

    Enfin les articles autour de Alain Cocq ont été l’ultime déclic. Cocq souffre d’une maladie dégénérative très douloureuse. Après le refus de Macron de lui permettre d’être sédaté jusqu’à sa mort, il a choisi d’arrêter ses soins, de boire et de manger. Tout ceci fut extrêmement médiatisé. A bout de souffrances, Cocq a décidé d’accepter les soins palliatifs et a repoussé ensuite sa décision de mourir. Et là il n’y avait plus aucun media s’intéressant à lui. J’aurais aimé savoir si Cocq avait, avant sa décision de mourir, bénéficié de soins palliatifs de qualité et si sa douleur avait convenablement été prise en charge. C’est une chose de vouloir mourir, c’en est une autre que de le vouloir parce que la médecine ne gère pas vos douleurs alors qu’elle peut le faire.

    #agonie #soin #soins_palliatifs #validisme #fin_de_vie #sédation_terminale

  • Aujourd’hui j’ai intubé mon premier patient Covid-19 et je ne le souhaite à personne | Le Huffington Post
    https://www.huffingtonpost.fr/entry/aujourdhui-jai-intube-mon-premier-patient-covid-19-et-je-ne-le-souhai

    Aujourd’hui j’ai honte.

    Honte d’avoir râlé sur ce confinement qui m’oblige à supporter quelques semaines de plus mon vieux canapé que je rêvais de changer.

    Honte d’avoir hésité à filer sur le chantier de ma maison avant le début du confinement en me disant que les confrères étaient assez nombreux pour se débrouiller sans moi.

    Honte de m’être plus inquiété des répercussions du confinement sur mon activité Airbnb que des conséquences du virus.

    • J’hallucine de voir les réanimateurs débordés, obligés de refuser des patients ayant en temps normal les critères pour être admis en réanimation.

      J’hallucine de voir ces patients qui se dégradent à une vitesse impressionnante, que tu intubes en speed avec une saturation dans les chaussettes.

      J’hallucine de voir ces patients à qui on demande de préciser leur directives anticipées (en haletant) pendant qu’on prépare le matériel d’intubation.

      Dans le Grand Est et en région parisienne :
      #réanimation #tri #directives_anticipées

    • Oui, @mad_meg, mais pas seulement puisque cela comporte aussi un aspect essentiel lorsqu’on passe par la case médecine avant le décès, les soins en fin de vie, dont le refus de l’acharnement thérapeutique

      Directives anticipées : dernières volontés sur les soins en fin de vie
      https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32010

      Toute personne majeure peut, si elle le souhaite, faire une déclaration écrite appelée directives anticipées pour préciser ses souhaits concernant sa fin de vie. Ce document aidera les médecins, le moment venu, à prendre leurs décisions sur les soins à donner, si la personne ne peut plus exprimer ses volontés.

      Voir le site de l’association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD)
      https://www.admd.net

      Et leur modèle de directives anticipées
      https://www.admd.net/qui-sommes-nous/une-association-votre-service/notre-fichier-des-directives-anticipees.html

      Ces directives peuvent comporter un ou des refus de traitement. Au vu de l’épidémie de Covid-19 pour laquelle on évoque davantage le tri en amont qui peut empêcher la réa, ayant tendance à penser que la morphine ou un de ses dérivés peut être préférable à des semaines d’intubation, je me demandais ce qu’il en était d’éventuels refus de réanimation. Il semble que ce soit possible.

      La haute autorité de santé écrit en effet
      https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2016-03/directives_anticipees_concernant_les_situations_de_fin_de_vie_v16.pdf

      Que vous soyez en bonne santé, atteint d’une maladie grave ou non, ou à la fin de votre vie, vous pouvez exprimer vos souhaits sur la mise en route ou l’arrêt de réanimation, d’autres traitements ou d’actes médicaux, sur le maintien artificiel de vos fonctions vitales et sur vos attentes. Vous pouvez en parler avec votre médecin pour qu’il vous aide dans votre démarche ; il pourra vous expliquer les options possibles, en particulier le souhait ou le refus d’un endormissement profond et permanent jusqu’à la mort.

      #soins_en_fin_de_vie #personne_de_confiance #refus_de_traitement #prise_en_charge_de_la_douleur #soins_palliatifs

    • Merci pour les précisions @colporteur
      Du coup ton choix c’est de souffrir ou pas avant de crever puisque

      J’hallucine de voir les réanimateurs débordés, obligés de refuser des patients ayant en temps normal les critères pour être admis en réanimation.

      Ce choix on l’aura pas très longtemps puisque on manque de curare, d’hypnotique et d’anesthésique…

      et tu peu choisir aussi comment on va racketter ta famille une fois qu’on t’aura mis à la morgue et peut être bientôt choisir la couleur du soylent que Macron va te faire devenir….

    • J’aime pas trop le caractère moralisateur de ce texte qui s’adresse presque uniquement à « les gens » qui sont de gros cons égoïstes, comme chacun·e sait. Pardon de ne pas pouvoir t’aider à intuber des patient·es, bonhomme, mais ce n’est pas mon boulot et j’aurais eu envie de me payer une belle carrière que le numerus clausus ne me l’aurait pas permis, sans papa-maman qui me payent les cours du soir. (Oui, je sais, pour les prols il reste aide-soignant·e et pour la classe moyenne infirmièr·e, mea culpa de ne pas avoir fait d’études médicales.)

      Alors qu’il y a bien des propos politiques à tenir sur ce sujet.

      Je réalise à quel point nous avons été arrogants d’imaginer être épargnés grâce à un système de santé meilleur que celui des Chinois ou des Italiens.

      (...)

      Je réalise que nous ne sommes toujours pas prêts à affronter la seconde vague qui s’annonce avec la fin du confinement.

      D’abord cette arrogance, c’est pas que la nôtre mais pas mal celle de #connards qui allaient au théâtre le 6 mars, désertaient leur poste de ministre de la santé ou de conseillère santé à l’Élysée, faisaient se tenir des élections le 15 mars et toute cette #incurie qu’on n’oubliera pas. À côté de ça, avec peu d’informations et beaucoup de réassurance pour pas ralentir la croissance économique, je n’ai pas l’impression de puer l’arrogance parce que je ne me rendais pas compte de la gravité du truc.

      Et un des problèmes, c’est peut-être parce que (sans le comparer à la Chine et à l’Italie mais en valeur absolue) notre système de santé n’est pas à la hauteur, sous-financé depuis des décennies. Et l’autre bourge de docteur qui sauve des vies ne s’en est pas encore aperçu.

    • Ben merdalors ! Les « braves-officiers » de l’économie de marché en mode exploitation capitaliste viendraient-ils de s’apercevoir que sans leurs subalternes, ils ne sont « rien », eux non plus ? Je les trouve bien mignons, tous ces grands « pontifieurs », accusateurs du « on » et du « nous » alors qu’ils se gardaient bien de ramasser la merde et d’éponger le vomis quand à la fin de leurs (longues) études financées par papa, ils ne pensaient qu’à leurs carrières. Mais une carrière en mode petit bourgeois urbains « gentrifiés », hein ? Pas question de faire le job dans les déserts médicaux parce que les bouseux ou les banlieusards, les relégué·es, et bien qu’ils se démerdent après tout ... Et voilà que désormais, « ils ont peur » et ils sont « en colère », rhôôô, les pauvres choux ... Voilà qui est plaisant, tiens !...
      C’est aussi pour ça que j’applaudis pas « les soignants » à 20h quotidiennement. J’aimerais pouvoir leur déverser des seaux de « bren » sur leurs sur-blouses, à tous ces paltoquets qui viennent chouiner dans le giron de la presse aux ordres. Parce finalement, « l’ordre républicain », ça leur allait si bien quand ils se scandalisaient que les « gueux » fracassent des vitrines et saccagent l’arc de triomphe, persuadés qu’ils étaient de vivre « en démocratie ». La démocratie vient de leur chier sur les chausses ? Qu’ils se démerdent ! Ils n’auront pas ma compassion ces petits branleurs biberonnés aux « valeurs » de la « start up nation »...

      [edit] j’avais pas encore lu l’article, seulement les commentaires (et mis quelques tags pour mémoire).

    • @antonin1 : oui,oui, t’inquiète. Je pourrais t’en raconter des bien trash, vu que Madame fut pendant de longues années l’humble et dévouée servante en tant que secrétaire médicale de ces « braves-soignants » dans un cabinet de quelque sept « praticien·nes »...
      Sinon une frangine aussi, qui bossait en tant qu’infirmière employée par un centre de « soin » géré par l’ADMR de son bled. Elle aussi bien cassée par des conditions de travail infernales et qui a fini sa carrière en invalidité à l’âge de 60 ans. (Prothèses sur chaque genou)
      Enfin, quand je mets en pétard, c’est surtout et uniquement contre celles et ceux qui tiennent le haut du parking. Quoique la hiérarchisation des tâches fait que tu as aussi des petit·es cheffaillon·nes qui peuvent bien te pourrir la vie quand tu es assigné·e au bas de l’échelle. Le « monde » du travail quoi, en mode exploitation capitaliste.

  • COVID-19 : LES VIEUX SACRIFIÉS

    « Je me suis dit que j’avais du mal comprendre. Je cherche confirmations sur les sites professionnels et j’en trouve facilement. Ils font état de la prise en injection de #Rivotril dans les #Ephad, qui vise à tuer les patients avant qu’ils ne soient transportés pour mourir en hôpital et ainsi en éviter l’#engorgement. On les achève par voie injectable, parce qu’il n’y a plus de place et de respirateurs. »

    #Denis_Robert sort en forêt pour raconter sa troisième semaine de confinement. Il décide de ne plus nommer ceux qu’il juge malfaisants, mais sort l’artillerie contre les communicants et les fachos, les méchants préfets et les fuyants agents régionaux de santé. Tous ceux qui cherchent à masquer une réalité douloureuse.

    https://www.youtube.com/watch?v=CTA7kY-aWEE&feature=youtu.be


    #vieux #covid-19 #coronavirus #décès #mort #pénurie #décès #mort #système_de_santé #tests #dépistage #masques #mensonge #mensonges #responsabilité #confinement #quartiers_populaires #autorisation #autorisations #abus_de_pouvoir #animaux #nature #hôpital #hôpitaux #médicaments #réserve_de_médicaments #vétérinaire #médicaments_vétérinaires #euthanasie #tissu_compassionnel

    Quelques citations :

    ping @reka @fil @simplicissimus

    Le texte dit-il à la fin, se trouve facilement sur le site de LeMedia... épisode 6... moi... pas vraiment trouvé...
    https://www.lemediatv.fr/articles/2020/assigne-a-resistance-regarder-le-cauchemar-droit-dans-les-yeux-VH9QtFoaSma

    #vieux

    –----

    A partir de la minute 5’30, référence au travail de @davduf (Allô, Place Beauvau) et parle de la #police en ces temps de confinement...

  • Tragédie à huis clos à la maison de retraite de Mougins | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/080420/tragedie-huis-clos-la-maison-de-retraite-de-mougins

    SANTÉ ENQUÊTE
    Tragédie à huis clos à la maison de retraite de Mougins
    8 AVRIL 2020 PAR HÉLÈNE CONSTANTY

    34 personnes sont mortes à la maison de retraite La Riviera de Mougins, dans les Alpes-Maritimes. Cet établissement est géré par le groupe #Korian fortement mis en cause pour son absence de réaction et d’information. Parmi les personnes survivantes, 33 sont atteintes par le virus.
    Dans cette maison de retraite sans charme, à la façade de béton couleur saumon, édifiée dans les années 1980 en bordure de la voie rapide qui relie Cannes et Grasse, le virus a tué avec la facilité d’un loup dans une bergerie.

    Le premier décès d’un malade atteint du Covid-19, intervenu le 15 mars en fin de journée, a été signalé à l’Agence régionale de santé (ARS) le 17 mars. Deux jours plus tard, l’établissement déclarait deux nouveaux décès. Conformément au Plan bleu, qui détaille les modalités d’organisation à mettre en œuvre en cas de crise sanitaire, la maison de retraite était dès lors considérée comme un foyer de propagation du virus.

    Elle était censée réorganiser les lieux, en séparant les malades des bien-portants, pour empêcher la contamination. Mais l’architecture du bâtiment, sur quatre étages autour d’un grand hall central, n’a pas permis pas de créer deux secteurs bien distincts, avec un secteur réservé aux malades du Covid-19 isolés de manière étanche des autres résidents.

    « Dès le 16 mars au matin, après le premier cas de Covid-19 confirmé, le directeur régional s’est rendu sur place pour s’assurer du renforcement des mesures barrières et de la mise en place du confinement en chambre. Un étage entier de onze lits a été réservé au quatrième étage pour accueillir les résidents symptomatiques », précise un porte-parole de Korian, dans une réponse écrite à nos questions. À partir du 20 mars, les nouveaux malades n’ont plus été testés.

    Pendant que l’épidémie se propageait, les familles ignoraient tout. Depuis le 6 mars, toute visite est interdite par Korian, qui a anticipé les recommandations faites par le gouvernement une semaine plus tard. Les proches des résidents, inquiets, n’ont plus que le téléphone pour prendre des nouvelles.

    La première semaine du confinement, Josy B. téléphone pour s’enquérir de l’état de santé de son père, âgé de 93 ans, hébergé à La Riviera depuis cinq ans. Une jeune femme lui répond que son père est très faible, qu’il est tombé et s’est ouvert le front, mais ne présente pas de signe de Covid-19. Josy, inquiète, insiste pour que la maison de retraite appelle le 15, comme le recommandent alors les autorités sanitaires. Son père est emmené aux urgences d’une clinique voisine, où il est testé positif au Covid-19. Il y décèdera quelques jours plus tard, le 22 mars.

    « Le lendemain, j’ai appelé la maison de retraite pour les prévenir. Un quart d’heure plus tard, je recevais sur ma messagerie le solde de tout compte ! » Choquée par le manque de soins dont son père a été victime et par la défaillance de Korian en matière de communication avec les familles, Josy envisage de porter plainte.

    Pendant quinze jours, les personnes âgées meurent donc en silence à La Riviera. Rien ne filtre du drame qui se joue à l’intérieur. Jusqu’à ce que Nice Matin, alerté par des riverains, mène l’enquête et se fasse confirmer par l’ARS des informations sur le nombre de décès… Mardi 31 mars, le quotidien consacre sa une à l’Ehpad de Mougins, sous le titre « Coronavirus, douze morts à la maison de retraite », illustrée de la photo d’un corbillard quittant l’établissement.

    Dès lors, Korian ne peut plus cacher la vérité. Le groupe cherche juste à limiter les dégâts en termes d’image, alors que son cours de bourse dégringole. En un mois, l’action Korian, cotée sur le marché parisien Euronext, a perdu la moitié de sa valeur, tombant de 45,50 euros le 19 février à 26,12 euros le 17 mars. Le 31 mars, elle est faiblement remontée à 28,28 euros. Une catastrophe pour le premier groupe privé de maisons de retraites médicalisées, dont le cours de bourse constitue l’alpha et l’oméga.

    « Toutes nos pensées vont vers les familles en ces moments douloureux. Elles sont informées régulièrement, dans une volonté de transparence […]. En revanche, dans l’information des familles, nous ne rentrons pas dans un décompte », explique un porte-parole du groupe, cité par Nice Matin le 31 mars.

    Ce que Korian ne dit pas, c’est que le directeur de l’Ehpad La Riviera et son médecin coordonnateur sont eux aussi malades et absents depuis le début de l’épidémie. « Dès la première semaine, c’était un bateau sans capitaine. Les personnes décisionnaires ayant dû être écartées, la prise de décision est devenue compliquée. Ils n’ont sans doute pas été relayés efficacement au niveau régional et national », déplore Richard Galy, le maire de Mougins. Lui-même médecin généraliste, l’élu LR a pris contact, dès le début du confinement, avec toutes les maisons de retraite de sa commune afin de connaître leurs besoins et coordonner les actions avec l’ARS. « Lorsque j’ai su que le virus circulait dans l’établissement, j’ai demandé que tout le monde soit testé, à la fois les résidents et le personnel. Mais rien n’a été fait jusqu’au 6 avril », constate-t-il.

    Le 31 mars, une réunion d’urgence a été organisée entre la préfecture, la mairie, l’ARS et Korian, au cours de laquelle le manque de réactivité de ce dernier a été pointé. « La réaction du groupe Korian n’a pas été aussi rapide que nous l’aurions souhaité face à la gravité de la situation. […] Des mesures barrières n’ont pas été prises », regrette Anne Frackowiak-Jacobs, la sous-préfète de Grasse, citée par Nice Matin.

    L’administration reproche notamment au gestionnaire de n’avoir pas donné suite à deux préconisations de l’ARS : solliciter l’équipe mobile d’hygiène d’un centre hospitalier voisin et recourir à un service d’hospitalisation à domicile, afin de soulager les équipes soignantes de l’établissement.

    Le groupe Korian assure avoir « sollicité à deux reprises une équipe mobile d’hygiène qui n’est jamais venue ». Le centre hospitalier de Grasse n’a pas souhaité répondre à nos questions à ce sujet. En matière d’hospitalisation à domicile, les ressources existaient pourtant, dans un département encore peu touché par le virus. Le 6 avril, il n’y avait que 80 patients atteints du Covid-19 en réanimation dans les Alpes-Maritimes et un total de 47 décès en milieu hospitalier.

    « L’Ehpad de Mougins n’a pas souhaité faire appel à nos équipes »

    À vingt kilomètres de Mougins, l’Institut Arnault-Tzanck dispose d’un service de pointe en matière d’hospitalisation et de soins infirmiers palliatifs à domicile, avec des équipes actives dans l’ensemble du département des Alpes-Maritimes, capables de prendre en charge des centaines de malades. « Dès que nous avons appris l’existence des premiers cas suspects de Covid-19, nous avons dit à l’ARS que nous étions disponibles et nous avons contacté tous les Ehpad pour leur proposer nos services. La direction régionale de Korian nous a répondu qu’elle “gérait”. L’Ehpad de Mougins n’a pas souhaité faire appel à nos équipes, ni pour les malades du Covid-19 qui auraient pu bénéficier d’hospitalisation à domicile, dans leur chambre de la maison de retraite, ni pour les #soins_palliatifs », précise Michel Salvadori, le directeur de l’Institut Arnault-Tzanck.

    Ce n’est sans doute pas un hasard si le virus a causé de tels ravages dans cette maison de retraite de Mougins en particulier. Au sein du groupe Korian, La Riviera a la réputation d’un établissement à problèmes, marqué par des difficultés de recrutement de personnel soignant et un absentéisme chronique, dans lequel les cadres ne restent pas longtemps. Pas moins de six directeurs s’y sont succédé ces cinq dernières années !

    L’un d’eux, Jean Arcelin, y a laissé tellement de plumes qu’il a quitté la profession, dégoûté, et écrit un livre poignant, Tu verras maman, tu seras bien (Éditions XO, mars 2019), dans lequel il témoigne de sa descente aux enfers. Ni Korian ni La Riviera ne sont nommés, mais c’est bien là que Jean Arcelin a pris ses fonctions, en juillet 2015 et travaillé jusqu’en 2017. Les circonstances mêmes de son arrivée sont révélatrices. Dans un chapitre intitulé « Les vers », Jean Arcelin raconte qu’il a pris son poste après le décès d’une résidente dans des conditions particulièrement sordides, survenu peu de temps auparavant. Un « événement indésirable grave » ou EIG, dans le jargon des Ehpad…
    Voici comment, selon l’auteur, la directrice régionale lui a présenté les faits : « La résidente était en fin de vie, avec des escarres au dernier stade. Les pansements ont été mal faits ou pas changés à temps. C’est l’été, les fenêtres restent ouvertes et des mouches sont entrées dans la chambre. La résidente a été hospitalisée parce que des vers sont apparus dans les plaies. Elle est décédée il y a quelques jours d’une septicémie à la clinique de Mougins. Comme je vous l’ai dit, la famille l’a appris par quelqu’un de l’équipe, parce que l’hôpital ne donne pas ce genre de détail. Évidemment, c’est mauvais pour l’image de l’établissement. »

    Selon Jean Arcelin, l’une des raisons des difficultés rencontrées à Mougins tient à la conception même du bâtiment, tout en hauteur, conçu pour des personnes âgées valides. Le lieu, qui a beaucoup vieilli, accueille maintenant des personnes de plus en plus dépendantes. Mais au-delà du problème architectural, c’est la gestion même du groupe Korian qu’il met en cause. Il dénonce la faiblesse des moyens alloués aux soins et à la nourriture, au regard des sommes versées par les résidents dans cet établissement (3 000 euros par mois en moyenne).

    « J’avais 120 résidents, mais seulement deux soignants la nuit, de 20 heures à 7 heures du matin. Il faut imaginer ce que ça donne, les résidents ayant un mauvais sommeil. Les deux tiers dorment, mais un tiers ne dort pas », dit-il dans un témoignage vidéo publié par l’Obs. Selon lui, la maltraitance dont sont victimes les personnes âgées est due au manque de moyens, lui-même causé par la recherche du profit par les établissements privés. « J’avais 4,35 euros pour nourrir un résident pendant 24 heures. Que l’on me demande de changer ma baguette de boulanger pour une baguette industrielle qui n’était pas bonne et causait des problèmes de déglutition m’était insupportable », dit-il. Dans le même temps, les directeurs subissent une pression permanente pour dégager une rentabilité maximale.

    Accablé par cette gestion contraire à son éthique personnelle, Jean Arcelin, victime d’un burn out, a préféré quitter la profession et retourner à son ancien métier de vendeur automobile.

    Après son départ, plusieurs directeurs se sont succédé. L’avant-dernier, touché par le Covid-19, était arrivé en août 2019. Depuis son arrêt médical, c’est le directeur régional qui a pris les rênes de la maison de retraite, dans le climat délétère causé par le virus.

    La règle dans le groupe est de ne pas communiquer sur la réalité de la situation sanitaire. « On a comme consigne de ne jamais répondre à un journaliste, dit encore Jean Arcelin dans un entretien publié par le site Atlantico. Quand un journaliste appelle, il doit passer par la cellule presse qui lui donne des éléments de langage, comme un homme politique. Qu’est-ce qu’il y a à cacher ? »

    Ce manque de communication revient comme un leitmotiv dans les récriminations des familles des résidents de La Riviera, comme Robert Fanna, un habitant de Mougins dont la mère, âgée de 89 ans, atteinte de la maladie d’Alzheimer et le frère, 65 ans, handicapé par une sclérose en plaques, y résident tous deux.

    « C’est voyant la une de Nice Matin, le 31 mars, que j’ai réalisé qu’il se passait quelque chose de grave. Pourtant, j’ai l’habitude de téléphoner tous les deux jours. On me disait que tout allait bien. J’ai immédiatement demandé à notre médecin de famille de se rendre sur place. Il était le seul à pouvoir entrer, puisque les visites des familles sont interdites. Il m’a dit que maman allait bien mais que mon frère était alité, fiévreux, délirant, avec des difficultés à respirer. Nous avons réussi à le faire hospitaliser au centre médico-chirurgical Arnault-Tzanck, où il a été testé positif au Covid-19. Il est entre la vie et la mort. J’en veux à Korian de nous avoir caché la vérité et j’espère que les familles dont les parents sont décédés iront porter plainte », dit Robert Fanna.

    Le porte-parole du groupe Korian conteste toute défaillance dans la communication avec les familles, tout en reconnaissant avoir rencontré des difficultés : « Le directeur de l’établissement a prévenu personnellement l’ensemble des familles de la présence du Covid-19 le 16 mars, après le diagnostic confirmé d’un premier cas. Ensuite, les situations individuelles ont été suivies au cas par cas, l’équipe habituelle étant elle-même pour partie touchée par l’épidémie et remplacée, ce qui a pu préjudicier à la régularité des contacts. Je précise que les équipes soignantes n’informent que le référent familial ou la personne de confiance, et non l’ensemble des membres de la famille. »
    À ce jour, une plainte contre X pour mise en danger de la vie d’autrui a été déposée auprès du procureur de la République de Grasse, qui a ouvert une enquête préliminaire. D’autres pourraient suivre.

    #Ehpad

  • A l’Ehpad des Quatre-Saisons, la vie et la mort au jour le jour
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/03/31/coronavirus-a-l-ehpad-des-quatre-saisons-la-vie-et-la-mort-au-jour-le-jour_6

    Les Quatre-Saisons, où vivent 65 résidents, fait partie des quelque 7 000 Ehpad que compte la France. Dans cette maison de retraite de Bagnolet, en banlieue proche de Paris, le quotidien a été totalement bouleversé, à partir de la mi-mars, par les mesures de protection contre le virus. Les visites étant interdites, récit de la vie confinée.

    Florence Aubenas, grande reporter au « Monde », a passé les onze premiers jours de confinement avec des personnes âgées à Bagnolet, en Seine-Saint-Denis. Face à la progression du coronavirus, le personnel tente de faire face.

    « Vous seriez en droit de m’engueuler »

    Mardi 17 mars, 1er jour de confinement. Le couple s’est planté sur le trottoir, juste devant la façade. Ils doivent avoir la cinquantaine, et c’est elle qui se met à crier la première, mains en porte-voix : « Maman, montre-toi, on est là ! » Aux fenêtres, rien ne bouge. Alors le mari vient en renfort, mimant une sérénade d’une belle voix fausse de baryton : « Je vous aime, je suis sous votre balcon ! » Un volet bouge. « Maman » apparaît derrière la vitre ; ses lèvres remuent, mais elle parle trop doucement pour qu’ils l’entendent. « Tu as vu ? Elle a mis sa robe de chambre bleue », constate madame. Puis ils ne disent plus rien, se tenant juste par les yeux, eux en bas et elle en haut, qui agite délicatement la main, façon reine d’Angleterre. Quand le couple finit par s’en aller, elle fait pivoter son fauteuil roulant pour les apercevoir le plus longtemps possible.

    Cela fait près d’une semaine que les visites des proches sont interdites aux Quatre-Saisons, un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) public situé à Bagnolet, en Seine-Saint-Denis. Face à la pandémie, cette maison de retraite – un immeuble de trois étages construit dans les années 2000 – fonctionne désormais à huis clos, comme les 7 000 autres de France. Les animations extérieures – sophrologie, chorale, coiffeur ou pédicure – étaient déjà suspendues, mais le confinement général vient d’être déclaré de l’autre côté des portes aussi : plus de 60 millions de Français sont bouclés chez eux à travers le pays.

    Il est 11 heures aux Quatre-Saisons, la décision vient d’être prise de mettre maintenant les administratifs à distance. Même l’accueil sera fermé. « De toute façon, on n’accueille plus personne. » La gestionnaire remet son manteau, la responsable des ressources humaines aussi. Elles devraient déjà être parties, mais elles grappillent quelques instants encore. Sale impression d’abandonner le navire. Il faut presque les pousser dehors.

    Désert, le hall prend des sonorités de cathédrale. Réunion dans la salle à manger pour ceux qui vont se relayer auprès des 65 résidents : les soignants, la cuisine, l’entretien, la direction, soit une petite quarantaine de personnes par rotation. Au stade 3, le plus haut de la pandémie, un masque de protection est obligatoire en Ehpad. La raison est double : le coronavirus s’attaque aux voies respiratoires, et les personnes âgées sont les premières victimes.

    « Je ne vais pas vous mentir : je n’ai pas de quoi vous distribuer des masques. Il faudra se débrouiller sans », commence Laurent Garcia, cadre de santé et bras droit du directeur, Edouard Prono. Il lui en reste 200 en réserve, de quoi tenir trois jours s’il fallait appliquer les consignes. Lui-même n’en porte pas, le directeur non plus. Qui comprendrait que la hiérarchie soit seule à pouvoir s’équiper ? « Vous seriez en droit de m’engueuler. A votre place, je serais même tenté d’aller mettre le souk dans mon bureau », continue Laurent Garcia. On rit, tout paraît irréel. « Pas grave, M. Garcia », lâche l’une. Lui, désespéré : « Mais si c’est grave. »

    Tous ici se souviennent des gants, des masques ou du gel hydroalcoolique, royalement distribués à l’accueil il y a quinze jours à peine, comme par temps de grippe ou de gastro. C’était le début de la contagion sur le territoire français. Une ou deux soignantes s’étaient aventurées dans le bus avec leur masque. On les avait toisées comme des extraterrestres, elles l’avaient retiré avant la fin du trajet. « On nous expliquait que le risque était faible, on ne se rendait pas compte », explique Laurent Garcia. Lui venait de renouveler sa commande, 500 masques, histoire d’assurer. Début mars , coup de fil du fournisseur : l’Etat a préempté tout le stock , plus rien de disponible, priorité aux hôpitaux et à la région Grand-Est, la plus touchée. Pour les Ehpad, même réponse évasive à tous : « C’est en cours. » Une infirmière des Quatre-Saisons coupe net : « On voit bien ce qu’ils pensent. Là-bas, ce sont des vieux, ils ont déjà vécu. »

    Par la grande baie vitrée, les résidents regardent passer des familles à rollers, un monsieur qui porte un gâteau cérémonieusement. Les petits dealeurs du quartier font des slaloms en quad au bout de la rue. Plus loin, un match de foot commence au stade des Rigondes. Les premiers moments du confinement respirent l’insouciance candide d’un long dimanche ensoleillé.

    Dans les couloirs de l’Ehpad, Rosa, l’animatrice, tend par réflexe la main à tous ceux qu’elle rencontre. Le directeur sursaute : « Ne me touchez pas, Rosa. Pensez aux consignes, pas de contacts. » Elle : « Vous êtes sérieux, M. Prono ? » Rosa a du mal à se dire que c’est pour de vrai. La veille du confinement encore, elle faisait la queue dans un restaurant algérien bondé vers Ménilmontant et se noyait avec délice dans la cohue du marché de Romainville. « Nous sommes en guerre », a répété le président Emmanuel Macron, la veille, à la télévision. Dans la salle de pause, un agent d’entretien approuve : « C’est vrai, au Leclerc de Rosny-sous-Bois, les gens se battent ».

    « Le Désert des Tartares »

    Mercredi 18 mars, 2e jour de confinement. Pas un bruit ne sort du bureau d’Edouard Prono. Depuis le matin, il est en train d’essuyer un bombardement terrible, mais silencieux, venu de sa boîte mail. Un collègue fait savoir que 16 résidents sur 20 sont touchés par le virus dans son établissement. Près de Montpellier, ils sont 47 sur 86, 3 en sont morts. De leur côté, les pompes funèbres viennent d’envoyer une note détaillée sur les types de cercueil autorisés pendant la pandémie. Deux possibilités seulement : « l’hermétique, qui permet un enterrement classique, mais il n’y en aura pas forcément assez vu la demande ». Ou alors, « le modèle simple, destiné à la crémation ». Conseil aux Ehpad : commandez déjà vos housses mortuaires. « Vous en avez pris ? », se risque à demander Edouard Prono à la docteure Claire Bénichou, médecin-coordonnateur de l’établissement.

    Sur un forum professionnel, des vieux de la vieille échangent en boucle des messages, dans lesquels chacun assure n’avoir « jamais vu ça ». Edouard Prono traduit immédiatement : « On n’arrivera pas à accompagner tout le monde. » Lui, c’est un garçon timide et bien élevé, 34 ans, jeune comme beaucoup de directeurs d’Ehpad aujourd’hui. « Il y a une question de génération. Comment on fait quand on vient de sortir de l’école et qu’on se prend ça de plein fouet ? »

    La porte de son bureau s’entrouvre : Laurent Garcia, le cadre de santé, annonce que la pharmacie ne livrera pas les 15 litres de gel hydroalcoolique. La commande a été oubliée, et plus rien n’est disponible maintenant. Les gants ? Fini aussi, ou presque. D’heure en heure, les infos changent, ordres et contre-ordres se succèdent. Le ministère de la santé vient d’envoyer la troisième version de son guide méthodologique, très strict au départ, la doctrine officielle s’assouplit à mesure que les stocks fondent au niveau national. En Ehpad, les masques ne sont finalement plus obligatoires au stade 3 de la pandémie, sauf infection déclarée. « Bref, pas de masques, mais des housses mortuaires : vous voyez le message ? », s’étrangle Laurent Garcia.

    Assis à son bureau, très pâle et très droit, les mains sur le clavier de l’ordinateur, Edouard Prono se met à pleurer. « Excusez-moi, ça ne m’arrive jamais. » Les alertes de messages carillonnent l’une derrière l’autre sur son téléphone, mais il ne les entend plus. « On est dans Le Désert des Tartares, à attendre les mains nues que la catastrophe nous tombe dessus. »

    Au troisième étage, Mme X., 90 ans, vient de se mettre à tousser, un des symptômes les plus classiques du virus. L’accès à sa chambre est aussitôt limité. « On ne va pas se mentir : il faut se préparer à avoir des cas. Si ça vous stresse, je m’occuperai moi-même de Mme X. », annonce Laurent Garcia à l’équipe. Dans un coin, la télévision psalmodie le nombre de décès du jour, en France et à travers le monde. Zineb sent ses jambes se dérober. Elle doit s’asseoir : « Il faut déjà que je meure, moi qui n’ai jamais voyagé, jamais profité de la vie, même pas été à l’école. » Elle a 45 ans, elle est agent d’entretien. Mais déjà, elle se relève, son chariot cahote vers les chambres, dans un tintement de vaisselle. Par-dessus son épaule, elle lance à Stéphanie, son binôme : « Tu viens, ma bichette ? » Eternels oubliés d’un secteur médical lui-même en crise, les Ehpad ont toujours manqué de tout – personnel, salaires, budgets. « On est habitués à passer derrière, à prendre sur nous. »

    Dans la salle à manger, les résidents attaquent la paella. « Et mon verre de rouge ? Marre de cette baraque, marre de ce putain de virus », tonne Daniel, bretelles noires tendues sur le ventre. Un serpent tatoué ondoie sur son avant-bras gauche, Brigitte Bardot croise haut les jambes sur le mur de sa chambre, sous un drapeau tricolore souligné d’un « Vive la France ». Ça se met à chahuter. « M. Daniel est volontiers grossier, mais il faut reconnaître qu’il met de l’ambiance », commentent poliment deux dames très sages à la table d’à côté. Charlotte attaque le yaourt : « Un virus ? Ah bon ? Je l’ai pas vu passer. » Ici, elle mange à sa faim, et son mari, « un fêlé, du genre qui cognait », a enfin disparu du paysage. Maintenant, elle se sent tranquille. Un ange passe avant que Charlotte relance, faisant rouler son accent des faubourgs : « Trop tranquille, même. » Sa voisine hausse les épaules. « Moi, j’ai été privée de jeunesse avec la guerre. Alors, je vais pas me laisser piquer ma vieillesse par un virus. » Sous l’auvent de l’entrée, Laurent Garcia allume une cigarette. « Je crois que, ce soir, je vais prendre quelque chose pour dormir. Un whisky, peut être. »

    « Ni complotiste, ni franc-maçon »

    Jeudi 19 mars, 3e jour de confinement. « Bonjour, je ne suis ni complotiste, ni franc-maçon », annonce un petit bonhomme filmé en gros plan dans son salon. Sur une vidéo, il promet de prouver « par A plus B » que le coronavirus a été volontairement créé par des chercheurs français. Ça dure vingt-deux minutes, et l’infirmier de service aux Quatre-Saisons se repasse une nouvelle fois la démonstration sur son portable. Le monde scientifique l’a unanimement dénoncé comme la « fake news » en vogue du confinement. Mais l’infirmier ne croit plus les discours officiels. « On saura la vérité un jour, dans vingt ou trente ans. » Si ça se trouve, un antidote a déjà été mis au point. Il l’envisage. « Mais on ne nous le donne pas. » Pourquoi ? Sourire entendu, hochement de tête. « Faites fonctionner votre cerveau. » Il regarde sa montre. Bientôt la distribution de médicaments.

    Dans les couloirs, des rumeurs et des doutes ont commencé à s’insinuer doucement. Un chauffeur à la retraite feuillette le bulletin des anciens d’Algérie. « De toute façon, on ne nous dit pas la vérité. C’est le problème en France. » Son regard plonge dans la rue. En deux jours, elle s’est vidée. Une voiture passe au ralenti, un homme en costume seul au volant, mais affublé d’un masque et de gants comme pour se protéger de lui-même. Sur les trottoirs, personne, à l’exception des petits dealeurs, plus discrets sous les porches mais en panoplie intégrale de bloc opératoire. L’un s’est rajouté un flacon de gel hydroalcoolique à la ceinture. L’autre manie une béquille, « par solidarité avec les malades du corona », dit-il mystérieusement. Le troisième tient un chiot en laisse, en cas de contrôle de police. Un copain le lui a loué. La bête a été baptisée « #Attestation ».

    « En fait, il n’y a que nous à ne pas avoir de matériel », dit Laurent Garcia, le cadre de santé. Il doit passer chercher trois tubes d’aloe vera chez sa cousine pour fabriquer du gel dans la cave des Quatre-Saisons. Francis, le responsable maintenance, s’en chargera après la panne d’ascenseur et avant le coup de main en cuisine. Le commis aussi a arrêté de venir.

    « Vous avez combien de morts chez vous ? »

    Vendredi 20 mars, 4e jour de confinement. Dans une aile du bâtiment, Zineb et Stéphanie, agents de service, aménagent une zone fermée en cas de propagation, de grandes chambres où la lumière se déverse à flot. En nettoyant les tiroirs, un papier oublié leur tombe sous la main, au nom d’un résident, décédé l’été dernier. Soupir. « C’était avant, du temps où on mourait encore d’autre chose. »

    Plus la pandémie progresse, plus elle paraît mystérieuse. « On avance dans le brouillard », signalent les échanges entre médecins. La liste des premiers symptômes n’en finit pas de s’allonger : diarrhée, confusion, chutes inhabituelles ou rhinites sont désormais répertoriées comme des signes possibles avant que se déclenchent les problèmes respiratoires et la fièvre, caractéristiques d’une infection due au coronavirus. « Mais, dans un Ehpad, presque tous les résidents présentent au moins un de ces symptômes », s’alarme Karim, un infirmier.

    A faire le tour des chambres, le Covid-19 semble maintenant à chaque chevet. Des chiffres ont commencé à circuler en sous-main, d’autant plus alarmants qu’ils sont impossibles à vérifier : 170 Ehpad seraient touchés sur les 700 en région parisienne. « Vous avez combien de morts chez vous ? », demande un journaliste au téléphone.

    « Ça y est, la vague arrive : la semaine prochaine va être terrible », se dit Edouard Prono. Aux Quatre-Saisons, onze personnes sont préventivement placées à l’isolement, après avis de la docteure Bénichou. Une résidente regarde la feuille rose sur sa porte, qui décrète l’accès très restreint à sa chambre. « Le directeur est venu la coller en personne. Je ne me fais pas d’illusions. Je me suis condamnée moi-même. »

    Désormais, un seul soignant dans chaque équipe prendra en charge ces 11 résidents-là, afin de limiter les contacts. Qui s’en chargera parmi les soignants ? Passe un frisson. « Marie-Jeanne, j’ai pensé à vous », ose Laurent Garcia. Marie-Jeanne secoue la tête, lentement, et la mèche blonde de sa perruque balaie son visage en mesure. « Non, je le ferai pas », elle dit. Il y a quelques mois, des punaises de lit avaient envahi 25 chambres de l’Ehpad, notamment à l’étage dont elle s’occupe. Marie-Jeanne se revoit un dimanche à la messe, quand elle avait ouvert sa bible : des insectes s’étaient échappés d’entre les pages. Elle avait affronté la honte, les reproches de la famille – même ceux restés à Kinshasa –, la peur que l’école ou les voisins l’apprennent. « Non », répète Marie-Jeanne.

    La main d’Ephline se lève : « Moi je peux. » Ephline avait la vocation des chiffres, une formation de comptable pour travailler dans un cabinet juridique. Quand elle cherchait du travail dans son secteur, elle précisait toujours au téléphone : « Je suis noire. » Il y a vingt-cinq ans, « les gens refusaient carrément, on avait du mal à trouver des Noirs dans les bureaux. On me conseille souvent de ne pas le dire, mais c’est vrai ». Elle a fini par suivre Mylène, sa sœur, aide-soignante aux Quatre-Saisons.

    Dans l’autre équipe, c’est d’ailleurs Mylène qui s’est portée volontaire pour s’occuper des 11 « isolés ». Les deux sœurs se relaieront donc en tandem, affaire conclue sans une parole, ni entre elles, ni avec les autres. « Normal, ça ne pouvait être que nous », explique Mylène. Dans ce petit Ehpad familial, chacun sait tout des autres, les vies sont aussi transparentes que l’aquarium à l’entrée. Les deux sœurs ont des enfants déjà grands, elles sont les plus âgées du groupe, 47 et 49 ans. Or, une question obsède les salles de pause : les gamins. Les médecins ont beau se montrer rassurants sur la capacité des jeunes à résister au coronavirus, la méfiance domine. « Est-ce qu’on nous dit vraiment tout ? Qui s’occupera des petits au cas où ? »

    A la réunion, Taoufik, un aide-soignant, alpague une des deux sœurs. La gratitude le transporte : « Je te jure, si j’avais un masque, je te le donnerais. » Laurent Garcia s’est assis. Il y a des histoires qui le cassent en deux, celle des masques en est une. Il ne cherche pas à s’en cacher. Gorge étranglée, il lance : « Pardon, pardon. Et merci d’être là, je vous aime. Vous avez des questions ? » Une voix féminine se risque : « Est-ce qu’on va augmenter les salaires, surtout pour celles qui vont faire ça ? On est courageuses, tout de même. » Laurent Garcia ne répond pas. La tête dans la main, il s’est endormi sur sa chaise.

    Il est 15 h 30. Dans la salle à manger, Rosa commence l’animation de l’après-midi pour les résidents. C’est la dernière avant un nouveau confinement dans le confinement. Comme beaucoup d’Ehpad, les Quatre-Saisons ont dû s’y résoudre : les regroupements de résidents aussi vont être suspendus, y compris pour les repas, que chacun prendra désormais dans sa chambre. Pour combien de temps ? On ne sait pas. L’infirmier-stagiaire lance la musique, un vieux succès de La Compagnie créole, tandis que Rosa, en blouse rouge éclatante, un minuscule chignon piqué sur la nuque, se met à danser en saisissant le micro : « On y va, tout le monde chante avec moi. » Alors, d’un parterre de fauteuils roulants et de déambulateurs s’élève un chœur de voix frêles, certaines ne tenant que par un fil, mais toutes reprenant comme un cantique : « C’est bon pour le moral, c’est bon pour le moral… »

    « Au revoir, madame »

    Samedi 21 mars, 5e jour de confinement. Dans le hall de l’Ehpad, deux employés des Pompes funèbres ont étalé leur tenue : combinaison, trois paires de gants, charlotte, protège-pieds, lunettes. « T’es sûr qu’on n’oublie rien ? » Ils commencent à se harnacher, minutieusement, quand l’un s’arrête soudain, doigt pointé vers un personnel de l’Ehpad : « Vous ne portez pas de masque ?

    – On n’en a pas. »

    Sous sa charlotte, l’employé n’en croit pas ses oreilles : « Mais vous êtes un secteur à risque, avec des personnes âgées.

    – On n’en a pas », répète l’autre.

    L’employé insiste : « Moi, si j’ai pas au moins un masque, je le fais pas. Et c’est tout le monde pareil chez nous. »

    Aux Quatre-Saisons, une résidente est morte dans la nuit.

    Son état avait commencé à inquiéter une semaine plus tôt, mais les urgences avaient refusé de l’accueillir : elle n’entrait pas dans les critères instaurés avec la crise. Le médecin avait promis de passer vers minuit. Sur le coup de 4 heures du matin, toujours personne. Panique à l’Ehpad. La résidente est finalement transférée au petit jour. Un test de dépistage du Covid-19 est demandé par l’équipe des Quatre-Saisons. Réponse : « Ici, on ne teste pas, on applique la politique de l’autruche. » Qui leur en voudrait ? L’hôpital craque, qui ne le sait pas, services à bout, des lits rajoutés partout, y compris dans les couloirs, visites interdites, sauf quinze minutes parfois chez les malades en fin de vie. On espère qu’une clinique privée pourra accueillir certains convalescents pour éviter l’explosion. Finalement, le test est accordé : négatif. Selon le vœu de ses enfants, la résidente est rapatriée à l’Ehpad, où une disposition spéciale les autorise à passer du temps avec elle.

    Il est 10 heures quand le cercueil sort des Quatre-Saisons. A la fenêtre du premier étage, deux femmes regardent la scène.

    « Vous avez vu la tenue des employés ? On dirait des cosmonautes.

    – J’ai l’impression de ne rien reconnaître, comme si on était maintenant dans un pays étranger. »

    Le cercueil est chargé sur le corbillard.

    « Moi, j’ai 87 ans. Je m’en fiche de mourir du corona ou d’autre chose. Et vous ?

    – Je voudrais être enterrée dans le Jura, mais est-ce que j’aurais le droit avec cette histoire-là ? Dans le doute, je préfère attendre un peu. »

    Le convoi démarre.

    « Regardez, elle s’en va. Ça me fait quelque chose quand même.

    – Au revoir, madame. »

    « Tu l’as eu où, ton masque ? »

    Dimanche 22 mars, 6e jour de confinement. Ça y est, Myriam aura été la première à l’avoir. Elle vient d’arriver au boulot le visage barré d’un masque, un FFP2, plus protecteur encore que le modèle classique, généralement utilisé dans les Ehpad. Son mari lui a acheté au pied de l’immeuble, dans leur cité à Bagnolet, 50 euros la boîte de 20. L’infirmier de permanence esquisse une moue d’expert : « Pas excessif, le prix. » Il valait 1 euro pièce en pharmacie avant le coronavirus. D’un même mouvement, les collègues se penchent vers Myriam pour scruter la merveille de plus près. Ses yeux roulent comme des billes par-dessus le FFP2. Ici, le masque est devenu le symbole de la crise sanitaire : en avoir ou pas. « Aujourd’hui, si tu poses ton portable et ton masque, on te vole ton masque », lance quelqu’un.

    Myriam l’admet : « Je suis une meuf qui fait beaucoup d’arrêts maladie. » Quatre gamins pas bien grands, la maison à faire tourner, la vie, tout simplement. Mais, en ce moment, elle se découvre une énergie inépuisable pour partir au boulot. Il y a cette envie d’être là, tout le temps, l’adrénaline qui monte en traversant la ville déserte, l’impression que son boulot d’agent d’entretien a pris une autre dimension. Chez elle, les rôles se sont inversés avec le confinement : son mari reste à la maison et elle file travailler. L’autre jour, il s’est retrouvé à baigner les enfants, pour la première fois de sa vie. En douce, il pousse les petits à la supplier : « Maman, reste avec nous ! »

    Son portable sonne. C’est lui, le premier coup de fil de l’interminable série qu’ils échangent pendant la journée. « Tu ne lâches pas l’affaire ? », demande le mari. Elle se marre. « Arrête de psychoter. Comment les autres vont faire si je ne viens pas ? » Lui : « T’as mis ton masque au moins ? »

    Dans les étages, c’est l’heure du café au lait, des tartines beurrées et du jus d’orange. Non, pas de jus d’orange, la livraison n’a pas eu lieu. Manque aussi la charcuterie, dont M. Daniel raffole au petit-déjeuner. Il jaillit de sa chambre, en marcel et bretelles. « Qu’est-ce qui nous reste comme plaisir ? Donnez-moi un flingue directement, j’ai hâte de crever pour ne plus vous voir ! » Une résidente arpente le couloir en chemise de nuit, répétant toujours, sur la même note : « Maman, j’ai peur, il va me battre. » Derrière son FFP2, Myriam l’attrape par le bras, s’époumonant pour se faire entendre. « Qui va vous battre, ma chérie ? Montrez-le-moi et je le défonce. » Elle tombe nez à nez avec une collègue portant un masque, elle aussi. Moment de saisissement. Toutes les deux s’exclament en même temps : « Tu l’as eu où ? » La collègue fait des manières pour donner le prix. « Je ne peux pas le dire, c’est un cadeau de mon fils. Je le mets pour lui. » M. Prono, le directeur, s’en mêle. « Je vois des masques, mesdames ? Si vous avez un filon, n’hésitez pas à me le dire. »

    Rosa, qui n’est pas de service, est venue quand même après le marché de Romainville. Poches pleines de mandarines qu’elle distribue dans les chambres : les prix ont doublé après une semaine de confinement. Seuls trois vendeurs avaient dressé leur étal. « Ça dure toujours, cette histoire de virus ? », demande un homme, allongé sur son lit.

    Depuis le passage des Pompes funèbres, la rumeur s’est répandue d’un décès aux Quatre-Saisons. Les familles appellent, l’une derrière l’autre. « Le corona est là ? » Rosa, à pleine voix dans le combiné : « Non, non, on n’a pas de cas chez nous. »

    Un fils insiste : « Y a un problème ? Ma mère va bien ? Pourquoi vous criez ?

    – C’est l’habitude de parler fort aux résidents, monsieur. Maintenant, je parle comme ça même chez moi. »

    Dans le petit jardin de l’établissement – quelques massifs que surplombent les HLM voisins –, des filles fument, d’autres discutent. Myriam attend le moment pour appeler son mari. Elle lui dira : « Prépare-toi, j’arrive. » Et ce sera la même scène que tous les autres soirs. Elle ouvrira la porte et lancera aux enfants : « Mettez les mains devant vos yeux. » Puis, dès l’entrée, elle enlèvera ses habits, très vite, pour ne contaminer personne et courra toute nue vers la douche. Le portable sonne. C’est lui.

    « T’as entendu ?, demande le mari.

    – Quoi ? »

    Un urgentiste de Compiègne vient de mourir, le premier hospitalier à succomber. Grace écrase sa cigarette. Voix glacée. « Hier, ça touchait la Chine, aujourd’hui, nos collègues. Ça y est, le virus vient sur nous. »

    « Si elle l’a, je l’ai »

    Lundi 23 mars, 7e jour de confinement. Accroupie près de l’ascenseur, Sihem répare le déambulateur de Mme Dupont. Une toux secoue la vieille dame, et Sihem sent quelques postillons lui tomber sur le visage. « Cette fois, c’est fait, elle pense. Si elle l’a, je l’ai. » Sihem se relève. Se ressaisir. Empêcher le film catastrophe de lui envahir la tête. Continuer la tournée du matin en se disant : « On est l’armée, il y a une guerre, il faut être courageuse. »

    A l’étage, elle croise Tiana. L’infirmière regarde son thermomètre. « Attention, Mme Dupont est en train de faire un pic de fièvre à 39, 1 °C. » Sihem se sent vaciller. Même quand elle dort, sa tête reste ici, à l’Ehpad, depuis le confinement. Elle se demande : « Qui est malade ? Qui ne l’est pas ? Comment le savoir quand on entre dans une chambre ? » Les Ehpad n’ont droit qu’à trois dépistages pour les résidents, et aucun n’a été réalisé aux Qautres-Saisons, après avis de la docteure Claire Benichou et d’un infectiologue.

    Dans le hall, Arnaud Dubédat, le médecin de Mme Dupont, arrête Sihem.

    « Vous savez qui s’est occupé d’elle aujourd’hui ?

    – Moi.

    – Vous avez quel âge ?

    – 37 ans.

    – Des enfants ?

    – Une fille de 12 ans. »

    A la pensée de la petite merveille, quelque chose se gonfle dans la poitrine de Sihem. Elle la revoit la veille, quand elle lui avait proposé de descendre la poubelle. L’enfant avait voulu se coiffer, s’habiller, tout excitée à la simple idée de mettre le nez dehors. C’était sa première sortie en une semaine. Sihem ne veut prendre aucun risque. Sa propre mère est morte quand elle était petite. Sa hantise serait que sa fille vive la même situation.

    Le médecin la regarde. « Je vais vous dire la vérité : Mme Dupont a peut-être des symptômes du Covid-19. »

    Il est 14 heures quand deux soignantes sont envoyées pour se faire dépister. Toux, fièvres, fatigue intense. Le test a lieu dans un labo à côté, un fauteuil planté sur un coin de parking derrière des draps tendus. Un infirmier des Quatre-Saisons vient déjà d’y passer. Pas de réponse avant trois jours, le circuit est engorgé. Sihem demande à passer le test aussi, mais, là encore, le matériel manque. Il faut déjà présenter des symptômes pour avoir droit au dépistage. Pourtant indispensable auprès des résidents, le personnel d’entretien en a d’abord été exclu : il a fallu la protestation de plusieurs médecins, dont la docteure Bénichou, pour qu’il finisse par en bénéficier.

    Au bout de la rue, les petits dealeurs ont disparu. Rupture de stock, la marchandise n’arrive plus.

    « Vous voulez qu’on appelle votre fils ? »

    Mardi 24 mars, 8e jour de confinement. Il faut un certain temps pour comprendre à quoi tient le silence qui règne dans les étages. En fait, les télés sont éteintes, toutes ou presque. Il n’y a plus que M. Daniel encore planté devant Premier Baisers, sa série préférée, les tribulations amoureuses d’une bande de lycéens. « Pourquoi pas ? Voir des petits jeunes, ça fait du bien dans ce mouroir. » Les autres résidents ont coupé l’image et le son, malgré les mesures d’isolement. « Ça ne parle que de morts, j’en peux plus du virus », dit une infirmière à la retraite.

    Dans sa chambre, Mme X. regarde son plateau-repas sans comprendre. C’est la première à avoir été isolée. « Qu’est-ce que je dois faire ? », elle demande. Elle prend la fourchette, la repose, perdue, repères qui semblent s’effacer un à un à force de solitude. Selon Hervé, le cuistot, les résidents mangent moitié moins depuis le confinement. « Si ça continue, il faudra peut-être permettre à certains proches de venir », suggère Lorette, la psychologue.

    Elle passe de chambre en chambre.

    « Vous voulez qu’on appelle votre fils ?

    – Je ne sais pas si je vais trouver quelque chose à lui dire, c’est flou. Dites-lui que je ne suis pas maltraitée. »

    Une soignante commence les toilettes. Quel jour on est ? Elle n’arrive pas à le dire. Même pour l’équipe, le calendrier commence à se mélanger, temps en apesanteur que ne rythment plus l’école ou les activités. Les magasins autorisés ouvrent et ferment à leur guise. « Chaque minute est devenue un combat, dit la soignante. J’ai du mal à voir plus loin. »

    A la réunion du matin, Tiana l’infirmière ouvre le bal : « Je ne vous le cache pas, j’ai pleuré avant de venir. » Sara vient d’arriver, déposée en voiture par son fils. « Il ne veut pas que je me mette à côté de lui. Il me fait monter derrière comme une chienne. J’ai honte. » Elle est agent d’entretien, 56 ans. Pour la première fois depuis son mariage, son mari a appelé sa mère : « Votre fille préfère son travail à moi. » Lui est vigile, il devient fou à force de rester à la maison. Tous les soirs, il répète : « Tu vas me ramener le virus et on est dans le même lit. » Lui, le confiné, se réveille la nuit, secoué de toux. C’est nerveux, assure le médecin. Une autre dort sur le canapé. Chez une vacataire, un traversin sépare en deux le matelas conjugal. « Chez moi, on me traite comme une pestiférée. » Sa mère l’appelle tous les soirs pour la supplier de se mettre en arrêt maladie. Elle n’est pas sûre de pouvoir continuer à venir. « Je vous en demande beaucoup, vous pouvez me détester, explique Laurent Garcia. Personne ne vous en voudra si vous restez chez vous. Mais je vous en supplie, pour les résidents et les collègues, ne me prévenez pas au dernier moment. » Dans le hall, une banderole a été tendue et l’équipe pose derrière : « Merci à nos familles de nous laisser sortir. »

    « Tu crois que c’est vrai ? On m’applaudit aussi ? »

    Mercredi 25 mars, 9e jour de confinement. Pour rien au monde, Martine ne raterait le rendez-vous de 20 heures, quand les Français se mettent aux balcons pour applaudir ensemble le personnel de santé. Elle en a fait une fête avec ses filles, chacune se remaquille pour apparaître au mieux devant les voisins. Cette fois, un type l’a alpaguée à travers la chaussée, celui qui habite le pavillon en face et conduit une Volvo. « Dites-moi, vous ne seriez pas infirmière ou quelque chose comme ça ? » Martine a rougi. « Je suis aide-soignante. » Elle a encore baissé d’un ton pour préciser qu’elle travaille en Ehpad, aux Quatre-saisons, à Bagnolet. Quand le type a applaudi plus fort, en la regardant droit dans les yeux et en criant « Bravo ! », Martine a cru qu’il se moquait d’elle. Pas du tout. « C’est vous aussi qu’on remercie tous les soirs », a précisé le voisin. Elle n’y avait jamais pensé. Elle n’aurait pas osé. En général, ceux des Ehpad se trimballent une image de sous-soignants par rapport aux hôpitaux, où se ferait la « vraie » médecine. « Toi, tu torches le cul des vieux », a rigolé un jour une copine. Martine a l’habitude, à force. Elle dit même qu’elle s’en fout. A 20 h 5, en refermant la fenêtre, elle a demandé à sa grande fille : « Tu crois que c’est vrai ? On m’applaudit aussi ? »

    « Le virus, on l’a tous eu au moins cinq minutes »

    Jeudi 26 mars, 10e jour de confinement. Le gel hydroalcoolique vient d’être livré, les 15 litres à 130 euros au lieu de 75, de quoi tenir une semaine. En revanche, plus un thermomètre sur le marché. Mais la grande nouvelle est venue de M. Prono, le directeur. « A 14 heures, je vais récupérer une dotation de 350 masques. Désormais, on en aura toutes les semaines. » Il a lâché l’info à sa manière, voix contenue, l’air de ne pas y toucher, comme si c’était tout à fait normal. La docteure Bénichou et Laurent Garcia ont attendu de voir la caisse sur la table pour le croire.

    A 16 h 30 commence la première réunion où toute l’équipe porte un masque. Il y en aura deux par jour pour le personnel d’entretien et trois pour les soignants. Dommage que les embrassades soient interdites.

    Et puis, d’un coup, l’ambiance vire au tragique. Les résultats des dépistages viennent d’arriver : deux des collègues sur trois ont été testés positifs, les premiers aux Quatre-Saisons. Les yeux bougent par-dessus les masques, à toute vitesse, chacun se cherche du regard. On discute entre soi, à voix basse.

    « Tu vas le dire à ton mari ?

    – Je suis pas sûre.

    – Tu crois qu’on est obligée ?

    – En tout cas, on a franchi une étape. Qu’est-ce qui va se passer ? »

    Rosa, l’animatrice, se lève : « Je n’avais pas peur, mais oui, je vais le dire : maintenant, j’ai peur. » D’ailleurs, elle ne se sent pas très bien. « Vous me voyez ? Je pèse 90 kilos, mais j’ai une petite santé, en fait. » A bien y réfléchir, elle cumule même tous les signes du virus. La voilà qui se palpe le ventre, la tête, la gorge. « Arrêtez, Rosa : ce n’est pas la première fois que vous nous annoncez votre mort », plaisante Laurent Garcia, alias l’ambianceur – c’est son surnom depuis qu’il a abandonné sa blouse d’infirmier pour devenir cadre de santé, il y a douze ans. Lui aussi, comme tout le monde, a eu son petit coup de fatigue, un peu plus tôt dans la journée. D’une voix mourante, il a demandé à l’infirmière : « Vous pouvez me prendre ma température, s’il vous plaît ? » 36,4 °C. Retour du sourire. « Le virus, on l’a tous eu au moins cinq minutes. » Une aide-soignante le coupe. « Jurez-nous quelque chose, M. Garcia : chaque fois que quelqu’un sera touché, vous nous le direz ? »

    « Dommage, ma famille ne pourra pas venir »

    Vendredi 27 mars, 11e jour de confinement. Dans sa chambre, une résidente a mis ses photos sur ses genoux et, un à un, elle caresse les visages. Les moments lui reviennent, les mariages et les drames, la guerre aussi. Et alors ? Ils vivaient les uns avec les autres, tous ensemble. « Ne quittez pas votre chambre, vous êtes à l’isolement », lui a recommandé la soignante chargée de son étage. La résidente a pris un air penaud : « Dommage, ma famille ne pourra pas venir. » La soignante n’a rien dit. Toutes les deux savent très bien qu’elle n’a jamais aucune visite. La résidente se lève de son fauteuil. Elle monte dans l’ascenseur. Personne dans le hall en bas. Quelques pas seulement la séparent de la porte vitrée qui ouvre sur la rue. Si elle sortait ? Coups d’œil sur le trottoir. Désert aussi. C’est vrai, elle s’en souvient maintenant, la France entière est confinée. Elle l’a vu aux infos. De l’autre coté de la fenêtre, elle aperçoit une femme qui se hâte de rentrer. Une pensée lui traverse l’esprit. Et si tout le pays était devenu un gigantesque Ehpad, chacun chez soi, interdiction de sortir, rien à faire sauf manger ? Et elle se met à rire, comme elle n’avait pas ri depuis une éternité.

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    #vieux #Ehpad #société_d'abandon #le_travail_tue #masque_de_protection #gants #isolement #housses_mortuaires #soignantes #soignants #agents_d'entretien #premiers_de_corvée #Noirs #Arabes #soin #Soins_palliatifs #courage #torcher_le cul_des_vieux #in_retrospect

    • Recenser les morts en Ehpad : a minima 160 personnes, selon des articles de presse locales récoltés par Nassira El Moaddem sur le volatile bleu @NassiraELM
      https://twitter.com/NassiraELM/status/1244545214590726145

      Le gouvernement ne comptabilise pas, pour l’instant, les décès #Covid_19 dans les #EHPAD. Pourtant, la presse, notamment quotidienne régionale, les recense. J’ai démarré un recensement à partir de leurs articles. N’hésitez pas à me signaler en commentaire ce que je n’aurais pas vu

      Société d’abandon.
      Ce qui suit provient du compte @reventoline (blue bird)

      https://twitter.com/reventoline/status/1244979454813835270

      « Sur 80 résidents, 40 sont infectés » (ex. donné sur 1 Ehpad). Mais « Il faut agir vite » ne signifie pas ici tenter de sauver les pers. âgées infectées mais les aider à mourir ds la dignité, car non seulement elles sont abandonnées à une mort quasi certaine, ...mais les conditions de leur fin de vie sont indignes (pas d’Hypnovel ni de morphine, personne pr prescrire...). Même situation inhumaine ds les centres d’accueil de pers. lourdement handicapées.
      Les vieux, les handis lourds, les malades psy, les sans-abris 1ers à l’abandon...

      Ehpad : « Il faut agir vite, la situation est tendue et douloureuse »
      https://www.liberation.fr/amphtml/france/2020/03/29/ehpad-il-faut-agir-vite-la-situation-est-tendue-et-douloureuse_1783499

      « A l’hôpital, il y a dix jours nous avions de la place et on pouvait si besoin hospitaliser les plus fragiles. Maintenant, c’est difficile. On évalue, on arrive encore à prendre les patients qui s’aggravent dans notre service de gériatrie, et on n’a pas encore beaucoup de décès, mais cela arrive », raconte la gériatre. A Bicêtre, il y a 38 lits de gériatrie, bientôt 5 de plus. Ce week-end, 34 étaient occupés par des personnes âgées infectées.

      Cela va déborder. Et les digues sont à construire au plus vite. « Il faut trier les infos, il faut des médicaments, il faut surtout gérer les choses du quotidien, poursuit la Dr Ravier-Lebrun qui s’appuie sur ce qui s’est passé dans l’est de la France. L’expérience de nos collègues de Strasbourg nous a montré qu’ils n’ont pas pu hospitaliser les résidents, et que donc certains allaient mourir dans leur Ehpad. C’est ce qui se va se passer en Ile-de-France. Il faut de toutes urgences s’y préparer, trouver des volontaires pour aller, la nuit, dans ces établissements. Aider les gens à mourir. On doit bien ça à ces personnes seules, sans proches, ni famille. » Elle ajoute : « C’est très dur pour le personnel. Beaucoup d’entre eux sont angoissés, en arrêt de travail. Dans les 19 Ehpad, il manque de tout. Ou presque. Ainsi, dans l’un, c’est la directrice qui s’occupe de la lingerie, l’employée étant malade. Dans un autre, sur 80 résidents, 40 sont infectés. » Elle se souvient : « Et dire qu’il y a quinze jours, il n’y avait pas un cas. On va vers une #hécatombe. Tous ne vont pas mourir, il faut le dire aussi, ce n’est pas parce que vous êtes vieux, dans un Ehpad et infecté, que vous allez forcément mourir. »

      « Les familles sont à bout »

      Comme se sentent les résidents ? « Ils sont parfois très angoissés ou assez détachés, cela dépend, raconte la Dr Ravier-Lebrun. Mais les familles sont à bout, angoissées, elles sont à l’extérieur, elles ne peuvent pas venir le soir. On essaye de monter des Skype, là aussi on a besoin de bénévoles. »

      Le défi est immense. A cela vient s’ajouter une lourdeur typiquement française : l’Hypnovel (ou Midazolam, un médicament qui permet d’accompagner le plus doucement possible une agonie), n’est pas disponible pour les Ehpad, la réglementation tardant à évoluer en dépit d’affaires récentes (1). « Il y a d’autres protocoles certes, avec des produits comme le Rivotril et le Valium, et à présent on fait avec. Mais encore faut-il qu’il y ait des médecins qui puissent faire la prescription puis l’injection, puis accompagner. »

      Même les services hospitaliers de #soins_palliatifs risquent de subir une pénurie de #Midazolam et #Hypnovel ...

      #housses_mortuaires #morts_en_Ehpad #prise_en_en_charge_de_la_douleur

    • Julien, aide-soignant en intérim
      https://blogs.mediapart.fr/violencedutravailcom/blog/290320/julien-aide-soignant-en-interim
      Je suis aide-soignant en intérim. Tous les jours, je vais au front alors que j’aurai pu rester planqué chez moi. Je ne devais pas travailler le mois d’avril mais quand j’ai vu tout ce bordel j’ai appelé mon agence d’intérim et je leur ai dit que je culpabilisais de ne pas travailler.

      Alors j’ai repris pour aider les équipes face à la rupture.

      J’ai beaucoup de missions en Ephad. Et là, je peux vous dire, c’est la guerre. Le personnel ne subit pas le manque de moyens comme à l’hôpital. Il n’a carrément rien. Pas de masque. Parfois des masques chirurgicaux mais jamais de FFP2. Je sors d’un Ephad où 10 membres du personnel sont touchés par le covid. Quasiment tous les résidents sont atteints. Ils ont enfin reçu des protections mais c’est déjà trop tard.

      Et moi, en tant qu’intérim j’ai dû m’énerver pour que l’on me prête des tenues (je parle de la blouse) car oui, les intérimaires sont en général obligés d’amener leur tenue et les laver chez eux. Et ce, même en pleine épidémie. Je suis venu renforcer mais en vérité l’intérimaire aide-soignant c’est du personnel sacrifiable. Tant pis s’il refile le covid à ses proches. On parle de prime pour les soignants mais on oubliera les intérimaires qui eux ont choisi d’aller au front.

      Je veux également parler des infirmières libérales qui prennent tous les risques avec très peu de moyens. Les seuls masques qu’elles ont, ont été donnés par un carrossier. Pareil pour les quelques combinaisons. Une entreprise de BTP leur en a donné. Mais rien de l’État. Alors on les envoie au front. On les applaudi à 20h. Mais le pire s’est que notre président leur a doublé leur cotisation retraite à tel point qu’elles se demandent si c’est encore rentable de travailler en libérales. Et on compte sur elles pour gérer une épidémie de cette ampleur. Sans rien. On parle de vocation. Cela sert à justifier les bas salaires. Mais ça ne justifiera jamais les risques que nous prenons juste par le fait que l’on n’a rien.

      C’est fort d’avoir trouvé un homme pour représenté une profession féminisé à 90% mais il est vrai que lorsque les femmes s’expriment ca n’intéresse pas grand monde. Et puis une fois cette crise passé il ne restera peut être plus beaucoup de soignantes. Entre celles qui vont mourir du virus, celles qui vont se suicidé, celles qui vont être incapables de travailler pour cause de dépression, burn-out et celles qui vont changer de métier puisque « notre président leur a doublé leur cotisation retraite à tel point qu’elles se demandent si c’est encore rentable de travailler en libérales »...

    • Coronavirus : à Cannes, dans l’Isère ou dans le Puy-de-Dôme, de nouveaux résidents d’Ehpad succombent à l’épidémie
      Officiellement, 3 523 personnes sont mortes depuis le début de l’épidémie en France, mais ces chiffres, égrenés quotidiennement, ne représentent que ceux recensés en milieu hospitalier.
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/04/01/coronavirus-a-cannes-dans-l-isere-ou-dans-le-puy-de-dome-de-nouveaux-residen

      (...) Le gouvernement a dit sa volonté d’aller vers « un isolement » en chambre individuelle de chacun des pensionnaires des Ehpad et d’intégrer les décès survenus dans ces établissements dans les statistiques officielles. D’ici quelques jours, selon l’ARS PACA, l’organisation mise en place par ses soins pour la remontée des informations et le suivi des Ehpad devraient permettre d’avoir une vue exhaustive de la situation dans ces établissements, au moins pour cette région.

      Pour l’Ehpad parisien que je connais, le 18 mars les visites étaient devenues impossibles et l’isolement en chambre déjà en cours (pas toujours facile à tenir). Annonce gouvernementale de mesures déjà prises par les institutions concernées.

      Quant au dénombrement des décès déjà promis « pour le début de la semaine prochaine » la semaine dernière. On voit que c’est pas pour tout de suite.

  • Coronavirus : des associations de soignants exigent en référé la « réquisition des moyens de production » de médicaments et matériel
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/03/30/coronavirus-des-associations-de-soignants-exigent-en-refere-la-requisition-d
    Une aide-soignante aide un infirmier à s’habiller, dans une tente installée à l’extérieur de l’hôpital Henri Mondor, à Créteil, depuis le 4 mars. ADRIENNE SURPRENANT POUR LE MONDE

    Le référé « mesures utiles » déposé en urgence au Conseil d’Etat demande une « réquisition des moyens de production » pour obtenir masques, respirateurs ou encore morphine.

    Plusieurs associations de santé et des juristes ont saisi en urgence le Conseil d’Etat, lundi 30 mars, pour sommer le gouvernement de réquisitionner, « à l’échelle industrielle », des usines de production pour fournir des masques, des respirateurs et des médicaments indispensables, qui commencent déjà à être rationnés. Pauline Londeix, cofondatrice de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament, prévient :
    « On est très inquiets du risque de pénurie et de rupture d’un certain nombre de médicaments indispensables contre la douleur, notamment la morphine et le curare. Pour le Covid-19, mais aussi en soins palliatifs. Le monde entier veut les mêmes médicaments, or nous avons en France le savoir-faire et les principes actifs, il faut que le gouvernement réquisitionne les moyens de production. »

    Le référé « mesures utiles », déposé par l’avocat Jean-Baptiste Soufron, permet de demander au juge administratif toutes sortes de mesures, qui peuvent être imposées à l’administration. Il est signé par « une coalition inédite » : Act Up-Paris, le Collectif inter-hôpitaux, le Collectif inter-urgences, la Coordination nationale des infirmières, l’Observatoire de la transparence des politiques du médicament, ainsi que par le professeur de droit Paul Cassia et le politologue Patrick Weil, tous deux membres de l’Association de défense des libertés constitutionnelles.

    Des demandes conséquentes

    Ces mesures sont conséquentes : les associations réclament des masques FFP2 et FFP3 pour les soignants, des masques chirurgicaux pour les malades – mais aussi pour l’ensemble de la population. Le personnel médical a besoin de pyjamas à usage unique, de gilets jetables, de surblouses, de lunettes, de tabliers, de pousse-seringues et de ventilateurs mécaniques, mais aussi « de moyens de dépistage massif », livrés à tous les laboratoires vétérinaires et de biologie. Les associations réclament la production en urgence et en France de toutes « les molécules apparaissant d’intérêt sanitaire » – tociluzimab, dexaméthasone, lopinavir, ritonavir, anakinra, midazolam et, bien sûr, morphine et curares.

    « Contrairement à ce qu’on raconte, les masques sont très utiles pour toute la population »

    « Le plus urgent, ce sont les masques et les respirateurs, explique André Grimaldi, professeur à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris et fondateur du Collectif inter-hôpitaux. Même chez les soignants, on est obligé de garder des masques toute la journée, voire le lendemain, ce n’est pas possible. Et contrairement à ce qu’on raconte, les masques sont très utiles pour toute la population, même avant le confinement. » Il estime que ce sont les infirmières qui vont en manquer le plus, en réanimation :
    « On a baissé la garde de la sécurité à l’hôpital. On ne peut pas y envoyer des gens sans précautions, malgré les applaudissements de 20 heures – si le gouvernement ne fait rien, la situation risque de se terminer par des droits de retrait du personnel. Il y a de la colère chez les soignants. »

    Si le Conseil d’Etat juge la requête recevable, il fixera une audience probablement dans les quarante-huit heures, après que le représentant du gouvernement aura présenté ses observations.

    #réquisition #médicaments #matériel_de_protection #masques_pour_tous #soins_palliatifs #santé #hôpital

  • Des stocks de médicaments sous tension dans les services de réanimation
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/03/26/des-stocks-de-medicaments-sous-tension-dans-les-services-de-reanimation_6034

    L’inquiétude porte principalement sur l’approvisionnement en curares, qui permettent de pratiquer une intubation.

    « Depuis 10 jours, c’est la bataille pour obtenir des boîtes », lâche un pharmacien hospitalier. Avec l’afflux de cas graves de #Covid-19 dans les services de #réanimation, la consommation d’#anesthésiques et d’#hypnotiques s’est envolée dans son établissement, et ses stocks sont au plus bas. « Nous frappons à toutes les portes pour en trouver, mais nous ne sommes pas les seuls », soupire-t-il. Et pour cause : avec l’afflux de patients Covid-19, le recours à ces molécules a été multiplié par 5 ou 10. « Il faut anticiper, sinon l’histoire des masques risque de se décliner dans d’autres domaines », craint Rémi Salomon, président de la commission médicale d’établissement de l’AP-HP, en référence à la #pénurie de masques respiratoires.

    L’inquiétude porte en premier lieu sur les #curares, utilisés pour relaxer les muscles au moment de l’intubation. Depuis un an, les ruptures de stocks se sont multipliées et les pharmaciens craignent que les laboratoires pharmaceutiques ne soient plus en mesure d’honorer toutes les commandes. « Il ne suffit pas d’augmenter la production, encore faut-il avoir accès à la matière première », souligne Nathalie Pons-Kerjean, chef du service de pharmacie à l’hôpital Beaujon de Clichy (Hauts-de-Seine), rappelant que le curare est extrait d’une plante exotique.

    Limitation des exportations
    Elle s’interroge aussi sur les mesures de réquisition que certains Etats pourraient prendre en cas de pénurie mondiale. « Que se passera-t-il si les Américains décident de bloquer les exportations de curare ? », demande-t-elle, en précisant que le laboratoire américain Pfizer est l’un de ses premiers fournisseurs. L’Inde a déjà pris une telle mesure : le 4 mars, le pays a interdit l’exportation de 26 principes actifs jugés stratégiques, dont plusieurs antibiotiques et le paracétamol, utilisé pour lutter contre les fièvres et les douleurs caractéristiques des formes légères de Covid-19.

    Pour épargner leurs stocks de curare, les médecins réfléchissent déjà à l’adaptation de leurs protocoles. « Nous essayons de réduire les doses et les durées d’utilisation, car nous ne voulons pas que cela compromette notre capacité à traiter les futurs patients », explique Djillali Annane, chef du service de réanimation de l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine), en rappelant qu’il n’existe pas d’alternative pour les curares. « Si nous devons nous en passer, nous ne serons plus dans une prise en charge optimale », prévient-il. Pour l’Agence régionale de santé d’Ile-de-France, l’accès aux médicaments de réanimation est devenu un sujet majeur, car cela pourrait très vite devenir un facteur limitant dans la prise en charge des patients, indique-t-on.

    Un suivi hebdomadaire des stocks
    Les tensions d’approvisionnement concernent aussi d’autres molécules, comme le #midazolam – un sédatif puissant utilisé aussi bien en réanimation qu’en #soins_palliatifs – ou le propofol – un anesthésique qui a fait l’objet d’une alerte le 10 mars par l’Agence de sécurité du médicament (ANSM) à la suite de la défaillance d’un fabricant. « La Suisse a bien voulu mobiliser des stocks pour nous », précise Mélanie Cachet, directrice adjointe de l’inspection au sein de l’agence.
    Depuis 2016 et la loi de modernisation du système de santé, les industriels sont tenus d’élaborer des « plans de gestion des pénuries » pour tous les médicaments dont la rupture représente « un risque grave et immédiat » pour les patients. « C’est à eux de trouver des solutions, par des importations ou une augmentation de la production », insiste Mélanie Cachet.

    Compte tenu de l’enjeu pour la prise en charge des patients Covid-19, l’ANSM a mis en place un suivi hebdomadaire des stocks pour une centaine de molécules essentielles, et les commandes sont désormais contingentées. Dans un tel contexte, « les laboratoires doivent réguler les flux », indique l’inspectrice. L’un des enjeux est d’assurer une bonne répartition des ressources sur l’ensemble du territoire, en fonction de la progression de l’épidémie. « Un pilotage national est très important pour garantir une équité dans les prises en charge des patients », estime une pharmacienne du CHU de Strasbourg.
    Le #propofol est à ce stade le seul médicament pour lequel un risque de rupture a été formellement identifié, mais « des investigations sont en cours » pour les curares et le midazolam, à la suite des signalements des médecins et des hôpitaux. La réglementation ne permet pas à la France de limiter les exportations des molécules à risques. « Mais il n’est pas interdit de penser que, compte tenu de la situation exceptionnelle, l’ANSM soit amenée à prendre des mesures également exceptionnelles », indique Mélanie Cachet. Selon nos informations, des discussions sont aussi en cours avec des industriels pour réorienter en urgence les chaînes de production françaises. A condition de disposer des matières premières nécessaires.

    • Rappelons que les #pharmabarons ont pratiquement stoppé toute la production sur notre territoire pour augmenter leurs marges en sous-traitant en Inde ou en Chine.

      Il a toujours été évident que c’est de la connerie que d’externaliser les activités stratégiques.

      Et l’on se rend compte que la #mondialisation, ça tourne court quand on passe en mode « chacun pour soi et sauve qui peut ».

      https://www.usinenouvelle.com/article/sanofi-et-le-jeu-subtil-de-l-ancrage-francais-dans-une-competition-in

    • Et surtout, on ne change rien → 24/02/2020 :
      Sanofi va externaliser son activité de principes actifs pour tiers, deux usines sont concernées en France
      https://www.usinenouvelle.com/article/sanofi-va-externaliser-son-activite-de-principes-actifs-pour-tiers-de

      Le géant pharmaceutique français va se désengager partiellement de la production de principes actifs. Sanofi veut regrouper une division commerciale et six usines européennes, dont deux en France, dans une entité indépendante pour la production d’ingrédients pharmaceutiques. Le projet vise une introduction en bourse en 2022, avec maintien de Sanofi à hauteur de 30% dans le capital et comme principal client. Une annonce qui intervient dans un contexte international de trop grande dépendance vis-à-vis de l’Asie, comme le rappelle la crise liée au coronavirus Covid-19.

    • Sanofi revoit sa carte industrielle européenne
      https://www.lesechos.fr/industrie-services/pharmacie-sante/sanofi-veut-externaliser-la-fabrication-de-ses-principes-actifs-en-europe-1

      Mais, derrière cette louable préoccupation, il y a aussi pour Sanofi la nécessité de réduire le nombre de ses usines en Europe, héritage des fusions successives qui ont construit le groupe mais aussi de rééquilibrer son parc industriel en faveur de la production biotechnologique puisque ses nouveaux ou futurs produits sont essentiellement des médicaments biologiques. Avec les cinq sites de synthèse chimiques qui lui restent, il estime avoir assez de capacité.

    • COVID-19 : Interpellation du gouvernement sur les risques de ruptures de médicaments, Communiqué de presse – Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament – vendredi 27 mars 2020
      https://blogs.mediapart.fr/edition/transparence-dans-les-politiques-du-medicament/article/270320/covid-19-interpellation-du-gouvernement-sur-les-risqu

      Alerté.es par plusieurs responsables de services hospitaliers parisiens, qui évoquent la diminution inquiétante des stocks de certains médicaments, nous avons interpellé hier le gouvernement, ainsi que Jean-François Delfraissy et Jérôme Salomon, pour qu’ils détaillent leur action pour anticiper de probables pénuries. Il devient crucial et urgent qu’ils nous répondent. (...)

      Nous leur avons notamment demandé si des moyens sont recensés au niveau national pour voir quelle ligne de production de #médicament pourrait être utilisée ou réquisitionnée pour réorienter au plus vite la production vers ces médicaments de première nécessité dont nous allons manquer. Car chaque jour compte, notamment dans la mesure où la demande mondiale pour ces médicaments est en train d’exploser.

      Nous n’avons toujours pas de réponses.

      Nous avions alerté dès juillet dernier et l’annonce d’un plan dédié par Mme Agnès Buzyn sur l’insuffisance des mesures proposées par le gouvernement contre les pénuries de médicaments, ainsi que sur le manque de transparence quant à l’origine de la matière première. Nous avions souligné l’importance de lister l’origine de la matière première pour anticiper ce type de rupture.

      L’exemple du manque de matières premières pour les réactifs du dépistage montre que nos alertes n’ont pas été prises au sérieux, avec pour conséquence de retarder dramatiquement l’extension du dépistage recommandée par l’Organisation mondiale de la santé. De même, les manques de #matériel_de_prévention ont révélé des dysfonctionnements majeurs dans la réponse à la crise autant que les failles des politiques de santé menées depuis vingt ans.

      Nous espérons qu’il n’en sera pas de même pour cette alerte et que le silence du gouvernement à nos questions est le signe qu’il est au travail pour éviter ces pénuries. Nous l’appelons à rompre ce silence : seule une communication transparente sur ce qu’il fait peut éviter la panique face à une situation angoissante pour les patient-es et leur famille.

    • Médicaments pour soigner le Covid-19 : des hôpitaux au bord de la pénurie, par
      https://www.mediapart.fr/journal/france/270320/medicaments-pour-soigner-le-covid-19-des-hopitaux-au-bord-de-la-penurie?on

      Les médicaments anesthésiques, qui permettent de placer sous respirateur artificiel les malades Covid-19, sont en tension en Île-de-France. Le corps médical tente de rationner leur utilisation. D’autres médicaments essentiels pour faire face à l’épidémie pourraient très vite venir à manquer.

      Les hôpitaux franciliens sont lancés dans une course folle pour ouvrir, dans les 48 heures, mille nouveaux lits de réanimation, et porter leur nombre à deux mille en tout. Mais les patients Covid dans un état critique ont d’autres besoins essentiels qui pourraient venir à manquer : les médicaments. Selon le point de situation du ministère de l’intérieur du 25 mars, que nous nous sommes procuré, « les hôpitaux civils n’ont qu’une semaine d’approvisionnement, tandis que les hôpitaux militaires n’ont plus que 2,5 jours de stock, contre quinze jours en temps normal ». Le point de situation de l’Agence régionale de santé, au 26 mars, évoque même une « rupture en fin de semaine » de curare, ces anesthésiques essentiels.

      Sans entrer dans le détail des chiffres, lors d’un point presse de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) ce 27 mars, le directeur général Martin Hirsch a aussi reconnu que « les stocks sont très courts sur certains médicaments ». Son adjoint, François Crémieux les a énumérés : « Les produits en forte tension sont les curares, les hypnotiques, les corticoïdes et les antibiotiques. »

      Il faut dire que de nouveaux malades du Covid arrivent sans cesse : 172 au cours des dernières 24 heures, selon le dernier bilan dressé le 26 mars au soir par l’Agence de régionale de santé d’Île-de-France. Or, pour réussir à absorber ce flot de malades qui s’étouffent littéralement, « on a plusieurs préoccupations, explique le réanimateur Antoine Vieillard-Baron, de l’hôpital Ambroise-Paré, à Paris. On doit ouvrir des lits, trouver du personnel suffisamment qualifié, des respirateurs. Mais on est aussi préoccupés par les médicaments ».

      Dans les services de réanimation, déjà sous très forte tension, c’est « un énorme poids supplémentaire », raconte, anonymement, un réanimateur francilien. « Nous sauvons la vie des patients Covid les plus critiques en les endormant profondément, et en les faisant respirer grâce à des machines, explique-t-il. Pour cela, on a recours à des médicaments anesthésiques puissants, notamment le curare, pour que l’organisme oppose le moins de résistance possible. Ce sont des médicaments quotidiens, anciens, de première nécessité. Dans mon hôpital, nous avons trois jours de stock. Pour s’en sortir, on fait appel à la débrouille, on appelle des collègues pour trouver des lots ici et là. Et on réfléchit à avoir recours à d’autres médicaments, parfois abandonnés depuis longtemps. On s’éloigne des standards de soins, à l’aveugle. C’est vrai, on doit choisir les patients admis dans notre service, en fonction de leur probabilité de s’en sortir. Mais si on en venait à ne plus soigner ou à mal soigner ceux qui peuvent s’en sortir, ce serait vraiment terrible. »

      À l’AP-HP, le directeur médical de crise Bruno Riou assure qu’un texte sur « les bons principes d’administration de ces médicaments » est en cours de diffusion dans les 39 hôpitaux de l’AP-HP, dans le but de « rationaliser » leur utilisation. Autrement dit, les économiser. Il assure que la qualité de la prise en charge des malades ne sera pas affectée : « On a par exemple des appareils qui mesurent la profondeur de la sédation, le degré de curarisation, pour ajuster la dose. On peut ainsi diminuer de 20 % la quantité de produits utilisés. »

      Est-ce que cela sera suffisant pour gérer la tension, et éviter une pénurie, mortelle pour les patients ? Les laboratoires pharmaceutiques sont-ils en capacité de livrer les hôpitaux au plus vite ? François Crémieux, le directeur général adjoint de l’AP-HP, n’est pas très précis : « Nous sommes en lien direct avec certains laboratoires, qui sont rassurants sur les capacités de production de curare. Sanofi, par exemple, est très mobilisé. Mais le contexte de la pénurie est européen. Il y a des enjeux de juste répartition entre les différents pays européens. »

      Des bénévoles de la protection civile transfèrent des patients infectés par le COVID 19 et ayant des problèmes respiratoires dans les hôpitaux parisien © AFP
      Des bénévoles de la protection civile transfèrent des patients infectés par le COVID 19 et ayant des problèmes respiratoires dans les hôpitaux parisien © AFP
      Encore une fois, l’Allemagne semble la mieux positionnée, puisqu’« une partie de ces médicaments vient d’Allemagne », relève le ministère de l’intérieur dans sa note Covid-19 du 26 mars.

      Le président de la Commission médicale d’établissement de l’AP-HP, Rémi Salomon, ne cache pas son affolement : « J’essaie de faire remonter l’information depuis plusieurs jours, en interne, auprès du ministère de la santé, jusqu’à l’Élysée. Je parle aussi à des dirigeants de l’industrie pharmaceutique. Je constate qu’il n’y a pas de plan de crise général. » À croire, après le manque de masques et de tests de dépistage, que le gouvernement a toujours un temps de retard.

      L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) n’a par exemple pas mis à jour les tensions d’approvisionnement pour le Cisatracurium. Cet anesthésique figure aujourd’hui sur sa liste des médicaments en rupture de stock, mais est indiqué comme « remis à disposition » depuis fin janvier 2019… Alors qu’il est en tension actuellement.

      Contactée à de multiples reprises, l’ANSM n’a pas répondu à nos sollicitations. Pour toute réponse à nos demandes, Aspen Pharma, le fabricant de plusieurs curares a répondu par courriel : « La période actuelle nous amène à nous concentrer sur des priorités de gestion d’entreprise à distance tout comme les approvisionnements de nos clients. »

      Comme l’épidémie, le manque de médicaments se fait sentir par vagues, avec quelques jours de décalage en fonction de l’arrivée de la déferlante de patients dans chaque région. Le 20 mars, les pharmacies d’hôpitaux de Bretagne ne signalaient pas de tension d’approvisionnement sur les anesthésiques. Mais dès le 23 mars, les inquiétudes montent à Lorient, Pontivy, Vannes, Rennes… Et le 26 mars, l’anesthésique propofol est officiellement en rupture de stock dans un hôpital breton, et même l’éphédrine, de l’adrénaline. Autant de produits essentiels pour ranimer les patients.

      L’autre grande inquiétude concerne les ruptures de stock d’antibiotiques comme l’Augmentin indiqué « en tension d’approvisionnement » sur le site de l’Agence du médicament depuis le 6 février 2020 déjà. Or « l’Augmentin ou ses génériques sont donnés à tous les patients Covid-19 pour éviter les surinfections bactériennes, notamment pulmonaires », s’alarme Alain Astier, chef de pôle honoraire de la pharmacie de l’hôpital Henri-Mondor de Créteil (Val-de-Marne). Car on ne meurt pas directement du virus, mais de la surinfection qu’il provoque en affaiblissant notre corps.

      Bientôt un outil numérique pour cartographier les stocks de médicaments

      Un pharmacien d’un CHU qui préfère ne pas être identifié a même confié à Mediapart la liste des 95 médicaments en rupture de stock dans son établissement au 26 mars. Le générique d’un antibiotique primordial, l’Amoxicilline/acide clavulanique en sachet y figure : le laboratoire Sandoz, filiale du géant pharmaceutique suisse Novartis, annonce un réapprovisionnement théorique… à compter du mois d’août.

      Interrogé , Novartis répond « disposer de stocks suffisants »… Sauf que la molécule est disponible, mais pas en sachet, seulement en comprimé. « Ce sont des gros comprimés très difficiles à avaler. On ne peut pas les écraser, ils sont impossibles à prendre pour les patients sous sonde naso-gastrique, typiquement, les patients Covid-19 en réanimation, dénonce un pharmacien d’hôpital. C’est un vieux médicament qui ne se vend pas cher, génériqué depuis longtemps, ce n’est pas la priorité des laboratoires d’en assurer l’approvisionnement. Mais aujourd’hui, il est nécessaire qu’ils le fabriquent en très grande quantité compte tenu du nombre de patients Covid-19 dans le monde ! »

      Si Novartis annonce à Mediapart que l’Amoxicilline est façonnée en Autriche, c’est-à-dire mis en comprimé ou en sachet, l’entreprise refuse d’indiquer où elle se procure la matière première en invoquant la « confidentialité de l’information ». Or les tensions d’approvisionnement des médicaments, qui se font encore plus ressentir en cette période de crise et de flambée mondiale de la demande, s’expliquent en partie par la dépendance des laboratoires pharmaceutiques vis-à-vis de l’Asie.

      Entre 60 et 80 % des principes actifs, les moteurs des médicaments, sont issus d’un pays hors de l’Union européenne, selon l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), et essentiellement de Chine et d’Inde où les coûts de production sont moindres. La proportion était seulement de 20 % il y a trente ans (Lire aussi Pénurie de médicaments : le dangereux business de l’industrie pharmaceutique).

      Le ralentissement, voire l’arrêt des chaînes de production des usines de fabrication chinoises des matières premières de médicaments du fait du confinement a réduit l’offre à mesure que la demande locale, puis mondiale, s’est embrasée. La prise de conscience du médicament comme produit stratégique est le reflet de la perte de la souveraineté française du fait du choix des industriels. Elle s’est accentuée avec cette crise sanitaire mondiale.

      Même le Doliprane, le médicament le plus vendu dans l’Hexagone, que Sanofi présente comme un pur produit « made in France », est dépendant de la production de sa matière première hors d’Europe. « Sanofi se procure son principe actif dans différents continents », admet le porte-parole du laboratoire.

      Or le paracétamol est recommandé en cas de fièvre liée au Covid-19, à l’inverse des anti-inflammatoires tels que l’ibuprofène ou la cortisone, comme l’a annoncé Olivier Véran, ministre de la santé, le 14 mars. La demande a encore augmenté en officine de ville au point que son achat devient rationné le 18 mars, mais aussi en hôpital. Dans une des pharmacies hospitalières interrogées, il sera de nouveau disponible, mais seulement à partir du 20 avril. « Cette situation de tension est seulement une question de jours », tente de rassurer le porte-parole de Sanofi.

      « Le manque de médicaments vitaux à venir pour lutter contre le Covid-19 serait insupportable. Nous importons de l’étranger beaucoup de médicaments de sédation profonde, or des solutions françaises sont envisageables », assure Pauline Londeix, confondatrice de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament.

      L’Observatoire a publié un communiqué de presse le 27 mars, devant l’absence de réponse du gouvernement à son courrier envoyé la veille. « Nous avons notamment demandé si des moyens sont recensés au niveau national pour voir quelle ligne de production de médicament pourrait être utilisée ou réquisitionnée pour réorienter au plus vite la production vers ces médicaments de première nécessité dont nous allons manquer. Car chaque jour compte, notamment dans la mesure où la demande mondiale pour ces médicaments est en train d’exploser », explicite le communiqué.

      D’autant que des mesures de protectionnisme sont envisageables sur les médicaments vitaux de la part des pays étrangers producteurs de remèdes. Exactement comme l’a fait le gouvernement français le 25 mars. Il a interdit l’exportation de médicaments à base d’hydroxychloroquine, expérimenté comme traitement du Covid-19 (lire aussi Chloroquine : itinéraire d’un traitement qui suscite espoir et controverse), par décret. Et ce, pour répondre aux inquiétudes montantes concernant les tensions d’approvisionnement naissantes du Plaquenil, le médicament à base d’hydroxychloroquine fabriqué par Sanofi – cette fois uniquement dans l’Hexagone – avec « une capacité de production qui évitera à la France toute rupture de stock », assure le porte-parole du laboratoire.

      Autre explication des difficultés d’approvisionnement dans les pharmacies des hôpitaux : les établissements des régions touchées à retardement tentent de faire des stocks pour se prémunir des pénuries à venir sur les produits vitaux face au Covid-19, ce qui alimente les tensions. « Depuis trois semaines, les pharmacies d’hôpitaux ont fait des stocks : habituellement, elles ont trente jours de réserves de médicaments, là elles en ont plutôt pour 45 jours », explique Jacques Trevidic, président du syndicat Action praticiens hôpital.

      « À Mulhouse, nos collègues ont utilisé en trois, quatre jours l’équivalent des produits dont ils ont besoin en un mois en réanimation habituellement », rapporte Cyril Boronad, pharmacien cannois. Pour répondre à ces pics de demandes, « souvent les laboratoires contingentent les livraisons en calculant ce qu’ils distribuent en fonction des consommations antérieures. Sauf que quand des services d’hôpitaux sont réquisitionnés pour soigner les patients Covid-19, le stock de produits vitaux pour soigner le coronavirus est réduit à zéro rapidement, explique Patrick Léglise, vice-président du Synprefh (Syndicat national des pharmaciens des établissements publics de santé). Nous essayons de trouver des médicaments alternatifs quand c’est possible, mais rapidement, eux aussi se retrouvent en tension en cascade. » Comble de la désolation de la situation sanitaire, il rapporte même des difficultés à s’approvisionner à présent en housses funéraires.

      Selon nos informations, l’agence régionale de santé d’Île-de-France a conclu un contrat avec la start-up MaPUI Labs le 27 mars qui sera opérationnel dans les prochains jours : son outil numérique cartographie les stocks de médicaments de ses hôpitaux et facilite les échanges de médicaments entre les établissements de la région en cas de ruptures de stock et de besoins imminents dans certains d’entre eux. D’autres régions ont montré leur intérêt. Un traçage instantané et national faciliterait les trocs de traitements en urgence… À condition que l’industrie pharmaceutique en fabrique suffisamment.

  • Fin de vie : la sédation profonde « peine à se mettre en place », Par François Béguin
    https://www.lemonde.fr/sante/article/2018/11/29/fin-de-vie-la-sedation-profonde-peine-a-se-mettre-en-place_5390291_1651302.h

    Dans un rapport, le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie relève la « frilosité » des soignants à mettre en œuvre cette procédure

    C’était l’une des dispositions phares de la loi Claeys-Leonetti « créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie », promulguée le 2 février 2016. La #sédation_profonde et continue jusqu’au décès devait permettre, sous certaines conditions, aux patients qui en faisaient la demande de « dormir avant de mourir pour ne pas souffrir ». Combinée à un développement des #soins_palliatifs, la mesure devait contribuer à mettre fin au « mal mourir » en France.
    Près de trois ans plus tard, ce dispositif « peine à se mettre en place sur le terrain », constate le groupe de travail mandaté par le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV), dans un document publié mercredi 28 novembre. Cette difficulté de mise en œuvre de la loi est toutefois difficile à mesurer avec précision, le nombre de sédations profondes et continues mises en œuvre n’étant pas officiellement recensé. La première enquête quantitative menée par le CNSPFV en 2017 ne fournit pas non plus de résultat probant.

    Dans le sillage de l’inspection générale des affaires sociales, qui avait jugé en juin que le droit à bénéficier d’une telle sédation était « encore peu exercé et de manière très hétérogène », le CNSPFV fait état d’une « certaine frilosité » des équipes soignantes à mettre en œuvre cette procédure, même pour « l’accès à des pratiques sédatives banales qui ne posaient aucune question éthique jusque-là ». Conséquence : « Cela engendre de l’incompréhension, voire parfois de la colère chez les familles qui ont essayé de l’obtenir pour leur proche en #fin_de_vie et qui avaient compris que c’était devenu un droit acquis depuis la loi de 2016. »

    Ambiguïté originelle de la loi
    Selon la loi, un #médecin ne peut pas s’opposer à une demande de sédation profonde et continue de la part d’un patient atteint d’une « affection grave et incurable », dont le « pronostic vital est engagé à court terme » et qui présente une « souffrance réfractaire aux traitements » ou lorsque sa « décision d’arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d’entraîner une souffrance insupportable »

    Or, dans les faits, « il y a une potentielle résistance médicale à ce droit », a fait valoir mercredi Valérie Mesnage, neurologue à l’hôpital Saint-Antoine à Paris et membre du groupe du travail. A l’origine de cette résistance, des « paradoxes » et des freins liés à l’ambiguïté originelle de la loi.
    Il y a d’abord la façon dont les patients formulent leur demande. Ils disent « vouloir être endormis », « que ça s’arrête », « ne plus souffrir », « ne pas vouloir mourir étouffé », sans forcément explicitement demander une « sédation profonde et continue jusqu’au décès ». En n’employant pas les termes consacrés par la loi, « cela peut créer un malaise chez les soignants, qui ne savent pas exactement ce que les patients entendent par les termes qu’ils utilisent et ce qu’ils attendent d’eux exactement », relèvent les auteurs de l’étude.

    Le CNSPFV estime par ailleurs que la loi Claeys-Leonetti, par son ambiguïté, a « échoué » à éloigner la question de l’#euthanasie, la différence entre #sédation_profonde_et_continue_jusqu’au_décès et euthanasie n’étant pas « perçue de façon si claire sur le terrain ». Certains patients s’en saisiraient d’ailleurs « pour qu’on les accompagne vers la mort à défaut de pouvoir avoir accès à une euthanasie active ».

    Réticences des équipes
    Autre frein pointé par le CNSPFV : les réticences des membres des équipes de soins palliatifs à mettre en place ce type de sédation irréversible, alors même qu’ils sont souvent les premiers à recevoir ce type de demande. « Or un certain nombre d’entre eux sont réservés vis-à-vis de cette pratique, estimant qu’elle n’est pas la plus conforme à l’accompagnement qu’ils souhaitent apporter aux patients en fin de vie », note le document.
    « Une demande de mort est souvent inacceptable pour une équipe, remarque Pascale Gabsi, psychologue clinicienne au CHU de Toulouse, qui raconte avoir dû « mener un combat au sein de son établissement pour faire appliquer la loi » et être devenue, pour cette raison, au fil des mois, « le bouc émissaire » de son équipe.

    #hôpital #mort

  • Pflegenotstand in Berlin: Sterbende wird mit ihren Schmerzen alleingelassen | Berliner Zeitung
    https://www.berliner-zeitung.de/berlin/pflegenotstand-in-berlin-sterbende-wird-mit-ihren-schmerzen-alleing


    A Berlin les soins palliatifs à domicile sont impossible. Il n’y a pas assez de’infirmiers compétents.

    Für einen Moment hält Dirk Bufé inne, bevor er die Tür zum Zimmer seiner Mutter öffnet. Die krebskranke Frau liegt im Sterben. Ihr Gesicht ist gelb, ihre Augen sind aufgerissen. Chihuahua-Hündin Mausi sitzt neben dem Bett. Bufé schließt die Tür wieder. „Die Ärzte in der Klinik haben Mutter entlassen – zum Sterben“, sagt er. Bis es soweit sei solle eine Palliativschwester kommen und Morphium gegen die Schmerzen spritzen. So sagten es die Ärzte. Doch in ganz Berlin ist derzeit keine solche Spezialkraft zu bekommen. Es herrscht Pflegenotstand. Und es sind Ferien.

    „Ich konnte nicht glauben, dass das wahr sein soll“, sagt Dirk Bufé. Er hätte es noch vor zwei Wochen für völlig ausgeschlossen gehalten, dass man einen Menschen in Deutschland einfach so dahinsiechen lässt. Doch im Büro der Berliner Patientenbeauftragten Karin Stötzner hat man bereits mit Erschrecken festgestellt, dass es solche Fälle gibt. „Wir haben von Patienten mit hohen Pflegestufen erfahren, Stufe drei oder vier, für die keine Pflegekraft verfügbar war“, heißt es dort. Der Mangel an zertifizierten Palliativpflegern, die Betäubungsmittel wie Morphium spritzen dürfen, sei eine Tatsache.

    Für Dirk Bufé bedeutet diese Tatsache, dass er die letzten Lebenstage seiner Mutter Brigitte Karzuki nun selbst gestalten muss, so gut er kann. Er wäscht sie, gibt ihr Wasser, spricht ihr beruhigend zu. Aber er sagt auch: „Ich fühle mich hilflos, wenn sie vor Schmerzen schreit.“ Ein niedergelassener Internist und Onkologe, der auf Todkranke spezialisiert ist, hat der 75-Jährigen nun Schmerzpflaster verschrieben. Deren Anwendung ist einfach, auch ein medizinischer Laie darf sie einem Angehörigen aufkleben. Aber sie sind in ihrer Wirkung nicht mit Spritzen zu vergleichen. „Der Arzt hat sich nach Kräften bemüht, eine zertifizierte Schwester zu organisieren, die auch kurzfristig nach Mutter sehen kann“, sagt Dirk Bufé. Doch selbst der gut vernetzte Mediziner hatte keinen Erfolg.

    Überall nur Absagen
    In ihrer Not haben sich Dirk Bufé und sein Ehemann Hartmut Benter an die Organisation Home Care Berlin gewandt. Der Verein sieht nach eigener Darstellung „seit 1993 seine Hauptaufgabe darin, durch eine intensive Versorgung für schwerstkranke Menschen die Möglichkeit zu schaffen, auch die letzte Lebenszeit im privaten Umfeld zu verbringen“. Die Mitarbeiter haben eine Liste aller 43 SAPV-Pflegedienste in Berlin erstellt. Die Abkürzung SAPV steht für spezialisierte ambulante Palliativversorgung. Hartmut Benter hat einen halben Tag gebraucht, um alle 43 Dienste anzurufen. „Keiner hatte eine Pflegekraft für uns“, sagt er.

    In ihren Antworten hätten die Pflegedienste zumeist drei Gründe für ihre Absage genannt, so Benter. Es gebe wenig spezialisiertes Personal, in den Sommerferien sei ein zusätzlicher Engpass entstanden und grundsätzlich könne man keine weiten Anfahrten in Kauf nehmen.

    Keine Hilfe für die eigene Mutter
    Das Ehepaar Benter und Bufé leben im Pankower Ortsteil Blankenburg, wo sie das Berliner Altenheim für Tiere und den Vogelgnadenhof betreiben. „Wir bemühen uns, jedem Tier einen Lebensabend in Würde zu ermöglichen“, sagt Dirk Bufé. Für ihn ist es eine grausame Vorstellung, dass er nun ausgerechnet für die eigene Mutter keine Hilfe besorgen kann. Beim Verein Home Care heißt es auf Anfrage; „Wenn alle zertifizierten Dienste absagen und auch der Arzt keinen mehr Rat weiß, bedeutet dies, dass in Berlin tatsächlich alle verfügbaren Kräfte gebunden sind.“

    Dirk Bufé hat einige medizinische Unterlagen seiner Mutter auf den Gartentisch gelegt. Er deutet auf den Entlassungsbrief der Klinik, in der sie zuletzt vom 10. bis 14. Juli stationär behandelt wurde. In dem Schreiben steht, Brigitte Karzuki leide unter Bauchspeicheldrüsenkrebs. Es gebe Metastasen in der Leber. „Dass meine Mutter Krebs hat, wissen wir erst seit diesem Klinikaufenthalt“, sagt Bufé. Bei einer großen Untersuchung im Sommer 2017 sei es ihr zwar schon schlecht gegangen, aber Tumore habe man nicht entdeckt.

    Man kann keinen Pflegedienst zwingen
    Das Augenmerk der Ärzte und der Familie lag immer auf den Vorerkrankungen. „Mutter hatte ein hartes Leben, sie hat viele Jahre getrunken und eine Demenz entwickelt“, sagt Dirk Bufé. Seit 27 Jahren wohnt sie nun bei ihm und Hartmut Benter. In dieser Zeit wurde Brigitte Karzuki dreimal auf ihre Pflegebedürftigkeit untersucht – in den Jahren 1995, 2009 und 2014. Doch jedes Mal kamen die Gutachter zu dem Schluss, dass für sie keine Pflegestufe infrage komme. Sie erhält lediglich etwas Geld nach dem Landespflegegesetz.

    Für den 3. August hat der Medizinische Dienst der Krankenversicherung nun eine neue Begutachtung angesetzt. „Wenn dabei festgestellt wird, dass sie dringend Hilfe benötigt, bringt uns das vielleicht weiter“, sagt Dirk Bufé. Doch zugleich hat er wachsende Zweifel, dass seine Mutter den 3. August noch erlebt.

    Die Berliner Patientenbeauftragte Karin Stötzner rät der Familie auf Anfrage, als nächstes an Sozialträger wie Caritas, Humanistischen Verband und Unionhilfswerk heranzutreten. „Dort muss man klar machen, dass ein Notfall vorliegt“, sagt sie. Ob das zum Ziel führe, sei jedoch offen. Die Familie könne auch, so Stötzner, noch einmal an die gesetzliche Krankenkasse herantreten und ihr Druck machen. Dirk Bufé ist skeptisch. Er sagt: „Bisher hieß es von der Krankenkasse, sie könne keinen Pflegedienst zwingen, zu uns zu kommen.“

    #Allemagne #Berlin #santé #maladie

    • En Allemagne le métier d’infirmière est toujours considéré comme une fonction auxiliaire qui serait exercée par des bonnes soeurs et autres Florence Nightingale pour des raisons morales. Rien à voir avec les pros dans les pays anglophones et en France. La rémunération correspond à cette image de la profession qui est toujours un métier situé au même niveau qu’un peintre en bâtiment ou un menusier. Il n’y a pas de formation universitaire mais un apprentissage sur place accompagné de quelques jours de formations scolaire par semaine.

      Pour devenir infirmier ou infirmière spécialisée en soins palliatifs il faut d’abord passer par ce moule et suivre des formations parfois privées et coûteuses. Demandez aux spécialistes, ne suis plus au courant des derniers développements dans ce domaine.

      Les jeunes assez qualifiés pour une formation exigente qui mène à une métier dur et sous-payé étant de plus en plus rares la situation actuelle n’est pas une surprise.

      Quand on agandit le champs de vue et prend en compte aussi les ravages dans le système hospitalier induits pas la privatisation désormais totale du secteur on arrive à des conclusions effrayantes en ce qui concerne la disponibilité de services de santé essentiels pour le commun des mortels allemands.