• La maison de mode italienne Loro Piana, propriété de LVMH, placée sous « administration judiciaire » pour avoir facilité l’exploitation d’ouvriers
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/07/14/la-maison-de-mode-italienne-loro-piana-propriete-de-lvmh-placee-sous-adminis

    Le tribunal de Milan reproche à la société de ne pas avoir mis en place les « mesures adéquates » pour vérifier les conditions de travail dans les ateliers de ses sous-traitants en Italie. Selon les enquêteurs, ils exploitaient des ouvriers en situation irrégulière sans respecter la législation sur la santé et la sécurité sur le lieu de travail.

    Selon les enquêteurs, la maison confiait la confection de vêtements à une société dépourvue de toute capacité productive, laquelle recourait elle-même à une autre société, qui à son tour faisait appel à des ateliers employant des ouvriers chinois en Italie pour faire baisser ses coûts. Dans ces ateliers étaient exploités des ouvriers en situation irrégulière sans respecter la législation sur la santé et la sécurité sur le lieu de travail, notamment pour « les salaires, les horaires de travail, les pauses et les vacances ».

    L’enquête a débuté en mai après la plainte d’un ouvrier chinois passé à tabac par son patron parce qu’il réclamait le paiement de ses arriérés de salaires. Les carabiniers ont constaté que des ouvriers étaient logés dans des « dortoirs construits abusivement et dans des conditions hygiéniques et sanitaires en dessous du minimum éthique ».

    Deux ressortissants chinois propriétaires d’ateliers ont été déférés devant la justice pour exploitation de main-d’œuvre, ainsi que deux Italiens pour violations des normes sur la santé et la sécurité sur le lieu de travail. Sept ouvriers dépourvus de titres de séjour ont aussi été renvoyés devant la justice.

    Le tribunal a aussi infligé des amendes d’un montant de plus de 181 000 euros et des sanctions administratives d’environ 60 000 euros. Les activités de deux ateliers chinois ont en outre été suspendues pour « violations graves en matière de sécurité et recours au travail au noir ».

    Loro Piana avait été acheté par #LVMH en 2013. L’actuel président de la société est Antoine Arnault, fils aîné de Bernard Arnault, patron de LVMH, dont un autre fils, Frédéric, est directeur général de cette filiale italienne. Contactés par l’AFP, ni Loro Piana ni LVMH n’étaient en mesure de réagir dans l’immédiat.

    Plusieurs prestigieuses maisons de mode, dont Armani, ont déjà été épinglées par la justice italienne dans des affaires similaires. L’autorité italienne de la concurrence a ainsi contraint en mai la marque de luxe Dior, appartenant également à LVMH, à verser 2 millions d’euros d’aide aux « victimes d’exploitation » dans le cadre d’une enquête sur les conditions de travail de ses sous-traitants. L’autorité avait toutefois exclu toute « infraction ».

    #industrie_du_luxe #sous_traitance #travailleurs_sans_papiers

  • Après un an de tractations avec Suez, la « demi-victoire » de sans-papiers exploités par un sous-traitant
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/07/10/exploites-par-un-sous-traitant-la-demi-victoire-de-sans-papiers-apres-un-an-


    Un nouveau groupe de travailleurs sans papiers des centres de tri des déchets d’Ile-de-France devant les prud’hommes

    Ils ont connu les horaires à rallonge, les tapis de tri aux cadences accélérées, les missions de nuit sur un site qui s’enchaînent avec des missions du matin sur un autre, les accidents du travail non déclarés, l’absence de congé maternité. Et cela pour une paye réduite, 60 euros la journée, 80 euros la nuit, dans un climat de racket et de harcèlement. « Il fallait aller toujours plus vite, et sans formation ni équipement de protection. Un jour, je suis rentré dans un four pour le nettoyer, le feu n’était même pas éteint à 100 % ! », se souvient encore Hicham, mercredi.

    Ce sont ces travailleurs eux-mêmes qui ont fini par dénoncer l’entreprise sous-traitante, NTI, à l’inspection du travail. Laquelle a orchestré des contrôles dans quatre centres de tri franciliens, fin 2022. Les dirigeants de NTI ont liquidé leur société quelques semaines plus tard. Mais certains de ses salariés sans papiers ont pu continuer à travailler plusieurs mois dans les mêmes centres de tri, en #intérim cette fois, prouvent les contrats qu’ils ont montrés au Monde.

    En août 2023, 11 travailleurs ont décidé les premiers de mettre ces dérives en lumière, en occupant le centre de tri XVEO de #Veolia, à Paris. Le Monde avait alors révélé les pratiques délétères de cette entreprise sous-traitante.
    « Compte tenu des éléments du dossier NTI portés à [sa] connaissance », Veolia a rapidement proposé une solution à l’ensemble du groupe de sans-papiers lanceurs d’alerte. Elle a rempli les précieux Cerfa, ces documents administratifs de demande d’autorisation de travail qui leur ont permis de déposer des #demandes_de_régularisation en préfecture.

    C’est ce qui a motivé un second groupe de 13 #travailleurs_sans_papiers exploités à sortir de l’ombre. (...) Le 12 juin 2024, ils ont déposé un dossier devant les #prud’hommes pour obtenir réparation des heures sous-payées. En parallèle, la CGT a entamé pour eux une discussion avec Suez, dans l’espoir que l’entreprise imite Veolia, et les embauche, ouvrant la voie à une possible régularisation.

    Mais les discussions n’ont cessé de s’enliser, les travailleurs refusant que le retrait du contentieux aux prud’hommes devienne la condition d’un accord. Or, la nouvelle pression exercée sur les sans-papiers ces dernières semaines, par des opérations de contrôle d’identité policières hors norme, a rendu plus stressante encore leur situation. « Je me sens toujours en danger, dès qu’on me regarde dans le bus je me dis “ils savent, ils vont me dénoncer”, témoigne Bouzid, 33 ans, la voix tendue, les yeux las. On travaille ici ou là dans des conditions pires qu’avant, tu te fais 5 heures-14 heures à porter des trucs lourds sur les marchés, et ça pour 20 ou 30 euros ! Mais quel choix j’ai ? » Il secoue la tête : « Ça fait vraiment mal… On n’en peut plus de vivre ça. C’est ce qui nous a donné le courage de manifester. »

    Le 1er juillet, les 13 sans-papiers se sont alignés devant l’entrée de #Suez par 39 °C. Le lendemain, ils sont entrés à l’intérieur quelques minutes. Le troisième jour, ils se sont scotchés la bouche. Et ainsi de suite, jusqu’à s’allonger sur l’esplanade.

    Lundi 8 juillet, Suez a formulé une offre : six embauches, pas plus. « Suez a arrêté ses activités avec NTI dès qu’elle a eu connaissance de ces pratiques illégales et contraires à l’éthique du Groupe », soutient l’entreprise dans une réponse écrite au Monde, affirmant n’avoir eu recours à ce sous-traitant que « de manière ponctuelle et limitée ». C’est parce qu’elle a été « sensible aux difficultés de ces personnes » que Suez a proposé à certains ces promesses d’embauche, lesquelles « pourront appuyer [leurs] demandes de régularisation. » Sans expliquer pourquoi elle ne proposait que six embauches.

    https://archive.ph/wAcRp

    #nettoyage #sous-traitance

  • « Comme un esclave » : L’industrie du #Champagne jugée pour #traite_des_êtres_humains

    Une affaire de traite des êtres humains, survenue lors des #vendanges de 2023, a été jugée jeudi 19 juin à Châlons-en-Champagne. Elle met au jour un système de #sous-traitance qui a conduit à une #maltraitance des travailleurs banalisée. Reportage.

    Devant le tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne, plusieurs dizaines de personnes, travailleurs immigrés et syndicalistes de la CGT, profitent des quelques coins d’ombre alors que l’audience du jour, ce jeudi 19 juin, est suspendue pour la pause de midi. « C’est une victoire que l’on soit tous là, que nos voix passent partout, à la radio, à la télévision », lance un travailleur au micro.

    Celui-ci fait partie des 47 travailleurs immigrés reconnus victimes potentielles d’une affaire de traite des êtres humains qui secoue l’image de luxe entretenu par l’industrie du Champagne. La moitié de la salle d’audience est remplie de ces travailleurs, concentrés dans leur écoute, venus massivement demander #justice.

    « Je salue le courage de ces vendangeurs des raisins de la misère. Ce procès doit marquer un tournant, introduit Maxime Cessieux, l’avocat de la CGT de la Marne et de la fédération agro-alimentaire et forestière. Si en septembre 2025 des récoltes se passent de la même façon, alors on aura échoué à attirer l’attention du monde entier sur ce qu’il se passe réellement en Champagne ».

    Ce dossier de traite des êtres humains incarne en effet l’envers du décor du travail saisonnier en Champagne. L’histoire commence dans une maison au cœur du petit village de #Nesle-le-Repons. 130 âmes, au milieu des splendides coteaux du vignoble champenois. Le 14 septembre 2023, trois inspecteurs du travail accompagnés de deux policiers y ont découvert des dizaines et des dizaines de #travailleurs_saisonniers, immigrés d’Afrique de l’Ouest (Mali, Mauritanie, Côte d’Ivoire, Sénégal…), entassés là, disposant de moins d’un mètre carré d’espace chacun. Dans ce #taudis, les matelas alignés à même le sol sont sales. L’électricité n’est pas aux normes. Il n’y a pas d’eau chaude tandis que les trois toilettes existantes sont vétustes et bouchées. Des conditions assimilables à un « #bidonville », résume le rapport de l’inspection du travail au cœur du dossier.

    « J’ai cru que l’on était dans une morgue »

    « Quand on est entrés dans cette maison, à 21h, j’ai vu les pieds des travailleurs, tous alignés en rang, dépasser d’un demi-plafond. J’ai cru que l’on était dans une morgue », glisse, assise sur les bancs du tribunal, Marilyne Breton, l’une des inspectrices du travail qui a découvert la situation. « Beaucoup d’entre nous étaient malades, fatigués, à cause de ces conditions insalubres. Personnellement, j’avais de la toux à cause de ça. Tout ça m’a énormément marqué, traumatisé », confie même devant les juges l’une des victimes présumées, M. Doumbia.

    À l’instar d’autres travailleurs qui l’écoutent derrière lui, et le soutiennent du regard, M. Doumbia a été recruté via les réseaux sociaux. D’autres l’ont été par des boucles Whatsapp ou par du bouche-à-oreille. Tous ont été ainsi ramenés de région parisienne vers la Marne, à bord d’un bus, où chacun a dû payer 10 euros sa place. Les deux recruteurs, Témuri Muradian et Abdoulaye Camara, leur ont fait miroiter 80 euros par jour travaillé, et un hébergement hôtelier. Aucune promesse n’a été tenue.

    Les deux hommes ont été engagés par une société de prestation, #Anavim, dirigée par une femme, #Svetlana_Goumina, de nationalité kirghize. Ce type de sociétés de prestataires de service s’est démultiplié ces dernières années, et fournit une large partie des 120 000 travailleurs qui viennent pour les vendanges chaque année. De la main d’œuvre à bas coût, basée sur une concurrence organisée entre travailleurs d’Afrique de l’Ouest et d’Europe de l’Est, tandis que les locaux délaissent ce travail difficile devenu trop mal rémunéré.

    En lieu et place de contrats, les rares qui ont signé un document, ont signé seulement une déclaration préalable à l’embauche – plusieurs d’entre eux ne savaient ni lire ni écrire. Les conditions de travail imposées dans ces #vignes étaient terribles, selon les témoignages recueillis. « Je n’ai jamais travaillé dur comme ça. On nous a aussi fait travailler sous la pluie. J’ai été traité comme un âne, comme un esclave », raconte M. Camara devant les juges.

    Un lever vers 5 h, un départ entre 6 et 7 h pour les vignes, entassés à l’arrière de fourgonnettes sans sièges et sans fenêtres, pour démarrer le travail à 8 h. Une fin de journée vers 18h30, avec une pause d’une demie-heure grand maximum le midi. Un retour à la maison vers 20h, parfois 21h. En somme : des amplitudes horaires à disposition de l’employeur qui explosent tous les compteurs du code du travail. Le tout, accompagnés d’une pression constante pour accélérer la cadence, de violences verbales et de menaces à l’arme blanche, racontent plusieurs victimes.

    Cinq kilos de riz pour une cinquantaine de personnes

    Malgré la dureté de la tâche, les travailleurs étaient sous-nourris. Un café le matin, un sandwich parfois « pourri », « encore congelé » le midi. Le soir, du riz avec parfois du poulet, mais en quantité très insuffisante. Cinq kilos de riz pour une cinquantaine de personnes, précisent les témoins. « J’étais mal. Je n’ai pas mangé pendant deux jours, j’ai eu des maux de tête », se souvient un autre travailleur, M. Camara, devant les juges. « Mais on est resté, on avait pas le choix. On se disait qu’on allait travailler et être payés. » Sans moyen de transport, #sans-papiers pour la plupart, les travailleurs ne savaient pas non plus comment se rendre à la gare la plus proche, à près de 2 heures 30 de marche.

    La traite des êtres humains est caractérisée par la #soumission de plusieurs personnes vulnérables ou dépendantes à des #conditions_d’hébergement indignes ou encore à une #rétribution insuffisante ou inexistante. On leur avait promis une paie à 80 euros par jour : la grande majorité n’a pas touché un centime. Sur les 57 personnes recensées par les gendarmes, 47 sont reconnues potentielles victimes de traite.

    Devant les caméras et les micros tendus vers Svetlana Goumina au début de l’audience, la responsable de la société de prestation donne à voir un air abattu, se laisse réconforter par sa fille. Face aux juges, elle nie en bloc le fait d’avoir acheté et aménagé cette maison pour y loger des vendangeurs. Elle dit ne pas les connaître. Assure qu’ils ont « squatté ». Que tout est la faute de ses deux hommes de main. Le procureur de la République, à sa gauche, lève les sourcils et souffle. C’est que le dossier d’instruction ne trompe pas : toutes les auditions et les perquisitions (achats de matelas en nombre, rétention de documents d’identité de travailleurs…) viennent contredire sa défense du jour – durant laquelle elle-même se contredit sans cesse.

    Rejet des responsabilités

    D’un bout à l’autre de la chaîne, tout le monde se défausse sur le maillon d’en-dessous, ou celui d’au-dessus. Le premier homme de main, #Témuri_Muradian, indique avoir « fait de son mieux » et répète qu’il avait « peur » de Svetlana Goumina et de son mari. Décrit par plusieurs victimes comme l’un des encadrants les plus violents, il nie en bloc et, habillé tout de blanc, jure en levant la main : « Je suis croyant, j’ai une famille. J’ai été piégé. Moi aussi, j’ai connu la galère ».

    Le recruteur lui-même a vécu en situation irrégulière pendant douze ans et a été amené à travailler comme saisonnier dans les vendanges, il y a près de quinze ans. Lui qui connaît le système, nie avoir compris qu’il recrutait des personnes sans-papiers : « On ne pouvait pas vérifier, on est pas des experts ». #Abdoulaye_Camara, le second recruteur, tient la même défense en disant que c’est Svetlana Goumina les a « mis dans la merde ».

    Le vigneron indépendant #Olivier_Orban, dont la SARL #Cerseuillat_de_la_Gravelle est poursuivie pour recours au #travail_dissimulé et à des étrangers en situation irrégulière, se défausse lui aussi sur la prestataire. Dans un secteur où la main d’œuvre se fait rare, « quand quelqu’un s’occupe de vous trouver du monde, vous savez, on est contents », balaie-t-il, derrière ses lunettes rouges et sa chemisette.

    Des travailleurs sont venus le voir pour se plaindre ? « C’est pas à moi de gérer ça, rétorque-t-il. Je pense même être un bon citoyen, je leur ai amené de l’eau ». Quand on lui demande s’il ne s’est tout de même pas dit qu’il y avait un problème en voyant les travailleurs, il ose même interpeller le président du tribunal : « Moi je ne peux pas vérifier si vous êtes en règle, c’est le ministère qui vous emploie ».

    Y compris lorsqu’on lui demande où part le raisin recueilli, le vigneron demeure vague. Il dit : « Je n’ai pas tous les gens en tête. On livre, après ce n’est plus de mon ressort. » Le dossier d’instruction ne suit pas la trace du raisin. Sauf que ce jour-là, les juges, insistent. Olivier Orban finit par lâcher un nom : #Moët_&_Chandon, propriété de #Bernard_Arnault via son groupe #LVMH. « Tous les prestataires, on travaille plus ou moins pour eux », ajoute le vigneron.

    Au vu des montages en sous-traitance, cette difficulté de responsabiliser les maisons de champagne se pose à chaque enquête ouverte. Ceci étant, en 2022, la justice avait identifié 200 victimes d’une traite des êtres humains survenue lors des vendanges 2018, dans laquelle il était avéré que les deux prestataires livraient pour #Veuve_Clicquot. Bien qu’un cadre de la maison ait été entendu au procès, l’entreprise n’a pas été jugée responsable. « Tant que les donneurs d’ordre ne seront pas sanctionnés, il ne se passera pas grand chose », estime José Blanco, secrétaire général de la CGT Champagne.

    « Chaîne de travail dissimulé »

    « C’est un système en bande organisée, caractérisé par l’#opacité : chacun dissimulant, chacun n’étant pas regardant, chacun refilant la responsabilité à l’autre… Tout cela aboutit à un #dumping_social, à traiter des gens pire que des animaux dans notre société actuelle », accuse l’avocat de la CGT Champagne, active depuis des années sur ces questions. Un système qui a des effets, bien au-delà des seules victimes de ce jour, sur tous les salariés du Champagne, estime l’avocat : « On déstabilise toute une économie. De vrais #emplois sont cassés par ça. »

    « C’est un scandale humain, organisé, et surtout banalisé par leurs auteurs. Qui sape les fondements même de notre cohésion sociale, introduit le procureur de la République dans ses réquisitions. On ne peut pas accepter que derrière n’importe quelle bouteille de champagne puisse se cacher une chaîne de travail dissimulé. Et la chaîne de sous-traitance ne saurait être un écran de fumée derrière lequel on dissimule l’#indignité ». Le procureur demande aux juges de reconnaître tous les prévenus coupables de l’ensemble des chefs de prévention.

    Il requiert quatre ans de prison dont deux avec sursis à l’égard de Svetlana Goumina, et trois ans de prison dont deux avec sursis pour les deux hommes de main. Enfin, 200 000 euros d’amende sont requis contre la société du vigneron. « Ce procès est l’occasion d’envoyer un message fort à tous les prestataires de service, appuie-t-il. La décision aura des retentissements, en espérant qu’elle sonne la fin d’un amateurisme professionnel. »

    En attendant, ces procès de l’indignité ne sont pas près de s’arrêter. Deux autres affaires sont en cours d’instruction par la procureure de Châlons-en-Champagne concernant de l’habitat indigne durant les vendanges 2024, nous indique la présidence du tribunal.

    Pourtant, ces vendanges 2024 avaient été particulièrement mises sous surveillance des autorités après les « vendanges de la honte » de 2023. Tandis qu’une autre affaire de traite des êtres humains pendant les vendanges 2023, concernant cette fois-ci des Ukrainiens, sera jugée en novembre dans ce même tribunal. Le délibéré de l’affaire de Nesle-le-Repons sera rendu courant juillet.

    https://basta.media/Comme-un-esclave-industrie-Champagne-jugee-pour-traite-des-etres-humains
    #traite_d'êtres_humains #néo-esclavage #agriculture #France #vin #travail #conditions_de_travail #exploitation #logement #migrations

    ping @karine4

  • La Tunisie met un terme aux contrats à durée déterminée
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2025/06/06/la-tunisie-met-un-terme-aux-contrats-a-duree-determinee_6610803_3212.html


    Dans une usine à Zriba, dans la région de Zaghouan, au sud de Tunis, en novembre 2024. FETHI BELAID / AFP

    Voté à l’unanimité par les députés présents, le 21 mai, le texte impose que toute relation de #travail soit, par défaut, fondée sur un contrat à durée indéterminé (CDI). Les #CDD ne pourront désormais plus être utilisés que pour le remplacement d’un salarié absent, un surcroît temporaire d’activité ou un emploi saisonnier.

    Autre disposition phare : l’interdiction de la #sous-traitance de main-d’œuvre. Les entreprises qui y recourent pour couvrir des postes structurels au sein de missions récurrentes devront désormais intégrer en CDI les salariés concernés à leurs effectifs, avec reconnaissance rétroactive de leur ancienneté.

    [...]

    Dans certains secteurs, les effets de la réforme ne se sont pas fait attendre. Dans le tourisme, pilier essentiel de l’économie tunisienne, représentant environ 5 % du PIB et 10 % avec les retombées indirectes, des #licenciements ont été observés dès l’annonce de l’adoption de la loi. Le 27 mai, Mohamed Baraketi, secrétaire général adjoint de la Fédération générale du tourisme, de l’artisanat et du commerce, faisait état de « centaines de licenciements préventifs », du fait d’employeurs craignant de devoir titulariser des employés ponctuels ou saisonniers.

    A Sousse, station balnéaire du centre-est du pays, entre 400 et 500 employés de l’hôtellerie auraient été remerciés en quelques jours, selon des déclarations de M. Baraketi à Echaab News, le journal en ligne de l’UGTT. Le même phénomène aurait été observé à Djerba et dans le gouvernorat de Médenine, dans le Sud-Est, avec environ 250 licenciements recensés. La région de Nabeul, qui abrite notamment la ville de Hammamet, aurait, elle aussi, enregistré la suppression de 400 à 500 postes.

    Ces licenciements témoignent du flou qui entoure l’application du nouveau texte, en particulier pour les emplois saisonniers, pourtant considérés comme dérogatoires dans la loi. Dans l’attente de la publication des décrets d’application, la crainte de sanctions ou de requalifications judiciaires semble avoir précipité une réaction défensive du patronat.

    Le porte-parole de l’UGTT, Sami Tahri, a affirmé que le nombre réel de licenciements serait bien supérieur à celui avancé par la fédération du tourisme ....

    https://archive.ph/98fK7

  • #Permis_miniers délivrés en #Bretagne : pour quoi faire ?

    C’est un projet qui commence à faire pas mal de bruit en Bretagne : un projet d’#exploration_minière qui concerne au total 22 communes bretonnes, 4 du côté d’#Hennebont et 18 dans le pays de #Redon (+ 2 communes du 44)./ Des demandes de permis d’exploration minière ont été déposés par une société canadienne. Elle veut explorer le sous-sol en espérant y trouver des #métaux_rares très recherchés actuellement. Communes et habitants se mobilisent, car l’État devrait rendre sa décision fin 2025. illustration dans le #Pays_de_Redon visé par l’un de ces permis de recherche

    https://www.youtube.com/watch?v=aMT7BwVU5dc


    #mines #extractivisme #France #Canada #résistance #sous-sol #métaux_rares #projet_taranis #stop_taranis #taranis #Breizh_Ressources (https://www.breizh-ressources.bzh) #Aurania_Resources #Fruta_del_Norte #or #mines_d'or #eau #eau_potable

    signalé aussi par @simplicissimus ici :
    https://seenthis.net/messages/1103635

  • « C’est une course capitaliste extrême » : à Canton, dans les ateliers de la sueur de Shein
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/05/10/c-est-une-course-capitaliste-extreme-a-canton-dans-les-ateliers-de-la-sueur-


    [le journal ne légende pas mais c’est un atelier pliage-enpaquettage pour expédition individuelle, probablement d’un des sous traitant qui conçoit et produit des articles Shein - Amazon grillé]

    « Le Monde » s’est rendu dans plusieurs ateliers qui produisent des millions de vêtements pour le géant chinois de l’e-commerce. Employés et patrons racontent l’âpreté d’un système ultraconcurrentiel.

    .... ces métiers difficiles n’attirent pas les jeunes.


    A l’heure de la pause du dîner, la salle pleine d’un restaurant ouvrier, à Canton (Chine), le 15 avril 2025. GILLES SABRIÉ POUR « LE MONDE »


    Un immeuble abritant des ateliers de couture pour Shein, à Canton (Chine), le 15 avril 2025. GILLES SABRIÉ POUR « LE MONDE »

    « Ici, l’efficacité est double par rapport à l’Asie du Sud-Est, dit cet homme en tee-shirt beige. La Chine produit les matières premières et nous proposons les modèles. Autour de Canton, des centaines de milliers de gens travaillent dans ce secteur. »

    Il faut bien cela, car la cadence est élevée, comme en témoigne l’écran plat géant fixé au mur et sur lequel le directeur garde un œil : s’y affichent la production de l’atelier – des données partagées en temps réel avec le siège de Shein – ainsi que les commandes pour les semaines à venir. Il détaille : pour les habits qui sortiront en juin, les designs ont été proposés en avril, ils doivent être arrêtés définitivement mi-mai. « Si Shein veut soixante nouveaux produits par mois chez nous, on doit lui en proposer 600, et il y a des allers-retours », résume le patron.

    Une des clés de Shein est de confier largement aux ateliers fournisseurs le soin de lui proposer les nouveaux modèles.


    Une ouvrière dans un atelier produisant des vêtements pour Shein, à Canton (Chine), le 15 avril 2025. GILLES SABRIÉ POUR « LE MONDE »


    Dans un atelier produisant des vêtements pour Shein, à Canton (Chine), le 15 avril 2025. GILLES SABRIÉ POUR « LE MONDE »

    De même, Shein donne un avertissement si les employés travaillent plus de vingt jours d’affilée. L’entreprise demande que les ouvriers de ses fournisseurs ne fassent pas plus de huit heures par jour mais, comme ce n’est réaliste ni pour tenir la cadence ni pour assurer un revenu suffisant aux travailleurs, les fournisseurs acceptent de payer les amendes de Shein ou parviennent à contourner les règles. Les inspections, faites par un auditeur tiers, n’ont lieu que deux fois par an.

    M. Wang s’interroge lui-même sur la viabilité du modèle économique, tant les prix sont cassés entre producteurs et entre sites de vente en ligne concurrents. « C’est une course capitaliste extrême. Cette industrie va à une telle vitesse qu’elle va mourir d’ici à cinq ans », prédit le patron, qui voudrait bien savoir comment tout cela est perçu en Europe. Hasard de la mode, son assistant à côté porte un tee-shirt sur lequel est écrit « Nous sommes le prolétariat ».

    https://archive.ph/SGjfO

    On dit fast-fashion mais c’est un point de vue de consommateurs, de supposés esthètes ou de concurrents. Il s’agit de production accélérée et d’"innovation" rapide (offre renouvelée sans cesse pour susciter et éponger la demande)

    (sinon, pour une fois, le bourgeoisisme produit un bon titre avec cette allusion au sweat shop chargé d’histoire, qui boucle avec la chute, "prolétariat").

    #Chine #Canton #Mode #industrie_textile #sous_traitance #ouvriers et #journaliers #designers #avion-cargo

  • Il “clima di terrore” tra i lavoratori dei centri per migranti in Albania

    Riservatezza e “obbligo di fedeltà” sono alcune delle clausole che i dipendenti di Medihospes Albania hanno dovuto sottoscrivere per iniziare a lavorare nelle strutture di #Shëngjin e #Gjadër. Gli operatori lamentano cattiva gestione e licenziamenti improvvisi. A un anno dall’aggiudicazione dell’appalto, la prefettura di Roma e il gestore non hanno ancora firmato il contratto. Mentre il governo ha riavviato i trasferimenti nella massima opacità. La nostra inchiesta.

    “Firmando il contratto abbiamo dovuto accettare una clausola che prevede ‘l’obbligo di fedeltà’: all’interno dei centri c’era un clima di terrore”, dice Arben, nome di fantasia di un ex dipendente della Cooperativa #Medihospes, l’ente gestore delle strutture per migranti di Shëngjin e Gjadër, in Albania, volute dal Governo Meloni. Un castello di carta retto da silenzio e “fedeltà” che poche informazioni fanno crollare in fretta.

    Documenti ottenuti da Altreconomia dimostrano infatti la confusionaria gestione del ministero dell’Interno dopo la frettolosa apertura di metà ottobre 2024, quando i centri erano in gran parte inagibili. A pochi mesi di distanza, la sostanza non è cambiata: il nuovo avvio dell’11 aprile è avvenuto nel buio più totale e ancora senza un contratto esistente tra la prefettura di Roma e Medihospes.

    Riavvolgiamo però il nastro per capire che cosa è successo. Esattamente un anno fa, il 16 aprile 2024, viene aggiudicato l’appalto da oltre 133 milioni di euro per la gestione dei centri e quando la presidente del Consiglio Giorgia Meloni si reca in Albania il 5 giugno 2024 per inaugurarli, l’apertura sembra imminente. Non è così: tutto resta fermo per settimane con l’esecutivo che posticipa di mese in mese l’apertura. Poi, in pochissimi giorni arriva un’accelerazione.

    L’8 ottobre avviene il doppio passaggio di “consegna” della struttura di Gjadër, il cuore del progetto albanese che prevede oltre 800 posti tra l’hotspot, il Cpr e la sezione destinata al carcere: il ministero della Difesa italiano, che ha svolto i lavori, consegna le strutture alla prefettura di Roma che a sua volta ne affida la gestione a Medihospes. Il documento, ottenuto da Altreconomia, sottolinea che l’avvio è parziale e “in via d’urgenza” ma il motivo dell’improvvisa fretta del governo non è indicato. Quel che è lampante, invece, è il ritardo dei lavori come dimostra la mappa allegata al verbale di inizio attività in cui vengono delimitate le aree ancora oggetto di cantiere che coprono gran parte del perimetro dei centri.

    I problemi non sono solo relativi agli spazi inagibili. Con una nota del 14 ottobre 2024, a tre giorni dall’arrivo dei primi migranti intercettati in mare, Medihospes indica alla prefettura tutte le criticità di un avvio della gestione così precipitoso. “Sono state consegnate all’ente gestore due palazzine alloggi ma, come poi verificato nelle ore successive presso il sito di Gjadër, solo una è utilizzabile dal personale atteso che la seconda è priva di letti”. I posti destinati ad alloggi per l’ente gestore “da capitolato risultano essere 60” mentre al 14 ottobre erano stati consegnati “soli 24 posti e non 48”, come era stato evidentemente pattuito. Secondo la cooperativa ciò rappresenta una “enorme criticità che comporta un notevole aggravio dei costi per la conseguente sistemazione del personale trasfertista”.

    Ancora. “Il numero delle aree destinate a spogliatoio del personale dell’ente gestore risulta assolutamente insufficiente”. Un’altra criticità è l’assenza di un locale da destinare a mensa o sala per la distribuzione dei pasti, così come l’affidamento a Medihospes della gestione di una “control room” non rientrante nelle prestazioni previste dal capitolato e dagli atti di gara. Solo per questa attività, comunicata all’ente gestore a sette giorni dall’avvio del servizio, serviranno un totale di 336 ore settimanali per le operazioni di videosorveglianza, antintrusione, antincendio, gestione di accessi e la filodiffusione.

    La cooperativa si mette addirittura a disposizione per fornire servizi non previsti del bando di gara, compresa la citata “control room”. Il confine tra gestione e sorveglianza si fa così progressivamente sempre più labile. Tanto che l’ente segnala le problematiche relative ai “varchi con cancelli motorizzati, non essendoci cancelli pedonali per entrare nei singoli lotti”. Medihospes sottolinea che “l’apertura frequente dei cancelli carrabili aumenterebbe il rischio di tentativi di fuga dal singolo lotto verso le aree comuni”, auspicando la realizzazione di “cancelli metallici dotati di tornello” così da garantire un maggior controllo.

    Insomma, i centri allora sono ancora lontani dall’essere pronti ma il 15 ottobre, mentre la nave Libra sta trasportando le prime persone soccorse al largo di Lampedusa verso le coste albanesi, arriva la firma del “verbale di esecuzione anticipata”. La giustificazione indicata dalla prefettura è “l’esigenza e l’urgenza di assicurare nell’interesse pubblico l’avvio del servizio di accoglienza e dei servizi connessi”.

    “La mancata firma del contratto sembra testualmente fondarsi su ragioni di urgenza che tuttavia sono correlate all’interesse pubblico di vedere avviati i centri -osserva Maria Teresa Brocchetto, avvocata amministrativista di Milano e socia dell’Associazione per gli studi giuridici sull’immigrazione (Asgi)– con una formulazione che suona solo tautologica e lascia inspiegata la ragione stessa dell’urgenza, a fronte di un protocollo della durata di cinque anni e di un contratto di gestione della durata di due anni prorogabile per altri due”. Un contratto che ancora oggi, a un anno di distanza, non sembra essere stato firmato.

    La confusione organizzativa poi ha avuto effetti negativi soprattutto sui lavoratori assunti da Medihospes, che a luglio 2024 ha aperto una filiale con sede a Tirana. “Ho siglato il contratto la notte prima dell’arrivo della nave Libra, non ho avuto neanche il tempo per leggere attentamente tutte le clausole”, riprende Arben, che racconta di non aver mai neanche ricevuto una copia dell’originale. “Ci è stata consegnata solo la fotocopia ma due mesi dopo la firma”, aggiunge, raccontando poi nel dettaglio come ha vissuto la prima operazione del governo. “Quando le prime persone sono arrivate sembravano spaventate, con gli sguardi assenti e sopraffatti dalle informazioni ricevute nell’hotspot di Shëngjin. Anche per noi è stato difficile seguire queste procedure”.

    Dopo il primo sbarco non sono stati solo i migranti ad affrontare la confusione ma anche gli operatori albanesi che non avevano ricevuto alcuna formazione. “Ci è stato detto di mantenere un ruolo di osservazione durante quella operazione. Non conoscevamo altri colleghi, né avevamo una visione d’insieme sul funzionamento dei centri. Fino alla fine di dicembre non abbiamo avuto nemmeno un ufficio”, sottolinea l’ex lavoratore, criticando la cattiva gestione e il caos della prima operazione avvenuta in fretta e furia. Tanto che i turni di lavoro sono stati forniti ai lavoratori molto tardi. “Tra le nove e le dieci della sera prima, e questo è accaduto anche nella seconda operazione”, spiega Arben.

    Inoltre, la prima formazione dello staff, durante la quale i lavoratori sono stati istruiti su tutte le procedure che si svolgono a Shëngjin e Gjadër con esercizi di simulazione sarebbe avvenuta solo una settimana dopo il primo trasferimento. Le sessioni informative sarebbero state condotte da Benedetto Bonaffini, imprenditore di Messina e già vicepresidente nazionale della Federazione italiana esercenti pubblici e turistici (Fiepet) di Confesercenti nonché colui che ha supportato Medihospes (allora Senis Hospes, come raccontato qui) a implementare le proprie attività nella città siciliana, soprattutto nell’ambito dell’accoglienza dei minori stranieri non accompagnati.

    I lavoratori albanesi assunti da Medihospes nei primi mesi di attività nei centri sono stati 99. Il contratto che hanno firmato ha stringenti clausole di riservatezza e fedeltà

    Nonostante gli esorbitanti investimenti per i centri stimati in 800 milioni di euro, i lavoratori hanno poi lamentato l’assenza di condizioni adeguate di base per il personale, tra cui il fatto che hanno dovuto viaggiare a proprie spese per coprire i venti chilometri di distanza che separano l’hotspot di Shëngjin ai centri di Gjadër. “Il mio turno più lungo è durato dalle otto del mattino alle undici di sera, anche se per legge non possiamo lavorare più di 12 ore -denuncia il lavoratore-. La cooperativa ci ha pagato tutti gli straordinari che abbiamo lavorato, ma non ci ha riconosciuto l’aumento del 25% del salario per le ore extra dopo le 19 previsto dal contratto”.

    Sulla base di una lista interna di lavoratori ottenuta da Altreconomia, Medihospes Albania avrebbe assunto 99 lavoratori nei primi mesi di attività dei centri. Tra ottobre 2024 e metà gennaio 2025 sono stati contrattualizzati dieci mediatori, 14 informatori legali, sette operatori sociali e altri professionisti sanitari e amministrativi. Uno di questi ci ha mostrato il contratto di lavoro, basato sul diritto albanese, evidenziando le stringenti clausole di riservatezza che hanno costretto molti dei suoi colleghi a non parlare con i giornalisti. L’articolo 11 s’intitola “Riservatezza”, quello successivo “Obbligo di fedeltà” e prevede il dovere dei lavoratori a “mantenere segrete tutte le informazioni relative all’attività del datore di lavoro, informazioni di cui è venuto a conoscenza durante il periodo di impiego presso il datore di lavoro”. Anche dopo la fine del rapporto di lavoro.

    Oltre al contratto, i lavoratori hanno dovuto firmare poi un codice di condotta, ovvero un documento interno che stabilisce le linee guida per garantire standard etici e professionali. Quest’ultimo li obbliga a consegnare il telefono all’ingresso del centro e a riporlo in un armadietto chiuso a chiave per utilizzarlo solo durante le pause, tranne nei casi in cui abbiano presentato al direttore del centro la richiesta di tenere il cellulare per esigenze di salute. Se non rispettano il codice di condotta, le persone assunte rischiano di incorrere in sanzioni che vanno dall’ammonimento scritto alla risoluzione del contratto. Come sostengono diversi ex dipendenti sentiti da Altreconomia, i rischi di infrangere il dovere di riservatezza ha fatto sì che si diffondesse paura nel denunciare potenziali abusi per timore di azioni legali o di licenziamento da parte dell’ente gestore.

    “Alcuni colleghi mi hanno raccontato di aver firmato il contratto il 3 febbraio quando i migranti erano già stati riportati in Italia. Appena due ore dopo la firma sono stati informati in una riunione che il rapporto di lavoro si sarebbe concluso a metà febbraio” – Arben

    Licenziamento che è comunque arrivato, per molti di loro, a metà febbraio. Infatti, dopo la conclusione dei primi tre mesi di contratto a gennaio 2025, alcuni dipendenti sono stati richiamati in vista del terzo tentativo del governo italiano di trasferire i migranti dopo i due “fallimenti” di ottobre. Ai lavoratori è stato fatto firmare un contratto di sei mesi ma le cose non hanno funzionato come il Governo Meloni auspicava: il 31 gennaio tutti e 43 i migranti portati in Albania hanno fatto rientro in Italia su decisione del Tribunale di Roma, che ha applicato la legge. “Alcuni colleghi mi hanno raccontato di aver firmato il contratto il 3 febbraio quando i migranti erano già stati riportati in Italia -sottolinea Arben-. Appena due ore dopo la firma sono stati informati in una riunione che il rapporto di lavoro si sarebbe concluso a metà febbraio”. La “giustificazione” data dall’ente gestore è stata fatta risalire a “una serie di pronunce giudiziarie contraddittorie e non conformi agli orientamenti della Corte di cassazione”, come si legge nella comunicazione di interruzione del contratto di lavoro inviata ai dipendenti da Walter Balice, l’amministratore di Medihospes Albania.

    L’ennesimo tentativo di rendere operativi i centri è iniziato come detto l’11 aprile di quest’anno con il trasferimento a Gjadër di 40 persone straniere rinchiuse nei Centri di permanenza per il rimpatrio (Cpr) italiani. Due sono già tornate in Italia ma è una delle poche informazioni note. L’operazione è infatti avvenuta nella più totale opacità. “Non abbiamo potuto avere accesso alla lista di chi è rinchiuso e ci sono già stati gravi atti di autolesionismo -racconta Rachele Scarpa, parlamentare del Partito democratico che ha visitato i centri il 16 aprile-. Sul contratto, invece, l’ente gestore non ha potuto rispondere altro che ‘no comment’”.

    I nodi critici rimangono così molti. Non si sa se è previsto un importo minimo garantito a Medihospes per questi mesi di stop forzato delle strutture ma soprattutto la prefettura oggi sembra trovarsi in una posizione scomoda con l’ente gestore, vista la mancata firma del contratto a un anno dall’aggiudicazione dell’appalto. La prefettura di Roma non ha risposto alle nostre richieste di chiarimento, così come la cooperativa che si è limitata a dire che “essendo un fornitore” non gli è permesso commentare quello che succede nei centri in Albania.

    https://altreconomia.it/il-clima-di-terrore-tra-i-lavoratori-dei-centri-per-migranti-in-albania
    #Albanie #Italie #externalisation #travail #conditions_de_travail #contrat_de_travail #Medihospes_Albania #licenciement #sous-traitance #privatisation #obbligation_de_loyauté #migrations #réfugiés #asile #control_room #Benedetto_Bonaffini #code_de_conduite #Walter_Balice

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    ajouté à la métaliste sur l’#accord entre #Italie et #Albanie pour la construction de #centres d’accueil (sic) et identification des migrants/#réfugiés sur le territoire albanais...

    https://seenthis.net/messages/1043873

    • Automutilation, « violation flagrante des droits », expulsion coûteuse... Les transferts de migrants vers l’Albanie sous le feu des critiques

      Dix jours après le transfert de 40 migrants d’Italie vers l’Albanie en vue d’une expulsion vers leur pays d’origine, deux personnes ont dû être rapatriées en Italie pour des cas d’automutilation et deux autres pour des questions juridiques. Dans la structure de Gjadër, les exilés sont confrontés à une « violation fragrante de leurs droits », estiment des parlementaires qui ont visité les lieux. Les autorités italiennes, de leur côté, vantent le « premier rapatriement d’un citoyen étranger » détenu en Albanie.

      Les revers s’enchaînent pour le gouvernement italien dirigé par la Première ministre d’extrême droite Giorgia Meloni. Dix jours après le transfert en Albanie de 40 migrants, quatre d’entre eux sont déjà de retour en Italie, indique la presse locale.

      Le 11 avril, 40 exilés maintenus en centre de rétention italien ont été expulsés vers le centre albanais de Gjadër, dans le cadre d’un accord entre Rome et Tirana. Ils sont désormais enfermés dans la structure en attendant leur renvoi dans leur pays d’origine. Une procédure qui peut prendre des mois.

      Très peu d’informations ont filtré sur la nationalité et le profil de ces personnes. Selon Rome, plusieurs d’entre elles ont des casiers judiciaires pour des faits de violences, de tentative de meurtre ou de trafic de drogue.
      Inaptes à la détention

      Mais ce transfert, largement salué par le gouvernement, semble déjà avoir du plomb dans l’aile. Quelques jours après leur arrivée en Albanie, deux migrants ont été rapatriés vers l’Italie pour des cas d’automutilation. Du fait de leur état psychologique, ils ont été jugés inaptes à ce type de détention.

      Deux autres ont été renvoyés sur le sol italien pour des questions juridiques : l’un car son appel sur sa demande d’asile n’a pas encore été traitée par la justice italienne, l’autre parce qu’il a déposé une demande de protection internationale à son arrivée en Albanie.

      En effet, l’accord entre les deux pays stipulent que seuls les migrants jamais entrés en Italie et les personnes en situation irrégulière présente sur le territoire national peuvent être transférés en Albanie. En demandant l’asile, même une fois arrivé sur le sol albanais, cette personne n’entre dans aucune de ces deux catégories, et ne peut donc être retenue à Gjadër.
      Première expulsion controversée vers le Bangladesh

      Le gouvernement, lui, préfère mettre en avant la réussite de son projet. Samedi 19 avril, le ministre de l’Intérieur Matteo Piantedosi s’est ainsi réjoui sur X du « premier rapatriement d’Albanie d’un citoyen étranger détenu au centre de Gjadër ». « Les opérations de rapatriement des migrants irréguliers se poursuivront dans les prochains jours comme le prévoit la stratégie du gouvernement pour une action plus efficace de lutte contre l’immigration illégale », a-t-il martelé.

      Mais le ministre omet de préciser que pour parvenir à cette évacuation, le processus a été long et coûteux. Selon la presse italienne, ce ressortissant bangladais de 42 ans a été transféré fin mars du centre de rétention de Pian del Lago, à Caltanissetta (Sicile) où il se trouvait, vers celui de Brindisi (Sicile). C’est depuis cette structure que les 40 exilés ont été envoyés en Albanie le 11 avril. Après six jours dans le centre de Gjadër, le Bangladais a été rapatrié en l’Italie, et enfin expulsé vers Dacca. Les expulsions d’étrangers vers un pays tiers ne pouvant se faire directement depuis le sol albanais.

      Au total, cette expulsion a coûté pas moins de 6 000 euros aux autorités italiennes, contre 2 800 euros si l’homme n’avait pas été transféré en Albanie, d’après les calculs de la Repubblica.

      « Comment peut-on qualifier, sinon de farce, le fait de déplacer un migrant déjà détenu dans un CPR [centre de rétention, ndlr] en Italie vers l’Albanie et de le rapatrier, alors qu’il aurait pu être rapatrié directement d’Italie, plus tôt et sans frais supplémentaires pour la communauté ? », s’est interrogé sur les réseaux sociaux le vice-président du parti libéral Italia Viva, Davide Faraone. « Les CPR en Italie ne sont pas pleins (...) Il n’existe aucune situation de surpopulation justifiant l’utilisation de centres albanais inutiles et les mouvements de navires militaires le long de la Méditerranée », a insisté le responsable politique.
      « Opacité et manque d’accès à l’information »

      Dès les premiers jours, les transferts vers l’Albanie ont suscité de vives critiques. Lors d’une visite dans la structure de Gjadër mi-avril, la députée italienne Rachele Scarpa, du Parti démocrate (centre gauche), et l’eurodéputée Cecilia Strada (Alliance progressiste des socialistes et démocrates) ont pu rencontrer quatre des quarante migrants retenus.

      Selon ces femmes politiques, toutes les personnes « ont appris dès leur arrivée qu’elles seraient transférées en Albanie. Aucune information préalable n’a été donnée, en violation flagrante de leurs droits ». L’un des exilés a raconté avoir été réveillé à 3h du matin dans le centre de rétention italien où il se trouvait, et qu’il avait découvert qu’il était en Albanie qu’après l’atterrissage. Il n’avait pas eu accès à un avocat.

      Les parlementaires dénoncent aussi le manque de transparence du gouvernement. « L’ensemble de l’opération en Albanie est mené dans l’opacité et dans un manque d’accès à l’information pourtant cruciale pour l’exercice adéquat de nos pouvoirs d’inspection en tant que parlementaires. »

      Avec le transfert de 40 exilés début avril, le gouvernement italien tente de « remettre en activité » les centres d’accueil pour demandeurs d’asile que Rome a construit à grands frais en Albanie. Fin mars, le Conseil des ministres avait adopté un décret-loi permettant de recycler les structures en centres de rapatriement pour migrants en situation irrégulière.

      Un projet de reconversion qui témoigne de l’inutilité de ces centres alors que la justice italienne a refusé à plusieurs reprises de valider la détention en Albanie de migrants interceptés en mer, exigeant même leur rapatriement sur le territoire italien.

      La Première ministre d’extrême droite Giorgia Meloni défend, depuis son arrivée au pouvoir en octobre 2022, un projet de d’externalisation du traitement de l’immigration dans un pays tiers, présenté comme un « modèle » pour toute l’Europe.

      https://www.infomigrants.net/fr/post/64111/automutilation-violation-flagrante-des-droits-expulsion-couteuse-les-t

  • #nucléaire : un périmètre étendu pour la distribution de pastilles d’iode
    https://splann.org/nucleaire-un-perimetre-etendu-pour-la-distribution-de-pastilles-diode

    De nouvelles communes situées à proximité des installations militaires de #brest et de l’Île Longue sont actuellement concernées par la distribution de pastilles d’iode stable. Passé récemment de 2 à 5 km, le périmètre de sécurité entourant ces sites militaires reste quatre fois plus petit que celui des centrales françaises et vingt fois inférieur à […] L’article Nucléaire : un périmètre étendu pour la distribution de pastilles d’iode est apparu en premier sur Splann ! | ONG d’enquêtes journalistiques en Bretagne.

    #Santé_publique #finistère #Île_longue #iode #sous-marins

  • #Decathlon : révélations sur un champion de l’#exploitation

    Des vêtements innovants et bon marché : tels sont les ingrédients du succès de Decathlon. Mais des documents confidentiels obtenus par Disclose racontent une tout autre histoire sur le géant français du sport. Travail d’enfants, exploitation d’ouvriers #ouïghours en #Chine, liens avec la #déforestation au #Brésil… Enquête sur une #multinationale prête à tout pour maximiser ses profits.

    La tente « 2 secondes ». Le sac à dos Quechua à 3 euros. Le masque intégral pour plonger à trois mètres de profondeur. Derrière ces produits iconiques, un nom qui rime avec innovation : Decathlon. La marque française a fait de son ingéniosité un emblème, vantant ses centres de conception au pied des Alpes, sur la côte Atlantique ou près de Lille. C’est là, dans le Nord, qu’elle a fait ses débuts en 1976, dans un petit entrepôt au bord d’une quatre-voies. Près de cinquante ans plus tard, elle a conquis les cœurs des consommateur·ices, s’affichant en tête des enseignes préférées des Français·es.

    Cette performance ferait presque oublier que Decathlon est avant tout une machine à cash, qui ouvre un magasin tous les quatre jours dans le monde. Son chiffre d’affaires a doublé en dix ans, atteignant 15,6 milliards d’euros en 2023, pour 931 millions d’euros de bénéfice net. Une prouesse telle que l’entreprise, non cotée en bourse, a versé l’an dernier 1 milliard d’euros de dividendes à son actionnaire majoritaire, la famille #Mulliez, également propriétaire de #Leroy_Merlin, #Auchan, #Kiabi ou #Flunch. Un partage de valeur réalisé au détriment des salarié·es des magasins, dénoncent les syndicats de Decathlon, qui ont appelé à la #grève en décembre 2024 ; fait rarissime dans l’histoire de l’enseigne. Peu coutumière des polémiques, la marque avait vu son image écornée fin 2023, lorsque Disclose avait révélé la poursuite de ses ventes en #Russie à l’aide de sociétés domiciliées dans les #paradis_fiscaux. Déjà, « l’amour du sport » revendiqué par la marque semblait s’effacer derrière l’appât du gain. Ce que vient confirmer une nouvelle série d’enquêtes de Disclose.

    Documents internes et témoignages inédits

    Pendant un an, nous avons plongé dans les secrets de fabrication de la multinationale française. Grâce à l’analyse de plusieurs dizaines de documents internes, des témoignages inédits d’ex-employé·es et la collaboration de chercheur·euses indépendant·es, notre investigation met au jour les graves conséquences humaines et écologiques de la stratégie « low cost » de Decathlon.

    Salaires misérables au #Bangladesh, #travail_d’enfants et #trafic_d’êtres_humains en Chine… D’après notre enquête, les principaux fournisseurs de Decathlon en Asie ont recours à plusieurs formes d’#esclavage_moderne. Ces conditions de production indignes sont la conséquence de la pression sur les coûts imposée par l’enseigne française à ses sous-traitants. Par souci d’économies, toujours, Decathlon compte aussi parmi ses partenaires des usines qui s’approvisionnent en #cuir auprès de géants du bœuf, accusés d’être les premiers responsables de la déforestation illégale au Brésil.

    Dans les pas de la #fast_fashion

    Alors que l’enseigne investit des millions pour ne pas être cataloguée comme une marque « low cost », ces deux mots s’affichent partout dans des documents transmis à Disclose par une source interne. Les prix bas, ce sont eux qui conduisent Decathlon à faire fabriquer la majeure partie de ses vêtements par des sous-traitants. Decathlon en compte 1 264 dans le monde, pour seulement… neuf sites de production « maison ». Pour s’assurer une rentabilité maximale, l’équipementier recherche en priorité les usines les moins chères. En l’occurrence, celles qui « travaillent pour des marques à bas prix et engagées dans la production de masse », comme le note un document interne, énumérant les critères pour sélectionner un sous-traitant. Une stratégie commerciale agressive qu’on aurait pu croire réservée aux géants chinois de la fast fashion, #Shein ou #Temu.

    Ses principaux fournisseurs sont en Asie : par ordre d’importance, en Chine, au #Vietnam et au Bangladesh. Ce dernier est d’ailleurs qualifié de « #low_cost_country » (« pays à bas coût »), dans une feuille de route interne. Confectionner des vêtements dans ce pays — où plus de la moitié de la population vit dans un bidonville — est une « force » pour Decathlon, renseigne le même document. Ici, le groupe travaille avec des fournisseurs présentés comme « #ultra_low_cost », qui emploient des adolescent·es, pouvant être légalement rémunéré·es sous le salaire minimum. D’autres usines intégrées à sa chaîne de production dans le pays sont qualifiées de « clandestines » par un ancien salarié. Bien qu’elles fournissent jusqu’à 10 % des composants d’une chaussure, la marque n’y effectue aucun audit, dévoile Disclose dans un premier volet de son enquête.

    En bout de chaîne, ce sont les ouvriers qui confectionnent les produits, #Quechua, #Kipsta, #Domyos ou #Kalenji qui paient le prix du système Decathlon. Disclose a obtenu une nomenclature interne qui détaille le coût de fabrication d’une basket pour enfant très populaire, la Decathlon PW 540. Sur les 8,61 euros de prix de revient au Bangladesh, le salaire des ouvriers et ouvrières représente seulement 2,84 euros. Prix de vente en France : 25 euros.

    Un champion de l’exploitation

    La soif de profit a poussé Decathlon dans les bras d’autres sous-traitants problématiques. En Chine, cette fois-ci. Ce deuxième épisode de notre enquête, publié jeudi 6 février, en partenariat avec Cash Investigation*, révèle que l’un de ses principaux partenaires locaux a recours au travail forcé des Ouïghours, une minorité musulmane persécutée par Pékin. Deux usines chinoises travaillant pour Decathlon utiliseraient également du coton originaire du Xinjiang, la région d’origine des Ouïghours, et où les accusations de travail forcé sont légion.

    Notre enquête sur la multinationale aux 931 millions d’euros de bénéfices en 2023, nous a aussi amené au Brésil. Ce troisième volet, publié en partenariat avec le média néerlandais Follow the Money, le samedi 8 février, s’intéresse à l’origine d’une autre matière première : le cuir utilisé dans les célèbres chaussures de randonnée Quechua. Les usines qui les assemblent au Vietnam utilisent des peaux de bovins en provenance du Brésil, au risque de contribuer à l’éradication des forêts primaires dans le pays.

    Confrontée à nos révélations, Decathlon se contente d’affirmer son « engagement en faveur d’un approvisionnement responsable ». L’entreprise assure par ailleurs « condamner fermement toute forme de travail forcé et de travail d’enfant ». Sa course aux prix les plus bas vient pourtant contredire ces engagements. Jusqu’à faire mentir le fondateur de la marque, Michel Leclercq, qui avait coutume de dire : « Il est interdit de tromper un client chez Decathlon ».

    https://disclose.ngo/fr/article/decathlon-revelations-sur-un-champion-de-lexploitation
    #sous-traitance #enquête

  • Ralentir la traduction ?

    La #traduction_automatique n’a pas été conçue à des fins professionnelles, mais pour produire une traduction moins chère et suffisante. C’est-à-dire, une ubérisation.

    Dans un passionnant article pour la revue Traduire (https://journals.openedition.org/traduire/2869), la traductrice indépendante Laura Hurot explique comment le secteur de la traduction a changé ces dernières années, sous la forme d’une ubérisation silencieuse.

    Nombre d’agences de traduction imposent de travailler sur des plateformes dotées d’un système de #chronométrage intégré qui évalue la #productivité des traductrices et traducteurs. Mais cette #accélération n’affecte pas seulement la phase traductionnelle : des agences recourent également à des systèmes de #révision et de #contrôle_qualité en partie automatisés reposant sur des outils de #catégorisation des erreurs. Ces changements conduisent à une accélération de la productivité et à une perte d’#autonomie, des #savoir-faire et du #bien-être des traducteurs indépendants plateformisés. D’ailleurs, on ne parle plus de traduction, mais de #post-édition, pour désigner une #correction de traduction automatique, dont la conséquence première est de lisser les #tarifs de traduction vers le bas.

    Dans un article plus récent de la même revue, le collectif en chair et en os, qui défend une traduction humaine contre la généralisation des machines, souligne que dans l’édition, la traduction automatique touche d’abord certains genres littéraires dont la langue n’est pas plus facile à prendre en charge par la machine, mais des genres qui sont périphériques dans la hiérarchie culturelle et où la #précarité est depuis longtemps plus forte (les secteurs de la romance, des livres pratiques, des livres pour les jeunes ou des sciences humaines sociales sont également des secteurs où les rémunérations sont moindres et les statuts plus précaires… et ils se sont précarisés avec la forte #féminisation du secteur depuis les années 80). Et les auteurs de rappeler qu’“un outil développé puis déployé à des fins d’économie n’est pas qu’un outil : il est l’élément d’un système”. Et de rappeler que la traduction automatique n’a pas été conçue à des fins professionnelles mais pour produire une traduction moins chère et suffisante. Pour les acteurs de la tech, traduire un texte consiste en effet à le transposer en miroir, dans une vision purement mathématique, en remplaçant simplement un mot par un autre mot, même si désormais ces agencements sont largement statistiques. Ce n’est pourtant pas si simple, surtout quand les textes sont complexes et les langues rares, comme le pointent les limites à l’utilisation croissante d’outils de traduction automatiques pour accomplir des tâches trop complexes pour eux, comme pour remplir des formulaires de demandes d’asiles sans maîtrise de la langue, conduisant à des erreurs multiples et aux rejets massives des demandes.

    Il n’y a pas que la traduction depuis des langues rares qui se révèle complexe, dans leur numéro de décembre, les Cahiers du Cinéma revenaient, à la suite d’une tribune de l’Association des traducteurs et adaptateurs de l’audiovisuel (Ataa), sur la perte de qualité des #sous-titres des films, trop souvent réalisés automatiquement. Le problème n’est pas seulement économique et lié au fait que le sous-titrage ou le #doublage viennent en bout de chaîne de la production, qui échappe souvent à la production, que de savoir à qui elle incombe : producteur, distributeur, diffuseur… Un conflit de responsabilité qui permet de justifier la perte de qualité. Le plus fascinant pourtant est de constater combien la traduction automatique échoue sur des phrases assez simples, même depuis l’anglais. Ainsi cet « How’s my room ? » traduit par « Comment va ma chambre ? » au lieu de « Où en est ma chambre ?« , nous montrant toutes les limites de l’approche de la traduction statistique, qui se révèle bien moins performante qu’on ne le pense souvent.

    L’observatoire de la traduction automatique (https://www.atlas-citl.org/lobservatoire-de-la-traduction-automatique) rappelait récemment que sa tribune de 2023 demandant la transparence réelle des données d’entraînements de l’#IA_générative, la possibilité de refuser que le travail de traduction serve à l’entraînement des machines qui détruisent le métier, que les aides publiques soient exclusivement réservées aux créations humaines ou que les produits culturels créés avec de l’IA soient obligatoirement signalés… n’avait toujours reçu aucune réponse des autorités.

    Signalons enfin que le 10e numéro de la revue Contrepoint, la revue du Conseil européen des associations de traducteurs littéraires, est entièrement consacré à la question de la traduction sous IA. Pour Damien Hansen, qui rappelle que la traduction automatique reste incapable de comprendre le texte, “le problème n’est pas tant l’outil en soi que le fait qu’on l’impose aux professionnels et qu’on l’emploie pour des raisons purement économiques”. Plutôt que de venir aider et soutenir le traducteur, la traduction automatique est produite pour le contraindre voire le faire disparaître. L’utilisation de l’IA comme outil de contrôle montre à nouveau que leur orientation vers des outils de contrainte plutôt que d’assistance, contrairement à ce qui nous est asséné, risque de devenir une limite forte à son développement.

    Dans son article, Laura Hurot, rappelle, à la suite du livre du spécialiste de la cognition, Olivier Houdé, L’intelligence humaine n’est pas un algorithme (Odile Jacob, 2019), que la clé de l’intelligence réside certainement bien plus dans le #ralentissement de la pensée plutôt que dans son accélération. A l’heure où la #vitesse est une idole indétrônable, il faudrait pouvoir mieux mesurer ce qu’elle nous fait perdre.

    https://danslesalgorithmes.net/2025/01/16/ralentir-la-traduction

    #traduction #AI #IA #intelligence_artificielle #ubérisation #travail #conditions_de_travail #automatisation

    via @reka

  • Le #service_public empêché

    Fragilisé mais loin d’avoir disparu, le service public est aujourd’hui « empêché ». Plusieurs mécanismes l’entravent, le gênent, font obstacle à sa conduite et produisent confusion et insatisfaction chez les usagers, #perte_du_sens de leur mission et #souffrance_au_travail pour les agents, sentiment d’abandon et fatalisme chez les citoyens.

    D’une entreprise ou d’une administration à l’autre (au sein de La Poste, de la SNCF, d’EDF, d’hôpitaux et d’autres services publics), les mêmes processus sont à l’œuvre : la #libéralisation européenne favorise la concurrence, la #marchandisation et la #financiarisation fixent des objectifs de #rentabilité, les #privatisations bouleversent le statut des organisations qui produisent l’#intérêt_général. Cet ouvrage se penche sur les effets de ces processus sur les usagers comme sur les travailleurs. Mais même si le principal effet de ces politiques est d’entraîner une #désingularisation du service public, il n’empêche qu’il continue, malgré tout, de fonctionner.

    Un ouvrage qui fait dialoguer plusieurs disciplines : sociologie, histoire et droit, par une spécialiste reconnue de la sociologie de l’action publique et du travail.

    https://www.puf.com/le-service-public-empeche
    #travail
    #livre

  • Le #Kazakhstan se rêve en nouvel eldorado des terres rares

    Le Kazakhstan envisage d’investir massivement dans l’#exploration_géologique, dont celle de #métaux_rares, avec l’aide financière et technique des pays occidentaux, très intéressés par les #ressources du #sous-sol kazakh, explique la presse de la région.

    “On dit que celui qui possède les terres rares possède le monde – or le Kazakhstan ferait partie des pays qui détiennent les plus grandes réserves de terres rares”, se gargarise le site d’information kazakh Tengri News.

    Problème : “Il n’y a pas de production de terres rares au Kazakhstan aujourd’hui, faute de #technologies économiquement viables pour leur traitement”, explique le directeur général du Centre national de traitement des matières premières minérales et académicien kazakh Abdurassol Jarmenov. Bien que “des perspectives de développement de cette industrie existent”, la qualité des #minerais de ces terres rares “laisse à désirer, car elle est dix fois inférieure à celle des minerais chinois”.

    “Nous ne serons jamais les plus grands fournisseurs de terres rares, concède Abdurassol Jarmenov. Leur production pourrait néanmoins donner un sérieux coup de pouce à notre économie.”

    Perspectives alléchantes

    Autre site kazakh, Kursiv est plus optimiste : "Aujourd’hui, notre pays produit 19 des 34 métaux les plus importants pour l’économie mondiale." Le ministère de l’Industrie a récemment "identifié plus de 100 #gisements de métaux rares, notamment de #tungstène, #molybdène [un million de tonnes] et #lithium [227 000 tonnes]", mais aussi de "#tantale, de #niobium et de #béryllium". Et Kursiv d’affirmer :

    "Le jour où les métaux rares dépasseront le pétrole est proche."

    "Certains experts prévoient que la demande mondiale de lithium doublera d’ici deux à trois ans. Et le prix du #cobalt pourrait augmenter de 70 %. Les métaux rares sont désormais considérés comme le pétrole de la nouvelle ère."

    "L’#exploitation des riches gisements de terres rares au Kazakhstan revêt une importance stratégique. La valeur totale de plus de 5 000 gisements non exploités dépasse 46 000 milliards de dollars, ce qui fait de leur développement une priorité pour renflouer le budget de l’État", relate le journal russe Nezavissimaïa Gazeta.

    Le président, Kassym-Jomart Tokaev, a récemment demandé au gouvernement d’"oeuvrer pour élargir, d’ici à 2026, la zone des explorations géologiques de 1,5 à 2,2 millions de kilomètres carrés". Le Premier ministre, Oljas Bektenov, a quant à lui affirmé vouloir "attirer activement les investisseurs étrangers dans l’exploration géologique, et, dès l’année prochaine, des entreprises étrangères [américaine, française, allemande, britannique et finlandaise] prospecteront le sous-sol kazakh".

    Le ministre de l’Industrie et de la Construction, Kanat Charlapaev, a par ailleurs récemment confirmé que le Kazakhstan "a considérablement accéléré l’exploitation de ses réserves de minéraux - #fer, #manganèse, #or, #uranium, #pétrole, #gaz". Le seul gisement de #Kuirektykol, dans la région de #Karaganda dans le centre du pays, "recèlerait 800 000 tonnes de terres rares".

    Éviter le scénario de l’#industrie_pétrolière

    Les ressources du Kazakhstan "attirent depuis longtemps l’attention des États-Unis, de l’UE, de la Chine et de la Corée du Sud", poursuit Nezavissimaïa Gazeta. En 2023, l’extraction de minéraux d’importance stratégique a été "l’objet de discussions entre Tokaev et son homologue français Emmanuel Macron, et en février 2024 [le président américain] Joe Biden a entamé un dialogue sur les minéraux critiques entre le Kazakhstan et les États-Unis, puis en juin le développement des gisements de lithium a été discuté à Astana par le président sud-coréen Yoon Suk-yeol". Le service géologique national compte sur l’aide financière de Londres pour créer "une carte géologique numérique du sous-sol kazakh".

    L’expert russe Alexandre Kobrinski, interrogé par Nezavissimaïa Gazeta, met en garde : "La situation avec les terres rares au Kazakhstan risque de reproduire le scénario de l’industrie pétrolière, quand le pays a perdu le contrôle de la production d’hydrocarbures en raison de sa forte dépendance aux investisseurs étrangers, qui détiennent 70,5 % des capacités de production, privilégiant une production rapide et bon marché plutôt que des investissements à long terme. Cela pose la question de savoir si le Kazakhstan maximisera les bénéfices de ses propres ressources." Autrement, le pays se transformerait "en un appendice de fournisseurs de matières premières, ne recevant en échange que des fonds insignifiants".

    https://www.courrierinternational.com/article/asie-centrale-le-kazakhstan-se-reve-en-nouvel-eldorado-des-te

    #terres_rares #extractivisme

  • Colère immense
    À Sciences Po-Grenoble, l’externalisation du ménage se passe déjà mal
    Depuis un mois, les agents de ménage de Sciences Po-Grenoble ne sont plus en contrat direct avec l’établissement mais avec un géant de la sous-traitance, Atalian. Salaires versés en retard, sous-effectif, suppression de semaines de congés… Les salariés constatent déjà une dégradation de leurs conditions de travail. https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/081224/sciences-po-grenoble-l-externalisation-du-menage-se-passe-deja-mal
    #capitalisme_esclavage

  • « Nous assistons à une escalade de la #prédation_minière »

    Une nouvelle #ruée_minière a commencé et touche aussi la #France. Au nom de la lutte contre la crise climatique, il faudrait extraire de plus en plus de #métaux. Celia Izoard dénonce l’impasse de cette « #transition » extractiviste. Entretien.

    Basta/Observatoire des multinationales : Il est beaucoup question aujourd’hui de renouveau minier en raison notamment des besoins de la transition énergétique, avec la perspective d’ouvrir de nouvelles mines en Europe et même en France. Vous défendez dans votre #livre qu’il ne s’agit pas du tout d’un renouveau, mais d’une trajectoire de continuité. Pourquoi ?

    #Celia_Izoard : Les volumes de #métaux extraits dans le monde aujourd’hui augmentent massivement, et n’ont jamais cessé d’augmenter. Ce qui est parfaitement logique puisqu’on ne cesse de produire de nouveaux objets et de nouveaux équipements dans nos pays riches, notamment avec la #numérisation et aujourd’hui l’#intelligence_artificielle, et qu’en plus de cela le reste du monde s’industrialise.

    En conséquence, on consomme de plus en plus de métaux, et des métaux de plus en plus variés – aussi bien des métaux de base comme le #cuivre et l’#aluminium que des métaux de spécialité comme les #terres_rares. Ces derniers sont utilisés en très petite quantité mais dans des objets qui sont partout, comme les #smartphones, et de façon trop dispersive pour permettre le #recyclage.

    Et la production de tous ces métaux devrait continuer à augmenter ?

    Oui, car rien ne freine cette production, d’autant plus qu’on y ajoute aujourd’hui une nouvelle demande qui est un véritable gouffre : celle de métaux pour le projet très technocratique de la transition. « Transition », dans l’esprit de nos élites, cela signifie le remplacement des #énergies_fossiles par l’#énergie_électrique – donc avec des #énergies_renouvelables et des #batteries – avec un modèle de société inchangé. Mais, par exemple, la batterie d’une #voiture_électrique représente souvent à elle seule 500 kg de métaux (contre moins de 3 kg pour un #vélo_électrique).

    Simon Michaux, professeur à l’Institut géologique de Finlande, a essayé d’évaluer le volume total de métaux à extraire si on voulait vraiment électrifier ne serait-ce que la #mobilité. Pour le #lithium ou le #cobalt, cela représenterait plusieurs décennies de la production métallique actuelle. On est dans un scénario complètement absurde où même pour électrifier la flotte automobile d’un seul pays, par exemple l’Angleterre ou la France, il faut déjà plus que la totalité de la production mondiale. Ce projet n’a aucun sens, même pour lutter contre le #réchauffement_climatique.

    Vous soulignez dans votre livre que l’#industrie_minière devient de plus en plus extrême à la fois dans ses techniques de plus en plus destructrices, et dans les #nouvelles_frontières qu’elle cherche à ouvrir, jusqu’au fond des #océans et dans l’#espace

    Oui, c’est le grand paradoxe. Les élites politiques et industrielles répètent que la mine n’a jamais été aussi propre, qu’elle a surmonté les problèmes qu’elle créait auparavant. Mais si l’on regarde comment fonctionne réellement le #secteur_minier, c’est exactement l’inverse que l’on constate. La mine n’a jamais été aussi énergivore, aussi polluante et aussi radicale dans ses pratiques, qui peuvent consister à décapiter des #montagnes ou à faire disparaître des #vallées sous des #déchets_toxiques.

    C’est lié au fait que les teneurs auxquelles on va chercher les métaux sont de plus en plus basses. Si on doit exploiter du cuivre avec un #filon à 0,4%, cela signifie que 99,6% de la matière extraite est du #déchet. Qui plus est, ce sont des #déchets_dangereux, qui vont le rester pour des siècles : des déchets qui peuvent acidifier les eaux, charrier des contaminants un peu partout.

    Les #résidus_miniers vont s’entasser derrière des #barrages qui peuvent provoquer de très graves #accidents, qui sont sources de #pollution, et qui sont difficilement contrôlables sur le long terme. Nous assistons aujourd’hui à une véritable #escalade_technologique qui est aussi une escalade de la #prédation_minière. La mine est aujourd’hui une des pointes avancées de ce qu’on a pu appeler le #capitalisme_par_dépossession.

    Comment expliquer, au regard de cette puissance destructrice, que les populations occidentales aient presque totalement oublié ce qu’est la mine ?

    Il y a un #déni spectaculaire, qui repose sur deux facteurs. Le premier est la religion de la #technologie, l’une des #idéologies dominantes du monde capitaliste. Nos dirigeants et certains intellectuels ont entretenu l’idée qu’on avait, à partir des années 1970, dépassé le #capitalisme_industriel, qui avait été tellement contesté pendant la décennie précédente, et qu’on était entré dans une nouvelle ère grâce à la technologie. Le #capitalisme_post-industriel était désormais avant tout une affaire de brevets, d’idées, d’innovations et de services.

    Les mines, comme le reste de la production d’ailleurs, avaient disparu de ce paysage idéologique. Le #mythe de l’#économie_immatérielle a permis de réenchanter le #capitalisme après l’ébranlement des mouvements de 1968. Le second facteur est #géopolitique. Aux grandes heures du #néo-libéralisme, le déni de la mine était un pur produit de notre mode de vie impérial. Les puissances occidentales avaient la possibilité de s’approvisionner à bas coût, que ce soit par l’#ingérence_politique, en soutenant des dictatures, ou par le chantage à la dette et les politiques d’#ajustement_structurel. Ce sont ces politiques qui ont permis d’avoir par exemple du cuivre du #Chili, de #Zambie ou d’#Indonésie si bon marché.

    Les besoins en métaux pour la #transition_climatique, si souvent invoqués aujourd’hui, ne sont-ils donc qu’une excuse commode ?

    Invoquer la nécessité de créer des mines « pour la transition » est en effet hypocrite : c’est l’ensemble des industries européennes qui a besoin de sécuriser ses approvisionnements en métaux. La récente loi européenne sur les métaux critiques répond aux besoins des grosses entreprises européennes, que ce soit pour l’#automobile, l’#aéronautique, l’#aérospatiale, les #drones, des #data_centers.

    L’argument d’une ruée minière pour produire des énergies renouvelables permet de verdir instantanément toute mine de cuivre, de cobalt, de lithium, de #nickel ou de terres rares. Il permet de justifier les #coûts_politiques de la #diplomatie des #matières_premières : c’est-à-dire les #conflits liés aux rivalités entre grandes puissances pour accéder aux #gisements. Mais par ailleurs, cette transition fondée sur la technologie et le maintien de la #croissance est bel et bien un gouffre pour la #production_minière.

    Ce discours de réenchantement et de relégitimation de la mine auprès des populations européennes vous semble-t-il efficace ?

    On est en train de créer un #régime_d’exception minier, avec un abaissement des garde-fous réglementaires et des formes d’extractivisme de plus en plus désinhibées, et en parallèle on culpabilise les gens. La #culpabilisation est un ressort psychologique très puissant, on l’a vu durant le Covid. On dit aux gens : « Si vous n’acceptez pas des mines sur notre territoire, alors on va les faire ailleurs, aux dépens d’autres populations, dans des conditions bien pires. » Or c’est faux. D’abord, la #mine_propre n’existe pas.

    Ensuite, la #loi européenne sur les #métaux_critiques elle prévoit qu’au mieux 10% de la production minière soit relocalisée en Europe. Aujourd’hui, on en est à 3%. Ce n’est rien du tout. On va de toute façon continuer à ouvrir des mines ailleurs, dans les pays pauvres, pour répondre aux besoins des industriels européens. Si l’on voulait vraiment relocaliser la production minière en Europe, il faudrait réduire drastiquement nos besoins et prioriser les usages les plus importants des métaux.

    Peut-on imaginer qu’un jour il existe une mine propre ?

    Si l’on considère la réalité des mines aujourd’hui, les procédés utilisés, leur gigantisme, leur pouvoir de destruction, on voit bien qu’une mine est intrinsèquement problématique, intrinsèquement prédatrice : ce n’est pas qu’une question de décisions politiques ou d’#investissements. L’idée de « #mine_responsable » n’est autre qu’une tentative de faire accepter l’industrie minière à des populations en prétendant que « tout a changé.

    Ce qui m’a frappé dans les enquêtes que j’ai menées, c’est que les industriels et parfois les dirigeants politiques ne cessent d’invoquer certains concepts, par exemple la #mine_décarbonée ou le réemploi des #déchets_miniers pour produire du #ciment, comme de choses qui existent et qui sont déjà mises en pratique. À chaque fois que j’ai regardé de plus près, le constat était le même : cela n’existe pas encore. Ce ne sont que des #promesses.

    Sur le site de la nouvelle mine d’#Atalaya à #Rio_Tinto en #Espagne, on voir des panneaux publicitaires alignant des #panneaux_photovoltaïques avec des slogans du type « Rio Tinto, la première mine d’autoconsommation solaire ». Cela donne à penser que la mine est autonome énergétiquement, mais pas du tout. Il y a seulement une centrale photovoltaïque qui alimentera une fraction de ses besoins. Tout est comme ça.

    Le constat n’est-il pas le même en ce qui concerne le recyclage des métaux ?

    Il y a un effet purement incantatoire, qui consiste à se rassurer en se disant qu’un jour tout ira bien parce que l’on pourra simplement recycler les métaux dont on aura besoin. Déjà, il n’en est rien parce que les quantités colossales de métaux dont l’utilisation est planifiée pour les années à venir, ne serait-ce que pour produire des #batteries pour #véhicules_électriques, n’ont même pas encore été extraites.

    On ne peut donc pas les recycler. Il faut d’abord les produire, avec pour conséquence la #destruction de #nouveaux_territoires un peu partout sur la planète. Ensuite, le recyclage des métaux n’est pas une opération du saint-Esprit ; il repose sur la #métallurgie, il implique des usines, des besoins en énergie, et des pollutions assez semblables à celles des mines elles-mêmes.

    L’accent mis sur le besoin de métaux pour la transition ne reflète-t-il pas le fait que les #multinationales ont réussi à s’approprier ce terme même de « transition », pour lui faire signifier en réalité la poursuite du modèle actuel ?

    Le concept de transition n’a rien de nouveau, il était déjà employé au XIXe siècle. À cette époque, la transition sert à freiner les ardeurs révolutionnaires : on accepte qu’il faut des changements, mais on ajoute qu’il ne faut pas aller trop vite. Il y a donc une dimension un peu réactionnaire dans l’idée même de transition.

    Dans son dernier livre, l’historien des sciences #Jean-Baptiste_Fressoz [Sans transition - Une nouvelle histoire de l’énergie, Seuil, 2024] montre que la #transition_énergétique tel qu’on l’entend aujourd’hui est une invention des #pro-nucléaires des États-Unis dans les années 1950 pour justifier des #investissements publics colossaux dans l’#atome. Ils ont tracé des belles courbes qui montraient qu’après l’épuisement des énergies fossiles, il y aurait besoin d’une #solution_énergétique comme le #nucléaire, et qu’il fallait donc investir maintenant pour rendre le passage des unes à l’autre moins brutal.

    La transition aujourd’hui, c’est avant tout du temps gagné pour le capital et pour les grandes entreprises. Les rendez-vous qu’ils nous promettent pour 2050 et leurs promesses de #zéro_carbone sont évidemment intenables. Les technologies et l’#approvisionnement nécessaire en métaux n’existent pas, et s’ils existaient, cela nous maintiendrait sur la même trajectoire de réchauffement climatique.

    Ces promesses ne tiennent pas debout, mais elles permettent de repousser à 2050 l’heure de rendre des comptes. Ce sont plusieurs décennies de gagnées. Par ailleurs, le terme de transition est de plus en plus utilisé comme étendard pour justifier une #croisade, une politique de plus en plus agressive pour avoir accès aux gisements. Les pays européens et nord-américains ont signé un partenariat en ce sens en 2022, en prétendant que certes ils veulent des métaux, mais pour des raisons louables. La transition sert de figure de proue à ces politiques impériales.

    Vous avez mentionné que l’une des industries les plus intéressées par la sécurisation de l’#accès aux métaux est celle de l’#armement. Vous semblez suggérer que c’est l’une des dimensions négligées de la guerre en Ukraine…

    Peu de gens savent qu’en 2021, la Commission européenne a signé avec l’#Ukraine un accord de partenariat visant à faire de ce pays une sorte de paradis minier pour l’Europe. L’Ukraine possède de fait énormément de ressources convoitées par les industriels, qu’ils soient russes, européens et américains. Cela a joué un rôle dans le déclenchement de la #guerre. On voit bien que pour, pour accéder aux gisements, on va engendrer des conflits, militariser encore plus les #relations_internationales, ce qui va nécessiter de produire des #armes de plus en plus sophistiquées, et donc d’extraire de plus en plus de métaux, et donc sécuriser l’accès aux gisements, et ainsi de suite.

    C’est un #cercle_vicieux que l’on peut résumer ainsi : la ruée sur les métaux militarise les rapports entre les nations, alimentant la ruée sur les métaux pour produire des armes afin de disposer des moyens de s’emparer des métaux. Il y a un risque d’escalade dans les années à venir. On évoque trop peu la dimension matérialiste des conflits armés souvent dissimulés derrière des enjeux « ethniques ».

    Faut-il sortir des métaux tout comme il faut sortir des énergies fossiles ?

    On a besoin de sortir de l’extractivisme au sens large. Extraire du pétrole, du charbon, du gaz ou des métaux, c’est le même modèle. D’ailleurs, d’un point de vue administratif, tout ceci correspond strictement à de l’activité minière, encadrée par des #permis_miniers. Il faut cesser de traiter le #sous-sol comme un magasin, de faire primer l’exploitation du sous-sol sur tout le reste, et en particulier sur les territoires et le vivant.

    Concrètement, qu’est ce qu’on peut faire ? Pour commencer, les deux tiers des mines sur la planète devraient fermer – les #mines_métalliques comme les #mines_de_charbon. Ça paraît utopique de dire cela, mais cela répond à un problème urgent et vital : deux tiers des mines sont situées dans des zones menacées de #sécheresse, et on n’aura pas assez d’#eau pour les faire fonctionner à moins d’assoiffer les populations. En plus de cela, elles émettent du #CO2, elles détruisent des territoires, elles déplacent des populations, elles nuisent à la #démocratie. Il faut donc faire avec une quantité de métaux restreinte, et recycler ce que l’on peut recycler.

    Vous soulignez pourtant que nous n’avons pas cessé, ces dernières années, d’ajouter de nouvelles technologies et de nouveaux objets dans notre quotidien, notamment du fait de l’envahissement du numérique. Réduire notre consommation de métaux implique-t-il de renoncer à ces équipements ?

    Oui, mais au préalable, quand on dit que « nous n’avons pas cessé d’ajouter des nouvelles technologies polluantes », il faut analyser un peu ce « nous ». « Nous » n’avons pas choisi de déployer des #caméras_de_vidéosurveillance et des #écrans_publicitaires partout. Nous n’avons pas choisi le déploiement de la #5G, qui a été au contraire contesté à cause de sa consommation d’énergie.

    La plupart d’entre nous subit plutôt qu’elle ne choisit la #numérisation des #services_publics, instrument privilégié de leur démantèlement et de leur privatisation : l’usage de #Pronote à l’école, #Doctissimo et la télémédecine dont la popularité est due à l’absence de médecins, etc. Dans le secteur automobile, la responsabilité des industriels est écrasante. Depuis des décennies, ils ne cessent de bourrer les véhicules d’électronique pour augmenter leur valeur ajoutée.

    Ces dernières années, ils ont massivement vendu d’énormes voitures électriques parce qu’ils savaient que le premier marché de la voiture électrique, c’était d’abord la bourgeoisie, et que les bourgeois achèteraient des #SUV et des grosses berlines. Donc quand je dis que nous devons réduire notre #consommation de métaux, j’entends surtout par-là dénoncer les industries qui inondent le marché de produits insoutenables sur le plan des métaux (entre autres).

    Mais il est vrai que nous – et là c’est un vrai « nous » - devons réfléchir ensemble aux moyens de sortir de l’#emprise_numérique. Du point de vue des métaux, le #smartphone n’est pas viable : sa sophistication et son caractère ultra-mondialisé en font un concentré d’#exploitation et d’#intoxication, des mines aux usines d’assemblage chinoises ou indiennes.

    Et bien sûr il a des impacts socialement désastreux, des addictions à la #surveillance, en passant par la « #surmarchandisation » du quotidien qu’il induit, à chaque instant de la vie. Là-dessus, il faut agir rapidement, collectivement, ne serait-ce que pour se protéger.

    https://basta.media/nous-assistons-a-une-escalade-de-la-predation-miniere
    #extractivisme #minières #électrification #acidification #contamination #hypocrisie #relocalisation #prédation #guerre_en_Ukraine #militarisation #déplacement_de_populations #dématérialisation #industrie_automobile

  • Il contratto fantasma tra #Medihospes e la prefettura di Roma per i centri in Albania

    A un mese dall’arrivo dei primi naufraghi a #Shëngjin e a più di sei dall’aggiudicazione della gara, l’ufficio del Viminale non ha ancora siglato il contratto con la cooperativa che si è aggiudicata il bando da oltre 133 milioni di euro. Un’anomalia amministrativa. Intanto 13 organizzazioni della società civile chiedono alle realtà medico-sanitarie di non rendersi “complici” del protocollo

    Solo un verbale di esecuzione in urgenza: tra la prefettura di Roma e Medihospes, la cooperativa sociale che ha vinto l’appalto da oltre 133 milioni di euro per la gestione dei centri per migranti in Albania, non è stato ancora siglato alcun contratto.

    A oltre un mese di distanza dall’arrivo delle prime 16 persone nei centri di Shëngjin e Gjadër ma soprattutto a più di sei mesi dall’aggiudicazione della gara pubblica. “Uno schema molto insolito”, osserva l’avvocata Maria Teresa Brocchetto, avvocata amministrativista e socia dell’Associazione per gli studi giuridici sull’immigrazione.

    Secondo il codice degli appalti infatti è previsto che dal momento dell’aggiudicazione la stazione appaltante -in questo caso la prefettura di Roma- entro sessanta giorni stipuli il contratto con chi ha vinto la gara pubblica: un termine ampiamente superato dall’aggiudicazione da parte della Cooperativa sociale Medihospes del 16 aprile 2024. Un ritardo facilmente imputabile alle lungaggini dei lavori di allestimento dei centri, che hanno fatto slittare l’inaugurazione alla metà di ottobre. Sei mesi di limbo che non hanno però impedito alla cooperativa romana di procedere, da un lato, con l’apertura a metà luglio di più di cento posizioni lavorative e soprattutto con la creazione di una “succursale” albanese per la gestione dei centri. Il tutto sulla “fiducia”, senza alcun contratto firmato. Infatti a metà novembre la prefettura di Roma ha fatto sapere formalmente ad Altreconomia di non aver ancora stipulato né sottoscritto alcun contratto con la cooperativa aggiudicataria della gara.

    “Ritardare in questo modo la stipula del contratto contraddice apertamente il carattere d’urgenza che ha connotato tutta l’avventura albanese, a partire dalla decisione di indire una procedura negoziata senza pubblicazione di bando”, aggiunge Brocchetto. Da un punto di vista giuridico, l’aver superato i termini di legge potrebbe essere giustificato dalle deroghe al codice degli appalti previste espressamente proprio dal protocollo Italia-Albania che autorizza all’esecuzione dei contratti “anche in deroga ad ogni disposizione di legge diversa da quella penale”.

    Quello che dovrebbe essere stato siglato è una sorta di verbale d’urgenza con cui è stato riconosciuto a Medihospes, a partire dalla consegna delle strutture, l’importo “parametrato” sulla ridottissima capienza con cui il centro è stato aperto.

    “Una ‘deroga’ è per definizione un’eccezione e quindi quella al codice degli appalti, anche se ammessa dalla legge italiana di ratifica del protocollo Italia-Albania, deve essere giustificata dall’urgenza o comunque dall’impossibilità di attuarlo rispettando il codice e sempre comunque nei limiti strettamente necessari. Presupposti che non si comprendono in presenza di una procedura negoziata già conclusa con l’aggiudicazione”, spiega Francesca Dealessi, avvocata di Torino ed esperta di diritto amministrativo.

    Insomma, i punti interrogativi sono molti. “Sebbene l’area del Cpr e quella funzionante come carcere non siano ancora operative, tutto è già pronto per un potenziale utilizzo -spiega Francesco Ferri, esperto di migrazioni di ActionAid Italia, che ha visitato i centri albanesi insieme a una delegazione del Tavolo asilo e immigrazione e ad alcuni parlamentari-. Il centro di Gjäder è in piena fase di ampliamento: ho osservato un cantiere a cielo aperto, destinato a occupare una porzione sempre più vasta della campagna circostante il piccolo centro abitato”.

    Nel capitolato della gara d’appalto è prevista la possibilità di assicurare “una ricettività progressiva rispetto a quella massima prevista, nelle more del completamento dei lavori di allestimento degli stessi”. La latitanza della prefettura di Roma nel seguire questa via potrebbe anche essere legata alla “fragilità” del modello Albania, il cui funzionamento è stato nuovamente bloccato lo scorso 11 novembre quando il Tribunale di Roma non ha convalidato -per la seconda volta- il trattenimento di sette persone, sospendendo la decisione e rinviando alla Corte di giustizia dell’Ue a causa dei “vari profili di dubbia compatibilità con la disciplina sovranazionale”.

    Intanto Medici senza frontiere e altre 13 organizzazioni hanno lanciato un appello chiedendo a tutte le realtà medico-sanitarie di non rendersi “complici” del protocollo. Secondo i firmatari, l’intesa siglata tra Roma e Tirana “viola il codice di deontologia medica e i diritti umani e mette a rischio la salute fisica e psicologica delle persone migranti”. Durante le procedure di identificazione a bordo della nave militare Libra e delle motovedette italiani non sussisterebbero “le condizioni perché possa essere effettuata una valutazione adeguata dello stato di salute di una persona” anche per la mancanza di un ambulatorio medico e di stanze che garantiscono un’adeguata tutela della privacy.

    A conferma dell’inadeguatezza delle valutazioni medico-sanitarie in sede di primo assessment delle vulnerabilità l’Asgi ha ottenuto dal ministero dell’Interno le cosiddette Sop (Standard operating procedures) che descrivono le modalità con cui vengono condotte le attività di screening in mare e lo sbarco sulle coste albanesi.

    La “sequenza operativa” da seguire prevede esclusivamente una “valutazione dello stato di salute generale di ciascun migrante, volto all’identificazione di condizioni di interesse sanitario meritevoli di attenzione e/o di ulteriori condizioni di vulnerabilità”. Per individuare questi profili il funzionario di polizia a bordo, con l’aiuto del team dedicato al pre-screening, raccoglie informazioni sulle nazionalità dichiarate e “su eventuali vulnerabilità immediatamente rilevabili e sugli eventuali legami di parentela per individuare nuclei familiari”.

    “Non c’è una definizione della vulnerabilità di tipo sanitario e sociale -spiega il medico Nicola Cocco-. Inoltre non è chiaro da chi è costituito il team che comprende il personale sanitario e non viene mai menzionata la soggettività migrante come destinataria di una tutela, ma vengono fatte solo indicazioni generiche sulla ‘sicurezza’ a bordo”. Una procedura quindi che, come già successo, che rischia di concludersi con il trasferimento nei centri albanesi di persone vulnerabili e minori. Come previsto fin dall’inizio.

    https://altreconomia.it/il-contratto-fantasma-tra-medihospes-e-la-prefettura-di-roma-per-i-cent

    #Albanie #Italie #externalisation #migrations #réfugiés #accord #privatisation #coopérative #contrat #MoU #Gjadër #sous-traitance

    –-

    ajouté à la métaliste sur l’#accord entre #Italie et #Albanie pour la construction de #centres d’accueil (sic) et identification des migrants/#réfugiés sur le territoire albanais...

    https://seenthis.net/messages/1043873

  • Un quart des bénéficiaires du Secours catholique sont sans ressources, un record
    https://www.latribune.fr/economie/france/un-quart-des-beneficiaires-du-secours-catholique-sont-sans-ressources-un-r


    En 2023, 95% des ménages rencontrés par le Secours catholique vivaient sous le seuil de pauvreté, soit 1.216 euros pour une personne seule (photo d’illustration). (Crédits : Reuters)

    C’est un bien triste record : 25,4% des ménages accompagnés par le Secours catholique en 2023 étaient sans ressources. Un chiffre en hausse de deux points par rapport à l’année précédente et surtout jamais atteint jusqu’alors. C’est ce qu’il ressort de son rapport sur l’état de la pauvreté en France, réalisé chaque année et dévoilé ce jeudi. Ces ménages tentent de « survivre grâce à la débrouille et au soutien de ceux qui sont en capacité de les aider », déplore l’association.

    Le Secours catholique a accueilli l’an dernier plus d’un million de personnes, dont 216.000 familles avec enfants. Le revenu médian des ménages accueillis s’est établi à 555 euros par mois. Au total, 95% des ménages rencontrés vivaient sous le seuil de pauvreté, soit 1.216 euros pour une personne seule.

    La faute à l’administration

    Selon le Secours catholique, cette précarité est notamment la traduction de « l’éloignement de la solidarité produite par l’administration elle-même ». L’association alerte ainsi sur « la difficulté à accéder à la protection sociale face à la dématérialisation des démarches administratives », mise en œuvre il y a une décennie et qui a connu une accélération depuis 2017. Ainsi, 13% des ménages rencontrés en 2023 ont exprimé un besoin d’aide pour effectuer de telles démarches, une hausse de 7 points en dix ans.

    Ces publics se heurtent à « des sites faits par l’administration et pour l’administration », explique le président du Secours catholique, Didier Duriez.
    Les plus pénalisés sont « ceux qui n’ont pas accès à internet, ceux qui ne comprennent pas » ce qui leur est demandé, ni comment s’orienter dans les méandres administratifs.

    Explosion des non-recours

    Résultat : un certain nombre de personnes ne perçoivent pas les aides auxquelles elles ont droit. Par exemple, plus d’un tiers (36,1%) des ménages français éligibles au Revenu de solidarité active (#RSA) rencontrés par le Secours catholique ne le sollicitent pas. Une proportion en hausse de plus de 13 points en une décennie. En ce qui concerne les allocations familiales, près du quart des ménages éligibles ne les perçoivent pas. Une part là aussi en augmentation, de presque 10 points depuis 2010.

    Outre le manque de connaissances ou le découragement face à la difficulté pour effectuer la démarche, la peur d’être stigmatisé explique le #non-recours à ces prestations sociales.

    « Plus on dit dans les médias, au niveau des autorités politiques que ces gens sont des assistés et que ça coûte un pognon de dingue », plus « ça fait des dégâts incroyables », assure Didier Duriez.
    Le recul de l’accès à certains droits est aussi le résultat du « durcissement des critères d’éligibilité » à certaines aides, comme le minimum vieillesse, les allocations chômage et le RSA, estime le Secours catholique. « Si vous ne cochez pas les cases » ou que « vous êtes un petit peu en dehors de la case qui est prévue », le risque est d’entrer dans un « no man’s land ». Il peut alors s’écouler beaucoup de temps - des mois - avant une réponse de l’administration, met en garde Didier Duriez.

    #allocations #chômage #pauvreté #dématérialisation

  • Qui sont les morts de la chaleur au travail ?


    Des ouvriers sous 39 °C, lors d’une vague de chaleur, à Ajaccio, en Corse, le 21 juin 2023. PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP

    Depuis 2018, au moins [du moins] 48 travailleurs sont morts dans des #accidents_du_travail liés aux fortes chaleurs. Ouvriers du BTP, vendangeurs, intérimaires… le climat représente un nouveau risque pour des salariés de tous âges déjà soumis à des conditions de travail éprouvantes ...

    [...]

    Dans la quasi-totalité des affaires, les #travailleurs ont été victimes de #malaises_cardiaques ayant entraîné la mort. Quelques-uns font état d’autres formes d’accidents que l’IMT a reliés à une problématique de chaleur. Le 11 août 2022, un homme d’une quarantaine d’années fait une chute fatale alors qu’il élague un arbre chez un particulier, dans la Vienne. Le 19 juillet 2023, un ouvrier de 51 ans se sectionne la carotide avec la tronçonneuse thermique qu’il manipule sur le chantier de la ligne ferroviaire Lyon-Turin.

    La #chaleur peut augmenter les risques d’accidents car « elle induit une baisse de la vigilance et une augmentation des temps de réaction », rappelle l’Institut national de recherche et de sécurité. L’institut estime qu’un risque peut apparaître à partir de 30° C pour une activité sédentaire, et de 28° C pour un travail physique. Le début des périodes chaudes est réputé plus dangereux, car le corps n’y est pas accoutumé.

    [...]

    Sept des victimes identifiées par la DGT travaillaient dans les « services administratifs et de soutien aux entreprises », c’est-à-dire pour des #sous-traitants ou des agences d’#intérim. Dans cette catégorie d’emploi connue pour ses #conditions_de_travail dégradées, notamment en matière de sécurité, la précarité des contrats dissuade les salariés de faire valoir leurs droits. Depuis juin, les salariés du #BTP ont la possibilité d’être indemnisés au titre du congé intempérie si leur chantier s’arrête pour cause de canicule. Mais ce dispositif reste à l’initiative de l’employeur, qui n’a aucune obligation d’y recourir.
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/11/01/qui-sont-les-morts-de-la-chaleur-au-travail_6371108_4355770.html

    https://justpaste.it/erm4q

    #travail #agriculture #morts_au_travail #climat

  • 40 grands sous-traitants français d’Airbus et de Safran en risque de défaillance
    https://www.usinenouvelle.com/article/40-grands-sous-traitants-francais-d-airbus-et-de-safran-en-risque-de-

    Assis sur le tas d’or du carnet de commande historique d’Airbus, les acteurs de la filière aéronautique ne parviennent pas vraiment à en tirer profit. Environ 40 grands sous-traitants du secteur – sur les 200 répertoriés – sont en risque de défaillance (avec une capacité d’autofinancement insuffisante et un endettement élevé) selon une récente étude confidentielle de la Banque de France. Des conclusions – basées sur les bilans financiers de 2023 – en partie partagées auprès de L’Usine Nouvelle par le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS). En 2022, la Banque de France en comptabilisait « seulement » 26 dans cette situation. 30% de ces grands fournisseurs ont en outre essuyé des pertes en 2023. Près de 20% des principaux sous-traitants de l’avionneur Airbus et du motoriste Safran se trouvent ainsi en grande difficulté financière. Et aucun signe de franche amélioration ne pointe à l’horizon.

    Ces acteurs sont pris dans une spirale de croissance insuffisamment rentable dont ils peinent à s’extraire depuis la pandémie. « La situation est préoccupante mais pas alarmante », tempère Didier Kayat, le président du groupe de ces grands sous-traitants, le GEADS, et par ailleurs directeur général de Daher. Si l’étude de la Banque de France pointe du doigt des situations de surendettement, le dirigeant souligne a contrario une tendance à l’amélioration de l’excédent brut d’exploitation des entreprises du GEADS.

    La réindustrialisation oui, mais sans #ruissellement sur les sous-traitants.

  • Un panaché de Nicolas Framont parlant de son livre Parasites pour tout retrouver au même endroit

    NICOLAS FRAMONT - Parasites (éd. Les Liens qui Libèrent) - Le Lieu-dit (Paris XXè)
    https://www.youtube.com/watch?v=jMwv4c21nh4

    CLASSE BOURGEOISE : LES PARASITES DE LA SOCIÉTÉ ?
    https://www.youtube.com/watch?v=VRNTZflvaR4

    Dénoncer les bourgeois parasites : un moteur pour la lutte des classes ?
    https://www.youtube.com/watch?v=Jw8T4sT06W8

    DE MACRON AU RN : les PARASITES sont prêts à TOUT pour maintenir leurs INTÉRÊTS - Nicolas Framont
    https://www.youtube.com/watch?v=lO5HDCDvNZE

    #Nicolas_Framont #parasites #bourgeoisie #sous-bourgeoisie #capitalisme

  • Néoruraux : comment les classes dominantes transforment les campagnes
    https://www.frustrationmagazine.fr/neoruraux

    Depuis l’épidémie de Covid, l’arrivée de sous-bourgeois et bourgeois Parisiens dans des petites et moyennes villes rurales enthousiasme autant qu’elle inquiète. Ces municipalités attirent, contribuant au développement de nouveaux services, mais éloignent et excluent encore un peu plus la classe laborieuse locale de son centre et de ses onéreux commerces. Ces néoruraux, pour l’essentiel issus […]

  • I proletari dell’intelligenza artificiale

    Come fa oggi un sito di commercio online a restituirci tutti i risultati che corrispondono a “maglia verde in seta” che stavamo cercando? Come fa un’auto che si guida da sola a riconoscere un pedone e a non investirlo? Come può Facebook capire che un certo contenuto è violento o pedopornografico e va bloccato? Come si comporta un chatbot per stabilire di quale informazione abbiamo bisogno? In tutti questi casi, la risposta è una: glielo insegna un essere umano.

    Un essere umano che guarda, analizza ed etichetta milioni di dati ogni giorno e li fornisce a quella che comunemente chiamiamo intelligenza artificiale (ia). L’intelligenza artificiale, per poter funzionare, ha bisogno di persone che la addestrino. E i suoi istruttori sono i nuovi proletari digitali. Quelli che si occupano delle mansioni più semplici, che si trovano alla base della piramide lavorativa del settore, i cui piani più alti sono occupati da analisti di dati, ingegneri o programmatori specializzati. Per insegnare all’intelligenza artificiale a riconoscere contenuti, e a crearne di nuovi, è necessario etichettare correttamente i dati, descrivere immagini, trascrivere testi, fare piccole traduzioni, identificare segnali stradali o altri elementi all’interno di immagini. I cosiddetti data labeling, gli etichettatori di dati, attraverso lavori spesso ripetitivi e alienanti, permettono l’addestramento dei software. Senza l’intervento umano, l’ia non sarebbe in grado di operare perché non saprebbe come interpretare i dati che le vengono sottoposti.

    “Quello che viene venduto come intelligenza artificiale è un tipo di apprendimento automatico, significa che bisogna nutrire la macchina con miliardi di dati, e sulla base di questo la macchina impara”, spiega Antonio Casilli, professore di sociologia al Telecom, l’istituto politecnico di Parigi, in Francia. “Per poter funzionare, che si tratti di creare un piccolo filtro di TikTok o software alla ChatGpt, c’è bisogno di masse enormi di dati, che devono però essere trattati, o meglio preaddestrati”. La “P” di chatGpt, che è l’acronimo di Generative pretrained transformer, significa infatti preaddestrato.

    Questo lavoro di preaddestramento è fatto però da persone che non sono quasi mai valorizzate. “Non vengono riconosciuti come i veri autori di questi prodigi tecnologici perché da una parte sono oscurati da professionisti molto più visibili, come i data scientist o gli ingegneri, e dall’altra perché non c’è interesse a far riconoscere l’intelligenza artificiale come una tecnologia labour intensive, cioè che ha bisogno di molto lavoro. L’intelligenza artificiale fa finta di essere una tecnologia che serve ad automatizzare il lavoro, e quindi a risparmiare, mentre invece ne richiede tantissimo”, spiega ancora Casilli.

    A sottolineare il concetto è anche Antonio Aloisi, che insegna diritto del lavoro all’università Ie di Madrid, in Spagna. “È sempre più evidente che l’imperfezione, l’incompletezza, l’inaccuratezza dei risultati, ha bisogno di un passaggio umano, che validi i risultati, che corregga gli errori e che faccia una prima verifica. In molte esperienze con i chatbot non c’è nulla di intelligente, ma soprattutto nulla di artificiale. I dati sono goffi, disfunzionali, per questo c’è bisogno di un ‘badante’ umano”.

    Quello degli istruttori è un lavoro a suo modo specializzato, ma quella specializzazione non è ben pagata, anzi è pagata malissimo. Non c’è interesse da parte delle aziende che reclutano questi lavoratori a riconoscerne le competenze, perché riconoscerle significherebbe pagarle. Casilli, con il suo gruppo di ricerca Diplab del politecnico di Parigi, uno dei tre al mondo che fa ricerca sul campo su questo tema, ha intervistato più di quattromila persone in venti paesi, soprattutto in quelli a basso reddito come Venezuela, Madagascar o Kenya, e ha raccolto e analizzato le esperienze di lavoro delle persone coinvolte.

    “Nella nostra ricerca abbiamo incontrato addirittura persone pagate 0,001 dollaro per ogni azione che compiono durante le loro mansioni. Sono reclutate in paesi talmente a basso reddito che per loro, purtroppo, diventa economicamente interessante svolgere questi compiti pagati male. In Venezuela, dove l’80 per cento della popolazione vive sotto la soglia di povertà e il salario medio è di sei-otto dollari al mese, arrivare a guadagnarne un po’ di più facendo microtask (traduzioni, descrizioni, tagging, sondaggi…) per l’intelligenza artificiale può in effetti rappresentare una prospettiva ed è su questo che fanno leva molte aziende come Google, la OpenAi, la Meta”.

    Si tratta di una catena di approvvigionamento molto lunga. Queste aziende subappaltano il lavoro ad altre, che di solito operano all’estero. “La filiera arriva fino in Asia, in Africa o in America Latina, dove ci sono piccole realtà informali, in cui si lavora in nero, spesso a conduzione familiare, e lì diventa difficilissimo, e a volte perfino pericoloso, investigare. Dobbiamo addentrarci in case, in internet point, in luoghi malfamati, per intervistare queste persone”, spiega Casilli.

    La ricerca di lavoratori avviene anche attraverso degli annunci online. “Vuoi aiutarci a plasmare il futuro dell’intelligenza artificiale? Abbiamo un lavoro al 100 per cento da remoto per te: non è richiesta alcuna esperienza, ma solo la volontà di imparare e contribuire al campo all’avanguardia dell’intelligenza artificiale. Che tu sia agli inizi o un professionista esperto, la nostra comunità ha un ruolo per te! Avrete l’opportunità di contribuire all’addestramento di applicazioni di ia come ia generativa, modelli linguistici di grandi dimensioni, assistenti virtuali, chatbot, motori di ricerca e molto altro ancora”. Questo è solo uno degli annunci che si trovano sui siti di ricerca lavoro per assumere addestratori di sistemi basati sull’intelligenza artificiale. L’antesignana di queste piattaforme è Amazon turk, nata come una sorta di supporto ad Amazon per mettere ordine tra i tantissimi annunci che comparivano sul sito, al caos delle descrizioni. Una bacheca globale per la ricerca di lavoro, con la possibilità di registrarsi e partecipare a queste microtask.

    “Ci siamo imbattuti in situazioni diverse, dall’addestramento dei filtri per la moderazione dei contenuti su Facebook in Kenya allo sviluppo di sindromi post-traumatiche da stress abbastanza forti, a famiglie venezuelane che si organizzano per lavorare senza fermarsi mai”, dice Casilli, raccontando alcune delle testimonianze raccolte sul campo. Certi creano delle piccole fabbriche in casa, dove la mattina lavora il padre, poi è il turno della figlia quando torna da scuola, e la sera la mamma o addirittura la nonna. In Venezuela l’elettricità costa poco, e all’epoca di Chavez era stato lanciato un programma per distribuire computer in tutte le famiglie, quindi oggi un po’ tutti possono lavorare da casa.

    Ci sono addirittura casi di false intelligenze artificiali: aziende che vendono videocamere di sorveglianza basata sull’ia a supermercati, e poi si scopre che non c’è alcuna intelligenza artificiale dietro, ma persone in Africa, pagate pochissimo, che fanno sorveglianza in tempo reale. “Abbiamo passato una settimana in una casa in Madagascar trasformata in fabbrica di dati, con lavoratori ovunque in garage, in soffitta. Erano almeno in 120 in una casa sommersa dalla spazzatura e con un bagno solo, pagati pochissimo e impiegati giorno e notte per far finta di essere un sistema di videosorveglianza basato sull’intelligenza artificiale”, racconta Casilli.

    La paga bassissima, soprattutto se paragonata ai miliardi che girano nell’indotto delle grandi aziende tecnologiche, non è l’unico dei problemi. Un aspetto sottovalutato è quello dei traumi psicologici a cui sono sottoposti i lavoratori. Si tratta spesso di compiti ripetitivi e alienanti, e in molti casi, come nella moderazione dei contenuti sui social network, si ha a che fare con contenuti tossici, violenti, sessualmente degradanti.

    E poi c’è l’instabilità. “Per i data worker uno dei problemi più sentiti, al di là delle paghe basse, è l’ansia di non avere un lavoro costante. Devono essere sempre disponibili. Non hanno alcun controllo sul salario, sul carico e sulle modalità di lavoro. I moderatori sono esposti tutto il giorno a contenuti osceni. Ci possono essere diverse conseguenze psicologiche”, spiega Simone Robutti, cofondatore della sezione berlinese e italiana della Tech workers coalition, un’organizzazione dei lavoratori del settore tecnologico nata per conquistare maggiori diritti e migliori condizioni. Molte di queste persone fanno questo lavoro perché hanno problemi di salute, non possono muoversi da casa. E quindi sono ulteriormente ricattabili, dice Robutti.

    Un altro aspetto del problema lo individua Teresa Numerico, professoressa di logica e filosofia della scienza all’università Roma Tre, secondo cui molti lavoratori firmano degli accordi di riservatezza così restrittivi che hanno addirittura paura di chiedere supporto legale o psicologico. “È per questo che si sa pochissimo di questo sottobosco lavorativo”.

    Il lavoro invisibile

    Spesso, quando si parla delle conseguenze dell’avvento delle intelligenze artificiali nel mondo del lavoro, si vede il pericolo maggiore nella sostituzione degli esseri umani da parte delle macchine. Ma Numerico sposta lo sguardo. “La conseguenza peggiore di questo processo non è tanto che l’intelligenza artificiale ha cominciato a fare il lavoro degli esseri umani, ma che ha incorporato il lavoro umano in modo tale da averlo reso invisibile. Questo produce maggiore potenziale di sfruttamento”.

    Stiamo assistendo da qualche anno alla cosiddetta piattaformizzazione del lavoro, cioè l’utilizzo delle piattaforme digitali e delle app per far incontrare domanda e offerta di lavoro. E sulle piattaforme sono impiegate persone che sono solo un’appendice delle macchine. “Questo li rende oggetto di sfruttamento. In un certo senso sono in competizione con le macchine. Si tratta di lavoratori intercambiabili. I rider sono ‘l’aristocrazia’ di questo processo, perché quantomeno si vedono”, dice Numerico.

    Nel gennaio 2023 Time ha pubblicato un’inchiesta sugli addestratori della OpenAi che guadagnavano meno di due dollari all’ora. L’azienda a cui la OpenAi aveva esternalizzato questo lavoro era la Sama di San Francisco, negli Stati Uniti, che impiega persone in Kenya, Uganda, India e altri paesi a basso reddito. Anche Google, la Meta e la Microsoft fanno così. Quelli assunti dalla Sama per conto della OpenAi erano pagati tra 1,32 e 2 dollari all’ora, a seconda dell’anzianità e delle prestazioni. Si legge nell’inchiesta: “Un lavoratore della Sama incaricato di leggere e analizzare il testo per la OpenAi ha raccontato di aver sofferto di disturbi ossessivi dopo aver letto la descrizione di un uomo che faceva sesso con un cane davanti a un bambino. ‘È stata una tortura’, ha detto”. Gli etichettatori di dati più giovani ricevevano uno stipendio di 21mila scellini kenioti (170 dollari) al mese.

    Come si vede dal racconto di Time, quando si parla di proletariato digitale esiste una divisione tra nord e sud del mondo. “Le grandi aziende che sviluppano e usano queste tecnologie hanno sede nei paesi ricchi. Ma chi completa manualmente queste attività è quasi sempre in Africa, in India. Anche perché le barriere all’ingresso sono poche: basta avere una connessione e una padronanza della lingua inglese”, spiega Aloisi. Numerico è d’accordo: c’è un tema di colonizzazione e razzializzazione.

    Come funziona in Italia

    “Anche in Italia troviamo annunci di lavoro in questo settore, che vanno dai 7 ai 15 euro l’ora”, spiega Aloisi.

    Secondo Casilli, poi, in Italia c’è qualche azienda un po’ più specializzata, per esempio nel trattamento di immagini per le radiografie e sistemi medici. “Ma la realtà è che non significa necessariamente che i lavori siano pagati meglio. L’Italia resta un paese in cui la difesa dei diritti dei lavoratori è sostanzialmente disattesa e ci sono situazioni di estrema precarietà”.

    Casilli anticipa i risultati di un’inchiesta del suo gruppo di ricerca, che sarà pubblicata tra qualche mese. I tre paesi europei più interessati dal fenomeno degli addestratori di sistemi di intelligenza artificiale sono la Spagna, il Portogallo e subito dopo l’Italia. Tanti lavoratori coinvolti, come in Italia, sono immigrati, che non hanno accesso al mercato del lavoro regolare e che trovano almeno una fonte di reddito, anche se scadente, in condizioni terribili, con addirittura il rischio enorme di non essere pagati. Sono persone che arrivano in Italia dall’Africa, dall’Asia, dal Sudamerica.

    Un’ulteriore faccia della stessa medaglia la evidenzia Numerico: “Per quanto riguarda l’addestramento in lingua italiana, spesso non è impiegato chi vive in Italia, ma chi parla italiano e vive all’estero, come per esempio in Nordafrica o in Albania”.

    Tutti questi lavoratori è come se si trovassero nel ventre di una balena e – a differenza di altri, come per esempio i rider – sono più difficili da tutelare, proprio perché invisibili. “Il primo passo è cominciare a far emergere la loro presenza, e poi avviare le lotte sindacali per trattamenti equi”, spiega Numerico, che individua nel lavoro da remoto un ostacolo, ma anche un modo per aggirarlo: la tecnologia potrebbe mettere in comunicazione queste persone dislocate in vari paesi e accomunate dal fatto di subire le stesse condizioni lavorative.

    In questo processo di piattaformizzazione il datore di lavoro scarica le proprie responsabilità, spiega Numerico. Non essendo un tipo di impiego subordinato, il datore non solo paga poco, ma non mette a disposizione dei lavoratori né i mezzi di produzione né gli spazi, e non si assume alcun rischio. Tuttavia, si prende il profitto che ne risulta. “Il lavoratore si assume tutti i rischi e deve anche pagarsi i mezzi per poter lavorare. Si crea uno spazio le cui regole sono dettate da chi detiene il controllo su quello spazio. Il datore di lavoro è evanescente”, conclude Numerico.

    Robutti della Tech workers coalition spiega che l’obiettivo dell’organizzazione è mostrare che ci si può sindacalizzare e organizzare anche nel settore della tecnologia digitale. Solo dieci anni fa non era realistico, c’erano veramente pochi esempi e nelle aziende del digitale non c’era la presenza di sindacati come in quelle tradizionali. “Ad oggi non c’è ancora un modo forte e consolidato con cui sindacalizzare i data worker. Si tratta spesso di persone che lavorano in subappalti di subappalti. Hanno pochissimo potere e per loro è molto complicato organizzarsi. Adesso che i rider hanno ottenuto molte più tutele rispetto a dieci anni fa, i sociologi del lavoro e gli accademici hanno cominciato a occuparsi dei data worker”.

    Un esempio virtuoso di sindacalizzazione lo racconta Casilli, spiegando che in Germania i sindacati sono molto attivi al fianco dei lavoratori del settore digitale già dal 2016. Anche in Kenya, dove per esempio la OpenAi ha fatto addestrare ChatGpt, ci sono grandissimi movimenti sindacali che coinvolgono i lavoratori del settore. Anche in Brasile ci sono pressioni per approvare norme che contengano misure per tutelarli. In Italia la situazione è meno rosea, conclude Casilli. “È difficile far vedere una popolazione invisibile”.

    Alessio De Luca, responsabile del Progetto lavoro 4.0 Cgil nazionale, spiega perché è così complicato anche per il sindacato tradizionale intervenire a tutela di questo tipo di professioni. Si tratta di un gruppo molto complesso, variegato ed esteso, e ogni giorno nascono e crescono una serie di nuove figure difficili da inquadrare, che lavorano direttamente con le piattaforme e non sono facilissimi da intercettare e organizzare. “Attraverso Apiqa, la nostra associazione che si occupa di lavoro autonomo, stiamo provando a stilare una serie di proposte normative. Le difficoltà maggiori riguardano l’individuazione della remunerazione e dei minimi salariali di questo ‘mondo di mezzo’. Bisognerebbe avere più strumenti possibili, a partire dai controlli: chi deve intervenire? Il garante? L’ispettorato del lavoro?”, si domanda De Luca. “Al momento stiamo immaginando proposte normative come l’equo compenso e trattamenti welfare e previdenziali. Il problema però è che si ragiona sempre dentro vecchi perimetri”.

    A livello europeo, spiega Aloisi, l’attenzione su questi fenomeni è cresciuta. Tra marzo e aprile è stata approvata ladirettiva piattaforme, la direttiva europea per il miglioramento delle condizioni dei lavoratori coinvolti nel settore e che in parte tutela i sottoproletari dei dati. La strada da seguire rimane quella dell’uscita dall’invisibilità, per poter agire e trovare soluzioni concrete al precariato e allo sfruttamento.

    https://www.internazionale.it/reportage/laura-melissari/2024/08/06/intelligenza-artificiale-lavoratori-sfruttamento
    #travail #conditions_de_travail #AI #IA #intelligence_artificielle #prolétariat #nouveau_prolétariat #data_labeling #données #soustraitance #sous-traitance #délocalisation #data_workers #travail_invisible #travailleurs_de_données

  • Qu’est-ce qu’une CTE ? | LearnSQL.fr
    https://learnsql.fr/blog/qu-est-ce-qu-une-cte

    Clause WITH : utiliser les CTE en SQL

    Une expression de table commune, ou CTE, est un ensemble de résultats temporaires nommés, créé à partir d’une simple instruction SQL, qui peut être utilisé dans les instructions suivantes SELECT, DELETE, INSERT ou UPDATE.

    – introduction à la clause WITH : https://learnsql.fr/blog/qu-est-ce-que-la-clause-with-en-sql
    – 5 exemples d’utilisation de WITH : https://learnsql.fr/blog/5-exemples-pratiques-de-la-clause-with-de-sql
    – les CTE récursifs : https://learnsql.fr/blog/qu-est-ce-qu-un-cte-recursif-en-sql

    Ca semble pratique pour les requêtes complexes généralement faites avec des sous-requêtes : une clause qui pourrait entrer dans l’API SQL de SPIP ?

    #WITH #SQL #sous-requête #SPIP

  • Mettre l’#eau_en_bouteille

    A Vittel, la naissance du #thermalisme au milieu du 19ème a jeté les bases d’un accaparement de la #ressource_aquifère par l’intérêt privé. Cet intérêt porte aujourd’hui le nom d’une multinationale, Nestlé, qui pompe des millions de mètres cubes par an.

    Nous sommes à Vittel. Ici, Nestlé Waters produit annuellement plus d’un milliard de bouteilles vendues sous les marques Vittel, #Hepar et #Contrex. Si l’eau puisée ici a fait rayonner la ville dans le monde entier depuis 1854, l’épuisement de la ressource et la sécheresse qui l’accompagne déclenchent aujourd’hui une importante levée de bouclier.

    Bernard Schmidt, militant du collectif eau 88 s’interroge : “Le problème de l’eau en bouteille, c’est de savoir à qui appartient l’eau ? Comment se fait-il qu’une entreprise, hier une entreprise familiale, aujourd’hui Nestlé, possède un quasi-monopole, je dis quasi parce que juridiquement c’est compliqué, mais un quasi-monopole d’exploitation que l’Etat ne sait pas ou ne veut pas remettre en cause. Si moi je veux faire un puits derrière chez moi, n’importe où en France, je peux le faire ici. Il faut que je démontre à Nestlé que je ne vais pas nuire à sa production. Et Nestlé a fait fermer tous les puits, les hôtels qui avaient eu nos gratuites”.

    Comment une ville d’eau a-t-elle pu en manquer au point d’être reconnue en état de catastrophe naturelle en 2022 ? Nous racontons ici comment le combat homérique d’une poignée d’habitants contre la multinationale témoigne des préoccupations environnementales contemporaines et d’une évolution du rapport de force.

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/lsd-la-serie-documentaire/mettre-l-eau-en-bouteille-4596377

    #eau #sécheresse #Vittel #Nestlé #Nestlé_waters #société_des_eaux #décharges #décharges_sauvages #résistance #justice #condamnation #prise_illégale_d'intérêt #intérêt_public #foncier #terres #accaparement_des_terres #Vosges #néo-féodalisme #néo-colonialisme #agriculture #safer #AGRIVAIR #green-washing #nappes_de_surface #agriculture_biologique #multinationales #escroquerie #sous-sol #appropriation #propriété #eaux_souterraines

    #audio #podcast

  • Des universités françaises au bord de l’#asphyxie : « Ça craque de partout »

    Locaux vétustes, #sous-financement structurel, #pénurie d’enseignants, inégalités sociales et scolaires… Les universités de Créteil, Villetaneuse ou encore Montpellier-III cumulent les difficultés. Le fossé se creuse encore entre les établissements prestigieux et les autres.

    A l’#université_Sorbonne-Paris_Nord, sur le campus de Villetaneuse, en Seine-Saint-Denis, la visite guidée se transforme immanquablement en un passage en revue du #délabrement. Tel couloir ou telle salle, inondés à chaque forte pluie, cumulent vétusté et moisissures sur les murs. Des amphithéâtres aux sièges cassés, des prises abîmées depuis des années, et des vidéoprojecteurs qui, régulièrement, ne fonctionnent pas. Les filets de fortune qui retiennent des bouts de plafond qui s’écroulent au-dessus d’une passerelle reliant plusieurs bâtiments. Cet ascenseur, également, en panne depuis la rentrée, rendant le deuxième étage du département des lettres inaccessible aux étudiants à mobilité réduite.

    De façon moins visible, une grande partie des bâtiments contient encore de l’#amiante, plus ou moins bien protégée. « Là ou encore là, le sol est abîmé, montre Stéphane Chameron, maître de conférences en éthologie, membre du comité social d’administration, encarté SUD-Education, en désignant des dalles usées dans des couloirs ou des escaliers. Donc il peut arriver que de la poussière amiantée soit en suspension dans l’air. C’est une #mise_en_danger. »

    Selon la Cour des comptes, 80 % du bâti de l’université Sorbonne-Paris Nord est aujourd’hui vétuste. Mais le constat national n’est guère réjouissant non plus, avec un tiers du #patrimoine_universitaire jugé dans un état peu ou pas satisfaisant. « Honnêtement, on a honte de faire travailler les étudiants dans ces conditions » , souligne une des enseignantes de l’établissement qui, comme beaucoup, a demandé à rester anonyme.

    En matière d’#encadrement aussi, « la situation est critique », alerte Marc Champesme, chargé du département d’informatique de Paris Nord, membre du syndicat Snesup-FSU. Dans sa composante, le nombre d’étudiants en première année a été multiplié par plus de trois entre 2010 et 2022, et par deux sur les trois années de licence. Dans le même temps, le nombre d’enseignants titulaires n’a pas bougé. « On est maintenant contraints de faire des travaux dirigés en amphi avec soixante étudiants parce qu’on manque de professeurs , réprouve-t-il. Alors même que les pouvoirs publics ne cessent de dire qu’il faut former plus d’informaticiens et de spécialistes de l’IA [intelligence artificielle] , que c’est l’avenir. »

    « Sans l’État, ce ne sera pas possible »

    Ici, comme dans d’autres facultés, les personnels ont été désespérés par le signal envoyé, en février, avec l’annonce de coupes budgétaires de près de 1 milliard d’euros dans l’enseignement supérieur – en contradiction avec la volonté affichée, fin 2023 par Emmanuel Macron, de « donner plus de moyens » pour la recherche. « On nous disait que l’université serait une priorité, mais cela a vite été oublié. C’est un #délaissement total. Et les premiers à trinquer, ce sont nous, universités de banlieue populaire ou de petites villes déjà en mauvaise forme » , s’exaspère un autre enseignant-chercheur de Sorbonne-Paris Nord.

    Cette réalité s’impose comme le signe d’une université française en crise, qui maintient sa mission de service public en poussant les murs, colmatant les brèches et serrant les dents. La conséquence de décennies pendant lesquelles les établissements ont absorbé une augmentation significative de la #population_étudiante, sans que les moyens aient suivi. Entre 2008 et 2021, le nombre d’étudiants a augmenté de 25 %, quand le #budget de l’enseignement supérieur a progressé de moins de 10 %. Quant aux fonds versés par l’Etat liés spécifiquement au #bâti, ils stagnent depuis plus de dix ans.

    Désormais, « ça craque de partout » , résume un enseignant dans un Baromètre des personnels réalisé en 2023 par la Conférence des praticiens de l’enseignement supérieur et de la recherche. A Villetaneuse, « on essaie de mettre les bouchées doubles depuis trois ans pour les travaux urgents. On a investi 6 millions d’euros sur fonds propres. Mais on ne dispose pas de ressources infinies. Sans l’Etat, ce ne sera pas possible » , souligne son président, Christophe Fouqueré. Sur tout le territoire, la pression budgétaire contraint les établissements à se contenter de rafistoler un bâti vieillissant plutôt que d’entamer des travaux de #rénovation nécessaires, ou encore à geler les embauches de #titulaires et à avoir recours à des #vacataires précaires – à présent majoritaires au sein des personnels enseignants dans les universités.

    Mais, à l’image de Sorbonne-Paris Nord, certaines se trouvent plus en difficulté que d’autres en matière de conditions d’études. « La question du bâti et de son délabrement éclaire en fait toutes les #inégalités entre élèves, et entre établissements du supérieur : d’abord entre universités et grandes écoles type Sciences Po, mieux loties, et désormais entre universités elles-mêmes, analyse la sociologue Annabelle Allouch, qui mène un projet de recherche sur le #bâti_universitaire. Mais elle renforce aussi ces inégalités, en encourageant des étudiants à adopter des stratégies d’évitement de certains campus. »

    De fait, des #écarts se sont creusés. Si certains campus ont bénéficié de belles rénovations, comme de moyens plus conséquents pour l’enseignement, d’autres universités, moins subventionnées, décrochent. « On a été oubliés du #plan_Campus de 2008, qui a permis à d’autres universités, y compris voisines, de se remettre à niveau » , regrette le président de Sorbonne-Paris Nord. « L’Etat avait fait le choix de porter les efforts sur 21 sites seulement. Cela a créé un premier différentiel, qui n’a cessé de s’accentuer puisque ces universités lauréates ont été, par la suite, mieux placées, aussi, pour répondre à des appels à projet sur le patrimoine » , explique Dean Lewis, vice-président de France Universités.

    Se sont ajoutées les diverses politiques d’ « #excellence », mises en œuvre durant la dernière décennie, et notamment les labels #Initiative_d’excellence, décernés à certains établissements prestigieux, avec des moyens supplémentaires correspondants. « On a été face à des politiques qui ont décidé de concentrer les moyens sur un petit nombre d’établissements plutôt que de les distribuer à tout le monde » , résume la sociologue Christine Musselin.

    #Violence_symbolique

    Une situation qui laisse de plus en plus apparaître une université à plusieurs vitesses. « Quand je passe de mon bureau de recherche de l’ENS [Ecole normale supérieure] aux locaux où j’enseigne, la différence me frappe à chaque fois », témoigne Vérène Chevalier, enseignante en sociologie à l’#université_Paris_Est-Créteil (#UPEC), qui subit aussi, avec ses élèves, un environnement dégradé. Dans certains bâtiments de cette université, comme celui de la Pyramide, les cours ont dû être passés en distanciel, cet hiver comme le précédent, en raison d’une défaillance de #chauffage, la #température ne dépassant pas les 14 0C. En avril, le toit d’un amphi, heureusement vide, s’est effondré sur un site de Fontainebleau (Seine-et-Marne) – en raison d’une « malfaçon », explique la présidence.

    Plongée dans une #crise_financière, avec un #déficit abyssal, l’UPEC est dans la tourmente. Et la présidence actuelle, critiquée en interne pour sa mauvaise gestion des finances. « Mais lorsqu’on voit arriver 10 000 étudiants en cinq ans, on se prend de toute façon les pieds dans le tapis : cela veut dire des heures complémentaires à payer, des locations ou l’installation de préfabriqués très coûteuses » , défend le président, Jean-Luc Dubois-Randé.

    Au sein d’un même établissement, des fossés peuvent se former entre campus et entre disciplines. « Quand mes étudiants vont suivre un cours ou deux dans le bâtiment plus neuf et entretenu de l’IAE [institut d’administration des entreprises] , dont les jeunes recrutés sont aussi souvent plus favorisés socialement, ils reviennent dans leur amphi délabré en disant : “En fait, ça veut dire que, nous, on est les pauvres ?” » , raconte Vérène Chevalier, qui y voit une forme de violence symbolique.

    Ce sont des étudiants « qu’on ne voit pourtant pas se plaindre », constate l’enseignant Stéphane Chameron. « Pour beaucoup issus de classes moyennes et populaires, ils sont souvent déjà reconnaissants d’arriver à la fac et prennent sur eux » , a-t-il observé, comme d’autres collègues.

    Dans le bâtiment Pyramide, à Créteil, une dizaine d’étudiants en ergothérapie préparent leurs oraux collectifs de fin d’année, assis au sol dans le hall, faute de salles disponibles. « Les conditions, cela nous paraît normal au quotidien. C’est quand on met tout bout à bout qu’on se rend compte que cela fait beaucoup » , lâche Charlotte (qui a souhaité rester anonyme, comme tous les étudiants cités par leur prénom), après avoir égrené les #dysfonctionnements : les cours en doudoune cet hiver, l’impossibilité d’aérer les salles, l’eau jaunâtre des robinets ou l’absence de savon dans les toilettes… « Ça va » , répondent de leur côté Amina et Joséphine, en licence d’éco-gestion à Villetaneuse, citant la bibliothèque récemment rénovée, les espaces verts et l’ « ambiance conviviale », malgré « les poubelles qu’il faut mettre dans les amphis pour récupérer l’eau qui tombe du plafond quand il pleut » .

    Dans l’enseignement supérieur, les dynamiques récentes ont renforcé un phénomène de #polarisation_sociale, et les étudiants les plus favorisés se retrouvent aussi souvent à étudier dans les établissements les mieux dotés. La sociologue Leïla Frouillou y a documenté l’accélération d’une #ségrégation_scolaire – qui se recoupe en partie avec la #classe_sociale. Favorisées par #Parcoursup, les universités « parisiennes » aspirent les bacheliers avec mention très bien des autres académies. « Se pose la question du maintien de la #mixité dans nos universités » , souligne-t-elle.

    En l’occurrence, un campus en partie rénové ne protège pas nécessairement ni d’une situation financière délétère, ni de difficultés sociales plus importantes que la moyenne du territoire. L’un des lauréats du plan Campus de 2008, l’#université_Montpellier-III, présente en majesté l’#Atrium. Une bibliothèque universitaire (BU) tout de verre vêtue, un bijou architectural de 15 000 m2 financé par l’Etat, la région et la métropole, et livré en avril à la porte de l’établissement. L’ouvrage masque un campus quinquagénaire arboré et aussi quelques classes en préfabriqué posées provisoirement à proximité du parking… il y a vingt et un ans. Montpellier-III reste l’une des universités les moins bien dotées de France.

    Un peu plus loin, derrière le bâtiment S, Jade attend patiemment son tour. En première année de licence de cinéma et boursière, comme 48 % des étudiants de son université (quand la moyenne nationale est de 36 %), elle s’apprête à remplir un panier de vivres à l’#épicerie_solidaire de l’établissement. Une routine hebdomadaire pour cette étudiante qui a fait un saut dans la #précarité en rejoignant l’université.

    « Nous avons des étudiants qui ne mangent pas à leur #faim » , regrette Anne Fraïsse, présidente de l’université. Ils sont, par ailleurs, ceux qui auraient le plus besoin d’encadrement. Quand, en 2022, l’#université_Gustave-Eiffel, implantée dans différentes régions, reçoit une subvention pour charge de service public de 13 195 euros par étudiant, Montpellier-III en reçoit 3 812. Les universités de lettres, de droit et de sciences humaines et sociales sont traditionnellement moins bien dotées que les universités scientifiques, dont les outils pédagogiques sont plus onéreux.

    Mais dans les établissements d’une même spécialité, les écarts sont considérables. Nanterre, la Sorbonne-Nouvelle, à Paris, Bordeaux-Montaigne ou Toulouse-Jean-Jaurès : toutes ces universités de #sciences_humaines ont une dotation supérieure de plus de 30 % à celle de Montpellier-III. « Si nous étions financés à la hauteur de ce que reçoit Toulouse-II, c’est 30 millions de budget annuel supplémentaire que l’on recevrait, calcule Florian Pascual, élu CGT au conseil scientifique de l’université Montpellier-III. Nous pourrions cesser de gérer la pénurie, embaucher des enseignants. »

    « Un poids pédagogique »

    En février, le conseil d’administration de l’université a voté un budget affichant un déficit prévisionnel de 5 millions d’euros. Alors que l’établissement a augmenté ses effectifs étudiants (+ 7 % sur la période 2018-2021) pour répondre au #boom_démographique, la #dotation de l’Etat par étudiant a, pour sa part, dégringolé de 18,6 % entre 2016 et 2022. Un rapport rendu en juin 2023 par l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche, reconnaît « une situation de #sous-financement_chronique et un état de #sous-encadrement_structurel » . L’université doit néanmoins répondre à l’injonction du gouvernement de se serrer la ceinture. « C’est ne pas tenir compte des grandes inégalités entre établissements » , répond Anne Fraïsse.

    « Ce que nous répète l’Etat, c’est de fermer des postes, en réduisant l’administration et en remplaçant des professeurs par des contractuels ou des enseignants du secondaire. Pourtant, dans treize départements, la moitié des cours ne sont plus assurés par des professeurs titulaires, rappelle la présidente de l’université . Cela a un poids pédagogique pour les étudiants. Pour augmenter les taux de réussite, il faut créer des heures d’enseignement et mettre des professeurs devant les étudiants. »

    La pression démographique absorbée par ces universités amène avec elle une autre difficulté insoupçonnée. « Chez nous, le taux d’utilisation des amphis est de 99 %, on n’a quasiment plus le temps de les nettoyer. Alors si on devait faire des chantiers, on n’aurait tout simplement plus d’endroit pour faire cours, et c’est le cas partout » , soulève Julien Gossa, enseignant à l’université de Strasbourg. « Mais plus on attend, plus ça se dégrade et plus ce sera cher à rénover » , souligne Dean Lewis, de France Universités.

    Or, dans certaines facultés, comme en Seine-Saint-Denis et dans le Val-de-Marne, la démographie étudiante ne devrait pas ralentir. « Nous ne sommes pas sur un reflux démographique comme d’autres, en raison d’un phénomène d’installation des classes moyennes en grande couronne. On envisage une trajectoire d’augmentation de deux mille étudiants par an durant encore un moment. Il va falloir trouver une façon de les accueillir dignement » , souligne Jean-Luc Dubois-Randé, de l’UPEC. D’autant que, malgré les difficultés matérielles, « les profs sont passionnés et les cours très bons », assure une étudiante, en licence de psychologie à Villetaneuse.

    Conscients de cette valeur des cours dispensés et des diplômes délivrés, les enseignants contactés marchent sur des œufs. En mettant en lumière les points de craquage de l’université, ils craignent d’accélérer la fuite vers l’#enseignement_privé, qui capitalise sur l’image dégradée du public. Pourtant, « former la jeunesse est une mission de l’Etat, baisser les dépenses en direction de l’enseignement, au profit du privé, c’est compromettre notre avenir » , rappelle Anne Fraïsse.

    Le nombre de #formations_privées présentes sur Parcoursup a doublé depuis 2020, et elles captent plus d’un quart des étudiants. « Mais même si elles peuvent se payer des encarts pub dans le métro avec des locaux flambant neufs, elles sont loin d’avoir toutes la qualité d’enseignement trouvée à l’université, qui subsiste malgré un mépris des pouvoirs publics » , souligne l’enseignant Stéphane Chameron.

    La fatigue se fait néanmoins sentir parmi les troupes, essorées. « Comme à l’hôpital, on a des professionnels attachés à une idée du #service_public, gratuit, accessible à tous et adossé à une recherche de haute volée , observe le président de l’UPEC, ancien cadre hospitalier. Mais le sentiment d’absence de #reconnaissance pèse, et on observe de plus en plus de #burn-out. » De la même manière que, dans les couloirs des urgences hospitalières, les équipes enseignantes interrogent : souhaite-t-on laisser mourir le service public ?

    https://www.lemonde.fr/campus/article/2024/05/11/des-universites-francaises-au-bord-de-l-asphyxie-ca-craque-de-partout_623255
    #ESR #France #université #facs #enseignement_supérieur #recherche

  • Italie : quand le #profit fait dérailler les trains

    Le secteur des #chemins_de_fer italien est souvent cité comme l’exemple par excellence du succès des politiques de #libéralisation_du_marché. Dans les années quatre-vingt-dix, la division des rôles entre le gestionnaire du réseau (#Rfi, #Rete_ferroviaria_italiana) et le gestionnaire des transports (#Trenitalia) est réalisée avec un double objectif : d’une part, la mise en œuvre des politiques communautaires européennes visant à accroître la #compétitivité, d’autre part la transformation du secteur ferroviaire vers un mode de gestion d’entreprise privée, afin de le rendre rentable. Une vision qui établit une différence manifeste avec toute autre perspective concevant la #mobilité comme un #service_public à garantir, même en l’absence de profit. Par Giorgio De Girolamo, Lorenzo Mobilio et Ferdinando Pezzopane, traduit par Letizia Freitas [1].

    Dans la droite ligne de cette approche, les #conditions_de-travail du personnel ferroviaire et la dimension réglementaire de la Convention collective nationale accusent un retard considérable comparées à d’autres services publics (si l’on tient compte également de la taille de #Fs, #Ferrovie_dello_Stato, l’entreprise ferroviaire publique au statut de société anonyme par actions au capital détenu à 100% par l’État italien, Rfi et Treniralia sont des filiales de FS, ndlr). La recherche constante de #réduction_des_coûts s’est imposée, au détriment des travailleurs de Trenitalia et de Rfi.

    Responsable des infrastructures, Rfi a progressivement réduit sa #masse_salariale, passant de 38 501 employés en 2001 à 29 073 en 2022, un quart de moins en une vingtaine d’années. Une diminution principalement motivée, non pas par une absence de besoin en main d’œuvre, mais par l’#externalisation du travail de #construction et de #manutention, confié à d’autres entreprises à travers un système d’#appels_d’offre et de #sous-traitance.

    Actuellement – selon les estimations des syndicats – 10 000 travailleurs externalisés opèrent sur les chemins de fers italiens. Il apparaît évident que cette gestion de la manutention rend la #sécurité accessoire et les #accidents, non pas des évènements tragiques et occasionnels, mais de tristes et amères certitudes. La stratégie de Rfi basée sur des #coûts_réduits et la rapidité d’exécution des travaux repose sur une dégradation structurelle des conditions de travail, qui se répercute sur la sécurité de tous les travailleurs FS, leur santé et la sécurité du service fourni. Avec des conséquences qui se transforment trop souvent en actualités dramatiques, comme dans le cas de #Brandizzo (accident ferroviaire dans lequel un train de la ligne Turin-Milan, a tué cinq ouvriers qui travaillaient sur les rails, le 31 aout 2023, ndlr).

    Dans cette phase de renouvellement de la Convention collective nationale de travail (Ccnl) – arrivée à échéance le 31 décembre 2023 – une assemblée autogérée de conducteurs de train et de chefs de bord s’est mise en place, avec un rôle de premier plan inédit. Cette assemblée a proposé – à travers deux grèves, dont l’une d’une durée de 24 heures, le 23 et le 24 mars, et une participation supérieure à 65 % au niveau national (et des pics à 90 % dans certaines régions) – une plateforme de renouvellement de la Ccnl alternative à celle formulée par les syndicats signataires.

    Une initiative qui ouvre des pistes de réflexion sur la place centrale du #transport_public_ferroviaire dans un monde se voulant plus durable. Un horizon qui rend également possible une convergence avec les revendications des mouvements écologistes. Cette convergence des mouvements sociaux serait en mesure, et ce ne serait pas la première fois, de redonner de la force à une négociation collective affaiblie.

    Nous en avons discuté avec Lorenzo Mobilio, Rsu (Rappresentanza sindacale unitaria) di Napoli-Campi Flegrei et membre de la coordination nationale de l’Union syndicale de base (Usb) qui participe à ce processus d’assemblée.

    La #grève du rail des 23 et 24 mars, d’une durée de 24 heures, n’est pas la première grève du secteur. En novembre 2023, la restriction du droit de grève demandée par le ministre Matteo Salvini avait fait scandale. Elle avait été réitérée en décembre par ordonnance, puis a été récemment annulée par le Tar Lazio (Tribunale amministrativo regionale de Lazio) pour excès de pouvoir. Ce conflit démarre donc dès 2023. Pourriez-vous préciser les processus qui ont conduit à cette grève, et ses implications en termes de participation ?

    Le mouvement de grève actuel dans le secteur ferroviaire est né de la création en septembre 2023 de l’assemblée nationale PdM (personale di macchina, conducteurs de train) et PdB (personale di bordo, personnel de bord).

    En septembre nous avons fait naître cette assemblée et nous avons conçu des étapes intermédiaires, comme un questionnaire qui a reçu plus de 3 000 réponses. À partir de ce questionnaire, nous avons mis en place une plateforme pour recueillir les revendications, puis nous l’avons transmise à tous les syndicats, qu’ils soient ou non signataires. Seuls Confederazione unitaria di base (Cub), Unione sindacale di base (Usb) et Sindacato generale di base (Sgb) ont répondu à l’appel. Chacun de ces syndicats a ensuite créé sa propre plateforme, ainsi que des assemblées autonomes qui ont tenté de négocier pour faire émerger un projet unique, à même de rassembler toutes les sensibilités présentes autour de la table

    L’assemblée du PdM et du PdB, a alors décidé de lancer la première action de grève de 2024, centrée sur le renouvellement de la convention collective nationale. La première grève a donc eu lieu le 12 février et n’a duré que 8 heures, c’est la règle dans le secteur ferroviaire. En revanche les suivantes peuvent durer vingt-quatre heures. Le premier jour de grève a été très suivi, avec une participation de 50 à 55 % dans toute l’Italie. C’est un nombre significatif si l’on considère que la grève avait été lancée par une nouvelle entité (l’assemblée PdM et PdB), déclarée par trois syndicats, et que de nombreux collègues, en vertu de la loi 146/1990 (définissant les règles sur l’exercice du droit de grève dans les services publics essentiels et sur la sauvegarde des droits protégés par la Constitution, ndlr) considèrent la grève comme un outil peu adéquat.

    Après le 12 février, l’objectif de l’assemblée a été de déterminer une nouvelle date pour une grève de 24 heures. Nous avons retenu un jour férié, car il n’y a pas de service minimum à assurer pour les trains régionaux et les trains de marchandises. En revanche, c’est le cas pour les trains interurbains et à grande vitesse, mais avec un service minimum plus réduit par rapport à un jour de semaine. Un choix qui, selon nous, garantirait une plus grande participation, et en effet les chiffres ont été plus élevés que ceux du 12 février. Le taux de participation était de 65 à 70 % sur tout le territoire national, avec des pics à 90 % dans certaines régions, comme la Campanie.

    Les grèves des derniers mois ont déjà produit des résultats. Il est bon de rappeler que les négociations pour le renouvellement de la Ccnl ont débuté en août 2023. Nous avons vu que les syndicats signataires ont commencé à réviser certaines de leurs demandes, en les adaptant – bien qu’encore très partiellement – à ce qui est ressorti de l’assemblée du PdM et du PdB.

    Sur votre plateforme, il est fait référence aux shifts désormais insoutenables que les conducteurs de train et les chefs de bord sont contraints d’effectuer. Il est clair que des shifts fatigants, ou plutôt épuisants, représentent un problème de sécurité non seulement pour les travailleurs, mais aussi pour les voyageurs. De quoi parle-t-on ?

    Tout d’abord, il est utile de rappeler que les conducteurs de train et les chefs de bord sont justement responsables de la sécurité du trafic ferroviaire et du convoi. Pourtant ces dernières années, l’entreprise nous a considérés uniquement comme des travailleurs à exploiter jusqu’à la limite de la durée du travail établie par la législation européenne. La loi sur la durée du travail et les directives européennes prévoient une durée de travail maximale de 13 heures, avec 11 heures de repos.

    À ce jour, la réglementation établit une durée de travail quotidienne maximale de 10 heures et jusqu’à 11 heures pour les trains de marchandises. Ces derniers temps, l’entreprise a essayé de nous pousser à travailler jusqu’à la limite. En oubliant qu’il fallait veiller à garantir au personnel garant de la sécurité un certain repos physique et psychologique, afin qu’un train puisse circuler en toute sécurité.

    Ils ne tiennent même pas compte du fait que lorsque vous allez dormir hors site, le temps de repos réel est bien inférieur à 8 heures, avec peut-être 5 heures de sommeil effectif.

    Nos shifts se succèdent sur 24 heures, pour une moyenne de 38 heures de travail hebdomadaire. Cela signifie qu’il peut y avoir des semaines au cours desquelles nous travaillons 44 heures, d’autres pendant lesquelles nous travaillons 30 heures, mais nous ne pouvons pas aller en deçà. Malgré ce que déclarent certains ministres, nous n’avons pas de repos le week-end. En réalité, nous avons droit au repos le week-end une seule fois par mois, car il est généralement calculé sur une base de 6 jours travaillés et parfois nous n’avons même pas deux jours de repos complets à la fin de notre service.

    Au fil des années, nos conditions de travail se sont dégradées et les résultats sont visibles : on constate une augmentation des sauts d’arrêt en gare, qui ne sont donc pas desservis, des passages alors que la signalisation est rouge et d’autres symptômes de distraction. Tout cela se produit lorsqu’il n’y a qu’un seul conducteur de train pendant la journée, alors que la nuit, heureusement, il y en a encore deux. Par nuit, nous entendons la plage horaire allant de minuit à 5 heures du matin. Si un train part à 5 heures, il n’y a qu’un seul conducteur, qui pour pouvoir prendre son poste à cette heure-là, se sera certainement réveillé au moins à 3 h 30. Ce shift – étant de jour – peut durer jusqu’à 10 heures et donc, vous vous réveillez à 3h30 du matin en travaillant peut-être jusqu’à 14h00 ou 14h30. De plus, au lieu d’embaucher, l’entreprise préfère avoir recours aux heures supplémentaires.

    En termes d’horaires, nous avons demandé de travailler 36 heures par semaine au lieu de 38. Pour le travail de jour, nous souhaitons la suppression du maximum de 10 heures par jour, contre un maximum de 8. Nous avons prescrit un maximum de 6 heures de travail la nuit – la nuit s’entendant de minuit à 6h00 et non 5h00- avec un nombre maximum de quatre nuits par mois, des périodes de repos hebdomadaires de 58 heures, deux jours complets de repos et un repos entre un shift et le suivant d’une durée de 16 heures contre 14 actuellement.

    Un autre problème à ne pas sous-estimer : les horaires des repas prévoient seulement 30 minutes pour manger, en comptabilisant le temps nécessaire pour se rendre au restaurant en gare. Par conséquent, de nombreux collègues apportent leur propre repas et ne mangent pas sur site. Dans le cadre des revendications, nous avons demandé une augmentation du temps pour se restaurer qui tiennent compte des horaires d’ouverture des restaurants.

    En référence à la question de la sécurité : comme vous le mentionniez, les trains de jour circulent actuellement avec un seul conducteur, une situation qui, ces dernières années, a conduit à une série d’accidents dus à des malaises soudains. Que proposez-vous ?

    Au sujet du double conducteur, il y a eu une vive discussion sur ce qu’il fallait intégrer à la plateforme. Certains proposaient un retour au double conducteur, d’autres étaient partisans de créer une figure intermédiaire entre le conducteur et le chef de bord, qui serait habilitée à conduire. Ces derniers jours, la question de la sécurité est redevenue centrale, car un conducteur a perdu la vie alors qu’il conduisait.

    Je crois qu’il est important de rappeler que le délai pour porter secours aux conducteurs et au personnel de bord en cas de malaise, a été établi par l’entreprise selon les délais généraux qui prévoient l’arrivée d’une ambulance en 8 minutes en ville et dans les centres urbains, en 20 minutes dans les espaces extra-urbains. Ce sont des délais calculés pour des cas fondamentalement différents. En 20 minutes, le temps nécessaire pour sauver un être humain d’une crise cardiaque, il est peu probable qu’une ambulance parvienne à secourir du personnel dans un train situé en dehors d’un centre-ville.

    Pour cette raison, la présence d’un second conducteur ou d’un autre travailleur autorisé à conduire est cruciale, car en cas de malaise cela permettrait au train d’être amené en toute sécurité jusqu’à la gare, sans interruption soudaine et en réduisant les délais d’intervention du personnel médical.

    Toujours sur le plan de la sécurité et du travail, il nous semble important de souligner que l’espérance de vie des conducteurs de train est actuellement, selon diverses études – dont celle menée par l’Université Sapienza de Rome – égale à 64 ans, donc inférieure à l’âge de départ à la retraite fixé à 67 ans. Quels raisonnements avez-vous conduit sur les aspects liés à la sécurité sociale ?

    Ce nombre provient d’une étude réalisée par la revue des conducteurs de train In Marcia, l’Université Sapienza de Rome, la Région Toscane et l’Asl Toscane (Azienda sanitaria locale de Toscane). Cette étude indépendante, publiée en 2010, a révélé que l’espérance de vie des conducteurs de train était, en effet, de 64 ans. Précédemment en tant que catégorie professionnelle, nous avions droit à la retraite à 58 ans. En 2012, avec la loi Fornero, nous avons été regroupés avec toutes les autres catégories. On n’a même pas reconnu la pénibilité de notre travail, ce qui nous aurait octroyé une réduction de trois ans sur l’âge de départ à la retraite.

    Aucun syndicat n’a appelé à la grève en 2012. De ce fait, depuis il n’y a pas eu d’évolution, la pénibilité de notre travail n’a pas été reconnue et la loi nous permettant de prendre notre retraite à 58 ans n’a pas été rétablie. Aucun gouvernement n’a pris en charge ces questions. Notre exigence – minimale, nous tenons à le préciser – est d’entrer dans la catégorie des métiers pénibles.

    Qu’en est-il du versant économique de la #convention_collective ?

    Sur l’aspect de la #rémunération, nous n’avons pas voulu porter de revendications excessives. Nous avons déjà vécu des renouvellements contractuels avec des syndicats qui, avant la hausse de l’inflation, sont restés sur des augmentations barémiques du salaire minimum de l’ordre de 30 euros bruts par mois. Cependant, la rémunération des conducteurs de train et des chefs de bord se compose de nombreux éléments supplémentaires (et variables, ndlr), ce qu’on appelle les compétences complémentaires, qui une fois additionnées, créent une différence pouvant atteindre 500 euros par mois.

    En réalité, ces compétences complémentaires stagnent depuis près de vingt ans : elles n’ont été ni augmentées ni réévaluées avec l’inflation. Alors que d’autres entreprises, y compris semi-publiques, ont appliqué des augmentations et des ajustements à l’inflation, sans passer par un renouvellement contractuel. Nous n’avons rien eu de tout cela et, bien qu’il y ait une renégociation de la convention en cours qui dure depuis août 2023, ni les syndicats signataires ni l’entreprise n’ont encore parlé de rémunération

    Cela peut sembler être une grosse somme, mais ces compétences font partie de notre salaire et n’ont pas été ajustées depuis vingt ans. C’est le minimum qu’on est en droit d’exiger.

    Les transports publics sont également au cœur des revendications des mouvements écologistes, qui demandent d’y investir beaucoup plus de ressources, notamment en raison des effets positifs sur l’emploi « vert ». En Italie pour tout le secteur, filière industrielle comprise, une étude de Cassa Depositi e Prestiti (Caisse des Dépôts et Consignations) estime un potentiel de 110 000 emplois par an. Les mobilisations de ces mouvements dans des pays comme l’Allemagne les ont amenés à se joindre aux syndicats – notamment avec Ver.di, le premier syndicat du secteur des services – pour le renouvellement des conventions collectives. Partagez-vous l’idée d’un lien étroit entre les transports publics et la transition écologique et pensez-vous qu’une convergence de deux luttes différentes -seulement en apparence­- pourrait servir les deux causes ?

    Nous pensons que le transport ferroviaire pourrait avoir un impact très positif sur l’environnement, en particulier le transport de marchandises, car on peut encourager le transport ferroviaire de marchandises, ce qui réduirait le fret routier. Ce n’est pas ce à quoi on assiste. Il y a encore trop peu d’entreprises dans ce domaine, qui par ailleurs entrent sur le marché avec la même logique de réaliser du profit sur le dos des travailleurs, avec une réglementation moins exigeante que la nôtre.

    Pour le transport de passagers, il est tout aussi important de réaliser des investissements afin de diminuer le nombre de voitures sur les routes, mais dans des régions comme la Campanie, la Sicile, la Sardaigne, etc. nous connaissons le mauvais état du réseau ferroviaire – on pense de manière complètement irrationnelle à construire des infrastructures à la fois nuisibles à l’environnement et inutiles dans l’état actuel des chemins de fer siciliens, comme le pont sur le détroit (projet de pont suspendu sur le détroit de Messine visant à relier la Sicile et la Calabre, ndlr).

    En tant qu’Usb, notre plateforme est plus large que celle de l’assemblée. Parmi nos revendications figure la protection de la fonction du service ferroviaire en tant que service public.

    « Cela signifie investir des ressources dans des zones où il n’y a aucun retour économique : quand votre priorité est d’assurer une mission de service public, vous dépensez cet argent quand même. »

    Lorsque le secteur ferroviaire est orienté vers la privatisation, la gestion privée devient incompatible avec une logique de service public et d’écologie. Le privé essaie d’économiser là où il le peut, en heures de travail, en sécurité, et exprime en amont une préférence pour le transport routier parce qu’il coûte moins cher. Pour l’Usb il pourrait donc facilement y avoir cette convergence. Dans nos revendications, elle existe déjà implicitement. Les opportunités futures ne manqueront pas pour l’expliciter et la mettre en œuvre.

    https://lvsl.fr/italie-quand-le-profit-fait-derailler-les-trains
    #transport_ferroviaire #Italie #trains #infrastructure