• Nicholas Noe sur X : https://x.com/NoeNicholas/status/1932734150873882849

    A longstanding blindspot among “sovereignists” is now gaping with the “New Israel”: no matter how submissive/passive Lebanon becomes, Israel is increasingly likely to harm the state as per its ever more extreme interests;& there are no restraints for this among “friendly” states.

    Un angle mort de longue date parmi les « #souverainistes » est désormais béant avec le « Nouvel Israël » : peu importe à quel point le #Liban devient soumis/passif, Israël est de plus en plus susceptible de nuire à l’État en fonction de ses intérêts toujours plus extrêmes ; et il n’y a aucune restriction à cela parmi les États « amis ».

    Mais assister à la défaite du Hezbollah ne vaut-il pas toutes les #souverainetés du monde ?

    #déni

  • 20 ans après le #référendum de 2005 : le « non » fait la force !
    https://lvsl.fr/20-ans-apres-le-referendum-de-2005-le-non-fait-la-force

    Pour le député LFI Matthias Tavel, le « non » massif des Français à la construction européenne néolibérale au référendum du 2005 dessine les contours d’une majorité sociale pour la gauche. Une victoire face à la propagande médiatique qui rappelle l’importance de la souveraineté populaire pour contrer la mondialisation et l’oligarchie.

    #Politique #austérité #Démocratie #Europe #gilets_jaunes #néolibéralisme #PS #souveraineté #trahison #UMP #Union_Européenne #vote

  • Baghdad sues Iraqi Kurds over US energy deals, Energy News, ET EnergyWorld
    https://energy.economictimes.indiatimes.com/news/oil-and-gas/update-2-baghdad-sues-iraqi-kurds-over-us-energy-deals/121417101

    The Iraqi federal government’s oil ministry has sued the semi-autonomous Kurdistan Region of Iraq over oil and gas contracts it signed with U.S. firms, three sources with direct knowledge of the matter said and a document showed.

    #Irak #états-unis #souveraineté

  • Thread de #Julien_Gossa sur Mastodon :
    Les scientifiques américains sont réellement en danger. Jouer avec ce type de situation seulement pour gagner un peu de crédit politique est très dangereux.
    https://social.sciences.re/@juliengossa/114375605162671356

    « On n’a déjà pas assez d’argent pour fonctionner normalement » : la France peut-elle accueillir des scientifiques étrangers ?
    https://www.leparisien.fr/futurs/on-na-deja-pas-assez-dargent-pour-fonctionner-normalement-la-france-peut-

    D’abord, il faut bien le dire : ce n’est pas une petite embrouille qui permet pépouze de tirer quelques marrons du feu.

    Les scientifiques américains sont réellement en danger, pour de bon. Pour l’instant, ça coupe surtout dans les #budgets. Mais les #arrestations_arbitraires ont déjà commencé.

    Donc on n’est plus dans le contexte #MakeOurPlanetGreatAgain ou #AIforHumanity, où on pouvait se permettre de raconter n’importe quoi, de claquer quelques millions puis d’oublier le bouzin après s’être auto-congratulé.

    Là, il va y avoir des conséquences concrètes, plus que juste gâcher du fric.
    https://www.huffingtonpost.fr/international/article/macron-a-t-il-vraiment-made-our-planet-great-again-un-an-apres-sa-phr

    Or, tout pousse à croire qu’il ne s’agit qu’un d’un coup de com’ à l’usage exclusif de l’image de M. Macron.

    « Un conseiller a lâché dans les grilles de l’Elysée : "Incroyable, Trump l’a sauvé" ».

    « sauver » M. Macron coute beaucoup moins cher que sauver des scientifiques. Mais à quel prix ?

    https://www.liberation.fr/politique/a-lelysee-le-dernier-carre-des-fideles-demmanuel-macron-20250418_VHMP3NU645AZ5DFC6DNZIHGCIA/?redirected=1

    Dans ce fil, je donnais trois conditions pour que cette démarche se passe bien.

    Aucune n’est remplie, et ça va même à l’exact inverse. On a pratiquement la garantie que ça se passe mal.

    1. Bien accueillir des #scientifiques_étrangers sans mieux traiter en même temps les #scientifiques_français va générer mécaniquement du #mécontentement et du #quiet-quitting.

    Globalement, on ne sauve rien, on ne fait que dégrader la science (qui ne va déjà pas bien du tout).

    Mais en plus le #dispositif est parti pour être famélique, donc pour décevoir les espoirs des scientifiques américains.

    C’est en fait un simple « outil », et l’État financera au maximum la moitié du coût de l’opération.

    https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr/lancement-de-la-plateforme-choose-france-science-une-

    Donc plus de la moitié du coût va reposer sur les université d’accueil, qui ne peuvent déjà pas boucler leur budget.

    On imagine le CA :
    – Point 1 : 15 M€ pour accueillir des ricains 💪
    – Point 2 : -20% de postes, -30% de budget des composantes, suppression du chauffage au bâtiment B
    https://www.francetvinfo.fr/sciences/ils-sont-motives-par-la-liberte-academique-le-president-d-aix-marseille

    Le Ministre le sait bien, et ouvre déjà son parapluie : L’effort d’accueil des chercheurs américains « doit se faire au niveau européen ».

    Donc c’est soit les universités, soit l’Europe qui doit payer. En somme, tout le monde, sauf l’État français qui en pourtant commanditaire.
    https://www.nouvelobs.com/sciences/20250419.OBS102961/l-effort-d-accueil-des-chercheurs-americains-doit-se-faire-au-niveau-euro

    Le chiffrage me parait totalement délirant : 330 k€/an pour une équipe, c’est une toute petite équipe, déjà installée en France, et avec un environnement papier/crayon/laptop.

    Et on ne prévoit rien pour accueillir les familles de ces scientifiques, les loger, l’école des mioches, etc.

    Ça mène au point 2, la #politique_scientifique.

    Elle se voit sur la #liste fermée des #thématiques concernées par le dispositif.

    D’abord, cette liste montre qu’on n’est pas du tout sur du papier/crayon/laptop. 330k€ pour une équipe dans ces domaines, c’est juste une blague.

    Surtout, on constate que cette liste exclut les #SHS - c’est-à-dire la discipline la plus en risque aux USA. Et pas seulement en risque de définancement. Ça pue la prison à plein nez.

    Le Ministre répond en substance "oui c’est vrai, mais il y a écologie qui est aussi menacée". L’aveu est terrible.

    L’aveu est terrible car il montre bien que l’intention n’est pas d’accueillir des scientifiques empêchés et persécutés, mais de profiter de la situation pour voler une paire de cerveaux considérés comme rentables par notre gouvernement.

    Tout ça en parlant de refuge pour les #libertés_académiques.

    Se prévaloir des libertés académiques tout en restreignant politiquement les #domaines_de_recherche. Formidable !👏

    Et il y a #écologie et écologie : l’écologie Total (pétrole à tous les étages, mais "vert") et l’écologie "arrêtez vos conneries on va tous crever".

    Laquelle vise le gouvernement ?

    Et là on arrive au point 3. la politique démocratique.

    L’administration Trump attaque très exactement les mêmes scientifiques que Macron attaquait dès 2020 en les considérant « coupable » de « casser la République en deux ».

    Les mêmes qu’on exclu du dispositif de « refuge ».

    https://www.lesinrocks.com/actu/macron-juge-le-monde-universitaire-coupable-davoir-casse-la-republique-e

    M. Macron aurait pu - même sans le reconnaitre publiquement - réaliser que l’offensive obscurantiste à laquelle il a lui-même participé pouvait conduire à des choses très graves, comme ce qui se passe notamment aux USA.

    Mais il a préféré s’entêter, et rester une politique de #vol_des_cerveaux.

    Tout cela est très dangereux, parce que ça va casser le moral des scientifiques français, mais qu’en plus ça va générer beaucoup de #frustration et de #déception auprès des scientifiques américains, dont beaucoup ont réellement besoin d’un #refuge.

    C’est le contraire de l’#humanisme.

    Pour les petits besoins de sa com’ personnelle, M. Macron est en train d’engager la responsabilité et la réputation de la France, mais sans mettre les moyens, et en ciblant l’inutile.

    En vouloir à la France va être tout à fait légitime. Et c’est très grave.

    Le gouvernement : "Tout sauf ces sales wokes. On ne veut que du top star grobraino en énergies fossiles ou en IA."
    L’ED : "Le gouvernement ouvre les frontières aux sales wokes"

    C’était couru, mais la stratégie du gouvernement est vraiment perdante-perdantes.
    ¯\(ツ)

    #France #recherche #accueil #chercheurs_en_danger #scholars_at_risk #ESR #USA #Etats-Unis #disciplines

    • Donc mon université a fait l’ouverture du journal de 8h de France culture avec son programme d’accueil des collègues états uniens dont les recherches sont en danger. 15 millions d’euros pour 10 à 20 collègues, sur le modèle #CPJ. Pour comparaison, j’ai appris que l’accueil de 3 collègues Palestiniens dans le cadre de Pause coûte à la même université... 75 000 euros

      Pour qu’on prenne bien la mesure de la #différence_de_traitement, alors que la présidence de l’université annonce qu’elle mobilise ses équipes pour trouver un logement et des places en école pour les familles des collègues états-uniens, voilà le message que les collègues nous envoient pour pouvoir assurer le minimum décent pour les collègues Palestiniens :

      Et voici le message d’appel à #solidarité concernant le troisième collègue palestinien, qui a le mérite de rappeler les conséquences matérielles de la guerre à Gaza et leur impact scientifique :

      #Palestine #deux_poids_deux_mesures

    • Accueil des chercheur∙ses internationaux en France : de qui se moque-t-on ? Communiqué intersyndical CGT-FO-FSE-FSU-Unef-Sud, 2 mai 2025

      Le 5 mai Emmanuel Macron organise un ersatz de cérémonie d’accueil pour « les chercheurs du monde entier » qu’il appelle à rejoindre la France. Ce soudain intérêt du président pour la recherche, nationale ou internationale, questionne alors que l’enseignement supérieur et la recherche sont très brutalement attaqués aux Etats-Unis, avec une remise en cause tout à la fois des libertés qui président partout à la vie universitaire, de la libre détermination des sujets d’enseignement ou de recherche par les enseignants et les chercheurs, ou des financements permettant le plein fonctionnement des institutions d’enseignement et de recherche.

      Des chercheur·ses sont brutalement licenciés, les budgets d’agences de recherche sur le climat comme la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration), sur la santé comme la NIH (National Institutes of Health) ou sur l’espace comme la NASA (National Aeronautics and Space Administration) sont largement amputés, des bases de données sont brutalement fermées, les financements fédéraux de plusieurs universités sont gelés, des étudiant·es sont poursuivis par la justice. De nombreux projets de recherche internationaux sont à l’arrêt, les déplacements de chercheur·ses états-uniens sont entravés, leur participation à des groupes internationaux comme le GIEC remis en question.

      Face à cette lame de fond à laquelle sont confrontées l’université et la recherche publiques, l’intersyndicale de l’ESR rappelle que pour lutter contre l’obscurantisme, il est urgent de défendre la liberté de production et de diffusion des savoirs, comme bien commun et facteur de progrès social. La solidarité envers la communauté de recherche mondiale s’impose et il est indispensable de pouvoir accueillir ces collègues tout comme celles et ceux empêché·es de travailler ou persécuté·es dans leur pays, quel qu’il soit.

      Dans ce contexte, la mise en place d’une plateforme “Choose France for Science”, annoncée par le Président de la République française, en réponse à la situation des chercheur·es aux Etats-Unis est choquante, voire indécente.

      Indécente, car la politique du Président Macron depuis 2017 a considérablement affaible l’Enseignement supérieur et la Recherche (ESR) en France non seulement par un sous-financement chronique, des regroupements forcés et un pilotage accru, mais aussi par des atteintes quasi incessantes à la liberté académique : attaques sans fondement de la Ministre Frédérique Vidal contre les sciences humaines et sociales, supposées gangrénées par de supposés chercheur·ses « wokistes » ou « islamo-gauchiste », sanctions disciplinaires contre des chercheur·ses qui ont exprimés leur solidarité au peuple palestinien, interdiction de conférences et de séminaires sur la situation à Gaza dans les Universités de Lille, Lyon, Bordeaux, etc. S’y ajoutent les dispositions des Zones à Régime Restrictif (ZRR), qui conduisent à des dérives inquiétantes sur les libertés (dont celle de publication) et les recrutements sous couvert de sécurité nationale.

      Et bien sûr le meilleur moyen d’affaiblir la recherche et la diffusion des connaissance est tout simplement d’assécher les finances publiques des établissements concernés. Sous la présidence Macron (2017 – 2022), le nombre de personnels enseignants titulaires a continué de baisser (-3,1% depuis 2015) tandis que celui des personnels enseignants contractuels explosait dans des proportions inquiétantes (+18,5%) et que le nombre d’étudiant·es augmentait (+325 000 / + 12,5%), la part de la richesse nationale consacrée à la recherche est passée de 2,25 % à 2,22 % (quand les États-Unis y consacrent 3,47 %), le bâti universitaire est en phase de délabrement accéléré (57 % de passoires énergétiques, 1/3 de bâtiments « vétustes »). Après les coupes brutales dans les budgets de l’ESR en février 2024 (-600M€), le gouvernement Macron a encore taillé 950 M€ en 2025 (dont -493 M€ sur la mission enseignement supérieur et recherche)…

      Dans ce contexte, les annonces du gouvernement Macron-Baptiste (ministre de l’ESR) ainsi que certains président·es d’université ne visent qu’à redorer leur image à peu de frais.

      Loin de répondre aux besoins criants des travailleur·ses et des étudiant·es de l’ESR public, ces annonces sont choquantes : évoquer une enveloppe de plus de 300 000 € par an par chercheur·se états-unien accueilli quand le salaire moyen d’un·e enseignant·e–chercheur·ses en France s’élève à 63 000 € brut / an (rapport social unique 2022), quand des milliers d’ATER (attaché·es temporaires d’enseignement et de recherche) payés 22 % au-dessus du SMIC (ou 13 % en-dessous pour les 1/2 ATER), quand 170 000 vacataires sont payés sous le SMIC avec plusieurs mois de retard, quand 35 % des agent·es du secteur ont un statut précaire de contractuel. Et que dire de l’effondrement (-27 % depuis 2000 selon l’INSEE) du pouvoir d’achat des agent·es du secteur public, qui conduit à la paupérisation de toutes et tous, et en particulier des plus modestes (collègues de catégorie B et C notamment), qui assurent l’entretien et l’administration indispensables au fonctionnement de nos universités et organismes de recherche.

      La recherche est œuvre collective, et la concentration des moyens sur quelques individus ou sur quelques laboratoires (comme le prévoyait le projet des Key Labs), dont la contrepartie est leur raréfaction pour la masse des autres, est en réalité un frein aux progrès indispensables.

      Les organisations signataires, outre l’accueil décent de collègues empêchés ou persécutés dans leur pays, continuent de demander un budget ambitieux, à la hauteur des enjeux, pour le service public de l’ESR.

      https://academia.hypotheses.org/62050

    • « #Choose_Europe_for_Science » : l’#opération_Potemkine de Macron sur la recherche française

      Le président de la République veut accueillir les cerveaux américains, martyrisés par l’administration Trump. Mais sa peinture de la France en paradis de la recherche et des libertés académiques ne passe pas.

      « Nous« Nous sommes à un moment de rupture où l’impensable est devenu notre réalité. » Les mots d’Emmanuel Macron lundi 5 mai, en clôture de l’événement franco-européen « Choose Europe for Science », ont dû résonner étrangement aux oreilles de la communauté scientifique publique hexagonale : le président de la République parlait-il des États-Unis ou de la France ?

      Notre pays est bien sûr loin de vivre la guerre impitoyable contre la recherche menée par Donald Trump depuis son arrivée au pouvoir, sœur de celles lancées par Javier Milei en Argentine ou encore par Narendra Modi en Inde. Mais, comme le rappelle avec force le professeur de physique Bruno Andreotti, du collectif Stand Up for Science, des « formes de continuité » existent.

      Elles se nichent dans une série de mesures réactionnaires et austéritaires qui nuisent à la qualité de la production scientifique française et qui contribuent à installer, y compris sous la présidence d’un Emmanuel Macron, un « imaginaire fasciste » hostile aux libertés académiques.

      Parlons gros sous, d’abord : ce n’est pas aux États-Unis mais en France que, de crédits rabotés en argent non versé, le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche a fondu de près 10 % ces quatre derniers mois (environ 2,5 milliards d’euros en moins sur les 25 milliards d’enveloppes prévues).

      Structurellement, la recherche publique a vu son financement chuter de 2 % depuis 2019 et le temps nécessaire pour accéder à un emploi stable n’a jamais été aussi long : les contrats courts et précaires y explosent. Plusieurs universités françaises sont même au bord de la faillite, peinant à trouver l’argent pour simplement payer les salaires et les fluides.
      Pour les chercheurs, l’ironie du désespoir

      Les mots, dans ce cadre, ont un sens : interrogée en décembre sur le sort budgétaire réservé à l’enseignement supérieur et à la recherche française, Hélène Boulanger, présidente de l’université de Lorraine, évoquait auprès de Mediapart une véritable « saignée », qui en médecine évoque un traitement de choc pour éviter la mort.

      Le président de la République peut donc bien lancer son « appel de la Sorbonne », mettre 100 millions d’euros sur la table afin d’accueillir les chercheur·es martyrisé·es par l’administration Trump, chérir « la science libre et ouverte », « trésor » du continent européen.

      « Aux États-Unis, [les universités] furent riches, cannibales, miraculeuses, écrit la philosophe Nadia Yala Kisukidi, dans le magazine Politis. En France, elles rament et on les enfonce depuis plus d’une décennie. »

      Les chercheur·es français·es, sur les réseaux sociaux et dans les boucles de messageries professionnelles, ne sont pas dupes : ils et elles rappellent avec l’ironie du désespoir leurs bricolages de bouts de ficelle, les bureaux délabrés, les amphis bondés, les étudiant·es refusé·es en licence, en master, en thèse, ainsi que les efforts déployés chaque jour dans les laboratoires de recherche pour payer un billet de train, financer les contrats postdoctoraux décents, assumer les frais d’un colloque, répondre à une invitation à l’étranger, y compris dans les domaines les plus prestigieux.

      « Dans mon université, à Rennes 2, je ne vais jamais voir la couleur de ces millions, et on se bat quotidiennement pour sauver des postes, s’est ainsi indignée Anaïs Lefevre-Berthelot, maîtresse de conférences spécialiste du genre et des médias aux États-Unis, à l’occasion de la conférence de presse du collectif Stand Up for Science ayant suivi les annonces présidentielles. On va offrir quoi à nos collègues américains, un contrat court de trois ans et un retour au pays ? C’est une opération de communication. »

      Pour la CGT du supérieur, ces annonces en grande pompe sont même « choquantes », surtout quand il s’agit de dédier, comme l’a fait récemment le président de l’université d’Aix-Marseille Éric Berton, entre 600 000 et 800 000 euros par chercheur·e accueilli·e sur trois ans. Le salaire moyen d’un·e enseignant·e-chercheur·e en France s’élève à 63 000 euros brut par année (selon le rapport social unique de 2022 cité par le syndicat) et des milliers de vacataires, parfois payé·es moins que le Smic, attendent des mois avant de recevoir leur dû.

      Personne ne se risque cependant à minimiser les enjeux du séisme scientifique, mais aussi sanitaire et démocratique, engendré par la chasse aux sorcières que vivent actuellement les États-Unis. « Des gens vont mourir » en raison des décisions de l’administration Trump d’arrêter les recherches sur le VIH, sur les vaccins, sur le climat, insiste encore Anaïs Lefevre-Berthelot.

      Le professeur Alain Fischer, spécialiste des déficits immunitaires génétiques, a lui souhaité souligner la nécessaire, bien que minimale, prise de position européenne du jour : « Ursula Van der Leyen et Emmanuel Macron ont rappelé que les valeurs académiques sont indispensables, c’est bien et important qu’ils le fassent. »

      D’autres, et Emmanuel Macron le premier, ont pris garde aussi à ne pas réactiver une forme de concurrence mortifère, se faisant les promoteurs de la solidarité vitale entre communautés académiques. « Il n’y aura pas d’effet d’éviction, n’en déplaise aux malthusiens. La science se nourrit de cette émulation, de cette capacité à recruter et à attirer les meilleurs talents », a ainsi martelé le président à la Sorbonne.

      Mais qui notre pays souhaite-t-il réellement accueillir, et dans quel but ? « Attention de ne pas penser qu’aux stars de la recherche, quand on devrait accueillir en priorité les jeunes, les post-doctorants vulnérables, ceux qui ont sans doute le plus à perdre », a noté Alain Fisher.

      S’agissant des profils, Libération a révélé que les chercheur·es en étude de genre ou travaillant sur les minorités, thèmes honnis par l’équipage trumpiste, seraient exclu·es de la politique d’accueil « à la française ». « On peut défendre nos intérêts stratégiques et en même temps porter une vision universaliste », a assumé l’Élysée auprès de nos confrères. Que les « Marie Curie de demain » (pour citer encore le président) qui souhaitent traverser l’océan afin de rejoindre « l’Europe du savoir » se le disent…
      La France n’a rien d’un paradis académique

      Ce n’est pas non plus la première fois que la diplomatie scientifique fonctionne à géométrie variable : un peu plus de 5 000 visas « recherche » ont été délivrés entre 2023 et 2024, selon les statistiques du ministère de l’intérieur, soit une hausse de 12,5 % en un an, mais la grande majorité des chercheurs et chercheuses accueilli·es dans les laboratoires français sont d’abord… européen·nes.

      La réforme des frais d’inscription pour les étudiantes et étudiants étrangers, mise en œuvre à l’occasion du premier mandat d’Emmanuel Macron, s’applique, elle, chaque année plus durement, pénalisant notamment les étudiant·es venu·es du continent africain, souvent moins doté·es financièrement.

      Enfin, le programme Pause, qui finance depuis 2021 des scientifiques en exil (afghans, syriens, turcs, ukrainiens, russes, et récemment palestiniens, dont la sortie est le plus souvent bloquée par Israël…), a vu son budget passer de 7 millions d’euros en 2023 à 3 millions l’an passé, s’inquiète un membre du conseil d’administration.

      Le décalage entre les discours et la réalité semble tout aussi patent sur la défense des libertés académiques. C’est le même Emmanuel Macron qui, en plein délire sur « l’islamogauchisme », accusait en 2020 les universitaires de « casser la République en deux » et de favoriser « l’ethnicisation de la question sociale », son ministre de l’éducation Jean-Michel Blanquer organisant deux ans plus tard à la Sorbonne un colloque indigent en forme du procès du « wokisme ».

      Après le 7 octobre 2023, plusieurs universitaires ont également dénoncé une forme de traque de toute parole jugée propalestinienne, tandis que Gabriel Attal, alors premier ministre, attaquait directement Sciences Po, dont il disait ceci, dans une sorte d’anti-intellectualisme primaire : « Le poisson pourrit toujours par la tête. »

      Qu’à cela ne tienne : « Le racisme systémique, le nationalisme chrétien, la suprématie blanche, la haine de la culture, le capitalisme hardcore et le vin qui arrache, c’est là-bas. Pas chez nous, écrit d’une plume teintée d’ironie et d’amertume la philosophe Nadia Yala Kisukidi. En France, l’État de droit est en grande forme. Les espaces critiques, qui renforcent la bonne santé des démocraties libérales (médias, justice, université, multipartisme), ne flanchent pas. »

      Depuis la tribune de Choose Europe for Science, on entend enfin, dans la bouche du président de la République, un opportunisme politique à la limite du cynisme. Il s’agit d’attirer et d’accueillir les chercheuses et chercheurs étrangers soucieux d’une « science libre », mais aussi d’en profiter pour réformer « en profondeur » le système français.

      C’est-à-dire « simplifier », « alléger » les processus dans « la transmission entre recherche fondamentale et appliquée », favoriser encore davantage les « financements publics-privés », « aller plus loin dans les contrats d’objectifs, de moyens et de performance » qui s’imposent désormais aux universités françaises, favoriser les grosses unités comme Paris-Saclay, pourtant contestées.

      En bref, copier le « modèle américain », plus efficace que le modèle européen « ces trois dernières décennies », selon Emmanuel Macron. Sans tirer aucune leçon de la rapidité avec laquelle ce même système, brillant et envié partout dans le monde occidental, a été brisé, en à peine quelques mois, par la force d’un seul homme.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/050525/choose-europe-science-l-operation-potemkine-de-macron-sur-la-recherche-fra

    • Etudes sur le #genre ou les #minorités : les scientifiques que la France ne veut pas sauver du trumpisme

      L’Etat veut bien accueillir les chercheuses et chercheurs empêchés de travailler aux Etats-Unis, mais pas tous. Les thématiques considérées comme « wokes » ne font pas partie des cibles du gouvernement.

      C’est l’éléphant qui manque dans la pièce. La France déploie ce lundi 5 mai un grand #plan pour accueillir les scientifiques empêchés de travailler aux Etats-Unis. Dévoilée le 18 avril, la plateforme #Choose_France_for_Science « recensera les projets de recherche » autour d’une liste de #thématiques parmi lesquelles on trouve la santé, le climat, l’intelligence artificielle, le spatial, l’agriculture, les énergies ou encore le numérique. Les études de genre, ou décoloniales, n’y figurent pas. Elles font pourtant partie des thématiques frontalement attaquées par l’administration Trump.

      « Cela n’est pas étonnant. Les attaques contre les recherches médicales ou sur le climat indignent beaucoup plus, en France comme ailleurs, que les attaques ciblant les #sciences_sociales, de la sociologie à l’histoire », se désole la sociologue du CNRS Laure Bereni. Anne Fraïsse, latiniste et présidente de l’université de Montpellier Paul-Valéry, voit là « une forme d’#opportunisme pour attirer des chercheurs étrangers mais pas pour répondre à une forme d’exclusion ».

      Equilibres politiques nationaux

      A l’Elysée, on assume. « On peut défendre nos #intérêts_stratégiques et en même temps porter une #vision_universaliste. Pour le coup, cette initiative est à la croisée de ces deux ambitions-là », assure un conseiller. Les domaines privilégiés sont en lien avec la stratégie, assumée, de « réaffirmer la recherche comme étant un enjeu fort pour le #développement_économique et notre #souveraineté_industrielle ».

      Mathias Bernard, président de l’université Clermont Auvergne, « regrette » lui aussi cette orientation. « Il y a, y compris en France, tout un discours contre les universités qui repose sur la montée en épingle de ce que l’on appelait hier l’#islamogauchisme et aujourd’hui le #wokisme », constate celui qui dirigeait déjà son établissement en 2021, quand sa ministre de tutelle, Frédérique Vidal , dénonçait l’ « islamo-gauchisme »qui, selon elle, « gangrenait » les universités .

      Laure Bereni voit aussi dans ce choix le poids des équilibres politiques nationaux. « Il paraît sans doute plus prudent pour un gouvernement de centre droit dont la légitimité repose sur le soutien tacite du RN, de ne pas défendre des recherches scientifiques sur le genre, la question raciale ou les minorités, qui sont actuellement sous le feu des attaques de droite et d’extrême droite », avance-t-elle. Choisissez la France pour les sciences, donc, mais pas pour toutes les sciences.

      https://www.liberation.fr/sciences/etudes-sur-le-genre-ou-les-minorites-ces-scientifiques-que-la-france-ne-v

      #universalisme

  • #guerre_commerciale : vers la dédollarisation et la mort de l’industrie européenne ?
    https://lvsl.fr/guerre-commerciale-vers-la-dedollarisation-et-la-mort-de-lindustrie-europeenne

    La guerre commerciale de #Trump remet en cause un demi-siècle de mondialisation. Si la #chine pourrait profiter de cette situation pour accélérer la fin du privilège du #dollar, l’Union européenne risque d’être la principale victime de cet affrontement. Incapable de remettre en cause son libre-échangisme, elle se retrouve prise au piège.

    #Économie #commerce #douane #euro #industrie #souveraineté #taxes #Union_Européenne

  • La droite imite Trump et attaque l’#ESS

    Si jusqu’à présent seul le Rassemblement national constituait une menace pour l’économie sociale et solidaire (ESS), le consensus républicain l’entourant semble s’éroder depuis la dissolution de l’Assemblée nationale.

    En région #Auvergne-Rhône-Alpes, le précédent président et actuel président du groupe dit de « La Droite républicaine » à l’Assemblée nationale, #Laurent_Wauquiez s’était surtout illustré par l’affaire du « Dîner des Sommets » à 180 000 euros, des déjeuners coûteux et des sondages en série.

    Il a ouvert le feu en début d’année en supprimant la totalité de sa #subvention à la #Chambre_régionale_de_l’ESS (#Cress), soit 230 000 euros et un quart de son #budget. Et ce au mépris de la #loi qui prévoit que la région, en partenariat avec l’Etat, doit conclure une #convention_d’agrément avec celle-ci afin qu’elle puisse mettre en œuvre les missions qui lui sont confiées.

    C’est une atteinte plus grave encore aux #libertés_associatives que sept députés Les Républicains (LR) viennent de commettre en proposant la triple #suppression du #Conseil_supérieur_de_l’ESS, une instance consultative placée auprès de Bercy dont les membres sont bénévoles, les Cress dont le budget alloué par l’Etat n’est en moyenne que de 80 000 euros, et ESS France qui représente l’ensemble des mouvements de l’ESS dont la subvention de 500 000 euros pèse bien peu en comparaison des soutiens de l’Etat à hauteur de 600 millions d’euros pour les Chambres de commerce et d’industrie (CCI) et de 250 millions d’euros pour les Chambres des métiers et de l’artisanat (CMA).

    Une atteinte aux libertés associatives

    La suppression des Cress comme d’#ESS_France n’est par ailleurs pas du ressort de l’Assemblée nationale car, si leurs missions sont organisées par la loi, elles sont constituées en associations. Leur suppression par la loi serait donc une #répression de la #société_civile sans équivalent depuis la guerre.

    Ces #amendements, déposés dans le cadre de l’examen du #projet_de_loi de #simplification_de_la_vie_économique, ont heureusement été rejetés en commission. Ils ont cependant de quoi étonner, tant parce qu’ils peuvent difficilement prétendre à la résorption des déficits de l’Etat au regard des montants engagés, que parce qu’ils se font sans considération de la ministre en charge de l’ESS, Véronique Louwagie, pourtant issue du groupe de La Droite républicaine.

    Excès de zèle ? Simple cafouillage ? Ou début de fronde chez Les Républicains ? Le président d’ESS France, Benoit Hamon, pointe à juste titre que cette initiative relève de la « #post-vérité » digne de Donald Trump ou d’Elon Musk puisque le chiffre avancé d’un #coût de fonctionnement de 15,6 millions d’euros d’ESS France est totalement faux et grotesque. Son budget n’est que de 2 millions d’euros.

    Certes l’ESS a le plus souvent été soutenue par des gouvernements de gauche depuis son institutionnalisation par Michel Rocard en 1981 (création d’une délégation interministérielle et d’un Institut de développement de l’économie sociale, intégration au Plan, adoption d’une loi, etc.). Mais jusqu’à présent elle a toujours fait l’objet d’un consensus transpartisan en raison de sa participation à l’#intérêt_général.

    La IIIe République elle-même, pour renforcer sa légitimité sociale après avoir éloigné le risque d’une restauration monarchique, s’est beaucoup reposée sur l’économie sociale dans la conception et la mise en œuvre de ses politiques de solidarité.

    Le 3 mars dernier, la ministre Véronique Louwagie, annonçant devant le Conseil supérieur l’élaboration d’une stratégie nationale de l’ESS, soulignait que celle-ci ne devait pas être celle « d’un gouvernement ou d’un camp politique : elle doit être celle de notre pays ».

    L’ESS : un enjeu européen

    Cette stratégie est en effet exigée par l’Europe. Chaque Etat membre doit s’en doter d’ici la fin de l’année. Alors que la France et les pays latins sont souvent apparus isolés en matière d’ESS sur le vieux continent, cette politique bénéficie aujourd’hui d’une assise plus large grâce au soutien en particulier de l’Allemagne et de la Pologne.

    Cette orientation résiste à la vague conservatrice des dernières élections européennes, puisqu’il y a toujours une commissaire qui doit appliquer le plan d’action en faveur de l’économie sociale, la roumaine Roxana Minzatu, ainsi qu’un intergroupe dédié au Parlement européen.

    Des craintes existent aujourd’hui au niveau européen de ne considérer l’ESS que comme une économie réparatrice, cantonnée aux politiques de l’emploi alors qu’elle est parvenue ces dernières années à être reconnue par la Commission européenne comme l’un des quatorze écosystèmes industriels européens.

    A l’heure où la #souveraineté_industrielle est mise à l’agenda, elle pourrait prétendre à une place plus importante en Europe. N’obéissant pas aux diktats financiers, les emplois de l’ESS sont le plus souvent des emplois non délocalisables. Les entreprises détenues par leurs salariés, à l’image des sociétés #coopératives et participatives (#Scop), survivent par ailleurs plus longtemps et ont une meilleure #productivité.

    L’ESS pourrait même contribuer à réconcilier l’exigence de #compétitivité avec la #transition_écologique. C’est ce que démontre un rapport d’experts européens sur les clusters d’innovation sociale et écologique (https://www.lelabo-ess.org/system/files/inline-files/ET0621205FRN.fr%20%282%29.pdf) qui, à l’instar des #pôles_territoriaux_de_coopération_économique (#PTCE) en France, regroupent une diversité de parties prenantes (ESS, entreprises, société civile, pouvoirs publics, enseignement et recherche) pour « améliorer la prospérité et la régénération économique, écologique et sociétale locale en facilitant la coopération, la mise en commun des ressources et le renforcement des capacités d’innovation ».

    Ainsi, plutôt que de chercher à détruire l’écosystème de l’ESS sous couvert de #simplification, les représentants de la nation devraient au contraire le renforcer. Une solution simple et sans surcoût serait de réorienter vers les Cress une part de la taxe parafiscale1 attribuée aux CCI et aux CMA correspondant aux contributions des organisations de l’ESS. Aux élus de retrouver leur boussole républicaine.

    https://www.alternatives-economiques.fr/timothee-duverger/imite-trump-attaque-less/00114509
    #économie_sociale_et_solidaire #France #attaque

  • « L’#hypocrisie des #puces_électroniques#made_in_France” »

    Relocaliser l’industrie numérique, telle que la production de puces électroniques, est un #leurre. #Quartz, #silicium, #cobalt... viennent du Sud global. « Le #numérique est une #technologie_impériale », résume notre chroniqueuse.

    C’était un mot qui faisait souffler un vent d’idéalisme, un mot de contre-sommet plus que de journal télévisé : « relocaliser ». Dans les années 2000, les altermondialistes voulaient « relocaliser l’économie ». Défendre la menuiserie de bois local contre la production mondialisée d’Ikea, soutenir l’agriculture paysanne contre la monoculture d’exportation. Le monde entier était devenu la base logistique des multinationales. Relocalisation et coopération s’opposaient à ce libre-échange impérial qui permet d’obtenir de l’huile de palme d’Indonésie ou du soja d’Amazonie cultivé sur les terres ancestrales des peuples autochtones.

    Mais en vingt ans, et plus encore depuis le Covid, « relocaliser » est devenu un mantra du patronat. Ce sont désormais les #multinationales qui demandent à l’État de les aider à rapatrier certaines activités « stratégiques ». Entre-temps, le sens du mot a complètement changé. Le but est aujourd’hui de « sécuriser les #chaînes_d’approvisionnement » : aider l’industrie à avoir sous le coude #matières_premières et #composants.

    Imaginez qu’un missile tombe sur Taïwan où se trouvent les principales fonderies de semiconducteurs, ces puces électroniques présentes dans le moindre objet du quotidien (Il y en a 160 dans un téléphone, plus de 3 500 dans une voiture hybride [1]). Voilà qui mettrait à l’arrêt la production de voitures, de drones, de satellites, d’objets connectés et d’armement (la France étant le deuxième exportateur d’armes du globe).

    Les multinationales n’ont pas subitement décidé qu’un autre monde était possible et qu’elles devaient exploser en millions de coopératives locales. C’est plutôt que, pour elles, la planète n’est plus cette base logistique commodément aménagée par les politiques de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. L’hégémonie occidentale est terminée. Il y a plusieurs empires en concurrence pour les ressources et les marchés. Tous veulent des #métaux, des #semiconducteurs, etc. pour produire peu ou prou les mêmes objets.

    #Dépendance à un vaste tissu économique mondialisé

    C’est dans ce contexte que les députés européens ont voté en juillet 2023 le #Chips_Act. Objectif : produire sur le continent 20 % de la demande européenne de semiconducteurs. À #Crolles, près de #Grenoble, l’État va consacrer 2,9 milliards du #Plan_France_Relance pour augmenter les capacités de l’usine #STMicroelectronics, un groupe franco-italien dont le siège est en Suisse.

    Une usine de semiconducteurs est-elle relocalisable comme la production de chaussettes, qu’on peut approvisionner en laine de brebis du causse d’à côté ? En quoi consiste la production de puces électroniques ? À cette question, le #collectif_Stop_Micro a consacré toute une enquête (https://stopmicro38.noblogs.org/post/2024/11/01/ce-que-signifie-relocaliser), publiée en amont des rencontres organisées à Grenoble du 28 au 30 mars avec Les Soulèvements de la Terre.

    Décrivant les étapes de la production d’une puce électronique, ce document d’une quarantaine de pages illustre « le degré de dépendance de l’industrie de la #microélectronique à un vaste tissu économique mondialisé ». « Les produits made in France de ST sont en réalité de purs produits de la #mondialisation capitaliste, et ne pourraient exister sans elle », conclut-il.

    Fondé en 2022, #Stop_Micro s’oppose à l’agrandissement des usines de puces électroniques, deux sites industriels situés en Isère qui consommeront bientôt plus d’#eau et d’#électricité qu’une ville de 200 000 habitants. Ces besoins colossaux s’expliquent par le degré de #miniaturisation des composants. Sur la moindre puce de quelques millimètres sont gravés des dizaines de milliards de #transistors dont chacun est « 10 000 fois plus fin qu’un cheveu humain », précise l’Esia, l’association européenne des semiconducteurs, dans une brochure. De l’#eau_potable ultrapure est nécessaire pour laver les plaquettes de silicium et les débarrasser de contaminants présents à l’échelle nanométrique.

    Milliards de #subventions_publiques

    Pourtant, malgré leur consommation de ressources, les usines de STMicroelectronics à Crolles et de #Soitec à #Bernin « ne produisent formellement même pas “des puces” », selon le collectif. En résumant beaucoup, disons qu’une puce électronique commence avec l’extraction de quartz dans une carrière puis sa transformation en silicium métal dans de hauts fourneaux. Pour atteindre le niveau de pureté de 99,9999999 % requis pour les semiconducteurs, il faut y ajouter de nombreuses étapes impliquant produits chimiques et hautes températures pour obtenir des lingots de silicium monocristallin ultrapur qui sont ensuite découpés en galettes très fines (#wafers).

    Ce n’est qu’à ce stade qu’interviennent les usines grenobloises. Elles reçoivent ces galettes pour y graver « par photolithographie (dans l’esprit d’une photo argentique mais en autrement plus complexe), des milliards de transistors et circuits miniatures ». À la sortie de ces usines, la puce n’existe pas encore comme objet séparé, précise Stop Micro. C’est dans d’autres sites en Asie qu’elles sont découpées, testées et préparées individuellement de façon à pouvoir être intégrées à des circuits électroniques. Ces usines « relocalisées » en Isère au moyen de milliards de subventions publiques ne sont donc qu’une étape parmi des dizaines d’autres, réparties sur toute la planète.

    Autre exemple : une minuscule puce peut contenir des dizaines de métaux différents : arsenic, tantale, titane, antimoine, gallium…. #Intel, le plus grand vendeur de semiconducteurs au monde, a travaillé pendant six ans pour retracer la provenance du #cobalt qu’il utilise afin de comprendre s’il est extrait dans des zones de guerre en République démocratique du Congo. L’entreprise n’y est parvenue qu’en partie, alors que le cobalt n’est qu’un seul de tous les métaux utilisés.

    Le fait que STMicro, à Crolles, ait plus de 6 600 fournisseurs directs donne une idée de la complexité des process mis en œuvre sur ce gigantesque site. « La fabrication de semiconducteurs est l’activité de fabrication la plus complexe que l’on connaisse actuellement », résume l’Esia. « Avant d’atteindre le stade du produit final, une puce peut faire 2,5 fois le tour du monde et traverser 80 frontières ».

    Des chaînes d’approvisionnement d’une complexité inouïe

    Il y a des technologies emblématiques de certaines formes politiques. Le métier à tisser mécanique, par exemple, cristallise le capitalisme industriel anglais du XIXe : le coton produit en Inde, les usines textiles de Manchester alimentées au charbon, les cotonnades vendues aux marchands d’esclaves africains. La puce de silicium, elle, est emblématique de l’hégémonie néolibérale des puissances occidentales des années 2000.

    Elle nécessite de maîtriser des chaînes d’approvisionnement d’une complexité inouïe, réparties sur des dizaines de pays. C’est la pax americana qui a rendu possible la Silicon Valley. Si cette domination mondiale n’avait pas existé, naturelle au point de passer pour « la fin de l’Histoire », si le monde n’avait pas été cet espace de libre-échange commodément organisé pour achalander les multinationales, il ne serait venu à l’idée de personne de numériser toutes les activités humaines.

    Car au fond, est-il bien raisonnable de rendre une société entière dépendante, pour sa survie, d’un objet qui repose sur l’activité de centaines de mines aux quatre coins du monde, qui franchit en moyenne 80 frontières avant d’atteindre le stade du produit final ? Le numérique est une #technologie impériale. Que devient-il quand l’empire vole en éclats ?

    Pour promouvoir l’activité de ses entreprises, l’Esia souligne que les semiconducteurs sont indispensables « aux soins médicaux critiques », « aux infrastructures d’eau », « à l’agriculture durable qui nourrit le monde ». Faut-il en conclure que tout doit être mis en œuvre pour trouver des terres rares, des galettes de silicium ou du cobalt ? Ou, au contraire, que l’hôpital, la distribution d’eau et l’agriculture devraient absolument pouvoir fonctionner sans informatique ? Qu’il est follement inconséquent de laisser les services essentiels à la merci de la moindre cyberattaque ou rupture d’approvisionnement.

    C’est tout ce qui sépare la quête d’#autonomie et de #sobriété, dont nous avons besoin pour nous protéger autant que pour rendre le monde plus juste, des politiques actuelles de « #souveraineté_industrielle » qui, en augmentant notre dépendance à des technologies impériales, nous condamnent à la guerre des ressources.

    https://reporterre.net/L-hypocrisie-des-puces-electroniques-made-in-France
    #puces #relocalisation #industrie

  • #Lettre de l’ambassade des États-Unis aux #entreprises françaises : Paris dénonce des « ingérences »

    Plusieurs entreprises françaises ont reçu une lettre de l’ambassade des États-Unis, demandant si elles avaient des programmes internes de lutte contre les #discriminations. Paris a réagi samedi, qualifiant cette initiative d’"ingérences inacceptables".

    Paris a vivement réagi, samedi 29 mars, après l’envoi d’une lettre de l’ambassade des États-Unis à plusieurs entreprises françaises, demandant si elles avaient des programmes internes de #lutte_contre_les_discriminations, qualifiant cette initiative d’"ingérences inacceptables" et prévenant que la France et l’Europe défendront « leurs valeurs ».

    Plusieurs sociétés françaises ont reçu une lettre et un #questionnaire leur demandant si elles mettaient en place des programmes internes de lutte contre les discriminations.

    La missive les prévient que, le cas échéant, cela pourrait les empêcher de travailler avec l’État américain, ce alors que la France interdit la plupart des formes de #discrimination_positive.

    L’information – révélée vendredi 28 mars par Le Figaro et les Echos – s’inscrit dans un contexte de fortes tensions commerciales alimentées par Donald Trump, qui agite tous azimuts des menaces de droits de douane.

    « Les ingérences américaines dans les politiques d’inclusion des entreprises françaises, comme les menaces de #droits_de_douanes injustifiés, sont inacceptables », a rétorqué le ministère français du Commerce extérieur, dans un message transmis à l’AFP.

    Les destinataires du courrier ont été informés du fait que « le #décret_14173 », pris par Donald #Trump dès le premier jour de son retour à la Maison Blanche pour mettre fin aux programmes promouvant l’#égalité_des_chances au sein de l’État fédéral, « s’applique également obligatoirement à tous les #fournisseurs et #prestataires du gouvernement américain », comme le montre le document révélé par Le Figaro.

    Une initiative « inadmissible »

    Une initiative « inadmissible », a réagi samedi auprès de l’AFP le président de l’organisation patronale CPME, Amir Reza-Tofighi, qui dénonce une « atteinte à la #souveraineté » et appelle les responsables politiques et économiques à « faire front commun ».

    De son côté, la CGT demande au gouvernement « d’appeler les entreprises à ne pas engager de politique dommageable pour l’égalité entre les femmes et les hommes et la lutte contre le racisme », a déclaré à l’AFP Gérard Ré, secrétaire confédéral du syndicat.

    Au ministère de l’Économie, l’entourage d’Éric Lombard assurait vendredi soir que « cette pratique reflète les valeurs du nouveau gouvernement américain ». « Ce ne sont pas les nôtres », ajoutait Bercy dans sa réaction transmise à la presse, précisant que « le ministre le rappellera à ses homologues au sein du gouvernement américain ».

    Samedi, les contours de la lettre restaient flous.

    Le cabinet du ministre de l’Économie, contacté par l’AFP, estime que le nombre d’entreprises ayant reçu la lettre serait « de quelques dizaines », tout en précisant que le décompte est toujours en cours.

    Les grands groupes contactés par l’AFP qui ont accepté de s’exprimer ont déclaré de ne pas avoir reçu la lettre, dont le format est inhabituel.

    « Ce n’est pas un courrier qui est parti sur le papier à en-tête de l’ambassade, ni du consulat ou d’une quelconque agence américaine », note auprès de l’AFP Christopher Mesnooh, avocat d’affaires américain du cabinet Fieldfisher basé à Paris, se basant sur la lettre publiée dans le Figaro.

    « Si c’est bien sous cette forme-là que les entreprises l’ont reçue, ce n’est pas une communication officielle et encore moins une communication diplomatique », selon l’avocat. « Ce n’est pas parce que ça traduit l’attitude de cette administration que c’est l’administration au sens propre du terme qui a autorisé son envoi à des entreprises », indique prudemment Christopher Mesnooh.

    Sollicitée par l’AFP, l’ambassade des États-Unis à Paris n’a pas répondu dans l’immédiat.

    L’administration américaine peut-elle exiger des entreprises françaises qu’elles se conforment à sa loi ? « Non », affirme Christopher Mesnooh. « Les entreprises françaises ne vont pas être obligées maintenant d’appliquer le droit social ou la loi fédérale contre les discriminations positives », poursuit l’avocat.

    En outre, pour les entreprises françaises, le problème ne se pose pas dans les termes posés par la lettre car en France, la discrimination positive fondée explicitement sur l’origine, la religion ou l’ethnie « n’est pas autorisée », rappelle l’avocat d’affaires.

    Pour autant, sur le volet de l’égalité hommes/femmes, depuis 2021, pour les entreprises de plus de 1 000 salariés, la loi française impose des quotas de 30 % de femmes cadres-dirigeantes et de 30 % de femmes membres des instances dirigeantes en 2027, puis d’atteindre des quotas de 40 % en 2030.

    Les entreprises qui choisiraient de se conformer aux exigences stipulées dans la lettre se mettraient donc dans l’illégalité du point de vue du droit français.

    https://www.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20250329-en-guerre-contre-la-diversit%C3%A9-l-administration-trump-fait-pr

    #USA #France #Etats-Unis #ingérence #ambassade #trumpisme

    • Stupeur dans les entreprises françaises après une lettre de l’ambassade américaine à Paris exigeant qu’elles respectent la politique antidiversité de Trump

      La représentation des Etats-Unis a envoyé un courrier à des nombreux groupes tricolores exigeant qu’ils respectent la politique « #anti-DEI » de l’administration républicaine pour tout contrat avec l’Etat fédéral.

      La lettre est signée par un certain Stanislas Parmentier, le directeur général des services de l’ambassade des Etats-Unis à Paris, selon l’annuaire du département d’Etat américain. En temps normal, cette affaire serait restée sous les radars, mais on est en plein trumpisme et la missive révélée par Les Echos, vendredi 28 mars, dont Le Monde a obtenu copie, enjoint les entreprises françaises destinataires de respecter les règles édictées par Donald Trump, qui bannissent toute discrimination positive en faveur de la diversité et de la parité homme-femme (DEI, Diversity Equity Inclusion) : « Nous vous informons que le décret 14173 concernant la fin de la discrimination illégale et rétablissant les opportunités professionnelles basées sur le mérite, signé par le président Trump, s’applique également obligatoirement à tous les fournisseurs et prestataires du gouvernement américain, quels que soit leur nationalité et le pays dans lequel ils opèrent », écrit l’employé de l’ambassade, qui demande à ses interlocuteurs de signer « sous cinq jours (…) un formulaire de certification du respect de la loi fédérale sur l’antidiscrimination ».

      L’affaire a créé la stupeur à Paris et est remontée au niveau des directions générales, voire des conseils d’administration. Son ampleur est inconnue : s’agit-il uniquement des fournisseurs de l’ambassade ou du département d’Etat ? C’est que laisse croire le préambule du formulaire à signer, qui explique que « tous les contractants du département d’Etat doivent certifier qu’ils ne conduisent pas de programmes de promotion de DEI ».

      Ceci expliquerait aussi que le groupe Orange, qui n’a pas d’activité aux Etats-Unis, l’ait reçue. Ou est-ce une opération de mise en garde de toutes les entreprises françaises ? Mais, dans ce cas, comment expliquer que des grands noms opérant aux Etats-Unis, comme Saint-Gobain, n’aient pas été destinataires du courrier, ni en France, ni aux Etats-Unis ? « Cette lettre n’a été adressée qu’à des entreprises ayant des relations contractuelles avec l’Etat fédéral. Saint-Gobain n’est pas concerné », nous indique l’entreprise. Axa et Kering ne l’ont pas reçue non plus, selon nos interlocuteurs.

      La discrimination positive, faible en France

      La tension créée par Donald Trump a atteint un tel niveau qu’une lettre d’ambassade suscite une panique du même ordre que si elle avait été envoyée par le secrétaire au Trésor ou le secrétaire d’Etat américain. Sans doute pas complètement à tort : la politique voulue par Donald Trump est désormais mise en œuvre avec diligence par les fonctionnaires de l’administration fédérale. La missive est sans doute avant-coureuse des exigences à venir, celles faites aux entreprises européennes de respecter les règles de DEI si elles veulent faire des affaires avec le gouvernement américain, voire faire des affaires tout court aux Etats-Unis.

      Les accusations d’abus d’extraterritorialité et d’ingérence fusent. Toutefois, certains tentent de temporiser avant d’y voir plus clair : l’indignation reste anonyme tandis que plusieurs groupes ont choisi de ne pas signer la lettre de certification, nous indique une haute dirigeante d’un grand groupe français.

      L’entourage du ministre français de l’économie, Eric Lombard, a jugé que « cette pratique reflète les valeurs du nouveau gouvernement américain. Ce ne sont pas les nôtres. Le ministre le rappellera à ses homologues au sein du gouvernement américain ».

      En réalité, dans une République qui a historiquement combattu tout communautarisme et toute distinction ethnique, à l’opposé des Etats-Unis, les politiques de discrimination positive, en France, ont historiquement été beaucoup plus faibles qu’aux Etats-Unis et très peu fondées sur le droit, le comptage ethnique étant prohibé et la prise en compte des origines interdite au sein des entreprises. En revanche, les sociétés de plus de 250 salariés sont légalement soumises à un quota minimal de 40 % de femmes dans leur conseil d’administration ou de surveillance.

      Disney visé par une missive spécifique

      Le décret de Donald Trump a été pris dans la foulée d’un arrêt de la Cour suprême de l’été 2023, interdisant la discrimination positive dans les universités américaines. Dans son décret signé dès le 21 janvier, le président américain écrit que les politiques de diversité « non seulement violent le texte et l’esprit de nos lois fédérales sur les droits civiques, mais portent également atteinte à notre unité nationale. Elles nient, discréditent et sapent les valeurs américaines traditionnelles de travail, d’excellence et de réussite individuelle, au profit d’un système de spoliation identitaire illégal, corrosif et pernicieux ».

      Selon M. Trump, « les Américains qui travaillent dur et qui méritent de réaliser le rêve américain ne devraient pas être stigmatisés, rabaissés ou exclus de certaines opportunités en raison de leur origine ethnique ou de leur sexe ».

      Cette politique est menée tous azimuts. Vendredi 28 mars, le patron de la Federal Communication Commission, qui régule les médias, Brendan Carr, a posté, sur X, la lettre qu’il avait envoyé à Bob Iger, patron de Disney, pour s’assurer qu’il avait démantelé sur le fond et pas seulement sur la forme ses politiques DEI.

      « Pendant des décennies, Disney s’est concentré sur le box-office et la programmation à succès mais quelque chose a changé. Disney est désormais empêtré dans une vague de controverses concernant ses politiques de diversité, d’inclusion et d’inclusion », écrit Brendan Carr, qui met en cause les anciens objectifs de Disney d’avoir plus de 50 % d’acteurs, metteurs en scène, scénaristes issus des minorités ou de rémunérer ses dirigeants en fonction des résultats DEI. « Je veux m’assurer que Disney et ABC [sa chaîne de télévision] n’ont pas violé les réglementations de la FCC sur l’égalité des chances en matière d’emploi en promouvant des formes odieuses de discrimination DEI », met en garde M. Carr.

      En 2022, la querelle entre le gouverneur républicain de Floride, Ron DeSantis, et Disney, qui s’opposait à une loi surnommée « Don’t Say Gay » (« ne dites pas homo ») bannissant dans les écoles et lycées les cours sur l’homosexualité et la théorie du genre, avait marqué l’acmé de la guerre culturelle aux Etats-Unis. Elle avait également marqué le début de la réaction anti-DEI. Elle se poursuit désormais sans relâche.

      https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/03/29/stupeur-dans-les-entreprises-francaises-apres-une-lettre-anti-diversite-de-l

    • L’embarras des entreprises françaises face à la croisade antidiversité de Donald Trump
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/04/06/diversite-les-oukases-de-trump-destabilisent-les-entreprises-francaises_6591

      Les exigences américaines sèment le trouble au sein des sociétés, notamment chez celles qui ont une présence aux #Etats-Unis. Si beaucoup assurent qu’elles vont maintenir leur politique inclusive, d’autres ont déjà tourné casaque.

      ... Le cabinet de conseil Accenture, jusque-là chantre des valeurs de diversité et d’inclusion, a supprimé ses objectifs DEI. ...

      Aujourd’hui, quelque 4 500 institutions ont signé la Charte de la diversité, « mais, en réalité, ce n’est pour beaucoup qu’une pétition de principe. Du moins pour les discriminations liées aux origines. En France, on parle désormais du genre, des LGBTQ+ et des personnes trans, mais on ne parle toujours pas des Noirs et des Arabes », estime M. Sabeg, ancien commissaire à la diversité et à l’égalité des chances (2008-2012).

      https://archive.ph/K40Z0

  • #Souveraineté_alimentaire : un #scandale made in #France

    À l’approche du Salon de l’agriculture et alors que la tension dans le monde agricole est toujours palpable, le Sénat devrait adopter mardi, la loi d’orientation pour la #souveraineté_agricole et le renouvellement des générations en #agriculture.

    Dans son 4ème rapport sur l’état des #terres_agricoles en France publié lundi 17 février, Terre de Liens révèle que la France a perdu la capacité à nourrir sa population. En l’état, la nouvelle Loi qui devrait être adoptée ne devrait qu’aggraver 75 ans de déconnexion politique entre #agriculture et #alimentation.

    2100 m2 de terres par habitant, là où il en faudrait le double

    Avec un potentiel nourricier de 130 %, la France dispose en théorie d’assez de terres agricoles pour nourrir sa population. Mais dans son nouveau rapport sur l’état des terres agricoles, Terre de Liens révèle que cette prétendue souveraineté alimentaire est aujourd’hui réduite à une chimère politique. Tandis qu’elle exporte la production de 43 % de ses terres (12 millions d’hectares), la France importe aujourd’hui l’équivalent de 10 millions d’hectares de terres, la surface de l’Islande, pour notre alimentation. Dans ces conditions, en France, la surface de #terres_nourricières est réduite à 2 100 m2 par habitant, quand il en faudrait le double pour nourrir une personne.

    Les #pâtes illustrent l’absurdité de la situation : avec nos 250 000 hectares de #blé_dur cultivés chaque année, nous pourrions aisément produire 15 kg de pâtes par personne, surpassant la consommation moyenne de 8,5 kg/personne. Hélas, le #blé produit sur deux tiers de ces surfaces est vendu hors de nos frontières et de nos estomacs. Résultat : la France importe trois quarts des pâtes et semoules qui nourrissent sa population.

    Ou encore le #lait. Tandis que #Lactalis réduit sa collecte de lait de 9 % en France, laissant sur le carreau plusieurs centaines d’éleveurs laitiers, il n’a pas fait mystère de son intérêt pour le #lait_en_poudre néo-zélandais, dont l’importation est facilitée par un récent accord de #libre-échange.

    La situation de l’agriculture française se résume en un triste palmarès : accro aux #intrants importés pour produire en masse et tenir la cadence des exportations, la France ne cesse d’accroître ses #importations pour remplir nos assiettes. Elles ont doublé en 20 ans.

    Agriculture et alimentation, 75 ans de déconnexion politique

    D’un côté de la chaîne, les agriculteurs·trices crient leur désespoir d’un #revenu indigne face à la #concurrence mondiale. De l’autre, la #précarité_alimentaire des Français augmente et les conséquences de notre alimentation sur notre #santé se chiffrent en milliards.

    Dans son rapport, Terre de Liens dresse un état des lieux effarant : entre agriculture et alimentation, 75 ans de déconnexion politique ont conduit à la situation que nous connaissons aujourd’hui. À l’heure où la France entend se doter d’une loi d’orientation agricole pour “préserver” sa souveraineté alimentaire, Terre de Liens appelle le gouvernement à prendre acte que cette dernière n’est plus. Ce dont il s’agit aujourd’hui, c’est de mettre en cohérence production agricole et besoins alimentaires, de toute urgence. Les leviers sont éminemment politiques :

    - La #PAC, dont aujourd’hui 20 % des plus gros bénéficiaires perçoivent 51 % des aides directes, encourage une production industrielle tournée vers le commerce international, au détriment de la durabilité des systèmes. Il est impensable de maintenir en l’état ce levier financier, qui représente en moyenne 74 % du revenu courant avant impôt des agriculteurs·trices, calibré de telle sorte qu’il nous prive de souveraineté alimentaire ;
    – Les #accords_de_libre-échange (#Nouvelle-Zélande, #CETA, #Mercosur) accroissent les kilomètres entre le champ et l’assiette, faisant perdre de vue où et comment est produite l’alimentation. Il est temps d’en finir avec la mauvaise foi du gouvernement qui a signé des dizaines de traités de libre-échange ;
    - Les acteurs de l’aval (transformation, distribution) reçoivent chaque année 16,4 milliards principalement sous forme d’#exonérations_fiscales et de #cotisations_sociales. Or, ces acteurs orientent considérablement la production agricole. Ces exonérations fiscales représentent donc un levier important de politique publique.
    - Le départ massif à la #retraite des agriculteurs entraîne la disparition de 200 #fermes par semaine en France. Une véritable politique d’#accès_à_la_terre et d’installation doit voir le jour sans plus tarder pour remplir les objectifs de renouvellement des générations inscrits dans la loi.

    En l’état, la loi qui devrait être adoptée mardi passe à côté de son objectif : des terres et des agriculteurs·trices pour une souveraineté alimentaire préservée. Sans moyens sur l’enjeu de renouvellement des générations et de la résilience des fermes (le long terme qui devrait être central dans une loi d’orientation), elle a fait semblant de donner des gages aux agriculteurs•trices par un abaissement généralisé des normes qui ne règlera pas leur problème de revenu et consacre dans le même temps une vision de la souveraineté alimentaire calquée sur la balance commerciale de la France.

    https://terredeliens.org/national/actu/souverainet%C3%A9-alimentaire-un-scandale-made-in-france-17-02-2025
    #exportation #rapport

  • Souveraineté alimentaire : un scandale made in France – Synthèse rapport #4 - Terre de liens - Février 2025
    https://ressources.terredeliens.org/les-ressources/souverainete-alimentaire-un-scandale-made-in-france-synthes

    28 millions d’hectares, c’est assez pour nourrir la population française et même plus. Mais en dédiant 43 % de ses terres à l’exportation, la France hypothèque sa souveraineté alimentaire : la surface disponible par habitant pour se nourrir est réduite à 2 100 m2, soit à peine la moitié de ce qu’il faudrait pour nourrir une personne. Pour combler le déficit, l’augmentation de nos importations contredit le discours ambiant d’une puissance agricole qui nourrit le monde. Notre modèle agricole est si absurde que nos terres ne nourrissent ni ceux qui la travaillent, ni ceux qui vivent autour.

    #souveraineté_alimentaire #politique_agricole

  • Mali, Niger et Burkina Faso reprennent peu à peu le contrôle de leurs mines | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/international/080225/mali-niger-et-burkina-faso-reprennent-peu-peu-le-controle-de-leurs-mines

    Mali, Niger et Burkina Faso reprennent peu à peu le contrôle de leurs mines
    Les trois pays ont lancé des réformes pour remettre la main sur les ressources de leur sous-sol. Ils n’ont pas hésité à engager des bras de fer avec de puissantes compagnies étrangères, dont certaines refusent de se plier aux nouvelles règles. Le Sénégal pourrait les suivre.

    #Sahel #Souveraineté #Ressources
    https://justpaste.it/fppc7

  • Drop Site sur X :
    https://x.com/DropSiteNews/status/1887904311671185583

    #Exigence
    #souveraineté
    #Liban

    U.S. Deputy Middle East Envoy Morgan Ortagus said on Friday after meeting with Lebanese President Joseph Aoun in Beirut that the United States is demanding that Hezbollah not be part of Lebanon’s government. “We have set clear red lines … that [Hezbollah] won’t be able to terrorize the Lebanese people, and that includes by being a part of the government,” Ortagus told reporters.

  • #Ada_&_Zangemann - Un #conte sur les logiciels, le skateboard et la glace à la framboise

    Zangemann est un inventeur mondialement connu et immensément riche. Enfants et adultes adorent ses fabuleuses inventions. Mais soudain, gros problème : les skateboards électroniques des enfants buggent et les glaces ont toutes le même parfum. Que se passe-t-il ?

    Ada, jeune fille curieuse, va découvrir comment Zangemann contrôle ses produits depuis son ordinateur en or. Avec ses amis, elle va bricoler des objets informatisés qui échappent aux décisions de Zangemann.

    https://media.fsfe.org/w/jPLeR3vpYE7zWaTYdsB9JU
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Ada_%26_Zangemann
    #film #ressources_pédagogiques #film #film_d'animation #numérique #court-métrage #logiciels_libres
    #Souveraineté #sobriété #mixité #inclusion

    —> C’est sous licence libre, et donc toutes les écoles peuvent librement en organiser des projections pédagogiques pour leurs élèves. C’est une excellente ressource pour aborder la question du numérique en classe.

    https://mastodon.mim-libre.fr/@lelibreedu/113872468454382522

  • #Métaux_rares : Séjourné veut accélérer la #réouverture de #mines en #Europe

    #Stéphane_Séjourné, le commissaire européen chargé de la stratégie industrielle, veut accélérer la réouverture de mines de métaux rares en Europe et a reçu 170 #projets_d’exploitation ou de #recherches_minières, a-t-il indiqué mardi soir.

    Au nom de la #souveraineté_industrielle, le Français entend rouvrir des mines de métaux et #terres_rares au sein de l’Union européenne, malgré les mobilisations régulières de militants écologistes contre ce type de projets.

    « La #diversification des approvisionnements fait partie de l’urgence pour moi. On va faciliter » l’attribution de #permis, a expliqué le commissaire européen à des journalistes à Bruxelles.

    « J’ai récupéré 170 projets sur de l’exploitation ou de la recherche minières en Europe avec une liste de métaux rares. On est en train d’étudier, on lancera les premières garanties (financières) pour les boîtes qui veulent explorer », a-t-il assuré.

    Stéphane Séjourné s’est rendu les 8 et 9 janvier en #Roumanie où cette question a notamment été abordée.

    « Sur la Roumanie on avait 9 projets, je ne vais pas vous donner de date mais j’essaie d’accélérer les choses au maximum », a-t-il déclaré.

    « Je suis prêt à mettre beaucoup de capital politique là-dessus parce que j’y crois vraiment », a insisté ce proche d’Emmanuel Macron, qui voudrait éviter une trop grande #dépendance à l’égard de pays comme la Chine.

    Avec la commissaire européenne espagnole #Teresa_Ribera (concurrence et transition écologique), Stéphane Séjourné doit présenter fin février une série d’annonces pour relancer et décarboner l’industrie européenne, le « pacte pour une #industrie_propre ».

    Ce pacte pourrait comporter des mesures pour réduire les coûts de l’#énergie, accompagner les plus grands sites industriels dans la réduction de leurs émissions de CO2 ou soutenir les achats de #voitures_électriques pour les flottes d’entreprises.

    En parallèle, la Commission promet une série de mesures de #simplification, afin de réduire les #démarches_administratives des entreprises, notamment des PME.

    https://www.mediapart.fr/journal/fil-dactualites/140125/metaux-rares-sejourne-veut-accelerer-la-reouverture-de-mines-en-europe

    –—

    #métaliste sur l’#extraction de #terres_rares dans les #Alpes (même si ici il s’agit d’une annonce pour toute l’Europe) :
    https://seenthis.net/messages/1013289

    • Séjourné, a inizio 2025 al via progetti Ue su materie prime rare

      ’Ricevute 170 candidature, li stiamo selezionando’

      La Commissione europea presenterà l’elenco dei progetti strategici nell’ambito del #Critical_raw_materials_act all’inizio del 2025.

      Lo ha detto il vicepresidente dell’esecutivo Ue Stéphane Séjourné intervenendo alla giornata dedicata al settore a Bruxelles, indicando che Bruxelles ha ricevuto 170 candidature.
      Il regolamento Ue sulle materie prime critiche, presentato nel marzo 2023, punta ad aumentare al almeno il 10% l’estrazione delle materie prime strategiche sul territorio continentale e ad almeno il 40% la capacità dell’Europa di raffinare e lavorare le terre rare lungo tutto la catena di valore.

      «Selezioneremo i progetti che meglio soddisfano i nostri criteri, in particolare quelli ambientali, sociali e di governance: saranno mirati a varie materie prime, riguarderanno l’intera catena del valore e saranno sia all’interno che all’esterno dell’Europa», ha indicato il francese, evidenziando che «non c’è transizione verso le zero emissioni senza materie prime: le auto elettriche hanno bisogno di batterie al litio, le turbine eoliche hanno bisogno di rame o alluminio».
      «La mia priorità per gli anni a venire sulle materie prime sarà la stessa dei settori industriali più strategici d’Europa - ha evidenziato -: un mercato solido in patria e una collaborazione stabile con partner fuori casa».
      Séjourné ha quindi sottolineato la necessità di «licenze più rapide e semplici» e di «rendere i progetti appetibili per gli investitori pubblici e privati». Parlando della nuova agenda, il vicepresidente ha messo in luce l’importanza del riciclo per le materie prime rare, indicando che l’Ue deve «creare un vero mercato europeo per i prodotti di seconda mano e un mercato unico per i prodotti di scarto». La capacità di riciclo è fissata nel regolamento Ue ad almeno il 25% del consumo annuo.

      https://www.ansa.it/europa/notizie/rubriche/altrenews/2024/12/11/sejourne-a-inizio-2025-al-via-progetti-ue-su-materie-prime-rare_d42681d2-0437-4

  • #Sénégal, #Ghana : les #visas évoluent pour “rendre la pareille” à l’#UE et favoriser l’#intégration_régionale

    Coup sur coup, le Sénégal et le Ghana ont annoncé modifier leur politique portant sur les visas. Dakar exige désormais des pays européens un #traitement_équitable et réciproque dans la délivrance du précieux sésame, tandis qu’Accra entend ouvrir son territoire à la libre circulation de tout porteur d’un passeport africain.

    #Réciprocité et #inclusion. Tels sont les maîtres mots de la politique des visas que plusieurs pays africains souhaitent désormais mettre en place. À commencer par le Sénégal, qui vient d’annoncer, par la voix de son Premier ministre, que le pays entendait désormais appliquer « le principe de réciprocité pour la délivrance de visas aux ressortissants de certains pays l’exigeant à nos ressortissants ». Les États qui imposent « des procédures complexes et coûteuses aux Sénégalais devront désormais s’attendre à la pareille », cingle Seneplus.

    De son côté, le Ghana vient d’annoncer la suppression de l’obligation de visa pour tout Africain désirant se rendre sur son territoire. Business Insider African rappelle que le pays ouest-africain rejoint ainsi le Rwanda, les Seychelles, la Gambie et le Bénin en offrant l’entrée sans visa à tous les détenteurs d’un passeport africain. Jusqu’alors, le Ghana offrait un accès sans visa aux citoyens de 26 pays africains, tandis que les voyageurs de 25 autres pays africains pouvaient obtenir un visa à leur arrivée.

    Un geste fort du président sortant, dont le mandat prendra fin le 7 janvier 2025, date à laquelle le président nouvellement élu, John Mahama, prendra le pouvoir au Ghana. En ouvrant un nouvel espace de libre circulation, il marque une étape importante vers la réalisation de l’objectif de l’Union africaine en matière d’intégration économique.

    Un acte de #souveraineté

    Ouestaf rapporte, ce 27 décembre, les propos d’Ousmane Sonko lors de sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale. Ce dernier estime que les procédures de traitement des demandes de visa portent « préjudice » aux ressortissants sénégalais. Une façon de souligner, analyse le titre, le déséquilibre, voire l’inégalité, qu’induit la politique occidentale vis-à-vis des demandes de visas émanant de ressortissants sénégalais, et plus largement africains.

    En effet, affirme Ouestaf, « les Sénégalais, comme beaucoup d’autres Africains, perçoivent comme une humiliation les procédures d’obtention de visas ainsi que les coûts élevés et les délais trop longs qui y sont liés. Selon le site Schengen News, l’UE a récolté 56 millions d’euros en 2023 sur des ressortissants africains dont les demandes de visas ont été rejetées. »

    En juillet dernier, BBC Afrique indiquait de son côté que, toujours selon Schengen News, en 2023 les ressortissants africains avaient reçu 704 000 réponses négatives à leurs demandes de visas vers l’espace Schengen, ce qui représentait 41,3 % de toutes les demandes rejetées cette même année.

    En outre, indique Ouestaf, cette politique délétère a produit « des pratiques peu orthodoxes dans les procédures de demandes de visas », notamment un trafic autour de la prise de rendez-vous, pour des montants pouvant aller jusqu’à 400 000 francs CFA, soit 612 euros. Autant de pratiques dénoncées par les organisations de la société civile sénégalaise qui n’ont cessé de réclamer une réforme de ces procédures.

    Cette mesure s’inscrit également dans la volonté affichée par les nouvelles autorités sénégalaises de mener une politique active de protection des intérêts des Sénégalais à l’étranger.

    Un « coup de poignard » pour le tourisme ?

    Quoi qu’il en soit, si les modalités de cette nouvelle politique n’ont pas encore été annoncées, la presse sénégalaise spécule sur les pays qui seront désormais soumis à cette obligation de réciprocité. « Des pays comme la France, les États-Unis et plus d’une trentaine d’autres pourraient-ils bientôt être soumis à l’obligation de visa pour entrer au Sénégal ? » interroge ainsi Seneplus dans un autre article.

    La presse sénégalaise ne cache pas aussi une légère inquiétude quant aux retombées économiques de cette mesure, notamment sur le secteur touristique du pays. Seneplus rappelle ainsi que le président précédent, Macky Sall, avait déjà mis en place cette mesure, qu’il avait fini par abandonner « après une évaluation des pertes économiques et sous la pression du secteur touristique », indique Seneplus.

    Senenews rapporte ainsi les inquiétudes d’acteurs du secteur du tourisme qui estiment, pour certains, qu’une telle mesure revient tout simplement à donner un « coup de poignard fatal au tourisme sénégalais ». La crainte d’un manque à gagner s’ajoute au départ de l’armée française du Sénégal, annoncée à la fin de 2024, pensée aussi comme un acte de souveraineté par le tandem au pouvoir, Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko, mais qui a constitué la perte d’une « clientèle non négligeable pour le secteur touristique sénégalais ».

    Des inquiétudes visiblement entendues par le gouvernement Sonko. En effet, note Seneplus, le Premier ministre sénégalais a indiqué que les répercussions potentielles sur le tourisme seront pris en compte.

    Politique panafricaine d’intégration économique

    La politique des visas devient aussi, pour de plus en plus de pays africains, le moyen de mettre en oeuvre une politique d’intégration régionale et panafricaine. Car les difficultés dans l’obtention de ces documents, qu’ils soient trop chers ou qu’ils nécessitent de lourdes procédures, limitent les possibilités de commerce, de tourisme et d’échanges culturels entre les pays africains, analyse Business Insider African.

    Le titre économique panafricain note ainsi que, paradoxalement, certains pays étrangers bénéficient d’un accès sans visa à divers pays africains, alors que de nombreux États africains appliquent toujours des exigences strictes en matière de visas à leurs voisins. L’assouplissement des exigences dans ce domaine pourrait donc stimuler la croissance économique, le tourisme et les échanges culturels sur tout le continent.

    Un constat déjà établi par Fair Planet. Le média en ligne notait, dès le mois d’avril, que l’Afrique gagnerait à créer un espace effectif de libre circulation, alors même que prendre l’avion de l’Afrique vers l’Europe ou les Émirats arabes unis peut revenir moitié moins cher que de voyager à l’intérieur du continent.

    Fait Planet rappelle ainsi que l’introduction d’un passeport africain en 2016, conçu pour permettre à ses détenteurs de voyager sans visa sur tout le continent, a été pensé par l’Union africaine comme une étape majeure, sans qu’elle suffise toutefois à permettre une libre circulation intra-africaine complète.

    Une Afrique délivrée des visas constituera surtout un formidable signe pour faire avancer la #zone_de_libre-échange_continentale_africaine (#ZLECA). Cette zone africaine, lancée en 2021, vise à unifier plus de 1,2 milliard d’Africains, ce qui en fait la plus grande zone de libre-échange depuis la création de l’Organisation mondiale du commerce.

    https://www.courrierinternational.com/article/geopolitique-senegal-ghana-les-visas-evoluent-pour-rendre-la-
    #union_européenne

    ping @6donie @reka

  • Le contrôle par l’armée libanaise de positions palestiniennes pro-Assad : quel timing et quelle importance ? - L’Orient-Le Jour
    https://www.lorientlejour.com/article/1441065/le-controle-par-larmee-libanaise-de-positions-palestiniennes-pro-assa

    L’institution militaire entend « rétablir la #souveraineté » dans tout le pays

  • Israël rase un poste-frontière de l’armée libanaise à Naqoura - L’Orient-Le Jour
    https://www.lorientlejour.com/article/1440725/israel-rase-un-poste-frontiere-de-larmee-libanaise-a-naqoura.html

    Un poste-frontière de l’armée libanaise a été rasé par l’armée israélienne dans le village de Naqoura, au Liban-Sud, ce samedi. L’information, relayée par des médias locaux, a été confirmée à L’Orient-Le Jour par une source militaire informée.

    Selon cette source, l’armée israélienne agit « en toute liberté et sans tenir compte des directives du comité chargé de la surveillance du cessez-le-feu », entré en vigueur le 27 novembre entre Israël et le Hezbollah. Le Liban répertorie ces violations auprès du comité, et appelle au respect du cessez-le-feu, toujours selon cette source.

  • #Externalisation_de_l’asile : une coopération au mépris de la #protection_internationale et de l’#état_de_droit

    Les velléités anciennes des États européens d’externaliser le traitement des demandes d’asile se sont
    récemment concrétisées à travers les « #accords » #Royaume-Uni/#Rwanda et #Italie/#Albanie. Alors que l’initiative britannique a été abandonnée, celle de l’Italie est temporairement bloquée. Après l’annulation des deux premiers transferts d’exilés dans les camps en Albanie et dans l’attente de la décision de la Cour de cassation de Rome sur le recours du gouvernement italien, celui-ci a rappelé le personnel mobilisé sur place.

    Ces #expérimentations, que l’application du Pacte européen sur la migration et l’asile pourrait favoriser, se
    heurtent pour l’instant au droit. Malgré ces revers et leur coût exorbitant, elles suscitent un engouement décomplexé des responsables européens qui ne se cachent plus de vouloir repousser hors de leurs territoires les personnes en demande de protection internationale.

    La médiatisation et l’instrumentalisation de ces feuille- tons politico-juridiques normalisent les violations des droits des exilé·e·s, mais aussi du #droit_international qui les définit et de la hiérarchie des normes qui les garantit, face à une #souveraineté_nationale prétendument bafouée. De même, dans les pays « tiers » parfois autoritaires, les « #partenariats » migratoires conclus par l’Europe contribuent à délégitimer et irrégulariser les personnes exilées, au mépris des droits.

    L’absence de transparence et la rhétorique hypocrite, souvent humanitaire, accompagnant l’externalisation des politiques migratoires européennes ont pu donner l’illusion d’un rempart préservant le #droit_d’asile. Qu’elles concernent explicitement l’asile ou non, celles-ci engendrent pourtant non seulement l’érosion de la protection internationale, mais aussi le délitement de l’état de droit, en Europe comme au-delà.

    https://migreurop.org/article3304.html
    #externalisation #asile #migrations #réfugiés #Migreurop #pays_tiers

  • « Les Syriens ont des craintes, mais sont heureux pour la première fois depuis des décennies »

    De la Syrie nous n’avons trop souvent que des images éparses. Celles d’un régime sanguinaire en place pendant cinq décennies, qui fut longtemps un partenaire privilégié de la France ; les images des révolutions populaires de 2011 réprimées dans le sang par l’ancien pouvoir ; la destruction des plus grandes villes du pays sous les bombes de #Bachar_al-Assad et des Russes ; les images des djihadistes de l’État islamique, ceux qui ont fomenté des attentats en France depuis la ville de Raqqa, dont le groupe terroriste avait fait sa capitale.

    Depuis une semaine, nous voyons désormais d’autres clichés, ceux d’un peuple en joie d’avoir renversé le tyran. Mais aussi les portraits des nouveaux maîtres de la Syrie, biberonnés au djihadisme, et dont nous ne savons pas quoi penser.

    Et puis il y a des images manquantes, celles de ces dizaines ou centaines de milliers de fantômes, des opposant·es, des artistes, des intellectuel·les ou des manifestant·es, embastillé·es et disparu·es : des noms sur des registres, dont les familles recherchent aujourd’hui les traces dans les sous-sols des prisons du régime.

    Qui sont les nouveaux maîtres de la Syrie ? Quel peut être l’avenir du pays dans un Moyen-Orient en plein bouleversement ? Les Syriennes et les Syriens dont les proches ont été tué·es ou torturé·es par le régime connaîtront-ils un jour la vérité ? Obtiendront-ils justice ?

    Nos invité·es :

    - Sana Yazigi, créatrice du site Mémoire créative de la révolution syrienne (https://creativememory.org), autrice de Chroniques de la révolte syrienne : des lieux et des hommes, 2011-2015 (Presses de l’Ifpo) : https://www.ifporient.org/978-2-35159-746-0 ;
    - Hanane et Obeida Dabbagh, proches de disparus syriens, qui ont obtenu la condamnation à perpétuité de trois officiels de l’ex régime syrien pour complicité de crimes contre l’humanité, en mai 2024 ;
    - Ziad Majed, politiste, enseignant à l’université américaine de Paris, auteur de Syrie, la révolution orpheline et coauteur de Dans la tête de Bachar al-Assad (éditions Actes Sud) : https://www.actes-sud.fr/dans-la-tete-de-bachar-al-assad ;
    – Gilles Dorronsoro, chercheur au Centre européen de sociologie et de science politique, coauteur de Syrie. Anatomie d’une guerre civile (éditions du CNRS) : https://www.cnrseditions.fr/catalogue/relations-internationales/syrie

    https://www.youtube.com/watch?v=NWXnsQRUtyo


    #Syrie #peur #statues #prisons #système_carcéral #Assad #surveillance #torture #dictature #terreur #clientélisme #clan #solidarité_de_corps #Russie #Iran #atrocités #répression #disparus #renaissance #armes_chimiques #justice #purge #colère #poursuites_judiciaires #HTS #Tahrir_al-Sham #al-Julani #Abu_Mohammad_al-Julani #sanctions #Kurdes #Turquie #souveraineté #Israël #Etat_islamique #Golan #USA #Etats-Unis #influences_étrangères #auto-détermination #complexité #kurdes_syriens #fédéralisme #baasisme #constitution #élections #bases_américaines #milices_turques #libération #procès #crimes_contre_l'humanité #affaire_Dabbagh #prisons_syriennes #destruction_des_corps #arrestations #résistance #révolution_syrienne #impunité #amnistie #détention #charniers #massacres #prisons_secrètes #tortionnaires

    • Creative memory

      Mémoire Créative est un projet à but non lucratif qui vise à documenter, archiver et protéger les œuvres et les événements de l’#oubli, de la #négligence et du #déni. Il s’agit là d’un engagement effectué dans la volonté de témoigner de l’effervescence culturelle et artistique née de la révolution syrienne. Celui-ci s’effectue dans un contexte instable de guerre, de destruction et de remodelage du tissu social. Le projet vise à témoigner, en ces temps troubles, de la construction d’une mémoire de sa révolution ainsi que de la création d’un patrimoine et d’une nouvelle identité culturelle, sociale et politique.

      Toutes les œuvres sont documentées sur le site telles qu’elles sont mentionnées dans leurs sources originales, avec les auteurs respectifs et tous les détails adhérents, y compris les éventuelles erreurs linguistiques. Des liens présents sur notre site, actifs au moment de l’archivage des sources y correspondant, peuvent avoir été désactivés, et ce pour des raisons indépendantes de notre volonté. Nous ne sommes donc pas responsables des suppressions des sources, des modifications et des erreurs qui se produisent après l’archivage.

      https://creativememory.org/fr/archive
      #archive #mémoire #culture #art #caricatures #dessins_de_presse #art_et_politique

    • Chroniques de la #révolte syrienne : des lieux et des hommes, 2011-2015

      Ce livre est une invitation à explorer un pays qui, pris dans une spirale de #violence inouïe, est fragmenté au point d’être devenu étranger à lui-même. Il présente, sous forme documentaire, cinquante villes, villages, communes, banlieues et quartiers syriens qui se sont révoltés en 2011. Ces Chroniques reviennent sur le début du mouvement de révolte, ses vecteurs de mobilisation et ses dynamiques internes. Elles témoignent que le soulèvement initié en mars 2011 a généré une importante créativité et un monde d’initiatives et de projets sociétaux.

      https://www.ifporient.org/978-2-35159-746-0
      #livre #révolution

    • Syrie. Anatomie d’une #guerre_civile

      Voici la première étude sur la guerre civile syrienne faite à partir d’entretiens réalisés en Syrie même et dans les pays voisins.

      #2011 : des centaines de milliers de Syriens de toutes confessions et origines ethniques manifestent pacifiquement pour réclamer la démocratisation du régime. Au bout de quelques mois, la violence de la répression les contraint à prendre les armes et à organiser une contre-société avec des institutions embryonnaires et à regrouper des unités militaires improvisées au sein de l’Armée syrienne libre.

      Après 2013, cette logique inclusive et unanimiste cède progressivement devant la montée des groupes transnationaux comme le PKK et l’État islamique. L’insurrection se fragmente alors avec une polarisation croissante alimentée de l’extérieur. Les groupes les plus modérés sont marginalisés au profit de l’islam politique qui prend des formes de plus en plus radicales et de revendications ethno-nationales kurdes.

      Quels sont les effets de la guerre sur la société syrienne ? Quelles nouvelles hiérarchies communautaires et sociales résultent de la violence généralisée ? Comment les trajectoires sociales des Syriens pris dans la guerre sont-elles affectées ? Comment se structure l’économie de guerre alors que le pays est divisé entre le régime, l’insurrection, le PKK et l’État islamique ?

      Un livre unique qui combine une recherche de terrain – rare sur le confit syrien – et une réflexion théorique novatrice sur les situations de guerre civile.

      https://www.cnrseditions.fr/catalogue/relations-internationales/syrie

    • Affaire Dabbagh

      L’affaire Dabbagh est une affaire criminelle concernant la disparition forcée et la mort sous la torture de #Mazzen_Dabbagh, conseiller principal d’éducation au Lycée français de Damas, et de son fils, #Patrick_Dabbagh, étudiant. Tous deux sont des citoyens franco-syriens, arrêtés à leur domicile à Damas en 2013 par les services de renseignement, victimes de disparition forcée pendant 5 années puis déclarés mort en 2018 par les autorités syriennes.

      En 2024, trois dignitaires syriens sont reconnus coupables de complicité de crime contre l’humanité par la justice française pour l’arrestation arbitraire, la torture et la privation de la vie de Mazzen et Patrick Dabbagh.

      https://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_Dabbagh

  • #Sécurité_Sociale_de_l’Alimentation : de l’utopie à la réalité

    Étendre le principe de la Sécurité sociale à l’alimentation en permettant à tous les Français d’acheter des produits conventionnés, choisis démocratiquement, grâce à une carte dédiée. Le principe de la Sécurité sociale alimentaire est simple, sa mise en oeuvre moins. Celle-ci implique en effet une bataille majeure contre les acteurs qui gèrent aujourd’hui ce secteur, notamment l’agro-business et la grande distribution, mais aussi l’obsession libre-échangiste de l’Union européenne. Petit à petit, l’idée essaime pourtant un peu partout en France, à travers des expérimentations locales. Alors qu’une proposition de loi pour une massification a été déposée, des questions majeures, portant notamment sur le financement, cherchent encore des réponses.

    Il y a un peu plus d’un an, les Restos du Cœur lançaient une vaste campagne d’appel aux dons, annonçant être submergés face à une demande croissante d’une partie de la population n’arrivant plus à se nourrir face à l’inflation. Encore aujourd’hui, la crise reste d’actualité, les files d’attente pour l’aide alimentaire ne disparaissent pas du paysage français. A titre d’exemple, un rapport publié le 17 octobre par l’association Cop1, révèle que 36 % des étudiants sautent régulièrement un repas faute de moyens, tandis que 18 % d’entre eux dépendent de l’aide alimentaire. Par ailleurs, l’isolement social accompagne les difficultés alimentaires : « 41 % des étudiant.e.s se sentent toujours ou souvent seul.e.s », contre 19 % dans la population générale. La crise cependant n’épargne pas les autres tranches d’âge. Le nombre de bénéficiaires de l’aide alimentaire ne baisse pas, atteignant aujourd’hui 2,4 millions, selon le dernier rapport d’activités des Banques Alimentaires.
    Une réponse démocratique à la faim et à la misère agricole

    À l’autre extrémité de la chaîne de production, l’agonie du monde paysan et agricole se prolonge. Alors que les élections des chambres d’agriculture se tiendront en janvier 2025 et que l’UE s’apprête à signer un désastreux traité de libre-échange avec le MERCOSUR, les tensions restent vives. Dans un contexte de forte couverture médiatique, les mouvements agricoles tentent de décrocher de nouveaux engagements : une rémunération juste du travail, le partage équitable de la valeur ou le rééquilibrage des rapports de force face à la grande distribution. À cela s’ajoutent des revendications pour des simplifications administratives, certaines pourtant, enfermées dans le modèle de l’agro-business, vont à l’encontre des objectifs écologiques.

    Pour toutes ces raisons, l’idée d’une Sécurité Sociale de l’Alimentation (SSA) fait son chemin. Encore peu connue, cette proposition se construit à travers diverses expérimentations, et apparaît de plus en plus souhaitable à chaque nouvelle crise. À l’occasion de la journée mondiale de l’alimentation, le 16 octobre 2024, plusieurs publications se sont penchées sur le sujet. Le 14 octobre, l’Institut Rousseau argumente l’idée d’une « sécurité sociale de l’alimentation » en soulignant « l’urgence d’une rupture avec le système alimentaire actuel ». Quelques jours plus tôt, la Fondation Jean Jaurès publiait une note appelant à la création de nouveaux droits pour agir sur les déterminants de santé. Ces deux rapports mettent en lumière des enjeux majeurs et bien réels.

    Seulement, mettre uniquement en avant certaines dimensions de la Sécurité Sociale de l’Alimentation risque d’en limiter l’ambition, ou du moins de ne pas en percevoir le sens profond. En se focalisant sur des enjeux concrets tels que les inégalités alimentaires ou la santé publique, on peut perdre de vue une finalité première de la SSA : celle de la transformation profonde des institutions et d’une réinvention de la citoyenneté par la démocratisation du processus de production, de distribution et de consommation de l’alimentation. Cet objectif exige une rupture et l’émergence d’institutions nouvelles. Il s’agit ici de questionner la chaîne alimentaire dans son ensemble. Ainsi, parler de crise paysanne et de crise alimentaire peut nous amener à en oublier la division accrue du travail, et donc des étapes intermédiaires. Matériellement, la démocratisation de l’assiette par la SSA remet au centre du jeu l’organisation de l’agro-industrie, de l’industrie de transformation alimentaire et celle de la grande distribution. Ce retour aux principes démocratiques de la SSA doit alors se faire au regard des stratégies de généralisation et des leçons tirées des expérimentations en cours.

    La SSA : entre idée neuve et reprise historique

    L’histoire de la Sécurité Sociale de l’Alimentation (SSA) se situe à l’intersection de l’innovation théorique et de la réactivation de politiques historiques. Mais quels sont les fondements de cette idée qui a émergé au début des année 2010 au sein de la société civile et qui est aujourd’hui défendue par divers acteurs ?

    La proposition d’une Sécurité sociale d’alimentation vise à étendre les principes du régime général de sécurité sociale dont nous profitons tous, établi en 1946 sous l’égide du ministre Ambroise Croizat, en les appliquant aux domaines de l’alimentation et de l’agriculture. L’objectif est de construire une organisation démocratique du système alimentaire. Cette initiative s’inspire de l’héritage de la Sécurité sociale, dont l’histoire est analysée entre autres par le collectif Réseau Salariat, ainsi que les contributions théoriques du sociologue Bernard Friot et les travaux de l’économiste Nicolas Da Silva.

    Depuis plusieurs années, un ensemble de collectifs, d’associations et de syndicats s’organisent sur le terrain. L’année 2019 marque la création d’un réseau national pour la promotion d’une Sécurité sociale de l’alimentation, conçu comme un espace commun permettant le partage des travaux. Ce réseau rassemble notamment des acteurs comme ISF Agrista, le Réseau CIVAM, Réseau Salariat, ou encore le syndicat agricole de la Confédération paysanne, ainsi que de nombreuses associations et collectifs locaux. La création de ce collectif représente un tournant historique, visant à structurer les échanges auparavant bilatéraux pour faire un premier état des lieux et amorcer un mouvement capable de porter ce projet dans le débat public.

    Le mouvement prend appui sur plusieurs constatations. À la base des problèmes identifiés se trouve l’impossibilité de transformer l’agriculture sans l’adoption de politiques alimentaires de transformation en profondeur. De plus, il devient impératif de dépasser le modèle de l’aide alimentaire basé sur le don, pour garantir un accès universel et autonome à une alimentation choisie. C’est ainsi qu’on peut être amenés à réfléchir à partir du « déjà-là » et des réussites passées, notamment de l’établissement d’une organisation démocratique et universelle dans l’économie de la santé entre 1946 et 1959, rendue possible grâce à la branche maladie du régime général de sécurité sociale.

    Concrètement, la mise en place de la Sécurité Sociale de l’Alimentation s’appuie sur trois piliers fondamentaux. Le premier est l’universalité : la SSA s’appliquerait à toutes et tous, sans distinction. Cette approche peut surprendre, car elle inclut également les plus aisés. Pourtant, c’est bien cette universalité qui garantit la force et la légitimité de la mesure. Elle vise à éliminer les mécanismes d’exclusion et de discrimination, cherchant à rompre avec le contrôle social et administratif associé au « statut de la pauvreté » et donc à la stigmatisation des bénéficiaires. En faisant de l’accès à l’alimentation un droit universel, la SSA défie également l’argument de « l’assistanat ». Notre histoire sociale et politique, depuis 1789, montre en effet que les politiques universelles sont à même de créer et de stabiliser les droits de manière durable.

    Le deuxième pilier de la Sécurité Sociale de l’Alimentation repose sur un système de financement autonome, structuré autour de mécanismes de cotisations plutôt que sur la redistribution étatique. L’objectif est ainsi de limiter les risques de remises en cause futures, de détricotage, pour mieux pérenniser le système face aux arbitrages opposés aux politiques de solidarité.

    Enfin, le troisième pilier de la Sécurité sociale de l’alimentation repose sur un conventionnement des produits alimentaires, pensé pour être véritablement démocratique. Ce processus de décision collective est au cœur du « droit à l’alimentation » et permet aux citoyens de reprendre la maîtrise de la chaîne alimentaire. Concrètement, les acteurs du système alimentaire seraient sélectionnés et évalués selon un cahier des charges ou une charte reflétant les attentes citoyennes. Ce troisième pilier ouvre largement la porte aux expérimentations, car un conventionnement démocratique ne se décrète pas et ne s’impose pas d’en haut : il se forge plutôt par la pratique du terrain.

    Pour concrétiser le projet de SSA, plusieurs scénarios sont envisagés. L’un d’entre eux propose un versement mensuel de 100 à 150 euros minimum sur une « carte de sécurité sociale », ou comme une extension de la carte Vitale, afin de garantir un accès suffisant à une alimentation saine. Ce montant, attribué aux parents pour les mineurs (sauf dans des cas spécifiques), servirait exclusivement à l’achat d’aliments auprès de producteurs et structures conventionnées. Les études montrent que 150 euros par mois par personne représentent un seuil minimal pour commencer à assurer un droit à l’alimentation. Cependant, comme le précise Mathieu Dalmais, agronome et membre de l’association Ingénieurs sans frontière, il reste loin d’être suffisant pour une alimentation équilibrée et digne en France.
    Le droit à l’alimentation : condition de l’épanouissement de la citoyenneté

    Il faut commencer par constater l’absence d’application effective d’un droit pourtant reconnu comme fondamental : le droit à l’alimentation. Ce droit, inscrit au niveau international dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), adopté par l’Assemblée générale des Nations unies en 1966, demeure encore largement absent dans de nombreuses régions du monde. La France n’est pas en reste. En analysant les textes de droit international et les lois françaises, Dominique Paturel, chercheuse à l’Institut national de l’agriculture, de l’alimentation et de l’environnement (INRAE) et membre du collectif Démocratie Alimentaire, met en lumière les lacunes de la législation française en matière de sécurité alimentaire.

    A titre d’exemple, l’article 61 de la loi « EGalim » de 2018, introduit la lutte contre la précarité en visant à « favoriser l’accès à une alimentation favorable à la santé aux personnes en situation de vulnérabilité économique ou sociale ». Cependant, le texte privilégie l’aide alimentaire, refermant ainsi toute perspective de mise en place d’un véritable système de sécurité sociale. Il précise en effet que cette aide est fournie par « l’Union Européenne, l’État ou des acteurs associatifs », soulignant un rôle majeur des associations. Ce modèle, largement insuffisant, pose deux problèmes majeurs. D’une part, il limite l’élaboration d’un accompagnement durable, laissant aux associations la gestion d’un besoin prioritaire, tandis que l’État se désengage. D’autre part, il réduit l’accès à l’alimentation à un besoin individuel, sans reconnaître l’alimentation comme un droit fondamental qui caractérise le développement de la citoyenneté de l’individu au sein de la société. La loi « EGalim 2 » adoptée en octobre 2021 ne constitue aucunement un changement de philosophie.

    Les textes en vigueur légitiment ainsi une situation hautement problématique : sous prétexte de lutter contre le gaspillage, la France réduit le droit à l’alimentation à une simple aide alimentaire. Ce modèle peut contraindre plusieurs millions de personnes (entre 2 et 4 millions selon les chiffres en vigueur de l’INSEE rapportés par l’Observatoire des inégalités), à bénéficier du « surplus » de l’agrobusiness, issu d’un système productiviste et industriel. En favorisant un modèle de citoyenneté davantage consumériste et passif que véritablement actif, la puissance publique oriente vers une consommation faussement solidaire et démocratique.

    Pourtant, l’idée d’un droit à l’alimentation peut être sans crainte comparé à des mobilisations historiques telles que la Révolution de février 1848, qui posa les fondations d’une République démocratique et sociale. Parmi les revendications, celle du « droit au travail » incarnait une réponse au paupérisme, portée depuis les années 1830 par des mouvements socialistes ainsi que la société civile engagée sur la question sociale. À l’époque, il s’agissait d’élargir une citoyenneté politique nouvellement acquise pour intégrer des droits sociaux autour de l’organisation du travail, et donc de l’existence quotidienne des classes populaires. Comme le souligne l’historienne et philosophe Michèle Riot-Sarcey, ce moment historique donna naissance à une volonté citoyenne de reprendre en main son destin : « Le moindre citoyen s’estime alors en droit de s’exprimer, en réunion, dans la rue, au sein des clubs. […] La révolution de février 1848 a su transformer cette coutume en expression de la volonté et donc de la souveraineté du peuple. ».
    Une organisation démocratique de l’économie

    La SSA se dessine au sein d’un paradigme écologique nous imposant de repenser le rapport entre l’individu, son environnement et sa liberté de décision. L’enjeu est de favoriser une véritable démocratisation de l’économie, s’appuyant sur des mécanismes de planification participative, où les citoyens sont directement impliqués dans la prise de décision, non plus dans un processus consultatif mais où le dernier mot leur revient. Cette approche contraste nettement avec la démocratie libérale actuelle, qui se limite souvent à une participation à travers le vote, laissant ensuite les décisions quotidiennes aux mains des élus, sans mandat impératif.

    Alors que la citoyenneté contemporaine est largement construite autour du statut de consommateur et que le pouvoir de consommation constitue l’inclusion sociale, la démocratie alimentaire vise un dépassement des fonctions discriminantes de l’alimentation en tant que déterminant social. Tanguy Martin, membre d’ISF Agrista, co-auteur avec Sarah Cohen de l’ouvrage La démocratie dans nos assiettes (2024), souligne que la Sécurité sociale de l’alimentation s’appuie sur une analyse structurelle des systèmes de domination, repensant en profondeur les rapports de pouvoir qui façonnent notre système alimentaire : « La démocratie dans son sens premier va fondamentalement à l’encontre de la logique de l’accumulation du capital qui régit aujourd’hui en grande partie les activités humaines et surtout organise l’espace social et matériel à partir de sa logique ».

    La SSA n’impose pas, elle cherche à convaincre. Pourtant, ce principe est parfois encore difficile à comprendre dans les sphères militantes au fort capital culturel. Face à l’urgence de la bifurcation écologique, celles-ci sont souvent tentées par l’imposition de mesures strictes. Tanguy Martin abonde dans ce sens, rappelant qu’au départ, la proposition avait surpris certains milieux, où la mise en place de critères spécifiques était perçue comme évidente et urgente. Or, le conventionnement démocratique vise à légitimer socialement des décisions radicales qui pourraient, appliquées autrement, sembler punitives. Pour lui, il s’agit avant tout d’une question de principe que de « pragmatisme », puisqu’il permet d’ancrer ces choix dans une démarche collective et partagée : « tout ce qu’on met en place de manière autoritaire ne fonctionne pas », tout en insistant, « si nous voulons partager des idées fortes, comme celle d’une décroissance de la production et de la consommation d’énergie, nous devons le décider collectivement ».

    Cet aspect central de l’organisation démocratique de la Sécurité sociale de l’alimentation est avant tout pédagogique. Elle rappelle l’expérience récente de la Convention Citoyenne pour le Climat qui – bien qu’ayant été en grande partie ignorée par le pouvoir politique – a démontré qu’un groupe de citoyens, non spécialistes, pouvait s’informer de manière rigoureuse, débattre avec des avis divergents, et aboutir à des propositions de politiques macro-économiques sérieuses et radicales. C’est là que réside la profondeur du conventionnement démocratique : il active le citoyen en mobilisant sa capacité à s’auto-éduquer socialement et renforce ainsi son engagement dans la prise de décision.

    La démocratie alimentaire doit s’emparer pleinement de cette question de classe, du capital culturel, mais aussi du capital économique, d’autant plus nécessaire face aux limites de l’incitation à consommer bio et local. En effet, le coût élevé de l’alimentation plus saine tend à en faire un réflexe de classe qu’il devient urgent de dépasser. Alors que l’incitation à consommer bio devient contre-productive et suscite des caricatures, illustrant les limites atteintes dans l’espace social, la SSA représente une avancée vers un modèle supérieur. Elle redonne aux citoyens un pouvoir d’agir et la fierté d’accéder à des produits issus de l’agriculture biologique ou de haute qualité, sans que cela dépende d’un privilège économique ou d’une logique de distinction sociale.

    Le conventionnement démocratique des acteurs devient ainsi un levier de participation pour une nouvelle planification démocratique de l’économie, orientée vers les impératifs écologiques. Aujourd’hui en France, le secteur de la grande distribution – principal point d’approvisionnement de la population et secteur fort de l’économie du pays – est dominé par quatre grandes enseignes, qui concentrent l’essentiel des ventes selon les données de 2023 : E.Leclerc (23,8 % de part de marché), Carrefour (19,7 %), Les Mousquetaires (16,7 %) et Système U (12 %). Cette concentration n’est pourtant que la partie visible de l’iceberg de l’« agro-industrie », révélant l’emprise croissante des grands groupes sur nos choix alimentaires.

    Autre exemple, l’annonce récente du géant Lactalis de réduire de 9 % sa collecte de lait en France d’ici 2030 illustre l’irresponsabilité de ces groupes envers la pérennité des fermes françaises tout comme illustre une stratégie visant à mettre en concurrence les producteurs laitiers à l’échelle mondiale. Cette approche s’oppose frontalement à l’idée d’une prise de décision citoyenne et démocratique sur la localisation de la production. L’organisation démocratique de l’alimentation soulève également la question cruciale de la répartition des terres. Alors que l’agro-industrie accapare les terres, la perspective du conventionnement citoyen doit s’emparer de l’enjeu foncier.

    Reste à concevoir l’institutionnalisation de cette planification démocratique de l’alimentation, visant à stimuler une politisation active des citoyens. Le débat est ouvert : avons-nous déjà les outils nécessaires, qu’il suffirait de réinventer, ou devons-nous créer un nouveau langage, de nouvelles institutions et des espaces inédits pour concrétiser le conventionnement démocratique ? Cette réflexion sur les moyens de donner corps à cette gouvernance citoyenne est déjà engagée à travers plusieurs expérimentations.
    La SSA à Cadenet : une expérimentation en milieu rural

    L’initiative est audacieuse, elle sollicite l’imagination politique. Elle revient à « utopier » : c’est-à-dire se situer dans ces interstices entre rêveries et réalité. Comme l’affirme le sociologue Erik Olin Wright, les utopies réelles ne sont faites ni pour l’idéaliste ni pour le réaliste ; elles sont des pratiques concrètes qui ouvrent les possibles d’un futur alternatif.

    La carte du site du collectif national pour la Sécurité sociale de l’alimentation permet de visualiser la répartition des initiatives locales à travers le pays : on compte plus d’une vingtaine de projets aux appellations variées. Régulièrement, de nouveaux projets rejoignent le mouvement, comme la « caisse commune de l’alimentation » récemment créée à Brest (Finistère). Les expérimentations s’adaptent aux spécificités locales : même si l’universalité et le financement par cotisation sociale restent aujourd’hui impossibles à mettre en œuvre à cette échelle, ces projets ont le mérite de placer la pratique démocratique au centre de leurs démarches. Sur le terrain, l’implantation locale devient donc un exercice de démocratie en acte qui alimente la théorie.

    Lancée en 2021, l’expérimentation de Cadenet dans le Vaucluse, département parmi les plus défavorisés de la métropole, se distingue d’autres initiatives souvent basées en milieu urbain. Après une première année de travail et la création d’un « Comité de pilotage » composé de citoyens engagés, les années 2022 et 2023 ont concrétisé la naissance d’une première convention citoyenne locale. La démarche, exigeante, s’organise sur six mois de rencontres hebdomadaires, permettant aux participants de se former par l’échange et de construire une base d’informations commune. Le groupe accueille également des experts pour éclairer chaque étape de la chaîne de production alimentaire.

    Éric Gauthier, membre de l’association Au Maquis, qui participe au projet, a été frappé par l’engouement suscité dès le départ : « Ce qui était frappant, c’est la construction des pensées ensemble, tout en cherchant une égalisation des savoirs », observe-t-il. « On s’est interrogés sur notre façon de s’organiser, sur nos objectifs et la manière de les atteindre tout en laissant place à la controverse et la porte ouverte aux retours sur les décisions ».

    Rapidement, dans des espaces publics mis à disposition ou chez les militants lorsque les salles municipales sont indisponibles, les premières réunions permettent de lancer un travail initial : retracer l’histoire du territoire et élaborer une « carte de l’avenir alimentaire désirable ». Ces moments vont au-delà de l’organisation formelle, ils dépassent la simple expression des voix pour tisser des relations plus profondes. Des liens immatériels se forgent, des amitiés se nouent. Les ateliers se prolongent souvent jusqu’à tard le soir. Au fil des semaines et des mois, les participants ne sont plus de simples voisins. Ils partagent, apprennent à se connaître, à se comprendre, échangent rires et anecdotes. Tout cela va bien au-delà du projet initial. Une association a été créée : le Collectif Local d’Alimentation de Cadenet (CLAC).

    La création d’une caisse commune représente une étape cruciale pour le projet, nécessitant plus de dix mois de préparation à Cadenet. Le groupe a dû réfléchir à un modèle de financement pour le lancement, puis à une solution permettant de pérenniser l’initiative. Dans toutes les expérimentations, le financement devient le nerf de la guerre. Les collectifs doivent l’affronter, penser malgré les blocages qu’ils rencontrent. Il faut savoir faire tout en sachant qu’on ne peut pas mettre en place l’idée d’un système de cotisation universelle. Ce sera pour plus tard, en attendant, on plante déjà quelques germes à l’échelon local.

    Dans le cas de Cadenet, un soutien financier de la Fondation de France a permis de constituer cette caisse, l’expérimentation ayant fait le choix collectif de se passer de fonds publics. D’autres initiatives, quant à elles, fonctionnent sur le principe de la mutualisation. La caisse commune de Cadenet a officiellement ouvert en avril 2024, après de longs mois de préparation et des étapes clés. La sélection des habitants bénéficiaires a été pensée de manière démocratique. Les membres du collectif ont informé les villageois, distribué des tracts et participé à des événements locaux comme le salon des associations, pour présenter ce nouvel organe démocratique à l’échelle locale. En investissant les places, les marchés, et en réactivant des méthodes de diffusion de proximité telles que le bouche-à-oreille, ils ont créé un véritable élan communautaire. Une réunion publique a réuni 70 volontaires, dont 33 ont été tirés au sort pour participer.

    Faute de monnaie locale, et confronté aux contraintes de gestion, le collectif a opté pour un système temporaire de remboursement plutôt qu’une distribution directe d’euros avant achat. Concrètement, les habitants bénéficiaires de l’expérimentation peuvent, chaque mois, se faire rembourser près de 8.000 produits conventionnés dans des points de ventes, en se présentant à l’association gérant la caisse munis de leurs justificatifs. Pour permettre l’organisation du système de conventionnement un groupe de travail a été créé pour définir une grille de critères de conventionnement des producteurs et des lieux de ventes. Les critères sont basés sur des notations allant de 1 à 10, ils concernent entre autres le respect des normes environnementales, la taille de l’unité de production, dans la mesure du possible l’indépendance vis-à-vis de l’agro-industrie, mais aussi le bien être au travail des salariés sur les sites de production.

    Preuve de la capacité d’adaptation et de l’enthousiasme qui animent autour du projet, suite à la fermeture inattendue de l’épicerie, principal point de vente des produits conventionnés, un groupe s’est formé en parallèle de l’expérimentation pour racheter les locaux et investir dans un système alimentaire local autonome. Cette initiative illustre une fois de plus le dépassement de l’idée initiale : le lancement d’une démocratie alimentaire suscite un enthousiasme qui dépasse les cadres initiaux du militantisme et vient dessiner une action citoyenne sur des espaces publics et privés autrement investis.

    Vers une généralisation trop rapide ?

    Si des expérimentations de ce type permettent aux participants de se familiariser avec de nouvelles méthodes de gestion d’un système alimentaire, le saut d’échelle vers une généralisation apparaît plus difficile à réaliser. Le 15 octobre dernier, le député écologiste Charles Fournier a déposé une proposition de loi visant à expérimenter une « sécurité sociale de l’alimentation », soutenue et co-signée par trois parlementaires de chaque groupe du Nouveau Front Populaire. Concrètement, ce texte propose la création et le financement de caisses alimentaires pour une période expérimentale de cinq ans, avec un fonctionnement inspiré de celui des caisses locales de santé qui ont précédé la mise en place de la Sécu. La proposition se fonde sur des expérimentations citoyennes déjà en cours un peu partout en France (Montpellier, Saint-Etienne, Lyon ou le département de la Gironde), tout en soulignant la nécessité d’un soutien financier et humain pour en garantir la pérennité et l’élargissement. Il prend modèle sur l’initiative « Territoire zéro chômeur de longue durée », instaurée en 2016, qui cherche à mettre fin à la privation durable d’emploi à l’échelle d’un territoire, en se basant sur le principe historique du droit au travail et créant des emplois dans des domaines non-pourvus localement.

    Dans la conjoncture actuelle, les conditions d’adoption d’un tel texte sont quasi inexistantes. Dans un contexte dominé par la pression du capital et des marchés financiers, et face à une Assemblée nationale peu favorable, exposer la SSA pourrait risquer de diluer son impact ou de « griller des cartouches ». Les militants s’interrogent : est-il temps de lancer une campagne officielle à grande échelle, incluant les médias, des actions sur l’espace public ou encore des démarches auprès des organisations politiques ? Ou bien faut-il encore attendre une fenêtre propice avec plus de retours des expériences locales et un poids politique suffisant pour maximiser les chances de succès dans la bataille de la généralisation ?

    L’introduction des débats sur la SSA au Parlement soulève également la question de la composition des organes décisionnaires chargés de superviser l’expérimentation. À ce sujet, l’article 2 propose la création d’un « conseil scientifique et citoyen » pour suivre le projet, dont la « composition [serait] fixée par décret » plutôt que par une participation directe des citoyens. Ce conseil aurait pour mission d’évaluer le dispositif et de remettre « un rapport d’ensemble au Parlement et aux ministres en charge de l’alimentation, de l’agriculture et de la solidarité » avec des recommandations pour l’avenir. Cela pose à nouveau l’incontournable question d’un réel pouvoir citoyen sur les décisions finales, et inversement des autres intérêts pouvant faire pression sur les élus.

    On peut aussi se questionner sur la structure de l’association chargée de gérer le fonds national d’expérimentation de la SSA : selon l’article 3 du texte, le conseil d’administration serait également défini par décret en Conseil d’État, avec une liste de catégories de représentants, sans garantir pour autant une participation démocratique citoyenne équilibrée, voire majoritaire. Or, au regard de l’histoire de la Sécurité Sociale, où les luttes d’influence ont souvent opposé des intérêts divergents, il s’agit d’un enjeu majeur.

    Ce débat sur la stratégie à adopter se reflète également au sein des organisations militantes œuvrant pour la mise en place de la Sécurité Sociale de l’Alimentation (SSA). Dans les espaces de travail communs, la diversité des cultures politiques engendre parfois des tensions, mais aussi de belles coopérations, avec un déploiement d’efforts sur divers fronts. Un consensus émerge cependant : préserver la SSA comme un projet collectif et non personnalisé, un bien commun que chacun peut défendre à sa manière, selon ses compétences et ses ressources.

    Le chemin reste également long pour faire de la Sécurité Sociale de l’Alimentation une priorité des programmes des organisations politiques de gauche. À titre d’exemple, la mesure n’était pas directement présente dans les principaux programmes lors de l’élection présidentielle de 2022, bien que la France insoumise proposait une « expérimentation visant à une garantie universelle d’accès à des aliments choisis » et EELV promettait une « démocratie alimentaire » offrant « une alimentation choisie, de qualité, en quantité suffisante et accessible à toute la population quels que soient ses revenus ». Aucune mention de la SSA en revanche dans le volet « Instaurer la souveraineté alimentaire par l’agriculture écologique et paysanne » du programme de la NUPES ou dans le contrat de législature élaboré en urgence par le Nouveau Front Populaire.

    Dans le monde syndical et agricole, le constat est similaire. L’idée de la Sécurité Sociale de l’Alimentation y reste largement méconnue, souligne Clément Coulet, qui a participé en animation tournante au collectif SSA pour le compte des CIVAM et par ailleurs rédacteur au Vent Se Lève. Il faut dire que les principales organisations syndicales – notamment l’alliance FNSEA-Jeunes Agriculteurs et la Coordination Rurale – défendent des politiques agro-industrielles, qu’elles soient orientées vers le libre-échange mondialiste ou vers le nationalisme économique. Le Réseau CIVAM (Centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural) et le troisième syndicat agricole, la Confédération Paysanne, font toutefois figure d’exception, participant depuis plusieurs années aux réflexions collectives autour de cette initiative.

    Philippe Jaunet, paysan bio installé à Yzernay dans le Maine-et-Loire et militant pour « des pratiques agricoles plus respectueuses de l’environnement », souligne l’importance d’une démocratisation du monde agricole : « L’objectif est aujourd’hui de redonner un sens à la terre et à la production par l’intervention citoyenne ». Il précise que cette intervention pourrait remettre en question la logique corporatiste du système alimentaire, et notamment celle de la production agricole, encore trop opaque. « Actuellement, les citoyens n’interviennent pas, ce qui permet à certaines organisations de monopoliser les instances de décision concernant les politiques mises en place ». Il prend notamment pour exemple le modèle de subventions de la Politique Agricole Commune (PAC), créée en 1962, aujourd’hui principal poste de dépense de l’Union européenne, dont la France bénéficie à hauteur de 9,5 milliards d’euros. Ce système financé par deux fonds européens – le Fonds européen agricole de garantie, FEAGA) et le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) – redistribue des aides aux agriculteurs sans consultation publique pour informer la population et lui permettre d’intervenir.

    L’échelon européen pose enfin un autre problème pour la mise en place d’une Sécurité Sociale de l’Alimentation : les États membres sont dépossédés par l’Union européenne en matière de politique agricole, qui organise une mise en concurrence interne au marché européen et externe, via les traités de libre-échange. Mettre en œuvre la SSA impliquera d’une manière ou d’une autre une remise en cause de ce modèle de concurrence tous azimuts, et donc un lien avec les mouvements européens et internationaux pour une agriculture plus juste.

    La SSA ne se limite donc pas à une solution conjoncturelle face aux crises actuelles, elle s’inscrit dans un héritage social et démocratique, éveillant une citoyenneté active et collective autour de la terre et de l’assiette. En ce sens, elle incarne la résistance à un système en bout de course et l’image d’un souffle transformateur qui se lève. Que ce soit la poursuite d’un « déjà-là » communiste ou l’émergence d’une société éco-socialiste, la Sécurité sociale de l’Alimentation appartient au futur. Une alternative qu’il reste largement à bâtir. En somme, cela revient à choisir entre être collectivement libres jusqu’au fond de l’assiette ou ne pas l’être dans le dogme de la consommation passive.

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