• « Aujourd’hui, on ne peut pas comprendre le contrôle à France Travail sans comprendre les algorithmes » - Entretien avec Claire Vivès
    https://www.odap.fr/articles/sur-la-piste-des-algorithmes-claire-vives

    Au fil de l’enquête, on s’est rendu compte que plusieurs outils qu’on peut qualifier d’« algorithmiques » jouent un rôle essentiel dans la sélection et le traitement des #allocataires qui vont, justement, faire l’objet d’un #contrôle. Il faut d’abord préciser que le mot « #algorithme » n’est pas toujours utilisé en interne : certains outils sont qualifiés de « robots », d’autres ressemblent à des documents Excel, mais ils participent tous à un processus de sélection ou de hiérarchisation automatisée des personnes inscrites sur les listes de #France_Travail.

    De fait, aujourd’hui, les personnes inscrites à France Travail peuvent être désignées pour un contrôle via trois modalités principales : le #signalement par leur conseiller ou leur conseillère, le #tirage_aléatoire, ou, finalement, ce qu’on appelle les « #requêtes_ciblées ». C’est là qu’intervient le premier véritable algorithme. Ces requêtes sélectionnent des personnes à partir de critères jugés pertinents (par exemple, une formation financée par France Travail achevée depuis plus de six mois ou une inscription dans un métier dit « en tension »). Ces critères sont définis au niveau national, puis adaptés régionalement. Ce sont des outils puissants de #ciblage, qui traduisent une forme de #suspicion_institutionnelle : pourquoi êtes-vous encore au chômage alors que vous avez été formé récemment ; ou que vous postulez dans un métier dans lequel les employeur·ses disent manquer de main-d’œuvre ?

    Un deuxième outil est récemment apparu, avec la réforme du contrôle de la recherche d’emploi entrée en vigueur au 1er janvier 2025. Pour répondre à l’objectif fixé par le gouvernement de passer de 600 000 contrôles par an à 1,5 million d’ici 2027, France Travail a introduit un « robot d’analyse des dossiers » censé permettre d’augmenter le nombre de contrôles à effectifs constants. C’est un outil qui vise à gagner du temps, en pré-classant en groupes les dossiers à contrôler. L’objectif est de déterminer si les demandeur·ses d’emploi recherchent activement un travail, à partir de critères comme la présence d’un CV sur l’espace personnel, les périodes travaillées au cours des trois derniers mois, ou encore les échanges avec France Travail. Mais déjà au niveau des critères, il y aurait beaucoup de choses à dire. Par exemple, l’usage de l’espace personnel n’est pas obligatoire : est-il donc pertinent que le robot en fasse un critère de tri ? Dans tous les cas, à ce stade, cet algorithme semble encore loin d’être opérationnel : il produit des erreurs basiques sur des informations comme les périodes travaillées, pourtant bien connues du système puisqu’elles déterminent l’indemnisation… À ce stade de notre enquête – qui n’est qu’à ses débuts sur cet aspect -, il semblerait que beaucoup d’agent·es ne l’utilisent pas, parce qu’iels considèrent qu’il leur fait perdre plus de temps qu’il n’en fait gagner. Il aurait même été suspendu le temps qu’une nouvelle version de l’outil soit déployée.

    Le dernier outil que nous avons identifié récemment est encore plus opaque. Il s’agit d’un « outil d’aide à la détermination de la #sanction » destiné à aider les agent·es dans l’application d’un nouveau type de sanction : la suspension du revenu de remplacement en cas de non-respect du #contrat_d’engagement1. Cette sanction est liée à la parution d’un décret, qui prévoit une suspension de l’indemnisation de durée et de niveau variable, en fonction des “manquements” identifiés. Pour ce faire, les agent·es utilisent un tableau Excel, non relié au système d’information de France Travail, dans lequel iels cochent dans des liste le ou les « indices de non-respect des engagements détecté(s) au cours du contrôle » d’une part, et les « contrainte(s) personnelle(s) et difficulté(s) détectées au cours du contrôle », d’autre part. L’outil attribue ensuite une « note » et propose une sanction selon trois critères : la « nature », le « pourcentage du revenu de remplacement impacté » et la « durée ». Nous ignorons absolument pour l’instant comment les différentes informations sont pondérées pour aboutir aux caractéristiques de la sanction préconisée.

    (...) Contrairement aux promesses d’automatisation libératrice qui présentent ces outils comme permettant aux agent·es de réduire leur charge de travail et de se concentrer sur leur cœur de métier en se déchargeant des tâches répétitives, on observe, au contraire, que ces dispositifs peuvent alourdir leur activité, sans que ce processus soit forcément visible, ni évident à mesurer. En fait, on constate qu’au mieux, les algorithmes ne font pas gagner de temps, et au pire, ils en font perdre. De plus, ces outils pourraient à terme conduire à déléguer au robot le travail d’analyse, ce qui ne laisserait aux agent·es que la charge de valider une décision prise par la machine ; sur la caractérisation des sanctions par exemple, les agent·es se trouvent dépossédés par l’algorithme.

    (...) Nos demandes d’observations du travail réalisé sur les plateformes de contrôle, par exemple, n’ont jamais abouti.

    #chômage #agents #automatisation_du_contrôle #contrôle_de_la_recherche_d’emploi #opacité #métier_en_tension #chomeur.euses #surveillance

    • certains critères redoublent les inégalités. Par exemple, le fait d’être inscrit·e sur un métier en tension : une telle situation atteste souvent d’autres difficultés, sociales ou de santé par exemple. Or, en 2023, plus de la moitié des contrôles ont ciblé des demandeur·ses d’emploi inscrit·es dans des métiers dits en tension.

  • Khrys’presso du lundi 3 novembre 2025
    https://framablog.org/2025/11/03/khryspresso-du-lundi-3-novembre-2025

     Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière. Tous les liens listés ci-dessous sont a priori accessibles librement. Si ce n’est pas le cas, pensez à … Lire la suite­­

    #Veille #Claviers_invités #GAFAM #Internet #Revue_de_web #Revue_hebdo #Surveillance #veille #webrevue

  • Sick of Feeling Like a Tourist? There’s a Tour for That

    With visitors increasingly interested in the social and political realities of global tourist hot spots, some local guides are adapting their offerings.

    I arrived in Athens for the first time last May with visions of alabaster architecture and picturesque avenues. But when I arrived in Petralona, the central neighborhood where I was staying, I found vacant storefronts, broken sidewalks and crumbling, graffiti-covered buildings.

    The more I explored, the more I wondered why parts of this ancient city had come to convey urban decay rather than classical charm.

    A tour of the Acropolis would most likely not provide answers. Searching on Airbnb Experiences for something more relevant, I found the Athens Social and Political Walk. Its tagline: “How did the ‘cradle of democracy’ become the ‘basket case of Europe’?” I signed up for a similar tour offered by the guide.

    I met the guide, a 35-year-old Spanish-born political scientist named Isaac Caballero Suey, and five other participants near bustling Omonoia Square. Mr. Suey, who had close-cropped hair and glasses, started off by explaining that contemporary Athens has almost nothing in common with the Ancient Greece of Aristotle. These days the city is a petri dish for pretty much every major postmillennial social ill — gentrification, wealth disparity, refugee and immigrant crises, and infrastructure decay.

    With tourism putting pressure on vacation hot spots like Athens, Buenos Aires, Mexico City and Rio de Janeiro, experiences like Mr. Suey’s are drawing curious visitors. They offer a counterpoint to traditional tourism narratives and a way to learn about the tensions affecting the people who actually live in these places.
    Glimpses of an Unseen City

    For three hours, Mr. Suey led us through parts of the city most travelers would ignore or avoid — where abandoned schools and dingy apartments abutted high-rise hotels, and empty arcades concealed vacation rentals.

    He gave us a glimpse of the world inhabited by mostly unseen Athenians, including immigrants and squatters. He connected these locations to issues like corruption, cultural displacement and politics, and shared enlightening stories of grass-roots organizing and mutual aid.

    The tour scrambled my preconceptions, leaving me with an appreciation for Athens as it was rather than as I had imagined it. I wasn’t the only one.

    “The more traditional tourist narratives feel dismissive of the people who live in these places, like they’re not important, and it’s no surprise that places like Athens have struggled to find a modern identity because of this,” said Peter Allen, a 38-year-old software engineer from Liverpool who was also on the tour.

    Mr. Allen, who could be described as a digital nomad, slots into the typical Athens Social and Political Walk demographic, Mr. Suey said: left-leaning frequent travelers, mostly from major cities. “Professors, people of social sciences, politics, economics, but also a lot of tech people,” he explained. “I could even tell you they love the brand Patagonia.”

    Mr. Suey, who also offers tours like Understanding the Refugee Crisis and the Greek LGBTQ History Walk, noted that most bookings are last-minute, suggesting that curious tourists may seek out his distinctive analysis only after they’re exposed to the official “This is Athens” visitors’ guide.

    “My goal is to give you an image of what’s going on in the country, and this is not what tourism boards are interested in,” Mr. Suey said. “I see myself as a political scientist, and what I do is like a documentary.” It is also a business. My tour cost 32 euros, or about $37.

    Encouraged by feedback from participants, he started a company called Planetwonk to bring similar tours to destinations like Buenos Aires, Manila, Mexico City and Rio de Janeiro.

    Beyond ‘Tequila Tours’

    Mr. Suey put me in touch with his partner in Mexico City, a 27-year-old graduate student of art history named Gustavo Sánchez. When he responded to Mr. Suey’s job posting on LinkedIn last year, Mr. Sánchez was working as a traditional, federally credentialed guide doing “tequila tours, very mariachi, very stereotypical,” he said in a phone interview. “Those tours are fun, but if we only do those, we’re exoticizing the country. We’re hiding the problems.”

    Tensions have recently been rising in Mexico City as well-heeled tourists and remote workers have driven up the cost of real estate and food prices, and demonstrations erupted last summer.

    Well versed in Mexico City’s history of corruption and protest, and with Mr. Suey’s guidance, Mr. Sánchez created the Mexico City Social and Political Tour (€34). Mr. Sánchez takes his guests — primarily students, journalists and nonprofit workers — to places like La Merced, the neighborhood that’s home to Mexico City’s largest market and has struggled with government neglect, and Plaza Tlaxcoaque, the site of a former secret prison where dissidents were tortured, which now hosts a large encampment of homeless people.

    “Other guides believe we shouldn’t talk about the bad things happening here. I think that’s unethical,” he said, noting that to his knowledge he’s the only guide in the city leading tours of this type. “I love Mexico City. I’ve studied its history. When you love a place, you can criticize it, because you want it to change.”

    These types of tours offer an alternative to the crowded predictability of social-media-driven tourism, but they existed long before Instagram and its peers. The Catalonian artist and writer Joan Brossa organized a one-night-only “anti-tourism” tour of Barcelona in 1979.

    More recently, in Portugal, Bruno Gomes started We Hate Tourism Tours in 2008, during a painful economic downturn. A skater and surfer, Mr. Gomes used to schlep visiting friends around Lisbon in his van, skipping popular destinations for his personal favorites and planting the seeds of his current company. Today, along with a staff of eight, he offers tours like We Hate Landmarks and Real Life Suburbia, starting at €47 a person. Mr. Gomes and his team still bypass popular sites like the Moorish Castle in Sintra in favor of less-visited alternatives of guides’ choosing.

    “I’m a designer and an artist,” Mr. Gomes said. “My colleague, she’s a journalist. We have an engineer. We have a musician. No one really has anything to do with tourism. We just share what we love.”
    Space for ‘Anti-Tourism’

    Traditional tour operators in Athens and Mexico City don’t seem to mind the competition. Representatives from the nonprofit operator This Is Athens and El Taco Club, a service in Mexico City that employs 80 guides and hosts thousands of guests annually, both used the term “complementary” to describe the nontraditional experience these so-called anti-tourism tours provide.

    The common spirit behind these experiences is an urge toward counterprogramming, but they can diverge in their approach to doing business. In fact, some are not businesses at all.

    Kyle Kajihiro, a University of Hawaii professor of ethnic studies, has spent more than 20 years leading informal tours of Oahu, mostly for friends and colleagues, that challenge the erasure of Native Hawaiians by American colonialism and military expansion. He calls these outings DeTours.

    Dr. Kajihiro does zero marketing for DeTours, nor does he charge for them, and they’re not really targeted at the general public. Instead, when interested people reach out, he screens them to gauge their commitment to Native Hawaiian issues like land rights and food sovereignty. DeTours, he says, are not a commercial venture but rather a way to connect like-minded activists.

    “I think there’s a market for alternatives that are less ethically problematic, that even feel affirming of certain values people have. And there’s a need to have a different kind of story being told,” he said. “But I’m troubled by the way that even good intentions can become a commodified experience.”

    The notion of anti-tourism tours may seem contradictory, but according to Anu Taranath, a faculty member at the University of Washington and the author of “Beyond Guilt Trips: Mindful Travel in an Unequal World,” embracing the full breadth of these tours — from Mr. Suey’s expansive approach to Dr. Kajihiro’s strategic exclusivity — could help drive a necessary shift in travel habits.

    “We need to operate on all levels,” Dr. Taranth said. Anti-tourism “isn’t antithetical to tourism, but our definition of tourism should open up.”

    “None of those are simple conversations to have,” she added, “but I’m seeing people wanting to understand where we are and how we got here, and what it means to do something different.”

    https://www.nytimes.com/2025/10/29/travel/athens-mexico-tourism.html
    via @fil
    #anti-tourisme #résistance #villes #urbanisme #airBnB #surtourisme #tourisme_de_masse #urban_matter #Athènes #Buenos_Aires #Mexico_City #Rio_de_Janeiro #alternative #contre-narration #TRUST #master_TRUST

  • Critique de l’urbanisme et politiques de la domination
    https://ecologiesocialeetcommunalisme.org/2025/10/30/critique-de-lurbanisme-et-politiques-de-la-domination

    Depuis toujours, la cité fut terrain d’affrontement historique et stratégique entre dominants et ceux qui voulaient qu’elle soit espace de liberté et de rencontre, de dialogue et de démocratie directe. Ainsi, il fallut malgré tout près de 150 ans à la domination marchande pour, par exemple, assassiner Paris ; réduire cette splendide place forte de […] L’article Critique de l’urbanisme et politiques de la domination est apparu en premier sur Atelier d’Écologie Sociale et Communalisme.

    #Orientation_bibliographique #Cité #Dominations #Gentrification #Surveillance #Théorie_critique_du_capitalisme #Ubanisation

  • #Frontex, agent intouchable du #renseignement_migratoire

    L’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, Frontex, est devenue, en vingt ans [1], le bras armé des politiques sécuritaires de l’Union européenne (UE) et de ses États membres. Initialement créée pour coordonner le contrôle des #frontières, organiser les #expulsions et produire des « #analyses_de_risques » des mouvements de populations, Frontex a élargi son champ d’intervention bien au-delà des questions migratoires.

    Nonobstant des enquêtes institutionnelles et journalistiques ayant démontré que ses officiers s’étaient rendus coupables de graves #violations_de_droits, tout semble organisé pour que la responsabilité de l’agence Frontex ne soit ni engagée ni reconnue. En sus de ses traditionnelles activités de #surveillance et de #contrôle des frontières prévues dans le règlement (UE) 2019/1896, l’agence tentaculaire dotée de moyens exponentiels est devenue tout à la fois agent du renseignement, négociateur, influenceur et membre d’un réseau de dissuasion violente, que rien ni personne ne semble pouvoir arrêter.

    Produire de l’information, qu’importe sa véracité

    Comme pour tout bon agent du renseignement, recueillir et exploiter des informations relevant de la vie privée est un axe essentiel du travail de Frontex. Elle collecte ces #données par le biais des États membres, d’agences européennes et d’organisations partenaires, mais aussi dans le cadre de ses propres opérations (maritimes, aériennes, terrestres). Elle est présente aux #frontières_maritimes (Méditerranée centrale et Manche), ainsi qu’aux #frontières_terrestres et aériennes de plusieurs pays (#Albanie, #Géorgie, #Monténégro, #Serbie, #Macédoine_du_Nord, #Moldavie, #Ukraine). Elle a progressivement élargi ses activités vers la zone #pré-frontière de l’UE et ouvert des bureaux #satellites temporaires dans des pays tiers du voisinage méridional et en #Afrique_de_l’Ouest [2].

    Quantité d’informations sont susceptibles d’être enregistrées : certaines sont générales, telles les routes migratoires empruntées, les dates de franchissement de frontière, les listes de passagers ou le pays de provenance ; d’autres, plus spécifiques, sont relatives aux #données_biographiques, aux incidents au cours d’opérations, jusqu’au lieu où se cachent les personnes au moment du contrôle. Les données recueillies nourrissent divers fichiers, parmi lesquels celui d’#Eurosur, instrument de surveillance et d’échange d’informations entre Frontex et les États membres, ou le #Joint_Operation_Reporting_Application (#Jora). Elles donnent aussi – et surtout – lieu à la production de #rapports_analytiques, avec une photographie de la situation aux frontières, supposés permettre de déterminer le niveau de « #risques » de déplacements vers le continent européen.

    Le Contrôleur européen de la protection des données (CEPD) estime que, malgré les moyens déployés, les « analyses de risques » produites par l’agence sont fondées sur des informations peu fiables, obtenues lors d’entretiens menés sans le consentement des migrant·es ni protection de leur identité [3]. Il a également émis des réserves quant à la sécurisation des données et l’ampleur de la collecte.

    L’#opacité des activités de Frontex inquiète aussi le Médiateur européen, qui a traité plusieurs plaintes concernant l’impossibilité d’accéder à des documents et informations. Il faut préciser que l’agence est très réticente à fournir les informations demandées, y compris à ses propres contrôleurs, chargés depuis 2019 d’évaluer en permanence le respect des droits fondamentaux dans ses activités opérationnelles [4].

    Frontex reconnaît elle-même que ses chiffres comportent des #erreurs : alors qu’elle communique chaque année sur le nombre de franchissements de frontières non autorisés, elle admet qu’« il n’existe aucun dispositif permettant d’établir le nombre exact de personnes ayant franchi les frontières [5] ». Mais pour elle, il s’agit presque d’une question secondaire : selon sa directrice adjointe, Aija Kaljana, « il est essentiel de devenir une organisation axée sur le #renseignement, car les ressources humaines et techniques sont limitées [6] ». L’ambition de Frontex est donc de passer d’une agence du contrôle migratoire à un #service_de_renseignement.

    Travailler en synergie, y compris hors du champ migratoire

    L’agence, au cœur d’un vaste réseau d’échanges de données, coopère avec de nombreux services, civils ou militaires, ayant des objets aussi variés que la pêche, la lutte contre le #narcotrafic ou la #sécurité_aérienne [7]. Frontex a créé, en 2018, la #Maritime_Intelligence_Community–Risk_Analysis_Network (#MIC-RAN), soit une communauté du #renseignement_maritime et un réseau d’analyse des risques, pour collecter des données et diffuser des rapports sur les #menaces_maritimes (i.e. l’appropriation illégale des zones maritimes, les conséquences du réchauffement climatique, les « usages illégaux » de la mer). Autre illustration de la diversité de ses collaborations : l’agence négocie des accords avec des sociétés d’affrètement comme #EASP_Air, #DEA_Aviation ou #Airbus [8] qui fournissent des #aéronefs, le personnel pour les exploiter et l’infrastructure technique pour la transmission des données enregistrées, en temps réel, au siège à Varsovie [9]. Elle capte également des données depuis l’espace, car elle a conclu un contrat avec #Unseenlabs, une entreprise française spécialisée dans la surveillance maritime par radiofréquence depuis l’espace, ou se sert des satellites du programme #Copernicus d’observation de la Terre qui sont utilisés pour la sécurité, la protection civile, la gestion de l’environnement et la recherche sur le changement climatique [10].

    Engagée dans des projets de recherche et développement, l’agence finance ceux qui se focalisent sur le matériel de surveillance [11]. Elle a étroitement suivi les avancées du programme #ITFlows, un outil de prédiction des flux migratoires à partir de techniques d’analyse automatisée de données, en y contribuant activement via la fourniture d’informations récoltées dans le cadre de ses missions [12]. Dans le même registre, elle a organisé avec des garde-côtes italiens, début 2025, un atelier international intitulé Évolution des garde-côtes : l’#intelligence_artificielle et les systèmes sans pilote améliorent les opérations de recherche et de sauvetage. Vaste programme à l’heure où le recours à l’intelligence artificielle (#IA) pose de sérieuses questions éthiques [13].

    Au-delà des frontières de l’Europe, Frontex multiplie des #campagnes qui sont de véritables opérations de séduction, afin de s’assurer du concours des États tiers pour empêcher les départs depuis les pays d’origine. Ainsi est-elle à l’initiative du projet #Africa–Frontex_Intelligence_Community (#Afic) dans huit pays africains (#Côte_d’Ivoire, #Gambie, #Ghana, #Mauritanie, #Niger, #Nigeria, #Sénégal et #Togo), officiellement lancé pour « collecter et analyser des données sur la #criminalité_transfrontalière et soutenir les autorités impliquées dans la #gestion_des_frontières ». Frontex a également organisé des séances opérationnelles de #sensibilisation à la lutte contre la #fraude_documentaire et la fraude à l’identité en #Albanie, #Bosnie-Herzégovine, #Égypte, #Géorgie, #Moldavie, #Macédoine_du_Nord, #Serbie et en #Tunisie.

    Comme pour conforter sa place centrale dans le réseau d’information qui surveille tout et constamment, c’est avec les services de répression, tels l’#Office_européen_de_police (#Europol) et l’#Organisation_internationale_de_police_criminelle (#Interpol), que l’agence a intensifié ses relations. Depuis 2008, Frontex signe des accords de coopération et des plans d’action conjoints avec Europol pour partager avec cette agence les informations qu’elle recueille, singulièrement via Eurosur, à des fins de lutte contre la criminalité ou le terrorisme. Sur le terrain, cette entente s’est notamment matérialisée durant des opérations relevant de la politique de sécurité et de défense commune (opérations #Sophia et #Jot_Mare en 2015). Plus surprenant : en 2024, Frontex a codirigé une opération internationale visant à lutter contre la #contrebande_de_drogue par voie maritime en fournissant un soutien technique et opérationnel [14] ; elle est aussi intervenue pour des opérations de soutien pendant les #Jeux_olympiques en France [15], pendant la compétition de l’Euro en Allemagne, ou encore durant la guerre en Ukraine... Elle outrepasse ainsi sa mission initiale et s’érige comme un organe de « super-contrôle ».

    De son côté, Interpol travaille avec l’UE et Frontex dans le domaine de la sécurisation des frontières, sous forme de collaborations techniques, de #formations et de projets de recherche communs. Frontex a élaboré un manuel de référence contenant des alertes de falsification et des cartes de contrôle rapide servant d’aides visuelles à la décision lors de la vérification de documents. Ce dispositif est désormais au cœur du système de bibliothèque électronique de documents #Frontex-Interpol (#Fields). Les #bases_de_données d’une agence de surveillance des frontières et celles d’une organisation de lutte contre la criminalité sont dès lors interconnectées.

    Une agence opaque et délétère qui influence les législations

    Plusieurs enquêtes documentées décrivent les actes illicites commis par l’agence sur ses terrains d’intervention. Il n’est plus à démontrer qu’elle s’est rendue complice ou coupable, à de nombreuses reprises, de #refoulements (#push-backs) en Grèce, pourtant interdits par le droit international. Des refoulements qui sont recensés dans sa base de données #Jora comme de simples opérations de « #prévention_de_départs [16] ». Des pratiques similaires ont été dénoncées à la frontière bulgare, où des violences ont été commises par des garde-frontières participant aux opérations de Frontex [17]. À #Chypre, de nombreux ressortissant·es syrien·nes ont été illégalement enfermé·es et d’autres ont été expulsé·es vers la Syrie, sous les yeux d’officiers de Frontex [18]. Des pratiques épinglées par l’Office européen de lutte antifraude (Olaf), qui a émis des doutes sur « la capacité de l’agence FRONTEX à […] veiller au respect et à la protection des droits fondamentaux dans toutes ses activités aux frontières extérieures ».

    L’agence va jusqu’à fabriquer de fausses informations lorsqu’elle prétend sauver des vies en mer, alors qu’elle transmet la position des embarcations en détresse aux #garde-côtes_libyens, dont les comportements violents envers les personnes migrantes sont notoires [19]. Il lui arrive aussi d’interrompre la prise de vue aérienne au-dessus de la mer Méditerranée pour ne pas avoir à référer d’abandon de personnes en mer [20]. En 2023, un navire où s’entassaient près de 200 migrants au large des côtes italiennes (Crotone) ne présentait, selon le rapport d’incident de Frontex, « pas d’intérêt particulier ». La même année, Frontex a omis d’envoyer un signal de détresse lors du naufrage de l’Adriana (Pylos), provoqué par une manœuvre des garde-côtes grecs [21]. Faut-il le rappeler, alerter les secours relève pourtant d’une obligation internationale de droit maritime. La multiplication des cas de refoulements ou le silence gardé à la vue d’embarcations en détresse contribuent à abaisser les standards de protection. L’agence fait en outre croire qu’elle s’intéresse au sort des personnes expulsées, voire améliore leur situation, lorsqu’elle met en avant les effets bénéfiques qu’aurait eu le retour dans le pays d’origine [22]. La violation des #droits_fondamentaux se banalise et, dans un contexte d’impunité généralisée, est traitée en matière migratoire comme un dommage collatéral.

    Malgré ces multiples mises en cause, Frontex exerce une influence croissante sur les instances politiques et les législations européennes. Ses « analyses de risques » sont l’unique source d’information de la Commission européenne, et l’image construite d’une perpétuelle « #crise aux frontières » qu’elles donnent à voir sert à justifier l’augmentation des contrôles et des mesures sécuritaires. Depuis des années, l’agence véhicule une image négative de la migration en la présentant comme une menace dont il faudrait se protéger.

    Cette image trouve sa traduction dans les réformes législatives. L’insistance de Frontex à alerter, dans ses rapports d’activité, sur « les #mouvements_secondaires […] à grande échelle » ou sur la persistance de la #pression_migratoire a sans nul doute contribué à l’adoption, en 2024, du #pacte_européen_sur_la_migration_et_l’asile. Un pacte dans la mise en œuvre duquel Frontex détient un rôle clé, avec, notamment, les nouvelles attributions qui lui sont confiées aussi bien lors des procédures frontalières (« #filtrage ») que dans l’organisation des #expulsions. Onze États sont en train de s’équiper d’un système informatique numérisé de gestion des retours sur le modèle du #Return_Case_Management_System (#Recamas) mis au point par Frontex.

    La réforme du règlement #Eurodac ouvre une nouvelle brèche en permettant à l’agence de consulter le #répertoire_central_des_rapports_et_statistiques (#CRRS) et d’avoir accès aux #statistiques de l’agence de l’Union européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice (#EU-Lisa).

    Enfin, la #réforme en cours des directives « Facilitation » et « Retour » risque de renforcer les pouvoirs de l’agence, en augmentant – encore – son #budget et en l’autorisant à transférer à des pays tiers des données relatives à des ressortissants aux fins de #réadmission.

    Une agence peu fiable, mais intouchable

    Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de 74 352 personnes ont trouvé la mort depuis 2014 en tentant de franchir les frontières [23]. En dehors du champ de la migration, l’acteur, personne physique ou morale, qui serait impliqué dans une telle hécatombe serait poursuivi et jugé, voire condamné. Malgré les preuves tangibles de la #responsabilité de Frontex, comme de l’UE et de ses États membres, dans ces drames, aucun d’entre eux n’a jamais été inquiété. Bien au contraire, la Commission européenne confirme son agenda politique basé sur la mise à l’écart des personnes exilées en donnant à l’agence un rôle de premier plan dans les politiques migratoires européennes et en proposant de tripler ses effectifs. Les États s’appuient toujours plus sur Frontex : en 2024, la #Belgique a adopté une loi pour permettre le déploiement d’officiers de l’agence sur son territoire afin de soutenir la police fédérale dans l’exécution des expulsions. Le #Royaume-Uni a signé un accord de coopération avec Frontex sur divers aspects de la gestion des frontières, comme la surveillance et l’évaluation des risques, l’échange d’informations, le renforcement des capacités et le partage d’expertise. Dans ces conditions, pourquoi l’agence intouchable s’arrêterait-elle là, même coupable du pire ? La meilleure défense étant l’attaque, la criminalisation des solidarités et la décrédibilisation de celles et ceux qui dénoncent ses actions – à l’image de la campagne Abolish Frontex accusée de « discours haineux » – sont érigées en stratégie de dissuasion. De même, celles et ceux qui pallient l’action défaillante des États, comme les ONG de sauvetage en mer, sont assimilées à des réseaux de passeurs. Une #rhétorique qui ressemble à s’y méprendre à celle des partis populistes.

    https://migreurop.org/article3472.html
    #migrations #réfugiés #directive_retour #directive_facilitation

    ping @karine4 @reka

  • Khrys’presso du lundi 27 octobre 2025
    https://framablog.org/2025/10/27/khryspresso-du-lundi-27-octobre-2025

     Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière. Tous les liens listés ci-dessous sont a priori accessibles librement. Si ce n’est pas le cas, pensez à … Lire la suite­­

    #Veille #Claviers_invités #GAFAM #Internet #Revue_de_web #Revue_hebdo #Surveillance #veille #webrevue

  • Nucléaire : l’Autorité environnementale s’inquiète de l’impact écologique des #EPR2 à #Penly
    https://www.connaissancedesenergies.org/afp/nucleaire-lautorite-environnementale-sinquiete-de-limpact-e

    Connaissance des Énergies avec AFP parue le 21 octobre 2025

    L’#Autorité_environnementale relève des zones d’ombres concernant l’impact #sanitaire, #environnemental ainsi que la #sûreté du chantier et de l’exploitation de deux nouveaux #réacteurs #nucléaires EPR2 par #EDF à Penly (Seine-Maritime), dans un rapport publié début octobre.

    Cette instance indépendante a pour mission de rendre des avis sur les conséquences pour la santé et l’environnement de grands chantiers comme des infrastructures routières ou énergétiques.

    (...)

    Une autorisation environnementale accordée en juin 2024 a permis à EDF de démarrer l’an dernier le chantier des aménagements pour installer deux nouveaux EPR2, avant même l’autorisation de leur création, toujours à l’instruction.

    Encore une autre autorité à fusionner sous une direction unique.

  • Le musée du Louvre braqué à la disqueuse, des bijoux « d’une valeur inestimable » dérobés [ces blaireaux on repris le terme de Dati, mais c’est cambriolé, cassé]
    https://www.liberation.fr/culture/arts/braquage-au-musee-du-louvre-letablissement-ferme-pour-la-journee-20251019

    Les faits se sont déroulés, selon les premiers éléments de l’enquête, entre 9 h 30 et 9 h 40 ce dimanche matin. Selon une source proche de l’établissement culturel parisien, quatre personnes ont installé un monte-charge Quai François Mitterrand, afin d’accéder à la fenêtre du 1er étage, qu’ils ont ouverte au moyen d’une scie mécanique. Sur France Inter à midi ce dimanche, le ministre de l’Intérieur, Laurent Nunez, a confirmé le modus operandi de « trois ou quatre auteurs » qui ont utilisé « une nacelle sur un camion » ainsi qu’une « disqueuse ».

    Le casse a duré 7 minutes

    Avec cette même disqueuse, les malfaiteurs auraient ouvert deux vitrines dans la galerie Apollon qu’ils ont vidées de leur contenu. Les deux vitrines ont pour nom « Bijoux Napoléon » et « Bijoux des souverains ». Elles abritent notamment des éléments précieux des parures des impératrices Marie-Louise puis Eugénie. « Le préjudice est en cours d’évaluation », fait savoir le parquet de Paris. Leur forfait accompli, les quatre auteurs ont pris la fuite sur deux puissants scooters T-max. Le casse « a duré 7 minutes », a assuré Laurent Nunez, signe d’« une équipe chevronnée qui avait fait des repérages ».

    #performance

    edit

    Un des bijoux dérobés a été retrouvé aux abords du musée, abandonné dans leur fuite par les malfaiteurs, a annoncé Rachida Dati sur TF1. Selon Le Parisien, il s’agit de la couronne de l’impératrice, qui a été brisée.

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/10/19/le-louvre-victime-d-un-braquage-et-ferme-pour-la-journee-des-bijoux-d-une-va


    1 354 diamants et 56 émeraudes

    « La criminalité organisée aujourd’hui s’attaque aux objets d’art » et « les musées sont devenus des cibles », a reconnu Rachida Dati.

    Fenwick au ministère, disqueuse un peu partout, monte-charge ici, qu’on ne dise pas que la réaproppriation de l’outil de travail a disparu du paysage. En revanche, sur ce coup, les commanditaires vont pas être jouasses de la perte de la couronne.

    #musées

    • Le spectaculaire cambriolage du Louvre met en lumière les failles de sécurité du plus grand musée du monde
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/10/20/le-spectaculaire-cambriolage-du-louvre-met-en-lumiere-les-failles-de-securit

      DÉCRYPTAGE Le collier de la parure de saphirs de la reine Marie-Amélie et de la reine Hortense, composé de huit saphirs et 631 diamants, et le diadème de l’impératrice Eugénie, qui compte près de 2 000 diamants, ont notamment été volés par un commando de quatre malfaiteurs, passé par une fenêtre de l’établissement parisien.

      Un cambriolage éclair d’une efficacité sidérante, perpétré avec une facilité déconcertante, en sept minutes et en plein jour, dans le plus grand musée du monde… Le Louvre (1er arrondissement de Paris) était ouvert au public depuis trente minutes, dimanche 19 octobre, vers 9 h 30, quand un commando de quatre malfaiteurs, peut-être inspiré par les audaces criminelles de Fantômas, en tous les cas éminemment bien préparé, lesté d’un aplomb saisissant, a atteint la galerie d’Apollon. Située au premier étage, elle abrite notamment les joyaux de la couronne de France.

      Une ascension effectuée en pleine rue, grâce à une banale échelle électrique de déménageur positionnée côté Seine, quai François-Mitterrand. Les cambrioleurs ont le temps de fracturer une porte-fenêtre, puis de fracasser deux vitrines haute sécurité pour dérober « huit objets d’une valeur patrimoniale inestimable », selon un communiqué du ministère de la culture publié dimanche. Avant de redescendre par le même chemin et de s’échapper à scooter.

      Dans le butin, figurent le collier de la parure de saphirs de la reine Marie-Amélie et de la reine Hortense, composé de huit saphirs et 631 diamants, et le diadème de l’impératrice Eugénie, épouse de Napoléon III, qui compte près de 2 000 diamants. Seul loupé, pour le moment, des cambrioleurs toujours recherchés : après l’effraction, mis en fuite, selon le musée, par l’intervention des agents du Louvre, ils ont laissé tomber la couronne de l’impératrice Eugénie, composée de 1 354 diamants et 56 émeraudes. La parure a été récupérée, endommagée.

      Cambrioleurs « chevronnés »

      Une enquête pour « vol en bande organisée et association de malfaiteurs en vue de commettre un crime » a été ouverte et confiée à la brigade de répression du banditisme. Le ministre de l’intérieur, ancien préfet de police de Paris, évoque des cambrioleurs « chevronnés » qui pourraient être « étrangers ».

      Selon Laure Beccuau, la procureure de la République de Paris, invitée dimanche par BFM-TV, la possibilité qu’une puissance étrangère soit la « commanditaire » du vol n’« est pas exclue »[thèse immédiatement reprise par Hollande]. « Nous retrouverons les œuvres et les auteurs seront traduits en justice », a promis Emmanuel Macron dimanche dans un message diffusé sur X.

      Le ministère de la culture a publié un communiqué en fin d’après-midi pour souligner une absence de dysfonctionnement du système de protection : « Les alarmes (…) se sont déclenchées. Au moment de l’effraction, particulièrement rapide et brutale, les cinq agents du musée, présents en salle et dans les espaces adjacents, sont immédiatement intervenus afin d’appliquer le protocole de sécurité. »

      Toutefois, l’enquête devra déterminer la chaîne de responsabilités qui a permis un cambriolage aussi spectaculaire, à l’ampleur quasiment inédite depuis le vol de la Joconde, en 1911, par un vitrier italien. Le tableau de Leonard de Vinci sera retrouvé en Italie deux ans plus tard. Le dernier vol recensé au Louvre a eu lieu en 1998 : une toile de Camille Corot, volée en pleine journée et jamais retrouvée.

      « Pièces invendables en l’état »

      Cette fois-ci, est-ce le casse du siècle ? « On dit que la valeur du butin est inestimable… Bien sûr qu’elle est estimable !, précise Alexandre Léger, expert agréé en joaillerie et montres de collection. Son montant est astronomique avec des milliers de diamants à plus de 500 euros le carat. Mais c’est la valeur patrimoniale qui rend ce vol insupportable. Les pièces sont invendables en l’état mais il y a de forts risques qu’elles soient démontées, l’or d’un côté, les diamants de l’autre. »

      Une fois le vol constaté, le musée a été immédiatement fermé au public tandis que Laurence des Cars, la présidente du Louvre, s’est adressée aux personnels, à 14 h 30, dans l’auditorium. Un discours mal accueilli par certains agents, qui ont hué la dirigeante et ont accusé l’administration muséale d’un manque d’anticipation.

      Soulignant que le plan « sûreté », qui doit moderniser le système de sécurité du musée, a été reporté dans le contrat de performance 2025-2029, les agents pointent un manque récurrent de moyens qui engendre des failles fatales dans la sécurité. Dans un communiqué publié dimanche, la CFDT-Culture appelle à « un audit complet et indépendant des dispositifs de sûreté et de prévention (…) à un renforcement des moyens humains de surveillance et d’accueil (…) et à une transparence totale sur les conclusions de l’enquête ».

      Le syndicat SUD-Culture, dans son propre communiqué, rappelle qu’il n’a eu « de cesse de dénoncer les arbitrages internes constatés depuis trois ans, ceux-ci ne prenant pas en compte la mission première de notre établissement : la préservation du patrimoine, du bâtiment, des collections et des personnes. (…) La responsabilité de la direction est écrasante, et il est grand temps que le président de la République et la ministre de la culture prennent en considération les alertes lancées par les personnels ».

      En outre, selon les informations du Monde, les travaux « Louvre nouvelle renaissance », visant à améliorer l’accueil et créer une nouvelle entrée dans la colonnade Perrault, ne concerneront qu’en 2034-35 l’aile Denon, qui abrite La Joconde ainsi que la galerie d’Apollon, lieu du cambriolage, la plus sensible pour les agents car la plus fréquentée. Ces mêmes agents déplorent, depuis longtemps, des effectifs globalement insuffisants et les conditions de travail problématiques de la galerie d’Apollon.

      « Grande vulnérabilité dans les musées français »

      Selon un salarié du Louvre contacté par Le Monde, cette galerie n’est plus surveillée que par cinq agents aujourd’hui, au lieu de six traditionnellement. Et ils ne sont que quatre lors de la première pause du matin qui dure trente minutes. Précisément le moment utilisé par les malfaiteurs pour agir. « On sait très bien qu’il y a une grande vulnérabilité dans les musées français », a convenu le ministre de l’intérieur qui a rappelé qu’un « plan de sécurité » récemment lancé par le ministère de la culture « n’épargnait pas » le musée du Louvre.

      Après son intervention chahutée par les personnels, Laurence des Cars leur a adressé un e-mail pour préciser que, depuis sa « prise de fonction, [elle a] été alertée sur la nécessité de renforcer notre architecture de sécurité. A cet égard, et à [sa] demande, des études précises ont été menées par la préfecture de police. Leurs conclusions [lui] ont été remises tout récemment. Elles viendront s’ajouter aux mesures déjà initiées ».

      L’affaire ravive le traumatisme des musées parisiens, qui n’avaient subi pareil cambriolage depuis un autre « casse du siècle » survenu en 2010 au Musée d’art moderne de Paris. Cinq tableaux de maître avaient été subtilisés par Vrejan Tomic, alias « l’homme-araignée ». Aucune de ces œuvres n’a été retrouvée. On assiste, depuis plusieurs mois, à une recrudescence de #cambriolages de musées. Mi-septembre, six kilos d’or natif d’une valeur de 600 000 euros étaient dérobés au Muséum d’histoire naturelle.

      En septembre encore, un musée de Limoges a subi un cambriolage dont le préjudice est estimé à 6,5 millions d’euros. La plupart du temps, les objets en or sont fondus et transformés par les malfrats. Mais parfois la chance sourit aux enquêteurs : mi-octobre, cinq des sept tabatières dérobées en novembre 2024 lors d’un braquage à main armée au musée Cognacq-Jay, à Paris, ont été retrouvées.

    • Cambriolage au Louvre : le préjudice des joyaux dérobés évalué à 88 millions d’euros, selon le musée
      https://www.lemonde.fr/culture/article/2025/10/21/cambriolage-au-louvre-le-prejudice-evalue-par-le-musee-a-88-millions-d-euros

      La conservatrice du Musée du Louvre a évalué, mardi 21 octobre, le préjudice des joyaux dérobés dimanche dans la galerie d’Apollon, à 88 millions d’euros, selon la procureure de Paris, Laure Beccuau. Une somme « extrêmement spectaculaire » mais qui « n’a rien de parallèle et de comparable au préjudice historique », a ajouté sur RTL la procureure, précisant que les malfaiteurs « ne gagneront jamais cette somme considérable « s’ils avaient la très mauvaise idée de dessertir et faire fondre ces bijoux ».

      L’enquête progresse, selon la procureure, « les expertises sont en cours, quatre personnes ont été identifiées comme présentes sur les lieux, sans certitude qu’il n’y ait pas eu une équipe pour les aider », a-t-elle par ailleurs déclaré, sans écarter non plus « la piste d’une complicité à l’intérieur » du musée.

      [...]

      [Le] cabinet [de Dati] a, par ailleurs, reçu mardi les organisations syndicales (CGT, SUD, CFDT, CFTC, FSU) du musée pour leur annoncer que l’enquête administrative évoquée la veille était confiée à l’inspection générale des affaires culturelles (IGAC), selon les syndicats. Ceux-là ont à cette occasion déploré la baisse des effectifs consacrés à la sûreté et à la sécurité des musées, en diminution de_ « 25 % en dix ans »_, selon Elise Muller de SUD-Culture.

      #ADN #police #emploi_public

      edit

      ... Dati a [évoqué] la question de la surveillance de la voie publique alors que les voleurs ont pénétré dans l’institution muséale via une fenêtre à l’aide d’un monte-charge stationné sur la route côté Seine. « Peut-être qu’on devrait s’interroger, et c’est une réflexion que nous avons avec le ministre de l’intérieur [Laurent Nuñez], mais aussi avec la Mairie de Paris, s’agissant justement de la sécurité sur la voie publique, qui n’existait pas à ce stade »

      C’est le classement aux Monument historiques qui interdit ici le barreaudage des fenêtres.

      #surveillance #tourisme #patrimoine #ville

    • « Les bijoux volés au Louvre, qui ne valent que pour leurs métaux précieux, sont surtout des objets désuets et encombrants », Michel Guerrin, Réac en chef au « Monde », et pourtant...
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/10/24/les-bijoux-voles-au-louvre-qui-ne-valent-que-pour-leurs-metaux-precieux-sont

      Les bijoux volés, dimanche 19 octobre, au Louvre, dont personne ou presque ne connaissait l’existence , ont provoqué un émoi tutoyant l’hystérie, en France comme à l’étranger. Quand un sujet culturel déborde à ce point, c’est rarement pour enrichir le débat esthétique. C’est souvent pour nourrir un scandale, qui, en l’espèce, se voit dopé par le climat ambiant : il est idéologisé, identitaire même.

      Pour le dire autrement, ce ne sont pas seulement des bijoux qui ont été dérobés, mais l’âme française. Pas des bijoux mais le Louvre, le plus grand musée au monde et l’ancien palais des rois. C’est le hold-up de notre mémoire, d’une certaine idée de la nation, celle d’hier et d’aujourd’hui. Depuis dimanche, la droite et surtout l’extrême droite, notamment via des médias, multiplient les figures de style pour dire ce que signifie le braquage : « Jusqu’où ira le délitement de l’Etat ? » (Jordan Bardella, sur X) ; « Une nouvelle épreuve pour notre pays » (Marine Le Pen, sur X) ; « Une nation menacée » (Eric Ciotti, sur X) ; « Une France en décadence » (un anonyme cité par Europe 1) ; « Un désastre français » (Valeurs actuelles).
      Le croquis d’une nation humiliée, incapable de protéger sa population comme ses trésors, a fait tache d’huile. La photo de la nacelle dressée vers la fenêtre du palais est devenue virale, agrémentée de commentaires moqueurs. « L’assaut du Louvre dresse le portrait d’un pays conscient de ses problèmes, mais incapable de les résoudre », résume El Pais, le 21 octobre.

      Le moment est d’autant plus pénible qu’il est associé à un autre, survenu le 15 avril 2019, quand le pays a regardé, impuissant, la cathédrale Notre-Dame de Paris se consumer. Se retrouvent dans la même barque du discrédit nos deux plus importants fleurons patrimoniaux, au croisement de l’art et de l’histoire, du pouvoir et de la religion. C’est d’autant plus désastreux que leur public est en grande majorité constitué de touristes étrangers. Stewart Chau, directeur clientèle du groupe Verian et spécialiste de l’analyse des sentiments des Français, clôt l’affaire des bijoux dans L’Opinion du 22 octobre : « Les Français ont honte de ce qui s’est passé, mais surtout honte de l’image que cela produit de leur pays, et même d’eux-mêmes. »

      Diable ! Peut-on encore dire que l’avalanche des réactions est disproportionnée et qu’elle est alimentée par d’autres ressorts ? Hors des frontières, l’occasion est belle de titiller l’arrogance française, voire celle du Louvre. Chez nous, les mots s’inscrivent souvent dans le calendrier électoral. Ajouter un vernis identitaire à l’affaire, c’est faire l’impasse sur la nature des objets dérobés.

      Avant le vol, ces bijoux étaient exposés dans un océan d’indifférence. Chaque fois qu’on a mis les pieds dans la galerie d’Apollon, le peu de monde venait surtout pour l’exceptionnel éclat de la salle et ses 61 mètres de long. Sinon la France républicaine n’envoie pas ses écoliers communier devant des joyaux désuets. On ne va pas au Louvre pour des diadèmes, broches, colliers, boucles d’oreilles. On y va pour Léonard de Vinci, Poussin, Delacroix, Géricault. Pour Vermeer. Pour les arts d’Egypte ou de l’islam.

      Comme le dit avec son humour britannique Jonathan Jones, dans The Guardian, le 20 octobre, « heureusement que les voleurs du Louvre avaient un goût atroce en matière d’art ». Ils ont snobé tant de chefs-d’œuvre « au profit de bibelots royaux sans intérêt ». L’Anglais y va fort, mais vise juste. Outre la valeur symbolique, que d’autres transforment en parure identitaire, ces objets ont une « valeur inestimable », comme on a pu l’entendre, non au regard de l’art ou de l’histoire, mais du cours des métaux précieux – saphirs, émeraudes, or, diamants. « L’art est fragile, les diamants sont éternels », écrit Jonathan Jones.

      Les réactions au casse du Louvre ignorent une bascule qui tourmente les musées depuis une dizaine d’années, soulignée dans le New York Times du 20 octobre : au XXe siècle, on a beaucoup volé des tableaux, aujourd’hui, on vole des métaux rares. Les premiers sont invendables, les seconds recyclables.

      Inquiétude et vulnérabilité

      Les casses se répètent, portant à croire que le #grand_banditisme s’invite au banquet. Des bijoux d’une valeur dépassant les 100 millions d’euros sont volés, le 25 novembre 2019, au Musée de la Voûte verte, à Dresde (Allemagne). Le 22 novembre 2022, toujours outre-Rhin, 483 pièces d’or sont dérobées au Musée d’art celtique et romain de Manching, au nord de Munich. Le Royaume-Uni est également frappé par une vague de vols similaires depuis les années 2010. A Paris, le 16 septembre, des pépites d’or d’une valeur d’environ 1,5 million d’euros sont subtilisées au Muséum national d’histoire naturelle.

      Sécuriser des bijoux dans un lieu inadapté, qui plus est gigantesque, devenu un barnum à touristes, qui accueille 30 000 visiteurs par jour et près de 9 millions de personnes par an (de quoi, en passant, faire fuir les amateurs d’art), devient compliqué. Que les autres grands musées du monde restent très discrets, du moins publiquement, sur le vol à Paris, traduit leur inquiétude et leur vulnérabilité.
      Tous sont devant une équation complexe : une ouverture généreuse au public et la sécurisation d’objets encombrants, plus à leur affaire dans une banque. Mais « personne ne souhaite entrer dans un musée comme s’il entrait dans un coffre-fort », dit, le 20 octobre au New York Times, James Ratcliffe, un responsable, à Londres, de l’Art Loss Register, qui gère une base de données des objets volés.

      Laurence des Cars, la présidente du Louvre, est prête à installer un commissariat de police au sein de l’établissement, et ce serait une petite révolution. Mais aucun responsable ne veut transformer son musée en bunker, juste pour des bijoux.

      Alors que le Louvre va dépenser 400 millions d’euros pour creuser une salle consacrée à La Joconde, afin que le tableau ne vampirise plus la visite, les objets rehaussés de métaux précieux ne doivent-ils pas être externalisés ? Au Royaume-Uni, les joyaux de la couronne ne sont pas exposés à la National Gallery mais dans la Tour de Londres. Donc dans une prison. Il est vrai que, du côté d’Albion, l’affaire est sérieuse.

      #tourisme (ses faux frais)

    • Thomas Schlesser, historien de l’art : « Penser qu’un musée pourrait se défendre à coups de pistolet, c’est symptomatique d’une bêtise démagogique galopante »

      Pour l’auteur du roman « Les Yeux de Mona », le cambriolage au Louvre ne fait que rappeler la vulnérabilité du patrimoine.

      Lors de l’audition de la présidente-directrice du Louvre au Sénat, mercredi 22 octobre, l’élue UDI Annick Billon a interrogé Laurence des Cars : « Est-ce qu’il est question d’armer du personnel » dans le musée ? Cette piste de réflexion a été aussitôt écartée par Dominique Buffin, chargée de l’accueil et de la sécurité des lieux récemment dépouillés de huit bijoux estimés à 88 millions d’euros. Mais cette option faisait, de manière stupéfiante, un peu son chemin depuis le déclenchement de l’affaire.
      Ainsi, sans recevoir de démenti strict en plateau, Didier Giraud, une des « Grandes Gueules » de l’émission de débats de RMC, pouvait déclarer au mépris de toute réalité factuelle qu’au Royaume-Uni, « les mecs auraient pris une balle ». Le chroniqueur assume clairement son inclination pour un système de gardiennage avec des agents munis d’armes à feu. RMC a même cru bon d’isoler fièrement cette spéculation délirante sur ses réseaux.

      [Des Cars a évoqué l’implantation dune commissariat de police dans le Louvre, ndc]

      L’immense et légitime émoi du vol au Louvre, parce qu’il est en effet une catastrophe et qu’il y a eu des défaillances manifestes nécessitant des améliorations, offre sa surenchère d’idées douteuses, alors même que ces bijoux relèvent d’une histoire et d’une mémoire dont il serait d’abord honnête de dire qu’elles sont ignorées de la plupart. Interrogez donc quelqu’un au hasard sur la reine Hortense, le Second Empire ou même la définition d’un diadème… [Même le droitard] Sylvain Tesson a eu le mérite de la sincérité au micro de France Inter : « J’habite moi-même à 300 mètres du Louvre. Je n’étais jamais allé voir les joyaux de la Couronne. »

      Mais maintenant que les experts de la veille sont légion et que certains voudraient protéger les trésors nationaux avec des fusils dans les salles, il est temps de rappeler qu’un musée traduit la vulnérabilité ontologique de ce qui constitue un patrimoine. Celui-ci est d’autant plus à choyer, avec déférence et décence, sans imaginaire oppressif, qu’il est une matérialité fragile dont l’aura d’éternité est une pure illusion et, insistons, une illusion qu’entretient sa muséification. Le musée apparaît, fallacieusement, comme un sanctuaire existant depuis toujours et à jamais, capable de conserver des œuvres et des objets des contingences et des altérations du temps. D’où l’immense stupéfaction, d’ordre quasiment métaphysique et religieux, quand il y a une effraction en ses murs.

      Une invention récente

      En réalité, loin d’être immémoriaux, les musées sont une invention récente. Ils naissent entre la fin du XVIIIᵉ et le début du XIXᵉ siècle, dans le sillage des révolutions politiques et scientifiques qui, pour la première fois, organisent la conservation comme un acte public et rationnel. Le Louvre, dans sa forme moderne, est créé à la fois dans un climat d’iconoclasme révolutionnaire et avec l’ambition d’une transmission collective à travers les siècles. Comme l’écrit Krzysztof Pomian, historien majeur de l’institution muséale, il s’agit d’« une collection publique, s’adressant à tous, destinée à un avenir indéfiniment éloigné ». Mais cette pérennité absolue est évidemment un leurre.

      Dès la naissance du Louvre, l’artiste Hubert Robert avait matérialisé cette ambivalence, en peignant en 1796 un extraordinaire tableau montrant sa célèbre Grande Galerie en ruine, voûtes effondrées, sculptures décelées (pour les amateurs, le tableau est d’ailleurs… au Louvre, salle 932 de l’aile Sully). Comme si, à l’origine même de ce fantasme d’un patrimoine figé dans sa splendeur, il y avait la vision de sa finitude. Oui : même les musées, même La Joconde, de Léonard de Vinci, et La Liberté guidant le peuple, d’Eugène Delacroix, un jour, dans trois décennies ou dans cinq cent mille ans, redeviendront poussière.

      Ce que l’on croit conservé ne l’est pas indéfiniment. La conservation n’est jamais qu’un sursis qui n’ose pas dire son nom. Le musée n’est pas un refuge hors-sol, hors temps, hors d’atteinte ; il doit encore moins être une enclave sécuritaire. C’est un espace d’exposition au sens plein – où les œuvres sont à la fois montrées et exposées aux risques, irréductiblement.

      Penser qu’un musée pourrait se défendre à coups de pistolet, c’est symptomatique d’une bêtise démagogique galopante, et c’est trahir la vocation de tels lieux, qui appellent à la dignité et à la contemplation, et plus encore, à une prise de conscience humble et engageante. Ce que l’humanité a produit de plus beau, et de supposément impérissable, est un matériau précaire. Il convient de soigner ce patrimoine avec des regards instruits et aimants, du mieux que nous le pouvons, sans être les dupes d’un fantasme d’éternité, ni les complices de quelque brutalité que ce soit.


      Hubert Robert - Vue imaginaire de la Grande Galerie du Louvre en ruines, Paris, Musée du Louvre

      #histoire_de_l'art

    • [ADN et pédigrée] Cambriolage au Louvre : ce que l’on sait des deux suspects interpellés
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/10/26/cambriolage-au-louvre-ce-que-l-on-sait-des-deux-suspects-interpelles_6649691

      L’un des suspects a été interpellé à l’aéroport de Roissy alors qu’il s’apprêtait à quitter le territoire pour l’Algérie. Les deux hommes étaient déjà connus des services de #police pour des faits de vols.

      Les enquêteurs de la BRB, qui surveillaient les deux suspects depuis quelques jours en espérant remonter jusqu’au butin et identifier leurs complices, ont alors précipité leurs opérations. Le deuxième suspect a été interpellé concomitamment en Seine-Saint-Denis.

      Agés d’une trentaine d’années, tous deux étaient connus des services de police pour des vols sophistiqués, précise une source au Monde. Leur garde à vue pour vol en bande organisée et association de malfaiteurs criminelle peut durer jusqu’à quatre-vingt-seize heures. A ce stade des investigations, les enquêteurs de la #BRB et de l’Office central de lutte contre le trafic de biens culturels (OCBC), chargés des investigations, sont toujours à la recherche du butin, estimé à 88 millions d’euros, et des autres complices.

      [...]

      Plus « de 150 prélèvements de traces ADN, papillaires et autres ont été réalisés » sur les lieux du cambriolage, avait annoncé jeudi Laure Beccuau. Dans leur fuite, les malfaiteurs avaient notamment abandonné des gants, un casque, deux disqueuses, un chalumeau, un gilet jaune et un talkie-walkie sur lesquels des prélèvements ont été effectués. Les voleurs n’ont pas eu le temps d’incendier le camion-élévateur, qui a aussi été examiné par les enquêteurs.

      La procureure avait également expliqué que la #vidéosurveillance avait « permis de suivre » le parcours des malfaiteurs à Paris et dans des départements limitrophes, évoquant aussi des images disponibles grâce aux caméras publiques ou privées (autoroutes, banques, entreprises…) à exploiter. Autant d’éléments qui ont permis d’identifier les deux suspects interpellés samedi.

      https://justpaste.it/a5bg6

  • La storia di Sophia, una delle diecimila vittime di Altamides
    https://irpimedia.irpi.eu/surveillancesecrets-first-wap-vittima

    Contattata dai giornalisti, non riusciva a spiegarsi chi ne volesse tracciare i movimenti. Poi ha ricostruito l’incontro con un uomo pakistano che le faceva avances con molta insistenza L’articolo La storia di Sophia, una delle diecimila vittime di Altamides proviene da IrpiMedia.

    #Diritti #Mondo #Sorveglianza #SurveillanceSecrets

  • Oppositori politici del Ruanda tra i target di Altamides, il software di First Wap
    https://irpimedia.irpi.eu/surveillancesecrets-first-wap-tracciati-oppositori-ruanda

    Tracciati i numeri di telefono delle persone più vicine a due dei principali leader dell’opposizione in esilio in Sudafrica nel 2012. Il governo di Kigali nega ogni responsabilità, ma è accusato di aver condotto una campagna per eliminare gli oppositori L’articolo Oppositori politici del Ruanda tra i target di Altamides, il software di First Wap proviene da IrpiMedia.

    #Diritti #Mondo #Sorveglianza #SurveillanceSecrets

  • Anche un ex manager di Eni tra i bersagli del software che traccia i telefoni
    https://irpimedia.irpi.eu/surveillancesecrets-first-wap-manager-eni-roberto-casula-bersaglio

    È Roberto Casula, tracciato nell’aprile 2013. Eni aveva dato mandato a investigatori privati che si sono appoggiati ad Altamides, il sistema di First Wap. Che però in Italia può essere utilizzato solo dalla polizia giudiziaria L’articolo Anche un ex manager di Eni tra i bersagli del software che traccia i telefoni proviene da IrpiMedia.

    #Diritti #Mondo #Sorveglianza #SurveillanceSecrets

  • #JOP2030 : un projet à contre-courant de la #transition Alpine

    Selon ses principaux promoteurs, les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 seront structurants pour les Alpes françaises. Il ne s’agit pas seulement de penser l’avenir des #stations_de_ski, comme le suggère l’#Association_Nationale_des_Maires_de_Stations_de_Montagne (#ANMSM), mais de redéfinir rien de moins que les contours d’une « #civilisation_alpine [1] » (sic). Derrière les grands discours, quel projet de #territoire se dessine, ou se confirme avec les JOP 2030 ?

    La vie des montagnard·es est marquée par le #relief. Il remplit notre champ de vision, contraint et draine nos déplacements, définit notre #identité. Le relief est omniprésent dans nos vies. Cette géomorphologie contraignante est aussi protectrice : contre les canicules, contre les sécheresses - précipitations plus abondantes, stockage de l’eau en altitude sous forme de glace... Contre les excès humains aussi, par la résistance naturelle qu’elle oppose à l’#aménagement, à la domination de l’environnement, à l’organisation des concurrences inter-humaines, et contre le vivant.

    Le projet de territoire porté par les promoteurs des JOP 2030 voudrait briser cette résistance. Pour Renaud Muselier, président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA), les jeux olympiques et paralympiques sont "une opportunité pour l’accélération de la #transition_montagnarde”. Mais laquelle ? Dans une interview pour La Provence (14/10/23), il répondait à la question de l’impact du projet sur l’environnement : "Quand on parle de bilan carbone, mettre 5 heures pour faire Marseille Briançon, est-ce acceptable ? L’embouteillage à Tallard, on l’accepte ?"

    Il pointait ainsi du doigt un de ces embouteillages des vendredi et dimanche soirs de la saison de ski, dans lequel se retrouvent coincés, les skieurs venus des grandes métropoles régionales du sud : Montpellier, Marseille, toute la côte varoise. Dont un certain Renaud Muselier, qui vient faire du ski en Haute Ubaye en passant par... Tallard pour accéder à son lieu de villégiature. D’autres “bouchons” ou goulets d’étranglement existent partout dans les Alpes françaises (et ailleurs) conséquence d’une hyper affluence ponctuelle qui engorge les massifs avec une régularité métronomique.

    Voilà qui illustre la vision de territoire portée par les JOP 2030, et ses promoteurs : en pleine période de restriction budgétaire massive, il s’agit essentiellement de favoriser quelques grands #domaines_skiables (deux pour les Alpes du sud) et l’amélioration des #axes_routiers pour y parvenir. Et ce au détriment des #populations_locales, des #services_publics, de l’#environnement… mais également de tous les "petits territoires”, éloignés (à peine) de ces domaines skiables et des grands axes qui y mènent. Ces “petits” territoires comprennent un ensemble de stations de #moyenne_montagne qui souffrent déjà particulièrement du #réchauffement_climatique, et dont les premières fermetures emblématiques se succèdent déjà.

    Et le #ferroviaire, demanderez-vous ? Dans cette vision territoriale, le ferroviaire est certes mis en avant par les porteurs du projet, comme caution verte : il s’agit de passer, d’ici aux jeux, d’un temps de trajet de quasi 5 heures à 3h30 entre Marseille et Briançon. Or, les temps de parcours actuels sont le résultat d’une politique de délaissement du #rail, depuis de nombreuses années, portée par les mêmes qui promeuvent les jeux. L’état du #réseau_ferroviaire alpin est tellement dégradé, qu’il paraît difficile de le rendre rapidement à nouveau attractif d’ici 2030. De sorte que l’option la plus "réaliste" pour réduire le temps de trajet serait... de ne pas s’arrêter dans les gares intermédiaires !

    La vision portée par les JOP 2030 est celle de la #spécialisation du territoire, celui des Alpes, au service d’un #tourisme_de_masse issu des grands centres urbains. #Chamonix, #Briançon en sont des exemples emblématiques. La population locale, habitant à l’année, est progressivement chassée des hautes vallées spécialisées dans le ski, devenues trop chères, et invivables au quotidien. Elle subit l’arrivée d’un nombre toujours croissant de vacancier·es, pour qui tout est organisé, dans une “montée en gamme” de l’accueil. On perçoit ainsi deux réalités et logiques distinctes, celle des habitant·es des territoires de montagne, et celle des consommateur·ices d’un territoire.

    Issue des catégories aisées des grands centres urbains, sous pression des contraintes citadines du quotidien, cette population de vacancier·es a besoin, le temps du weekend et des #vacances, de fuir leur lieu de vie, pour s’aérer, pour décompresser. Iels deviennent consommateur·ices d’un territoire, avec le besoin impérieux de changer d’air, de se détendre et de couper d’un quotidien oppressant... pour mieux se présenter le lundi matin au bureau avec la mine hâlée de ceux qui ont les moyens de s’échapper momentanément de l’"enfer" des grandes cités, et de profiter, le temps du weekend ou de vacances, des espaces naturels et des bienfaits de l’activité en extérieur.

    La spécialisation de territoire (au service des centres urbains) que dessine le #surtourisme se retrouve aussi dans d’autres secteurs d’activités : l’#énergie par exemple. Dans les Alpes du sud, des zones “excentrées” sont vues comme territoire à “faible pression foncière”, qui laisse la place au développement des #énergies_renouvelables, solaire photovoltaïque entre autres (du fait du climat particulièrement ensoleillé) et l’apparition de #centrales_photovoltaïques géantes, remplaçant forets et espaces naturels “sauvages”.Ou encore le secteur des #déchets, les arrières pays servant de zone de stockage des déchets des grandes agglomérations.

    Cette #spécialisation_territoriale n’a pourtant pas d’avenir dans le contexte actuel de réchauffement climatique. Dès janvier 2023, la trajectoire climatique de la France a été définie par le ministère de la Transition écologique à +4 degrés à l’horizon 2100, moins de 8 ans après les Accords de Paris qui stipulaient un objectif de 1,5 degrés. Dans les Alpes, ces +4 degrés pourraient être atteints bien avant 2100, ce territoire se réchauffant plus vite que le reste du pays. Quelle hausse de température pouvons nous y attendre et craindre +5, + 6 degrés ?... Une étude européenne sur plus de 2500 stations de ski montrent qu’à plus 4 degrés, 98 % des stations auront un problème existentiel d’enneigement.

    Dans ce contexte de réchauffement climatique fort, les territoires de montagne sont à la fois fragiles, et pourvus d’atouts importants : fraîcheur (relative), réserves en eau, espaces naturels disponibles pour la biodiversité… Un ensemble de facteurs nécessaires à la résilience de territoire. La #revitalisation du territoire alpin ne pourra pas être activée sans prendre en compte ses particularités et sans sa population. Et c’est pourtant ainsi qu’est bâti le projet JOP 2030 ! Il paraît urgent de remettre la #vie_montagnarde, celle des habitant·es des Alpes, au cœur de la question de l’avenir des massifs, au cœur de la question de la #transition_alpine ; Urgent de rompre avec un modèle de consommation de la montagne, urgent d’intégrer les populations pour construire de nouvelles orientations.

    https://france.attac.org/nos-publications/lignes-d-attac/article/jop-2030-un-projet-a-contre-courant-de-la-transition-alpine
    #JO2030 #jeux_olympiques #Alpes #migrations #consumérisme #climat #changement_climatique

  • First Wap, la discrète entreprise de cybersurveillance chargée de suivre à la trace journalistes, personnalités et cadres dirigeants
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2025/10/14/first-wap-la-discrete-entreprise-de-cybersurveillance-chargee-de-suivre-a-la

    First Wap voit le jour en 1999, en Indonésie. Elle est fondée par un Autrichien – Josef Fuchs, mort en 2024 – et un Français – Pascal Lalanne –, résidents de longue date du pays. La société conçoit d’abord une messagerie électronique basée sur des SMS. Le succès de l’application est balayé par l’explosion de la bulle Internet : en 2004, le cofondateur français quitte l’entreprise, revend ses parts et First Wap doit se réinventer. Forte de ses partenariats avec de nombreux #opérateurs_télécoms, elle va se lancer dans la #surveillance_téléphonique. Josef Fuchs, ancien de Siemens et de Telkomsel, l’un des plus importants opérateurs télécoms indonésiens, en sera le principal artisan avec un autre cadre de ce groupe, l’Allemand Jonny Goebel.

    Leur outil de pistage, appelée FastTrax puis Altamides, émerge au milieu des années 2000. Elle permet de géolocaliser les téléphones portables, puis, plus tard, d’intercepter les appels et SMS. Pour cela, elle profite du fonctionnement des opérateurs téléphoniques : pour acheminer les communications, ils doivent savoir à quelle antenne-relais chaque téléphone est connecté, souvent la plus proche. Connaître cette antenne-relais, c’est donc savoir où se trouve le téléphone.

    First Wap, profitant du laxisme généralisé de l’industrie des télécoms en matière de sécurité, n’a qu’à silencieusement interroger les opérateurs pour géolocaliser n’importe quel appareil dans le monde. La firme propose aussi le détournement de SMS, utile pour prendre le contrôle d’un compte WhatsApp en captant le message contenant le code pour transférer le compte d’un téléphone à un autre.

    A son lancement, First Wap est pionnière. « Ils étaient les premiers, et pendant quelques années parmi les leaders de ce marché », selon une source au sein de l’industrie de la surveillance israélienne. « Je me souviens de quand j’ai vu l’outil pour la première fois. J’étais stupéfait, absolument stupéfait  », se remémore un ancien commercial de l’entreprise.

    Discrétion garantie

    Altamides – proposée à un prix pouvant atteindre 20 millions de dollars – diffère des logiciels espions comme ceux vendus par les sociétés israéliennes NSO Group ou Paragon Solutions, en ce qu’il ne pénètre pas le #téléphone. Son action étant cantonnée aux réseaux auxquels le téléphone visé est connecté, elle est complètement invisible et indétectable.

    https://justpaste.it/aiybv

    #Altamides #Logiciel_espion #cybersurveillance #géolocalisation

  • First Wap, la pioniera delle società di #Sorveglianza di cui non avete mai sentito parlare
    https://irpimedia.irpi.eu/surveillancesecrets

    Dal 2007 sfrutta vulnerabilità della rete telefonica per localizzare telefoni, registrare chiamate e dirottare il traffico internet. Tra le vittime il giornalista Nuzzi e un ex manager Eni. Un archivio segreto svela la rete di attività L’articolo First Wap, la pioniera delle società di sorveglianza di cui non avete mai sentito parlare proviene da IrpiMedia.

    #Diritti #Mondo #SurveillanceSecrets

  • Nel 2012 il giornalista che indagava sul pontificato di Ratzinger è stato spiato
    https://irpimedia.irpi.eu/surveillancesecrets-first-wap-indagini-vaticano-gianluigi-nuzzi

    L’attività è cominciata alla pubblicazione del libro di Nuzzi Sua Santità, il 18 maggio, e si è interrotta il giorno dopo l’arresto della sua fonte, la settimana dopo. Le rivelazioni dell’archivio di First Wap L’articolo Nel 2012 il giornalista che indagava sul pontificato di Ratzinger è stato spiato proviene da IrpiMedia.

    #Diritti #Mondo #Sorveglianza #SurveillanceSecrets

  • Entry/Exit System : un pas de plus vers la #surveillance généralisée

    Présenté comme un « simple » outil facilitant le contrôle des frontières et dont la seule conséquence négative serait le temps d’attente aux postes frontières, le système d’entrée et de sortie de l’#espace_Schengen (#EES)[1], mis en œuvre à partir du 12 octobre 2025, est en réalité un outil supplémentaire au service d’une #surveillance_généralisée des personnes en migration.

    L’EES est un système européen de contrôle des frontières prévu par le Règlement (UE) 2017/2226 du 30 novembre 2017. Reportée depuis plusieurs années, sa mise en œuvre est intervenue hier, le 12 octobre 2025.

    Ce nouveau système permet l’#enregistrement des #entrées_et_sorties des ressortissants de pays tiers aux #frontières_extérieures de l’espace Schengen. Il doit permettre de remplacer le tamponnage des passeports et faciliter l’#identification des personnes qui n’ont pas le droit d’entrer ou qui ont dépassé la durée autorisée de leur séjour dans les pays européens.

    Mais l’EES vient surtout s’ajouter à un arsenal déjà important de surveillance des personnes en migration dont l’objectif est de restreindre et contrôler davantage le nombre de personnes étrangères entrant sur le territoire de l’Union européenne. L’Anafé a récemment publié un outil recensant les fichiers dans lesquels les personnes étrangères sont inscrites – la partie sur l’EES est développée à la page 90[2].

    Ce sempiternel développement de nouvelles technologies aux fins de contrôles a pour finalité de nourrir la politique européenne de #tri des personnes se présentant aux frontières, et pour conséquence la #criminalisation des personnes étrangères.

    https://anafe.org/entry-exit-system-un-pas-de-plus-vers-la-surveillance-generalisee
    #technologie #frontières #migrations #contrôles_frontaliers

  • Khrys’presso du lundi 13 octobre 2025
    https://framablog.org/2025/10/13/khryspresso-du-lundi-13-octobre-2025

     Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière. Tous les liens listés ci-dessous sont a priori accessibles librement. Si ce n’est pas le cas, pensez à … Lire la suite­­

    #Veille #Claviers_invités #GAFAM #Internet #Revue_de_web #Revue_hebdo #Surveillance #veille #webrevue

  • Aux frontières de l’Europe, un arsenal technologique contre les migrants

    "L’Union européenne déploie à ses frontières des technologies civiles et militaires pour bloquer les flux migratoires. De la Pologne à la Serbie, enquête sur le complexe techno-industriel qui érige la « forteresse Europe »."

    – Épisode 1/5 : En #Pologne, un mur de 190 kilomètres à travers la #forêt primaire
    – Épisode 2/5 : À Madrid, au Salon mondial de la #sécurité aux frontières, le #showroom des #technologies de #surveillance
    – Épisode 3/5 : Dans les #Balkans, des technologies contre les migrants qui se retournent contre la société civile
    – Épisode 4/5 : En #Italie, une #fouille intégrale des #téléphones
    – Épisode 5/5 : En #Bosnie, rencontre avec un passeur, entre les #drones et les #gangs

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-aux-frontieres-de-l-europe-un-arsenal-technologique-contre-les-mig
    #externalisation #militarisation_des_frontières #technologie #migrations #réfugiés #Europe #Trieste #route_des_Balkans #complexe_militaro-industriel
    #podcast #audio

    ping @reka @isskein @karine4

    • Épisode 1/5 : En Pologne, un mur de 190 kilomètres à travers la forêt primaire

      La forêt de Białowieża est l’une des dernières forêts primaires d’Europe, préservée de l’action humaine depuis près de 12 000 ans. Mais son visage a radicalement changé depuis 2021, lorsque le Bélarus, un pays voisin de la Pologne et allié de la Russie, a créé une crise migratoire.

      Le Bélarus a entrepris de délivrer des visas à des familles venant d’Afrique et du Moyen-Orient, pour les acheminer jusqu’à Minsk, la capitale bélarusse. De là, les autorités bélarusses poussaient les exilés vers la Pologne.

      En réponse, la Pologne a entrepris d’ériger un mur à travers la forêt : une immense barrière de métal, longue de 190 kilomètres, haute de cinq mètres, protégée par trois rangées de barbelés, des caméras, des drones et des hélicoptères.

      “Il y a 5 300 caméras, le mur, des soldats, et un système de détection : si quelqu’un touche le mur, nous sommes avertis immédiatement de ce qu’il se passe”, explique Katarzyna Zdanowicz, la porte-parole des gardes frontières pour la région de Białowieża.

      On a parfois l’impression que la frontière sépare aussi deux manières de comprendre la situation. D’un côté, les activistes, qui parlent de femmes, d’enfants, et de familles qui fuient la guerre. De l’autre, le gouvernement Polonais qui dénonce une “menace” migratoire ; le premier ministre Donald Tusk va jusqu’à parler d’une “guerre hybride” dont les munitions seraient les personnes exilées envoyées sur son territoire. En conséquence, la Pologne a autorisé les gardes frontières à utiliser des armes à feu contre les réfugiés en juillet 2024. En mars 2025, le pays a carrément suspendu le droit des exilés à demander l’asile en arrivant dans le pays. Toute personne interceptée sur le territoire est systématiquement refoulée vers le Bélarus.

      Les militants sur place dénoncent des violations régulières des droits humains à l’encontre des exilés, perpétrés par les gardes frontières bélarusses, mais aussi polonais.

      https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-grand-reportage/en-pologne-un-mur-de-190-kilometres-a-travers-la-foret-primaire-7597265

      #murs #barrières_frontalières #Grupa_Granica #Belarus #caméras #caméras_de_surveillance #détection #Biélorussie #contrôles_frontaliers #militarisation_des_frontières #menaces #menace_migratoire #guerre_hybride #décès #mourir_aux_frontières #gardes-frontières #armes_à_feu #refoulements #push-backs #Krynki #drones

    • Épisode 2/5 : À Madrid, au #Salon_mondial_de_la_sécurité_aux_frontières, le #showroom des technologies de surveillance

      En Pologne, comme dans la plupart des pays que nous avons traversés pour cette enquête, les zones frontalières sont soumises à des régimes d’exception. Cette culture du secret qui entoure les frontières, nous avons pu en faire l’expérience à Madrid, lors du #World_Border_Security_Congress.

      En Pologne, comme dans la plupart des pays que nous avons traversés pour cette enquête, les zones frontalières sont soumises à des régimes d’exception : pas le droit de photographier, pas le droit d’enregistrer avec un micro, et une liberté de circuler très relative. Cette culture du secret qui entoure les frontières, nous avons pu en faire l’expérience dans la capitale espagnole, lors du World Border Security Congress, le salon mondial de la sécurité aux frontières, qui réunit les acteurs majeurs de l’industrie de la surveillance et de la répression de l’immigration. L’événement est tout simplement interdit aux journalistes : il nous faut nous faire accréditer par une ONG pour pouvoir y accéder, et découvrir les dernières innovations technologiques en matière de surveillance des frontières.

      Se pensant loin des micros de la presse, #Hans_Leijten, le directeur exécutif de #Frontex, livre un discours extrêmement dur :

      “Laissez-moi être clair : dans le monde actuel, il ne peut plus y avoir de repas gratuit, expose-t-il. La coopération ne fonctionne pas à sens unique. Si un pays veut bénéficier des fonds européens, alors il doit répondre aux demandes de l’Union européenne. Cela veut dire qu’il doit accepter les protocoles de réadmission, renforcer ses contrôles aux frontières, et combattre les réseaux de passeurs”.

      Ce salon, intitulé ’Patrouiller la périphérie’, incarne aussi le plan européen consistant à “externaliser les frontières”, c’est-à-dire à s’implanter dans les pays voisins de l’Union pour y stopper l’immigration avant qu’elle atteigne son territoire.

      https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-grand-reportage/a-madrid-au-salon-mondial-de-la-securite-aux-frontieres-le-showroom-des-

      #régimes_d'exception #intelligence_artificielle #AI #IA #industrie_de_l'armement #surveillance_mobile #usage_dual #complexe_militaro-industriel #adaptation #façonner_le_monde #business #patrouiller_la_périphérie #gestion_des_frontières

      –-

      –-> citation, voilà ce que dit Hans Leijten dans le salon intitulé « Patrouiller la périphérie », à partir de la min 4,45 :

      « Si nous voulons de la stabilité et du contrôle, alors nous devons construire les mécanismes de sécurité, et pas seulement à nos frontières, mais aussi loin, au-delà. Cette approche a porté ses fruits en Europe, dans les Balkans, où nous avons utilisé une combinaison de gestion des frontières, d’engagement politique et de traités commerciaux qui ont donné de bons résultats »

    • Épisode 3/5 : Dans les Balkans, des technologies contre les migrants qui se retournent contre la société civile

      En s’appuyant sur l’idée “d’externalisation des frontières”, l’Union européenne justifie sa présence dans les pays hors de l’Union européenne, pour y stopper l’immigration avant même que celle-ci n’atteigne son territoire.

      "Tout ce qui concerne la migration en #Bosnie-Herzégovine est payé par l’Union européenne ou les États membres, explique la chercheuse #Nidžara_Ahmetašević, spécialisée dans la migration. Par exemple, la semaine dernière, l’Union européenne a donné des drones pour les gardes frontières. La semaine précédente, elle a donné des voitures."

      Ces #financements proviennent notamment des #Fonds_de_Pré-Accession, des fonds d’aide au développement dont la vocation initiale est d’aider les pays voisins de l’Europe à atteindre un niveau de développement économique suffisant pour devenir des partenaires commerciaux, voire pour intégrer l’Union. En se penchant sur le détail des transactions, on découvre qu’une vaste partie des financements servent en réalité à financer des infrastructures de contrôle de la migration.

      Mais en déployant des technologies de type militaire chez ses voisins aux régimes politiques instables, l’Union européenne risque de créer des situations conflictuelles : ces technologies prévues contre la migration peuvent se retourner contre la société civile.
      Nous nous sommes rendus en Serbie, où les étudiants manifestent depuis plusieurs mois contre le gouvernement d’Aleksandar Vučić. En novembre 2023, le gouvernement de Vučić a déployé une arme nouvelle contre des exilés, dans le nord du pays : un canon à son. En mars 2025, ce même canon à son a, d’après plusieurs témoignages, été utilisé contre les étudiants. “La Serbie est un laboratoire pour tester les technologies aux frontières terrestres, exopse Mila Bajić, de l’association SHARE. Puisque la Serbie ne fait pas partie du territoire européen, il n’y a pas de loi européenne pour encadrer les pratiques, tel que le règlement européen sur l’intelligence artificielle, et les demandes d’accès aux informations publiques ne fonctionnent pas. Le gouvernement peut donc agir sans rien révéler.”

      https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-grand-reportage/dans-les-balkans-des-technologies-contre-les-migrants-qui-se-retournent-

      #externalisation_des_frontières #Balkans #route_des_Balkans #développement #aide_au_développement #intégration_européenne #drones #test #laboratoire #Serbie #frontières_terrestres #canon_à_son #armes_sonores #barrière_acoustique

      –-

      sur les #murs_sonores, voir aussi :
      La Grèce allonge son mur et le fortifie avec un #mur_acoustique...
      https://seenthis.net/messages/920711
      #mur_sonore

      et aussi :
      –> La police serbe a déjà utilisé des #armes_sonores sur des migrants
      https://seenthis.net/messages/1104712

    • Épisode 4/5 : En #Italie, une fouille intégrale des #téléphones

      L’arsenal technologique déployé aux frontières a plusieurs missions, formalisées dans les documents de la Commission européenne : détecter, contrôler, et surveiller. En Italie, dans la ville portuaire de Trieste, ces technologies ont un impact immédiat pour la vie des exilés.

      D’après de nombreux témoignages que nous avons recueillis, les policiers fouillent de manière quasi-systématique les téléphones des exilés lorsque ceux-ci effectuent leur demande d’asile.

      “Ce qu’ils font, c’est qu’ils lisent vos messages sur #WhatsApp, ils regardent vos photos, ils regardent votre historique de recherche, explique Smaïl, qui a fui le Pakistan il y a plusieurs années et vient en aide aux exilés à Trieste après avoir réussi lui-même à régulariser sa situation. S’ils voient que vous avez cherché “Milan”, ils vous disent : “Tu as cherché des informations sur Milan, alors pars à Milan”. Il y a même des gens qui m’ont dit qu’ils avaient effacé toutes les données sur leur téléphone, mais que la police a trouvé les informations quand même. S’ils font ça, c’est parce qu’ils trouvent qu’en tant que cité frontalière, ils en font déjà assez, alors ils cherchent des excuses pour renvoyer ceux qui demandent l’asile.

      Ce que décrit Smaïl ressemble point par point au logiciel #Le_Kiosk, développé par l’entreprise israélienne #Cellebrite, dont nous avons pu avoir une démonstration au cours du Salon Mondial de la Sécurité aux Frontières. En 2019, la France a annoncé équiper pas moins de 500 commissariats avec le #logiciel Le Kiosk. Ces technologies de surveillance rendent le parcours migratoire toujours plus complexe. Pourtant, les chiffres montrent que les entrées dans l’Union ne baissent pas ; en revanche, les routes sont de plus en plus dangereuses. “Vouloir stopper le mouvement des humains, c’est comme se battre contre la nature, contre la mer : les gens circulent, ils doivent trouver des moyens de passer”, regrette Smaïl.

      https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-grand-reportage/en-italie-une-fouille-integrale-des-telephones-3950382
      #smartphones #Trieste #danger #parcours_migratoire

    • Épisode 5/5 : En Bosnie, rencontre avec un passeur, entre les drones et les gangs

      A ce stade de l’enquête, une question continuait de nous tarauder : comment, avec tout cet arsenal pour protéger les frontières, expliquer que les entrées illégales dans l’Union européenne continuent ?

      Un paradoxe nous apparaît à la fin de cette tournée des pays des Balkans : les drones, logiciels de surveillance, caméras thermiques et autres équipements, ne sont peut-être pas essentiels pour comprendre la réalité de la migration. Au bout de trois jours passés à #Bihac, dans le nord de la #Bosnie, on comprend déjà beaucoup de la réalité de ce petit village, dernière étape avant l’entrée dans l’Union européenne : sur la place principale, il y a des exilés qui ont été refoulés la veille, qui se reposent pendant la journée, et dont tout le monde sait qu’ils vont retenter leur chance le soir-même. Et puis, il y a ces visages de gens qui ne partent pas, pendant 6 mois, 1 an : eux, ce sont les passeurs. Ici, tout le monde les connaît, ils se baladent dans la rue principale avec leurs clients, dans l’impunité la plus totale. Petit à petit, ces passeurs se sont structurés en réseau ; ces réseaux sont devenus des gangs.

      Nous nous sommes entretenus avec Ali, un passeur qui vit à la frontière entre la Bosnie et la Croatie depuis bientôt huit ans. La première fois que nous l’avons rencontré, c’était à un arrêt de bus. Il faisait presque 40°, le soleil cognait fort, et Ali venait de récupérer un groupe d’Afghans qu’il s’apprêtait à faire traverser. Il avait un pull noir à manches longues. Il a accepté de relever une de ses manches pour nous montrer son bras - lacéré par des cicatrices, du poignet jusqu’à l’épaule.

      “Ils nous ont torturés, raconte-t-il. Ils ont appelé mes parents, ils leur ont dit : “envoyez de l’argent !”. Ils nous ont tout fait. Mais crois-moi, après ça, les cicatrices font de toi quelqu’un de respecté dans le milieu.”

      Comment les passeurs arrivent-ils à déjouer les caméras thermiques, les drones, les patrouilles ? Ali ne nous donnera pas tous ses secrets, mais il laisse en deviner quelques-uns.

      “Je connais les horaires, l’heure à laquelle les gardes frontières font leur ronde, l’heure à laquelle ils sont dans la ville, détaille Ali. Mais il faut aussi s’en remettre à la chance.Tu crois que les caméras et les senseurs pourront m’arrêter. Laisse-moi te dire quelque chose : tu viens de l’Union européenne. Il y a des caméras de surveillance dans toutes les rues, dans tous les magasins. Est-ce que ça empêche les voleurs ? Non, jamais.”

      https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-grand-reportage/en-bosnie-rencontre-avec-un-passeur-entre-les-drones-et-les-gangs-839123
      #passeurs