• Un long fil [de @Themislv_vls] sur les différentes prises de positions de B. STIEGLER ces dernières années, « puisque certains semblent étonnés du partage de ce tweet antisémite »
    https://threadreaderapp.com/thread/1678894070767206407.html

    (...) dès le 22 octobre 2020, en réponse à l’éditorial de Horton, Emily Mendenhall, à l’origine [du concept de syndémie],

    https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(20)32218-2/fulltext
    🧵explique qu’il est erroné de qualifier le COVID-19 de "syndémie" de façon générale, que le contexte compte et qu’une telle erreur passe complètement à côté de l’intérêt même du concept.
    🧵E. Mendenhall explique ainsi que “la syndémie nous permet de reconnaître comment les facteurs politiques et sociaux favorisent, perpétuent ou aggravent l’émergence et le regroupement des maladies”, citant la Nouvelle Zélande où le leadership politique en réponse à la crise
    🧵a été exemplaire, de telle sorte que le Covid n’y est pas syndémique.
    Le concept n’est donc en aucun cas utilisé pour nier la réalité de la pandémie ni la nécessité d’une prévention.


    cet excellent fil recense les trucages de cette bonimenteuse et bon nombre des membres cultivés des sections d’assaut de l’obscurantisme. n’hésitons pas à le communiquer aux gens de gauche, syndicalistes, révolutionnaires éventuellement intéressés par cette extension de la gauche de droite. ping @rezo

    edit en plus d’inspirer les orientations de LFI, Stiegler siège au comité de surveillance de l’#ARS Aquitaine et est vice-présidente du comité d’#éthique du #CHU de Bordeaux
    .

    #toctoc #pandémie #mensonge #obscurantisme_cultivé #santé_publique #philosophie #Barbara_Stiegler #confusionisme #GBD #protection_ciblée #syndémie (dévoyée) #enfants #minimisers #prévention #Alt_Right #covid_19 #gauche #gauchededroite #antivax #Aude_Lancelin

    • La perspective de B. Stiegler et F. Alla, appliquée au Covid19, combine à la fois une conception particulière de la santé publique et de la prévention, une négligence des droits fondamentaux à la vie et à la santé et une ignorance de l’état des connaissances scientifiques.
      Tout cela participe à l’adoption de positions contraires à l’éthique et à une dérive frôlant l’eugénisme.
      […]
      Enfermée dans un cadre d’analyse bancale rejetant la prévention réduite à un acte médical quand elle relève avant tout de la santé publique, collective, enfermée dans un cadre ouvrant la voie aux idées délétères, contraires à l’éthique, validistes et frôlant l’eugénisme, B. Stiegler continue donc d’ignorer les victimes d’un néolibéralisme qui a porté l’absence de prévention au rang de normes pour la préservation des profits, quoi qu’il en coûte pour la population.
      […]
      On peut sérieusement se demander, et avec inquiétude, pourquoi cette philosophe enfermée dans son récit, étanche à l’éthique et aux faits, tenant un discours si délétère, est encore associée aux luttes de la gauche et aux institutions & autorités sanitaires.

    • tenant un discours si délétère, est encore associée aux luttes de la gauche

      Parce qu’à « gauche » il y a un paquet de gens qui ont les mêmes opinions moisies que cette « philosophe » et qui sont bien contents d’intellectualiser leur connerie en citant Stiegler.

    • Trois ans déjà. L’un des effets politiques parmi les plus décisifs de la pandémie, c’est d’avoir conduit à l’émergence d’une nouvelle gauche de droite. Non gouvernementale cette fois, elle s’est créée « par le bas ». Ce qui la rend autrement dangereuse. Pour ma part, c’est par elle que l’irrespirable domine.
      « Critique » du « système » elle est excrément - le correcteur m’a suggéré un lapsus signifiant, je le garde ! - [extrêmement] composite, elle inclue tout aussi bien politiciens et gauchistes extra-parlementaires, écologistes qu’anarchistes, intellectuels et Gilets jaunes, insiders et outsiders. Terreau d’une fascisation qui n’en porte pas le nom, on la voit et la rencontre partout.
      Headshot. Le taf de snipper réalisé par @Themislv_vls suffira pas. Mais on peut imaginer que d’autres s’en saisiront, pour déciller, pour réouvrir à une position critique, une pensée et des actes qui ne reposeraient pas sur la falsification, la confusion plus ou moins délibérée.

  • De la #démocratie en #Pandémie. #Santé, #recherche, #éducation

    La conviction qui nous anime en prenant aujourd’hui la parole, c’est que plutôt que de se taire par peur d’ajouter des polémiques à la confusion, le devoir des milieux universitaires et académiques est de rendre à nouveau possible la discussion scientifique et de la publier dans l’espace public, seule voie pour retisser un lien de confiance entre le savoir et les citoyens, lui-même indispensable à la survie de nos démocraties. La stratégie de l’omerta n’est pas la bonne. Notre conviction est au contraire que le sort de la démocratie dépendra très largement des forces de résistance du monde savant et de sa capacité à se faire entendre dans les débats politiques cruciaux qui vont devoir se mener, dans les mois et les années qui viennent, autour de la santé et de l’avenir du vivant.

    https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Tracts/De-la-democratie-en-Pandemie

    –-

    Et une citation :

    « La conviction qui nous anime en prenant aujourd’hui la parole, c’est que plutôt que de se taire par peur d’ajouter des #polémiques à la #confusion, le devoir des milieux universitaires et académiques est de rendre à nouveau possible la discussion scientifique et de la publier dans l’espace public, seule voie pour retisser un lien de confiance entre le #savoir et les citoyens, lui-même indispensable à la survie de nos démocraties. La stratégie de l’ _#omerta_ n’est pas la bonne. Notre conviction est au contraire que le sort de la démocratie dépendra très largement des forces de résistance du monde savant et de sa capacité à se faire entendre dans les débats politiques cruciaux qui vont devoir se mener, dans les mois et les années qui viennent, autour de la santé et de l’avenir du vivant. »

    #syndémie #désert_médical #zoonose #répression #prévention #confinement #covid-19 #coronavirus #inégalités #autonomie #état_d'urgence #état_d'urgence_sanitaire #exception #régime_d'exception #Etat_de_droit #débat_public #science #conflits #discussion_scientifique #résistance #droit #santé #grève #manifestation #déni #rationalité #peur #panique #colère #confinement #enfermement #défiance #infantilisation #indiscipline #essentiel #responsabilité #improvisation #nudge #attestation_dérogatoire_de_déplacement #libéralisme_autoritaire #autoritarisme #néolibéralisme #colloque_Lippmann (1938) #économie_comportementale #Richard_Thaler #Cass_Sunstein #neuroscience #économie #action_publique #dictature_sanitaire #consentement #acceptabilité_sociale #manufacture_du_consentement #médias #nudging #consulting #conseil_scientifique #comité_analyse_recherche_et_expertise (#CARE) #conseil_de_défense #hôpitaux #hôpital_public #système_sanitaire #éducation #destruction #continuité_pédagogique #e-santé #université #portefeuille_de_compétences #capital_formation #civisme #vie_sociale #déconfinement #austérité #distanciation_sociale #héroïsation #rhétorique_martiale #guerre #médaille_à_l'engagement #primes #management #formations_hybrides #France_Université_Numérique (#FUN) #blended_learning #hybride #Loi_de_programmation_de_la_recherche (#LPR ou #LPPR) #innovation #start-up_nation #couvre-feu #humiliation #vaccin #vaccination
    #livre #livret #Barbara_Stiegler

    • secret @jjalmad
      https://twitter.com/jjalmad/status/1557720167248908288

      Alors. Pour Stiegler je veux bien des ref si tu as ça, j’avais un peu écouté des conf en mode méfiance mais il y a un moment, sans creuser, et je me disais que je devais pousser parce qu’en effet grosse ref à gauche

      @tapyplus

      https://twitter.com/tapyplus/status/1557720905828253698

      Check son entretien avec Desbiolles chez les colibris par ex. T’as aussi ses interventions à ASI, son entretien avec Ruffin, etc. C’est une philosophe médiatique, on la voit bcp. Et elle dit bien de la merde depuis qq tps. Aussi un live de la méthode scientifique avec Delfraissy

      Je suis pas sur le PC mais je peux te lister pas mal de sources. D’autant plus pbtk parce que « réf » à gauche. Mais dans le détail elle dit de la merde en mode minimiser le virus + méconnaissance de l’antivaccinisme. Et du « moi je réfléchit » bien claqué élitiste et méprisant.

      Quelques interventions de B Stiegler (en vrac) :
      Alors la première m’avait interpellée vu qu’elle était partie en HS complet à interpeller Delfraissy sur les effets secondaires des vaccins : https://radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-methode-scientifique/et-maintenant-la-science-d-apres-8387446
      (le pauve N Martin se retrouvait sur un débat complètement HS)

      Il y a d’une part la critique politique (rapport à la démocratie en santé publique), mais pour Stiegler outre la position « le gvt en fait trop, c’est des mesures autoritaires inutiles » elle se positionne par ailleurs sur des choix

      Parler des EI des vaccins sans balancer avec les effets de la maladie. Utilisation de la santé mentale des enfants pour critiquer le port du masque à l’école, lecture de la situation où il n’y aurait que gvt vs libertay, et en omettant complètement toutes les positions développées par l’autodéfense sanitaire et les militants antivalidistes et de collectifs de patients (immunodéprimés, covid long, ...) quand ils ne vont pas dans son narratif.

      Elle met de côté toutes les lectures matérialistes de la situation et sort clairement de son champ de compétence sur certains points, tout en ne donnant que très peu de sources et de points de référence pour étayer ses propos.

      Genre elle critique la pharmacovigilance et les EI mais elle ne donne jamais aucune source ni aucune information sur les outils, méthodes et acteurs qui travaillent ces sujets. Pareil quand elle dit découvrir les critiques des vaccination. Il y a de quoi faire avec les travaux historique sur la #santé_publique et la vaccination. A t elle interrogé des spécialiste de ces sujets, notamment les spécialistes qui ne vont pas que dans le sens de son propos. Elle semble manquer cruellement de référence historique sur le sujet alors qu’elle s’en saisit et qu’elle a une aura d’#intellectuelle_de_gauche, donc plein de monde lui accorde une confiance et trouve qu’elle est très pertinente sur certains sujets. Mais sur le traitement des points techniques elle me semble plutôt à la ramasse et ce qui ne va pas dans son sens est renvoyé à la doxa gouvernementale ou technoscientiste liberale, sans apparemment regarder les contenus eux même. Et Desbiolles c’est pareil. Alla je connais moins et je l’ai entendu dire qq trucs pertinents (sur les profils des non vaccines par exemple) mais le fait qu’il cite Desbiolles devant l’opecst, alors que celle ci racontait des trucs bien limites sur les masques et les enfants, ça me met des warnings.

      Je rajouterai 2 points : 1) il y a des sujets super intéressants à traiter de trouver comment on construit une position collective sur des questions de santé publique, ni individualiste ni subissant l’autorité de l’état. Genre comment penser une réflexions sur les vaccinations (en général, pas spécifiquement covid) dans une perspective émancipatrice et libertaire, comment on fait collectif, comment on mutualise des risques, comment on se donne des contraintes individuelles pour soutenir celles et ceux qui en ont plus besoin.

      Stiegler ne fait que critiquer l’autoritarisme d’état, parle de démocratie, mais ne propose aucune piste concrète ni axe de réflexion pour développer cela. D’autres personnes le font et développent cela, et c’est des sujets non triviaux sur lesquels il est important de délibérer.

      2) Un autre point c’est son discours, comme ceux d’autres intellectuels, est surtout axé sur la partie « choix libre » de la phrase « choix libre et éclairé », et n’évoquent pas vraiment la manière dont on construit collectivement la partie « éclairé »

      Il y a des sujets super importants à traiter sur le rapport aux paroles d’expert, de la place des scientifiques dans un débat public, de la dialectique entre connaissance scientifique et choix politiques et éthiques, bref plein d’enjeux d’éducation populaire

      Ah et aussi dernier point que j’ai déjà évoqué par le passé : l’axe « liberté » sur les questions de vaccination, c’est un argument central des discours antivaccinaux, qui axent sur le fait que les individus peuvent choisir librement etc. C’est assez documenté et c’est par exemple un registre argumentaire historique de la Ligue Nationale Pour la Liberté de Vaccination (LNPLV), qui défend le rapport au choix, défendant les personnes qui ont refusé les vaccinations obligatoires. Mais sous couvert de nuance et de démocratie, ce sont des positions antivaccinales assez claires qui sont défendues. Ce truc de la nuance et de la liberté, tu la retrouves par exemple également chez les anthroposophes (j’en parlais récemment dans un thread).

      j’ai enfin compris pourquoi on dit intellectuel de gauche : c’est pour indiquer avec quel pied leur marcher dessus.

  • Dans l’indifférence générale, on continue à mourir du Covid, par Christian Lehmann (Libération)
    https://www.liberation.fr/societe/sante/dans-lindifference-generale-on-continue-a-mourir-du-covid-20220422_YUKS4Q
    https://www.liberation.fr/resizer/G410uFY9Y9eL4EiuTWFsJha7DQw=/800x0/filters:format(jpg):quality(70):focal(4001x2440:4011x2450)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/liberation/J6PGNLNTPBBEHGGSMWZL6KFDJQ.jpg

    Mais comme le martelait avec véhémence l’un des rassuristes de plateaux en chef, Gérald Kierzek : « Plus on teste, plus il y a de personnes positives. Donc il faut déjà arrêter de tester, pour éviter que tout le monde s’affole. » Le gouvernement a tenu compte de ce conseil judicieux. Comme aurait dit Joseph Staline, un autre grand théoricien : « Un homme, un problème. Plus d’homme, plus de problème. »

  • Sur la catastrophe en cours et comment en sortir - Serge Quadruppani & Jérôme Floch
    https://lundi.am/Sur-la-catastrophe-en-cours-et-comment-en-sortir

    Il y a tout de même pas mal de choses intéressantes dans cet article de Quadruppani (qu’on sait déjà mais dites au public antibiopolitique).

    On a pourtant aussi toutes les raisons d’écouter le cri de rage d’un ami infirmier, à qui j’ai fait lire l’interview de Lamarck : « Je voudrais surtout pas tomber dans le pathos, mais le subjectif est là, et je vais pas le refouler : quand tu as vu des personnes âgées qui ont un nom : Marthe, Francis, Suzanne, Mario, Huguette , Gilberte et tant d’autres, magnifiques, qui ne demandaient qu’à finir leurs vies tranquilles, sereines et entourées, partir en 24 heures, emballées dans des housses mortuaires, sans préparation, sans que leurs proches ne puissent les voir, ne serait-ce qu’une dernière fois, quand tu as vu tes collègues infirmières et aides-soignantes, pourtant pleines d’expérience, et qui savent tenir la « bonne distance » professionnelle avec la mort, te tomber dans les bras et pleurer de détresse, que tu as vu toute l’équipe soignante aller au tapis, frappée de plein fouet par le virus, et les rares soignantes encore valides rester à poste 18h sur 24, que tu as vu le quart des personnes prises en charge mourir en une semaine, les poumons bouffés par le virus, et qu’il s’en fallait à peine d’un mois pour que des vaccins soient disponibles... alors le gus qui te déclare, du haut de son Olympe conceptuel : « c’est la porte ouverte à la modification moléculaire de l’humain », tu as juste envie de lui hurler : « ta gueule, connard ! Tu n’as aucune idée de ce dont tu parles... ! » C’est con, hein ? »

    Non, c’est pas con, et d’autant moins que c’est assorti d’une critique des affirmations lamarckienne qui peut s’avérer fort utile pour dissiper les fantasmes attachés à ce vaccin à ARNm souvent au cœur des argumentaires antivax. « Bien, alors le truc affreux [d’après Lamarck] ce serait ces vaccins à ARN messager modifié « enrobés dans un vecteur complètement artificiel ». Le mot est lâché : « artificiel », sûrement opposé à « naturel ». Ne relevons même pas que bien des produits artificiels se sont révélés forts utiles, et que nombre de produits naturels peuvent être extrêmement nocifs. Le truc ici consiste à faire peur : c’est « artificiel » ! Pas bon ça ! Le vecteur en question est une microparticule avec 4 lipides (dont du cholestérol), 4 sels (chlorures de sodium, de potassium, dihydrogénophosphates de sodium, de potassium), du sucre (saccharose) et de l’eau... (c’est presque Bio !) Non, faut que ça fasse peur ! Car nous disent-ils tout ça « est injecté massivement depuis décembre 2020 sans tests cliniques suffisants tant sur l’innocuité que sur l’efficacité ». C’est évidement faux, les essais de phase I, II, et III ont bien eu lieu, et si la phase III se poursuit c’est pour étudier les effets secondaires inattendus, la durée de protection induite par la production d’anticorps et la mémoire immunitaire induite, et d’envisager le calendrier vaccinal de rappels le cas échéant … à ce jour près de 8 milliards de doses de vaccins contre la Covid ont été administrées, et près de 55% de la population mondiale a reçu au moins une dose (dont seulement 6% dans les pays pauvres). Jamais dans l’histoire des traitements et vaccins il n’y a eu une telle surveillance de pharmacovigilance. »

    Et jamais peut-être il n’a été aussi important d’éclaircir nos rapports avec la science en général, et avec la science médicale en particulier. L’humeur antivax est ancienne, en particulier dans des milieux où les ennemis du capitalisme se recrutent en grand nombre. Au risque de déplaire à bien des amis ou des alliés, disons-le sans détour : cette humeur repose pour l’essentiel sur des fantasmes sans fondement. Deux reproches principaux ont alimenté longtemps le refus de la vaccination, et, malgré tous les démentis, ont resurgi à la faveur de celle contre le Covid : son lien avec l’autisme et les accidents consécutifs à la présence d’aluminium. La première rumeur, qui eut d’abord les honneurs du Lancet, a ensuite été démentie et il s’est avéré que celui qui l’avait lancée était un escroc. Quant à la seconde, s’il est vrai que de l’aluminium a bien été ajouté à certains vaccins pour les booster, et que ce métal a, dans quelques cas, déclenché des réactions locales à l’endroit de l’injection, il n’a jamais entraîné d’accidents graves.

    […]

    On se gardera pourtant de reprendre à notre compte le vocable de « Big Pharma ». Pas seulement parce qu’on le retrouve systématiquement dans des bouches qui ont très mauvaise haleine, — est-ce un hasard ? — mais parce qu’il charrie une vision simpliste de ce à quoi nous faisons face et ne permet donc pas d’en saisir la complexité, les dynamiques et les rouages. « Big Pharma » est à l’ère des gouvernements biopolitiques revendiqués ce qu’était le mythe des deux cents familles au XIXe siècle. Il n’y a pas plus de gouvernement mondial secret que de Big Pharma, ce à quoi nous faisons face c’est à une coalition d’intérêts qui opèrent et prospèrent au sein d’un ordre du monde et d’une organisation sociale organisés par et pour eux. Il y a donc fort à parier que, à l’instar de toutes les structures étatiques, l’INSERM ne soit pas à l’abri de du lobbying général des grandes compagnies pharmaceutiques comme de l’influence de telle ou telle d’entre elles. Mais c’est justement parce qu’il s’agit d’une coalition d’intérêts particuliers et non pas d’une entité monolithique, qu’on peut compter sur l’existence de contradictions en son sein. Peut-on imaginer que s’il existait le moindre soupçon d’effets secondaires néfastes avec l’ARN, Johnson&Johnson et Astrazeneca, les concurrents sans ARN, épargneraient leurs rivaux d’une intense campagne de lobbying pour effrayer la population et récupérer tout le marché ? Et comment s’expliquer, sous le règne omnipotent de « Big Pharma » et du déjà un peu ancien « nouvel ordre mondial » que les stratégies sanitaires, idéologiques et politiques aient été aussi radicalement différentes des Etats-Unis à la France, d’Israël au Brésil, de la Suède à la Chine ?

    […]

    La vérité est à la fois beaucoup plus simple et complexe. Face à la pandémie, à la profondeur de ce qu’elle venait remettre en cause et au risque qu’elle faisait peser soudainement sur l’économie mondiale, les gouvernants ont paniqué. Et c’est cela que leurs litanies de mensonges devaient recouvrir, alors que tout leur pouvoir repose sur leur prétention à gérer et anticiper, ils ont dû bricoler, dans un premier temps du moins. Non pas pour sauver des vies mais pour préserver leur monde de l’économie. Au moment même où les appareils gouvernementaux de toutes les plus grandes puissances mondiales connaissaient leur plus grande crise de légitimité, certains ont voulu y voir le complot de leur toute puissance. Le complotiste aime les complots, il en a besoin, car sans cela il devrait prendre ses responsabilités, rompre avec l’impuissance, regarder le monde pour ce qu’il est et s’organiser.

    […]

    Dans la vidéo « La Résistance », dont le titre est illustré sans honte par des images de la seconde guerre mondiale, le Chant des Partisans en ouverture et Bella Ciao à la fin, on voit défiler les gourous anti-vax sus-cités. Renard Buté y nomme l’ennemi suivant le vocabulaire typique de QAnon : c’est l’ « Etat profond » et les « sociétés secrètes », il nous dit que le vaccin tue, que c’est un génocide qui est en cours, et qu’il faut s’y opposer par toutes sortes de moyens. La vidéo semble vouloir rallier les différentes chapelles antivax, de Réinfocovid au CNTf (organisation délirante, mêlant islamophobie, revendication du revenu garanti et permaculture, et partisane de rapatrier les troupes françaises pour… surveiller les frontières contre la « crise migratoire » et les banlieues), et après un appel à la fraternisation avec l’armée et la police (thème de prédilection du CNTf) débouche sur un autre appel… à la constitution d’une nouvelle banque qui serait entre les mains du peuple. Tout cela se mêle à des thèmes qui peuvent paraître pertinents aux yeux d’opposants radicaux au capitalisme : l’autonomie comme projet de vie, la manière de s’organiser et de faire des manifestations moins contrôlables, la démocratie directe… autant de thèmes et revendications qui pourraient sortir de bouches amies, voire des nôtres. Que ce genre de salmigondis touche pas mal de gens qui pourraient être des alliés, et que des amis proches puissent éventuellement avoir de l’indulgence pour ce genre de Renard fêlé, nous paraît un signe de l’ampleur de la secousse que la crise du Covid a provoquée dans les cerveaux.

    […]

    On a tendance, dans notre tradition très hégélienne de l’ultragauche à considérer que tout ce qui est négatif est intrinsèquement bon. Comme si par la magie de l’Histoire, la contestation de l’ordre des choses produisait automatiquement et mécaniquement la communauté humaine disposée à un régime de liberté supérieur. Pourtant, lorsque l’on se penche sur la nébuleuse anti-vaccin, c’est-à-dire sur les influenceurs et porte-paroles qui captent l’attention sur les réseaux sociaux, organisent et agrègent les énoncés et les rassemblements, on s’aperçoit qu’une écrasante majorité baigne depuis de longues années dans l’extrême droite la plus bête et la plus rance. Militaires à la retraite, invités hebdomadaires de radio courtoisie, lobbyistes contre les violences féminines (oui, oui...), il suffit de passer une heure à « googliser » ces porte-paroles autoproclamés pour avoir une idée assez précise des milieux dans lesquels ils grenouillent. Certes, on pourrait être magnanimes et essayer d’imaginer que l’épidémie de Covid ait pu transformer de telles raclures en généreux camarades révolutionnaires mais comment s’expliquer que les seules caisses de résonances que trouvent leurs théories alternatives sur le virus et l’épidémie soient Egalité et Réconciliation, Sud Radio, France Soir, Florian Phillipot, on en passe et des pires ? En fait, si on se peut se retrouver d’accord sur des énoncés formels, on bute bien vite sur un point fondamental, c’est-à-dire éthique : la manière dont on est affecté par une situation et à la façon que l’on a de se mouvoir en son sein. En l’occurrence, ce qui rend tous ces « rebelles » anti-macron aussi compatibles avec la fange fasciste c’est l’affect de peur paranoïaque qu’ils charrient et diffusent et qui sans surprise résonne absolument avec une longue tradition antisémite, xénophobe, etc. Et c’est là que l’on peut constater une différence qualitative énorme avec le mouvement gilets jaunes. Eux, partaient d’une vérité éprouvée et partagée : leur réalité matérielle vécue comme une humiliation. C’est en se retrouvant, sur les réseaux sociaux puis dans la rue, qu’ils ont pu retourner ce sentiment de honte en force et en courage. Au cœur du mouvement antivax se loge une toute autre origine affective, en l’occurrence la peur, celle qui s’est distillée des mois durant. La peur d’être contaminé, la peur d’être malade, la peur de ne plus rien comprendre à rien ; que cette peur du virus se transforme en peur du monde puis du vaccin, n’a finalement rien de surprenant. Mais il nous faut prendre au sérieux cette affect particulier et la manière dont il oriente les corps et les esprits. On ne s’oriente pas par la peur, on fuit un péril opposé et supposé, quitte à tomber dans les bras du premier charlatan ou sauveur auto-proclamé. Il n’y a qu’à voir les trois principales propositions alternatives qui agrègent la galaxie antivax : Didier Raoult et l’hydroxychloroquine, Louis Fouché et le renforcement du système immunitaires, l’Ivermectine et le présumé scandale de son efficacité préventive. Le point commun de ces trois variantes et qui explique l’engouement qu’elles suscitent, c’est qu’elles promettent d’échapper au virus ou d’en guérir. Toutes disent exactement la même chose : « Si vous croyez en moi, vous ne tomberez pas malade, je vous soignerai, vous survivrez. » Mot pour mot la parole biopolitique du gouvernement, dans sa mineure.

    […]
    Dans la soirée évoquée, ce n’est pas « quelqu’un du public » mais bien Matthieu Burnel lui-même qui avait ironisé sur les suceurs de cailloux !

    Parce que le pouvoir n’a jamais été aussi technocratique, livide et inhumain, certains tendent une oreille bienveillante aux premiers charlatans venus leur chanter « le vivant ». Mais l’engrenage est vicieux et une fois qu’on a adhéré à une supercherie du simple fait qu’elle prétende s’opposer au gouvernement, on a plus d’autre choix que de s’y enferrer et d’y croire. Lors d’une discussion un lundisoir, une personne du public avait commis quelques blagues peu finaudes à propos d’antivax qui lécheraient des pierres pour se soigner du cancer, et cela a apparemment provoqué quelques susceptibilités. Le problème en l’occurrence, c’est que cette plaisanterie n’était caricaturale que dans sa généralisation certainement abusive. Il n’en est pas moins vrai qu’Olivier Soulier, cofondateur de Réinfocovid assure soigner l’autisme et la sclérose en plaque par des stages de méditation et de l’homéopathie, que ce même réseau promulguait des remèdes à base de charbon aux malheureux vaccinés repentis pour se « dévacciner ». Autre nom, autre star, Jean-Dominique Michel, présenté comme l’un des plus grands experts mondiaux de la santé, il se propulse dès avril 2020 sur les devants de la scène grâce à deux vidéos sur youtube dans lesquelles il relativise l’importance et la gravité de l’épidémie, soutient Raoult et son élixir, et dénonce la dictature sanitaire à venir. Neurocoach vendant des séances de neurowisdom 101, il est membre d’honneur de la revue Inexploré qui assure soigner le cancer en buvant l’eau pure de l’une des 2000 sources miraculeuses où l’esprit des morts se pointe régulièrement pour repousser la maladie. Depuis, on a appris qu’il ne détenait aucun des diplômes allégués et qu’il s’était jusque-là fait remarquer à la télévision suisse pour son expertise en football et en cartes à collectionner Panini. Ses « expertises » ont été partagées par des millions de personnes, y compris des amis et il officie désormais dans le Conseil Scientifique Indépendant, épine dorsale de Réinfocovid, première source d’information du mouvement antivax. Ces exemples pourraient paraître amusants et kitchs s’ils étaient isolés mais ils ne le sont pas.

    […]

    Historiquement, ce qui a fait la rigueur, la justesse et la sincérité politique de notre parti, - et ce qui fait qu’il perdure-, c’est d’avoir toujours refusé de se compromettre avec les menteurs et les manipulateurs de quelque bord qu’ils soient, de s’être accrochés à une certaine idée de la vérité, envers et contre tous les mensonges déconcertants. Que le chaos de l’époque nous désoriente est une chose, que cela justifie que nous perdions tout repère et foncions tête baissée dans des alliances de circonstances en est une autre. Il n’y a aucune raison d’être plus intransigeant vis-à-vis du pouvoir que de ses fausses critiques.

    […]

    Au moment où l’idée même que l’on se faisait de la vie se trouvait acculée à être repensée et réinventé, on a critiqué les politiciens. Quand le gouvernement masquait si difficilement sa panique et son incapacité à exercer sa fonction fondamentale et spirituelle, prévoir, on a entendu certains gauchistes même anarchistes caqueter : si tout cela arrive, c’est qu’ils l’ont bien voulu ou décidé. Ironie cruelle, même lorsque l’État se retrouve dans les choux avec le plus grand mal à gouverner, il peut compter sur ses fidèles contempteurs pour y déceler sa toute puissance et s’en sentir finauds.

    Faire passer des coups de force, de l’opportunisme et du bricolage pour une planification méthodique, maîtrisée et rationnelle, voilà le premier objectif de tout gouvernement en temps de crise. En cela, il ne trouve pas meilleur allié que sa critique complotiste, toujours là pour deviner ses manœuvres omnipotentes et anticiper son plein pouvoir. C’est en cela que le gouvernant a besoin du complotiste, il le flatte.

    #Serge_Quadruppani #covid #antivax #gauche #émancipation #réflexion #science

  • #COVID19 , les dégâts sociaux ?

    Un fil de « Petite Loutre » récupéré sur l’oiseau bleu qui tente de répondre à cette question :
    source : https://twitter.com/TAtterre/status/1477540324696285185
    archive : https://threadreaderapp.com/thread/1477540324696285185.html

    #COVID19 , les dégâts sociaux ? Je vais essayer de répondre à ça. Ça va être un peu long.

    On parle énormément de l’impact immédiat de la pandémie, celui sur la santé physique. C’est normal, ça saute aux yeux, c’est déjà gravissime pour certains.
    Derrière cet impact évident, il y a d’autres conséquences plus larges qui mériteraient d’être prises en compte par nos gouvernants. Je fais qq détours pour m’expliquer.

    Je ne suis pas soignante. Mais pendant 10 ans j’ai été conjointement assistante sociale et conseillère en insertion professionnelle. (Si vous pensez que ces métiers ont pour objectif « d’aider les gens », détrompez-vous. Leur but c’est de réduire l’impact des galères de la population sur le fonctionnement de la société. Ça passe par une forme d’aide, mais c’est pas pour ça que l’état y injecte des thunes.)

    Au début de ma carrière je me disais naïvement que je ne bosserai pas dans le champ de la santé. Sauf que... derrière 70% des situations de galère, il y a une problématique santé. Plus cette problématique prend de place, plus il est difficile d’améliorer les choses.

    Si vous avez une vision réac des allocataires RSA (j’entends « ces feignasses qui ne veulent pas bosser »), dites vous qu’une proportion impressionnante fait face à des problèmes de santé/à un handicap. J’ai un jour décompté les allocataires que je suivais pour constater qu’environ 30% auraient plutôt dû ouvrir des droits à l’AAH. J’en ai accompagné certains dans la démarche, ils ont tous obtenu au minimum une RQTH, et pour la plupart l’AAH. (La France est aussi un pays de non recours aux droits...)

    La crise que nous vivons aujourd’hui est sanitaire. J’essaie de la comprendre au mieux, et j’en profite pour remercier l’énorme travail effectué ici. Merci donc @Le___Doc @EricBillyFR @SaiyanBio @mimiryudo @C_A_Gustave @LehmannDrC @corinne_depagne @FLAHAULT 7/n
    @nicolasberrod @nathanpsmad @nousaerons @Cote_Science @gforestier @GuillaumeRozier (j’en ai oublié évidemment) de nous apporter une vision bien moins bordélique de la situation que celle diffusée par les autorités. ❤️.

    Et donc, bien que toutes les conséquences de cette crise ne soient pas encore connues, on voit s’en dessiner certaines.
    Ce qu’on a aujourd’hui (hors hôpitaux)
    – Un nombre mal connu, non négligeable de #CovidLong, de séquelles diverses
    – Des personnes vivant avec les séquelles (physiques ou psychologiques) d’un passage en réa
    – Des familles ayant perdu un ou plusieurs membres
    _⚠️Cela ne représente pas une part importante de la population, mais cela s’ajoute à un contexte compliqué de manière SIMULTANÉE _
    – une méfiance envers le corps médical pour une part de la population
    – une économie pas franchement folichonne, ce qui n’aide en rien

    Quoi de neuf ? Hormis les spécificités dues au #covid, pas grand chose, puisque tout ça existait déjà auparavant.
    Ce qui change aujourd’hui, c’est que ces phénomènes sont massifs. Que l’arrivée d’omicron, qu’elle qu’en soit la gravité (ça c’est hors de mon champ de compétences) va encore les augmenter.
    Qu’ils vont donc entraîner des répercussions bien plus invalidantes pour la société.
    Le COVID19 a aggravé de nombreuses choses préexistantes. Omicron sera sans doute le level supérieur de cette aggravation.

    Pourquoi parler de dégâts sociaux ?

    Parce que les difficultés de santé, physiques ou psychologiques, sont un important facteur d’exclusion et que les personnes malades/handicapées par la pandémie n’arrivent pas au compte goutte mais toutes en même temps. Répercussions possibles : l’éloignement de l’emploi, l’isolement social, une baisse des ressources/du niveau de vie par ex.
    La maladie et le handicap sont aussi des facteurs favorisant la maltraitance (conjugale, familiale, infantile...) ou des facteurs éloignant du soin (plus grande difficulté à s’occuper de soi, donc à consulter si nécessaire). Il faut imaginer qu’une partie de la population va rejoindre celle qui était déjà avant « en difficulté », et que les personnes en difficulté au préalable ne verront pas leur situation s’améliorer. Que cette pandémie touche en particulier les classes sociales défavorisées, qui voient leur situation s’aggraver. Que cela ne peut qu’augmenter le nombre de personnes ayant recours à des aides sociales diverses, aux allocations chômage, à l’assurance maladie et/ou ne contribuant plus, ou moins, à l’impôt sur le revenu. N’oubliez pas qu’aux victimes directes du covid, il faut ajouter les victimes de déprogrammation et de saturation des hôpitaux, dont il est impossible d’évaluer le nombre aujourd’hui. N’oubliez que pour 1 victime c’est l’entièreté du foyer qui est souvent impacté, enfants y compris.
    N’oubliez pas que les dégâts sur la santé mentale sont invalidants également parce que notre système de santé est dans un état déplorable, que cela ne peut qu’entraîner une difficulté d’accès aux soins accrue, donc une prise en charge de la santé publique dégradée.

    Conséquences ? Les mêmes que précédemment. Ajouter une raréfaction des pro de santé dont certains iront grossir sans aucun doute les rangs des personnes en difficulté, pour cause de burnout ou de toute autre pathologie se développant dans un environnement de travail dégradé.
    Cette dégradation du système de santé viendra aussi aggraver la perte de confiance dans le monde médical si toute demande de soin s’apparente à un parcours du combattant. Donc une nouvelle fois, éloignement du soin des personnes en besoin, conséquences sur la santé physique et mentale, sur le niveau de vie, sur le contexte familial, etc.

    Toutes les personnes touchées par la pandémie ne vont pas automatiquement se retrouver sous le seuil de pauvreté (ou tout autre indicateur de galère), mais toutes risquent de subir au moins une part des difficultés évoquées. Et plus il y a de « maillons faibles » dans un système, plus le système rame, et plus il cherche à exclure ces « maillons faibles » pour retrouver un fonctionnement idéal. D’ailleurs, qui est chargé de faire en sorte qu’on en arrive pas là ? Le secteur social. Qui n’en est pas au point du secteur médical, mais qui alerte depuis des années sur le manque de moyens, de personnel, les conditions de travail dégradées et l’impossibilité de faire face à la charge de travail. Bien avant le covid. Donc de nombreux travailleurs en souffrance avec une charge de travail augmentée. Prochain secteur à imploser ?

    N’oublions pas que les enfants, moins touchés par les conséquences du virus, n’en sont pas moins victimes. Leur propre maladie (car il y a des covidlong pédiatriques) les impacte, mais aussi : les maladies ou les décès de proches, par covid ou par déprogrammation. Ces conditions favorisent d’éventuelles difficultés scolaires.
    Le secteur de l’enseignement est abîmé par la pandémie, ce qui entraîne des conséquences (voir plus haut again)

    Donc quand on fait semblant de croire que cette pandémie ne touche que les covid+ ou fragiles...

    #social #crise #effondrement

  • Usbek & Rica - Fukushima 10 ans après : « Le désastre est toujours en cours »
    https://usbeketrica.com/fr/article/fukushima-10-ans-apres-le-desastre-est-toujours-en-cours

    C’est à croire que chaque crise impose, en plus de ses drames humains et matériels, son propre vocabulaire. Dans l’essai De la démocratie en Pandémie  ; Santé, recherche, éducation, paru le 14 janvier aux éditions Gallimard, la philosophe Barbara Stiegler se propose de questionner l’usage du terme « pandémie » pour décrire la crise mondiale provoquée par le Covid-19. Selon elle (comme pour Richard Horton, le rédacteur en chef de la revue scientifique The Lancet, dont elle reprend le propos), l’épidémie de Covid-19 n’est pas une pandémie mais une « #syndémie », c’est-à-dire une maladie causée par les inégalités sociales et par la crise écologique. La philosophe spécialiste du néolibéralisme démontre ainsi que l’émergence du coronavirus n’est que « l’énième épisode d’une longue série » de « nouveaux risques sanitaires », amplifiés « par le démantèlement des systèmes de santé ». À rebours, précisément, de la dimension exceptionnelle, temporaire et inattendue que cristallisent les huit petites lettres du mot « pandémie ».

  • Normalement, j’suis plutôt pas du genre déprimé. Mais à chaque fois qu’il y a Castex, baisse de pression, manque de sucre, taux d’oxygène qui flanche, je sais pas, mais j’ai soudain un énorme coup de mou.

    P’têt même qu’il va falloir que je me tape une plaque entière de chocolat pour m’en remettre. Je crois même que Castex m’a plus fait grossir que le confinement.

  • Paradoxes et apories de la pandémie

    Louis de Colmar

    https://lavoiedujaguar.net/Paradoxes-et-apories-de-la-pandemie

    La société moderne, aujourd’hui, se caractérise par un double échec : elle a détruit la dimension collective, « holiste », du vivre-ensemble qui a marqué l’ensemble des civilisations précédentes, et elle a rendu patent l’échec de l’individualisme asocial qui avait marqué l’utopie de son développement jusqu’à la fin du XXe siècle.

    Le cœur de la conscience sociétale repose en grande partie sur une sorte de consensus informulé, sur des concepts et des notions largement en deçà de la conscience, sur une résonance sans mots, sans mots véritablement adéquats… Il y a des périodes de la vie des sociétés où cette conscience sociétale, mouvante, dynamique, trouve des expressions et des formulations plus ou moins largement et explicitement partagées ; il en est d’autres, comme la nôtre, où les mots peinent à rendre compte de la réalité ressentie. Il est des périodes où les mots et les discours tournent littéralement à vide et donnent seulement l’impression de brasser du vent.

    Dans le contexte de l’idéologie dominante, la solitude, la pauvreté relationnelle sont pour l’essentiel la résultante de l’exclusion des circuits économiques. Un des rares « mérites » de la crise sanitaire est sans doute de permettre de préciser ce mécanisme (...)

    #pandémie #société #conscience #solitude #crise #économie #politique #désocialisation #Covid #Gilets_jaunes #distanciation #confinement #syndémie

  • Pour limiter les pandémies, les humains doivent « décoloniser le monde »

    Lorène Lavocat (Reporterre)

    La destruction des écosystèmes est une des causes de la pandémie de Covid-19. Sans changement radical de notre rapport à la planète,
    d’autres drames sanitaires sont à prévoir. Mais, dans la perspective
    de la catastrophe économique à venir, les décideurs sauront-ils
    prendre conscience de ce qu’il se passe en écoutant et respectant les
    citoyens ?

    (…)

    Nous détruisons les milieux naturels à un rythme accéléré : 100
    millions d’hectares de forêt tropicale coupés entre 1980 et 2000 ;
    plus de 85 % des zones humides supprimées depuis le début de l’époque industrielle. Ce faisant, nous mettons en contact des populations humaines, souvent en état de santé précaire, avec de nouveaux agents pathogènes. Les réservoirs de ces pathogènes sont des animaux sauvages habituellement cantonnés aux milieux dans lesquels l’espèce humaine est quasiment absente ou en petites populations isolées. Du fait de la destruction des forêts, les villageois installés en lisière de déboisement chassent et envoient de la viande contaminée vers des grandes villes.

    Avant le Covid-19, d’autres virus et bactéries se sont déjà propagées
    d’animaux sauvages vers les humains : Ebola en Afrique, le Sars de
    Chine, le Nipah de Malaisie, la fièvre de Lassa au Nigeria, Zika… Sans
    compter la multiplication des épizooties, les pandémies animales,
    comme la peste porcine ou la fièvre catarrhale ovine. Cependant, face
    à cette recrudescence des maladies infectieuses, « nos réponses sont
    toujours des réponses contre la nature, contre le vivant, regrette M.
    Morand. Lors de la grippe aviaire en 2005 en Thaïlande, les autorités
    ont ciblé le petit élevage de basse-cour, et poussé pour l’abattage
    massif et l’interdiction des races locales au profit de races
    industrialisées ». Certains chercheurs craignent que les
    chauves-souris et les pangolins, désignés comme hôtes originels du
    coronavirus, ne fassent ainsi les frais de la pandémie. « Les
    chauves-souris ont un rôle essentiel dans les écosystèmes, notamment parce qu’elles participent à la pollinisation, insiste Jean-François Guégan. On tire sur les chauves-souris et les pangolins pour ne pas répondre à la cause réelle qu’est la destruction des habitats par notre système économique. »

    Autrement dit, ne nous trompons pas de responsables. Mais ne nous
    trompons pas non plus de grille de lecture, estime la philosophe
    Virginie Maris : « Il y a d’abord beaucoup d’enseignements à tirer sur
    notre société, l’effondrement de l’État-providence et l’explosion des
    inégalités qui la caractérisent et qui sont mises à nues par cette
    crise sanitaire, souligne-t-elle. Cet épisode contribue aussi à
    déconstruire l’idée que la nature serait foncièrement bonne et que la
    solution à la crise écologique actuelle serait d’“accepter les lois de
    la nature” ou de “nous réconcilier” avec elle. » Pour Mme Maris, « 
    rétablir l’harmonie rompue entre humains et autres qu’humains », est une illusion, un fantasme « qui prend racine dans le mythe du jardin d’Éden et qui se renouvelle sans cesse, avec la figure du bon sauvage et la diversité des formes qu’elle a prise dans l’histoire ».

    Lire la suite :

    https://reporterre.net/Pour-limiter-les-pandemies-les-humains-doivent-decoloniser-le-monde

    • « Si nous ne changeons pas nos modes de vie, nous subirons des monstres autrement plus violents que ce coronavirus » entretien avec , Claire Legros, 17 avril 2020 (à quelle vitesse Le Monde suit-il ?)

      Jean-François Guégan, directeur de recherche à l’Inrae, travaille sur les relations entre santé et environnement. Dans un entretien au « Monde », il estime que l’épidémie de Covid-19 doit nous obliger à repenser notre relation au monde vivant.

      Entretien. Ancien membre du Haut Conseil de la santé publique (HCSP), Jean-François Guégan a fait partie du comité d’experts qui a conseillé la ministre de la santé Roselyne Bachelot lors de l’épidémie de grippe A (H1N1), en 2009. Directeur de recherche à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) et professeur à l’Ecole des hautes études en santé publique, il estime que l’épidémie de Covid-19 doit nous obliger à repenser notre relation aux systèmes naturels, car l’émergence de nouvelles maladies infectieuses est étroitement liée à l’impact des sociétés humaines sur l’environnement et la biodiversité.

      Vous avez fait partie des experts qui ont conseillé d’acheter des masques et des vaccins en grand nombre lors de la pandémie provoquée par le virus H1N1. Comment analysez-vous la situation en France, dix ans plus tard ?

      Comme beaucoup de mes collègues, j’ai été très surpris de l’état d’impréparation de la France à l’épidémie de Covid-19. Les expériences passées avaient pourtant mis en évidence la nécessité d’anticiper et de préparer l’arrivée de pandémies. Au sein du HCSP, nous avions préconisé l’achat des fameux vaccins, mais aussi la constitution d’une réserve de près de 1 milliard de masques, pour protéger la population française en cas de risque majeur, à renouveler régulièrement car ils se périment vite. Nous avions alors réussi à sensibiliser les décideurs de plusieurs ministères sur cette nécessaire anticipation. Je pensais que nous étions prêts. Au ministère de la santé, Xavier Bertrand a reconduit l’achat des masques, mais, ensuite, il y a eu un changement de stratégie. Il semble que l’économétrie ait prévalu sur la santé publique.

      Comment expliquer cette difficulté à cultiver, sur le long terme, une approche préventive ?

      Les départements affectés aux #maladies_infectieuses ont été, ces dernières années, désinvestis, car beaucoup, y compris dans le milieu médical, estimaient que ces maladies étaient vaincues. Et c’est vrai que le nombre de décès qu’elles occasionnent a diminué dans les sociétés développées. En revanche, elles sont toujours responsables de plus de 40 % des décès dans les pays les plus démunis, et on observe aussi une augmentation de la fréquence des épidémies ces trente dernières années.

      Nous n’avons cessé d’alerter sur leur retour en force depuis quinze ans, sans succès. On a vu les crédits attribués à la médecine tropicale s’effondrer, des connaissances se perdre, faute d’être enseignées, même si elles perdurent encore chez les médecins du service de santé des armées, dans les services d’infectiologie et les grandes ONG humanitaires.

      Quelle est la place de la santé publique dans la culture médicale en France ?

      La médecine, en France, a toujours privilégié l’#approche_curative. On laisse le feu partir, et on essaie ensuite de l’éteindre à coups de vaccins. De fait, il existe aujourd’hui une hiérarchie entre les différentes disciplines : certaines sont considérées comme majeures, parce que personnalisées, technologiques, curatives. C’est le cas, par exemple, de la médecine nucléaire ou de la cardiologie. D’autres sont délaissées, comme la santé publique et l’infectiologie, discipline de terrain et de connaissances des populations.

      Que sait-on aujourd’hui des interactions entre environnement et santé, et en particulier du rôle de la biodiversité dans la survenue de nouvelles épidémies ?

      Depuis les débuts de notre civilisation, l’origine des agents infectieux n’a pas varié. Les premières contagions sont apparues au néolithique, vers 10 000 à 8 000 av. J.-C., en Mésopotamie inférieure – aujourd’hui l’Irak –, lorsqu’on a construit des #villes dont les plus grandes pouvaient atteindre vingt mille habitants. On a ainsi offert de nouveaux #habitats aux animaux commensaux de l’homme, ceux qui partagent sa nourriture, comme les arthropodes, les mouches, les cafards, les rats, qui peuvent lui transmettre des agents.

      Pour nourrir les habitants des villes, il a fallu aussi développer l’agriculture et l’élevage en capturant des animaux sauvages, créant ainsi les conditions de proximité pour le passage vers l’humain de virus et de bactéries présents chez ces animaux ou abrités dans les sols ou les plantes et leurs systèmes racinaires. Les bactéries responsables du tétanos, de la tuberculose ou de la lèpre sont originaires du sol.

      La #déforestation est mise en cause dans l’augmentation du nombre de maladies infectieuses émergentes ces dernières années. De quelle façon ?

      Sa pratique massive a amplifié le phénomène depuis cinquante ans, en particulier dans les zones intertropicales, au Brésil, en Indonésie ou en Afrique centrale pour la plantation du palmier à huile ou du soja. Elle met l’humain directement en contact avec des systèmes naturels jusque-là peu accessibles, riches d’agents microbiens.

      Ainsi, le virus du sida le plus distribué, VIH-1, est issu d’un rétrovirus naturellement présent chez le chimpanzé en Afrique centrale. Le virus Nipah, responsable d’encéphalites en Malaisie, en 1998, a pour hôte naturel une espèce de chauve-souris frugivore qui vit habituellement dans les forêts d’Indonésie. La déforestation dans cette région a entraîné son déplacement vers la Malaisie, puis le Bangladesh, où les chauves-souris se sont approchées des villages pour se nourrir dans les vergers. Des porcs ont joué le rôle de réacteurs et contribué à l’amplification du virus.

      Il ne fait aucun doute qu’en supprimant les #forêts_primaires nous sommes en train de débusquer des monstres puissants, d’ouvrir une boîte de Pandore qui a toujours existé, mais qui laisse aujourd’hui s’échapper un fluide en micro-organismes encore plus volumineux.

      Depuis trente ans, l’urbanisation s’étend aux régions intertropicales. Quel rôle joue-t-elle dans cette transmission ?

      Dans ces régions, une vingtaine de villes comptent désormais plus de 7 millions d’habitants, qui accumulent à la fois richesse et extrême pauvreté, avec une population très sensible aux infections. Le scénario du néolithique se reproduit, mais de manière amplifiée par la biodiversité tropicale.

      L’agriculture qui s’y organise dans les zones périurbaines favorise la création de gîtes pour les micro-organismes présents dans l’eau, comme les bactéries responsables du choléra, ou les moustiques, vecteurs de paludisme. Des élevages de poulets ou de porcs y jouxtent les grands domaines forestiers tropicaux. Il suffit de faire une cartographie de Manaus [Brésil] ou de Bangkok pour visualiser comment ces pratiques favorisent les ponts entre des mondes hier bien séparés.

      Peut-on dire que la pandémie de Covid-19 est liée à des phénomènes de même nature ?

      Les origines du virus sont discutées, il faut rester prudent. Les scientifiques s’accordent néanmoins sur une transmission de l’animal à l’humain. Dans sa composition moléculaire, le coronavirus responsable du Covid-19 ressemble en partie à un virus présent chez les chauves-souris du groupe des rhinolophes, et en partie à un virus qui circule chez une espèce de pangolin d’Asie du Sud-Est.

      Si le coronavirus a été transmis par la chauve-souris, il est possible que la déforestation intensive soit en cause. Si le scénario du pangolin est vérifié, la cause est à rechercher du côté de l’exploitation illégale de ressources forestières menacées. En Chine, le pangolin est un mets de choix, et on utilise aussi ses écailles et ses os pour la pharmacopée. La nette diminution des rhinocéros en Afrique a peut-être joué un rôle, avec un report sur le pangolin à un moment où l’importation en Chine de cornes de rhinocéros est rendue plus difficile.

      Certains sont tentés de supprimer les animaux soupçonnés d’être les réservoirs du virus…

      Cette hypothèse n’est ni réaliste ni souhaitable. Et d’ailleurs a-t-on vraiment envie de vivre dans ce monde-là ? De tout temps, les épidémies ont suscité des boucs émissaires. Les chauves-souris sont également accusées d’être les réservoirs d’Ebola – une théorie qui n’est pour l’heure pas démontrée – et souvent associées dans les imaginaires à une représentation diabolique. On oublie au passage qu’il s’agit d’animaux extrêmement utiles pour la pollinisation de très nombreuses plantes, ou comme prédateurs d’insectes.

      N’oublions pas non plus que la vie sur Terre est organisée autour des micro-organismes. Cette biodiversité est par exemple essentielle chez l’humain pour le développement du microbiome intestinal, c’est-à-dire l’ensemble des bactéries abritées dans notre système digestif, qui détermine dans les premiers âges de la vie notre système immunitaire.

      Peut-on faire un lien direct entre l’augmentation des épidémies et la crise climatique ?

      C’est un paramètre sur lequel on manque d’arguments. Les crises environnementales dans leur ensemble provoquent des phénomènes non linéaires, en cascade, des successions d’événements que l’on ne peut pas appréhender par la voie expérimentale. On peut réaliser des expériences en mésocosme, c’est-à-dire dans des lieux confinés où l’on fait varier les paramètres – sol, hygrométrie, température. Mais d’autres variables, telles que la pauvreté, la nutrition ou les mouvements de personnes, ne sont pas considérées par ces études, alors qu’elles peuvent jouer un rôle très important dans la transmission des infections. Quoi qu’il en soit, le changement climatique viendra exacerber des situations déjà existantes.

      Une approche pluridisciplinaire est donc indispensable pour comprendre les épidémies ?

      L’approche cartésienne pour démontrer les relations de cause à effet n’est plus adaptée face à ces nouvelles menaces. Toutes les problématiques planétaires nécessitent de développer des recherches intégratives et transversales, qui doivent prendre en compte les sciences humaines, l’anthropologie, la sociologie, les sciences politiques, l’économie…

      Il est possible de développer des analyses de scénarios, ainsi que des analyses statistiques. Or, ces approches sont souvent déconsidérées au profit des sciences expérimentales. D’un point de vue épistémologique, il est temps d’en finir avec cette distinction entre sciences majeures et mineures, pour reconstruire une pensée scientifique adaptée aux nouveaux enjeux. Cela demande que chaque discipline se mette à l’écoute des autres. Mais ce n’est pas le plus facile !

      Faut-il envisager la permanence d’un risque pandémique ?

      Nous sommes à l’ère des #syndémies (de « syn » qui veut dire « avec »), c’est-à-dire des épidémies qui franchissent les barrières des espèces, et circulent chez l’humain, l’animal ou le végétal. Si elles ont des étiologies différentes (des virus de familles différentes par exemple), elles ont quasiment toutes les mêmes causes principales.

      Cette épidémie est terrible, mais d’autres, demain, pourraient être bien plus létales. Il s’agit d’un coup de semonce qui peut être une chance si nous savons réagir. En revanche, si nous ne changeons pas nos modes de vie et nos organisations, nous subirons de nouveaux épisodes, avec des monstres autrement plus violents que ce coronavirus.

      Comment faire pour se protéger ?

      On ne réglera pas le problème sans en traiter la cause, c’est-à-dire les perturbations que notre monde globalisé exerce sur les environnements naturels et la diversité biologique. Nous avons lancé un boomerang qui est en train de nous revenir en pleine face. Il nous faut repenser nos façons d’habiter l’espace, de concevoir les villes, de produire et d’échanger les biens vitaux.

      L’humain est un omnivore devenu un superprédateur, dégradant chaque année l’équivalent de la moitié de l’Union européenne de terres cultivables. Pour lutter contre les épidémies, les changements nécessaires sont civilisationnels.
      Comme dans la symbolique du yin et du yang, nous devons accepter la double nature de ce qui nous entoure. Il nous faut complètement repenser notre relation au monde vivant, aux écosystèmes naturels et à leur diversité biologique, à la fois garants des grands équilibres et source de nombreux dangers. La balle n’est plus dans le camp des chercheurs qui alertent depuis vingt ans, mais dans celui des politiques.

      #cartésianisme #transversalité