• Combien d’instits vaut un taxi ? (L’instit’humeurs)
    http://blog.francetvinfo.fr/l-instit-humeurs/2016/02/07/combien-dinstits-vaut-un-taxi.html

    Je ne suis pas le seul, les collègues n’ont pas attendu l’article du Point.fr pour constater que leurs grèves sont devenues aussi inopérantes que peu suivies, et le lien de cause à effet n’est pas à établir dans le sens que l’on croit, les rangs grévistes étaient plus fournis avant mais pour un résultat tout aussi proche de rien […].

    Si la grève a perdu de son aura et de son efficacité, les premiers responsables sont peut-être les profs eux-mêmes, sans doute ont-ils un peu trop usé du droit de grève, et de façon pavlovienne, et manquant parfois de discernement. Toutes les grèves ne sont pas forcément bonnes à faire, trop de grève tue la grève et à la fin toutes les grèves finissent par se ressembler, les TV pourraient se contenter de ressortir les archives de l’INA, les images et les discours sont les mêmes, et le but d’une grève étant de faire passer un message, si le message n’est pas audible la grève perd beaucoup de sens.

    Les syndicats ont aussi une large part dans cette affaire. On nous rétorque que s’ils étaient plus puissants, s’il y avait plus de syndiqués, les grèves porteraient plus, mais le problème est ailleurs : dans la culture syndicale même de ce pays, où le dialogue social est une affaire de sourds, où le conflit fait office de discussion, où l’opposition de principe est un préalable, où le gonflage de jabot tient lieu d’argumentaire, et où le consensus est vu comme une défaite, voire une trahison. Les syndicats, pris dans leurs petits jeux d’influence et de couloirs entre eux et avec le pouvoir, ont trop souvent joué avec la grève et ont contribué à casser le jouet.

    Les dirigeants de ce pays ont, ces dernières années, également bien contribué à dévaluer sérieusement le droit de grève. Singulièrement durant la présidence de Nicolas Sarkozy, grand expert en clivages, la grève a pris un bon coup sur la tronche, largement discréditée car vendue au grand public comme un mouvement indu tourné contre les bonnes gens et les vrais travailleurs. Voici la grève officiellement devenue synonyme de prise en otage, privilège écœurant de fonctionnaires gauchos gonflés au lait de la nation.

    Le plus terrible est que, la plupart du temps, les grèves enseignantes ont pour revendication, non leurs petits privilèges, mais l’idée qu’ils se font de leur mission et du service public d’éducation de ce pays (qu’ils aient tort ou raison est encore une autre affaire). Non leur petit nombril, mais l’intérêt des élèves qu’ils ont pour charge d’instruire ! Pour une grève faite pour les salaires, combien faites pour défendre une certaine idée de l’école ?

    #éducation #salarié.e.s #grève #mouvement_social #syndicalisme_enseignant