• Éducation : qu’est-ce qui décourage les élèves ? (Le Point)
    http://www.lepoint.fr/societe/education-qu-est-ce-qui-decourage-les-eleves-02-07-2014-1842491_23.php

    Mais l’étude de l’OCDE va plus loin : un système sélectif nuirait à la motivation et à la progression des élèves. Alors même que l’on pourrait imaginer que la multiplicité des filières qui s’offrent aux élèves leur permettrait d’effectuer un choix affiné qui correspondrait mieux à leurs attentes, et ainsi les encouragerait dans l’effort, il n’en est rien. Pisa montre que la motivation chute lorsque le système éducatif propose un grand nombre de filières, lorsqu’il favorise l’orientation dans des voies professionnelles et lorsque cette orientation se fait à un jeune âge. D’autant que cette sélection accentue les inégalités sociales et que les élèves le perçoivent parfaitement, les « perdants » de la sélection ayant le sentiment de ne pas bénéficier des mêmes chances de réussite.

    Conséquence : la motivation pâtit du tri, sur des critères académiques, avec les gagnants qui rejoignent des établissements sélectifs et les autres qui sont « orientés » dans d’autres filières ou établissements en raison de leurs faibles résultats, de problèmes de comportement ou de besoins éducatifs spécifiques. En somme, si l’on suit les conclusions de Pisa, ce qui motive les meilleurs élèves démotive les plus fragiles. Apparemment, c’est la quadrature du cercle.

    #éducation #système_scolaire #échec_scolaire #sélection

  • Immuable rentrée, immuable école (Bernard Collot)
    http://education3.canalblog.com/archives/2014/08/27/30482447.html

    Ce qui est effrayant, ce n’est pas la fuite du temps qui me concerne, c’est son immobilité absolue en ce qui concerne l’école : rien n’a changé. A six ans autrefois ou un peu plus tôt aujourd’hui, c’est la même séparation, la même préparation de ce qui va conférer le statut qui va vous habiller en élève avec ses affutiaux obligatoires, les mêmes recommandations parentales, la même entrée dans une enceinte avec ses personnages auxquels il va falloir se soumettre (pourquoi ?), les mêmes sonneries, cloches, injonctions ou claquements des mains qui vont réguler presque jusqu’à votre respiration, les mêmes ordres qui vous assignent une place, les moments où vous pouvez la quitter, ceux où vous devez ouvrir un livre, prendre un crayon… et même ceux où vous devez aller faire pipi !
    […]
    Et chacun va en prendre pour une quinzaine d’années. Une quinzaine d’années où pour la plupart l’essentiel sera résumé à « attendre ». Attendre l’ordre qui dira ce qu’il faut faire ou ne pas faire, attendre une récré (ou la craindre), attendre l’heure de la sortie, attendre… la libération de l’école pour tenter d’être et de vivre.
    […]
    Il est effrayant et cela devrait effrayer : près de soixante-dix ans après, dans ce que me raconte mon fils au collège et ce que je peux en savoir, je peux me revoir tel je l’étais dans le cours complémentaire, tel dans ce qu’on me faisait faire ou subir, jusqu’à la place qu’on me faisait occuper ! Rien, strictement rien n’a changé y compris dans l’organisation, y compris dans les comportements des enseignants et par voie de conséquence des élèves. Les cahiers sont passés au format A4, des matières ont changé de nom (on ne fait plus de la science mais des SVT !), il faut acheter une calculette (dont il ne faut pas se servir en dehors d’exercices spécifiques), la liste des fournitures s’allonge ce d’autant qu’elles ne sont plus… fournies, il vaut mieux avoir un ordinateur à la maison,… rien d’autre.

    Ce qui est effrayant, c’est que presque personne, pas plus les enseignants que les parents, ne se rend compte que rien n’a changé. Pire, certains se font même croire que cela a trop changé ! Les mêmes polémiques sur les méthodes perdurent tout en restant soigneusement des polémiques, les grands discours ministériels se reproduisent, les « experts » continuent de s’empoigner sur les médias, tout doit changer, va changer… à condition que rien ne change.

    #éducation #système_scolaire #tout_change_rien_ne_change #c'est_la_rentrée

  • L’égalité toujours au ban de l’école (Libération)
    http://www.liberation.fr/societe/2014/07/08/l-egalite-toujours-au-ban-de-l-ecole_1060032

    Inégalités territoriales, entre établissements, entre classes, absence de mixité sociale, ségrégation scolaire... L’école de la République n’est plus la même pour tous.

    #éducation #école #inégalités #système_scolaire #inégalités_territoriales #mixité_sociale #ségrégation #déterminisme_social

  • Sur la Réforme de l’Enseignement (Lou Mestre d’Escolo, octobre 1944)
    http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32815350t/date

    http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8841902/f1.highres

    « Bien qu’elle ait beaucoup servi dans certains programmes électoraux, l’École Unique n’a pas été mise en pratique en France. Ce qui a été réalisé, ce sont des réformes de détail […]. La réforme avait de l’importance - une importance à la fois symbolique et pratique - pour la masse des petites gens, pour les classes moyennes de la ville. Pour la classe ouvrière, pour les paysans pauvres, il aurait fallu bien autre chose […]. D’autres corrections partielles atténuaient, sur tel ou tel point particulièrement sensible, le caractère de privilège et d’inégalité inhérent à maints points du système d’enseignement public. […] Mais il n’en reste pas moins que […] la structure fondamentale de l’enseignement français demeurait en place : sauf la correction d’un modeste système de bourse, la sélection des élèves admis aux écoles secondaires continuait à être pure affaire d’argent. Aptitude à étudier et possibilité d’étudier ne coïncidaient pas toujours. »
    « Un élève entré à 11 ans au lycée pouvait parcourir le cycle d’enseignement le plus long et le plus difficile, passer successivement le baccalauréat, une licence, une agrégation, sans recevoir absolument aucune vue tant soit peu approfondie sur l’histoire du travail et de l’organisation économique de son peuple ou sur les bases juridiques et sociales de la cité. Encore moins était-il question bien entendu, de lui donner une initiation aux gestes les plus généraux de l’activité manuelle et à la vie de l’homme de métier, ou un aperçu des notions fondamentales de technologie. Sauf quelques enseignements fragmentaires qu’il pouvait tirer successivement de l’histoire politique, de la géographie et de la littérature, rien ne préparait le lycéen au contact concret avec la société précise dans l’élite de laquelle il était censé entrer […] »
    « Les méthodes actives ne trouvaient pas d’emploi étendu […]. Une importance exagérée était fréquemment accordée, à tous les degrés de l’enseignement, aux examens et à leur préparation, aux compositions, aux manuels et aux cours dictés, à la pédagogie livresque. »
    « Ce qui se faisait dans un sens réformateur était le plus souvent dû à l’initiative privée : c’était l’œuvre des maîtres eux-mêmes (ou de leurs associations), et cette œuvre, loin d’être toujours soutenue par les pouvoirs publics, était à l’occasion combattue par eux. »

    #éducation #réforme_de_l'enseignement #histoire_de_l'éducation #inégalités #système_scolaire #méthodes_actives

  • Le niveau scolaire des Français en 1913 : loin du mythe de l’âge d’or
    http://blogs.mediapart.fr/blog/dominique-momiron/090813/le-niveau-scolaire-des-francais-en-1913-loin-du-mythe-de-l-age-d-or

    « Il faudrait en finir avec le mythe d’une école où régnait l’ordre et le silence, où les élèves apprenaient tous à lire, à écrire et à compter, et où ils connaissaient les grandes dates de l’histoire de France, les départements avec leur préfecture et leurs sous-préfectures, et les fleuves avec leurs affluents. »

    […]

    Si des progrès considérables avaient été engagés, puisque moins de 5 % des conscrits ne savaient ni lire ni écrire, le certificat d’études ne concernait en réalité que les bons élèves, les seuls que les instituteurs présentaient à l’examen. Et donc on ne comptait qu’un tiers d’une classe d’âge titulaire du certificat d’études. Un diplôme qui, s’il garantissait des apprentissages solides en lecture, écriture, orthographe et calcul, se contentait aussi de connaissances très minces en sciences, en histoire et en géographie, comme le montre l’observation des copies des lauréats. Mais surtout, le sort des autres élèves ne constituait pas une préoccupation pour la société, société pour laquelle il était évident que tous les élèves ne pouvaient réussir. Aucun inspecteur n’aurait reproché à un maître d’avoir de grands élèves juste capables d’ânonner, car l’existence de cancres faisait partie de la normalité. Leur échec n’inquiétait personne puisque la société leur permettait tout de même de se trouver une place. Le rôle du maître, tel que chacun le concevait, était de faire réussir les bons élèves au certificat d’études.

    Et le baccalauréat ? Eh bien, en 1913, un peu moins de 8 000 lycéens l’ont obtenu cette année-là. […] Le diplôme sanctionnait un niveau de culture humaniste sans utilité immédiate. Il était l’apanage de l’élite sociale, c’est-à-dire de la bourgeoisie. Être bachelier suffisait à distinguer les jeunes bourgeois dont beaucoup arrêtaient là leurs études sans que cela ne leur nuise pour faire une belle carrière. Et donc une minorité de bacheliers s’engageait dans des études supérieures (41 000 étudiants en 1913, contre 2 millions aujourd’hui). […] Mais cette minorité ne suffisait pas aux besoins en travailleurs très qualifiés de l’économie. L’enseignement primaire supérieur et l’enseignement pratique (écoles des arts et métiers) complétaient ces besoins avec les titulaires du brevet supérieur (pratiquement au niveau du bac) et les diplômes d’écoles professionnelles ou des écoles pratiques du commerce et de l’industrie. […]

    Ces réalités méritent d’être diffusées de nos jours, tandis que les médias et le grand public se complaisent dans un discours désespérant sur l’état actuel du niveau d’étude des Français.

    #éducation #histoire_de_l'éducation #système_scolaire #diplôme

  • Dépenses d’éducation : la France dépense-t-elle vraiment trop ? (Observatoire des inégalités)
    http://www.inegalites.fr/spip.php?page=article&id_article=1792

    D’abord, le constat est désormais largement admis : l’enseignement primaire est très nettement sous doté en France. […] La France est bonne dernière de la liste, notamment parce que les enseignants à ce niveau sont les plus mal payés des pays riches. Dans certains pays, les enseignants disposent de davantage de personnels de soutien, comme c’est d’ailleurs le cas en maternelle en France. La prime de 400 euros qui sera versée par le gouvernement ne changera en rien la situation.

    Ensuite, la France arrive en 11e position sur 14 pour les dépenses par élève dans l’enseignement supérieur. […] Mais les écarts sont énormes en France entre les filières sélectives (IUT, BTS et grandes écoles principalement) et les autres où les étudiants sont entassés en nombre dans des amphithéâtres, ce qui fait baisser la moyenne.

    Enfin, contrairement à une idée reçue, la France occupe une place dans la moyenne aussi pour l’enseignement secondaire […]. Notre pays est moins mal classé, mais reste loin d’avoir surinvesti ce niveau. Nos collégiens et nos lycéens disposent du standard moyen d’études des pays riches.

    L’argent ne fera pas le bonheur du système éducatif français. Les élèves français souffrent d’un enseignement peu modernisé depuis les années 1960, très académique et taillé sur mesure pour la culture des élèves de milieux favorisés. Mais le manque de moyens va encore dégrader les choses. Il n’aidera pas à recruter les meilleurs enseignants, à réduire le nombre d’élèves par niveau (du primaire et de l’université notamment), ou à offrir des conditions matérielles d’études dignes de ce nom aux étudiants (campus, bibliothèques, logements, etc.). Du côté des enseignants, l’hypocrisie règne : une évaluation et des exigences limitées, en contrepartie de salaires peu élevés pour un bon nombre.

    #éducation #budget #système_scolaire #statistiques #institution

  • François Dubet : « L’école est en péril »
    http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/20130513trib000764314/francois-dubet-l-ecole-est-en-peril-.html

    « En panne de projet moral et éducatif ». Voilà, selon le sociologue spécialiste de l’enseignement, la principale explication à la déliquescence du système français. Un système perclus d’incohérences, sclérosé par la machine administrative, les revendications corporatistes et la rhétorique doctrinaire, ébranlé par les bouleversements sociétaux, scellé dans son immobilisme, son rejet de l’innovation, et l’indifférence pour ses meilleurs éléments. Un système que particularisent un intellectualisme inapproprié, l’abandon des devoirs, la reproduction des élites, un ostracisme inepte pour le capitalisme et l’entreprise, in fine la relégation au second rang de l’objet même de ce qui fut une vocation : donner aux jeunes les armes de se construire, de trouver une place dans la société, d’être acteurs de la démocratie.

    Une longue et très intéressante tribune de François Dubet. Même si on peut ne pas partager son positionnement politique très "gauche réformiste", ce texte incisif a le mérite de pointer clairement les questions essentielles, celles que la #Refondation aurait dû traiter en priorité et sur le long terme, loin des polémiques stériles sur l’#école qui nous passionnent tant…

    L’école semble appartenir aux professionnels de l’école, attachés en premier lieu à défendre leur double sort professionnel et personnel. C’est sur ce mur que les grands élans réformistes du monde enseignant se sont épuisés ces dernières décennies.
    […]
    Mais l’incapacité à réformer n’est pas seule coupable. Le système éducatif est prisonnier d’un dogme : la société française confie sans limite à l’école la responsabilité de définir le destin social des individus. Presque nulle part ailleurs on observe une telle emprise scolaire, une telle indexation du devenir personnel sur l’envergure du diplôme. Dans ce contexte, la problématique des inégalités et des injustices scolaires devient un enjeu essentiel, et d’autant plus considérable que la situation ou l’opinion des vaincus sont reléguées.
    […]
    Pourquoi les grandes confédérations syndicales interprofessionnelles défendant la classe ouvrière et a priori tout à fait légitimes sur le sujet de l’école, se taisent, considérant que ce dernier « appartient » aux enseignants et donc relève des compétences des organisations corporatistes ? C’est incompréhensible, surtout quand l’école ne traite pas très bien les enfants de la classe ouvrière.
    […]
    Les causes de cette mutation sont multiples : l’autorité de l’institution s’est épuisée, on ne croit plus avec la même innocence ni à la nation ni au progrès ni à la science, le mécanisme de promotion sociale des catégories des élites populaires vers l’enseignement a décliné au profit de classes moyennes qui se « recasent » dans l’appareil éducatif. Résultat, l’enseignant ne se sent plus empli du même devoir et des mêmes investissements à l’égard de la société.
    […]
    Chacun revendique une école équitable, juste, productrice de bons professionnels, mais personne n’est en mesure de dessiner l’essentiel : le « type d’individu » que l’on souhaite faire éclore. La communauté juvénile est confrontée au monde des savoirs et des évaluations. Le corps enseignant dénonce avec raison la décomposition des liens familiaux, la bêtise médiatique, une anomie généralisée ; mais, dépourvu de projet éducatif, concentré sur la performance et l’apprentissage des enfants, il contribue in fine à ce qu’il dénonce !
    […]
    L’école a vocation à résister, mais aussi à former des résistants. Il ne s’agit, bien sûr, pas d’isoler les jeunes des désordres et des passions du monde, mais simplement de les rendre plus intelligents pour comprendre le monde et y trouver, à partir de raisonnements autonomes, une place. Que voulons-nous que nos enfants sachent et maîtrisent ? Savoir être et savoir penser : voilà à quoi l’école doit former en premier lieu. Il est capital d’apprendre aux enfants à devenir de futurs acteurs de la démocratie. Or comment y parvenir dans un système éducatif à ce point non démocratique et qui n’accorde ni droit ni leçon de vie collective aux apprentis ?
    […]
    Les parents attendent énormément de l’école, et notamment qu’elle soit capable de dire ce qu’elle fait. Et on ne peut qu’y souscrire. Parce qu’il paie des impôts qui financent l’éducation, chaque citoyen est en droit de savoir ce que le système produit, si les enfants progressent et ce qu’ils apprennent, etc. Le monde éducatif doit rendre des comptes, non seulement à l’institution qui l’héberge mais aussi aux citoyens qui le rétribuent et lui confient leurs enfants.
    […]
    Cette dimension permettrait aussi de développer une solidarité entre professeurs, trop souvent anémique. Comment ne pas me remémorer ces collègues rentrant en larmes d’un cours et qui s’isolaient au fond de la salle des professeurs sans que personne ne vienne les secourir... Le monde de l’enseignement est d’une solitude absolue au nom de l’autonomie de chaque enseignant. L’enseignant perfectible ou fragile ne sera jamais aidé ; ses collègues feront en sorte de ne pas placer leurs enfants dans sa classe. A toutes ces conditions, la fonction éducative pourrait être activée, et chacun pourrait se sentir pleinement « responsable ».
    […]
    Le monde enseignant ne manque pas, loin s’en faut, de sujets qui entreprennent. Malheureusement, l’administration constitue un obstacle, souvent rédhibitoire. Toute tentative d’innover, de proposer des modes alternatifs d’enseignement davantage adaptés au profil des enfants, est une épreuve. Enfin, n’oublions pas le dogme, si spécifique au système français et source de ses blocages : le faux conflit syndicats - administration. Tous deux forment en réalité un couple et se contrôlent mutuellement, dissuadant tout - et notamment les initiatives nouvelles et audacieuses - ce qui peut remettre en question les habitudes et les convictions, aussi dépassées ou inopérantes soient-elles. Ils s’accordent à maintenir le système dans la pesanteur et l’immobilisme. Et ainsi, toute expérimentation réussie est étouffée au lieu d’être essaimée.
    […]
    La rhétorique antilibérale et anti-entreprise au sein du corps enseignant est une réalité, parfois incohérente quand on sait combien l’univers de l’école, obsédé par les classements, soumis aux diktats de l’hyper sélection et de l’hyper compétition, opposé aux choix de carrière des élèves et capable de délaisser les plus vulnérables, est lui-même d’une extraordinaire brutalité ! […] Cet univers de l’école a, pendant longtemps, revendiqué une sorte de havre de paix, même une leçon de sagesse et d’exemplarité en riposte à la « brutalité » de la société, notamment économique. Ce temps est révolu parce que l’école elle-même est devenue brutale et dénonce la brutalité réelle du capitalisme pour cacher sa propre violence.
    […]
    Seules solutions : d’une part que l’école soit davantage éducative, c’est-à-dire qu’elle s’intéresse aux individus, à leur personnalité, à leurs champs singuliers, de réalisation ; d’autre part que les diplômes occupent une place moins importante dans la vie sociale.
    […]
    Pour l’essentiel, les inégalités scolaires sont le produit des inégalités sociales, et donc diminuent ou progressent proportionnellement à la réduction ou à l’accroissement de ces dernières. Or en France […] l’envergure des inégalités scolaires est bien supérieure à celles que laissent supposer les inégalités sociales. En cause : une culture scolaire sélective, et la perception qu’il n’existe aucune autre opportunité de réussite que l’école. Ce qui par ailleurs enjoint de taire définitivement les chimères dorées et récurrentes qui confèrent à l’école un levier d’ascenseur social ou la responsabilité de résoudre tous les maux de la société et de l’individu.
    […]
    La fiction du mérite est utile, mais elle ne doit pas devenir fantasme. La compétition méritocratique est la seule manière d’allouer des individus à des positions sociales inégalitaires. Mais ce mécanisme juste a priori peut engendrer de très grandes inégalités. Il faut donc être méritocratique sans aller au bout de cette logique et ce soucier surtout du sort de ceux qui n’ont pas de mérite.

    #éducation #système_scolaire #inégalités

    • Bravo : la plus grosse contradiction de l’école républicaine, ce « double-bind » qui la bloque et qui la mine, est ici pointée du doigt.

      Comme me disait un prof d’anglais au lycée sans se rendre compte de l’absurdité de son propos :
      « pour réussir il faut être dans la première moitié. Et ça, en bossant un peu, tout le monde peut y arriver ».
      Oui, mais pas en même temps. Ou bien il faut se serrer et partager les place que tout le monde dans la première moitié. Bref, que fait-on de la deuxième moitié ?

      L’école est empêtrée dans ses aspirations d’égalitarisme et d’élitisme, et ne s’en sort pas. A l’image de la société (capitaliste).
      Pour moi le problème, c’est notre attachement à la vision hiérarchique qui assurent les schémas de domination. Acceptons de sortir de l’élitisme sans pour autant renoncer à nos ambitions de performance sociale, technique, humaine. On verra que chaque individu pourra trouver une place utile et performante pour les autres, et gratifiante pour lui même..

      La rhétorique antilibérale et anti-entreprise au sein du corps enseignant est une réalité, parfois incohérente quand on sait combien l’univers de l’école, obsédé par les classements, soumis aux diktats de l’hyper sélection et de l’hyper compétition, opposé aux choix de carrière des élèves et capable de délaisser les plus vulnérables, est lui-même d’une extraordinaire brutalité ! […] Cet univers de l’école a, pendant longtemps, revendiqué une sorte de havre de paix, même une leçon de sagesse et d’exemplarité en riposte à la « brutalité » de la société, notamment économique. Ce temps est révolu parce que l’école elle-même est devenue brutale et dénonce la brutalité réelle du capitalisme pour cacher sa propre violence.

      […]

      La fiction du mérite est utile, mais elle ne doit pas devenir fantasme. La compétition méritocratique est la seule manière d’allouer des individus à des positions sociales inégalitaires.

      Et sinon ici aussi j’applaudis :

      Cette dimension permettrait aussi de développer une solidarité entre professeurs, trop souvent anémique. Comment ne pas me remémorer ces collègues rentrant en larmes d’un cours et qui s’isolaient au fond de la salle des professeurs sans que personne ne vienne les secourir... Le monde de l’enseignement est d’une solitude absolue au nom de l’autonomie de chaque enseignant. L’enseignant perfectible ou fragile ne sera jamais aidé ; ses collègues feront en sorte de ne pas placer leurs enfants dans sa classe. A toutes ces conditions, la fonction éducative pourrait être activée, et chacun pourrait se sentir pleinement « responsable ».

      #management

  • Ecole française = fabrique d’inégalités (Le Nouvel Observateur)
    http://tempsreel.nouvelobs.com/education/20130318.OBS2300/ecole-francaise-fabrique-d-inegalites.html

    Comment expliquer cette persistance, alors que les gouvernements successifs n’ont cessé de hâter la massification de l’enseignement, c’est-à-dire l’encouragement de tous les jeunes à pousser leurs études au bac, puis dans les filières du supérieur ? C’est que ce mouvement, démontre Camille Peugny, loin de changer la situation sociale, ne l’a que ‘‘repoussée plus loin dans le cursus scolaire’’. ‘‘Alors qu’auparavant, les enfants des milieux riches en capitaux économiques et culturels se distinguaient par des durées de scolarité plus longues (inégalités quantitatives), ils se distinguent aujourd’hui par le choix de filières d’excellence (…) (inégalités qualitatives)’’, écrit-il.

    Autrement dit, si les élèves de condition modeste passent de plus en plus le bac, c’est souvent un bac techno ou pro, qui offre des horizons professionnels rikikis, alors que les fils de cadres et d’enseignants misent sur le bac scientifique. Et si les premiers poursuivent dans le supérieur, c’est très souvent dans les filières universitaires les moins porteuses, laissant aux seconds les classes prépas et les grandes écoles d’ingénieurs ou de commerce, qui ouvrent toutes les portes. Bref, tout le monde reste plus longtemps à l’école, mais penser que tout le monde a les mêmes chances d’ascension sociale relève du trompe-l’œil.

    […]

    Heureusement, conclut le sociologue, les solutions existent pour fonder une ‘‘école véritablement démocratique’’ : d’abord, en finir avec la manière française de sélectionner précocement et s’inspirer de nos voisins qui classent et évaluent plus tard les enfants – ce qui garantirait à la fois plus d’efficacité et de justice sociale, comme le martèle depuis presque quinze ans l’enquête PISA de l’OCDE. Ensuite, ne plus laisser à l’école le ‘‘monopole de la formation’’. Il y a les diplômes scolaires, et puis, il y a la formation professionnelle : il est impératif de développer cette dernière – qui se trouve dans un état catastrophique – pour permettre plus de mobilité sociale.

    #éducation #inégalités #système_scolaire

  • « Le malheur français, c’est quelque chose qu’on emporte avec soi » (Rue89)
    http://www.rue89.com/2013/04/03/malheur-francais-cest-quelque-chose-quon-emporte-soi-241113

    En revanche, j’ai observé que les immigrés qui étaient passés par l’école en France depuis un très jeune âge étaient moins heureux que ceux qui n’étaient pas passés par l’école française. Ce qui me fait penser que les institutions de socialisation primaire formatent les choses assez lourdement.

    Quel rôle joue l’école dans la fabrication de la mélancolie française ?

    Avec les données dont je dispose aujourd’hui, je n’ai pas pu identifier les facteurs qui façonnent cette mentalité. On manque de données sur le bien-être des enfants. Je partage les conclusions des frères d’Iribarne, qui ont écrit qu’il y avait une contradiction dans le système français entre élitisme et égalitarisme. On dit à tout le monde : il y a égalité des chances.

    Mais on a un système super élitiste et unidimensionnel. On demande aux gens d’appartenir aux 5% des meilleurs (mais par définition, tout le monde ne peut pas y être), on les classe, et on considère que seuls le français, les maths et l’histoire comptent. On se fiche complètement qu’ils excellent en sport, en peinture, en musique, en conduite de projets...

    Il y a donc très peu de gens qui ont l’impression d’être vraiment au top. Ils se voient comme étant en échec ou moyens. A force d’être éduqués avec cette échelle de 0 à 20, beaucoup finissent par se voir au milieu de l’échelle. L’école française a plein d’avantages, elle produit des gens très bien formés, mais ce n’est pas l’école du bonheur.

    […]

    Et ça produit quoi ?

    Ça produit de l’estime de soi et de la confiance en soi. Précisément la base du bonheur. D’un point de vue rationnel, c’est intéressant de former des citoyens qui ont le courage d’affronter le monde, de prendre des risques, de se lancer en se disant qu’ils vont y arriver.

    #éducation #système_scolaire #bonheur

    • A propos de la « constante macabre »

      Le terme constante macabre a été inventé en 1988 par André Antibi, chercheur en didactique, et a été le sujet d’un livre éponyme paru en 2003.

      « Par "Constante macabre", j’entends qu’inconsciemment les enseignants s’arrangent toujours, sous la pression de la société, pour mettre un certain pourcentage de mauvaises notes. Ce pourcentage est la constante macabre1 »

      André Antibi dénonce2 ainsi à la fois le poids excessif qu’auraient la note et la systématisation des mauvaises notes dans le système éducatif français qui, d’après lui, sélectionnerait par l’échec avec comme conséquence le découragement et l’exclusion de nombreux élèves.

      (source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Constante_macabre)

      Sur André Abibi et son ouvrage éponyme :
      http://ecolesdifferentes.free.fr/constantemacabre.html

      Le Mouvement contre la constante macabre a 10 ans. André Antibi et son équipe fête cet anniversaire à l’occasion d’un colloque organisé à Paris le 17 juin en partenariat avec le Café pédagogique. « L’utilité de notre combat contre l’échec scolaire artificiel et la souffrance de nombreux élèves, est très largement reconnue, et le MCLCM a contribué à l’amélioration de notre système éducatif dans ce domaine. Nous poursuivrons notre action avec conviction et militantisme », nous a dit A. Antibi.

      (source : http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2013/04/15042013Article635016060770042853.aspx)

      Le site du Mouvement Contre la Constante Macabre :
      http://mclcm.free.fr

  • La Educaciòn Prohibida

    Documentaire (2h25) qui vise à alimenter le #débat sur la pertinence du #système_scolaire actuel et sur la façon dont l’acte d’éduquer est entendu, à travers des expériences éducatives alternatives.

    Le documentaire est en espagnol, mais il est possible (via l’interface You Tube) d’avoir les sous-titres en plusieurs langues, dont le français.

    À voir ici : http://www.educacionprohibida.com

    La Educación Prohibida es una película documental que se propone cuestionar las lógicas de la escolarización moderna y la forma de entender la educación, visibilizando experiencias educativas diferentes, no convencionales que plantean la necesidad de un nuevo paradigma educativo.

    La Educación Prohibida es un proyecto realizado por jóvenes que partieron desde la visión del quienes aprenden y se embarcaron en una investigación que cubre 8 países realizando entrevistas a más de 90 educadores de propuestas educativas alternativas. La película fue financiada colectivamente gracias a cientos de coproductores y tiene licencias libres que permiten y alientan su copia y reproducción.

    La Educación Prohibida se propone alimentar y disparar un debate reflexión social acerca de las bases que sostienen la escuela, promoviendo el desarrollo de una educación integral centrada en el amor, el respeto, la libertad y el aprendizaje.