Entretien avec #Pierre-Carles
Texte paru dans la revue Tête-à-tête, N° 3, Images du pouvoir, Printemps 2012
►http://www.pierrecarles.org/spip.php?article9
La partie la plus intéressante est peut-être la dernière, sur l’#autoproduction et la diffusion des œuvres critiques.
TàT : Ce film ne va donc sortir que sur support DVD ?
P. C. : Oui, mais on va surtout le diffuser sur internet à partir du 15 avril si tout se passe bien. On va demander aux internautes et aux spectateurs qui l’auront vu sur internet, de le financer après coup, soit en achetant le DVD, soit en faisant un don.
Ce film n’aurait pas pu voir le jour si, les uns et les autres, nous n’avions pas mis notre travail en participation. La #télévision n’avait aucune envie de le produire, le cinéma ne pouvait pas, donc, si ça vous intéresse, si vous voulez voir d’autres documentaires de ce type, il faudra les financer d’une manière ou d’une autre. C’est la première fois que nous allons mettre un de nos films en #libre-diffusion sur #internet. À terme, l’ensemble de mon travail y sera visible. C’est quelque chose qui est en construction.
TàT : En quoi la mise à disposition gratuite vous intéresse-t-elle ?
P. C. : Le principe m’intéresse à condition qu’il génère des ressources pour fabriquer des films. Il ne faut pas croire qu’on peut faire les choses gratuitement, elles ont un prix. Pour l’instant, Sony ne donne pas de caméras, les bancs de montage ne sont pas gratuits, travailler à la réalisation de films est un travail à plein temps qui demande un certain nombre de moyens. On ne peut pas faire ça bénévolement à moins de risquer de faire des films de mauvaise qualité. Le principe du bénévolat peut marcher une fois, mais il n’est pas viable à long terme.
Mes derniers films n’ont pas marché suffisamment pour générer des recettes ou en tout cas déclencher des financements automatiques de la part du CNC qui permettraient de démarrer d’autres films de manière autonome. Avec C-P Productions, nous sommes dans une situation délicate du fait de l’insuccès des deux derniers films produits par la société, Fin de concession et Squat. Le modèle économique que l’on avait constitué à l’époque de Pas vu pas pris arrive peut-être à son terme.
TàT : Est-ce qu’un film comme celui-ci a un budget comparable à celui d’un film « classique » ?
P. C. : C’est du travail, du montage, du tournage, du repérage, de la documentation, mais non, ce n’est pas comparable. Si on voulait le faire correctement, il nous faudrait au moins 70 000 euros. Ça nous permettrait de payer tout le monde. Là, on va le faire à l’arrache, chacun amène ce qu’il peut. Ce genre de films pas vraiment désirés par le système n’a pas d’autre possibilité d’être produit autrement qu’en autoproduction.
TàT : Ce fonctionnement vous convient-il ou est-ce un choix par défaut ?
P. C. : Non, ça ne me convient pas. Quand on est en situation fragile, économiquement parlant, on peut difficilement se consacrer à un film. Ce n’est pas une situation idéale.
TàT : Vous avez suivi la logique inverse, puisque vous vous êtes complétement grillé à la télévision et vous retrouvez dans une situation de plus en plus incertaine…
P. C. : Oui, c’est le prix à payer.