• 🛑 Payer pour percevoir ses aides : le désengagement de l’État laisse place au privé - Basta !

    Faire valoir ses droits au RSA ou à une allocation devient de plus en plus compliqué. Des sociétés privées se saisissent de cette opportunité et de la désorganisation des Caisses de sécurité sociale pour marchander l’accès aux aides.

    « Je ne saurais absolument pas quelles aides me correspondent, ni quelles démarches faire, ni où me présenter, ni avec qui parler… Ni rien. » Thomas, 37 ans, secoue la tête devant les caméras de TF1, dans un reportage du journal de 20 heures. Comme lui, des millions de personnes se retrouvent démunies en France face au difficile accès aux allocations sociales. La dématérialisation a encore accru la complexité (...)

    #RSA #prestationssociales

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    ▶️ https://basta.media/payer-pour-percevoir-ses-aides-le-desengagement-de-l-etat-laisse-place-au-p

    • . Ces services payants, pour faire valoir un droit censé être garanti par l’État, prospèrent sur la complexité des prestations sociales, et la lenteur des services publics, plus prompts à contrôler et à sanctionner, qu’à traiter convenablement les dossiers des demandeurs, comme l’illustre la situation des Caisses d’allocations familiales.

      vous devez fréquenter la jungle ? Prenez un guide ! ici, il s’agit de payer pour accéder à des droits, ce qu’impose l’opacité défensive des caisses et du monstre froid qui les commande. le terme aides est là, dans le langage courant (celui de la défaite) pour ramener au principe des « aides facultatives » c’est-à-dire attribuées selon des évaluations au procédures diverses, des arbitraires peu anticipables. tout l’inverse du droit dont relèvent pourtant le RSA, la prime d’activité, l’alloc chômage, l’ASPA, la CSS, en même temps que d’autres, dont l’#AAH est un bon exemple, se rapprochent de l’aide, puisque pour devenir un droit elle doit être d’abord accordée par une commission, au vu de l’"étude" d’un dossier, d’un cas, et en fonction du budget disponible, de la politique suivie en la matière.
      le « manque » d’assistantes sociales aggrave la situation. mais le passage obligé par les A.S., avec la sujétion qu’il implique, ne garantissaient déjà pas une information suffisante, puisque ces dernières évaluant qui parmi leurs « clients » mérite telle ou telle « aides », et à quel niveau.

      le pauvre, cet enfant à qui on donne ou refuse le biberon (ils vont boire !), cet enfant auquel on tape sur les doigts, et bien fort (expulsions locatives, interdictions bancaires, jobs de merde, prison, ...). fallait réussir, s’intégrer. chez les autres, ça inquiète (sombrer soi-même), ça rassure (on a fait ce qu’il faut pour ne pas en être), et ça distrait (il me coûtent, qu’on les mettent au taf au vrai, ou bine qu’on les pende !).

      #droits_sociaux #aides #jungle

    • La #dématérialisation participe de la volonté de l’état d’atomiser non seulement les #services_publics d’aide aux personnes mais aussi les services administratifs au sens plus large : une amie nous a confié qu’elle avait eu recours à une officine privée (payante) en ligne pour faire modifier la carte grise de la voiture du couple suite au décès de son mari.

      Pour la santé, pareil : tu dois te créer un compte sur doctolib si tu veux obtenir un rendez-vous dans un centre de radiologie. Le téléphone, tu peux oublier : ça ne sert plus qu’à prendre des selfies pour alimenter tes « stories » sur Insta ou TikTok.

      Le pire, c’est bien sûr la CAF, devenue un véritable léviathan qui paralyse d’effroi ses allocataires. Ne va surtout pas à l’encontre de leurs décisions, ils seraient capables de t’assigner au tribunal pour fraudes. Mon petit dernier vient d’en faire les frais : refus de poursuivre le versement de l’APL vu que (soit disant) il avait trop gagné en mai dernier. Résultat, le fils laisse tomber l’affaire (en s’asseyant sur 3 X 400 €) vu qu’il a plein d’autres projets plus importants et beaucoup plus motivants qu’un recours en indemnités auprès d’un tribunal administratif.

      La volonté d’affamer la bête des gouvernements successifs depuis 2007, et ce, par pure complaisance aux forces profondément réactionnaires de la société française, a permis que s’installe une profonde incurie au sein de tous les services publics. Le #non_recours n’est qu’une manifestation particulière de ce qu’il conviendrait de nommer globalement un régime de #terreur_administrative, lequel relève d’une volonté descendante de provoquer la panique et la soumission auprès des ayant-droits. Et tout cela n’a rien à voir avec la « phobie ».

      #starving_the_beast #marchandisation (des démarches pour faire valoir ses droits)

      Voir aussi tous les articles connexes sur la page de Basta.media à propos des CAF :

      https://basta.media/caf-declaration-en-ligne-prestations-APL-RSA-AAH-numerisation-chaos-raconte

      https://basta.media/Face-a-des-CAF-devenues-des-monstres-numeriques-sans-humanite-un-collectif-

      https://basta.media/CAF-controles-abusifs-des-allocataires-CNAF-score-de-risque-fraude-tribune-

    • L’institution des aides sociales (je les prends pour une seule pour me mettre dans la perspective des ayants droit sans formation en la matière) en Allemagne est aussi opaque qu’en France. Il y a également un biotope d’associations, entreprises, conseiller et avocats qui se font de l’argent en s’occupant des démarches administratives.

      La différence : l’état allemand est obligé de les payer pour leur travail.

      Quand moi, analphabète en matières officielles, je me trouve sans les sous pour payer mon appartement (toujours si j’en a un), je vais voir mon conseiller de quartier qui activera le fond municipal contre les évictions qui se chargera de mes loyers impayés. En même temps mon conseiller remplira ma demande d’allocations (Wohngeld, Bürgergeld, etc.) et me conseillera d’aller voir l’institution officiellement chargée de résoudre les problèmes d’endettement individuel où on établira avec moi un plan de désendettement.
      Si mes problèmes sont trop compliquées pour les résoudre avec l’aide d’un simple conseiller, je serai orienté vers des avocats spécialisés qui me représenteront au et seront payés par l’état.

      Mon rôle dans ce processus sera de suivre les consignes de mes conseillers, de prendre rendez-vous avec aux quand j’en ai besoin (quand je trouve un lettre du « Amt » dans ma boîte postale). On ne résoudra pas mon problème de pauvreté mais j’aurai des partenaires compétents et compréhensifs qui me protégeront contre l’incompétence, le harcèlement et l’injustice de la part des agents de l’institution des aides sociales. Si ma santé le permet je serai en mesure de reconstruire ma vie.

      Malheureusement les choses ne fonctionnent pas exactement comme ça. Je dois être en mesure de les trouver et communiquer avec ces conseillers. Quand je suis déjà à la rue, quand je n’ose pas sortir, quand je suis malade et tout seul, c’est un grand effort de partir à la recherche d’aide. Si je suis réfugié les choses sont tellement compliquées que la démarche décrite n’est pas suffisante. Je risque de rencontrer des conseillers qui ne savent pas identifier les bonnes ressources pour moi. Si je ne me trouve pas dans une grande ville où il y a des structures d’aide et de conseil, je risque de devoir me débrouiller tout seul.

      Bref, c’est souvent le parcours du combattant. Cette situation n’est pas le résultat du hasard mais le produit de l’idéologie qui considère les pauvres comme responsables de leur situation et de lois qui constituent un compromis entre cette idéologie fasciste et la constitution qui veut que l’état allemand soit un état social.

      #Allemagne #France #aide_sociale #exclusion

  • Meurtre d’un homme de 27 ans à Marseille : ce qui apparaîtra désormais dans les titres de la presse mainstream ( et aux ordres), c’est cette volonté des rédactions à éduquer leur lectorat au concept de « probabilité »

    Les infos de 6h - Marseille : ce que l’on sait de la mort d’un homme probablement touché par un tir de flash-ball
    Un homme de 27 ans est décédé à Marseille dans la nuit du 1er au 2 juillet, probablement à la suite d’un tir de "type flash-ball". (RTL)

    Homme mort après un « probable » tir policier de LBD à Marseille : ce que l’on sait (Libé)

    Selon le parquet, les premiers éléments de l’enquête « permettent de retenir comme probable un décès causé par un choc violent au niveau du thorax causé par le tir d’un projectile de « type flash-ball » . (La Marseillaise)

    Marseille : enquête après le décès d’un homme probablement touché par un tir de flash-ball (Europe 1)

    Un homme décédé à Marseille, probablement après un tir de flash ball (Le Dauphiné)

    Les éléments de l’enquête indiquent que la cause du décès est probablement due à "un choc violent au niveau du thorax" causé par ce type d’arme. (Var Matin)

    #probablement #éventualité #Parquet #enquêtes #justice_menottes_prison #violences_policières #IGPN #terreur_d'état #pinochétisation (de la classe politique) #14_juillet

    • Oui mais bon, pourquoi n’était-il pas chez lui ? C’est comme une femme violée à cause de sa jupe trop courte, ou dans la rue seule, ou trop ceci ou trop cela...

    • À Marseille, une enquête ouverte après la mort d’un homme probablement due à un tir de flash-ball
      Publié le Mercredi 5 juillet 2023 | Julia Hamlaoui | L’Humanité
      https://www.humanite.fr/societe/mort-de-nahel/marseille-une-enquete-ouverte-apres-la-mort-d-un-homme-probablement-due-un-

      Un homme de 27 ans a trouvé la mort à Marseille, dans la nuit du samedi 1er au dimanche 2 juillet, alors que la ville était en proie à de nouvelles violences consécutives à la mort de Nahel, tué à bout portant par un policier mardi 27 juin à Nanterre. Sans qu’il soit pour l’heure établi de savoir s’il participait aux émeutes dans la cité phocéenne, la victime est probablement décédée à la suite d’un tir de flash-ball, selon les autorités.

      Le parquet a ouvert une information judiciaire pour « coups mortels avec usage ou menace d’une arme », a révélé, mardi 4 juillet, le quotidien La Marseillaise . La police judiciaire et l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) ont été cosaisies, selon une source proche de l’enquête citée par l’AFP. « Les premiers éléments de l’enquête permettent de retenir comme probable un décès causé par un choc violent au niveau du thorax causé par le tir d’un projectile de »type flash-ball«  », précise le parquet qui ajoute que l’impact « a entraîné un arrêt cardiaque et donc la mort dans un temps proche ». (...)

  • Petit-neveu de Macron « tabassé » ? Analyse d’un déchaînement médiatique et judiciaire - Contre Attaque
    https://contre-attaque.net/2023/05/17/petit-neveu-de-macron-tabasse-analyse-dun-dechainement-mediatique-et

    Les personnes relâchées vont alors expliquer leur version en sortant du commissariat. Des poubelles ont été posées devant l’entrée de la chocolaterie, fermée au moment des faits, à 22h. Aucune dégradation, aucun projectile, comme c’était raconté. « Le neveu de Brigitte Macron a bousculé notre camarade, on est venus pour séparer et, quand on est repartis, une voiture de la BAC est venue ». Un autre homme arrêté confirme cette version : « Jean-Baptiste Trogneux est intervenu, il a plaqué au sol mon collègue. Autant vous dire que mon collègue ne s’est pas laissé faire ». Une personne s’est alors interposée : « un autre collègue est juste intervenu » pour les séparer. Le fait qu’ils aient été relâchés, probablement sur la base de la vidéosurveillance, va dans ce sens plutôt que celle de la version répétée en boucle la veille.

    « On a retenu la personne de la boutique qui voulait frapper un de nos camarades, et c’est lui qui se retrouve en garde à vue pour rien du tout » répètent ces témoins.

    Il s’agit en fait d’une altercation : un commerçant mécontent a bousculé un manifestant, des coups ont été échangés, heureusement sans gravité, avant qu’un autre manifestant ne fasse cesser les tensions. Pas de quoi monopoliser toute l’attention médiatique pendant des jours, ni créer un martyr du macronisme. Des tabassages, des vrais, qui provoquent des blessures graves, il y en a eu des centaines par la police depuis le début du mouvement, sans que les médias n’en parlent.

    • Superbe. Le Canard, Libé ou Mediapart en profitent pour tacler dans les grandes largeurs, ou ils jouent pas le jeu et font les morts ?

    • Alors oui, mais… « un commerçant mécontent », c’est pas si simple non plus :

      Des poubelles ont été posées devant l’entrée de la chocolaterie, fermée au moment des faits, à 22h. Aucune dégradation, aucun projectile, comme c’était raconté.

      Donc certes, il ne s’agit pas d’une bande qui est allée tabasser le neveu de madame Macron. Mais ce n’est pas non plus « un commerçant » au hasard : ce commerce est ciblé justement parce qu’il est le commerce Trogneux. Alors soit on m’explique qu’on a installé des poubelles devant tous les commerces d’Amiens (l’article se garde bien de prétendre une telle chose), soit il va falloir un peu justifier pourquoi tu t’en prends spécifiquement à cette chocolaterie, mais comme chacun le suspecte, c’est uniquement parce qu’elle est de la même famille que Madame. Comme logique de contestation, je trouve ça pas bien glorieux non plus : si tu as une logique d’action confuse et illisible, tu t’étonnes pas trop que la propagande d’en face sur-exploite tes conneries.

    • c’est pas une « logique d’action » à la manière des buzz de Roussel ou d’une intervention XR, c’est une logique de situation. t’es là avec tes potes dans ce que tu peux créer d’espace public (merci d’attendre la fermeture des commerces), un riche qui a tout moyen de déléguer la milice du capital pour ce faire vient t’emmerder, te prendre physiquement à partie, c’est pas sur une casserole que tu tapes.
      un membre de cette bourgeoisie locale dont la fortune commence après l’écrasement de La Commune, liée aux notabilités locales de la droite (De Robien), qui tient la ville ripolinée d’Amiens tout autant que Le Touquet et la compta de la CNAF joue la revanche contre les GJ et tous ceux qui ne sont rien. succès assuré. mille Pravda capitalistes en action. 3 personnes en détention.

      Jean-Baptiste Trogneux est diplômé d’une école d’ingénieur l’Hetec et effectue plusieurs stages d’études en Asie dans l’#industrie_du_luxe

      https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Trogneux_(entreprise)

      #bourgeoisie #prison #répression

    • Les autorités annoncent même désormais que des policiers vont passer « chaque heure » sur les plages de fermeture de la chocolaterie. Une protection plus rapide et efficace que pour le maire de Saint-Brévin visé par l’extrême-droite.

    • Le monopole bourgeois de l’indignation face à la violence @colporteur @touti @sombre

      "D’un côté nous avons un notable très entouré, bien défendu et soutenu par l’ensemble de la classe politique et de l’autre un salarié syndicaliste, qui semble terrifié par ce qu’il a vécu, et dont personne ou presque ne parle."

      "Le fait que Ford soit devenu un symbole du capitalisme de compromis en dit très long sur la capacité de la bourgeoisie à faire oublier, en permanence, sa propre violence."

      "Non seulement la bourgeoisie peut, de plus en plus, compter sur des alliés violents, mais elle le fait d’autant plus facilement que c’est aussi elle qui dit ce qui est violent et ce qui ne l’est pas."

      "Rappelons-nous toujours que ces gens sont totalement biaisés en matière d’appréciation de la violence, qu’ils appartiennent à un groupe social qui a été le plus violent de tous au cours des siècles, et qu’ils ont un rapport opportuniste à la qualification de la violence : en ce moment, ils ont besoin de criminaliser les manifestants et l’extrême-gauche et d’invisibiliser la violence patronale et d’extrême-droite. En la matière, la réaction de Jean-Luc Mélenchon est assez fine : “ Des commentateurs indifférents aux tentatives de meurtres et agressions racistes contre des insoumis me somment de me prononcer sur l’agression à Amiens contre le chocolatier Trogneux. Je lui exprime ma compassion et je joins ma protestation à la sienne. Je demande à Macron et Madame d’en faire autant pour nos amis agressés ou menacés sans réserver leur sollicitude au seul Zemmour quand il fut molesté ” : bien tenté, mais ça n’arrivera pas."

      Nicolas Framont

      https://seenthis.net/messages/1003495

  • Entretien avec #Mathieu_Rigouste : une #généalogie coloniale de la police française
    (2017 —> pour archivage)

    L’entretien qui suit est la transcription d’une conversation ayant eu lieu le 23 septembre 2016 afin de figurer dans le 8ème numéro de The Funambulist (disponible en ligne et dans certaines librairies) dedié a une critique de la police dans differents contextes politiques et géographiques (États-Unis, Palestine, Égypte, Allemagne, Brésil, France). https://thefunambulist.net/magazine/police

    LÉOPOLD LAMBERT : Mathieu, ton travail consiste à beaucoup d’égards de mettre à jour la #généalogie_coloniale déterminante de la #police_française. J’aimerais donc commencer cette conversation avec le #massacre du #17_octobre_1961 qui a vu la police parisienne tuer entre 40 et 100 algérien-ne-s lors de manifestations ayant rassemblé environ 30 000 personnes en solidarité avec le #FLN. Lorsque nous évoquons la répression sanglante de l’état français au moment de la révolution algérienne, nous pensons souvent aux #violences commises en Algérie mais pas nécessairement en « métropole » ; c’est pourtant là que ce se détermine la police française d’aujourd’hui en relation à la partie de la population provenant d’anciennes colonies de « l’Empire » (nous en parlerons plus tard). Peux-tu nous décrire cette relation, ainsi que de la figure déterminante de #Maurice_Papon, préfet pour le régime Vichiste, puis à #Constantine en Algérie et enfin à l’œuvre à Paris donnant l’ordre d’un tel massacre ?

    MATHIEU RIGOUSTE : Il y a plusieurs racines de l’#ordre_sécuritaire. L’axe de mes recherches, c’est la #restructuration_sécuritaire qui accompagne la restructuration néolibérale du #capitalisme à l’époque contemporaine. Dans tous mes travaux je retombe sur ce mécanisme dans lequel on voit la société impérialiste française importer dans son système de #contrôle, de #surveillance, de #répression des dispositifs qui viennent des répertoires coloniaux et militaires. Au sein de l’Algérie qui est la colonie de peuplement et d’expérimentations d’une gestion militaire de la population colonisée la plus poussée, sont développés des répertoires d’#encadrement qui vont influencer en permanence, depuis 1830, la restructuration du contrôle de la population « en métropole ». Notamment par l’application de ces dispositifs sur les populations directement désignées comme étant la continuité des indigènes en Algérie, c’est-à-dire principalement les #arabes à #Paris. On a donc des répertoires particuliers, des #régimes_policiers de #violences appliqués aux colonisés « en #métropole » qui font un usage régulier de pratiques de #coercition, d’#humiliation, de #rafles, d’#assassinats, de #tortures longtemps avant la #guerre_d’Algérie et de manière continue. On a déjà une police dans les années 30 qui s’appelle #Brigade_de_surveillance_des_Nord-Africains (#BNA) qui est donc une police opérant sous critères racistes, chargée par l’utilisation de la coercition d’encadrer les français de souche nord-africaine. Ces répertoires vont se transmettre. La continuité de l’état, ça veut dire la continuité des personnels, des administrations, des bureaucraties. Et à travers la restructuration des unités de police, se transmettent des systèmes de #discours, d’#imaginaires, d’#idéologies, et de #pratiques.

    Donc au moment du 17 octobre 1961, il y a déjà tous ces répertoires qui appartiennent à l’arsenal de l’encadrement normal et quotidien des arabes à Paris. J’essaye d’alimenter une piste un peu nouvelle qui apporte un regard supplémentaire aux travaux critiques qui avaient été faits sur la question et qui essaye de montrer comment les doctrines de #contre-insurrection dominaient la pensée militaire de l’époque et comment elles ont été importées et réagencées après leur application industrielle pendant la guerre d’Algérie, notamment à partir de 1956, pour passer du répertoire militaire et colonial dans le répertoire policier de l’écrasement des arabes à Paris. Tu l’as dit, ça passe par des personnels ; on pense à la figure de Maurice Papon en effet, mais aussi à des « étages » moyens et inférieurs de la police, les #CRS, les #gendarmes_mobiles… tout le monde fait son séjour en Algérie pendant la guerre en tant que policier en formation ou pour servir puisqu’on avait utilisé la plupart des effectifs militaires et policiers disponibles à l’époque. Il y a donc déjà une masse de policiers et de gendarmes qui ont été faire la guerre aux colonisés et ils se sont appropriés le modèle de contre-insurrection, le modèle de #terreur_d’Etat. Et puis, il y a aussi tout le contingent, les « #appelés », toute une génération de jeunes mâles qui vont se construire – certains, en opposition, mais une minorité – dans cette guerre d’Algérie, et à travers toute l’économie psychique que ça suppose, les #peurs et la #férocité que ça va engendrer dans toute une génération qui prendra ensuite les manettes de la #Cinquième_République.

    Ce que j’essaye de montrer donc, et que l’on voit bien dans le discours de Maurice Papon à l’Institut des Hautes Études de Défense Nationale (IHEDN) en 1960, c’est que lui en tant que #IGAME, c’est-à-dire super préfet itinérant en Algérie, se forme à la contre-insurrection – c’était déjà un spécialiste des mécanismes de #purges, il s’était illustré par la #déportation des juifs de Bordeaux pendant l’occupation – et donc, assez logiquement, est nommé super préfet en Algérie pour organiser l’écrasement de la #révolution_algérienne. Il se forme ainsi à la contre-insurrection et expériment une forme de remodelage d’une contre-insurrection militaire et coloniale en contre-insurrection militaro-policière et administrative. Il se fascine completement pour cette doctrine qui exhorte à se saisir de l’ennemi intérieur pour pacifier la population, qui dit que le guérillero, le partisan, est comme un poisson dans l’eau, l’eau étant la population, et donc qu’il faut se saisir de la population. Ce système idéologique et technique va être élevé au rang de doctrine d’état et devenir hégémonique dans la pensée militaire francaise à partir de 1956. Dès lors, la doctrine « de la guerre (contre) révolutionnaire » alimente la restructuration des appareils de défense intérieure, « la #défense_intérieure_du_territoire » à l’époque, c’est-à-dire les grands plans de #militarisation_du_territoire en cas d’invasion soviétique. #Papon fait partie de la plateforme de propulsion d’une analyse qui dit que probablement une invasion soviétique – c’est la grille de lecture générale de toute la pensée militaire de l’époque – serait certainement précédée de manifestations géantes communistes et nord-africaines. Papon a en quelque sorte ouvert les plans de défense intérieure du territoire le 17 octobre. Il n’y avait eu que très peu de renseignements du côté de la Préfecture et ils ont été pris au dépourvu ; lorsqu’ils se sont rendus compte le 16 au soir, ou le 17 au matin qu’il y allait il y avoir des manifestations, ils sont allés chercher dans les répertoires disponibles, en l’occurrence la défense intérieure du territoire qui sont donc des plans de gestion militaire de la métropole en cas d’invasion soviétique. Ca explique pas mal de choses sur la puissance du dispositif mis en œuvre. Sur la radio de la police, on diffusait des messages d’#action_psychologique, on disait que les arabes avaient tué dix policiers à tel endroit, etc. pour exciter la #férocité des policiers. Il y a encore un autre aspect qu’il faut prendre en compte – j’y travaille en ce moment – c’est le soulèvement des masses urbaines de décembre 1960 en Algérie. C’est un peu la réponse à la #bataille_d’Alger, c’est-à-dire la réponse du peuple colonisé à la contre-insurrection. C’est un déferlement des masses (avec des enfants, des vieux, des femmes, etc.) dans les rues des grandes villes algériennes qui déborde la militarisation, déborde la contre-insurrection militaire et policière et emporte le versant politique de la guerre d’Algérie alors que le versant militaire était quasiment perdu. Le FLN et l’#Armée_de_Libération_Nationale étaient quasiment K.O. technique, militairement parlant et c’est donc le plus petit peuple qui remporte l’aspect politique de la guerre d’Algérie. Ça va marquer très très fort les administrations, les états-majors politiques, militaires et policiers et quand Papon se fait « ramener » à Paris c’est parce qu’il est reconnu comme un spécialiste de la gestion des arabes aux colonies et qu’on lui demande de faire la même chose à Paris. Il emporte donc cette mémoire avec lui et au moment où son état-major obtient l’information qu’il va il y avoir des manifestations organisées par le FLN et que des algériens vont marcher, depuis les périphéries vers le centre-ville – c’est-à-dire le même mouvement qu’en décembre 1960 en Algérie – il va utiliser l’arsenal d’écrasement qui est à sa disposition.

    Bien entendu, tout cela va semer des graines dans toute la Cinquième République qui est fondée autour du coup d’état militaire qui porte De Gaulle au pouvoir en 1958 et à travers toute cette grammaire idéologique qui considère les arabes et les communistes comme un #ennemi_intérieur dont il faudrait se saisir pour protéger la France et « le monde libre ». Voilà pour le contexte idéologique.

    LÉOPOLD LAMBERT : Dans le livre qu’est devenu ta thèse, L’ennemi intérieur (La Découverte, 2009), tu décris cette généalogie dans de grands détails. Peux-tu nous parler en particulier de la manière dont la doctrine de contre-insurrection coloniale française, élaborée d’abord par des militaires comme le Maréchal #Bugeaud au moment de la colonisation de l’Algérie, puis par d’autres comme #Roger_Trinquier, ou #Jacques_Massu au moment de la guerre de son indépendance a par la suite influencé d’autres polices et armées à l’échelle internationale – on pense notamment à Ariel Sharon ou David Petraeus ?

    MATHIEU RIGOUSTE : On peut dire que c’est à l’origine même de la construction de l’Etat. L’Etat se forge comme #contre-révolution. C’est un appareil qui permet aux classes dominantes de refermer soit le mouvement révolutionnaire soit le temps et l’espace de la guerre pour asseoir leur domination. Tout état se forme donc sur des appareils de contre-insurrection. Du coup, on trouve une pensée contre-insurrectionnelle chez #Sun_Tzu ou dans toute autre philosophie politique. Mais effectivement avec l’avènement de l’état nation moderne, du capitalisme et de sa version impérialiste, la contre-insurrection va elle-même prendre des formes modernes, industrielles, va se mondialiser, va se techniciser, va se rationaliser, et va évoluer en même temps que les systèmes technologiques. Du coup on a des formes modernes de doctrines de contre-insurrection chez le Maréchal Bugeaud en effet. Lui-même, son parcours et sa pensée reproduisent le mécanisme de restructuration impériale, c’est-à-dire l’importation de dispositifs issus de l’expérimentation coloniale et militaire vers le domaine du contrôle. Il va ainsi pouvoir expérimenter des pratiques contre-insurrectionelles à travers la conquête de l’Algérie avec toute sortes de dispositifs qui vont perdurer, comme les rafles, les déplacements de population, etc. et d’autres qui vont être mis de côté comme les enfumades, mais il y reste bien une logique d’extermination durant toute la conquête de l’Algérie.

    Pendant les dernières décennies de sa vie, Bugeaud ne cesse d’insister sur le fait qu’il a constitué une doctrine de contre-insurrection applicable au mouvement ouvrier en métropole. Il passe également beaucoup de temps à démontrer les similarités qu’il y aurait entre le processus révolutionnaire – ce que lui appelle « les insurrections » – au XIXe siècle en métropole et les révoltes aux colonies. À la fin de sa vie, il écrit même un livre (qui ne sera pas distribué) qui s’appelle La guerre des rues et des maisons dans lequel il propose de transférer son répertoire de contre-insurrection à la guerre en ville en métropole contre le peuple et dans lequel il développe une théorie d’architecture qui va se croiser avec toute l’hausmannisation et qui correspond à l’application de la révolution industrielle à la ville capitaliste. On va donc voir des doctrines militaires et coloniales passer dans le domaine policier en même temps que Hausmann « perce la citrouille » comme il dit ; c’est-à-dire en même temps qu’il trace les grandes avenues qui permettent à la police ou l’armée de charger les mouvements ouvriers. On introduit également tout cet imaginaire de la tuberculose, des miasmes, etc. On assimile les misérables à une maladie se répandant dans Paris et il faudrait donc faire circuler l’air. C’est comme aujourd’hui dans la rénovation urbaine, on ouvre des grands axes pour que la police puisse entrer dans les quartiers populaires le plus facilement possible et aussi pour les enfermer. Et on invoque la circulation de l’air. On a donc ces logiques avec tout un imaginaire prophylactique, hygiéniste, qui se met en place en même temps qu’on importe le répertoire contre-insurrectionnel dans le domaine de la police sur toute la seconde partie du XIXe siècle.

    Avec la restructuration impérialiste, les Etats-nation, les grandes puissances impérialistes du monde occidental vont s’échanger en permanence leurs retours d’expériences. On en a des traces dès 1917 après la révolution russe, où on voit donc les polices et les armées du monde occidental se faire des comptes rendus, s’échanger des synthèses d’expérience. Et c’est comme ça tout au long du XXe siècle. Tu parlais d’Ariel Sharon ; on a des traces du fait que des envoyés spéciaux de l’armée (et peut-être aussi de la police) israélienne qui ont été en contact et qui ont sans doute été également formés au Centre d’Instruction à la Pacification et à la contre-Guérilla (CIPCG) en Algérie. Les spécialistes de la contre-insurrection français et israéliens s’échangent donc, dès la guerre d’Algérie, des modèles d’écrasement de leurs ennemis intérieurs respectifs. On a donc une sorte de circulation permanente des textes révolutionnaires et contre-révolutionnaires. J’avais travaillé là-dessus pour une préface que j’ai écrite pour la réédition du Manuel du guérillero urbain ; on pense que ce manuel a beaucoup plus circulé dans les milieux contre-insurrectionnels que dans les mouvements révolutionnaires – ceux-ci disaient d’ailleurs qu’il n’avaient pas vraiment eu besoin d’un manuel de guérilla urbaine dans les années 1970. On a donc une circulation permanente et parfois paradoxale des textes révolutionnaires et contre-révolutionnaires, et des expériences.

    LÉOPOLD LAMBERT : Et des films comme La bataille d’Alger !

    MATHIEU RIGOUSTE : Exactement ; j’allais y venir. Ce film est d’abord censuré les premières années mais il va circuler en sous-main et il va être validé très rapidement par l’armée française qui dit que les choses se sont passées de manière très proche de ce qu’on voit dans le film. Celui-ci va donc à la fois permettre d’introduire la question contre-insurrectionnelle et le modèle français notamment. Bien que ça n’ait pas forcément forcé l’application exacte de ce modèle dans toutes les armées occidentales, on retrouve ce film dans beaucoup de formations militaires étrangères. On retrouve le film dans des mouvements révolutionnaires également : on sait par exemple que les zapatistes le projettent de temps en temps et s’en servent, d’autant que l’armée mexicaine est une grande collaboratrice de l’armée française. La gendarmerie mexicaine qui a tué des enseignants à Oaxaca il y a trois mois venait d’être formée par la gendarmerie française à ce modèle de gestion des foules, mais aussi au maniement des armes que la France vend avec.

    LÉOPOLD LAMBERT : Dans un autre livre, La domination policière (La Fabrique, 2012), tu dédies un chapitre entier à une branche de la police française qui est sans doute celle contribuant le plus à la continuation de la ségrégation coloniale de la société française, en particulier dans les banlieues, la Brigade AntiCriminalité (BAC). Quelqu’un comme Didier Fassin a fait une étude anthropologique très utile mais, somme toute assez académique puisque venant de l’extérieur, mais toi-même a vécu la plus grosse partie de ta vie en banlieue parisienne, à Gennevilliers et tes écrits peuvent ainsi nous donner un regard plus incarné à la violence raciste (et souvent sexiste et homophobe) qu’une telle branche de la police développe. Peux-tu brièvement nous retracer l’histoire de la BAC et nous parler de son action en banlieue ces dix dernières années (cad, depuis les révoltes de 2005) ?

    MATHIEU RIGOUSTE : Les Brigades AntiCriminalités représentent assez bien ce que j’essaye de démontrer dans mes travaux sur le capitalisme sécuritaire parce qu’elle a deux origines ; c’est la fusion des polices endo-coloniales et de la restructuration néolibérale de l’État. Ce sont des polices qui vont être formées au début des années 1970 et qui vont aller puiser dans les personnels, dans les grilles idéologiques, dans les boites à outils pratiques des polices endocoloniales. Je dis endocolonial pour parler de ces polices comme la Brigade de surveillance des Nord-Africains, et par la suite les Brigades Agression et Violence qui déploient les repertoires coloniaux sur des populations internes au pays sur des critères socio-racistes. Je parle d’endocolonialisme car ce ne sont pas les mêmes régimes de violence que ce qui est appliqué aux colonies et ce ne sont pas les mêmes régimes de violence appliqués aux classes populaires blanches – les Black Panthers ne se prenaient pas tellement la tête ; ils parlaient juste de colonies intérieures. Et parce que la société impérialiste a besoin de maintenir la surexploitation et la surdomination d’une partie des classes populaires, la partie racisée, elle a aussi besoin d’une police spécifique pour ça. C’est pour ça qu’après 1945, c’est-à-dire après le vrai-faux scandale de la collaboration de la police française à la destruction des juifs d’Europe, la bourgeoisie Gaulienne invente « la France résistante » et tente de faire croire que ce racisme a été renvoyé aux oubliettes. Mais bien-sûr on va reproduire les mêmes types de dispositifs avec souvent les mêmes personnels – on va aller rechercher les gens qui étaient dans les BNA vu qu’ils savent faire et qu’on va leur refiler le même boulot – et on va trouver une nouvelle dénomination, celle des Brigades Agression et Violence. Un appareil de gestion socio-raciste va ainsi être mystifié par cette dénomination, ce qu’on retrouve également dans la dénomination d’AntiCriminalité aujourd’hui dans cette rhétorique de la « guerre à la délinquance » qui permet de cacher les appareils de production du socio-apartheid derrière des mythes légalistes.

    On se retrouve donc avec une police qui fait à peu près la même chose, qui se rationalise, se modernise, et au tout début des années 1970, c’est-à-dire juste après 1968 – parce que dans tous ces ennemis intérieurs, il y a aussi le gauchiste, la figure qui n’avait jamais complètement disparue du révolutionnaire qu’incarnait la figure du fellagha – on considère qu’il faut des polices modernes qui vont aller dans les quartiers populaires installer la nouvelle société rationnelle, optimisée, néolibérale, etc. On va donc aller chercher dans les répertoires d’idées, de pratiques, de personnels, pour forger une nouvelle police. La première expérimentation se fait en Seine-Saint-Denis, c’est pas un hasard et en 1973, on file à un ancien des Brigades Agression et Violence la charge de policer les quartiers populaires de Seine-Saint-Denis et son unité va donc s’appeler la Brigade AntiCriminalité. Il va mettre à profit tout ce qu’on apprend à l’époque dans les grandes écoles de la nouvelle société, c’est-à-dire, ce qui s’appellera bientôt le néomanagement : l’application aux appareils d’état de la restructuration néolibérale dans les entreprises en quelques sortes. D’ailleurs, la doctrine de la guerre contre-révolutionnaire va elle-même être transposée dans les théories néolibérales et on parlera de doctrines de « guerre économique » par exemple. Il s’agit de détruire l’entreprise ennemie, en l’empoisonnant, en quadrillant son marché, en utilisant des agents de renseignement, tout ça nait au cours des années 1970. Cette première BAC va influencer la naissance d’autres unités sur le même mode dans différente villes et on va ainsi appliquer aux quartiers populaires des méthodes de gestion endocoloniales ce qui va mener aux premières grandes révoltes contre les violences policières dans les cités.

    Il apparait également une nouvelle logique comptable qu’on va appeler aujourd’hui « la politique du chiffre » qui consiste à optimiser le rendement, la productivité de la machine policière. Faire du chiffre, ça veut dire faire le plus possible de « bâtons », c’est-à-dire des « mises-à-disposition ». Ils appellent ça « faire une affaire » ; une affaire, c’est ramener quelqu’un et une histoire à traiter pour l’Officier de Police Judiciaire (OPJ) et si cette histoire est suffisamment utilisable pour en faire une affaire auprès du procureur et du coup aller jusqu’en justice et mettre cette personne en prison ou en tout cas essayer, ça fera un « bâton ». Ces bâtons gonflent une carrière et donc par exemple un commissaire qui veut « grimper », devenir préfet ou je ne sais quoi, il a tout intérêt à développer des unités de BAC dans son commissariat parce que celles-ci font beaucoup de mises-à-disposition puisqu’elles fonctionnent sur le principe du flagrant délit – les Brigades Nord-Africaines fonctionnaient déjà sur cette idée. Le principe du flagrant délit, c’est un principe de proaction. On va laisser faire l’acte illégal, on va l’encadrer, voire l’alimenter, voire même le suggérer ou le produire complétement pour pouvoir se saisir du « délinquant » au moment où il passe à l’action. La BAC est donc un appareil qui tourne beaucoup autour de la production de ses propres conditions d’extension. Cette logique de fond, c’est notamment ça qui va faire que les BAC vont se développer dans l’ère sécuritaire, c’est parce qu’elles font beaucoup de chiffre et qu’elles produisent également beaucoup de domination socioraciste, dont l’Etat a besoin pour contenir le socio-apartheid. Ceci se trouve dans le fait que le plus facile pour faire des mises-à-disposition et remplir ainsi cette mission néolibérale consiste à « faire » des ILS et des ILE : des Infractions à la Législation sur les Stupéfiants – des mecs qui fument des joints – et des Infractions à la Législation sur les Étrangers – des sans-papiers. Comment on trouve du shit et des gens qui n’ont pas de papiers ? Eh bien on arrête les noirs et les arabes. On traine donc autour des quartiers populaires pour faire des arrestations au faciès sur les classes populaires de couleur.

    Voilà comment nait en gros la BAC dans les années 1970 ; elle s’est ensuite développée tout au long des années 1980, d’abord par l’intermédiaire des BAC de Surveillance de Nuit (BSN) et au début des années 1990 et l’avènement de Charles Pasqua – le symbole le plus caricaturale des logiques politiques, policières et militaires de la guerre d’Algérie et dont la carrière politique est structurée autour de la chasse à l’ennemi intérieur – au Ministère de l’Intérieur, il va intensifier cette utilisation des répertoires de contre-insurrection et va être à la pointe de la genèse du système sécuritaire français. C’est lui notamment qui va rendre possible que toutes les villes de France puisse développer des BAC. Ce qui est à nouveau très intéressant du point de vue du capitalisme sécuritaire c’est que les BAC sont des unités qui utilisent beaucoup de matériel, et qui en revendiquent beaucoup, qui « gueulent » pour être de plus en plus armées. Ça c’est très intéressant pour les industriels de la sécurité. Pour les flashballs par exemple ; les BAC ont demandé à en être armées très vite, elles veulent les nouveaux modèles et elles participent avec les industriels à créer les nouveaux modèles et, bien-sûr, c’est elles qui utilisent le plus de munitions : le flashball est utilisé tous les soirs pour tirer dans les quartiers populaires de France. C’est la même chose pour les grenades lacrymogènes ; on en voit beaucoup dans le maintien de l’ordre des manifestations de mouvements sociaux dans les centre-villes mais les gaz sont utilisés quotidiennement dans les quartiers populaires.

    Le phénomène continue de se développer dans les dix dernières années. La BAC semble vraiment caractéristique de ce capitalisme sécuritaire, notamment par sa férocité mais aussi par son aspect ultralibéral, ultraproductif, ultraoptimisé, ultraviril, ultramédiatique : la BAC se met en scène, les agents s’inspirent énormément de ce qu’ils voient à la télévision… On a même une extension de ce qu’elle a inventé comme système de domination et d’écrasement des quartiers populaires vers la gestion des autres mouvements sociaux, comme récemment des luttes contre la loi travail. Généralement, la BAC est utilisée comme dispositif de pénétration, de saisie, de capture et elle est de plus en plus combinée à des dispositifs d’encerclement, d’enfermement, d’étranglement dans lesquels on utilise plutôt les CRS, les gardes mobiles. On a vu pendant le mouvement contre la loi travail, les BAC qui étaient employées à faire « du maintien de l’ordre ». À Toulouse, on a vu les effectifs des BAC sont utilisés dans l’expérimentation de nouveaux dispositifs hybrides : capable de faire et du maintien de l’ordre et de la capture, de l’intervention, de passer de l’un à l’autre en permanence, et de passer à des niveaux d’intensité très hauts très rapidement. La BAC rejoint ainsi la logique de restructuration de tous les appareils en ce moment qui consiste à devenir rhéostatique : être capable de s’adapter comme le mode de production toyotiste, c’est-à-dire s’adapter le plus instantanément à la demande, avec le moins de stock et de dépenses possibles et de la manière la plus rationalisée qui soit.

    LÉOPOLD LAMBERT : Tout comme Hacène Belmessous dans le deuxième numéro de The Funambulist, tu décris la manière dont « la rénovation urbaine » enclenchée en 2003 constitue à beaucoup d’égards une manière pour la police de s’approprier l’espace urbain des banlieues. Peux-tu nous en dire plus ? Cela intéressera sans doute beaucoup la moitié (ou le tiers) des lecteurs/-trices de The Funambulist qui sont architectes ou urbanistes !

    MATHIEU RIGOUSTE : Il y a effectivement un sursaut en 2003, mais ça avait commencé bien avant. Un des premiers grands quartiers qui est soumis à une politique de ce qu’ils appellent « la rénovation urbaine », mais ce qui est en fait de la destruction et du réaménagement, c’est le quartier où je suis né ; le Luth à Gennevilliers. Il s’agissait d’une coopération du Plan Pasqua et du Parti Communiste Français (PCF) qui gère la ville depuis les années 1930, tous deux ravis de se débarrasser des familles les plus pauvres et d’essayer une nouvelle forme de gestion des quartiers populaires. C’est un processus constant : la ville capitaliste au gré des crises de suraccumulation du capital, se restructure pour continuer à concentrer des masses de travailleurs pauvres autour de ses centres d’accumulation du capital. Et dans ces quartiers populaires, ces campements, ces bidonvilles, ces territoires misérables, les dominé-e-s, les exploité-e-s, les opprimé-e-s, les damné-e-s, inventent en permanence des formes d’auto-organisation, d’autonomisation, de fuites et de contre-attaques, des cultures d’insoumission et des manières de se rendre ingouvernables. Il faut donc en permanence, pour le pouvoir, à la fois une police qui permette de détruire cette dynamique d’autonomisation récurrente et de survie – parce qu’en fait les gens n’ont pas le choix – et un réaménagement des territoires : il faut à la fois ségréguer et pénétrer ces territoires pour aller y détruire tout ce qui peut émerger de subversif. Et l’urbanisme tient un rôle fondamental dans la restructuration sécuritaire de la ville capitaliste. Cette logique est déjà à l’œuvre dans les bidonvilles durant la guerre d’Algérie ; on a des polices spécialisées à la gestion des bidonvilles, c’est-à-dire au harcèlement, à la brutalisation, à la surveillance, au fichage, parfois à la torture, parfois même aux assassinats et aux disparitions d’habitants du bidonville et qui détruisent les cabanes des habitant.e.s parce que même dans le bidonville, on voit ré-émerger des formes de mises-en-commun, d’auto-organisation, de politisation révolutionnaire, de colère, d’entraide, toute sorte de choses qui menace le pouvoir et qui nécessite donc une intervention. En plus d’intervenir avec de l’idéologie, du divertissement ou de l’aménagement, il faut intervenir avec de la coercition.

    On retrouve ce processus dans toute l’histoire de la ville capitaliste ; c’est une dialectique permanente. Sauf que ce qui nait dans les années 1970, c’est un schéma qu’on va voir apparaître ; à partir du moment où on met des polices féroces, comme la BAC, autour des quartiers populaires, celles-ci produisent de la violence policière et donc produisent de la colère. Les dominé-e-s, face à ça, vont produire des tactiques, des techniques, des stratégies, des pratiques de résistance et de contre-attaque. Ça va donner lieu à des révoltes, parfois très spontanées, parfois plus organisées : une histoire des contre-attaques face à la police nait dans les années 1970 et on se rend compte, au gré de ces révoltes et de leur répression et de leur gestion médiatique que des municipalités en collaboration avec la police et les média sont capables de désigner aux pouvoirs publics et au reste de la population en général un quartier populaire comme ingérable, infâme, irrécupérable. Ceci s’accompagne d’une logique humanitaire ; aller « sauver des gens » alors que les revendications pour des meilleures conditions de vie sont permanentes et que les habitants n’obtiennent jamais rien.

    Toute cette logique va activer au cours des années 1970 la reconnaissance par les pouvoirs publics et par le capital industriel et financier du fait que lorsqu’on est capable de désigner un quartier populaire comme infâme, on va pouvoir activer un circuit de capitaux financiers d’abord, puis industriels, liés à ce qu’on va appeler de manière publicitaire « la rénovation urbaine », c’est-à-dire un protocole de restructuration de ce quartier qui peut aller jusqu’à sa destruction complète. Il va ainsi apparaitre beaucoup de régimes de restructuration : certains consistent à éloigner les populations les plus pauvres ou les moins gouvernables, d’autres vont organiser l’évacuation totale de ces populations, d’autre encore qu’on observe beaucoup depuis le début des années 2000 à travers la mystification de la mixité sociale consistent à parler de réhabilitation mais à en fait déplacer les plus pauvres, sans détruire le quartier. On fait ça à la fois avec de la police et de la prison, mais aussi avec la hausse des loyers provoquée par l’arrivée de nœuds de transports en commun qui permet de faire venir des cadres qui ne se seraient pas déplacés jusque-là ; la petite bourgeoisie à laquelle on veut permettre de venir s’installer à la place des quartiers populaires. Bref, à travers tout ce programme publicitaire qu’est la rénovation urbaine, la transformation des quartiers populaires en quartiers petits-bourgeois va attirer des flux de capitaux gigantesques, notamment liés au fait que depuis le début des années 2000, l’État investit énormément pour appuyer les pouvoirs locaux dans leur politiques de restructurations urbaines. C’est de l’argent qui va retomber immédiatement dans les poches des industriels du bâtiment et aussi dans celles des industriels de la sécurité, encore une fois, parce qu’on voit qu’une fois que la police, les média, la prison et les autorités municipales ont réussi à « déblayer le terrain », le réaménagement des quartiers se fait en partenariat avec tous les industriels du bâtiment mais aussi des technologies de surveillance, de design – les cliques du néo-urbanisme – les publicitaires, les commerces, bref tout un système d’entreprises qui vivent autour de ça. La logique de fond est à la fois le renforcement du socio-apartheid, mais aussi une forme de colonisation interne à travers l’expansion de la ville capitaliste et l’invention de nouvelles formes d’encadrement de la vie sociale.

    LÉOPOLD LAMBERT : À l’heure où nous parlons, l’état d’urgence promulgué par François Hollande au lendemain des attentats du 13 novembre 2015 a déjà été renouvelé trois fois. Pour un certain nombre de francais-e-s blanc-he-s de classe moyenne ou riches, cela ne représente qu’une nuisance négligeable mais pour la population racisée française, en particulier ceux et celles que l’on nomme pudiquement « musulman-ne-s d’apparence » ce régime légal donnant une latitude encore plus importante à la police insiste encore d’avantage sur l’existence d’une sous-citoyenneté qui ne dit pas son nom. Travailles-tu actuellement sur la manière dont l’état d’urgence agit comme précédent à la fois légal et dans les pratiques policières ? Peux-tu nous en parler ?

    MATHIEU RIGOUSTE : Je ne travaille pas précisément sur cet aspect des choses mais bien-sûr, je suis ce qui est en train de se passer, notamment au sein des luttes dans lesquelles on avance et on réfléchit sur cet aspect-là. Et effectivement, tu le résumes bien, il y a toute une partie des strates privilégiées, même des classes populaires qui ne se rend pas compte de ce à quoi sert l’état d’urgence parce qu’il ne le voit pas et les média ont vraiment un rôle fondamental là-dedans. C’est ça aussi le socio-apartheid : les vies sont séparées, elles ne se croisent pas. Effectivement l’état d’urgence a permis une intensification de la ségrégation mais aussi de mécanismes d’oppression contre les quartiers populaires, ce qui peut rester complétement invisible pour le reste de la population. L’angle d’attaque, c’est l’Islam et les violences, ce sont des perquisitions fracassantes : explosion de la porte, on met tout le monde a terre et en joue, parfois on gaze à l’intérieur des appartements, parfois on tabasse. Ca provoque des traumatismes très forts dans les familles ; on a des récits de perquisitions en pleine nuit et les enfants, la maman, la grand-mère, plusieurs mois après, cherchent à être suivis par des psychologues. À l’école, c’est dramatique, les enfants n’y arrivent pas, après que des unités militaro-policières ont débarqué chez eux en mode anti-terrorisme. Les violences, ce sont aussi des assignations à résidence ; on a du mal à le saisir lorsqu’on ne le vit pas, mais il s’agit d’un système d’encadrement très dur car il faut aller pointer régulièrement. La plupart de ces histoires, je tiens à le dire, se dégonflent après ; il y a déjà des victoires dans les tribunaux parce que l’immense majorité de ces assignations à résidence sont fondées sur rien du tout, surtout par le fait que la personne a été désignée par quelqu’un comme étant « très pratiquante », possiblement « radicalisée », c’est de l’ordre de la délation. Ce sont donc des violences très fortes et très profondes dans les familles, principalement musulmanes à travers ces perquisitions, ces assignations à résidence et ces procédures judiciaires qui durent bien-sûr et qui épuisent. Les noms des gens sont lâchés dans la presse, toute une ville peut d’un seul coup vous considérer comme un probable terroriste.

    Donc voilà, l’état d’urgence permet l’intensification du socio-apartheid, de l’islamophobie et des racismes d’état, ce qui se conjugue assez bien à la gestion quotidienne des quartiers populaires dans la France impérialiste.

    https://blogs.mediapart.fr/leopold-lambert/blog/200117/entretien-avec-mathieu-rigouste-une-genealogie-coloniale-de-la-polic
    #colonialisme #colonisation #bac #police #Algérie #France #histoire #entretien #interview

  • La nuit des longs couteaux - Regarder le documentaire complet | ARTE
    https://www.arte.tv/fr/videos/086122-000-A/la-nuit-des-longs-couteaux
    https://api-cdn.arte.tv/api/mami/v1/program/fr/086122-000-A/940x530

    https://www.youtube.com/watch?v=cyR7Sctoguk

    À l’été 1934, Hitler, qui a liquidé la démocratie allemande en un temps record, se retrouve pourtant pris en étau entre deux forces antagonistes : d’un côté, la frange révolutionnaire de son parti, le NSDAP (Parti national-socialiste des travailleurs allemands), incarnée par son ami Ernst Röhm, le chef de la Sturmabteilung (SA), formation paramilitaire du parti nazi ; de l’autre, les milieux conservateurs, révulsés par les excès de cette faction qui menace la Reichswehr, l’armée régulière. Cofondée par Hitler et Röhm en 1921 à Munich, la SA a joué un rôle fondamental dans l’ascension des nazis. Si le putsch manqué du 9 novembre 1923, qui a amené le futur dictateur à viser une conquête du pouvoir par les urnes, avait éloigné ce dernier de Röhm, les deux hommes se sont retrouvés en 1930. Surfant sur les ravages de la Grande Dépression, le premier a fait campagne devant des foules grandissantes, pendant que le second tenait la rue par la terreur.

    Basculement
    Mais en juin 1934, les services rendus ne comptent plus. Göring, le numéro deux du régime, Himmler, le chef de la SS, et Heydrich, son adjoint, pressent le Führer de neutraliser Röhm, en inventant un projet de coup d’État. Au matin du 30 juin, à Bad Wiessee, Hitler, revolver au poing, procède à l’arrestation de son ancien frère d’armes – abattu le lendemain dans sa cellule – et déclenche une vague d’assassinats à travers le pays, qui se déchaînera jusqu’au 2 juillet, ciblant les dignitaires de la SA mais aussi des opposants conservateurs et catholiques. Présentés comme une purge interne, ces meurtres seront légalisés rétroactivement. Après la mort du président Hindenburg, le 2 août 1934, Hitler, désormais soutenu par les élites conservatrices et l’armée régulière, peut précipiter l’Allemagne dans la barbarie.
    Entrelaçant images d’archives et passionnantes analyses d’historiens français et allemands, ce documentaire retrace l’ascension commune, mêlée de fascination réciproque, d’Hitler et de Röhm, le tribun et le militaire. Il déroule la chronologie détaillée et expose les conséquences de ces trois jours sanglants qui, par des compromissions insidieuses au plus haut sommet de l’État, ont légitimé la #terreur_nazie .

    #Troisième_Reich #histoire

    • Vu cette semaine, j’ai apprécié, j’ai noté vers la fin cette quasi impossibilité de rompre l’enchainement fasciste avec la mise en place de l’obligation des militaires de prêter serment de fidélité à Hitler lui même plutôt qu’à leur pays.
      #obéissance
      #militaires

    • La fabrique du cauchemar « Journal fictif d’Adolf Hitler », de Haris Vlavianos
      https://www.monde-diplomatique.fr/2020/09/DE_MONTJOYE/62162

      D’emblée, dans son avant-propos, Haris Vlavianos pose la vieille et obstinée question : « Comment un homme falot, pétri d’obsessions, inculte et d’origine modeste, a-t-il fait pour séduire autant d’Allemands et les entraîner dans son sillage ? » Des centaines d’ouvrages ont donné leur version et accumulé les clichés : Adolf Hitler, petit caporal, peintre raté, médiocre « poilu » ; ou bouffon maniaque, monstre débile, tueur en série de masse, incarnation d’un mal absolu… Vlavianos choisit la forme du journal intime. C’est hardi, c’est risqué. Il effectue une plongée dans le quotidien de #Hitler au moment où les vociférations hystériques de ce petit chef de bande vont devenir élaboration d’un programme politique destiné à conquérir le pouvoir, quand, à la suite de son putsch manqué (novembre 1923), il est emprisonné (jusqu’en décembre 1924) à Landsberg, une captivité de plus d’un an qui aboutit à la rédaction des premiers chapitres de Mein Kampf. Avec ce « document fictionnel » qui transforme Hitler en « vrai » personnage, il n’est plus de fascination possible, il y a là juste un pauvre type.

      Vlavianos use d’une langue simple, simpliste, syntaxe minimale, vocabulaire réduit, pour ce pauvre type prétentieux, qui commente des livres où il n’est capable de voir que ses obsessions. Et qui ressasse sa vision de l’Europe : décadente, perverse, infestée par le Juif et le communiste, et dont le « honteux traité de Versailles » est à la fois effet et cause, aboutissant à l’humiliation de l’Allemagne. Autant d’idées banales et haineuses qui circulaient alors largement dans une partie de la population, et tant pis si le peuple allemand est sacrifié à l’idée qu’il a de l’Allemagne, tant pis pour le peuple — tout comme les femmes, grand objet de son dégoût —, qui a besoin d’être guidé… Oscillant entre auto-apitoiement — « Je suis un minable » — et exaltation obsessionnelle, il commence à tisser les liens avec et entre les individus de sa sphère politique, courriers, entretiens, visites d’admiratrices (qu’il méprise), et c’est ainsi que se prépare la suite… Le procès va lui permettre de se tester « pour de vrai » : ce qui devait être affaire de justice tourne en meeting, dont chaque parole et chaque geste sont amplifiés, commentés, par la presse et les politiques, offrant à ce qui n’était qu’une idée fumeuse et paranoïaque une consistance publique. Hitler apparaît comme cristallisant l’inconscient collectif, la machine s’enclenche, les liens tissés commencent à être utiles, le désir fou d’un pouvoir absolu s’appuie sur un mouvement soigneusement planifié dont les moteurs sont la détestation viscérale de la vie, le mépris absolu de l’autre, et la conquête du consentement populaire, par le biais de gesticulations « démocratiques » destinées à l’anéantissement du système parlementaire. Pour ce faire, tous les moyens seront bons, et ce sont les multiples « ficelles » de ce succès que le livre rend visibles et sensibles. Écrit par un historien qui est aussi un poète célèbre, l’auteur notamment de Vacances dans la réalité (Circé, 2011), grand traducteur (de Walt Whitman, Wallace Stevens, William Blake…), ce « journal fictif » est l’un de ces livres-outils qui permettent, au-delà de l’émotion ou de la morale, de déconstruire les mécanismes identitaires et totalitaires dont notre époque se montre assez friande.

      Arnaud de Montjoye

  • https://lundi.am/Le-coronavirus-et-l-etat-d-exception-en-chacun

    Rappel pour les élèves du premier rang : le contrat social qui a inspiré et inspire le plus le réseau de pouvoir n’est pas celui de Jean-Jacques Rousseau mais bien celui de Thomas Hobbes - « Le Léviathan » - ayant engendré entre autres le courant utilitariste dont le panoptique de Jeremy Bentham. Ce brillant ouvrage d’urbanisme (Le Panoptique !) à l’usage de nos gouvernants a enfanté l’architecture de la plupart de nos prisons mais aussi de nos écoles. Peu intéressés par la science-politique et l’urbanisme carcéral, vous vous demandez quel est le rapport entre ce contrat social et le caractère terrorisant de cette grippe ?

    #coercition #terreur_d'état #gestionnaires_du_cheptel_humain

  • « Si je suis aux Restos du coeur, c’est parce que j’ai été mutilé par la police » | StreetPress
    https://www.streetpress.com/sujet/1579018259-restos-coeur-mutile-par-police-violences-blesses-gilets-jaun

    Mutilés par la police, ces Gilets jaunes ont perdu un oeil, une main ou des dents. S’ajoute le traumatisme psychologique mais aussi souvent l’extrême précarité financière. Ils racontent leur quotidien entre arrêt-maladie, chômage et restos du coeur.

  • Parmi divers moyens héritées de la Bac (premier service policier doté de flash ball) ou de l’armée (grenades, blindés, hélicoptères), le maintien de l’ordre emploie actuellement des fusils d’assaut et des snippers.

    Manifestation du samedi 9 mars à Metz
    https://twitter.com/mazoudemetz/status/1104406961880268800

    Snipper dans la manifestation et non sur les toits comme ce fut le cas par exemple en décembre à Paris
    https://twitter.com/mazoudemetz/status/1104408517677641728

    #manifestation #armes_longues #fusils_d'assaut #gilets_jaunes #snippers #armes_de_la_police #violence_d'État #militarisation #police #terreur_diffuse #ça_rappelle_la_Guerre_d'Algérie

  • Sot d’homme go more...
    http://www.dedefensa.org/article/sot-dhomme-go-more

    Sot d’homme go more...

    Dans son blog Jean Luc Mélenchon estime qu’un couple de lesbiennes doit avoir le droit de recourir à la procréation médicale assistée (PMA). Cela aura pour conséquence que l’enfant naissant dans ce couple sera privé de contact permanent avec un homme réel, un homme de chair, voire même cet homme imaginaire qui ne flottera plus dans la subconscience grise de ces deux marâtres jouant à la Mère Plurielle.

    Il pense donc qu’il est normal, acceptable, bonifiant même, qu’un enfant, garçon ou fille (dieu merci les sexes existent encore malgré la meute énervée des genrés) puisse grandir, être éduqué, aimé, par deux femmes-mères à l’exclusion de père. Cette conviction hélas est répandue chez beaucoup. On aurait pu cependant espérer que la faiblesse de l’argumentation déjà relevée par maints (...)

  • #Isa et le grand capital
    http://bandedessinee.blog.lemonde.fr/2016/09/21/isa-et-le-grand-capital/#xtor=RSS-32280322

    Isabelle Denis est clairement du camp des humbles. C’est au point qu’elle se contente de signer de son prénom, diminutivement amputé, Isa. Tout pour éviter de se faire remarquer par un pseudonyme claquant ou affirmer sa personnalité dans un exhibitionnisme … Continuer la lecture →

    #Bande_dessinée #Terreur_sur_le_CAC_40

  • Ayotzinapa :
    la vérité semble s’éloigner à grands coups de rames

    Georges Lapierre

    http://lavoiedujaguar.net/Ayotzinapa-la-verite-semble-s

    Oaxaca, 19 juin 2016.

    Des grenades lacrymogènes, comme des petites bombes, tombent du ciel sur les barricades ; elles sont lancées des hélicos : une petite guerre aérienne qui oblige les « barricadistes », maîtres d’école, parents, quelques rares habitants, quelques bandes de jeunes venus en découdre des villages alentour à se replier un temps.

    J’ai le sentiment que l’État, dans son aveuglement autoritaire, est en train de créer les conditions de sa critique. Le mouvement des maîtres d’école s’opposant à la « réforme de l’éducation » prend de l’épaisseur pour se bonifier avec le temps. Peu à peu, par la force de son obstination, il attire, focalise et « cristallise » le mécontentement des gens. J’aime bien regarder les maîtresses d’école fabriquer en toute hâte des cocktails Molotov. (...)

    #Mexique #terreur_d'État

  • #violences_policières : ouvrez les yeux !
    https://www.mediapart.fr/journal/france/310516/violences-policieres-ouvrez-les-yeux

    Des dizaines de manifestants ont été blessés lors des #manifestations contre la #loi_sur_le_travail. Le gouvernement a mis en place une stratégie de la tension, suite logique d’années de dérive. Il est temps qu’une commission d’enquête se saisisse de cette gestion incendiaire.

    #France #Bernard_Cazeneuve #maintien_de_l'ordre #social #Valls

    • Médias à la mémoire courte. Ils n’auront pas relevé que pour la première fois depuis des décennies, les pillages de magasins sont rarissimes, tout comme les violences collatérales (voitures brûlées, déprédations diverses) qui ont de tout temps accompagné les grandes manifestations. Ils ont oublié que c’est à l’occasion d’une manifestation de marins pêcheurs que le Parlement de Bretagne a brûlé à Rennes en 1994. Que les autonomes ont, tout au long des années 1980, dévasté les à-côtés des manifestations. Que ce sont des sidérurgistes qui, en 1979, avaient soumis le quartier de l’Opéra à un pillage en règle après avoir laminé les forces de l’ordre sous des pluies de boulons et de barres de fer et érigé des barricades sur les grands boulevards…

      Le drame de Sivens s’inscrit lui-même dans un temps plus long qui a vu se développer les violences policières dans une impunité quasi systématique. Généralement ignorées par les médias, elles n’ont d’abord concerné que certaines marges de la société. Après la mort d’un supporter du PSG tué par un policier en légitime défense en 2006, puis d’un autre à l’issue d’une bagarre interne en 2010, un fichage spécifique et contraire aux recommandations de la Cnil a été mis en œuvre (lire ici et ici), et des interdictions de se déplacer ont été signifiées aux #ultras du foot, comme elles le sont aujourd’hui à des militants. Les ultras ont été aussi blessés ou éborgnés par des tirs de Flash-Ball, comme à Montpellier (lire ici) ou à Reims (lire ici).

      Les quartiers populaires ont également eu leur lot de victimes. Ce sont déjà des techniques policières qui sont remises en cause, comme l’étouffement (dite “technique du pliage”) dans l’affaire Ali Ziri (lire ici) ou Wissam El-Yamni (lire ici). Et judiciairement, l’impunité policière est à chaque fois constatée, comme dans les procès Zyed Benna et Bouna Traoré (lire ici), ou Amine Bentounsi (lire ici). Faut-il rappeler que le candidat François Hollande posait, il y a quatre ans, avec les militants de Stop contrôle au faciès, laissant entrevoir l’espoir d’un embryon d’expérimentation du récépissé de contrôle d’identité, sage outil de contrôle citoyen des abus policiers ? Faut-il rappeler que cette stratégie du maintien de l’ordre avait été déjà mise en cause lors des manifestations de soutien à Gaza, durant l’été 2014 ? À l’époque, Bernard Cazeneuve entra dans l’histoire, en étant le seul ministre de l’intérieur au monde à interdire des manifestations de soutien au peuple palestinien.

      Assumer la #violence voire l’organiser… Quatre éléments permettent de souligner que ce choix de l’escalade est délibéré. Le premier est l’usage massif d’armements nouveaux qui démultiplient les violences : grenades de désencerclement, lanceurs de balles, Flash-Ball, spray de lacrymogènes. Le deuxième est la mise en contact direct des forces de l’ordre et des manifestants sur une grande partie des cortèges. Le troisième est l’utilisation systématisée des grenades lacrymogènes, en particulier lors des dispersions de manifestations. Le quatrième est la course aux interpellations au sein même des cortèges : près de 1 600 personnes ont ainsi été interpellées, déclenchant chaque fois de mini-affrontements entre manifestants solidaires et policiers…

      « De toutes les manifestations du pouvoir, celle qui impressionne le plus les hommes, c’est la retenue ». Thucydide http://www.laviedesidees.fr/Un-splendide-isolement.html

    • « Médias à la mémoire courte ». Médiapart inclus. Car ce qui suit cette affirmation va au-delà de la simplification, du pipo : les autonomes étaient bien plus nombreux, présents et actifs dans les manifs et ailleurs de 1976 à 1981 que durant les années 80 (décomposition politique, dépolitisation et pacification après l’alternance socialiste) ; ce ne sont pas tant les sidérurgistes - habitués à s’affronter très durement à la police dans leur bassin d’emploi respectifs) qui, le 23 mars 1979, « avaient soumis le quartier de l’Opéra à un pillage en règle (pipo) après avoir laminé les forces de l’ordre sous des pluies de boulons et de barres de fer et érigé des barricades sur les grands boulevards », tout simplement parce qu’il est malaisé de pratiquer le combat de rue (ce jour là, de République à Opéra, et d’Opéra à la gare de l’est) dans un environnement qu’on ne connait pas et alors que l’on doit reprendre les cars pour rentrer. Il y avait le 23 mars 1979, des milliers de gens venus de Paris et banlieue qui s’affrontèrent à la police (plus de 300 flics blessés selon la pref) et attaquèrent des lieux marchands.

  • Ayotzinapa 26/27 septembre 2014
    Rien de bien nouveau sous le soleil de Satan

    Georges Lapierre

    http://lavoiedujaguar.net/Ayotzinapa-26-27-septembre-2014

    « Il est important de bien comprendre que les actions de répression politique sont des actes intentionnels commis par l’État ou par d’autres groupes qui sont en relation avec lui (comme les narcotrafiquants et/ou les paramilitaires) et que la responsabilité de ces violations revient à l’État, que ce soit par action directe, omission ou acquiescement… »

    Que sont devenus les 43 étudiants disparus dans la nuit du 26 au 27 septembre 2014 ? Une délégation d’élèves était partie de l’école normale rurale d’Ayotzinapa près de Chilpancingo, capitale de l’État du Guerrero (Mexique), afin de récupérer des autobus pour se rendre à Mexico, où devait se tenir le 2 octobre une grande manifestation à la mémoire des étudiants assassinés par l’armée mexicaine sur la place de Tlatelolco en 1968. (...)

    #Mexique #disparitions #terreur_d'État #armée #pouvoir #faire_silence

  • juste un micro-résumé du livre « Paris est une fête » : il s’agit de l’histoire d’un impuissant (suite à une blessure de guerre) antisémite, homophobe et alcoolique, qui essaye de « donner » la femme qu’il aime à un jeune toréro « plein de vie », lors des fêtes tauromachiques de San Fermin à Pamplune. Il ne se passe presque rien à Paris...

    Bon, soit-dit en passant, il m’a fallut trois lectures et cinq ans de recul pour dépasser l’aspect festif du livre, et pour capter le cynisme, voire la pure et simple dégueulasserie du bouquin, qui est tout en non-dit et en allusions...

    #hemingway #paris_est_une_fête #symbolisme #terreur_et_toursime

    (On en reste à la couv’ hein ?)

  • Au nom des victimes. #Dictature et #terreur_d'État en #Argentine, #Chili et #Uruguay

    Après les dictatures qui règnent sur l’Argentine, le Chili et l’Uruguay des années 1970 jusqu’en 1990, le processus de résolution démocratique de ces histoires de terreur semble nécessairement en passer par la construction de #récits et, ce faisant, de #mémoires qui reconfigurent le passé. Au coeur de ces processus propres à chacun des pays, s’impose la figure de la #victime que viennent questionner les textes rassemblés par Claudia Feld, Luciana Messina et Nadia Tahir.

    http://temoigner.revues.org/856
    #revue #Amérique_latine
    signalé par @ville_en (twitter)

  • A #Sivens, des semaines de tensions documentées par les manifestants
    http://www.lemonde.fr/pixels/article/2014/10/30/guerilla-numerique-au-barrage-de-sivens_4514834_4408996.html

    La multiplication de ces vidéos amateurs n’a pas uniquement lieu dans le but de court-circuiter les gros canaux d’#information. Elles constituent également des preuves pouvant être utilisées dans un contexte judiciaire.

    La vidéo tournée dans la caravane est aujourd’hui un élément-clé pour la plainte que s’apprête à déposer Elsa, la jeune femme apparaissant dans le film, qui a été hospitalisée dix jours après sa blessure à la main. Il s’agirait de l’un des premiers cas documentés de l’utilisation d’une grenade par les forces de l’ordre sur le chantier du barrage, selon l’avocate d’Elsa, Me Claire Dujardin (dans un contexte où l’usage de ce type d’arme pose question depuis la mort de Rémi Fraisse).

    #violences_policières #ZAD_du_Testet #terreur_d'état

  • Un mort au Testet : récit du week-end de luttes contre le barrage de Sivens

    Les occupants de la Zone à Défendre du Testet appelaient à un rassemblement le 25 octobre pour s’opposer à la poursuite des travaux. Au cours du week-end, Rémi Fraisse, 21 ans, a été tué dans l’explosion d’une grenade provenant des rangs des gendarmes. Témoignage en images d’un manifestant qui avait répondu à l’appel des zadistes.

    J’emprunte le résumé de cette journée à un ariégeois : la kermesse d’un côté, la baston de l’autre. Un peu désabusé, il ne s’est pas vraiment senti utile. Un peu plus loin, un intervenant lance à la cantonade un sentiment que la plupart des personnes présentes approuve : « Je vis pour les emmerder et plus je les emmerde, plus je vis ». Ici, il n’y a pas que des pacifistes plutôt âgés et des « manifestants » plutôt jeunes, des babas d’un côté et des extrémistes de l’autre (« casseurs », « radicaux », « anars »…), il y a surtout une foule de plus de cinq mille personnes engagée dans une cause commune qui a bien compris qu’on ne peut pas défendre l’environnement dans une société qui a érigé en dogme que le progrès et le développement économique sont infinis et parallèlement qui ne veut pas voir que les ressources de son logis appelé la Terre sont tout sauf infinies.

    http://larotative.info/un-mort-au-testet-recit-du-week.html