• L’exposition au glyphosate pourrait avoir des effets sur plusieurs générations
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/05/06/l-exposition-au-glyphosate-pourrait-avoir-des-effets-sur-plusieurs-generatio

    Une grande partie de ce que nous mangeons pourrait affecter directement nos petits-enfants. C’est, en tout cas, ce que suggèrent les résultats d’un rapport publié fin avril dans la revue américaine Scientific Reports. Cette étude, menée par le biologiste américain Michael Skinner, démontre qu’une exposition au glyphosate pourrait entraîner des modifications génétiques persistantes sur plusieurs générations.

    « Cette étude est importante, explique John McCarrey, chercheur en génétique à l’Université du Texas, sans lien avec cette publication. Car elle prouve que, une fois un individu exposé à certains produits chimiques perturbateurs tels que celui testé dans cette étude, les défauts qui en résultent peuvent être transmis aux enfants ou petits-enfants, même en l’absence de toute exposition ultérieure. Cela montre que les gens doivent faire plus attention aux produits chimiques auxquels ils sont exposés qu’on ne le pensait auparavant. »

    Mais les pathologies ont augmenté significativement pour les deuxième et troisième générations. « Les pathologies observées vont des tumeurs aux maladies de la prostate, en passant par des maladies des ovaires et certaines anomalies congénitales », observe Michael Skinner. Les chercheurs ont, par exemple, constaté une augmentation de 30 % des maladies de la prostate chez les mâles de troisième génération et une augmentation de 40 % des maladies rénales chez les femelles de la troisième génération. Deux animaux sur cinq de la troisième génération souffraient également d’obésité. « Pour la plupart des substances toxiques environnementales, comme le glyphosate, les pathologies induites sont similaires chez l’homme et le rat. La comparaison entre les deux est donc scientifiquement correcte », rappelle Michael Skinner.
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    Pour John McCarrey, ces résultats ne sont pas étonnants : « Si un composé modifie l’épigénétique du sperme ou de l’ovule de l’individu exposé, il transmet cela à ses descendants et continue ainsi pendant des générations. » L’observation sur au moins trois générations est nécessaire pour conclure à ce que les auteurs de l’étude appellent la « toxicologie générationnelle » :

    « Lorsqu’on observe des effets sur les deux premières générations, il est difficile de dire si ces impacts ne sont pas dus à des effets toxiques directs du produit chimique. Ce n’est que si les défauts persistent pendant trois générations ou plus que l’on peut en conclure qu’il existe, effectivement, des effets transgénérationnels. C’est exactement ce qu’ont fait les auteurs de cette étude. »

    Cette étude paraît au moment où l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) a décidé de classer le glyphosate comme produit non cancérigène. Cette déclaration, effectuée le mardi 30 avril, contredit ainsi l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui classe la substance comme potentiellement cancérigène.

    Pour les auteurs de la publication, cette déclaration serait due en partie à des études de toxicologie trop restreintes. « L’EPA et le domaine de la toxicologie ne pensent qu’à l’exposition directe de l’individu, jamais à la toxicologie générationnelle, explique Michael Skinner. Nous avons fourni la première étude, c’est à eux maintenant de poursuivre les recherches dans ce sens. »

    #Glyphosate #Perturbateurs_endocriniens #Toxicologie_environnementale