• À #Genève, un musée met en débat la restitution d’œuvres

    Le musée d’ethnographie de Genève met au jour ses errements passés, dans une exposition stimulante consacrée au rôle joué par la ville suisse dans le monde colonial. Et envisage, sur un registre apaisé, la restitution de pans de sa collection.

    La manœuvre n’est pas si fréquente : à Genève, un vénérable musée a décidé de faire en grand son autocritique, et d’égratigner la légende de ses pères fondateurs. À travers l’exposition « Mémoires. Genève dans le monde colonial », le musée d’Ethnographie (MEG), inauguré en 1901, interroge ses collections sous le prisme colonial. Il pose aussi de manière subtile l’enjeu des restitutions, non sans écho avec le film de Mati Diop Dahomey, qui sort en salles mercredi 11 septembre.

    Sur le parcours conçu dans l’immense sous-sol sombre du musée, une vitrine est consacrée à l’un des glorieux donateurs de l’établissement, le peintre suisse Émile Chambon (1905-1993), qui avait amassé un millier de pièces d’Afrique et d’Océanie : il surgit dans un autoportrait de 1931, portant le casque et l’uniforme de son oncle, qui fut administrateur colonial en Afrique équatoriale française. C’est de cet oncle qu’il avait hérité les premiers artefacts africains de sa collection.

    Un artiste contemporain, Mathias Pfund, a inversé les bordures du cadre de cette peinture malaisante, l’un des cœurs malades de cette exposition : une discrète intervention, qui signale que quelque chose s’est déréglé. Face aux objets personnels de Chambon, qui traduisent sa fascination pour l’Afrique, ont été rassemblés, dans une autre vitrine, certains de ses dons au musée : des statues de cuivre ou de fer qui représentent des gardiens de reliquaires kotas, sur les territoires du Gabon et de la République du Congo.

    Lorsque des missionnaires ont arraché ces figures au XIXe siècle, ils se sont débarrassés, en les brûlant ou en les cachant en forêt, des corbeilles d’os qu’elles surveillaient. Depuis, le MEG les a exposées comme de simples statues africaines. Cette fois, le musée a sculpté de nouvelles urnes funéraires glissées au pied de leurs gardiens, avec l’aide de visiteurs réguliers du MEG d’origine kota, pour tenter de rendre à ces objets une forme d’intégrité.

    « Dans l’exposition, les objets n’illustrent pas les discours. Les propos historiques viennent étoffer, dans un deuxième temps, l’histoire de ces objets. C’est pourquoi il y a beaucoup de choses que nous ne disons pas, sur le colonialisme à Genève et en Suisse, parce que les objets de notre collection ne le racontent pas », précise la Française Floriane Morin, commissaire de l’exposition.
    Le colonialisme suisse

    La Suisse, puissance coloniale ? L’affirmation peut surprendre, en particulier depuis la France. Dans l’exposition, une carte interactive relaie les conclusions d’un rapport de 2022 sur « l’héritage raciste et colonial dans l’espace public genevois ». « L’État suisse n’a pas conquis de territoires ni administré directement de colonies, explique Fabio Rossinelli, l’un des historiens qui ont travaillé sur l’exposition, rattaché aux universités de Lausanne et de Genève. Mais des sociétés suisses se sont formées spontanément, en Égypte ou encore au Brésil, qui étaient reconnues par le corps consulaire, et entretenaient des relations avec Berne. »

    Il poursuit, soucieux de « ne pas dédouaner l’État de ses responsabilités » : « L’État était bien présent, mais plutôt un peu à l’arrière-plan, en cachette. Prenez la Société de géographie de Genève [fondée en 1858 – ndlr]. C’était une société privée. Des collaborations avec l’État avaient lieu, des subventions étaient au besoin octroyées. On voulait favoriser l’intégration du pays dans le monde impérial et colonial. » Beaucoup des missionnaires suisses partis à cette époque, soutenus par cette société, ont rapporté des objets qui constituent le socle des collections actuelles du MEG.

    Quant à l’implication de la Suisse dans la traite négrière, elle est, là encore, bien réelle. D’après l’historienne Béatrice Veyrassat, la participation suisse à la traite, d’une manière « active » (des commerçants suisses qui recourent à l’esclavage dans leurs plantations aux Amériques) ou « indirecte » (via des investissements dans des compagnies maritimes dotées de bateaux négriers) « est estimée entre 1 % et 2 % de l’ensemble des Africain·es déplacé·es vers les Amériques ».

    Avec Nantes, Genève fut aussi, à partir des années 1670, l’un des centres de production des « indiennes », ces tissus fabriqués à partir de coton importé des comptoirs d’Inde (les collections suisses d’indiennes sont accrochées au château de Prangins, on ne voit que des reproductions frustrantes dans l’exposition genevoise). Ces indiennes pouvaient servir de monnaie d’échange des Européens contre des êtres humains mis en esclavage dans les ports africains, lors du commerce triangulaire. En 1785, pas moins de 20 % de la population active à Genève travaille pour une dizaine d’« indienneries ».
    Objets éclatés

    À bien des endroits, l’exposition est coupante et inconfortable, en particulier lorsqu’elle revient de manière très précise sur le travail problématique des équipes passées du MEG. Alors que Genève organise une « exposition nationale suisse » en 1896, dotée en son sein d’un « village noir », dans la sinistre tradition des zoos humains, le MEG achète à l’époque 85 artefacts fabriqués par ces captifs africains, majoritairement venus du Sénégal et de Gambie. Mais les experts du musée gomment ensuite leur origine et les font passer pour des objets fabriqués en Afrique de l’Ouest.

    Autre silence complice : une sublime coiffure de femme faite de cuir et de fer, attribuée à une femme d’origine herero, rapportée de Namibie par un couple de collectionneurs en 1906. Au même moment se déroule, de 1904 à 1908, le génocide des Herero (et des Nama), premier génocide commis par l’Allemagne. « La datation de ces objets laisse peu de doutes quant au contexte génocidaire et d’extrêmes violences qui a rendu leur acquisition possible », tranche un cartel de l’exposition.

    Une vitrine montre encore un ustensile aux allures de fouet, utilisé pour repousser les mouches, dans le Ghana du XIXe siècle. Ce chasse-mouches, peut-être détenu par un roi, avait aussi valeur de talisman coranique. À une date inconnue, des employés du musée l’ont éventré pour lui retirer sa charge magique, constituée notamment d’une lame de couteau – disparue – et de cinq feuillets de prières, retrouvés des décennies plus tard dans un tiroir du musée. « Comment perdre l’intégrité d’un objet au musée ? », s’interroge un cartel.

    L’exposition revient aussi sur l’essor de l’anthropologie telle qu’elle est enseignée à Genève à partir de 1860, discipline qui s’est distinguée en justifiant l’impérialisme occidental et en décrétant la supériorité européenne. C’est le point d’ancrage morbide des premières collections d’objets amassées à Genève, qui, là encore, alimenteront les réserves du MEG. Dans les années 1920, Eugène Pittard, fondateur du musée, tire aussi profit du trafic de restes humains dans les colonies britanniques.
    « Ramatriement »

    Floriane Morin assume cette approche « incisive » vis-à-vis de l’histoire de son musée, « parce qu’elle est la seule condition à la possibilité d’une réparation ». Mais est-il encore possible de décoloniser un musée construit sur des mensonges aussi lourds ? Même si le MEG s’est doté d’un nouveau bâtiment en 2014, en forme de pirogue blanche spectaculaire et facile à reconnaître dans le paysage genevois, ne faudrait-il pas plutôt fermer ses portes à jamais ?

    L’un des espaces les plus originaux de l’exposition prouve en tout cas que le musée a encore des choses à dire, et des chantiers à mener. « Nous ne parviendrons pas à décoloniser notre musée, à redéfinir l’institution, sans engager des relations sur le temps long, avec des personnes qui sont le plus à même [originaires des pays et populations concernés – ndlr] de reconsidérer ces collections et de réfléchir à leur avenir », avance encore Floriane Morin.

    Cinq « capsules » ont été aménagées, comme autant de cocons qui posent la question de la restitution d’objets aux populations qui les réclament. Dans ces salles, des registres de paroles se mêlent – juridiques, historiques, administratifs, intimes, mais aussi depuis le Nord et les Suds –, pour restituer le dialogue entretenu au fil des décennies entre le MEG et des populations autochtones.

    Ici, des objets déjà restitués à une communauté autochtone du Canada – un « ramatriement » plutôt qu’un rapatriement, précise le cartel – sont représentés par de simples silhouettes de papier noir sur le mur. On prend des nouvelles de leur vie d’après, réintégrés à des cérémonies rituelles. Ailleurs, un réseau de huit musées suisses négocie directement avec le Nigeria, pour le retour de biens originaires de l’ancien royaume du Bénin.

    L’histoire de deux mâts-totems est sans doute la plus emblématique. Achetés en 1955 par un collectionneur suisse dans une ville du sud-est de l’Alaska, les deux immenses totems aux motifs d’oiseaux ont été plantés dans le jardin du musée suisse pendant trente-quatre ans. Stockés par la suite dans des entrepôts dans un souci de protection, ils ont été remplacés par des copies. Mais ils sont restés des emblèmes de ce quartier de Genève au fil des années. L’exposition donne la parole aux descendants du sculpteur de ces mâts, qui disent leur sensation de manque et l’importance qu’ils revêtent encore pour eux, mais décrit aussi l’attachement de générations de Genevois·es à ces objets aux pouvoirs manifestement actifs des deux côtés de l’Atlantique.

    « Il y a une histoire qui se crée après la restitution, insiste Floriane Morin. Les restitutions ne sont pas la fin de quelque chose. Rendre un objet n’est pas fermer la porte, mais entamer une nouvelle histoire avec des personnes qui nous font confiance, cela crée plein de choses, déclenche de nouveaux projets, et c’est aussi ce que nous avons voulu raconter dans cette exposition. »

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/100924/geneve-un-musee-met-en-debat-la-restitution-d-oeuvres

    #Suisse #Suisse_coloniale #colonialisme_suisse #MEG #exposition
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    ping @reka @cede

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    • La Collection

      La Collection propose de (re)découvrir les objets muséifiés par le prisme de leur ancrage dans l’histoire coloniale du Musée d’ethnographie de Genève. Ils se sont imposés dans ce parcours. La trame narrative se tisse autour d’eux, par les récits, les indices ou les silences de leurs trajectoires jusqu’au Musée, par les assignations qu’ils ont subies, mais aussi par les multiples identités qu’ils assument, selon qui interagit avec eux. Les biographies fragmentaires de ces objets se mêlent à l’énonciation du contexte colonial spécifique à Genève ainsi qu’à certains épisodes de l’histoire des impérialismes européens. La plume d’historien-ne-s, géographes et anthropologues spécialistes de l’ère coloniale, les gestes et les œuvres d’artistes contemporain-e-s, l’implication d’héritières et d’héritiers culturel-le-s se lient ici aux archives que le MEG partage en toute transparence.

      Au fil de La Collection, les sept « Mémoires d’objet », reconnaissables à leurs vitrines individuelles, apportent un éclairage approfondi sur des artefacts singuliers aux histoires surprenantes.

      https://colonialgeneva.ch/la-collection

  • https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/300122/trente-ans-apres-une-exposition-pionniere-nantes-revisite-son-passe-negrie

    Trente ans après une exposition pionnière, Nantes revisite son passé négrier

    Dans l’enceinte du château des ducs de Bretagne, une exposition didactique apporte de nouveaux éclairages sur les collections de la ville, premier port négrier de France. En replaçant l’essor de la traite nantaise dans le temps long, et à l’échelle de non pas trois, mais quatre continents.

    Ludovic Lamant, 30 janvier 2022

    Nantes (Loire-Atlantique).– Les deux tableaux, acquis par le musée d’histoire de la ville de Nantes en 2015, forment un diptyque. Dans un intérieur cossu, les époux Deurbroucq exhibent leur fortune dans une pose figée, chacun flanqué d’un domestique noir.

    « L’Abîme », exposition consacrée à la traite négrière visible jusqu’en juin au château des ducs de Bretagne, ne s’intéresse pas tant à l’histoire des deux époux. Leur biographie est bien documentée, et depuis longtemps : lui, d’origine flamande, a pris part à sa première campagne de traite en 1734 ; elle appartient à une famille de commerçants allemands qui exportent vers l’Europe du Nord des produits venus des colonies.

    Le mystère qui émane de ce double portait réalisé en 1753 provient des deux figures de l’arrière-plan, deux domestiques noirs. La jeune femme, en particulier, dont on perçoit le collier d’esclave, serti de quelques pierres précieuses, a le regard perdu, impossible à saisir.

    Dans la ville de Nantes, 4 712 personnes réduites à l’esclavage ont été déclarées entre 1692 et 1792. Elles étaient sans doute bien plus nombreuses à travailler, selon des statuts variés, dans ce qui était alors le premier port négrier de France.

    Les travaux préalables à l’exposition n’ont pas permis d’établir l’identité précise de cette servante. Mais la salle où les toiles sont présentées contient une dizaine de biographies de ces esclaves nantais, dont le nom, celui que leur avaient imposé leurs maîtres, a été retrouvé.

    « Même si son identité n’est pas encore connue, cette femme témoigne, par sa présence, des conditions de vie de ces gens-là. C’est une manière de renverser nos collections : prendre l’objet et le regarder là où il n’était pas prévu, à l’origine, que le regard se porte », avance Krystel Gualdé, directrice scientifique du musée d’histoire de Nantes et responsable de cette exposition, aussi didactique que recommandée en ces temps politiques agités.

    À la fois aux habitué·es du musée nantais, qui reconnaîtront des pièces emblématiques exposées sous un nouvel angle, et aux néophytes qui découvriront, cartes animées et archives à l’appui, l’une des boucles les plus sinistres de l’histoire française qui continue de hanter le pays aujourd’hui.

    Avec « L’Abîme », Nantes poursuit un travail ancien d’exploration de son passé de port négrier. Une manifestation pionnière, « Les Anneaux de la mémoire », avait déjà été montée entre les murs du château dès 1992. Le musée lui-même avait rouvert en 2007, consacrant plusieurs de ses salles permanentes au commerce d’esclaves et à l’enrichissement de la ville au XVIIIe siècle grâce à la traite. En 2012 enfin, Nantes a inauguré un mémorial de l’abolition, posé sur les quais de Loire, une première en France parmi les anciens ports négriers.

    Nantes fut le premier port négrier français avec 43 % des navires de la traite partis depuis la France.

    Ce chantier mémoriel est le résultat de l’activisme d’associations locales dès les années 1980, d’un personnel politique plutôt bien disposé sur ces questions, à commencer par l’ancien premier ministre socialiste Jean-Marc Ayrault, qui fut longtemps maire de la ville (1989-2012), mais aussi d’une donation qui a considérablement enrichi les collections publiques nantaises : celle du musée des Salorges.

    Celle-ci a été constituée au début du XXe siècle par deux frères qui avaient fait fortune dans l’industrie de la conserve. Ils rassemblèrent des pièces qui appartenaient directement aux descendants des grandes familles d’armateurs nantais et qui arrivèrent au « château » en 1955.

    Nantes fut le premier port négrier français avec 43 % des navires de la traite partis depuis la France (1,3 million d’esclaves déportés à l’initiative des ports français, sur un total estimé entre 13 et 17 millions de personnes). L’exposition inscrit le phénomène dans un temps long, de l’exploration des côtes africaines par les Occidentaux dès le XVe siècle (une série de sublimes gravures de 1686 documente l’approche des côtes africaines par la mer, depuis les navires européens) jusqu’à 2022 (avec une réflexion, bienvenue mais un peu attendue, sur la persistance de certaines formes d’esclavage comme de préjugés racistes).

    Mais elle prend pour référence un laps de temps relativement bref pour la traite nantaise en tant que telle, la faisant débuter en 1707 avec l’échec de l’expédition de L’Hercule (et même si la première expédition organisée depuis Nantes, répertoriée par les historiens, remonte à 1657, sous l’impulsion des frères Libault).

    Si la « vocation négrière » de Nantes est plutôt tardive, comparée à celle d’autres ports d’Europe, tout bascule en 1733, lorsque Lorient obtient le monopole des ventes de la Compagnie des Indes orientales : le port nantais décide alors de se spécialiser dans la traite.

    Un commerce « quadrangulaire, avec l’Asie »

    À celles et ceux qui redoutent parfois qu’il n’y ait rien à voir, au-delà d’insipides carnets de comptes de navires négriers, dans une exposition sur la traite, l’exposition nantaise apporte un cinglant démenti : elle regorge d’objets étranges et ambigus, dont les experts n’ont parfois pas encore déterminé la fonction exacte (même si l’on n’y trouve pas d’objets ayant appartenu à des esclaves, prouesse qu’avait réalisée l’exposition sur l’esclavage qui s’est tenue l’été 2020 à Amsterdam).

    On se contentera d’évoquer ici en vrac un énigmatique anneau de traite en ivoire qui pourrait avoir été offert par un capitaine de navire négrier venu de Liverpool à un intermédiaire africain, en remerciement de sa loyauté, un effroyable coffre renfermant les instruments de chirurgiens de la marine embarqués à bord des navires (dont des outils pour marquer la peau des captifs et captives du sceau de leur propriétaire), ou encore un éventail célébrant la première abolition, celle de 1794, reproduisant les paroles d’une chanson engagée de l’époque, La Liberté des nègres.

    D’autres objets exposés – les cauris, ces coquillages venus des îles Maldives (récemment popularisés par Beyoncé), ou encore ces tissus à motifs importés du continent indien (puis réalisés depuis Nantes, prenant le nom d’« indiennes ») – illustrent l’importance jouée par l’Asie dans la traite : « Nous avons voulu montrer qu’il s’agit bien d’un commerce non pas triangulaire [entre l’Europe, l’Afrique et les Amériques – ndlr] mais quadrangulaire, avec l’Asie, d’où l’on faisait venir des monnaies d’échange contre les esclaves », explique Krystel Gualdé.

    Pour le reste, les habitué·es du musée nantais ne seront pas dépaysé·es. À l’exception de trois prêts, l’exposition s’est construite uniquement sur les collections municipales (dont une bonne partie, tout de même, provient des réserves, peu montrées jusqu’alors, à quoi s’ajoutent quelques acquisitions récentes).

    On retrouve une édition de l’incontournable Code noir (qui fixe la condition de l’homme noir réduit en esclavage, pour le dire vite, entre l’homme libre et le bien meuble), ou encore les deux aquarelles de la Marie-Séraphique, qui ont fait la réputation internationale des collections nantaises. La Marie-Séraphique, ce navire négrier parti de Nantes, qui réalisa quatre expéditions de 1769 à 1774, déporta environ 1 300 personnes vers Saint-Domingue, l’actuel Haïti.

    Petit événement, l’exposition révèle pour la première fois l’existence d’une autre aquarelle, détenue par un collectionneur privé, malheureusement pas prêtée mais reproduite en toute fin de catalogue : on y voit deux images, l’une montrant des esclaves mangeant sur le pont de la Marie-Séraphique dans d’énormes gamelles, l’autre une scène de ventes d’hommes en terres africaines.

    Comme c’est déjà le cas dans les collections permanentes du musée, l’exposition prend un soin infini à dresser l’inventaire des grandes familles nantaises qui firent fortune dans la traite, des premiers explorateurs aux armateurs. Sur une carte qui répertorie les plantations agricoles d’une région de Saint-Domingue, le cartel va jusqu’à préciser les deux terrains qui appartenaient à des Nantais…

    À ce jeu-là, on signale une lettre stupéfiante, datée de 1819 : un armateur de la région y explique qu’il compte bien poursuivre ses activités dans l’illégalité, malgré l’abolition de 1794, et se félicite même des perspectives de bénéfices supérieurs… L’écriture de cet armateur en train de commettre un crime contre l’humanité est fine, régulière et glaçante.

    Fidèles à ce souci d’actualiser les connaissances comme les manières de raconter cette histoire indicible, Krystel Gualdé et ses équipes ont aussi fait le choix d’utiliser majoritairement l’expression de « personnes mises en esclavage » plutôt que d’« esclaves », à l’instar des musées anglo-saxons qui parlent d’« enslaved people » plutôt que de « slaves », dans le but de ne pas réduire la personne au seul statut d’esclave, qu’elle n’a jamais désiré.

    Un parti pris que les musées français qui évoquent la traite sont encore loin d’avoir tous adopté : « Pourquoi s’interdire de réinterroger ces mots ?, se justifie Krystel Gualdé. Il est nécessaire de construire une vision commune sur cette histoire, d’ouvrir d’autres possibles. Et cela ne pourra pas se faire en s’accrochant, tout seul, à tel ou tel terme. »

    Si Nantes, avec cette nouvelle exposition, continue à faire sa part, ce chantier reste encore ouvert dans de nombreuses autres villes françaises, de Marseille à Bayonne, de La Rochelle à Bordeaux. « L’Abîme » prouve en tout cas, une nouvelle fois, l’urgence d’ouvrir un musée national consacré, tout ou en partie, à la traite négrière organisée depuis la France.

    Sur ce sujet, Jean-Marc Ayrault, désormais à la tête de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage, s’était montré prudent sur le calendrier, dans un entretien à Mediapart en 2020 : « Je suis convaincu qu’à terme, la France se dotera d’un lieu où l’on ne parlera pas que de la traite et de l’esclavage, mais aussi de la période coloniale, et du travail forcé : tout cela forme un tout. » Le fait que le ministère de la culture n’ait pas jugé bon de reconnaître « d’intérêt national » cette exposition nantaise sur la traite n’invite pas à l’optimisme.

    L’exposition est visible à Nantes jusqu’au 19 juin 2022. Les informations pratiques sont ici. Un catalogue rédigé par Krystel Gualdé a été publié (éditions du musée d’histoire de Nantes, 29,95 euros).

    Ludovic Lamant

    #Mémoiresclavage #misenesclavage #muséepostcol

  • Musée d’art et d’histoire de #Neuchâtel
    –-> Recherches passé colonial

    Dans un souci d’intégrer les acquis de la recherche et de stimuler la réflexion face aux enjeux contemporains liés au #passé_colonial de la Suisse, le #MahN entend mettre à disposition du public des sources et des indications bibliographiques sur l’implication de Neuchâtelois dans la #traite_négrière et l’#esclavage.

    https://www.mahn.ch/fr/expositions/recherches-passe-colonial-1

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    #Séminaire UNINE sur la statue de #David_de_Pury, 7 décembre 2020

    https://www.youtube.com/watch?v=JhSZz3pbIHU


    #de_Pury #monument #mémoire #statue


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    #mémoire de bachelor :
    Déboulonner David de Pury. Une analyse des revendications et des résistances autour du retrait d’un #monument sur la #Place_Pury

    https://www.mahn.ch/fileadmin/mahn/EXPOSITIONS/EXPOSITIONS_ACTUELLES/Recherches_passe_colonial/TEXTES/MemoireMasterUNiNEDaviddePury2021.pdf

    #Suisse #histoire #histoire_coloniale #décolonial

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    • En tête-à-tête avec David de Pury

      Inaugurées hier à Neuchâtel, des œuvres d’art contemporain sont censées porter ombrage à David de Pury. La Ville a choisi cette option plutôt que celle du déboulonnage.

      On dirait à première vue un nain de jardin coulé dans du béton par le collectif chaux-de-fonnier Plonk & Replonk. Mais à y regarder de plus près, c’est bien l’ancien bienfaiteur de Neuchâtel David de Pury, dont la fortune a été érigée au XVIIIe siècle grâce au commerce triangulaire, qui a été légèrement renversé de son piédestal. Du moins symboliquement.

      L’artiste genevois et afro-descendant #Mathias_Pfund a en effet irrévérencieusement bétonné un modèle miniature de cette statue, qu’il a ensuite renversée à 180 degrés pour les besoins d’un art critique et éclairant sur le passé. Choisie par le jury, son œuvre présentée hier à Neuchâtel est cependant nettement moins imposante que l’originale. Elle va pourtant tenter bientôt de dialoguer avec l’auguste statue qui trône sur la place du même nom depuis 1855. Baptisée A scratch on the nose (Une éraflure sur le nez), sa sculpture a été vernie hier par les autorités municipales sur le Péristyle de l’Hôtel de Ville dans le cadre de la semaine d’actions contre le racisme à Neuchâtel. Là aussi tout un symbole.

      Contenter les pétitionnaires

      Par ce type d’actions, l’exécutif veut entretenir son tête-à-tête avec David de Pury en livrant des contrepoids qu’il juge pertinents pour que l’histoire encombrante de la ville continue d’être questionnée. Un geste aussi à l’adresse d’une partie des pétitionnaires qui, au cours de l’été 2020, ont demandé que l’on déboulonne la statue du commerçant dans le sillage d’autres opérations de ce genre menées à travers le monde. Mais au lieu de céder au tabula rasa, la Ville de Neuchâtel a finalement choisi l’option des #marques_mémorielles.

      L’œuvre conçue par Mathias Pfund a été choisie par un jury cornaqué par Pap Ndiaye, lui-même à la tête du Palais de la Porte-Dorée à Paris, qui comprend le Musée d’histoire de l’immigration version française. Il a été secondé dans ses choix par Martin Jakob du Centre d’art de Neuchâtel (CAN), Faysal Mah du Collectif pour la mémoire, Noémie Michel, maître-assistante en science politique à l’université de Genève, Alina Mnatsakanian, coprésidente de Visarte Neuchâtel, et la photographe Namsa Leuba. Trois membres de l’art officiel ont également eu leur mot à dire : l’urbaniste municipal, Fabien Coquillat, le codirecteur du Musée d’ethnographie de Neuchâtel Grégoire Mayor et la conservatrice du département des arts plastiques au Musée d’art et d’histoire, Antonia Nessi.
      Coups de boutoir nécessaires

      Membre du mouvement Solidarités Neuchâtel, François Chédel voit dans cette mise en perspective « un premier pas ainsi qu’une solution pour l’heure satisfaisante ». Du moins en phase avec les réflexions qui entourent le sort de cette statue depuis près de deux ans. Une chose est sûre, l’exécutif n’entend ni rebaptiser la place ni déplacer l’icône du négociant.

      En revanche, l’espace sera revue de fond en comble. Ce qui devrait permettre sans doute aux œuvres sélectionnées, quatre au total, dont celle de Mathias Pfund et celle de l’artiste neuchâtelois #Nathan_Solioz (Ignis fatuus) qui fera appel cet hiver aux âmes des esclaves, de perdurer. « La durée de leur exposition devant la statue est étroitement liée à la question du réaménagement de la place Pury. On peut donc parler de plusieurs années d’exposition, sans être plus précis pour l’instant », ont indiqué au Courrier les autorités municipales.

      Pour François Chédel, les noms qui parsèment l’espace public continuent cependant de nous interroger, à Neuchâtel aussi, sur « nos réalités patriarcales, colonialistes, voire racistes ». Il relève aussi que les actions didactiques menées par la Ville n’auraient sans doute pas été possibles « sans les changements radicaux » exigés voici maintenant près de deux ans par son mouvement ainsi que par d’autres dans la foulée des manifestations Black Lives Matter. Il faut « questionner notre histoire et sa résonance dans l’espace public au travers de nouveaux #récits », a résumé pour sa part récemment le Service cantonal de la cohésion multiculturelle en présentant la Semaine contre le racisme.

      https://lecourrier.ch/2022/03/21/en-tete-a-tete-avec-david-de-pury

    • Place Pury : un hommage raté ?

      Suite à l’inauguration de l’œuvre autour de la statue de Pury, des voix dénoncent une « imposture » et pointent du doigt un hommage aux victimes de l’esclavage « au rabais ».

      La semaine dernière, Neuchâtel inaugurait une oeuvre Great in the Concrete (notre édition du 28 octobre) et une plaque explicative autour de la statue de David de Pury, un négociant qui avait fait fortune avec l’esclavage et légué sa fortune à la ville. Le monument a été au cœur de houleux débats lors du mouvement « Black Lives Matter ». Une pétition demandait en 2020 son retrait (notre édition du 26 juillet 2020).

      Suite à cette polémique, la Ville a lancé une série de mesures pour faire la lumière sur son passé colonial, dont la plaque et l’œuvre.

      Si ces deux initiatives sont présentées par les autorités comme un « #acte_de_mémoire » et un « #hommage » envers les personnes exploitées par le riche baron, le secrétaire général du Carrefour de réflexion et d’action contre le racisme anti-Noirs (CRAN), Kayana Mutombo, se dit très déçu. Il y voit même une #humiliation.

      « Le résultat de ce processus est tout simplement une #imposture », dénonce le politologue. Il déplore les #dimensions de #Great_in_the_Concrete. Il s’agit d’une version #miniature de la statue du bienfaiteur renversée, tête écrasée dans le sol. Le politologue n’était pourtant pas en faveur d’un déboulonnement.

      « J’ai participé aux rencontres initiales, nous avions proposé la création d’un monument bis qui établisse un dialogue entre le monument et les descendants des victimes de l’esclavage. Le résultat est au final une discussion entre de Pury et de Pury. Les voix des victimes et de leurs descendant·es n’y sont pas intégrées. »

      Nommer les victimes de l’esclavage

      Cet ancien chargé du Programme de lutte contre le racisme et la discrimination à l’UNESCO estime que la mémoire des victimes est ainsi minimisée. « Nous avions souligné l’importance de la #proportionnalité entre la statue originale et la nouvelle dans le cadre d’un devoir de mémoire. On rend hommage aux descendant·es aujourd’hui, comme on récompensait les esclaves avec une miche de pain ! »

      Il regrette également que les mots « Noir·es et Afrique » ne figurent pas sur la plaque explicative. « Il faut avoir étudié l’histoire pour comprendre les termes de #commerce_triangulaire et #colonisation. Ne pas nommer les #victimes est l’une des stratégies du racisme anti-Noir·es », déplore Kanyana Mutombo.

      Le collectif pour la mémoire à l’origine de la pétition est plus nuancé. Il estime que « ces mesures ne sont pas suffisantes ni satisfaisantes mais guident sur la voie à emprunter ». Il avance que la Ville de Neuchâtel a pris au sérieux sa demande constituant un groupe de réflexion et en produisant un contenu pédagogique, à défaut d’enlever la statue. Il regrette cependant que le Secrétaire général du CRAN n’ait pas été inclus dans la suite de la réflexion.

      Des moyens dérisoires ?

      D’autres voix déplorent le manque de moyens engagés pour la Ville. Ousmane Dia, artiste plasticien suisse et sénégalais, très enthousiasmé dans le projet a vu ses ardeurs freinées, lorsqu’il a appris que le budget alloué était de 20 000 à 25 000 francs.

      « En tant qu’artiste plasticien afro-descendant, je ne pouvais pas ne pas concourir. Mon projet s’appelle #Dialoguons, il s’agit d’une œuvre monumentale constituée de personnages en acier placés tout autour de de Pury pour l’interpeller. J’ai glissé une lettre dans mon dossier qui mentionne que rien que pour fabriquer l’objet coûte 63 000 francs et que leur budget n’était pas suffisant. »

      Au total, une enveloppe de 66 000 francs a été investie dans le cadre de cet appel à projets artistiques. Quatre projets ont été retenus mais seuls deux verront le jour. Les deux autres n’étaient techniquement pas réalisables. Le projet de #Nathan_Solioz_Ignis_Fatuus, (feu folet), une évocation en lumière des âmes des esclaves morts lors de la traversée forcée de l’Atlantique, sera réalisée au printemps prochain.

      Thomas Facchinetti, conseiller communal en charge de la culture, de l’intégration, de la cohésion sociale et responsable du dossier, précise que le vernissage des deux œuvres primées n’est pas l’unique réponse aux demandes des pétitionnaires.

      « La Ville a pris toute une liste de mesures. Un #parcours_pédagogique sur le passé colonial de la Ville est en cours d’élaboration, une exposition au Musée d’art et d’Histoire aborde ces sujets et des recherches historiques vont être réalisées. Il s’agit d’un engagement très conséquent. »

      Il rappelle que le monument réalisé par le sculpteur #David_d’Angers avait été financé à l’époque par de riches notables, alors que l’initiative actuelle se fait aux frais des contribuables.

      De Pury à Dakar

      Aujourd’hui, #Ousmane_Dia, le candidat déçu se dit surtout choqué par la #taille de l’oeuvre vernie. « J’ai beau retourner le sujet dans tous les sens je n’y vois qu’une interprétation : la statuette nous dit qu’on a tenté de renverser et d’enfoncer de Pury, mais la grande statue répond qu’il s’est relevé encore plus grand.

      Pour Martin Jakob, artiste et curateur au CAN Centre d’art Neuchâtel, membre du jury, le caractère non monumental de l’oeuvre retenue fait tout son sens. « Aucun travail artistique ne permet de panser toutes les plaies. Aujourd’hui, il n’est plus question de réaliser de statues comme à l’époque. D’ailleurs, quel que soit leur taille, ces œuvres d’art finissent par intégrer notre environnement quotidien et s’effacer de notre regard. l’important, c’est le débat qu’elles suscitent. »

      Le collectif pour la mémoire se dit « ravi » par la mise en place de Great in the concrete mais espère qu’un budget pourra être alloué pour concrétiser le projet de Ousmane Dia. « Malgré le fait que la statue soit toujours là et qu’il y aurait encore beaucoup à questionner sur l’acharnement à défendre ce personnage nous souhaitons plutôt se concentrer sur la mémoire de milliers de personnes réduites en esclavage. »

      La saga de Pury n’en est pas à son épilogue. A l’horizon 2028-2029, la place devrait être entièrement requalifiée, la statue pourrait être déplacée et son nom pourrait même être modifié. « Il s’agit d’un projet de plusieurs millions de francs.

      Avec l’enveloppe du pour-cent culturel, un concours artistique sera réalisé, son budget sera bien plus conséquent et permettra d’ériger une œuvre pérenne plus conséquente », précise Thomas Facchinetti. Quant à Ousmane Dia, il envisage de réaliser son projet à Dakar, en reproduisant une statue de David de Pury pour y intégrer son projet Dialoguons.

      https://lecourrier.ch/2022/10/30/place-pury-un-hommage-rate

    • La statue, l’esclavagiste et le #contre-monument contestés

      Fin décembre 2022, à Neuchâtel, une récente installation d’art contemporain, conçue comme réponse à la statue de l’esclavagiste David de Pury contestée en 2020 par des militants se revendiquant de « Black Lives Matter », a été à son tour maculée de peinture. Ce dispositif didactique et conceptuel déployé dans l’espace public, qui compte parmi les premiers adoptés en Europe pour réparer symboliquement les mémoires citoyennes blessées, est un contre-monument ironique, temporaire et anti-monumental.

      https://aoc.media/analyse/2023/02/07/la-statue-lesclavagiste-et-le-contre-monument-contestes

      et sur seenthis : https://seenthis.net/messages/989775

  • Derrière le débat sur le « wokisme », les trois mutations du racisme : biologique, culturel, systémique

    Après avoir postulé, depuis l’esclavage, l’inégalité des races, le racisme insiste, après 1945, sur l’impossible coexistence culturelle. Plus controversée est la notion, apparue dans les années 2000, de racisme « structurel ».

    C’est un mystérieux néologisme qui désigne un ennemi aussi terrifiant qu’insaisissable : le « wokisme », ce mouvement venu des Etats-Unis, suscite depuis des mois des croisades enflammées. Pour le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, ce mot renvoie à une idéologie obscurantiste qui, en imposant une police de la pensée digne de George Orwell, ouvre la voie au totalitarisme. Le réquisitoire est sans doute un peu exagéré : le wokisme n’est ni un corpus idéologique structuré ni un courant de pensée homogène, mais, plus modestement, une attitude consistant à être attentif (« awake ») aux injustices subies par les minorités.

    Si l’expression apparaît dans l’argot afro-américain dans les années 1960, si elle est présente, en 1965, dans un discours prononcé par Martin Luther King (1929-1968), si elle est aujourd’hui revendiquée par le mouvement américain Black Lives Matter, elle reste très largement méconnue des Français : selon un sondage IFOP réalisé en février 2021, 86 % d’entre eux n’ont jamais entendu parler de la « pensée woke » et 94 % ignorent ce qu’elle signifie. En France, le wokisme est « un épouvantail plus qu’une réalité sociale ou idéologique » , résume l’historien Pap Ndiaye, directeur général du Palais de la Porte Dorée (l’établissement public qui comprend le Musée national de l’histoirede l’immigration et l’Aquarium tropical de Paris).

    Les controverses françaises sur le « wokisme » ont beau reposer sur des à-peu-près et des chimères, elles ont cependant un mérite : démontrer que le mot « racisme » ne veut pas dire la même chose pour tout le monde. Pour les militants « woke », la statue d’un ardent défenseur de l’esclavage ou le « blackface » festif d’un homme blanc signent la survivance subtile mais réelle d’une hiérarchie raciale héritée de la traite négrière et de la colonisation. Pour leurs adversaires, cet exercice scrupuleux de vigilance antiraciste mène tout droit à la tyrannie des minorités, voire à un « racisme inversé .

    XVIe siècle : la racialisation du monde

    Si le racisme des uns ressemble si peu au racisme des autres, c’est parce que ce mot affiche une simplicité trompeuse et ce depuis sa naissance, à la fin du XIXe siècle. Popularisé en 1892 sous la plume du pamphlétaire antisémite Gaston Méry, le terme « racisme » désigne, dans le roman Jean Révolte, non pas une condamnable hiérarchie entre les hommes, mais une enviable « patrie naturelle fondée sur la communauté d’origine », souligne l’historien Grégoire Kauffmann. Pour le héros, qui « refuse d’admettre qu’un Juif ou qu’un nègre puisse devenir son concitoyen », le racisme est une forme élevée et respectable de patriotisme. Si l’origine du mot « racisme » est ambiguë, son sens l’est tout autant. « Ce terme est polysémique » , prévient Abdellali Hajjat, auteur des Frontières de l’ « identité nationale » (La Découverte, 2012). « Il est hautement problématique », renchérit l’historien des idées Pierre-André Taguieff dans son Dictionnaire historique et critique du racisme (PUF, 2013) . Parce que le racisme se nourrit des préjugés de son époque, parce qu’il épouse la circulation des hommes et des idées, parce qu’il s’adapte à l’état de la science, il se conjugue toujours au pluriel.

    Depuis le XVIIIe siècle, le racisme français a ainsi, selon Pierre-André Taguieff, affiché deux visages : le racisme « biologique et inégalitaire » de l’esclavage et de la colonisation, qui postulait l’existence d’une hiérarchie irréductible entre les races, et le « néoracisme différentialiste et culturel » de l’après-guerre, qui fait de certaines communautés, non pas des races inférieures, mais des groupes inassimilables. Depuis les années 2000, beaucoup y ajoutent un troisième : le racisme « systémique » engendré, jour après jour, par le fonctionnement routinier et discriminatoire des institutions.

    En déportant 12,5 millions d’Africains vers les Amériques, l’esclavage atlantique inaugure, au XVIe siècle, l’ère de la racialisation du monde, et façonne du même coup la matrice du racisme biologique et inégalitaire qui survivra, en France, jusqu’à la seconde guerre mondiale. Avec la traite négrière, la « race » devient le pilier d’un ordre social fondé sur des traits phénotypiques comme la couleur de la peau. « Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les Européens théorisent l’infériorité supposée de certains peuples, souligne Pap Ndiaye. L’esclavage n’invente pas les préjugés sur les Noirs mais il les structure dans une pensée systémique de la hiérarchie raciale qui légitime la chosification des êtres humains. »

    Pendant que les naturalistes du XVIIIe siècle répertorient méthodiquement les plantes et les animaux, les savants classent les races humaines en leur attribuant des carac téristiques physiques, intellectuelles et morales immuables. Dans la hiérarchie culturelle de la perception du beau et du sublime élaborée par Kant (1724-1804), les Germains, les Anglais et les Français figurent au sommet : relégués en bas de l’échelle, les Noirs doivent se contenter du « goût des sornettes . « L’humanité atteint la plus grande perfection dans la race des Blancs, écrit Kant. Les Indiens jaunes ont déjà moins de talent. Les Nègres sont situés bien plus bas. »

    A la fin du XVIIIe siècle, l’obsession de la hiérarchie raciale est telle que le colon créole Moreau de Saint-Méry, député de la Martinique à l’Assemblée constituante et grand défenseur de l’esclavage, élabore une classification méticuleuse des hommes en fonction de leur couleur de peau. S’il estime que les Blancs incarnent l’ « aristocratie de l’épiderme » , il recense 128 combinaisons de métissage noir-blanc qu’il regroupe dans neuf catégories soigneusement hiérarchisées : le sacatra, le griffe, le marabout, le mulâtre, le quarteron, le métis, le mamelouk, le quarteronné et le sang-mêlé... Cette racialisation du monde aurait pu s’effacer après l’abolition de l’esclavage, en 1848, mais la colonisation, qui voit la France conquérir l’Algérie, en 1830, puis l’Indochine et une partie de l’Afrique, perpétue les hiérarchies raciales construites pendant la traite négrière. Sous la IIIe République, les préjugés sur la supériorité biologique des Blancs sont encore très vivants : c’est en vain, affirme Pierre Larousse dans le Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle (1872), que « quelques philanthropes ont essayé de prouver que l’espèce nègre est aussi intelligente que l’espèce blanche .

    La Caution scientifique

    Parce que la colonisation est justifiée, au XIXe siècle, par la « mission civilisatrice » de la France, la pensée raciale, cependant, se transforme. « A la hiérarchie biologique de la traite négrière s’ajoute, au XIXe siècle, une hiérarchie culturelle des civilisations, explique le sociologue Abdellali Hajjat, chargé de cours à l’Université libre de Bruxelles . Parmi les " indigènes " , la IIIe République distingue l’Arabe musulman, fourbe mais civilisé, du bon sauvage noir, proche de l’animal. Aux yeux des colonisateurs, le monde musulman, qui a une histoire commune avec l’Europe, est une civilisation, même si elle est menaçante, alors que le monde subsaharien est situé, lui, hors de la civilisation. »

    Dans un siècle marqué par les fulgurants progrès de la science, cette « raciologie républicaine », selon le mot de l’historienne Carole Reynaud-Paligot, se nourrit de discours savants. Les anthropologues comparent les anatomies, jaugent les boîtes crâniennes, mesurent les angles faciaux. « Au XIXe siècle, la pensée raciale se pare d’une caution scientifique, poursuit Abdellali Hajjat. Les nouvelles disciplines comme l’anthropologie, l’ethnologie ou la philologie élaborent des discours qui justifient l’inégalité des races. Les savoirs, dans toute leur diversité, consolident et légitiment la pensée raciale de la IIIe République. »

    A la fin du XIXe siècle, l’anthropologie physique devient ainsi l’un des viviers du racisme « scientifique . Dans le Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales, Paul Broca, fondateur, en 1859, de la Société d’anthropologie de Paris, distingue ainsi les races « éminemment perfectibles, qui ont eu le privilège d’enfanter de grandes civilisations », de celles qui ont « résisté à toutes les tentatives qu’on a pu faire pour les arracher à la vie sauvage » . « Jamais un peuple à la peau noire, aux cheveux laineux et au visage prognathe, n’a pu s’élever spontanément jusqu’à la civilisation » , écrit-il.

    Pendant la IIIe République, cette hiérarchie des races et des civilisations est profondément ancrée dans les esprits, y compris dans ceux des Républicains. « Il faut dire ouvertement, affirme Jules Ferry en 1885, que les races supérieures ont un droit sur les races inférieures » , celui de les « civiliser » . Pendant que les écoliers apprennent dans Le Tour de la France par deux enfants (1877) que la « race » blanche est la « plus parfaite » de toutes, leurs parents découvrent, dans les « villages nègres » des expositions universelles, des Africains parqués comme des animaux qui tressent des nattes et cisèlent des bracelets.

    Il faut attendre le début du XXe siècle pour que ce racisme biologique et inégalitaire commence à vaciller. Le déclin s’amorce avec l’affaire Dreyfus (entre 1894 et 1906), qui voit naître les premiers mouvements de défense de l’universalité du genre humain. Mais le coup de grâce intervient au lendemain de la seconde guerre mondiale. « La Shoah disqualifie définitivement le racisme, analyse l’historien Emmanuel Debono. A la Libération, le premier geste de l’Organisation des Nations unies et de l’Unesco [sa branche consacrée à l’éducation], tout juste créées, est de condamner le racisme chimiquement pur qu’est le nazisme. L’antiracisme s’impose, pour la première fois de l’histoire, comme une norme internationale. » En récusant catégoriquement la validité scientifique du concept de « race », en proclamant solennellement l’égale dignité de tous les hommes, les institutions internationales nées à la Libération installent, selon le philosophe Etienne Balibar, un nouveau « paradigme intellectuel » : « l’humanité est une », proclament les documents de l’Unesco des années 1950.Ce discours est si neuf que le pasteur noir américain Jesse Jackson sillonne le sud des Etats-Unis pour le promouvoir. « Une organisation internationale avait fait des recherches et conclu que les Noirs n’étaient pas inférieurs, racontait-il en 2002, dans une interview à un journal aux Etats-Unis. C’était énorme ! »

    Le racisme biologique et inégalitaire de l’avant-guerre ne survit pas à ce nouveau paradigme. Dans la seconde moitié du XXe siècle, les racistes « à l’ancienne » se font de plus en plus rares : les Français qui croient à la supériorité biologique de certaines races représentent aujourd’hui moins de 10 % de la population. « L’Unesco a indéniablement réussi à délégitimer le concept de race » , constate Abdellali Hajjat. L’ « inertie » des catégories raciales bâties pendant l’esclavage et la colonisation est cependant très forte : « Le racisme est un train à grande vitesse, poursuit-il. Même quand on appuie fermement sur le frein, il met du temps à ralentir. »

    La hantise du métissage

    Malgré les déclarations de principe des instances internationales des années 1950, le racisme continue en effet à prospérer, mais le climat de l’après-guerre l’oblige à changer de visage. Au lieu de distinguer et de hiérarchiser les races humaines, comme il le faisait pendant l’esclavage et la colonisation, le racisme , selon Pierre-André Taguieff, adopte dans la seconde moitié du XXe siècle une tonalité « culturelle et différentialiste » : il célèbre désormais le culte des identités parti culières. « Le néoracisme met en avant des différences irréductibles fondées, non plus sur la biologie, mais sur les moeurs » , constate Emmanuel Debono.

    Résolument hostile à l’ouverture des frontières, ce « new racism », selon le mot de l’historien britannique Paul Gilroy, clame haut et fort sa hantise du métissage : ce qui est reproché aux étrangers, résume Pierre-André Taguieff, ce n’est plus leur infériorité biologique, mais le fait « d’être culturellement inassimilables et d’incarner, en tant que corps étranger, une menace de désordre pour le groupe national menace polymorphe de défiguration, de dénaturation, de désinté gration, voire de souillure . « C’est le racisme de l’inégalité des cultures et du chacun chez soi, explique Pap Ndiaye, auteur de La Condition noire. Essai sur une minorité française (Gallimard, 2009). Chacun dans sa culture, chacun sur son territoire. »

    Dans les années 1970, le Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (Grece) du philosophe Alain de Benoist est le laboratoire théorique de cette doctrine qui finit par irriguer l’extrême droite, puis une grande partie de la droite. Les « grécistes » , observe le politiste Sylvain Crépon, en 2010, dans la revue Raison présente , tournent peu à peu le dos aux théories biologiques racialistes pour défendre la notion « anthropologique » de culture, et prôner, au nom de la pureté, une « étanchéité entre les peuples . Dans une France de plus en plus métissée, le Front national, qui émerge sur la scène politique en 1983, se fait le porte-parole de cette pensée identitaire.

    Face à ce « néoracisme » qui manie avec habileté le vocabulaire des modes de vie, les asso ciations antiracistes « classiques » et « généralistes » comme la Ligue des droits de l’homme, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme ou le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples sont vite dépassées. « Leur discours de principe sur l’universalité du genre humain a du mal à penser les différences culturelles, d’autant que ces militants traditionnels sont rarement issus de l’immigration », observe l’historienPap Ndiaye.Il faut attendre les années 1980 pour voir émerger une nouvelle génération d’activistes : l’organisation, en 1983, de la Marche pour l’égalité, puis la création, en 1984, de SOS-Racisme rajeunissent et élargissent le cercle de la mobilisation.

    Dans les années 1980 et 1990, ces nouveaux acteurs de la scène politique analysent le « néoracisme » non comme un système de valeurs collectif hérité de l’esclavage et la colonisation, mais comme l’expression d’une dérive « morale et individuelle », écrivent les chercheurs Fabrice Dhume, Xavier Dunezat, Camille Gourdeau et Aude Rabaud dans Du racisme d’Etat en France ? (Le Bord de l’eau, 2020). Pour SOS-Racisme, les Français hostiles aux immigrés sont des « acteurs déviants, isolés, adhérant à la doctrine raciste et/ou portés par une idéologie violente » , ajoutent les chercheurs. Face à ces errances individuelles, les militants de SOS-Racisme défendent avec conviction les vertus du métissage, de la fraternité et de la tolérance. « Ils estiment que le racisme est le fruit de l’ignorance et de la peur . La loi et l’éducation constituent donc les deux piliers de leur engagement. La loi parce qu’elle permet, depuis la législation Pleven de 1972, de sanctionner les propos racistes, l’éducation parce qu’en luttant contre les préjugés, elle ouvre la voie à un changement des mentalités. », analyse la philosophe Magali Bessone, professeure de philosophie à l’université Paris-I-Panthéon-Sorbonne et autrice de Faire justice de l’irréparable. Esclavage colonial et responsabilités contemporaines (Vrin, 2019).

    « Une matrice idéologique »

    Cette conception du racisme est questionnée à partir des années 2000. Dans un monde qui se mobilise contre les discriminations la directive européenne sur l’égalité de traitement date de 2000, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, de 2005 (supprimée en 2011) , l’idée d’un racisme « systémique » émerge peu à peu dans les milieux militants et universitaires. Ses défenseurs ne nient pas que le racisme est souvent adossé à un discours explicite de haine, mais ils estiment qu’il est souvent, voire surtout, un système de pouvoir qui imprègne discrètement, et en silence, le fonctionnement des institutions républicaines.

    Alors que le néoracisme « culturel et différentialiste » émanait d’individus affichant ouvertement une idéologie nativiste, le racisme dit « systémique » se passe de discours d’exclusion : il est, plus banalement et plus massivement, le fruit des pratiques répétitives, souterraines et discrètes de la police, de la justice, de l’entreprise ou de l’école. Comme le savent les jeunes issus de l’immigration, comme le démontrent les enquêtes de sciences sociales, ce racisme « ordinaire », qui n’est ni intentionnel ni systématique, distribue inégalement les places et les richesses.

    Le sociologue Fabien Jobard établit ainsi, dans une étude réalisée en 2007-2008 à Paris, qu’un Maghrébin a 9,9 fois plus de risques de se faire contrôler par la police qu’un Blanc, un Noir 5,2 fois plus. Cinq ans plus tard, les économistes Nicolas Jacquemet et Anthony Edo constatent lors d’un « testing » que malgré un faux CV parfaitement identique, « Pascal Leclerc » obtient deux fois plus d’entretiens d’embauche que « Rachid Benbalit . « En mettant en lumière l’ampleur des discriminations, ces travaux démontrent qu’elles ne peuvent être le fait de quelques brebis galeuses animées de croyances ouvertement racistes », observe Magali Bessone.

    Pour nombre de militants et d’universitaires, ces pratiques insidieuses et silencieuses relèvent d’un racisme « institutionnel », « structurel », voire « d’Etat . Ces mots ne signifient nullement qu’en France, un principe de hiérarchie raciale est inscrit dans le droit, comme il l’était lors de l’apartheid en Afrique du Sud ou du nazisme en Allemagne : ils renvoient plutôt, selon la politiste Nonna Mayer, à un racisme « déguisé ou subtil », qui se manifeste par des contrôles au faciès, des discriminations à l’embauche, voire des « micro-agressions quotidiennes comme des plaisanteries ou des regards, à première vue plus bénignes, mais qui maintiennent les populations racisées à distance, en position d’infériorité » .

    Le « catéchisme » antiraciste

    Les premiers jalons de cette réflexion sur le racisme « systémique » remontent, en France, à l’après-guerre. « Dès 1956, [le psychiatre et essayiste] Frantz Fanon affirme ainsi qu’une société coloniale est une société structurel lement raciste, souligne Magali Bessone. Le racisme n’y est pas, selon lui, le fruit d’une subjectivité déviante mais une norme collective et partagée. En 1972, la sociologue Colette Guillaumin défend, elle aussi, l’idée que le racisme ne renvoie pas au comportement intentionnel de quelques personnes ignorantes ou malveillantes, mais à une matrice idéo logique faite de normes, de pratiques, de catégories et de procédures. »

    Il faut cependant attendre les années 2000 pour que cette analyse, longtemps cantonnée dans un cercle étroit d’intellectuels et de militants, s’impose dans le débat public. « La question des discriminations est propulsée au premier plan en 2004, lors de l’interdiction des signes religieux à l’école, puis en 2005, lors des émeutes urbaines et des polémiques autour de la loi sur les " aspects positifs de la colonisation " , poursuit la philosophe. Les deuxièmes, voire les troisièmes générations de l’immigration postcoloniale, constatent avec amertume que l’injonction à l’intégration est toujours à recommencer : elle est aussi forte pour eux que pour leurs parents, voire leurs grands-parents. »

    C’est dans ce climat que naissent, dans les quartiers populaires, les collectifs de l’anti racisme que l’on qualifie parfois de « politique » - le Parti des indigènes de la République, le Conseil représentatif des associations noires, La Vérité pour Adama. A l’éloge du métissage célébré par SOS-Racisme dans les années 1980 se substitue, dans les années 2000-2020, une dénonciation du racisme systémique fondée sur un nouveau lexique « racisé », « décolonial », « privilège blanc . « Ces militants qui s’intéressent à l’histoire et à la sociologie s’efforcent de conceptualiser la trame du racisme ordinaire , souligne Abdellali Hajjat. Ils estiment que certains gestes apparemment anodins du quotidien constituent des rappels à l’ordre racial. »

    Dans un pays intensément attaché aux principes universalistes, cette conception « structurelle » du racisme est aujourd’hui âprement critiquée. Dans L’Antiracisme devenu fou, le « racisme systémique » et autres fables (Hermann, 2021), Pierre-André Taguieff vilipende l’idée d’un « racisme sans racistes » : parce qu’il est devenu « victimaire » , le « catéchisme » antiraciste d’aujourd’hui a rompu, selon lui, avec la « tradition du combat contre les préjugés raciaux fondée sur l’universalisme des Lumières » . Une conviction partagée par la philosophe Elisabeth Badinter, qui estime que ces combats « identitaires » remettent en cause l’universalisme républicain .

    Cette idée est réfutée par Pap Ndiaye. « L’antiracisme contemporain, dans l’ensemble, ne tourne pas le dos à l’universalisme : il cherche au contraire à l’approfondir en évitant qu’il reste incantatoire, abstrait ou " décharné " , selon le mot d’Aimé Césaire. Les militants d’aujourd’hui sont finalement plus pragmatiques que leurs aînés : alors que les antiracistes de l’après-guerre espéraient, par le redressement moral, extirper le mal de la tête des racistes, les militants d’aujourd’hui veulent, plus simplement, faire reculer une à une les discriminations. » Cette ambition égalitaire n’est pas contraire à l’universalisme, estime l’historien : elle est même au coeur de la promesse républicaine.

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/01/06/biologique-culturel-systemique-le-racisme-en-trois-mutations_6108458_3232.ht
    #racisme #racisme_biologique #racisme_culturel #racisme_systémique #Jean-Michel_Blanquer #Blanquer #obscurantisme #idéologie #police_de_la_pensée #Martin_Luther_King #Black_Lives_Matter #épouvantail #racisme_inversé #tyrannie_des_minorités #racialisation #Gaston_Méry #préjugés #esclavage #traite #traite_négrière #hiérarchie_raciale #colonisation #hiérarchie_raciale #pensée_raciale #mission_civilisatrice #antiracisme #néoracisme #new_racism #marche_pour_l'égalité #SOS-racisme #histoire #pouvoir #nativisme #racisme_ordinaire #discriminations #testing #racisme_d'Etat #décolonial #privilège_blanc #universalisme #racisme_sans_racistes #universalisme_républicain

    –-> ajouté à ce fil de discussion autour du wokisme :
    https://seenthis.net/messages/933990
    et plus précisément ici :
    https://seenthis.net/messages/933990#message943325

    • à faire débuter l’anti-racisme politique durant les années 2000, ce journal ne fait que propager une arrogante vulgate militante où l’on se complait à confondre le mot dont on se pare et la chose que l’on cherche à (ré)inventer, avec des bonheurs contrastés (l’appel des indigènes de la république est publié en janvier 2005, or le soulèvement de novembre 2005 n’a concerné ses tenants que de loin).

  • La puissance politique du sucre, entre délices et dominations
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/24/la-puissance-politique-du-sucre-entre-delices-et-dominations_6107186_3232.ht

    C’est l’un des effets collatéraux de l’épidémie de Covid-19. Entre le début du confinement et la fin du mois de mai 2020, les ventes de sucre ont bondi de 30 % en France, avec une prime au sucre en poudre (+ 56 %) et plus encore au sucre à confiture (+ 80 %). La peur de la pénurie a sans nul doute joué un rôle dans cette ruée. Mais une enquête menée par le Centre des sciences du goût et de l’alimentation, à Dijon, montre aussi que la période a favorisé, notamment chez l’enfant, ce que les auteurs de l’étude appellent le « manger émotionnel ». Dans le huis clos de nos vies confinées, nous avons été nombreux à noyer nos angoisses de fin du monde dans la douceur réconfortante de desserts faits maison.

    Valeur refuge au cœur des crises, ingrédient incontournable des fêtes ou plaisir solitaire et parfois coupable, le sucre raconte, à sa façon, la part intime de l’histoire des hommes et des femmes, de leurs joies et de leurs détresses, de leurs peurs et de leurs espoirs. Il est aussi, aux côtés des céréales, l’un des produits qui, à travers les siècles, décrit le mieux l’histoire des peuples, la violence des empires et la naissance d’une mondialisation dont il est un acteur central.

    Derrière #paywall #sucre #histoire #alimentation

  • "La France a débaptisé des noms de collabos, pourquoi pas celles qui portent des noms de #négriers ? "

    En marge des manifestations contre le racisme, après la mort de Georges Floyd, des statues de négriers sont déboulonnées aux États Unis, au Royaume Uni,en Belgique. Et en France, qu’en est–il du passé négrier de certains grands ports de la façade atlantique ? Pourquoi certaines rues n’ont jamais été débaptisées ?

    https://www.franceinter.fr/la-france-a-debaptise-les-rues-portant-le-nom-de-collabos-pourquoi-pas-c

    –-> ça date de 2020, pour archivage

    #toponymie #toponymie_politique #France #débaptisation #noms_de_rue #traite #traite_négrière

    ping @cede

  • Jamaica plans to seek reparations from Britain over slavery

    Jamaica plans to ask Britain for compensation for the Atlantic slave trade in the former British colony, a senior government official said, under a petition that could seek billions of pounds in reparations.

    Jamaica was a centre of the slave trade, with the Spanish, then the British, forcibly transporting Africans to work on plantations of sugar cane, bananas and other crops that created fortunes for many of their owners.

    “We are hoping for reparatory justice in all forms that one would expect if they are to really ensure that we get justice from injustices to repair the damages that our ancestors experienced,” Olivia Grange, Minister of Sports, Youth and Culture, told Reuters in an interview at the weekend.

    “Our African ancestors were forcibly removed from their home and suffered unparalleled atrocities in Africa to carry out forced labour to the benefit of the British Empire,” she added. “Redress is well overdue.”

    An estimated 600,000 Africans were shipped to toil in Jamaica, according to the National Library of Jamaica.

    Seized from Spain by the English in 1655, Jamaica was a British colony until it became independent in 1962. The West Indian country of almost three million people is part of the Commonwealth and the British monarch remains head of state.

    Britain prohibited trade in slaves in its empire in 1807 but did not formally abolish the practice of slavery until 1834.

    To compensate slave owners, the British government took out a 20 million pound loan - a very large sum at the time - and only finished paying off the ensuing interest payments in 2015.

    The reparations petition is based on a private motion by Jamaican lawmaker Mike Henry, who said it was worth some 7.6 billion pounds, a sum he estimated is roughly equivalent in today’s terms to what Britain paid to the slaveholders.

    “I am asking for the same amount of money to be paid to the slaves that was paid to the slave owners,” said Henry, a member of the ruling Jamaica Labour Party.

    “I am doing this because I have fought against this all my life, against chattel slavery which has dehumanized human life.”

    Grange herself declined to give a figure.

    The petition, with approval from Jamaica’s National Council on Reparations, will be filed pending advice from the attorney general and three legal teams, Grange said. The attorney general will then send it to Britain’s Queen Elizabeth, she added.

    The initiative follows growing acknowledgement in some quarters of the role played by slavery in generating wealth in Britain, with businesses and seats of learning pledging financial contributions in compensation.

    They include insurance market Lloyd’s of London, pub owner Greene King and the University of Glasgow.

    The petition also coincides with increasing efforts by some in Jamaica to sever formal ties with the United Kingdom.

    Opposition lawmaker Mikael Phillips in December presented a motion to remove the British monarch as head of state.

    More than 15 million people were shackled into the transatlantic slave trade, according to the United Nations.

    https://www.reuters.com/world/africa/jamaica-plans-seek-reparations-britain-over-slavery-2021-07-12
    #Jamaïque #esclavage #réparation #traite_négrière #justice_réparatrice #pétition

    ping @karine4 @cede

  • 20 ans de la #loi_Taubira : Trierweiler analyse le « silence assourdissant » de Macron

    ÉDITO - Le 10 mai 2021, nous commémorions les 20 ans de la loi Taubira qui a reconnu l’esclavage et la traite négrière comme crimes contre l’Humanité. Comment expliquer le silence d’Emmanuel Macron, dénoncé par la gauche ? Quelles conséquences pour le président ?

    Le 10 mai, ce n’était pas seulement les 40 ans de l’élection de François Mitterrand mais nous fêtions aussi les 20 ans de la loi Taubira, celle qui a permis à la France de reconnaitre l’esclavage et la traite négrière comme crimes contre l’Humanité.

    Pourtant ce lundi 10 mai, il ne s’est quasiment rien passé alors qu’il s’agissait un rendez-vous très attendu. Petit rappel : Emmanuel Macron a commémoré le bicentenaire de Napoléon alors que ce dernier a rétabli l’esclavage en 1802 aboli en 1794, alors les associations attendaient beaucoup du président en guise de rééquilibrage.

    Comme chaque année depuis 2006 et à l’initiative de Jacques Chirac, il y a eu une cérémonie au jardin du Luxembourg à laquelle assistaient un certain nombre de personnalités dont Jean-Marc Ayrault, président de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage. Il y a eu plusieurs discours. Et au moment où chacun s’attendait à ce que le président Macron prenne la parole. Rien, il ne s’est #rien passé, rien d’autre que le silence. Pas le genre minute de silence, pas le silence solennel, mais le silence assourdissant. Et il est parti.

    De vives réactions

    Le moins que l’on puisse dire c’est que cela a suscité des réactions ! Dans l’heure qui a suivi, Christiane Taubira a immédiatement fustigé le président de la République. Et elle n’a pas été la seule. Une grande partie de la gauche s’est emportée elle aussi, dénonçant un silence coupable ou encore un silence d’une grande violence.

    Alors dans la soirée, sans doute sur les conseils de collaborateurs, Emmanuel Macron s’est fendu d’un tweet pour préciser qu’il y a 20 ans, la France reconnaissait l’esclavage comme crime contre l’Humanité mais sans citer Christiane Taubira.

    Quelles conséquences ?

    Il ne s’agit pas là d’une simple passe d’armes entre deux politiques de camp adverse.

    Emmanuel Macron s’est mis à dos les ultra-marins et tout de ce que la France compte de descendants d’esclaves qu’on estime à 2,5 millions de personnes. Et au-delà d’eux, c’est toute la communauté noire qui se sent touchée.

    Comment expliquer ce silence ?

    Tout est politique à un an de la présidentielle ! L’historien François Durpaire a demandé s’il y avait une mémoire de droite et une mémoire de gauche. Ce silence est d’autant plus incompréhensible qu’il y a deux ans lors de cette même cérémonie, Emmanuel Macron avait fait des promesses et assuré que l’histoire de « l’esclavage était notre histoire » et que « les conséquences de ce passé sont toujours là ». A l’époque, il disait même « chère Christiane Taubira. »

    Alors au moment où Emmanuel Macron veut se recentrer sur le régalien, qu’il y a-t-il de plus régalien que de réconcilier un pays avec son passé ? Qu’il y a-t-il de plus régalien que de vouloir renforcer la cohésion de la nation ? Son silence risque de renforcer la marche du 23 mai, celle qui depuis 1998 rend hommage aux victimes de l’esclavage. Et Emmanuel Macron, par son silence, aura encouragé une forme de séparatisme.

    https://www.rtl.fr/actu/politique/20-ans-de-la-loi-taubira-trierweiler-analyse-le-silence-assourdissant-de-macron-7900030747/amp?__twitter_impression=true
    #commémoration #silence #Macron #esclavage #traite_négrière #crimes_contre_l'humanité #Emmanuel_Macron

  • La #Suisse et l’#esclavage des Noirs

    En septembre 2001, la Suisse a signé, avec 162 autres pays, la Déclaration de Durban élaborée au terme de la troisième Conférence mondiale contre le racisme, reconnaissant que “l’esclavage et la traite des esclaves constituent un crime contre l’humanité”. Tout en s’associant à cette occasion à la communauté internationale, la Suisse a voulu marquer sa différence en soulignant, par la voix de son représentant, qu’elle n’avait “rien à voir avec l’esclavage (ou) la #traite_négrière”. Au vu de ce que révèle ce livre, ce point de vue n’est guère défendable. Des Helvètes n’étaient pas seulement des négriers, mais également des esclavagistes, et qu’ils ont de surcroît contribué à maintenir le système américain de plantation esclavagiste.

    https://www.antipodes.ch/produit/la-suisse-et-lesclavage
    #histoire #livre #colonialisme #colonisation #plantation

    –-> livre sorti en 2005, ajouté ici pour archivage

    –-

    Ajouté à la métaliste sur la #Suisse_coloniale :
    https://seenthis.net/messages/868109

  • La traite négrière, oubliée de l’histoire économique
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/06/la-traite-negriere-oubliee-de-l-histoire-economique_6054887_3232.html

    Chronique. En pleine polémique sur Colbert, concepteur du Code noir légiférant l’esclavage, le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, a expliqué, le 15 juin sur France Info, que Colbert, « c’est aussi la Compagnie des Indes, la restructuration de l’industrie ». Devrait-on, en ce début du XXIe siècle, tirer la moindre fierté de la Compagnie des Indes orientales fondée en 1664 ? Celle-ci contribua à l’expansion économique de la France, certes, mais tout en organisant des centaines d’expéditions de traite et en déportant des dizaines de milliers d’Africains vers les colonies françaises.

    A moins qu’elle ne trahisse une nostalgie de l’empire colonial, ce que l’on n’ose imaginer, la remarque de Bruno Le Maire témoigne de la difficulté à faire le lien, en France, entre la traite négrière et le développement économique. Peut-être parce que celle-ci ne fait pas partie de l’histoire économique, telle qu’elle est étudiée dans l’Hexagone. Comme l’explique l’historien Alessandro Stanziani, directeur de recherches au CNRS, « les spécialistes français de l’esclavage ne s’intéressent pas à l’économie et les historiens français de l’économie ne s’intéressent pas à l’esclavage ». Dans l’ouvrage intitulé Les Grandes Dates de l’histoire économique et financière de la France, publié par le ministère de l’économie en 2017, aucune date ne concerne, de près ou de loin, la traite négrière. Quant au très sérieux Comité pour l’histoire économique et financière de la France rattaché à Bercy, il n’a quasiment rien publié sur le sujet. Ce qui est plutôt surprenant lorsqu’on sait que le capitalisme moderne est né en partie dans les plantations de canne à sucre.

    Immenses profits de la production de canne à sucre

    Aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, c’est tout le contraire. Tandis qu’en France, tout débat sur l’esclavagisme est happé par des questions identitaires, les historiens anglo-saxons tentent d’évaluer les profits dégagés pendant cette période, s’ils ont favorisé ou non la révolution industrielle. Un historien comme George Frederickson pousse la rationalité économique de la traite négrière jusqu’à écrire que si l’esclavage des Blancs avait été profitable, il aurait vraisemblablement existé.

    En étudiant ce passé, la France découvrirait peut-être que ce n’est pas seulement la machine à vapeur qui est à l’origine de la révolution industrielle, mais les immenses profits dégagés par la production de canne à sucre, réinvestis dans l’innovation. Elle découvrirait que les débats sur l’abolition étaient dominés par les arguments économiques : un abolitionniste du XVIIIe siècle comme Du Pont était par exemple convaincu que les travailleurs libres étaient bien plus productifs que les esclaves. Elle réaliserait à quel point les inégalités sont un héritage du passé, comme l’a montré Thomas Piketty dans Capital et idéologie (Seuil, 2019).

    Ce devoir d’histoire est la responsabilité des entreprises qui, à l’instar d’Axa ou de la Banque de France, ont vu le jour grâce à l’argent de la traite négrière, et de l’Etat français

    Lorsque les Britanniques ont aboli l’esclavage en 1833, ils ont versé l’équivalent de 5 % du revenu national à 4 000 propriétaires, favorisant l’émergence de grandes fortunes qui existent toujours aujourd’hui. La France a aussi versé des compensations en 1848 aux propriétaires de la Réunion, de la Guadeloupe, de la Martinique et de Guyane. Mais on commence tout juste à connaître leurs montants et leurs bénéficiaires. Idem pour les réparations qu’Haïti a dû payer à la France jusqu’en 1950 pour avoir voulu s’affranchir de l’esclavagisme.
    Article réservé à nos abonnés Lire aussi Aurélia Michel : « L’histoire de l’esclavage irrigue encore une large part de l’organisation de notre société »

    Quelques historiens et économistes commencent à travailler sur ces sujets, à l’instar de Jessica Balgues, qui présentera son ouvrage intitulé Indemniser l’esclavage en 1848 ? (Karthala, 220 pages, 20 euros) aux Rendez-vous de l’histoire de Blois, le 10 octobre, ou de Simon Henochsberg, auteur d’une thèse remarquée sur les compensations versées à la France par Haïti. Ce devoir d’histoire est la responsabilité des entreprises qui, à l’instar d’Axa ou de la Banque de France, ont vu le jour grâce à l’argent de la traite négrière, et de l’Etat français. Sur le site Internet de Bercy, la biographie de Colbert, répertorié comme un « grand nom de l’économie », ne mentionne ni le commerce colonial ni la Compagnie des Indes, et encore moins la traite négrière.

    Julien Bouissou

    #esclavage #colonialisme #décolonisation

  • Des manifestants #BlackLivesMatter ont fait tomber une statue d’Edward #Colston se trouvant à #Bristol depuis 1895. L’homme était un négrier. Elle avait été érigée car il avait aidé au développement de la ville au XVeme siècle.

    La statue a ensuite été jetée dans un canal.


    https://twitter.com/Conflits_FR/status/1269677215400288262

    #monument #statue #GB #Angleterre #Edward_Colston #Colston #Bristol #toponymie #toponymie_politique #BLM #Black_Lives_Matter #esclavage #traite #traite_négrière
    ping @neotoponymie @reka

    • Protesters rally in #Oxford for removal of #Cecil_Rhodes statue

      University campaigners and #Black_Lives_Matter protesters block road outside Oriel College.

      More than a thousand protesters have gathered outside Oxford University to demand the removal of a statue of the Victorian imperialist Cecil Rhodes.

      Blocking the road outside Oriel College, the Rhodes Must Fall campaign said Black Lives Matter (BLM) protests across the UK, which included the dramatic toppling of a statue of the slave trader Edward Colston in Bristol, had reignited their campaign.

      Riot police stood on the roof of the college building while the crowd below the Rhodes statue listened to speeches, including the announcement of a BLM protest in Oxford on Friday. The demonstration ended peacefully with people leaving their signs on the outside of the building, while there were cheers as a police officer briefly took a knee in the crowd.

      In 2016, hundreds of Oxford students campaigned for the removal of a likeness of the controversial 19th-century figure – who supported apartheid-style measures in southern Africa – from the wall of the college. The campaign also called for the university curriculum to be changed to reflect diversity of thought beyond the western canon.

      The university said then that the statue would stay, with modifications that “draw attention to this history [and] do justice to the complexity of the debate”. It had been warned that it could lose about £100m in gifts should the statue be taken down, but it insisted financial implications were not the primary motive behind its decision.
      Guardian Today: the headlines, the analysis, the debate - sent direct to you
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      In a statement released on Tuesday, Oriel College said it “abhors racism and discrimination in all its forms” and that it would “continue to debate and discuss the issues raised by the presence on our site of examples of contested heritage relating to Cecil Rhodes”.

      The campaign to remove the statue was supported this week by the Liberal Democrat MP Layla Moran and the leader of the local council.

      Femi Nylander, an organiser for Rhodes Must Fall, welcomed the support from the council, Moran and the thousands who signed the petition to remove the Rhodes statue.

      He said: “It’s good to see public consciousness is changing. We are seeing a paradigm shift. You can see that everywhere.” He added that he hoped the protest would result in a resurgence of the Rhodes Must Fall movement in Oxford.

      Simukai Chigudu, an associate professor of African politics at the University of Oxford, said the phrase “black lives matter” resonated because of “a history of white supremacy that has denigrated, exploited and subjugated black lives”.

      He added that Rhodes Must Fall, which he joined in 2015, had been started by student activists in South Africa who were “tired of colonial iconography, tired of white supremacy in our curriculums, tired of the crisis of representation of black and other minority ethnic people in our institutions”.

      A PhD student, Ndjodi Ndeunyema, 30, said: “We reject this narrative that Cecil Rhodes is a complicated character. No, he is a genocidaire, he is someone who planned an assault [on] Africa and he is not worthy of exaltation, he does not deserve to be on a high street looking down on us. That history will never be erased, it’s a lived reality for people in southern Africa, but it needs to be contextualised, it needs to be accurately represented and not glorified in the way it is today.”

      He said the protest went further than calling for the removal of the statue, it was also about meaningful equality “for the black community, given the moment we are in, but also people of colour and people on the social and economic fringes of any society”. He called for justice for the Windrush generation, describing the scandal as a “substantive policy manifestation of anti-blackness”.

      There was a significant police presence before the protest, with police vans and officers on horses.

      A PhD student who did not want to be named said: “We are here today as students, community members and community-based organisations who believe in democracies, who believe in the valuation of all lives equally and who believe in the removal of colonial iconographies that we must all inhabit.

      “We’re here to say to the University of Oxford, Oriel College and other colleges in Oxford that still demonstrate in support of the values we disagree with, that it is time to take a stand. If you are truly anti-racist and pro-good race relations and inclusion of black and ethnic minority students then today is the day to put your money where your mouth is.”

      Kate Whitington, the Oriel College junior common room president, said: “Oriel College must not be blind to its legacy of colonialism and racism in association with Cecil Rhodes. Despite claims that clear historical context about the Cecil Rhodes statue would be provided in order to acknowledge and educate our students on the imperialist past, the subject remains taboo and Oriel’s continuing silence equal to complicity in the perpetuation of white privilege and supremacy.”

      https://www.theguardian.com/world/2020/jun/09/protesters-rally-in-oxford-for-removal-of-cecil-rhodes-statue?CMP=Share

      #UK

    • Edward Colston statue replaced by sculpture of Black Lives Matter protester Jen Reid

      Exclusive: Artist #Marc_Quinn leads secret mission to install resin-and-steel figure of #Jen_Reid at site of toppled Bristol slave trader.

      The statue of slave trader Edward Colston was replaced in Bristol on Wednesday morning – with a sculpture of one of the protesters whose anger brought him down.

      The figure of Jen Reid, who was photographed standing on the plinth with her fist raised after the 17th-century merchant was toppled by Black Lives Matter demonstrators last month, was erected at dawn by a team directed by the artist Marc Quinn.

      The ambush sculpture is likely to reignite the debate over public statuary in the UK that began with the toppling of the Colston figure five weeks ago. On Wednesday morning police said they had had no complaints and it was “a matter for Bristol city council”.

      Marvin Rees, the city’s mayor, issued a statement saying that “the future of the plinth and what is installed on it must be decided by the people of Bristol”. He said the sculpture was “the work and decision of a London-based artist,” and added: “It was not requested and permission was not given for it to be installed.”

      But he stopped short of saying that the council would act to remove it.

      Arriving in two lorries before 5am, a team of 10 people worked quickly to install the figure of Reid, who said she had been secretly working with Quinn on the idea for weeks. It came as a complete surprise to the authorities, who are yet to announce their plans for the location.

      A cardboard placard reading “black lives still matter” was placed at the bottom of the plinth.

      Shortly after the vehicles drove away, Reid stood in front of the statue with her fist in the air. “It’s just incredible,” she said. “That’s pretty fucking ballsy, that it is.”

      After meticulous planning to ensure the statue could be erected quickly enough to have it in place before officials arrived, the vehicles left the scene about 15 minutes after they got there. “I just knew it was going to happen,” said Reid. “They were so efficient.”

      The most powerful moment of the morning, she said later, was “watching children stand next to it and raising their fists. Black children and white children, together.”

      Quinn said that the installation had gone well. “It went exactly the opposite of how it imagined, because I imagined it being stopped,” he said. “It almost feels like it’s been there forever. It gets under the skin before you understand what it is, which I think is how you make people think about things, how you pose the question a different way and renew the conversation.”

      By late morning the only council presence had been a roadsweeper, whose driver stopped to take a picture before continuing on his shift.

      “It is incredible seeing it,” said Jen Reid’s daughter, Leila Reid, arriving and gazing up at the statue a little later. “It’s surreal. From the kneecap to the shape of her hands - it’s just her.” She said she had struggled to keep the secret since her mother told her. “She’s proud to represent a movement, and if there’s a better way to do that I can’t think of it.”

      Reid, a stylist, attended the march with her husband, who one of the group that rolled the statue of Colston to the river after it was pulled down. She said that to stand for the BLM movement was “massive”, but “it would be just as big if it was someone else representing the same thing.”

      Quinn – whose best known works include his “blood head” self-portrait Self and a sculpture of an artist that temporarily occupied the fourth plinth in Trafalgar Square, Alison Lapper Pregnant – said he viewed it as a duty for prominent white artists to amplify other voices.

      “Jen created the sculpture when she stood on the plinth and raised her arm in the air,” said Quinn. “Now we’re crystallising it.”

      In the weeks since the Colston statue was removed, although ideas including a Banksy proposal and calls for a statue of civil rights campaigner Paul Stephenson have been floated, and a mannequin of the notorious paedophile Jimmy Savile was briefly installed before falling off, no permanent decision on the future of the Colston site has been reached.

      The new black resin and steel figure – entitled A Surge of Power (Jen Reid) 2020 – was transported from Quinn’s studio on Tuesday and stored overnight nearby. It was put in place using a hydraulic crane truck parked next to the plinth.

      The team carried out the same surveys and health and safety checks it would have gone through on a more conventional work, Quinn said, adding that it would be “extremely difficult to move”. But he added: “This is not a permanent artwork.”

      Reid said it had been difficult to keep the secret from friends and family. “When friends say ‘I’ll see you later,’ I think … yeah, you will!”

      On whether there was an issue with a white artist being behind the work, Reid said: “It’s not even a question. If we have allies, it doesn’t matter what colour they are. He has done something to represent BLM, and to keep the conversation going.”

      A placard was briefly placed on the plinth reading “Marc Quinn loves money, not blacks” before it was removed by another member of the public to applause.

      Others were broadly positive in their response. “It’s a really great addition to the centre of Bristol,” said Bobby Loyal, an engineer. “I just hope no one tries to rip this down. The statue before was offensive to a lot of people, I don’t think this is. I think the council should leave it in place.”

      Sanna Bertilsson, who was cycling past, did a double take as she saw the figure and stopped to look. “I didn’t know they were replacing it,” she said. “It’s absolutely beautiful.” Told that it had been put up without permission, she said: “I’d better get a picture before they take it down.”

      The author Bernardine Evaristo tweeted that “some people will find this image of black empowerment offensive/outrageous/threatening” but that she thought it was “wonderful”.

      https://www.theguardian.com/world/2020/jul/15/edward-colston-statue-replaced-by-sculpture-of-black-lives-matter-prote

  • Au Portugal, le récit des « grandes découvertes » remis en cause

    Un #mémorial aux victimes de la #traite_négrière en chantier, un projet avorté de « Musée des #grandes_découvertes »… Des activistes tentent de fissurer le grand récit portugais, qui atténue la nature violente de l’expansion portugaise depuis des siècles.
    Lisbonne, de notre envoyé spécial. – Le mémorial sera construit sur le Campo das cebolas (« champ d’oignons » en français), l’une des places du bas de Lisbonne, à deux pas des quais où les navires d’esclaves débarquaient autrefois le long du Tage. « Beaucoup de villes en Europe ont des mémoriaux liés à l’esclavage, mais il n’y en a pas encore un seul au Portugal », assure Evalina Gomes Dias, à la tête de Djass, une association d’Afro-descendants portugais.

    Le collectif avait obtenu une enveloppe de 100 000 euros pour réaliser ce projet, dans le cadre des budgets participatifs de la ville en 2017. Cinq artistes ont alors été sollicités. Dans la foulée, Djass a organisé des réunions de voisins, dans des quartiers populaires de Lisbonne, où la population d’Afro-descendants est nombreuse, pour choisir entre les différents projets.

    Une centaine de personnes ont voté, et retenu l’option d’un artiste angolais. Kiluanji Kia Henda a imaginé une plantation de 540 cannes à sucre réalisées en aluminium, à taille réelle. Si l’épidémie du coronavirus n’a pas tout retardé, l’inauguration du site pourrait avoir lieu dès la fin de l’année.

    C’est à Lagos, un petit port d’Algarve, dans le sud du Portugal, qu’un navire chargé d’esclaves africains, venus de l’actuelle Mauritanie, débarque pour la première fois en Europe, en 1444. Les esclaves sont ensuite acheminés dans de grandes villes du pays. L’événement marque le début de la traite occidentale. On estime que des navires portugais ont transporté plus de cinq millions d’esclaves, d’Afrique vers le Brésil en particulier, de 1519 à 1867.

    À Lagos, un petit musée inauguré en 2016 rappelle l’existence du premier marché d’esclaves d’Europe dans cette ville devenue une tranquille station balnéaire. « Ils avaient trouvé sur le site des squelettes d’anciens esclaves. Mais ils n’ont pas voulu les garder, et préféré les envoyer à l’université de Coimbra [dans le centre du pays – ndlr]. Pour Djass, cette décision était une provocation. Ces corps auraient dû être montrés dans le musée », juge Evalina Gomes Dias, née en 1968 au Sénégal de parents venus de Guinée-Bissau.

    Le mémorial en chantier à Lisbonne marque une rupture. Mais les débats sur le passé esclavagiste du Portugal ne vont sans doute pas s’apaiser pour autant. D’autant que le legs douloureux de ce passé négrier se mêle, de manière complexe, aux mémoires des « grandes découvertes », cette phase d’expansion maritime du Portugal à partir du XVe siècle, comme à celles des colonies, qui ont duré sur le sol africain jusqu’en 1974, un « record » de longévité.

    Evalina Gomes Dias a aussi fait partie, avec sa sœur Beatriz, une députée du Bloc de gauche, des adversaires du projet de l’actuel maire de Lisbonne d’ouvrir un « Musée des grandes découvertes » dans la capitale. La proposition du socialiste Fernando Medina, qui ne faisait qu’actualiser une vieille idée de la classe politique portugaise, avait déclenché en 2018 un tollé.

    Dans une tribune, une centaine d’historiens et activistes s’en prenaient en particulier au choix du mot « découvertes » – un terme « obsolète », une « erreur de perspective », alors qu’il est « important de prendre en compte le point de vue de tous », Européens comme non-Européens. Ces universitaires dénonçaient le recours à « une expression fréquemment utilisée durant l’Estado Novo [la dictature de Salazar, de 1933 à 1974], pour célébrer le passé, et qui n’est pas compatible avec le Portugal démocratique ».

    « Pas en notre nom ! », s’étaient élevés, dans une autre lettre ouverte, des représentants de la communauté afro-portugaise, inquiets de voir minimisée, une fois de plus, l’évocation du passé négrier dans ce futur musée : « Nous n’acceptons pas ce musée qui serait construit sur l’occultation de notre histoire, avec l’argent des impôts des Noires et Noirs de ce pays. » Face à la polémique, et alors que se profilent des municipales en 2021, le maire Medina n’évoque plus ce projet. Joint à plusieurs reprises par Mediapart, il n’a pas donné suite à nos demandes d’entretien.

    Un an plus tôt, c’est la visite du président portugais, Marcelo Rebelo de Sousa, à Gorée, l’île en face de Dakar, symbole de la traite négrière en Afrique, qui a crispé. Il s’était félicité, sur place, que le Portugal eût aboli l’esclavage dès 1761. « Cette décision du pouvoir politique portugais est une reconnaissance de la dignité de l’homme », avait-il lancé.

    Mais cette abolition fut théorique, rappelle l’historien José Pedro Monteiro : « Cette abolition ne concernait que la métropole, alors que l’esclavage a perduré dans le reste de l’empire. Surtout, le travail forcé, rémunéré ou non, s’est poursuivi très tardivement, aboli seulement en 1961, en même temps que le statut de l’indigénat [contre 1946 pour la France – ndlr]. » Pour cet universitaire, la sortie présidentielle entretient encore « le vieux discours d’une exceptionnalité portugaise, d’un humanisme idéalisé » en matière d’empire et de colonies.

    Le Portugal a longtemps nourri l’idée que l’empire qu’il s’était construit au fil des siècles, n’avait rien à voir avec ceux d’autres puissances européennes. Qu’il avait fait preuve de plus d’humanité vis-à-vis des populations sur place. « Contrairement à ses voisins européens qui chercheraient à imposer outre-mer des valeurs spécifiquement européennes, le Portugal se serait efforcé de transmettre des valeurs chrétiennes, de portée universelle et de se mélanger avec les populations indigènes, créant ainsi une véritable civilisation “luso-tropicale”, sorte de paradis terrestre protégé des affres de la modernité », décrit l’historien français Yves Léonard (Sciences-Po Paris).

    Ce « lusotropicalisme » théorisé par le sociologie brésilien controversé Gilberto Freyre (1900-1987) devient l’idéologie d’État durant le salazarisme, après la Seconde Guerre mondiale. Les Portugais se sont mis en scène en « pionniers de la mondialisation ». Alors que les critiques à l’égard de la colonisation se renforçaient partout dans le monde, ce discours a aussi permis à l’Estado Novo de justifier ses colonies. Mais tout cela est un mythe : l’expansion portugaise s’est appuyée sur des fondements aussi racistes que celles d’autres États européens. Ce soi-disant « humanisme » n’avait en fait rien d’exceptionnel.

    La Révolution des œillets de 1974 a mis fin à la présence portugaise en Afrique. Mais ce lusotropicalisme défendu par Salazar, lui, est resté bien ancré dans le débat public. Un signe parmi tant d’autres : en 1989, pour la première participation du Portugal à l’Eurovision, le groupe Da Vinci chantait un « hit » douteux, mais toujours populaire auprès de certaines générations, Conquistador, qui vantait les héros de l’expansion portugaise et de la colonisation.

    Pourquoi la révolution n’a-t-elle pas mis un terme à cette culture politique ? « La gauche portugaise a une part de responsabilité, estime José Pedro Monteiro. Le Parti communiste, par exemple, n’a défendu le droit à l’auto-détermination des peuples colonisés que tardivement, à la fin des années 1950. » Le rôle joué dans la révolution par des militaires qui avaient participé aux guerres coloniales a sans doute aussi pesé.

    Depuis, les polémiques mémorielles se poursuivent, entre universitaires et activistes d’une nouvelle génération, et historiens qui seraient les « gardiens du consensus luso-tropicaliste », prompts à critiquer ce qui ne seraient que des stratégies de victimisation de l’extrême gauche. Certaines controverses se sont radicalisées.

    En 2017, une statue est inaugurée dans le vieux centre de Lisbonne, montrant le père jésuite António Vieira (1608-1697) – dont les positions sur l’esclavage sont ambiguës –, trois enfants indigènes et nus à ses pieds. Lorsqu’un groupe d’activistes s’est mis à lire des poèmes en mémoire des victimes de l’esclavage sur la place, des militants d’extrême droite sont venus « protéger » la statue, contre ces tentatives de « dénigrer l’Église catholique et instiller de la culpabilité chez les Portugais ».

    Le paysage est d’autant plus que sensible que le chantier d’un « musée Salazar », dans la ville natale du dictateur et partisan de l’empire portugais, Santa Comba Dâo (centre du pays), lui, n’a toujours pas été bloqué. Face au malaise suscité par ce projet, les autorités locales parlent désormais d’un « centre interprétatif de l’Estado Novo ». « Cet endroit va forcément devenir un lieu d’hommage, il n’y a pas d’expertise historique sérieuse, cela revient à ouvrir la boîte de Pandore », assure Marília Villaverde Cabral, à la tête de l’Union des résistants antifascistes portugais, une association née sous Salazar pour soutenir les prisonniers politiques.

    Elle a fait parvenir à l’Assemblée une pétition signée par plus de 11 000 personnes pour exhorter les députés à interdire ce projet.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/230520/au-portugal-le-recit-des-grandes-decouvertes-remis-en-cause
    #mémoire #traite #Portugal #récit #contre-récit #résistance #expansion_portugaise #histoire #colonisation #colonialisme #décolonial #Lisbonne #esclavage #budget_participatif #art #art_et_politique #plantation #Kiluanji_Kia_Henda #Lagos #marché_d'esclaves #Djass #rupture #passé_esclavagiste #expansion_maritime #découverte #contre-récit #exceptionnalité_portugaise #civilisation_luso-tropicale #lusotropicalisme #Estado_Novo #racisme #Salazar #António_Vieira #statue #culpabilité

    ping @isskein @karine4 @cede @reka @mobileborders

    • #Djass (association d’afro-descendants)

      A Djass – Associação de Afrodescendentes é uma organização sem fins lucrativos, de âmbito nacional, constituída em Lisboa a 25 de maio de 2016, com a missão de defender e promover os direitos das/os negras/os e afrodescendentes em Portugal e de combater o racismo em todas as suas formas e dimensões, reivindicando políticas e práticas de igualdade.

      O QUE PRETENDEMOS

      • Combater e denunciar todas as formas de racismo, invisibilização e discriminação contra negras/os e afrodescendentes em Portugal.

      • Promover uma reflexão crítica e abrangente sobre as relações interétnicas em Portugal, de forma a contribuir para a transformação social e para a afirmação positiva das/os negras/os e afrodescendentes enquanto membros de pleno direito da sociedade portuguesa.

      • Combater a visão eurocêntrica da História, reivindicando o contributo das africanas/os na construção do conhecimento, da cultura e da História.

      • Incentivar e promover a participação das/os negras/os e afrodescendentes nos processos de tomada de decisão política.

      O QUE FAZEMOS/FAREMOS

      • Organização de sessões de debate, reflexão, informação e formação sobre temas associados ao racismo, colonialismo, identidades e relações interétnicas.

      • Defesa da inclusão precisa da história e contribuição dos povos Africanos nos currículos e manuais escolares em Portugal.

      • Desenvolvimento e apoio a atividades de investigação e investigação-ação sobre temáticas relacionadas com as/os negras/os e afrodescendentes em Portugal.

      • Implementação de projetos de intervenção social e educativa, em particular com pessoas e comunidades afrodescendentes.

      • Colaboração com organizações congéneres em Portugal e no estrangeiro, através da troca de experiências, organização de iniciativas comuns e do trabalho em rede.

      • Organização de iniciativas de divulgação e valorização das identidades e culturas negras e africanas.

      JUNTEM-SE A NÓS!

      Contamos com a colaboração de todas/os as/os negras/os e afrodescendentes residentes em Portugal e de todas/os aquelas/es que pretendem dar o seu contributo para uma sociedade mais justa, informada e livre de discriminação.

      https://fr-fr.facebook.com/associacao.djass

    • Et une #chanson controversée citée dans l’article

      Eurovision Portugal 1989 - #Da_Vinci - #Conquistador

      “Conquistador” (Conqueror) was the Portuguese entry in the Eurovision Song Contest 1989, performed in Portuguese by Da Vinci.

      The song reminisces about the former Portuguese colonial possessions worldwide. Lead singer Tei Or takes the role of the Portuguese state and sings that she has been to Brazil, Praia, Bissau, Angola, Mozambique, Goa, Macau and “Timor” (the last a reference to East Timor).

      The song was performed ninth on the night, following Norway’s Britt Synnøve with “Venners nærhet” and preceding Sweden’s Tommy Nilsson with “En dag”. At the close of voting, it had received 39 points, placing 16th in a field of 22.

      https://www.youtube.com/watch?v=1tjdDgJgLko

      ping @sinehebdo

  • Afroféminisme (France)

    – Ait Ben Lmadani, Fatima  et Moujoud, Nasima, « Peut-on faire de l’#intersectionnalité sans les ex-colonisé-e-s ? » https://www.cairn.info/revue-mouvements-2012-4-page-11.htm#re22no22
    – Dooh Bunyah, Lydie (entretien avec), « La condition des #femmes_noires en #France » http://www.hommes-et-migrations.fr/docannexe/file/1213/dossier_1257_dossier_1257_81_89.pdf
    – Gay, Amandine, préface à Ne suis-je pas une femme ? de bell hooks
    – Maiga, Aïssa (dir.), Noire n’est pas mon métier
    – MWASI (collectif) - Afrofem
    – Thiam, Awa - La Parole aux négresses

    Race et société (France)

    – Bouteldja, Houria et Khiari, Sadri, Nous sommes les indigènes de la République
    – Cukierman, Leïla, Dambury, Gerty et Vergès, Françoise (dir.), Décolonisons les arts
    – Diallo, Rokhaya et Sombié, Brigitte, Afro !
    – Fanon, Frantz, Peau noire, masque blanc
    – Fanon, Frantz, Les damnés de la terre
    – Keaton, T. D., Sharpley-Whiting, T. D., Stovall, T., Black France / France noire : The History and Politics of Blackness
    – Ndiaye, Pap, La #Condition_noire. Essai sur une minorité française
    – Vergès, Françoise, « ’Le Nègre n’est pas. Pas plus que le Blanc’. Frantz Fanon, esclavage, race et racisme. » https://www.cairn.info/revue-actuel-marx-2005-2-page-45.htm
    – Vergès, Françoise, « Les troubles de la mémoire. #Traite_négrière, #esclavage et écriture de l’#histoire » https://journals.openedition.org/etudesafricaines/15110#quotation
    Wieviorka, Michel, « #Racisme, #racialisation et #ethnicisation en France » https://www.persee.fr/doc/homig_1142-852x_1996_num_1195_1_2609

    Black Feminism (États-Unis)

    – Davis, Angela, Femmes, #race et #classe
    – hooks, bell, Ne suis-je pas une femme ? Femmes noires et féminisme
    – Lorde, Audre, Sister Outsider

    Podcasts

    – « Des Black Studies en Europe ? », La Fabrique de l’Histoire, France Culture
    – Kiffe ta Race, Rokhaya Diallo et Grace Ly
    – Épisode 6 : Amandine Gay, La Poudre, Lauren Bastide

    –---

    Et elle ajoute :
    – Le Triangle et l’Hexagone de Maboula Soumahoro paru le 6 février
    – NoirEs sous surveillance. Esclavage, répression, violence d’État au Canada de Robyn Maynard
    – Afro-communautaire. Appartenir à nous-mêmes de Fania Noël-Thomassaint

    –-> compilation de Zoé Jourdain, reçue via mail

    #liste #compilation #ressources_pédagogiques #afro-féminisme #black_feminism #féminisme #féminismes

    ping @cede @karine4

  • Sous la pression d’activistes, Liverpool se penche sur son passé esclavagiste - Page 1 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/international/261219/sous-la-pression-d-activistes-liverpool-se-penche-sur-son-passe-esclavagis

    #Liverpool fut le premier port négrier européen au XVIIIe siècle, d’où sont partis plus de bateaux que l’ensemble des ports français, dont Nantes et Bordeaux. Dès 1740, Liverpool avait dépassé l’activité de ses concurrents nationaux, Londres et Bristol. Dans les années 1790 jusqu’à l’abolition du commerce d’#esclaves par le #Royaume-Uni en 1807, quelque 120 bateaux quittaient chaque année Liverpool vers l’Afrique, soit les trois quarts environ de la flotte partant d’Europe. Ils sont 1,5 million d’Africains à avoir été emmenés de force en Amérique sur des bateaux affrétés à Liverpool – un peu plus de 10 % de l’ensemble des populations esclavagisées.

    (sans parler de celleux qui ont perdu la vie dans les entrepôts infâmes des ports de la côte africaine où ielles étaient entassées avant embarquement)
    #esclavage #traite_négrière #plantation #plantationocène #musée #mémoire

  • #CHAM, Memories of colonial slavery: a photographic investigation

    I started the Cham (1) project with the urgency of answering this question: How was made possible the deportation of twelve million men and women from African continent to the Americas and Europe. How was organized the social, political and moral consensus around the slave trade for four centuries, and then, how it was possible to erase this tragedy of the collective memory of the West countries (and not only), even in textbooks? Have the memories of slavery, discarded by the rails of official history, survived to this day and, if so, in what forms, in what practices and places? How these memories, repressed by some, preserved by others, define our everyday relationships, our perception of others and the place of everyone in society?


    http://www.nicolalocalzo.com/en/the-cham-project

    #photographie #esclavage #mémoire #Nicola_Lo_Calzo #traite #traite_négrière #commerce_triangulaire

    ping @albertocampiphoto @reka @philippe_de_jonckheere

  • Le génocide voilé

    « Les #Arabes ont razzié l’#Afrique_subsaharienne pendant treize siècles sans interruption. La plupart des millions d’hommes qu’ils ont déportés ont disparu du fait des traitements inhumains.
    Cette douloureuse page de l’#histoire des peuples noirs n’est apparemment pas définitivement tournée. La #traite_négrière a commencé lorsque l’émir et général arabe #Abdallah_ben_Saïd a imposé aux #Soudanais un #bakht (accord), conclu en 652, les obligeant à livrer annuellement des centaines d’#esclaves. La majorité de ces hommes était prélevée sur les populations du #Darfour. Et ce fut le point de départ d’une énorme #ponction_humaine qui devait s’arrêter officiellement au début du XXe siècle. »


    http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Continents-Noirs/Le-genocide-voile

    #esclavage #déportations #livre #racisme
    ping @reka

    On me signale ce livre, que je signale du coup à mon tour.
    Elle me l’a signalé avec ce commentaire :

    c’est sur la #traite_arabe, qui a saigné l’Afrique bien plus longtemps , en plus grand nombre, et plus inhumaine aussi (car tous ces esclaves ont bien peu de descendants dans les pays arabes) et en accouchant, tout autant que l’autre, d’un #racisme_anti-noirs très fort.

    (indispensable pour saisir l’immensité de l’horreur libyenne).

    Pas tout récent, il est sorti en 2008...

  • Du commerce triangulaire à l’esclavage moderne - Philippe Rekacewicz - Visionscarto
    https://visionscarto.net/esclavage-moderne

    Le musée Kuben d’Arendal en Norvège a inauguré, en juin 2018, une exposition consacrée à l’esclavage moderne. Il se trouve que cette petite ville de la côte sud du détroit du Skagerrak (qui fait face au Danemark) entretient un lien particulier avec l’histoire de l’esclavage.

  • Details of horrific first voyages in transatlantic slave trade revealed | The Independent

    https://www.independent.co.uk/news/world/americas/transatlantic-slave-trade-voyages-ships-log-details-africa-america-at

    Almost completely ignored by the modern world, this month marks the 500th anniversary of one of history’s most tragic and significant events – the birth of the Africa to America transatlantic slave trade. New discoveries are now revealing the details of the trade’s first horrific voyages.

    #esclavage #commerce_triangulaire

  • Les routes de l’#esclavage (1/4)
    476-1375 : au-delà du désert

    Domination, violence, profit : le système criminel de l’esclavage a marqué l’histoire du monde et de l’humanité. Au fil de ses routes, cette série documentaire retrace pour la première fois la tragédie des traites négrières. Captivant et implacable. Premier volet : de la chute de Rome en 476 à la fin du XIVe siècle.

    Après la chute de Rome en 476, les peuples (Wisigoths, Ostrogoths, Berbères, Slaves, Byzantins, Nubiens et Arabes) se disputent les ruines de l’Empire. Tous pratiquent l’asservissement – « esclave » viendrait du mot « slave ». Mais au VIIe siècle émerge un Empire arabe. Au rythme de ses conquêtes se tisse, entre l’Afrique et le Moyen-Orient, un immense réseau de traite d’esclaves, dont la demande ne cesse de croître et qui converge vers Bagdad, nouveau centre du monde. Après la révolte des Zanj – des esclaves africains –, qui s’achève dans un bain de sang, le trafic se redéploie vers l’intérieur du continent. Deux grandes cités commerciales et marchés aux esclaves s’imposent : Le Caire au nord, et Tombouctou au sud, place forte de l’Empire du Mali d’où partent les caravanes. Au fil des siècles, les populations subsahariennes deviennent la principale « matière première » de ce trafic criminel.

    https://www.arte.tv/fr/videos/068406-001-A/les-routes-de-l-esclavage-1-4

    #film #documentaire #Afrique #Empire_romain #histoire #pratique_généralisée #traite #Fustat #économie #Nubie #guerre #violence #butins_de_guerre #Bagdad #main-d'oeuvre #Islam #Berbères #dromadaires #Sahara #Tombouctou #Empire_du_Mali #or #altérité #Touareg #essentialisme #fatalité #Basora #Le_Caire #esclaves_domestiques #paternalisme #négation_de_l'être #domination #esclavage_doux #oasis #Atlas_catalan

    #Catherine_Coquery-Vidrovitch :

    Dans l’Empire arabo-musulman, « l’#esclave n’était pas différencié par sa couleur, ça ne comptait pas. L’esclave était différencié par sa #culture. Il n’avait pas la culture du dominant »

    #géographie_culturelle #domination

    #Ibrahima_Thioub, université Cheickh Anta Diop, Sénégal :

    « Pour mettre en esclavage un individu, un des phénomènes importants c’est de le construire comme autre, de construire une #altérité. Les sociétés humaines ont des registres assez larges. On peut utiliser la différence de #couleur_de_peau, la différence de #religion. Dans la #traite_trans-saharienne, on va combiner les deux ».

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Ibrahima_Thioub

    Ibrahima Thioub :

    « L’intérêt des maîtres, c’est de faire croire à l’individu qu’il est esclave non pas parce qu’un jour on lui a opposé un rapport de force qui est réversible, mais parce que, par sa nature, il est destiné à être un esclave. C’est une #idéologie extrêmement forte. Si votre sang est considéré comme un sang servile, et que cette nature vous la transmettez à votre descendance, il devient impossible de sortir du phénomène esclavagiste »

    Selon ce qui est dit dans ce reportage, 3,5 millions d’Africains ont circulé sur les routes de l’esclavage entre le 7ème et le 14ème siècle.

  • Sur Twitter cette vidéo est diffusée par Just See Real (aka Cyril) qui rappelle la prise de parole de Luc Saint-Eloy et Calixthe Beyala lors des 25 ans des Césars en 2000 :

    https://twitter.com/JustSeeReal/status/836325535701741568

    César 2017 : Alice Diop, Maïmouna Doucouré, Déborah Lukumuena récompensées
    https://www.youtube.com/watch?v=0EdSfCj0jrY

    La 42ème nuit des #César a consacré des #Noirs, des #femmes_noires, pour leur travail et pour leur talent. C’est suffisamment rare pour être souligné. C’est même historique ! Toute arrivée a son départ...

    À la suite de cette prise de parole, #Luc_Saint-Eloy avait été interviewé. Je recopie ici l’interview pour archive :

    http://calixthe.beyala.free.fr/html/entretien%20avec%20Luc%20Saint-Eloy.htm

    [des quotas dans le cinéma ?]

    Entretien avec Luc Saint-Eloy

    directeur artistique de la compagnie du « Théâtre de l’Air Nouveau », metteur en scène, acteur et membre actif du Collectif Egalité.

    « Nous sommes obligés de parler d’oppression, de liberté à retrouver. J’ai personnellement toutes les preuves que ce système nous empêche de fonctionner. »

    Flu : De qui était le texte lu lors de la cérémonie des Césars ?

    Luc Saint-Eloy : De Calixte Beyala et moi-même. Le texte a été écrit très spontanément, le jeudi soir où nous avons appris que nous avions deux invitations pour la cérémonie. Il devait être aux alentours de minuit, nous venions de faire deux courriers avec #Calixte_Beyala et nous étions assez fatigués. Le texte a donc été écrit très rapidement, à deux, pratiquement d’un seul jet. On l’ a revu le samedi après midi avec #Jacques_Martial. On n’a alors corrigé que deux, trois petites choses parce qu’on a pensé que ce texte, qui venait du cœur était déjà assez juste.

    F : Qu’est ce que cela représentait pour vous, de prendre la parole devant ce parterre de personnalités ? C’était un défi ?

    L.S-E : C’était un pari difficile. Nous avions deux invitations qui nous permettaient d’être à l’intérieur du théâtre des Champs Elysées, mais les places étant numérotées et réservées, nous étions installés au deuxième balcon, donc très loin de l’espace scénique. Nous avons plusieurs fois essayé de descendre et d’accéder au rez-de-chaussée. Ce dernier étant réservé aux nominés, aux institutionnels, nous avons été arrêtés à chaque fois. Nous avons alors décidé, vers vingt et une heure quinze de passer par un escalier qui nous faisait arriver vers la porte la plus proche du rez-de-chaussée, où une équipe importante de membres de la sécurité regardaient la cérémonie sur un petit écran. On a attendu patiemment derrière eux, et quand ils s’y attendaient le moins, on est passé en disant que c’était à notre tour de parler. On a ouvert brutalement et rapidement les portes et on est montés directement sur la scène. Evidemment, on ne se sentait pas à l’aise, même si on était sûrs de l’importance de notre démarche. On a eu peur d’être happés juste avant d’arriver sur scène ou d’être coupés au milieu de notre discours et expulsés de l’espace scénique. Donc nous avions quand même une grosse angoisse, qu’il fallait maîtriser, ne pas montrer. C’était donc un pari à gagner, avec souplesse, avec élégance et je crois que nous nous en sommes bien sortis.

    F : Qu’avez vous pensé du parti pris du réalisateur qui a immédiatement filmé les quelques noirs qui étaient dans la salle ?

    L.S-E : Je trouve que le réalisateur a fait preuve d’un grand professionnalisme. Avant de pouvoir prendre la parole, j’ai eu le temps de dire à Alain Chabat, qui présentait la cérémonie, de se rassurer puisque nous ne voulions adresser qu’un message d’espoir. #Alain_Chabat nous a demandé d’attendre que la personne qui était alors sur le plateau finisse son discours avant d’entrer en scène. Je crois que le réalisateur, dans ce court temps d’attente, a reconnu Calixte Beyala et s’est rendu compte que nous allions prendre la parole au nom du #Collectif_Egalité. Il a donc cherché dans la salle où étaient les noirs. Il a fait fort, puisque sur les deux mille personnes qui étaient là, il a réussi à trouver les cinq, six noirs qui étaient présents. Je ne sais pas s’il a voulu cautionner ou non notre discours mais en tout cas on a vu des noirs à l’écran. On a pu voir #Melvin_Van_Peebles, qui est un des plus grands réalisateurs noirs américains, et qui, soit dit en passant, était lui aussi au balcon et non avec le gratin du bas. Personnellement, ce qui m’a le plus touché et scandalisé, à part le fait qu’il n’y ait, une fois de plus, ni acteur ni réalisateur noir nominé, c’est qu’à aucun moment il n’ait été prévu au cours de cette cérémonie de rendre un hommage à #Darling_Légitimus. Son nom n’a même pas été cité lors de la séquence nécrologique qui a eu lieu quelques minutes après notre intervention. Darling avait donné un grand prix d’interprétation à la #France à la Mostra de Venise et pourtant aucun représentant du ministère de la culture n’était présent à son enterrement. J’avais été aussi scandalisé lors de la mort de #Serge_Sommier, qui avait notamment travaillé des années avec #Michel_Drucker, et dont la disparition avait été passée sous silence à la télévision. Donc nous avons donné un prix en notre nom à Darling et je pense définitivement que notre intervention était justifiée et nécessaire.

    F : Comment expliquez vous que le #cinéma_antillais, à la veille de ce XXIème siècle, soit presque inexistant ?

    L.S-E : C’est difficile de répondre en deux minutes à cette question qui est un vrai problème et nécessite un vrai débat. Il existe un cinéma naissant antillo-guyanais. Il existe des scénarios, des projets mais qui ne sont pas suffisamment défendus. Cependant, même lorsqu’ils sont menés à leur terme, ils n’ont pas l’accueil qu’ils mériteraient. J’ai par exemple été l’interprète du dernier film de #Christian_Lara, Sucre Amer, dans lequel je joue le rôle de #Louis_Delgrès. Ce film a été tourné il y a plus de trois ans et n’a toujours pas été distribué. Je sais que Lara a mené un véritable chemin de croix pour réussir à financer son film. Aucune #télévision n’a voulu l’aider, même #Canal+, alors que je pense que le film est original et que le scénario est intelligent et aucunement agressif. Il n’a trouvé des financements qu’auprès du Canada et du Conseil Régional de la #Guadeloupe. J’ai l’impression qu’il existe une véritable volonté de la part des financiers et décideurs français de ne pas nous prendre en considération. Je crois qu’ils ont hérité d’un fonctionnement colonial par rapport aux noirs des #Antilles_françaises et ils continuent à ne pas nous voir comme des êtres normaux. Ils peuvent arriver à considérer talentueux un artiste noir américain, qu’il soit réalisateur, acteur ou technicien et parallèlement, ils sont incapables de reconnaître le talent d’un noir francophone. Je ne sais si c’est à cause de la #traite_négrière ou du #système_colonial, mais ils restent sous la coupe d’un système hérité et ils semblent continuer à croire que nous sommes inexistants ou que nous ne pouvons exister qu’à travers eux. Il existe donc un vrai problème au niveau des mentalités et je crois que, si on ne les fouette pas, si on ne leur montre pas le vrai visage de la France que nous sommes les seuls à connaître, et qui n’a rien à voir avec le discours républicain qu’ils défendent, ils ne nous considèreront jamais comme des gens normaux. Ils vont continuer de plus en plus à nous laisser sur la touche et à ne pas croire qu’il existe des comédiens ou des #réalisateurs_noirs en France. Nous ne savons pas comment faire changer les choses, mais pour l’instant nous avons décidé de nous battre en accusant publiquement, ouvertement la France d’être #raciste.

    F : Est ce qu’il n’y a pas aussi un travail à faire du côté du public noir francophone ? On sait par exemple que #Siméon_d'Euzhan_Palcy n’a pas touché le public antillais visé et qu’il est très dur de mobiliser le public, antillais notamment...

    L.S-E : Il est évident qu’il y a aussi un énorme travail à faire de ce côté là. Mais il ne faut pas oublier que si vous voulez que le public soit au rendez vous, il faut accompagner un spectacle ou un film d’une vraie campagne promotionnelle. Le simple fait que nous n’ayons pas accès aux grands médias diminue largement notre pouvoir de communication. Pour pouvoir parler de marché, il faut avant tout fidéliser un public. Personnellement cela fait dix sept ans que je me sacrifie dans l’univers théâtral, que je me bats pour convaincre les miens qu’il existe un #théâtre qui n’est pas vu et défendu car il n’y a aucune politique pour le défendre. Mais à force d’être au combat, le public sait maintenant qu’il existe des rendez vous théâtraux, même s’ils ne sont pas réguliers. Tant qu’on n’aura pas un espace pour créer et diffuser des spectacles vivants, on ne pourra pas fidéliser le public comme la télévision a réussi à le faire en diffusant des images 24 heures sur 24.

    D’un autre côté, notre cinéma ne peut pas avoir absolument du succès à tous les coups et convaincre tous les publics. On sait que la rencontre avec le public est un évènement que l’on ne peut pas prévoir et dont personne ne connaît la recette. Siméon a été un relatif échec et des conclusions sont immédiatement tirées sur l’absence de marché pour le cinéma antillais. Nous savons que c’est faux, puisque Rue Cases Nègres a fonctionné et pas uniquement grâce au public antillo-guyanais, mais grâce à une véritable campagne promotionnelle. C’est vrai qu’en plus, le public a été séduit par les personnages, sachant que c’était la première fois que l’on montrait de si beaux personnages de noirs et par le sujet du film et sa réalisation. Mais même les plus grands réalisateurs ont des échecs... Je pense que ce qu’il faut surtout souligner c’est que les publics antillo- guyanais et africain n’ont pas encore ce réflexe d’aller voir des films qui pourraient les toucher parce qu’ils ne se posent pas de questions par rapport à leur représentation à l’image. La traite négrière n’est abolie que depuis à peine cent cinquante ans et elle a été remplacée par le système colonial qui nous a enfermés dans encore autre chose. Donc nous sommes encore sous domination. Un public qui est sous domination ne peut pas avoir de vrais réflexes de survie. C’est pourquoi nous tentons de débroussailler tout cela, de faire le ménage pour que nos enfants n’aient plus à évoluer dans le même contexte que nous. Si je me bats ce n’est pas pour moi, c’est avant tout pour que nos enfants bénéficient d’un regard complètement défolklorisé.

    Ce problème de promotion est aussi lié au problème d’information. On peut se demander pourquoi notre intervention aux Césars n’a pas été traitée le soir même sur les chaînes publiques. La marche que nous avions faite en juin 98, et qui avait mobilisé plus de 80 000 personnes, avait été de la même manière passée sous silence. Je ne pense pas que tout cela soit normal....

    F : Comment comptez vous mener votre combat ?

    L.S-E : Il faut changer le regard qui est posé sur nous : dire haut et fort que nous voulons définitivement vivre hors domination, dire haut et fort que nous ne voulons plus nous fâcher avec nous mêmes, comme on nous l’a appris. Lors de notre intervention au cours des Césars, nous avons parlé au nom des peuples noirs, au nom de toutes les communautés visibles, au nom de l’ #Afrique et des #Antilles et c’était une première. Dorénavant nous savons que nous vivons sur le sol français, que l’histoire nous a rendus français, que nos enfants grandissent ici et nous sommes fiers de ce que nous sommes ! Nous sommes fiers de notre passé et c’est pour cela que nous voulons le faire ressurgir pour bâtir le socle qui nous manque. Nous ne voulons pas du socle qu’on a établi pour nous, mais au contraire bâtir nos propres repères. Le combat à mener est dans leurs têtes et dans nos têtes. C’est un véritable #rapport_de_force entre #colonisateurs et #colonisés. Nous sommes obligés de parler d’oppression, de liberté à retrouver. J’ai personnellement toutes les preuves que ce système nous empêche de fonctionner. Je sais les bâtons qu’on a voulu me mettre dans les roues quand j’ai voulu monter une grande fresque historique en juin 98.

    F : Donc votre combat pour la reconnaissance de l’esclavage comme crime contre l’humanité et votre combat artistique sont intimement liés..

    L.S-E : Pour l’instant, en France, le domaine sportif est le seul domaine dans lequel ils acceptent que nous existions. Il me semble qu’il faut faire attention car cela me rappelle une période où ils n’avaient besoin que de nos muscles. Je n’ai pas envie que mes enfants ne rêvent à ne devenir que des sportifs, même si je n’ai rien contre les sportifs. Mon combat en tant qu’artisan de la #culture est de trouver une nouvelle manière de nous rebâtir. En tant que créateur, je ne peux m’éloigner de ce qui m’opprime. Il me faut d’abord me libérer. Donc c’est effectivement totalement lié. Il faut se fabriquer de nouvelles ailes pour pouvoir être un oiseau neuf.

    F : Pourriez-vous nous parler de votre compagnie du « Théâtre de l’Air Nouveau » ?

    L.S-E : Je suis directeur artistique de cette compagnie qui a maintenant dix-sept ans. Nous avons à notre actif plus de quinze créations. J’ai toujours dénoncé l’exclusion dont nous sommes victimes, l’exclusion dont le théâtre antillo-guyanais est victime dans le paysage culturel français. Je dénonce leur manière de parler à notre place à chaque fois qu’il s’agit de mettre en scène les rares actes théâtraux qui parlent de notre histoire. J’ai toujours adressé pour chaque création des demandes de subvention au Ministère de la Culture, à la Drac Ile-de-France et à chaque fois ces demandes ont été refusées. Pourtant j’essaie d’expliquer que notre théâtre souffre de ne pas être soutenu. Je ne pleure pas, je ne me plains pas, simplement pendant ce temps je paye des impôts en tant que citoyen français et le Ministère de la Culture m’ignore... Nous sommes à la merci de commissions dans lesquelles pas un de nos auteurs ne figurent. Je pense que les personnes qui sont dans ces commissions ne savent pas nécessairement me lire. Leur approche du théâtre n’est pas la mienne. Je veux définir ma manière de jouer et je ne veux plus que mon théâtre repose sur leurs critères. Mon théâtre est né dans les plantations, dans un système d’oppression. Il descend de l’art du conteur qui a toujours été une forme de résistance à l’oppression et donc de marronage. Le système culturel actuel me marginalise, puisque mes dossiers sont refusés et que je ne peux pas jouer dans les théâtres traditionnels. Donc je commence à me considérer comme un « marron ». N’oublions pas que les marrons ne sont pas partis des îles, mais se sont enfuis dans les mornes où ils se sont organisés comme de véritables sociétés, redescendant parfois pour brûler les plantations. Je suis en train de m’organiser comme un marron, de trouver des idées nouvelles. C’est mon devoir de rappeler les symboles. Ce que j’ai fait lors des Césars est un acte de marronage. Nous sommes entrés dans le temple. Encore une fois, je me tourne vers les enfants qui nous regardent, et je ne veux même pas savoir ce que mon père, qui est toujours proche du rôle de la victime, pense. Je ne veux plus voir ma communauté passive, mais actrice de son devenir.

    F : J’aimerais avoir votre opinion sur la question des quotas.

    L.S-E : Nous sommes dans un pays extrêmement vieux. Les choses ne bougent dans ce pays que lorsque des lois sont votées et appliquées. Nous savons dorénavant qu’il ne faut plus espérer et attendre les bonnes volontés des uns et des autres. Alors je dis oui aux quotas. En disant que nous voulons des quotas, nous créons le débat. Des gens sont pour, d’autres sont contre. J’attends que ceux qui sont contre nous fassent d’autres propositions et nous démontrent que notre démarche est injuste. Mais je pense que les #quotas, pendant une période donnée, permettront à ceux qui ont du talent de le montrer. Ils auront ainsi une chance d’être jugés comme les autres. Pour le moment nous sommes loin d’avoir la possibilité de pouvoir exprimer nos talents. Donc pour pouvoir créer des chances égales, nous voulons des lois. Nous ne pouvons plus faire confiance à un système qui nous a opprimés, un système qui ne veut pas évoluer. Nous ne voulons pas une petite politique volontariste qui ne durera qu’un temps limité. Nous voulons aller jusqu’au bout. Nous voulons des quotas et point final. Nous tirerons des leçons de cette politique après un certain temps mais on aura eu le temps de laisser jaillir nos talents. Nous sommes nombreux à avoir du talent. La France serait-elle le seul pays d’Europe où il y aurait des minorités visibles sans talent ?

    F : L’émergence de la littérature antillaise aurait pu faire croire que les autres arts allaient être reconnus.

    L.S-E : Tout cela est très vicieux. Si la #littérature émerge, c’est parce que de temps en temps on remet des prix aux écrivains antillais. J’ai l’impression que de temps en temps, on nous autorise à être dans tel ou tel secteur. Je ne trouve pas cela normal. Nous devons être dans tous les secteurs et nous n’avons pas besoin de prix, de César ou de #Molière. Il faut simplement que nous puissions nous représenter et ainsi donner des signes de reconnaissance à nos enfants. Le système français est hypocrite. Il n’existe pas de loi contre les noirs, mais cela ne signifie pas que tout aille bien en France. Il ne faut pas attendre que cela éclate en violence dans les rues. J’ai peur de la #violence. Je n’ai pas envie que nos enfants aillent se battre dans les rues. Je veux trouver des solutions avant d’arriver à ces solutions extrêmes. C’est pour cela que nous faisons des propositions afin de construire ensemble une société meilleure. Nous montrons que nous sommes en train de voler au secours des valeurs républicaines. Et je pense que nous devrions en être remerciés. Où sont en effet les chances d’égalité, de fraternité, de justice concernant les populations des communautés visibles ? Nous avons été suffisamment humiliés, bafoués. Je connais des enfants qui veulent se suicider parce qu’ils ont la peau noire. Des directeurs d’écoles briment des enfants surdoués parce qu’ils sont noirs. Des étudiants noirs en DEA vivent l’enfer avec leur directeur de mémoire. Tout cela n’est pas normal et ne doit pas continuer. Nous voulons la parole pour dire tout cela. Nos ancêtres ont gagné leur liberté, en brisant leurs chaînes. Leur liberté s’est arrachée, avec leur sueur, avec leur sang. Le respect s’arrache aussi et nous l’arracherons exactement comme nos ancêtres l’ont fait. Nous arracherons l’honneur et le respect. Point final.

    Propos recueillis par Florence Combaluzier-Kromwel

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    #Alice_Diop, #Maïmouna_Doucouré, #Déborah_Lukumuena #Racisme

  • Abolition of Slavery and the Slave Trade

    Is the abolition of foreignness possible? Was the abolition of the slave trade and legal slavery in most parts of the world or the emancipation of women possible? Was it possible to overcome the ingrained racism of the early twentieth century? This web page explores the abolition of the Atlantic slave trade and slavery as a case study in overcoming ingrained practices which had lasted for hundreds of years, underpinned by industries practising and depending on the slavery. The emancipation of women and the eradication of racism present similar case studies. Below we explore modern manifestations of slavery.


    http://beyondforeignness.org/abolition-of-slavery-and-the-slave-trade
    #esclavage #traite #histoire #traite_d'esclaves #traite_négrière