• « Les sciences sociales ne jouent plus leur rôle de contre-pouvoir »
    http://www.lemonde.fr/festival/article/2015/09/03/les-sciences-sociales-ne-jouent-plus-leur-role-de-contre-pouvoir_4745227_441

    Si Facebook était un pays, il serait, avec 1,4 milliard de membres, plus peuplé que la Chine. L’entreprise annonce ne plus vouloir seulement «  connecter  » la planète, mais aussi «  comprendre le monde  ». Un chercheur doit-il aller chez Facebook pour étudier la société  ?

    Pour analyser les données qu’elles collectent, les plates-formes de type Google, Facebook ou LinkedIn embauchent massivement des personnes aux formations diverses (communication, économie, sciences politiques et même anthropologie). On assiste à une véritable absorption de cerveaux, de nombreux jeunes rêvant d’aller dans ces entreprises. Cependant, ce n’est ni la société ni l’opinion qu’ils analysent, mais les traces numériques que laissent des comptes tenus par des individus  : tweets, «   likes   », commentaires… Ils cherchent ensuite des corrélations. Nul besoin d’hypothèses théoriques pour faire tourner les machines. Puis ces entreprises vendent ces analyses, ou leur valorisation, en suggérant à leurs clients de placer une publicité à un endroit plutôt qu’à un autre.

    le reste derrière #paywall et pas de lecture zen :-(

    • Le paywall a été supprimé.

      Il arrive aux #sociologues ce qui déjà est arrivé aux linguistes et aux géographes. Ces dernières décennies, les informaticiens ont pris la main sur le #traitement_automatique de la langue, puis sur la géomatique [l’ensemble des outils et méthodes permettant d’analyser des données géographiques]. Désormais, ce sont les statisticiens, les informaticiens et les mathématiciens qui traitent et interrogent les données sur la #société récoltées sur Internet.

      Comment expliquer ce décrochage   ?

      Le #big_data, qui consiste à récolter, stocker et traiter ces données de façon massive, propose de nouvelles méthodes de travail fondées sur le volume, la variété et la vélocité. Le défi pour les sciences sociales est de traiter cette vitesse, qui était inaccessible jusqu’ici. Cela change la perspective temporelle des sciences sociales. (...)

      Peu de chercheurs en sciences sociales semblent se rendre compte que d’autres acteurs, déjà, donnent par ces corrélations leur analyse sur l’état de la société. Ils restent centrés sur les demandes de l’Etat, sur ce qui est défini comme #social dans ce cadre. Je regrette leur tendance à centrer leurs études uniquement sur le long terme. Alors qu’il faudrait donner leur place à l’étude des «  vibrations  », ces phénomènes de #propagation_sociale, et aux technologies qui les favorisent.
      Je plaide pour des sciences sociales de troisième génération, qui s’emparent de ces nouveaux phénomènes pour les requalifier  : il faut inventer des concepts, des outils et limites de validité sur ces nouvelles données, ces traces auxquelles nous n’avions pas accès. Ce que nous vivons a déjà été pensé par Gabriel Tarde en 1890. Dans Les Lois de l’imitation, ce juriste, sociologue et philosophe théorise la propagation des pensées par une multitude de petites transmissions. Il avait d’ailleurs proposé d’inventer le «  gloriomètre  », l’équivalent de la mesure du buzz. Mais à l’époque il n’avait pas les outils pour mesurer ce phénomène. Désormais, nous les avons.

      A quel projet pensez-vous, concrètement  ?
      Je milite pour la création d’une nouvelle discipline, les social data sciences, avec un diplôme à Sciences Po

      #temporalité