• Quand la crise sanitaire interroge le travail invisible. Le cas des employé·e·s domestiques

    Les mesures strictes de confinement ont fait couler beaucoup d’encre chez les journalistes et les chercheur·e·s, dans la presse, notamment à propos de l’utilité sociale des métiers et de leurs hiérarchies symbolique et économique. Si les soignant·e·s de la fonction publique hospitalière sont au premier plan, ce sont aussi d’autres métiers habituellement invisibles qui sont mis en lumière : les caissières, les éboueurs, ou encore les travailleur·e·s du bâtiment et les aides à domicile. C’est à propos de ces dernières, et plus largement des travailleur·e·s qui prennent soin des autres et font le travail domestique chez les autres, qu’il s’agit ici d’apporter quelques pistes de réflexion pour la recherche sociologique. La crise actuelle exacerbe en effet les problématiques du travail domestique à domicile rémunéré, et est une occasion de (ré)affirmer ce vers quoi les nouvelles recherches sur ce travail peuvent s’orienter.
    Depuis les années 1980 aux États-Unis, et la fin des années 1990 en France, le paradigme sociologique du #care marque une partie des travaux qui portent sur les métiers du soin à autrui et plus spécifiquement sur les emplois à domicile. Les chercheur·e·s qui s’inscrivent dans ce paradigme ­ des sociologues, philosophes et psychologues principalement ­ prônent une « société du care » et une « éthique du care » qui dépassent les enjeux scientifiques théoriques pour des applications politiques concrètes qui viseraient, entre autres, à redéfinir les valeurs du travail et les relations professionnelles…

    https://www.cairn.info/revue-societes-contemporaines-2019-4-page-213.htm

    #confinement #travail_domestique #travail_invisible #travail #covid-19 #coronavirus

  • Il y a vraiment quelque chose que je ne comprends pas. On n’arrête pas de nous expliquer que les masques artisanaux, ainsi que ceux en papier, ne servent pas se protéger soi-même, mais à éviter de contaminer les autres :
    https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/coronavirus-l-article-a-lire-si-vous-comptez-vous-munir-d-un-masque-gra

    Comme l’a rappelé Sibeth Ndiaye sur franceinfo, lundi 20 avril, il n’y a "pas de consensus scientifique à ce stade sur l’utilité de l’utilisation du masque pour tous les Français". Plus précisément, les spécialistes s’accordent à dire qu’une protection en tissu n’est pas suffisante pour empêcher une personne d’être contaminée par le Covid-19. Mais elle permet de freiner la propagation de l’épidémie, en limitant les projections de gouttelettes dans lesquelles se trouvent le coronavirus.

    Mais dans ce cas, pourquoi ce luxe de précautions (ne les tenir que par les élastiques…), pourquoi le lavage compliqué… ? Puisque de toute façon le masque de nous protège pas nous-même ?

    • Ce qui m’embête c’est que ce n’est pas que Sibeth. Un peu partout ça explique à la fois que les masques sont destinés à éviter de contaminer les autres, mais que ça ne protège pas le porteur, et en même temps qu’il faut faire super-attention à comment on le manipule (genre sinon on risque d’être contaminé ? alors qu’on n’est de toute façon pas protégé par le masque ?).

    • Ah non en fait, ceux-là disent qu’« en théorie », le masque est efficace également pour le porteur :
      https://www.liberation.fr/checknews/2020/04/23/ce-schema-viral-sur-l-efficacite-des-masques-est-il-juste_1785952

      Bertrand Dautzenberg et Rémi Reuss s’accordent à dire que les protections établies selon le cahier des charges de l’Afnor fonctionnent « de la même manière dans les deux sens ». En théorie, donc, ce type de masques, bien porté, pourrait également filtrer à 70% les particules reçues dont la taille est supérieure ou égale à trois microns. En appliquant cette donnée au cas numéro 1 (où une personne porteuse d’un masque fait face à une personne contaminée), cela réduit le risque, sans permettre là non plus de donner de valeur précise. « Pour les particules plus fines, plus légères, qui demeurent après un éternuement par exemple, le masque ne sera d’aucune aide » prévient Rémi Reuss. De même, des particules émises par la personne malade pourront se déposer sur le masque, et le risque de contagion dépendra largement du fait que la personne qui le porte le touche avec ses mains, et se frotte les yeux, par exemple.

    • C’est pas « théorique », de nombreux éléments le démontre, même si ce n’est pas la panacée sans être articulé à l’emploi d’autres moyens (test, recherche, soin plus médicaux). Toutes ces bêtises visent à prolonger la dépossession des concernés, à conforter leur monde.
      C’est dans le même mouvement qu’on dit que ça ne sert à rien et que c’est très compliqué. Deux mensonges grossiers pour disqualifier ce que Lucien Bonnaffé nommait (en matière de pathologies mentales) le « potentiel soignant du peuple ». Tout ne vilipendant l’"assistance", on nous demande de nous en remettre à l’État, « la science », l’hôpital, quitte à agrémenter ça d’un « lavez vous mes mains » et d’un contrôle d’un confinement parfaitement incohérent en termes sanitaires, dans les modalités totalement contradictoires dans lesquels il est établi, des modalités insensées (et je ne parle pas que du maintien d’activités productives inutiles et nuisibles). La seule égalité qui leur importe c’est que l’on soit aussi incohérent qu’un État qui désorganise le soin et la prévention. Ainsi, on s’est focalisé sur un indicateur ultra technique (la réa et la saturation de ses capacités, alors que seuls 30% des personnes placées en « ventilation intensive » survivent...) sans jamais se fonder sur la mise en oeuvre de pratiques sociales partageables. Et en s’attaquant à celles qui se mettent en place (amendes contre des protagonistes d’action de solidarité, interdiction policière de distributions de vivres). Les gestionnaires du capital haïssent la démocratie réelle dans ce qu’elle a de productif. Il faut défendre l’anti-production capitaliste, par tous les moyens nécessaires.

      Dans bon nombre de collectifs, il ya eu des recherches sur les données scientifiques et techniques concernant les masques, jetables et lavables. Si je potasse la doc qui a été éclusée, « consensus scientifique » ou pas (les défenseurs de la pénuries, les défenseurs des professionnels de la profession, les scientistes les plus craignoss, etc), dont une partie est d’ailleurs ici même, j’essaierais de faire un point sur la filtration des particules selon les matériaux.
      Il n’y aucune protection absolue (même avec blouses, gants FFP2, etc), d’autant que la théorie souffre des errements inévitables de la pratiques des mieux informés et formés.
      Mais il y a un moment ou un minimum de logique suffit : si on enlève mal un masque en le touchant, un lavage de main immédiat, systématique et un tant soit peu technique, suffit à éviter que ce manquement ait des conséquences.
      Ce qui leur importe c’est de sauver ce qu’ils peuvent de leur légitimité, ils ont beau détruire l’hôpital depuis 50 ans, l’hospitalisme-centrisme reste leur geste barrière contre l’appropriation collective d’une prévention (dont ils se foutent bien que ça épargnerait un pan du pognon de dingue des soins) et de la santé, qu’il faut comme le reste déléguer à d’autres.

      #nuage_de_Tchernobyl

    • Masques

      Point de vue généraux, épidémiologistes et autres professionnels contribuant au soin
      https://seenthis.net/messages/840915
      https://seenthis.net/messages/837114
      https://seenthis.net/messages/837114

      Masques en tissu : données technico-pratiques (à compléter car nous avons utilisé d’autres sources que je n’ai pas retrouvé ou signalé ici, et que des patrons bien plus ergonomiques et sûrs sont désormais au point, après plusieurs prototypes, série, lectures, confrontations)
      https://seenthis.net/messages/832910

      Argument basique, soit les soignants sont stupides de réclamer des protections, soit c’est appuyé sur une longue histoire (asepsie, hygiène, prévention bactériologique). Si on dit que les quidams en ont pas besoin c’est non seulement en raison de conditions pratiques (je suis pas secrétaire, technicienne de surface ou réanimateur dans un service covid ) mais parce qu’on veut faire du soin une activité à part réservée (les autres sont des aidantes, au mieux). Il suffit de voir à quel point même ce qui est médical (cliniques privés) ou paramédical hors hôpital a pas été mobilisé (on voit que les test sérologiques vont aux machines dédiées Abbot et pas aux labos vétos qui pourraient le faire sans ce monopole).

      Il en découle que qui est est susceptible d’être en contact avec des bipèdes contaminés dont la majorité ne présente pas de symptômes, quiconque est contraint de fréquenter des lieux confinés (cage d’escalier, ascenseur, commerce, transport, bureau, etc) ou gouttelettes et aérosols peuvent contenir le corona virus peut trouver bénéfice à une protection du même type, même si entre un FFP2 bien utilisé (notons que ça se fait à plusieurs dans le meilleur des cas, voir des photos de préparation d’entrée en "zone covid") qui protégerait à 98 ou 99% et un masque en tissu qui selon les versions (avec ou sans filtre) protège de 70 à 90% et plus. Mais dans la vie extra hospitalière, ces mesures sont théoriques (réalisées expérimentalement par des tests) : si on a pas d’accident, que la distance physique est maintenue sauf moments très brefs (croiser de trop près quelqu’un au supermarché, etc), on peut penser que de très nombreuses contaminations sont évitées.

      De plus, au lieu de nous gendarmer jusqu’à la lie, de telles pratiques, parce qu’elles impliquent des échanges, de la relation, permettent une #appropriation_collective des données sanitaires, de la connaissance de l’épidémie et du virus, des gestes barrières, non pas par une pédagogie descendante (dont on voit actuellement comment elle est littéralement insoutenable, la confusion et les contradictions des messages officiels, conduisent à faire n’importe quoi, car rien ne vaut) mais par un apprentissage en commun, par l’expérience partagée, dite, remise en cause, contradictoire.

      Ils veulent du "travail bénévole" (comme ils disent) quitte à l’imposer, mais se refusent à reconnaître l’apport du #travail_invisible (sauf quand il parviennent à le transformer en support de profit).

      Depuis la mobilisation contre la loi travail, il y a eu tout un taff de fait sur les masques (lacrymos) dans divers réseaux et collectifs, il y a une expérience,des fabrications (de masques avec valves, qui convienne pas pour le corona, mais sont plus respirants, ce qui permet de bouger davantage). C’est remis en chantier depuis début mars avec l’arrivée de l’épidémie. (j’ai d’ailleurs tendance à penser que c’est aussi la difficulté à gouverner une population masquée qui inquiète après des années de mobilisations peu enclines à pactiser avec l’ordre social).
      La production, l’intelligence, l’inventivité sont sociales, collectives, ça se vérifie fort bien parmi des minorités. L’étatisme d’aujourd’hui ne sait plus composer avec ces dimensions collectives, il ne sait qu’individualiser. Même la Chine avec ses atroces "comité de quartiers" remis en route face au Covid 19 permet de vérifier qu’il n’y aura pas de politique sanitaire sans une implication populaire active (même partielle, et au pire, instrumentale et odieuse). On en a pour un an ? deux ans ? Et il faudrait attendre "la solution médicale" tout en faisant le plus possible comme avant. No way. Demain commence aujourd’hui.

      Quant à eux, tous autant qu’ils sont du côté de la gouvernementalité (média inclus donc), il leur arrive de parler vrai ( « J’assume de mentir » de Sibeth Ndiaye quand ils ne brouillent pas les pistes (« Mon ennemi, c’est la finance », Hollande). Il sont très occupé à ruiner ce que l’on sait ou peut savoir pour mieux commander. N’oublions pas d’en tenir compte.

      #masques #care #valeur_d'usage

    • Le masque chirurgical protège efficacement les soignants contre COVID-19
      https://www.infectiologie.com/UserFiles/File/spilf/recos/choix-des-masques-14-avril-2020.pdf

      Les masques chirurgicaux recommandés dans les précautions complémentaires Gouttelettes ont deux objectifs
      1.Protéger ceux qui les portent contre le risque de contact entre des gouttelettes > 5 μm contenant des microorganismes et les muqueuses du nez et de la bouche
      2. Porté par un patient atteint d’une infection respiratoire, prévenir la contamination de l’entourage en retenant les gouttelettes émises lors de la toux, des éternuements et de la parole.

      [...]

      Il est maintenant admis que la transmission de SARS-CoV-1 est très majoritairement assurée par des grosses gouttelettes. Des travaux chinois ont montré qu’un placement des lits des patients à plus d’1,50 m dans une salle commune était un facteur fortement associé à l’absence de transmission du virus (5). En revanche, les manœuvres invasives respiratoires génèrent des aérosols de petites particules nécessitant le port d’un masque FFP2, afin de protéger les professionnels de soins d’une transmission (6, 7).

      Je ne suis pas sûr que la première affirmation du dernier paragraphe est partagée par tout le monde.

    • Le Pharmachien canadien a bien expliqué pourquoi il ne fallait pas considérer que ça protégeait le porteur :
      http://lepharmachien.com/masques

      Ça protège peut-être un peu… mais pas trop… et donc il ne faut pas considérer être protégé quand on porte un masque artisanal, sinon ça va laisser penser qu’on peut se rapprocher les uns des autres, yolo on danse sur le dancefloor alors que non. Le seul truc dont on est sûr c’est que ça capte une grosse partie de TES gouttelettes quand tu parles et tousses qui n’iront pas sur les autres ou même juste dans l’air (qui ensuite seraient attraper par les passants).

      Le lavage bah c’est parce que tu le salies toi-même en parlant et toussant dedans, et après tu le manipules avec tes mains, et donc tu fous du virus sur tes mains et ensuite sur le mobilier où tu vas etc. Donc si tu fais attention à pas le manipuler n’importe comment et que tu le laves à température désinfectante régulièrement, tu diminues drastiquement le fait d’en mettre partout ailleurs, aucun rapport avec ta protection à toi : c’est toujours pour les autres.

    • Widely Used Surgical Masks Are Putting Health Care Workers at Serious Risk - Scientific American
      https://khn.org/news/widely-used-surgical-masks-are-putting-health-care-workers-at-serious-risk

      The allowance for surgical masks made more sense when scientists initially thought the virus was spread by large droplets. But a growing body of research shows it’s spread by minuscule viral particles that can linger in the air as long as 16 hours.

      A properly fitted N95 will block 95% of tiny air particles—down to three-tenths of a micron in diameter, which is the hardest to catch—from reaching the wearer’s face. But surgical masks, designed to protect patients from a surgeon’s respiratory droplets, aren’t effective at blocking particles smaller than 100 microns, according to mask maker 3M Corp.

  • Invisible pénibilité du travail féminin

    Pour faire passer le recul de l’âge de la retraite, le précédent gouvernement français avait promis la création d’un compte personnel de pénibilité, ouvrant le droit à un départ plus précoce. Non seulement les critères ont été réduits par l’actuelle équipe, mais la plupart avaient été définis en fonction du travail masculin. Les facteurs de risques encourus par les femmes demeurent occultés, comme les gestes répétitifs ou les tâches liées au nettoyage et aux services à la personne. (...)

    Construite dans des branches comme le bâtiment, la chimie ou la métallurgie, la notion de pénibilité s’est d’abord définie en fonction de critères masculins. « Les recherches ne sont quasiment jamais faites dans une perspective de genre, constatait le Conseil économique, social et environnemental (CESE) en 2010. L’impact des facteurs de risques au travail sur la santé des femmes conserve ainsi à bien des égards un caractère d’invisibilité entraînant méconnaissance ou sous-estimation et donc faible prise en compte. » (...)

    Si les accidents du travail avec arrêt baissent globalement de 15,3 % entre 2001 et 2015, ils progressent pour les femmes.

    #retraite #pénibilité #travail #travail_féminin #travail_invisible #risque #femmes #gestes #tâches #nettoyage #accidents_du_travail #genre #santé

    https://www.monde-diplomatique.fr/2017/12/ANDRZEJEWSKI/58205

  • Résister à la domination dans le nettoyage - Les Utopiques
    http://www.lesutopiques.org/resister-a-domination-nettoyage

    Le secteur du nettoyage constitue depuis son apparition au milieu du XIXe siècle, et son fort développement à partir des années 701, un secteur où les formes de résistances ouvrières n’ont suscité que peu d’intérêt de la part des chercheurs, mais aussi du mouvement syndical. Les premiers se sont le plus souvent contentés d’enfermer les nettoyeurs et les nettoyeuses dans une position d’exploités, sans chercher à interroger les mécanismes de cette exploitation et les résistances qui s’y opposaient. Le second, encore aujourd’hui, peine à sortir d’une double impasse. Tantôt, il a organisé les nettoyeurs « par le haut », ce qui explique encore de nos jours le rattachement des nettoyeurs à la CGT Ports et Docks par exemple. Tantôt, il s’est trouvé confronté à des pratiques contestables allant du détournement de fonds à la collusion plus ou moins directe avec le patronat de certaines structures. Si les expériences de syndicalisme sincère et efficace existent fort heureusement (on en trouvera une analyse dans le récent ouvrage de C. Nizolli), elles restent trop peu visibles, et souvent limitées à une partie du secteur (essentiellement sur des sites regroupant beaucoup de nettoyeurs et nettoyeuses au même endroit). C’est pourquoi, dans l’idée d’aider ces syndicalistes sincères à poursuivre leur action et à l’amplifier, je propose de nous intéresser à ce que sont concrètement les résistances au travail dans ce secteur.

    Pour cela, je m’appuierai sur une enquête menée par immersion dans le cadre de ma thèse. Pour cette enquête, qui repose par ailleurs sur des analyses quantitatives de l’enquête emploi de l’INSEE et des entretiens, je me suis fait moi-même nettoyeur, et j’ai travaillé dans trois entreprises aux côtés de celles et ceux qui assurent ces tâches quotidiennement. La première de ces entreprises, appelée ClariNet, est une entreprise d’environ 30 salarié-es, travaillant essentiellement pour le compte de DiscountPlus, une chaîne de supermarchés. La seconde, nommée Les Bambins heureux, est une crèche où une partie du travail de nettoyage (celle pour laquelle j’étais recruté) est toujours internalisée. La troisième, que je nomme Valévol, est une agence d’un très grand groupe du secteur, travaillant notamment pour un hôpital de banlieue parisienne.

    #enquête #nettoyage #freinage #travail #travail_invisible #grève