• Notes sur le jour où je suis devenue une vieille personne | Alisa del Re
    https://acta.zone/notes-sur-le-jour-ou-je-suis-devenue-une-vieille-personne

    Dans ce texte qui relève à la fois de l’expression subjective personnelle et des considérations stratégiques, Alisa del Re, figure de l’opéraïsme et du féminisme italien, s’interroge sur la construction de la vulnérabilité des personnes âgées durant l’épidémie de Covid-19 et ses conséquences. Ce faisant, elle rappelle la nécessité de replacer la question des corps et de la reproduction sociale au centre de la réflexion politique, et plaide pour une réorganisation sociale qui permette à chacun·e, sans considération pour sa classe d’âge, de bénéficier d’une santé et d’une vie décentes. Source : Il Manifesto via Acta

    • Nous sommes aujourd’hui scandalisé·e·s par ce massacre des personnes âgées, par ce manque de soins pour les corps faibles, qui a montré toutes ses limites parce qu’il n’est pas au centre de l’attention politique, parce qu’il est marginalisé et qu’il est géré suivant les logiques du profit. Face à la pandémie, on découvre, comme si cela était une nouveauté, que nous sommes tou·te·s dépendant·e·s des soins, que nous devons tou·te·s être reproduit·e·s par quelqu’un, que chacun·e d’entre nous porte la faiblesse du vivant en lui ou en elle, que seul·e·s, nous ne pouvons pas grand chose. Nous ne sommes pas des machines disponibles au travail sans conditions, les travailleur·se·s ont été les premier·e·s à faire grève pour que leur santé soit protégée avant le profit, avant même les salaires.

      Au contraire, c’est précisément cette situation exceptionnellement dramatique et sans précédent qui a mis les corps et leur reproduction au premier plan, en soulignant l’étroite relation entre la reproduction, les revenus et les services sociaux – étroite relation qui doit nous servir de programme pour la phase à venir. Même le pape a saisi cette nécessité dans son discours du dimanche de Pâques : « Vous, les travailleurs précaires, les indépendants, le secteur informel ou l’économie populaire, n’avez pas de salaire stable pour supporter ce moment… et la quarantaine est insupportable. Peut-être le moment est-il venu de penser à une forme de salaire universel de base qui reconnaisse et donne de la dignité aux tâches nobles et irremplaçables que vous accomplissez ; un salaire capable de garantir et de réaliser ce slogan humain et chrétien : « pas de travailleur sans droits » ».

      #soin #corps #santé #reproduction_sociale #travailleurs_précaires #indépendants #salaire #revenu_garanti

    • Et #pape. Je ne comprends pas du tout comment son propos sur les droits liés au travail et devant assurer la continuité du revenu dans des situations comme celles-ci (et d’autres : chômage, vieillesse) peut être entendu comme la demande d’un revenu sans contrepartie. C’est bien de droits dérivés du travail qu’il est question.

    • @antonin1, aie l’amabilité s’il te plait de pardonner cette réponse embrouillée et digressive, ses fôtes, erreurs terminologiques et conceptuelles, élisions impossibles et répétitions. Sache qu’elle n’est pas non plus suffisamment mienne à mon goût (je reviendrais peut-être sur ces notes, là, j’en ai marre.).

      Ce revenu là est sans contrepartie car le travail vient avant lui (renversement politique de la logique capitaliste du salaire, payé après la prestation de travail, contrairement au loyer, payable d’avance). C’est reconnaître le caractère social de la production, sans la passer au tamis des perspectives gestionnaires actuellement dominantes à un degré... inusité, bien qu’il s’agisse d’un conflit central. "Chamaillerie" séculaire du conflit de classe prolongé, revisité (quelle classe ? que "sujet" ?) : Qui commande ? Ce point vue selon lequel la contrepartie est par avance déjà assurée, remet en cause le commandement sur le travail (non exclusivement dans l’emploi et l’entreprise) provient pour partie de la lecture politique des luttes sur le salaire, dans l’usine taylorisée, le travail à la chaine, qui ont combattu l’intenable mesure des contributions productives à l’échelon individuel (salaire aux pièces, à la tâche) en exigeant que soit reconnu le caractère collectif de la production avec la revendication durante les années soixante et ensuite d’augmentations de salaire égales pour tous (idem en Corée du Sud, dans l’industrie taylorienne des années 80, ou depuis un moment déjà avec les luttes ouvrières du bassin industriel de la Rivière des Perles chinoise), et pas en pourcentage (ou les ouvriers luttent pour le plus grand bénéfice des « adres », qui accroît la hiérarchie des salaires), ce à quoi on est souvent retourné avec l’individualisation des salaires des années 80, sous l’égide d’une valeur morale, le mérite. Comment peut-on attribuer une "valeur" individuelle à une activité qui est entièrement tributaire de formes de coopération, y compris auto-organisée, mais essentiellement placée y compris dans ces cas "exceptionnels", sous contrainte capitaliste, directe ou indirecte ?

      La est le coup de force sans cesse répété auquel s’oppose tout processus de libération, dans et contre le travail. Avoir ou pas pour finalité LA Révolution, événement qui met fin à l’histoire et en fait naître une autre, qu’on la considère comme peu probable, retardée ou dangereuse - hubris du pouvoir révolutionnaire qui se renverse en domination, à l’exemple de la "soviétique" qui a assuré le "développement" du capitalisme en Russie, entre violence de l’accumulation primitive, bureaucratie, police et archipel pénal, ou faillite, épuisement de la politisation populaire-, ne modifie ça que relativement (et c’est beaucoup, c’est l’inconnu : reprise des perspectives communalistes, mais à quelle échelle ? apologie de la révolution dans la vie quotidienne, de la désertion, de la fragmentation, perte de capacité à imaginer comment la coopération sociale, la production, la circulation, les échanges, la recherche, etc. pourraient être coordonnées autant que de besoin), avoir ou pas La révolution à la façon du Grand soir pour perspective ne supprime pas ce qui fonde des processus de libération, ces contradictions sociales, politiques, existentielles (chez tous, spécialement les femmes et les « colorés » pour employer une désignation étasunnienne, faute de mieux, car réticent au sociologique « racisés »), l’immanence de tensions agissantes, ou seulement potentielles (la menace est toujours là, bien qu’elle ne suffise en rien à elle seule, confère par exemple l’époque ou, actualisée ou rémanente, l’ivresse mondiale du socialisme pouvait partout potentialiser la conflictualité sociale). Ne pas en rester aux « alternatives » de la politique gestionnaire, impose de s’appuyer sur des avancées pratiques seules en mesures de relancer cet enjeu de lutte... Il y aurait sans doute à le faire aujourd’hui à partir du #chômage_partiel provisoirement concédé sous les auspices de la crise sanitaire à plus de la moitié des salaires du privé et d’autres phénomènes, massifs ou plus ténus. Être dans la pandémie réintroduit une étrange forme de communauté, et à quelle échelle ! Quels agencements collectifs d’énonciation se nicheraient là depuis lesquels pourraient être brisée la chape de la domination et dépassée le fragmentaire, sans dévaster des singularités encore si rares (si on excepte les pratiques comme champ propice à l’invention de mondes, si l’on excepte les vivants non bipèdes dont nous avons à attendre une réinvention de notre capacité d’attention), ça reste à découvrir.

      Nos tenants du revenu d’existence ou de base s’appuient d’ailleurs sur ces contradictions, latentes ou visibles (le scandale de la misère, d’une rareté organisée , ce en quoi je ne peux qu’être d’accord au cube) et déclarées, pour promettre de les résorber peu ou prou. Comme on parlait du "socialisme à visage humain" après Staline, la mort du Mouvement ouvrier, et non des luttes ouvrières, fait promettre une consolation impossible, un capitalisme à visage humain, ce qu’on retrouve chez les actuels enchantés actuels l’après qui sera pas comme avant qui refusent d’envisager qu’il s’agit de force à constituer et à mettre en oeuvre, contre la violence du capital, ne serait- ce que pour modestement, mais quelle ambition !, la contenir (sans jamais tabler outre mesure sur le coût d’arrêt écologique). Pourtant, il n’y a aucun espace pour le "réformisme » sans tension révolutionnaire, sans conflit, ouvert ou larvé, qui remette en cause avec force le business as usal.

      Je digresse à profusion, mauvais pli. Le travail déjà là qui « justifie » (que de problèmes inabordés avec l’emploi de ce terme) le revenu garanti, doit se lire au delà de l’usine et de toute entreprise : l’élevage des enfants, le travail des femmes, la scolarisation et la formation, l’emploi aléatoire et discontinu, le travail invisible(ils sont plusieurs, dont une part décisive des pratique du soin), la retraite (qu’elle a déjà bien assez travaillée avant d’avoir lieu, les comptables pourraient servir à quelque chose si on les collait pas partout où ils n’ont rien à faire que nuire), les périodes de latence elles-mêmes, et donc la santé (pas tant la "bonne santé" que la santé soignée, défaillante et « réparée », soutenue) prérequis à l’existence de la première des forces productives (souvent réduites au capital fixe et à la science) le travail vivant, d’autant que c’est toujours davantage la vie même qui est mise au travail (jusqu’aux moindres manifestations d’existence et échanges : data), ici le revenu garanti est une politique des besoins radicaux autant qu’il signe une acceptation de l’égalité. C’est du moins comme cela que je veux le voir (bien des seenthissiens sont en désaccord avec divers points évoqués ici, et avec une telle caractérisation de la portée révolutionnaire du revenu garanti, qui fait par ailleurs l’objet de nombreuses critiques se prévalant de l’émancipation, de la révolution, etc.).

      Antériorité du travail vivant sur le rapport de capital donc. L’économie venant recouvrir cela, si l’on veut bien en cela "suivre" Marx sans renoncer à une rupture des et d’avec les rapports sociaux capitalistes (modalités diverses : intellectuelles, lutte, Révolution, révolutions..) - compris dans ses versions marxistes (décadence objectiviste et économiciste de la critique de l’économie politique alors que ce type d’approche ne peut aller sans poser la question du pouvoir, du commandement capitaliste (micro, méso, macro, global).
      L’approche d’Alisa del Re, l’intro à son texte le rappelle, a partie liée avec un courant théorico-politique né dans l’Italie au début des années 60, l’opéraïsme, un marxisme hérétique et une pratique de pensée paradoxale.
      [Voilà comment j’ai relevé ce jour les occurrences de La Horde d’or pour leur coller tous le # La_Horde_d’or, (parfois, je ne disposais pas d’un post perso où ajouter ce #, s’cusez), livre en ligne http://ordadoro.info où on trouve de quoi satisfaire en partie la curiosité sur ce courant et ces histoires, par recherche internet sur le site dédié ou en employant l’index].

      La revendication d’un revenu garanti, d’une généralisation égalitaire des "droits sociaux" qui soit substantielle, (niveau élevé, absence de conditionnalité, de familialisation comme mécanisme de base, ce qui ne veut pas dire qu’il ne faille pas tenir compte positivement de l’ampleur du ménage, des enfants, etc. ) peut (a pu, pourra ?) mettre crise la politique du capital (une vie soumise à la mesure du temps de travail, une disponibilité productive gouvernée, cf. chômage) et entrouvrir à un autre développement que le "développement" capitaliste, de faire que la "libre activité" actuellement interdite, bridée, exploitée et toujours capturée -ce qui limite singulièrement la définition des prolos et précaires comme surnuméraires , même si celle-ci décrit quelque chose de l’idéologie agissante de l’adversaire, qui n’est pas un rapport social sans agents agissants, ni une simple oligarchie sans assise sociale réelle, mais bien l’organisation de fait de militants de l’économie fabriqués en série dans les écoles faites pour ça, et pas seulement la télé -, que la libre activité ou la "pulsion" à oeuvrer, transformer, inventer (présente sous le travail qui est nécessité économique avant tout) absorbe comme n voudra capturée pour le profit puisse relever de satisfaction des besoins)

      Travail, revenu et communisme t’intriguent. Si ce qui précède ne te refroidit pas, il y a ici même des # utilisables pour un parcours, petites promenades ou randonnée sans fin : revenu_garanti refus_du_travail general_intellect opéraïsme salaire_social salaire_garanti Mario_Tronti Toni_Negri Silvia_Federici Paolo_Virno Nanni_Ballestrini ... labyrinthe étendu lorsque s’y ajoute dess # trouvé dans les textes abordés ou la colonne de droite du site.

    • Pardon @colporteur mais ça fait vingt ans que j’entends virevolter les abeilles de YMB, traducteur de tout ce beau monde, et je ne comprends toujours pas comment dans le cadre où nous sommes, une société capitaliste libérale, une revendication de revenu garanti peut ne pas être une mesure libérale. Dans une société idéale, peut-être, sans accumulation, sans marché du travail, où nous sommes plus proches des bases matérielles de nos vies, où le travail fait donc sens et s’impose sans être imposé... Mais pour l’instant, je ne vois pas comment on peut sortir de la condition surnuméraire par la magie d’un revenu sans fonction sociale. Serait-ce le plus beau métier du monde, tellement beau que les mecs se battent pour l’exercer, justement la fête des mères se rapproche.

    • [Les # du post précédent ne s’enregistrant pas, j’essaie ici] il y a ici même des # utilisables pour un parcours, petites promenades ou randonnée sans fin : #revenu_garanti #refus_du_travail #general_intellect #opéraïsme #salaire_social #salaire_garanti #Mario_Tronti #Toni_Negri #Silvia_Federici #Paolo_Virno #Nanni_Balestrini ... labyrinthe étendu lorsque s’y ajoute des # trouvés dans les textes abordés ou/et dans la colonne de droite du site.

  • En Allemagne, pas d’#asperges sans Roumains

    Chronique, sur la vie, la vraie, vue d’Allemagne. Ce voisin qu’on croit connaître très bien mais qu’on comprend si mal. Au menu de cette semaine, la passion des Allemands pour les asperges a poussé le gouvernement à ouvrir ses frontières pour faire rentrer des #saisonniers roumains, indispensables à la récolte de leur légume-roi.

    Il a déjà été évoqué dans cette chronique le rapport singulier qu’entretiennent les Allemands avec leurs asperges. Ils les aiment bien blanches, massives, au diamètre imposant, et noyées sous environ douze litres d’épaisse sauce hollandaise. C’est ainsi : entre les Allemands et l’asperge la relation est passionnelle, fusionnelle, et surtout irrationnelle. Comme le dit avec humour la chroniqueuse Margarete Stokowski, que ne ferait-on pas pour célébrer le « culte » du « vieux mâle blanc des arts culinaires » ? Ainsi, tous les ans, le pays, premier producteur européen, surveille ses récoltes comme le lait sur le feu, et on ne compte plus les articles espérant le retour du Spargelzeit, le temps des asperges, comme la promesse de jours meilleurs.
    « Aucun Allemand ne veut faire ce boulot »

    Aussi le pays se trouva-t-il fort dépourvu lorsque le coronavirus menaça de mettre en péril la récolte du légume-roi. Sans travailleurs saisonniers venus de l’Est, pas d’asperges, et pas de sauce hollandaise. Car si les Allemands se bousculent pour acheter leur légume préféré, ils se pressent moins pour les ramasser. « Aucun Allemand ne veut faire ce boulot », déplorait déjà un producteur dans le Brandebourg en 2018. Ramasser des asperges est harassant, et consiste à travailler dix heures par jour le dos courbé pour le salaire minimum.

    Un printemps sans asperges ? Face à cette catastrophe annoncée, le gouvernement allemand n’est pas resté les bras ballants. La ministre de l’Agriculture, Julia Klöckner (CDU), a d’abord proposé d’utiliser des demandeurs d’asile, dont on lèverait l’interdiction de travail. Certaines personnes originaires d’Albanie, de Bosnie-Herzégovine ou du Kosovo ne pourraient-elles pas faire l’affaire ? Finalement, le gouvernement s’est dit : coronavirus ou pas, il nous faut des travailleurs saisonniers. D’un seul homme, les exploitants se sont proposés afin d’aller chercher les volontaires par avion. Seul hic, la plupart des frontières en Allemagne sont fermées depuis la mi-mars.

    Soulagement

    Qu’à cela ne tienne. Si Paris vaut bien une messe, l’asperge vaut bien une entorse à la fermeture des frontières. Le 2 avril, le gouvernement fédéral a permis la venue de 80 000 travailleurs saisonniers. Des images d’ouvriers roumains, photographiés à leur sortie d’avion façon paparazzade, ont alors envahi les médias, qui poussèrent un cri de soulagement : « Les saisonniers sont là. » Même le parti d’extrême droite AfD s’est réjoui, une fois n’est pas coutume, de l’#ouverture_des_frontières.

    Seulement, l’affaire n’est pas sans danger, quand bien même les exploitants assurent respecter les consignes d’hygiène et de sécurité. L’un de ces ouvriers agricoles roumains est mort du Covid-19 lors du week-end de Pâques, près de Fribourg-en-Brisgau (Bade-Wurtemberg). Il avait 57 ans. On suppose qu’il a contracté le virus en Allemagne. Une éditorialiste du Zeit s’est indignée, et elle n’est pas la seule : « Pas besoin d’être diplômée en économie pour comprendre que l’idée d’envoyer des milliers de Roumains démunis en Allemagne pour travailler dans les champs en pleine pandémie n’est pas particulièrement bonne. »

    https://www.liberation.fr/planete/2020/04/21/en-allemagne-pas-d-asperges-sans-roumains_1785811

    #travailleurs_étrangers #migrations #coronavirus #covid-19 #Roumanie #travailleurs_roumains

    Ajouté à cette métaliste :
    https://seenthis.net/messages/849493

  • “Stay in Your Box!”: Migrant Workers and Social Discipline/Distancing in Singapore

    10 April 2020 – Jia Ye – Singapore has been hailed as a ‘model’ response to COVID-19, but in recent days its cramped and crowded migrant worker dormitories, were been the site of a surge of cases. In this podcast #Jia_Ye – Geographer at Nanyang Technical University – tells us about the impossibility of social distancing for workers – who remain in the dorms, in the trucks and on their work sites. She also gives us an insider’s look into Singapore’s state led response, and the unique codes of self-policing and ‘civility’ that hold it in place.

    https://4mpodcast.com/2020/04/12/stay-in-your-box-migrant-workers-and-social-discipline-in-singapore
    #audio #podcast #travailleurs_étrangers #migrations #Singapour #distanciation sociale #hébergement #logement

    ping @zhipeng_li

    • Le Japon face à l’épidémie. Gestion de crise et #responsabilité_civique

      La prétendue discipline japonaise, qui passe pour un modèle de #civisme_spontané, dépend en réalité en grande partie des décisions du gouvernement, comme le montre la récente progression de l’épidémie, qui discrédite la trop simpliste explication culturaliste.

      Jusqu’à la mi-mars, la situation japonaise semblait sous-contrôle avec un taux de propagation relativement faible. Or, depuis fin mars, le nombre de nouveaux cas dont les voies de transmission ne sont pas identifiées augmente rapidement. Le 7 avril le Premier ministre Shinzô Abe déclare l’état d’urgence dans sept préfectures du pays, et demande aux citoyens un #confinement_volontaire en s’appuyant sur un plan de soutien à l’économie de grande ampleur.

      En comparaison des mesures prises par plusieurs pays pour tester en masse et/ou faire appliquer un confinement obligatoire, la gestion de crise japonaise soulève plusieurs questions. La bonne organisation des institutions de santé publique, les procédures de gestion de crise sanitaire et les mesures de prophylaxie permettent-elles d’expliquer la décision de ne pas recourir aux tests de dépistage à grande échelle, ou bien cette décision relèverait-elle de contraintes légales et sanitaires ? Si la lente progression du nombre de cas jusqu’à la mi-mars nourrissait encore certaines explications simplistes fondées sur la discipline des Japonais, l’accélération récente des cas discrédite le facteur culturaliste, et met en question le rôle de la responsabilité civique et les conditions de son application.
      Pour préparer cette analyse que seul le temps pourra mener à son terme nous proposons ici de décrire les mesures de lutte contre l’épidémie depuis le mois de janvier jusqu’au début du mois d’avril 2020 et d’éclairer le rôle joué par la responsabilité civique dans la gestion de crise sanitaire actuelle.
      Le système de gestion de crise sanitaire

      La loi de Mesures contre les maladies infectieuses de 1998, révisée pour la dernière fois le 14 mars 2020 pour y ajouter le Covid-19, définit le système japonais de gestion de crise sanitaire qui relève de la compétence et de la coordination renforcée entre le secrétariat du Cabinet, le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales, les gouvernements locaux et les experts formés en comité consultatif. Différentes mesures plurisectorielles sont articulées à différents niveaux que l’on peut synthétiser en trois piliers : l’identification de clusters, le renforcement du système de santé, et la responsabilité civique. En fonction des critères qui figurent dans la loi, lorsque les voies de contamination ne sont plus suffisamment identifiées et que le risque de contamination atteint un certain niveau, le Premier ministre, après avoir activé la structure décisionnelle de crise, peut déclarer l’état d’urgence sanitaire.

      Cependant, la loi ne prévoit pas de mesures de coercition pour appliquer l’état d’urgence, à la différence notamment de ce qu’a fait la France (il est par exemple impossible de sanctionner le non-respect de demande de confinement par des amendes ou des peines de prison). Contrairement à ce qu’une partie de la presse étrangère rapporte, l’étendue des restrictions des libertés individuelles et l’absence de sanctions n’en font pas un « d’état d’urgence a minima » qui reposerait sur le civisme culturel et la pression sociale de la société japonaise.

      Le civisme ou la citoyenneté responsable se définit selon Luigi Lombardi Vallauri comme une attitude qui « (…) est libre, entièrement facultative ; même comme simple attitude, elle n’est pas exigée du sujet à l’intérieur d’un système normatif, en tous cas elle ne l’est pas à l’intérieur d’un ordre juridique positif », il s’agirait donc d’ « (…) une attitude et non pas (d’) une situation passive ni (d’) un devoir dont on répond devant les institutions »

      . En demandant aux citoyens de réduire leur interaction sociale à 80 % pour freiner la propagation du virus, le Premier ministre s’appuie bien sur la responsabilité civique des Japonais et non pas sur leur civisme. D’un point de vue général le recours au pilier de la responsabilité civique trouverait son fondement dans l’article 12 de la Constitution :

      La liberté et les droits garantis au peuple par la présente Constitution sont préservés par les soins constants du peuple lui-même, qui s’abstient d’abuser d’une façon quelconque de ces libertés et de ces droits ; il lui appartient de les utiliser en permanence pour le bien-être public.

      Plus particulièrement, la déclaration de l’état d’urgence vise à la préservation du bien public, lequel ne peut être garanti, d’après le discours du Premier ministre, que par les restrictions sur l’activité économique et sociale. Ce serait donc un renforcement des actions relevant de la responsabilité civique de tous les acteurs de la société civile qui, articulé aux deux autres piliers eux même renforcés, permettrait encore de résoudre la crise sanitaire]. En outre, le 2 avril Shinzô Abe a mentionné devant la Chambre des représentants réunis en séance plénière, la possibilité de réformer la loi pour y inclure des dispositions ayant pour objectif de réprimer le non-respect des mesures de distanciation sociale

      .

      On observe donc depuis le début de la gestion de crise sanitaire un processus graduel d’activation de la responsabilité civique lequel évolue en fonction de la progression de l’épidémie et de sa compréhension.
      Les premières mesures de lutte contre la propagation du Covid-19 de janvier à février 2020

      Le 5 janvier 2020, l’OMS a publié une note informative sur l’émergence en Chine, dans la ville de Wuhan, province du Hubei, d’une maladie respiratoire dont les causes étaient inconnues. Le 6 janvier, le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales publie en coordination avec l’Institut national des maladies infectieuses une note informative sur l’émergence dans la ville de Wuhan (province du Hubei, Chine), d’une maladie respiratoire dont les causes sont inconnues. Les premières recommandations sont formulées à l’attention des voyageurs en provenance de Wuhan qui présenteraient des symptômes (fièvres, courbatures, difficultés respiratoires). Le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales adresse aux gouvernements locaux une note pour renforcer la coordination entre les centres de santé (health centers, hokenjô), les structures hospitalières, et l’Institut national des maladies infectieuses. Le 15 janvier, le premier cas est relevé. Dès le 21 janvier et conformément à l’article 15 de la loi de Mesures contre les maladies infectieuses, l’Institut national des maladies infectieuses réalise des tests pour les personnes qui ont été en contact avec les cas confirmés. Dans le cadre de la mise en place d’un système de surveillance, les porteurs potentiels du virus peuvent être testés sans que leur lien avec la ville de Wuhan soit établi. Les tests sont également réalisables dans les centres de santé locaux. La priorité est néanmoins donnée aux patients présentant des symptômes sévères pour permettre une prise en charge rapide.

      En se fondant sur les directives publiées par l’Institut national des maladies infectieuses, et les premières analyses chiffrées, le gouvernement applique le 21 janvier les premières mesures de prévention contre la propagation du Covid-19 pour contrôler l’état de santé des personnes entrant sur le territoire japonais en provenance de régions à risques, et d’identifier les voies de transmission. Le 23 janvier, 2 cas sont confirmés (23 personnes ont été en contact avec eux et font l’objet d’un examen). Le gouvernement renforce les mesures, notamment la mise en place de dispositifs pour effectuer les enquêtes épidémiologiques. Le 30 janvier, le gouvernement crée une cellule de crise sous la supervision du directeur adjoint du secrétariat du Cabinet du Premier ministre et demande la mise en place d’un comité consultatif d’experts qui se réunit pour la première fois le 16 février.

      L’identification des clusters est la première priorité. Le groupe de recherche dirigé par le virologue Hitoshi Oshitani (université du Tohoku), en coordination avec le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales et le comité consultatif, analyse la propagation du Covid-19 en fonction du comportement des personnes infectées afin d’identifier les modes de contagion. Depuis le 3 février, différentes structures sont également déployées dans les centres de santé pour contacter les personnes revenues au Japon après un séjour à l’étranger, dans le but de retracer les voies de transmission. Entre le 3 février et le 26 mars, un grand nombre de personnes ont été prises en charge par ces centres de santé (environ 500) ouverts sans interruption (24h/24 et 7j/7). Selon le document officiel publié le 25 février, il reste très peu de cas dont les voies de transmission n’ont pas été identifiées.

      Ensuite, le second pilier vise à soutenir le système de santé et à freiner la propagation du virus par une prise en charge adaptée des patients. Pour faire face à une hausse possible du nombre de cas, le gouvernement a augmenté les capacités d’accueil (nombre de lits) et de soins spécifiques (équipement de dispositif d’assistance respiratoire). Depuis le 13 février, des structures hospitalières sont préparées au niveau national (1059) dont une partie est dédiée exclusivement aux maladies infectieuses (412).

      Enfin, la responsabilité civique est encouragée par l’intermédiaire de recommandations à l’attention des citoyens, publiées notamment sur le site des différents ministères, comme les règles d’hygiène de base (lavage de mains, éternuer et tousser dans son coude, port du masque), et l’auto-confinement en cas de symptômes (rhume et grippe compris). Il est demandé aux personnes présentant des symptômes légers d’attendre 4 jours avant de consulter un médecin (2 jours pour les personnes âgées).

      Parallèlement à la mise en route des procédures de gestion de crise sanitaire, et sans concertation, le Premier ministre Shinzô Abe déclare la fermeture des écoles primaires, des collèges et des lycées, le 27 février.
      Le tournant de la politique de lutte et la crise de confiance. Fin février - fin mars 2020

      La décision soudaine du Premier ministre de fermer les écoles a suscité de vives critiques relayées par la presse. Il s’agirait d’une mesure arbitraire dès lors que, d’une part, elle a été prise en dehors du cadre d’état d’urgence sanitaire et, d’autre part, qu’elle n’a fait l’objet d’aucune concertation avec le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales, le ministère de l’Éducation, les gouvernements locaux et le comité consultatif des experts

      . L’absence de structures suffisamment déployées en amont de cette prise de décision pour aider les familles à s’organiser en recourant notamment au télétravail reflèterait le manque de coordination entre les sphères politique, administrative, les entreprises et les citoyens pour permettre l’application cohérente des mesures de lutte contre l’épidémie qui figurent dans le système de gestion de crise et qui reposent sur la responsabilité civique. De fait, l’objectif de distanciation sociale aurait été amoindri par les modes de garde collective alternatifs auxquels les familles ont dû avoir recours.

      Le 11 mars, deux experts scientifiques interviennent à la Diète pour répondre aux questions des parlementaires sur les mesures prises par le gouvernement. Les deux experts s’entendent sur le fait que la décision de fermer les écoles est avant tout politique et ne repose sur aucune analyse scientifique. Ils sont néanmoins en désaccord sur l’usage des tests. Selon Shigeru Omi, Président du comité consultatif des experts, invité par le parti de la majorité (le Parti Libéral Démocrate), le dépistage des cas avancés doit être la priorité, limitant de fait le nombre de tests effectués. Masahiro Kami, Président du conseil du centre de recherche sur la gouvernance médicale, invité par un des partis de l’opposition (le Parti Démocrate Constitutionnel), souligne quant à lui l’importance d’effectuer le maximum de tests possibles pour obtenir des données statistiques fiables. Le pourcentage de la population testée par rapport à la population totale est un des plus faibles en comparaison internationale.

      En effet, la loi sur les Mesures contre les maladies infectieuses ne mentionnant pas l’obligation de recourir à des tests à grande échelle, la décision du gouvernement de ne pas tester en masse repose sur le fonctionnement efficace du premier pilier de la gestion de crise : l’identification des clusters. L’avancée quotidienne des recherches pour comprendre les facteurs de propagation du virus permet grâce à une coordination avec le ministère de la Santé, du Travail et des Affaires sociales de communiquer les derniers résultats au gouvernement et au comité consultatif.

      La gestion de crise confuse du gouvernement reflète dès lors l’existence de conflits d’intérêts divergents opposant les partisans de la poursuite de l’activité économique, soutenue par le Keidanren (Fédération des organisations économiques) et le ministère de l’Économie et de l’Industrie, aux partisans du dépistage en masse et du confinement généralisé demandés par l’Association des médecins du Japon et certains membres du comité consultatif. Les connaissances scientifiques relatives à la propagation du Covid-19 encore fragiles et les enjeux de pouvoir inhérents aux intérêts divergents entre groupes d’acteurs concernés expliquerait la difficulté rencontrée par le gouvernement pour adopter une ligne d’action cohérente, alors que la définition du problème de santé publique

      et plus précisément son niveau de risque fait encore l’objet d’un manque de consensus.

      S’ajoute à ces tensions politiques et scientifiques, une perte de confiance de l’opinion publique liée à la gestion de crise sur le navire de croisière Diamond Princess et sa médiatisation, au déficit de transparence sur le nombre de cas réellement infectés causée par le non-recours au dépistage massif, et à la fermeture précipitée des écoles. Dans ce contexte la révision de la loi sur les Mesures contre les maladies infectieuses en vue d’y intégrer le Covid-19 est votée à la quasi-unanimité (à l’exception du Parti communiste). Cette nouvelle loi est appliquée le 14 mars pour une durée de deux ans et permet au Premier ministre de déclarer l’état d’urgence sanitaire. Le 19 mars, les effets des mesures de lutte contre la propagation du virus sont analysés lors du huitième comité consultatif des experts. Ce comité se tient dans un contexte mondial de pandémie où l’état d’urgence sanitaire est déclaré dans plusieurs pays du monde dans lesquels une part croissante des citoyens est forcée au confinement.
      La prise de conscience du risque dans un contexte de pandémie mondiale – les mesures d’urgence depuis fin mars 2020

      D’après les membres du comité consultatif, bien que la corrélation scientifique soit difficile à établir, les efforts des citoyens pour respecter les gestes barrières, la demande du gouvernement de fermer les écoles, d’annuler ou de reporter des événements, semblent avoir été efficaces pour ralentir la progression de la contagion par le Covid-19. Cependant, ils s’inquiètent de l’augmentation du nombre de cas isolés et importés de l’étranger dans les grandes villes (Tokyo, Osaka, Nagoya). Cette tendance semble indiquer le début d’une nouvelle vague de cas, localisés dans certaines régions, et dont les symptômes peuvent être sévères. L’apparition de gros clusters, au sein desquels les voies de transmission du virus ne peuvent plus être identifiées, risque d’entraîner, selon les membres du comité consultatif, une situation comparable à celle de l’Italie, de la France ou des États-Unis.

      L’articulation des mesures de lutte contre la propagation du Covid-19 autour des trois piliers est donc renforcée. Le comité recommande alors un renforcement des mesures de prévention face à la formation de nouveaux clusters, une augmentation des budgets accordés au système de santé, ainsi qu’un partage plus efficace des informations entre les gouvernements locaux pour gérer plus étroitement le risque d’infection en fonction des régions. Une augmentation des capacités de test de dépistage est déployée. Enfin, la communication est ciblée sur les conditions de propagation du risque en demandant d’éviter les lieux fermés, les interactions sociales rapprochées, et les rassemblements collectifs.

      Dans ce contexte, le gouvernement décide de la réouverture des écoles après les vacances de printemps, laissant toutefois les gouvernements locaux prendre leur décision en fonction de la situation sanitaire locale. Les contradictions apparentes entre la décision de ré-ouvrir les écoles et l’évolution de la situation sanitaire, à l’égard de laquelle le comité consultatif a émis des recommandations d’urgence, entraînent une nouvelle confusion dans la politique de gestion de crise sanitaire. Ce manque de cohérence pourrait de nouveau altérer l’efficacité des mesures reposant sur la responsabilité civique en réduisant la perception du risque à quelques jours du pont pour l’équinoxe de printemps pendant lequel la floraison des cerisiers attire chaque année un grand nombre de Japonais dans les lieux publics, les restaurants et les bars.

      La veille du long week-end, les deux gouverneurs de Kobe et d’Osaka ont appelé les citoyens à limiter leurs déplacements leur demandant un confinement volontaire. Le discours et les actions des deux gouverneurs locaux avaient pour objectif d’accroître la prise de conscience du risque des citoyens et de prévenir leurs comportements, contrastant avec le manque d’anticipation du gouvernement central. Déjà fin février, le gouverneur de Hokkaido, Naomichi Suzuki, a fait preuve de réactivité en déclarant l’état d’urgence. Le 19 mars il déclare la fin de l’état d’urgence en réponse à la baisse du nombre de nouveaux cas alors que la propagation du virus augmente dans les grandes villes comme Tokyo. La réactivité d’une partie des gouvernements locaux face au manque d’anticipation et de préparation du gouvernement central rappellerait notamment la crise du modèle de gouvernance analysée lors de la catastrophe nucléaire du 11 mars 2011.

      À partir du 25 mars, la gouverneure de Tokyo, Yuriko Koike, recommande aux habitants de la capitale de limiter les sorties et les déplacements pendant les week-ends (fermeture progressive d’un grand nombre de parcs, de bars, d’établissements de karaoké, de cinémas, et promotion du télétravail). Les gouverneurs des préfectures de Chiba, Saitama et Aichi demandent aux citoyens de ne pas se rendre à Tokyo. Face à cette gestion politique confuse, la confiance de l’opinion publique dans la capacité du gouvernement à endiguer cette épidémie continue de baisser.

      L’état d’urgence, déclaré le 7 avril pour sept préfectures (Tokyo, Kanagawa, Saitama, Chiba, Osaka, Hyogo, Fukuoka), devrait permettre au gouvernement d’appliquer plus efficacement les mesures de lutte contre l’épidémie grâce au déploiement d’une coordination institutionnelle entre les sphères politique, administratives et la société civile qui faisait défaut jusqu’à présent. En effet, alors qu’il ne disposait pas de suffisamment de marge de manœuvre politique et budgétaire, l’état d’urgence, assorti d’un grand plan de soutien à l’économie, permet au Premier ministre de procéder à l’activation à un degré avancé de la responsabilité civique pour soutenir les deux autres piliers - identification des clusters et renforcement du système de santé.
      Conclusion

      La responsabilité civique en tant que pilier de gestion de crise sanitaire diffère du civisme qui est une attitude et non un devoir
      . Elle dépend de la communication et de la politique conduite par les autorités. L’identification des clusters, l’analyse des facteurs de propagation du virus dans la société japonaise, les capacités des structures hospitalières, le cadré légal et les enjeux économiques sont autant de variables, parfois divergentes, qui ont orienté la politique de gestion de crise du gouvernement central et des autorités locales. On observe donc une interférence des logiques de santé publique dans le système politique et économique créant un espace de confrontation qui donne lieu à de nouveaux compromis et qui résultent dans l’état d’urgence sanitaire : les autorités demandent aux citoyens de réduire les interactions sociales de 80 % sans établir, pour le moment, un régime exceptionnel de restriction des libertés individuelles. La réticence du gouvernement à mettre en place un tel régime repose sur les valeurs démocratiques et pacifistes de la Constitution d’après-guerre qui incarne les libertés civiques. Or, depuis son entrée en vigueur le 5 mai 1947, sa légitimité provoque de fortes controverses politiques relayées notamment dans le débat public sur les libertés civiques pendant l’état d’urgence. En juin 2017 le vote de la loi Anti-terroriste a déclenché des critiques virulentes au sein de l’opinion publique, des avocats et des journalistes dénonçant son contenu liberticide. En cas d’échec des mesures reposant sur le volontariat la question se pose donc de savoir si la responsabilité civique pourrait évoluer vers un modèle plus normatif et coercitif ? Ou bien le Japon parviendra-t-il à « imaginer un autre mode de réponse à la crise sanitaire et notamment une réponse qui ne sacrifie pas – ou qui sacrifie moins – les libertés » ?

      Pour soutenir les secteurs économiques et les ménages impactés par la crise sanitaire, le gouvernement déploie un plan massif (plan de soutien à l’économie de 915 milliards d’euros). Le gouvernement aurait-il recours à l’incitation économique pour activer la responsabilité civique à un niveau avancé ? Quelle est sa marge de manœuvre face aux non-bénéficiaires des aides financières ? La gestion de crise exacerbe en effet les inégalités de la société japonaise face aux conséquences socioéconomiques engendrées par les mesures de lutte contre l’épidémie. Selon l’enquête réalisée par la Chambre du commerce et de l’industrie de Tokyo, seulement 26 % des PME ont pu mettre en place le télétravail (57,1 % des entreprises de plus de 300 employés, contre seulement 14,4 % des entreprises de moins de 50 employés). Les inégalités face au télétravail altèrent donc l’efficacité des mesures reposant sur la responsabilité civique. Celle-ci est aussi remise en question face aux inégalités sociales et juridiques. Par exemple, la récente mobilisation juridique pour défendre les travailleurs d’Uber Eats pose la question urgente des droits des travailleurs indépendants face aux risques de contagion et aux conséquences socioéconomiques engendrées.


      https://laviedesidees.fr/Le-Japon-face-a-l-epidemie.html

      #géographie_culturelle

      –-> A mettre en lien avec la lecture culturaliste face à la crise en #Suisse :
      https://seenthis.net/messages/848845

    • Coronavirus : l’#exception japonaise ?

      En quelques mois, la pandémie de coronavirus a plongé le monde dans une situation de paralysie dont la durée est difficilement appréhendable. Le Japon, pris entre le report des JO et la rentrée scolaire, semble avoir maîtrisé l’épidémie dès les premières semaines, enrayant de fait son développement exponentiel. Il reste néanmoins des difficultés principalement dues à une réduction des investissements publics dans les hôpitaux contraints de réduire leur accueil.

      Au loin, une sirène retentit. Dans un pays où la population vieillissante est composée à 28% de personnes ayant plus de 65 ans, les ambulances tournoient quotidiennement. Mais en cette période de confinement, elles génèrent une tension latente absente d’ordinaire. Car ça y est. Le Japon, en proie au SARS-CoV-2, a franchi, lui aussi, le pas vers un confinement souple, plus conseillé qu’imposé, mis en place en deux temps, d’abord pour les sept préfectures les plus touchées depuis le 11 avril (Tôkyô, Kanagawa, Saitama, Chiba, Ôsaka, Hongo et Fukuoka), puis, devant la multiplication des cas, en généralisant ces mesures à l’ensemble du Japon le 17 avril. C’est dans un contexte politique très tendu que le Japon doit administrer cette nouvelle crise, à l’origine d’un report et peut être d’une annulation des Jeux Olympiques dont les préparatifs avaient été organisés à grands frais et non sans contestation, la décision de leur accueil ayant été prise deux ans seulement après le triple désastre (tremblement de terre, tsunami, explosion de la centrale nucléaire dai-ichi à Fukushima) qui avait dévasté le Nord-Est du Japon en 2011. Si elle devait se produire, cette annulation représenterait la seconde pour le Japon, la première ayant été motivée par le début de la seconde guerre mondiale. Mais pour l’heure, la guerre est déclenchée au virus, selon les termes du président français, repris par les dirigeants Japonais. Quelle est la situation au Japon et comment le gouvernement fait-il face à la crise ? D’une crise sanitaire à l’autre, le Japon a-t-il tiré les leçons de la communication sur les effets sanitaires développée après Fukushima ? Le système social en place permet-il de pallier à la vulnérabilité de certaines couches de la population ? Quelle est l’ampleur de l’épidémie au Japon comparativement à la situation française ? Autant de questions qui s’imposent afin d’évaluer les diverses mesures mises en place, et de permettre l’élaboration de nouvelles stratégies dans la gestion des désastres sanitaires, au-delà d’une réflexion qui s’impose quant à une refonte de notre système économique et à celui de nos modes de vie.

      Les mesures prises durant le début de l’épidémie et le report des JO

      Depuis le début de l’année, les informations d’abord jugées douteuses en provenance de son voisin chinois sur la potentialité d’une pandémie de covid 19, se sont confirmées. La globalisation des échanges commerciaux, celle du tourisme de masse, ainsi que celle des voyageurs auront eu raison des discours les plus rassurants quant à une maîtrise possible de la pandémie. Chargé d’accueillir les Jeux Olympiques en 2020, le gouvernement japonais n’ayant déclaré que 9 personnes contaminées au 30 janvier 2020, a d’abord été soupçonné de dissimuler le nombre de cas sur son territoire afin de ne pas entraver une organisation qui s’était avérée fort coûteuse, leur coût total étant évalué à 11,5 milliards d’euros[1]. Ces JO revêtent en effet une importance toute particulière dans le cas présent, puisque l’un de leurs objectifs était de médiatiser la réouverture de la zone d’évacuation autour de la centrale nucléaire de Fukushima Dai-ichi, notamment via la localisation du relai de la flamme olympique dans des tronçons de la zone d’évacuation rouverts pour l’occasion[2].

      A la mi-février, alors que le gouvernement japonais luttait contre une annulation probable des JO, les voix d’opposition pour une meilleure gestion d’une possible épidémie dans le pays se firent entendre. Dans un communiqué publique, le Premier Ministre japonais Shinzo Abe, annonce alors quelques restrictions, essentiellement fondées sur la responsabilité civile, en demandant de multiplier le télétravail tant que faire se peut, le report des évènements prévus dans les prochaines semaines, l’évitement des attroupements, la ventilation des espaces confinés, l’annulation des évènements sportifs, et la fermeture des écoles quinze jours avant les vacances saisonnières, la rentrée scolaire au Japon s’effectuant en avril. A un niveau individuel, le savonnement des mains et les lavements de bouche. Dans son allocution, le Premier Ministre spécifie néanmoins le maintien des Jeux Olympiques, et notamment le départ du relai de la flamme Olympique à Fukushima qui devait se dérouler le 16 mars.

      Quelques jours avant le départ du relai, le gouvernement doit néanmoins faire face au refus des coureurs de participer à la course, estimant être doublement mis en danger, par l’exposition aux radiations encore élevées dans la zone, et à celle au coronavirus, l’événement attirant de nombreux spectateurs. Le gouvernement propose alors que le relai soit remplacé par le transport en bus de la flamme olympique renfermée dans une lanterne de cuivre, au moment où les organisations d’athlétismes canadiennes et américaines, en pleine pandémie, demandent le report des JO, finalement décidé par le comité d’organisation international.

      Quand minimaliser les risques ne fait que les augmenter

      Hormis Hokkaidô, dont le gouverneur a déclaré l’état d’urgence dès le 28 février, en demandant à ses habitants le port du masque et un confinement stricte, le Japon, en dépit de la mise en place d’un comité consultatif d’experts dirigé par Omi SHIGERU et suivant une logique épidémiologique très critiquée durant la gestion de l’accident nucléaire de Fukushima, se refuse à effectuer une campagne massive de dépistages argumentant le possible déclenchement d’une vague d’inquiétude démesurée de la population. Pire encore, le 20 mars, la décision de rouvrir les écoles et facultés à la rentrée scolaire début avril est annoncée simultanément à une montée en tension générée par l’apparition de nouveaux clusters qui touchent les principales zones urbaines de Tôkyô, Nagoya, Ôsaka et Kyôto.

      Néanmoins, les échanges de voyageurs en provenance des pays les plus touchés sont limités et des premières mesures fiscales sont annoncées afin de faciliter le confinement. Parmi elles, la possibilité de reporter le paiement des taxes, charges et autres impôts et la mise en place d’un prêt d’urgence. En 2 mois, depuis son premier cas mi janvier, le Japon décompte 1200 cas testés positifs sur son territoire (les dépistages n’étant pas systématiques, ces chiffres ne sont donc qu’indicatifs), dont seulement 5% sont estimés être graves. Si la multiplication du nombre de contamination est rapide, le pays réussi à maintenir une certaine stabilité en raison de plusieurs facteurs. Le premier est une distanciation physique culturellement acquise, puisqu’on ne se touche pas physiquement ni pour se saluer, ni pour exprimer ses marques d’affection. Le second est le fait que la plupart des foyers possèdent des masques en raison de forts rhumes des foins générés par le pollen de certaines essences végétales importées contre lesquelles les japonais n’ont pas d’immunité. Cette « coutume » du port du masque est bien antérieure à la crise du sras et autres grippes influenzas. Les japonais les portent également en cas de rhume afin de ne pas contaminer leurs congénères. En outre, bien que les masques chirurgicaux soient de fabrication nationale, la plupart des distributeurs du Japon, dès le début de l’épidémie, se sont trouvés en rupture de stock. La population en détenait néanmoins suffisamment pour ne pas être affectée par cette pénurie, celle-ci étant comblée par la fabrication artisanale de masques courante dans le pays. Le troisième est le niveau d’hygiène. Ainsi, de l’alcool pour se désinfecter les mains est proposé à l’entrée de la plupart des magasins, les aliments sont emballés (ce qui génère par ailleurs une consommation de plastique extrêmement élevée), tandis que des employés, protégés de masque, de gants et d’écrans de plastique transparent se consacrent à la désinfection des paniers et charriots dans les surfaces alimentaires.

      Le gouvernement comptait donc essentiellement sur la conscience civile, entrainée par les nombreux désastres naturels (tremblements de terre, typhons, inondations) et industriels (maladie de minamata engendrée par la pollution au mercure dans le nord de Kyushu, catastrophe nucléaire de Fukushima) pour faire face au péril. Fort de cette assurance, le Premier Ministre Abe tout en annonçant un plan de soutien économique s’affiche, lors d’une conférence de presse, affublé d’un masque en coton et promet que deux masques en coton seront distribués par foyer dès la mi-avril, générant les sarcasmes de nombreux citoyens. Abenomics[1]était devenu Abenomask (les masques d’Abe)[2], la majorité de la population estimant que les mesures prises restaient insuffisantes face à l’accroissement rapide du nombre de cas et à la détérioration inquiétante de la situation dans les pays occidentaux.

      Quelles sont les mesures prises depuis le 11 avril ?

      Les 7 et 11 avril, de nouvelles mesures sont annoncées par le gouvernement et par la maire de Tôkyô, Yuriko KOIKE, la mégalopole étant la plus touchée par la maladie qui s’avère être une maladie urbaine, en raison de la densité de population qui facilite la transmission d’un individu à l’autre et de la pollution aérienne qui augmenterait le taux de mortalité par le virus selon une récente étude menée par Harvard T.H. Chan School of Public Health[3]. L’air, dans les villes japonaises, étant de bonne qualité en raison d’une circulation automobile réduite, de la quasi suppression du diesel limité aux véhicules de transport, et d’une ventilation suffisante assurée par leur localisation côtière, les risques de contamination sont plus à craindre dans les lieux où la promiscuité est importante, présents en grand nombre dans les villes : transports en commun, Izakaya (bars populaires), pachinko et autres karaoke.

      Ces mesures sont les suivantes :

      Une modification de la loi a été faite afin d’imposer :

      – l’arrêt provisoire d’activité pour toutes les structures scolaires dont la superficie dépasse les 1000 m2

      – la fermeture temporaire de tous les commerces autres que ceux fournissant les denrées nécessaires au quotidien et dont la surface est supérieure à 1000m2

      – la fermeture temporaire de l’ensemble des centres d’exposition, bibliothèques, salles de concert et autres musées dont la surface est supérieure à 1000m2

      – la fermeture des établissements sportifs, ainsi que des salles de loisirs (pachinko, Majong et autres Game center) ou autres lieux de divertissements (cabarets, karaoke, internet-café, night club, etc.)

      Une requête de coopération est par ailleurs faite, sans contrainte légale :

      – les établissements éducatifs (petites universités, auto-école, etc.) de moins de 1000m2 peuvent continuer leur activité en prenant les mesures de précaution pour se protéger.

      – Les centres d’exposition, bibliothèques et autres salles de concert en deçà de 1000m2sont priés de fermeture temporaire

      – Les commerces hors vente de produits nécessaires au quotidien sont priés de fermer sauf ceux dont la surface est inférieure à 100 m2qui peuvent continuer leur activité en respectant les mesures de précaution.

      Il est également demandé aux cultes, services de garde d’enfants et autres services sociaux d’arrêter ou de limiter leurs services en respectant les règles de protection.

      Les hôpitaux, vétérinaires, hôtels, transports, services funéraires, média, bains publics, supermarchés et autres kombinis(supérettes) devront, quant à eux, assurer les mesures de précaution afin de continuer leur activité. Cette règle est également appliquée aux bars et restaurants dont les horaires d’activité sont néanmoins réduits. Ainsi, leur activité est permise de 5 h du matin à 20h.

      Le télétravail est recommandé pour les autres activités.

      Si les tests sont limités, une application-test est envoyée sur l’ensemble des téléphones portables via Line, un service de messagerie très populaire au Japon afin de distribuer un questionnaire permettant d’appréhender le nombre de personnes présentant les symptômes de la maladie.

      Les mesures annoncées pour la capitale seront finalement appliquées sur l’ensemble du pays, devant une accélération du nombre de personnes contaminées, une semaine après leur annonce.

      Ici comme ailleurs, héroïser les plus vulnérables ne leur permet pas de faire face

      Mais très vite, les voix se lèvent. La cessation d’activité est insoutenable pour une grande partie de la population. Des manifestations, respectant les distances sécuritaires, sont organisées à Tôkyô, avec pour mot d’ordre : « sans argent, pas de confinement ! ».

      Après des discussions tendues au parlement, le gouvernement décide finalement, le 20 avril, la distribution de 100 000 jpy/personne (850 euros) qui seront versés au chef de famille, afin de combler les pertes dues au confinement.

      Par ailleurs, la fermeture des internet-cafés où dormaient les personnes sans foyer, communément désignées sous le terme de « réfugiés des cyber cafés » (netto kafe nanmin) , une population estimée par les associations de suivi social à 4000 personnes pour la seule ville de Tôkyô et à 500 par le gouvernement, se retrouve à la rue. La maire de Tôkyô a proposé, pour solutionner le problème, le réquisitionnement d’hôtels ou d’équipements d’accueils afin de permettre leur hébergement, mais également de maîtriser les cas de contagion éventuels. Néanmoins, les associations s’occupant du suivi des personnes sans domicile fixe tirent la sonnette d’alarme. Le dirigeant de Tôkyô Umbrella kikin partage sur les réseaux sociaux les secours quotidiens promulgués à ces nouveaux homeless qui viennent de perdre leur travail suite aux fermetures contraintes des magasins qui les employaient[1].

      La politique de confinement est dramatique, et c’est pour éviter d’avoir à l’imposer que le gouvernement avait tenté de maîtriser l’épidémie, notamment en permettant au département la réquisition d’hôtels afin d’isoler les personnes positives asymptômatiques ou présentant des symptômes légers. Cette mesure a été adoptée sur l’ensemble du territoire. La liste de ces hôtels fait l’objet d’une publication régulière dans la presse, comme c’est le cas pour la préfecture spéciale de Kyôto dont le répertoire des hôtels mobilisés à cet effet a été publié le 21 avril 2020 dans le journal Asahi, l’un des quotidiens nationaux les plus lus du Japon[2].

      Malgré l’ensemble des mesures promulguées par les institutions aux diverses échelles d’intervention (aux niveaux national, départemental et local), les hôpitaux commencent à être engorgés dès la mi-avril[3] et les patients se voient refuser leur demande d’hospitalisation. Pire encore, les opérations de patients atteints du cancer sont annulées une à une, en raison du manque de personnel, en sous-effectif, en partie victime de la maladie. Shintsuke TENNÔ, représentant de l’association des malades du cancer témoigne, dans un reportage de la NHK du 20 avril[4], d’un problème récurrent dans la plupart des pays qui ont fait le choix de réduire leur soutien aux hôpitaux publics. Ainsi, le Japon a opté pour une réduction importante du nombre de lits d’hôpitaux depuis plusieurs années. En 1998, le nombre de lits réservés en cas d’épidémie était de 9060 lits, contre 1869 aujourd’hui. Si le nombre de lits total reste assez important en raison de la présence de dispensaires nombreux dans le pays, ainsi que du grand nombre de lits en psychiatrie, soit 7.79 lits pour 1000 personnes contre 3.09 lits pour 1000 personnes en France[5], des études sur le sujet (voir : Intensive Care Medicine journal , National Center for Biotechnology Information , ou encore more recent analysis publiées dans Critical Care Medicine Journal comparent le nombre de lits en réanimation dans les pays d’Asie) montrent que le nombre de lits en réanimation pouvant être mobilisés en cas d’épidémie est drastiquement plus faible, puisqu’il est de 7,3 lits pour 100 000 personnes au Japon contre 11,6 lits pour 100 000 personnes en France.

      Depuis octobre dernier une accélération notable de ce processus avait été activée, visant à la suppression de 130 000 lits d’hôpitaux en 5 ans décidée par le ministère des finances[1]. Ici aussi, les discussions quant au maintien des investissements publics dans le secteur médical sont remises sur le devant de la scène.

      Si certains choix politiques sont semblables, les cas français et japonais sont néanmoins bien distincts

      Le 23 avril 2020, à l’heure où la France déplore 119 151 cas de malades confirmés et 21240 décès pour une population moitié moindre, le Japon (126 millions d’habitants) ne compte que 12061 personnes testées positives et 300 décès attribués au covid19. Si l’on se concentre sur la tendance globale, depuis janvier, l’épidémie de covid19 au Japon s’est propagée à un rythme régulier, avec un nombre de cas détectés qui a été multiplié par 10 tous les mois. Etant donné le temps d’incubation du SARS-CoV-2, environ 5 jours[1], ceci correspond à un taux de reproduction (le nombre moyen de transmissions par malade) moyen de l’ordre de 1,5.

      En comparaison, le cas de la France est très différent avec un nombre de cas détectés qui, entre la mi-janvier et la mi-mars quand le confinement a été déclaré, a été multiplié par 10000 ! Le taux de reproduction peut être évalué à 2,15. Cela semble assez proche du cas Japonais, mais, dans les faits, les conséquences de cette différence sont dramatiques - c’est le principe d’une exponentielle - avec un nombre de morts près de 100 fois plus importants en France qu’au Japon.

      Évolution de l’épidémie de covid19 au Japon et en France (d’après les données de l’European Centre for Disease Prevention and Control). Au 23 avril 2020, la base de données faisait état de 11 772 cas détectés et de 287 décès au Japon, et de 119 151 cas détéctés et de 21340 décès en France.

      D’autre part, malgré un nombre de tests qui peut paraître faible au regard d’autres pays, le rapport entre le nombre de cas détectés et le nombre de décès est de 42 au Japon. Il est de 5,6 en France. En comparaison, il est de 45 en Corée du Sud, vantée pour avoir su juguler l’épidémie grâce à des tests massifs. Il semble donc que le Japon retrouve une grande partie des cas de COVID-19, même si l’apparition de cas non traçables de plus en plus nombreux montre qu’il s’agit d’un problème complexe qui n’est pas maitrisé pour l’instant. De son côté, la France, qui n’a pas vu arriver l’épidémie et s’est retrouvée submergée, ne teste qu’environ 10% des cas : ceux qui sont dans un état critique et doivent aller à l’hôpital.

      Une tendance positive se dessine cependant : la courbe du nombre de cas/jour (histogramme bleu) descend côté français où le taux de reproduction R est donc clairement passé en dessous de 1. Cela semble aussi être le cas au Japon, grâce à la déclaration d’état d’urgence, même s’il est encore trop tôt pour être sûr que ce soit une tendance robuste. Il faut s’attendre néanmoins au Japon à une augmentation du nombre de décés par jour lié à l’augmentation des cas les jours et semaines précédentes.

      Ainsi, en comparaison de la France, le Japon a été relativement épargné par l’épidémie de covid19. Il a certainement bénéficié d’habitudes de sa population, une distanciation physique culturelle, le port fréquent du masque et une hygiène très présente, pour limiter la progression de l’épidémie. Le Japon n’a cependant pas pu éviter de déclarer l’état d’urgence, montrant que l’épidémie ne peut être jugulée que par des mesures fortes. Les semaines qui viennent vont être décisives pour ces deux pays qui doivent confirmer la décroissance de l’épidémie, pour la France organiser le déconfinement et pour le Japon faire repartir progressivement son économie. Plus généralement, si l’on peut déplorer l’impréparation de scénarii pourtant connus et analysés depuis plus de trente ans (voir à ce sujet les travaux de l’anthropologue Frédérick Keck[1]), cet épisode aura néanmoins montré, certes non sans coût, que l’impossible devenait possible, au moins pour un moment, lorsque volontés étatiques et citoyennes se conjuguaient. Peut-être est-il temps d’appréhender ce désastre comme une opportunité de réfléchir à la mondialisation des échanges tant de voyageurs que des marchandises pour la limiter au nécessaire aussi en vue d’une réduction de notre empreinte carbone, mais également d’évaluer le coût de la délocalisation des industries nationalement vitales. A un niveau local, cette occasion faitémerger la nécessité d’une réflexion sur l’orientation des investissements publics, tant dans le secteur hospitalier, que dans les structures d’accueil et d’habitat à destination des plus démunis, les épisodes épidémiques étant l’un des critères fondamentaux à l’origine de l’élaboration d’institutions publiques de logements permettant de « loger le peuple » afin de prémunir la sécurité (entre autres) sanitaire de chacun[2].

      http://japosphere.blogs.liberation.fr/2020/04/28/coronavirus-lexception-japonaise
      #chronologie

  • Iranian Kurdish refugees in Sulaimani hit hard by COVID-19 lockdown- Rudaw

    A large number of Iranian Kurdish families in Sulaimani have been left jobless amid the coronavirus lockdown, exacerbating their economic woes. Approximately 250 families in Sulaimani are political refugees who fled Iran fearing political persecution, seeking shelter in the Kurdistan Region

    #Covid-19#Iraq#KRG#Suleymanieh#réfugiés_politique#Iraniens#Pandemie#Economie#Travailleurs#Quarantaine#migrant#migration

    https://www.rudaw.net/english/kurdistan/260420201

  • Le temps des ouvriers. Le temps de l’#usine (1/4)

    Du début du XVIIIe siècle à nos jours, Stan Neumann déroule sur plus de trois siècles l’histoire du monde ouvrier européen, rappelant en une synthèse éblouissante ce que nos sociétés doivent aux luttes des « damnés de la terre ».

    Dès le début du XVIIIe siècle, en Grande-Bretagne, une nouvelle économie « industrielle et commerciale », portée par le textile, chasse des campagnes les petits paysans et les tisserands indépendants. Pour survivre, ils doivent désormais travailler contre salaire dans des fabriques (factories) qui rassemblent plusieurs milliers d’ouvriers, sur des métiers appartenant à des marchands devenus industriels. C’est la naissance de la classe ouvrière anglaise. Le travail en usine, le Factory System, où seul compte le profit, impose aux déracinés une discipline et une conception du temps radicalement nouvelles. Avec la révolution industrielle de la fin du XVIIIe siècle, ils subissent un dressage plus violent encore, sous la loi de machines qui réduisent l’ouvrier à un simple rouage.
    Surexploitée et inorganisée, cette classe ouvrière primitive, qui oppose à la main de fer de l’industrie naissante des révoltes spontanées et sporadiques, va mettre plusieurs générations à inventer ses propres formes de lutte, dans une alliance parfois malaisée avec les républicains anglais, inspirés par la Révolution française de 1789. Ses revendications sont sociales et politiques : réglementation du travail des enfants, salaires, durée du temps de travail, liberté syndicale, droit de grève, suffrage universel... Dans les années 1820, après des décennies de combats perdus, une classe ouvrière anglaise puissante et combative semble en mesure de faire la révolution.

    Temps complet
    La classe ouvrière a-t-elle disparu, ou simplement changé de forme, de nom, de rêve ? Conciliant l’audace et la rigueur historique, l’humour et l’émotion, le détail signifiant et le souffle épique, Stan Neumann (Austerlitz, Lénine, Gorki – La révolution à contre-temps) livre une éblouissante relecture de trois cents ans d’histoire. Faisant vibrer la mémoire des lieux et la beauté des archives, célébrissimes ou méconnues, il parvient à synthétiser avec fluidité une étonnante quantité d’informations. Les séquences d’animation, ludiques et inventives, et un commentaire dit par la voix à la fois présente et discrète de Bernard Lavilliers permettent de passer sans se perdre d’un temps à l’autre : celui du travail, compté hier comme aujourd’hui minute par minute, celui des grands événements historiques, et celui, enfin, des changements sociaux ou techniques étalés parfois sur plusieurs décennies, comme le processus de légalisation des syndicats ou du travail à la chaîne. En parallèle, le réalisateur donne la parole à des ouvriers et ouvrières d’aujourd’hui et à une douzaine d’historiens et philosophes, hommes et femmes, « personnages » à part entière dont la passion communicative rythme le récit. On peut citer Jacques Rancière, Marion Fontaine, Alessandro Portelli, Arthur McIvor, Stefan Berger, avec Xavier Vigna comme conseiller scientifique de l’ensemble des épisodes. Cette série documentaire virtuose, où l’expérience intime coexiste avec la mémoire collective, au risque parfois de la contredire, révèle ainsi combien nos sociétés contemporaines ont été façonnées par l’histoire des ouvriers.

    https://www.arte.tv/fr/videos/082189-001-A/le-temps-des-ouvriers-1-4

    #documentaire #film_documentaire #film
    #agriculture #cleasning #nettoyage #industrie #industrie_textile #industrialisation #expulsions_forcées #histoire #Ecosse #UK #exode_rural #déplacés_internes #IDPs #histoire #force_de_travail #classe_ouvrière #Highlands #désindustrialisation #compétition #factory_system #esclavage #Crowley #temps #contrôle_du_temps #salaires #profit #filatures #travail_d'enfants #enfants #femmes #New_Lanark #Robert_Owen #silent_monitor #école #Institut_pour_la_formation_du_caractère #paternalisme #contrôle #tyrannie #liberté_de_commerce #grève #émeute #insécurité_sociale #pauvreté #workhouse #criminalisation_de_la_pauvreté #résistance #Enoch #Great_Enoch #John_Ludd #général_Ludd #luddisme #luttes #insurrection #cadence #progrès_technique #accidents_de_travail #Angleterre #insurrection_luddite #massacre_de_Peterloo #odeur #intercheangeabilité #temps_des_ouvriers

    Sur le silent monitor :

    This small four-sided wooden block was known as a ’silent monitor’ and was used by Robert Owen as a means of imposing discipline at his #New_Lanark_Mills.

    Robert Owen was strongly opposed to the use of corporal punishment, so in order to keep discipline at the New Lanark Mills, he devised his own unique system. The ’silent monitors’ were hung next to each worker in the mills, with each side displaying a different colour. ’Bad’ behaviour was represented by the colour black; ’indifferent’ was represented by blue; ’good’ by yellow; and ’excellent’ by white. The superintendent was responsible for turning the monitors every day, according to how well or badly the worker had behaved. A daily note was then made of the conduct of the workers in the ’books of character’ which were provided for each department in the mills.


    https://www.peoplescollection.wales/items/10456

    New Lanark :

    • Le temps des ouvriers (4/4)Le temps de la destruction

      Stan Neumann déroule sur plus de trois siècles l’histoire du monde ouvrier européen. Dernier volet : dans les années 1930, la classe ouvrière semble plus puissante que jamais. Le succès, en 1936, du Front populaire en France témoigne de cette force. Pourtant, les ouvriers européens vont de défaite en défaite...

      En Espagne, la dictature franquiste, soutenue par Hitler et Mussolini, triomphe en 1939. Puis dans l’Europe asservie, l’Allemagne nazie fait des ouvriers des pays vaincus des « esclaves du XXe siècle » : « travail obligatoire » pour les ouvriers de l’ouest de l’Europe, « extermination par le travail » des juifs, des Tsiganes et des prisonniers de guerre soviétiques.
      Après 1945, la guerre froide génère de nouvelles fractures. En Occident, on achète la paix sociale en améliorant les conditions de vie et de travail dans la plus pure tradition fordiste. À l’Est, le pouvoir est confisqué par des partis uniques qui prétendent représenter les ouvriers tout en les privant des libertés syndicales avec le soutien de l’URSS et de ses tanks. L’espoir renaît dans les années 1970, qui voient fleurir les utopies révolutionnaires, des Lip à Solidarnosc. Mais c’est un chant du cygne. Avec son cortège de misère et de chômage, la désindustrialisation a commencé.

      Temps complet
      La classe ouvrière a-t-elle disparu, ou simplement changé de forme, de nom, de rêve ? Conciliant l’audace et la rigueur historique, l’humour et l’émotion, le détail signifiant et le souffle épique, Stan Neumann ("Austerlitz", « Lénine »", ""Gorki"" – ""La révolution à contre-temps") livre une éblouissante relecture de trois cents ans d’histoire. Faisant vibrer la mémoire des lieux et la beauté des archives, célébrissimes ou méconnues, il parvient à synthétiser avec fluidité une étonnante quantité d’information. Les séquences d’animation, ludiques et inventives, et un commentaire dit par la voix à la fois présente et discrète de Bernard Lavilliers permettent de passer sans se perdre d’un temps à l’autre : celui du travail, compté hier comme aujourd’hui minute par minute, celui des grands événements historiques, et celui, enfin, des changements sociaux ou techniques étalés parfois sur plusieurs décennies, comme le processus de légalisation des syndicats ou du travail à la chaîne. En parallèle, le réalisateur donne la parole à des ouvriers et ouvrières d’aujourd’hui et à une douzaine d’historiens et philosophes, hommes et femmes, « personnages » à part entière dont la passion communicative rythme le récit. On peut citer Jacques Rancière, Marion Fontaine, Alessandro Portelli, Arthur McIvor, Stefan Berger, avec Xavier Vigna comme conseiller scientifique de l’ensemble des épisodes. Cette série documentaire virtuose, où l’expérience intime coexiste avec la mémoire collective, au risque parfois de la contredire, révèle ainsi combien nos sociétés contemporaines ont été façonnées par l’histoire des ouvriers.

      https://www.arte.tv/fr/videos/082189-004-A/le-temps-des-ouvriers-4-4

      #poing_levé #Front_populaire #Espagne #Fígols #mujeres_libres #guerre_d'Espagne #mineurs #alcolisme #violence_domestique #expulsions_collectives #travailleurs_étrangers #Volkswagen #nazisme #extermination_par_le_travail #Berlin #Pologne #Hongrie #superflu #rock_and_roll #mai_68 #Sochaux #Lip #Solidarność #Solidarnosc #Anna_Walentynowicz #printemps_de_Prague #NUM #autonomie_ouvrière #Arthur_McIvor #Margareth_Thatcher #muséification #désindustrialisation #invisibilisation #uberisation

  • Indians living in Erbil offer free lunch, food baskets to laborers out of work amid COVID-19 lockdown - Kurdistan 24

    A number of Indian nationals living in the Kurdistan Region’s capital of Erbil have been offering free meals and food baskets to residents now out of work or otherwise facing financial hardship as a result of curfews and other measures enacted by the government to curb the spread of the coronavirus pandemic.

    As part of these measures, the Kurdistan Regional Government (KRG) imposed a regionwide lockdown in early March, causing a near shutdown of the economy that has affected daily wage earners particularly harshly.

    #Covid-19#Iraq#KRG#Travailleurs#Indiens#Aide_publique#Alimentation#Quarantaine#migrant#migration

    https://www.kurdistan24.net/en/news/c754623e-6255-45d6-a834-066eb0eb3204

  • 3,474 Health Workers Tested Positive for COVID-19, Says Turkish Medical Association - Bianet English
    According to a report by Turkish Medical Association (TTB), 3,474 health workers, 38 percent of whom are physicians, have tested positive for COVID-19. In İstanbul, 2,005 health workers, including 960 physicians, have been diagnosed with the virus.

    #Covid-19#Turquie#Travailleurs#Santé#Médecin#Personnel_médical#Politique#migrant#migration

    http://bianet.org/english/health/223317-3-474-health-workers-tested-positive-for-covid-19-says-turkish-medica

  • ‘We Worked During Curfew as Well; It is a Construction Work, is it Really Urgent?’ - Bianet English

    On the construction of Niğde-Ankara Highway, there are around 40 subcontracting firms and around 4 thousand 200 workers in total. Everyone is equally concerned. They have to come here, risking death. They do not have any guarantee, they are really afraid of unemployment.
    “We are told that if we want to leave, we are free to do so. We can, of course, leave. We would rather starve to death than endure so many insults. But we have families, we are not responsible only for ourselves.”
    The worker speaking to bianet says that keeping their “social distance” is not possible at the constrcution site and even though they asked for a mask to use there, they could not even receive it:

    "Our working conditions are already hard, sometimes we cannot take a break for lunch. When it is heard on social media that there are positive cases at the construction site, a disinfectant is left at the dining hall and that was all. A single disinfectant at the entrance of a dining hall to be used by hundreds of people in the morning and in the evening...

    #Covid-19#Turquie#Réfugiés#Travailleurs#Exploitation#Encampement#Quarantaine#Logement#expulsion#Camp#migrant#migration

    http://bianet.org/english/labor/223312-we-worked-during-curfew-as-well-it-is-a-construction-work-is-it-reall

  • Refugees: How can we stay at home when we can’t make it out ? Multeci Medyasi
    We talked about the corona days of Iranian workers in Denizli, where a lot of refugees live. Indicating that they could not benefit from any rights because they had no insurance, Iranian refugees said that those who could not pay their rent were expelled from their homes.

    Indicating that he was called to work daily in the industry, Iranian Worker Esmaeil Fattahi stated that he was completely unemployed after the epidemic and said, “We couldn’t earn money to manage us during the normal working period. We lived in misery and couldn’t even meet our daily needs. There is no social assistance right now, we are in a very difficult situation. ” Stating that the landlords have a problem in renting, Fattahi said, “They already wanted more rent than the refugees. Now, in this difficult process, they do not agree to postpone rent. In other provinces, I learned that my friends were thrown out of the house. ”
    Refugee Does Not Seek Right to Workers

    Not only refugees from Turkey is also the difficult situation of workers Fattah said, "This is how the workers will stay in quarantine? There are bills. Even when a worker is working, he hardly manages himself, how will he do it now? There are thousands of employees under the age of 20 who make a living. There are at least legal right of Turkish workers, does not meet the right of the sacked workers refugees, "he said.

    What the UN nor the government of Turkey said that they receiving financial support from the following in expressing Fattah continued, "Already the refugees were only being used as a political trump card in advance. In the most recent Pazarkule example, refugees have been put forward as trump cards and have been subjected to violence. How can the government not give enough support to its people to refugees? The public does not know when this epidemic will end, and when it will win its bread. ”

    Stating that Iranian immigrants’ health insurance was cut off at the beginning of the year, Fattahi stressed that the demand for health insurance was urgent, saying that he paid 200 lira treatment and 250 lira medication money in the hospital he went to two months ago.
    ’How To Stay At Home Refugee’

    The Iranian refugee Arsalan Nejati, who earned his living by doing barista (bartending) work in the cafes, said that the cafe he worked for was also closed. “I have a total of 500 lira. We don’t know when the outbreak will end. I asked for the money from the last boss sent 200 liras. Thank you, but when you exchange food, that money is gone. There are many unemployed and free refugees. What will they do? ” Nejati said that they had difficulties economically.

    Saying that his friend, who was thrown out of the house because he could not pay rent, moved to him, Nejati said, “Come on, I bought that friend home. There are refugees who will stay on the street because they cannot pay rent. Don’t we have a right to life? Everyone is called stay at home, but where should the refugees from the house stay? ” asked.

    Nejati, who stated that he called the United Nations Refugee Representative and conveyed the troubles, said “Manage us”. We are asking how we will manage! If we are sick, the cheapest medicine is 50 liras. We do not have insurance, how we will manage, ”he said.
    ’The cost of staying at home is devastating’

    Iranian Meysam, who was fired, said, “I am Iranian, but when they emigrate, they do not look where they are from. I have been unemployed for three months. Now there are epidemics and workplaces are closed. How do I pay the rent, the bill? “There’s a devastating expense to stay at home, I can’t afford it every day.”

    #Covid-19#Turquie#Réfugiés#Travailleurs#Iraniens#Encampement#Quarantaine#Logement#expulsion#Camp#migrant#migration

    https://multecimedyasi.org/2020/04/07/multeciler-gecinemiyorken-nasil-evde-kalalim

  • Bordering under the corona virus pandemic

    In our recent book Bordering (Yuval-Davis, Wemyss & Cassidy, 2019), we discuss the paradoxical phenomenon that, under neoliberal globalisation, borders did not disappear but rather proliferated off-and in-shore, from consulates across the globe to everyday spaces like railways and places of work. We described the functioning of bordering as processes rather than static boundary lines that, like computer firewalls, are invisible to some, impermeable to many others. We showed the ways these have crucially contributed to multi-scalar – from the global to the local – inequalities and precarities, forcing more and more people to be precariously stuck in limbo grey borderzones with no possibility of building regular lives with civil, political and social rights.

    It is important to examine the ways the pandemic has affected these processes of everyday bordering, both locally and globally. Of course, it is far too early to know, or even predict, the longer-term transformations in bordering that the pandemic will bring. However, it is safe to say that, as after earlier major crises, such as 9/11 and the AIDS crises – to mention just two major transformatory crises in recent decades – the ‘new normal’ is not going to go back to how things were, in several major ways. Everyday bordering, from the lockdown of individuals in their homes to the lockdown of regional and national borders, is at the heart of the technologies of control used to try to contain the pandemic and it is thus hard to believe that free movement would be restored any time soon.

    Except that, as we’ve shown in our book, free movement has never been free for most people. Border controls have been operating like computers’ firewalls, invisible to some, blocking many others, with money and required skills for the neoliberal economy being the main facilitators. We can see these firewalls continuing to operate today as well – at different ends of the scale, the super-rich flying in private jets able to travel without being subject to the usual restrictions and seasonal workers from Eastern Europe being flown into the UK by the farming industry to ensure that fruit is being picked. Two weeks into the lockdown, the Home Office published its guidance for post-Brexit immigration rules aimed at preventing low paid workers – the key workers on which healthcare services are depending – from working in the UK.

    These are just some of the paradoxes of ‘lockdown’ and ‘social distancing’ policies. On the one hand, a neo-liberal governmentality that puts the onus of responsibility on the individuals, where people are required to isolate themselves at home and keep away from others, while others are forced to carry on working – not only because they fulfil essential medical, social and economic roles, but also because many of them would not get any money to live on if they stop working.

    This is just one of the intersectional growing inequalities impacts of everyday bordering. Given their disproportionate presence in frontline health and public services, the percentage of BAME people who have died under the pandemic is still unknown but feared to be to very high. Of course, this is not just due to the kind of jobs they do, but also their poor and crowded living conditions, as well as a distrust of governmental and scientific authorities which have not helped them in the past.

    In addition to unequal class and racialised effects, the lockdown bordering has also had a major gendered effect, such as a sharp rise in domestic violence, as can be expected when nuclear family members are locked down together.

    In our book we discussed the ways everyday bordering as a top down technology of control has been reinforced by and reinforces the growth of bottom up nativist extreme right movements, which have brought to power authoritarian rulers in many countries in the globe and arguably Brexit in the UK. Blaming and scapegoating the ‘Others’ have been a major multi-scalar reaction to the pandemic, from Trump calling the corona virus ‘the Chinese virus’, to social media blaming George Soros in the traditional antisemitic blood conspiracy theories, to street hate crimes, including health workers reporting abuse from strangers for leaving their homes.

    One of the positive ‘side effects’ of the lockdown has been the development and reinforcement of mutual aid groups in local communities. Neighbours have got to know each other, help elderly and vulnerable people with their shopping etc. However, the other side of the strengthening of local bonds has been the rejection of ‘others’. Local media report people crossing county borders’ violating lockdowns – Kent Online reported ‘Lockdown louts from London have been fined after once again invading the county’ and being found by ‘enforcement officers from the council who were patrolling the area’. This is aided by regional bordering policies, which in some countries, such as Italy, has meant the official closure of regional borders for non-essential traffic, while in the UK, Sussex police, for example, praised ‘the amazing community spirit across Sussex’, whilst noting that ‘Unfortunately, a small number of people from outside of the county deemed it appropriate to visit the area’.

    The aim of this blog post is not to oppose bordering policies in the age of the pandemic, but rather to argue that using it as almost the only counter-pandemic measure is dangerous, both at present and for the future.

    At present, we have seen that when voluntary lockdown policies are used, without mass testing and sufficient protective equipment for those who are not in isolation, they cost many lives as well as create psychological, social and economic hardships. In comparison, other states, including Germany and South Korea, have used mass testing and contact tracing to slow down the rate of infection.

    Moreover, these borderings, like the borderings we described in our book, are an intersection of political projects of governance and of belonging. Very few states, including Ireland and Portugal, have recognised all migrants to be full entitled members of society during the pandemic; only a few states have recognized the right of all members of societies for minimum income during the pandemic, and policies aimed at exclusion and deprivation of all those in national and global grey limbo zones endanger the lives of millions across the globe.

    Everyday bordering policies are evolving in which the surveillance of people is reaching sci-fi dimensions. Similar COVID-19 related technologies are being developed globally by authoritarian and liberal governments. While Israel has authorised counter-terrorism surveillance to track corona virus patients, compulsory colour-coded health apps determine whether individuals can travel in China, while Russia uses face recognition technologies to enforce self-isolation. In Hong Kong and Singapore, COVID 19 apps identify locations and contacts of individuals. European governments are copying these apps whilst also collecting telecom data and using drones to spot transgressors.

    Such developments combine with rumours and debates about national and global digital monitoring of vaccinations, adding force to Yuval Noah Harari’s speculations that the epidemic may normalise biometric surveillance with authorities becoming able to detect people’s emotions as well as their lifestyles and whereabouts. This would be the utmost paradox: a borderless world with the most tightly operated everyday bordering technology.


    https://acssmigration.wordpress.com/2020/04/20/bordering-under-the-corona-virus-pandemic-georgie-wemyss-and-nira-yuval-davis/amp/?__twitter_impression=true

    #frontières #coronavirus #covid-19 #bordering #frontiérisation #surveillance #frontières_mobiles #riches #pauvres #immobilité #hyper-mobilité #travailleurs_étrangers #confinement #responsabilité_individuelle #travail #inégalités #everyday_bordering #classes_sociales #inégalités_raciales #violence_domestique #altérité #solidarité #racisme #xénophobie #surveillance_biométrique #drones

    La conclusion autour d’un #paradoxe :

    This would be the utmost paradox: a borderless world with the most tightly operated everyday bordering technology.

    Pour @etraces :

    Everyday bordering policies are evolving in which the surveillance of people is reaching sci-fi dimensions. Similar COVID-19 related technologies are being developed globally by authoritarian and liberal governments. While Israel has authorised counter-terrorism surveillance to track corona virus patients, compulsory colour-coded health apps determine whether individuals can travel in China, while Russia uses face recognition technologies to enforce self-isolation. In Hong Kong and Singapore, COVID 19 apps identify locations and contacts of individuals. European governments are copying these apps whilst also collecting telecom data and using drones to spot transgressors.

    Pour @karine4 :

    Moreover, these borderings, like the borderings we described in our book, are an intersection of political projects of governance and of belonging. Very few states, including Ireland and Portugal, have recognised all migrants to be full entitled members of society during the pandemic; only a few states have recognized the right of all members of societies for minimum income during the pandemic, and policies aimed at exclusion and deprivation of all those in national and global grey limbo zones endanger the lives of millions across the globe.

    ping @isskein @mobileborders

  • #Coronavirus : manquant de bras, l’Italie va régulariser 200.000 sans-papiers

    Des secteurs essentiels comme celui de l’#agriculture souffrent du manque de #main-d'oeuvre qui menace les #récoltes. Un #décret va permettre la régularisation d’environ 200.000 clandestins qui pourront obtenir un contrat dans des #entreprises_agricoles. Cela déclenche des attaques de la Ligue de Matteo Salvini.
    L’agriculture italienne manque de bras. Environ 300.000 travailleurs saisonniers, essentiellement en provenance de l’Est de l’Europe, qui sont restés bloqués chez eux à cause du coronavirus. Confagricoltura et Coldiretti, les principaux représentants du secteur agricole transalpin, demandent la régularisation d’une partie des 600.000 sans-papiers présents en Italie. Beaucoup travaillent déjà de manière illégale dans les champs. La proposition est soutenue par les ministres de l’Intérieur, du Mezzogiorno, du Travail et de l’Agriculture. Un décret sera prochainement adopté pour régulariser environ 200.000 clandestins qui auront la possibilité d’obtenir un contrat de travail dans la filière agricole. Cela représenterait la plus importante régularisation depuis plus d’une décennie en Italie.
    La survie du secteur agricole est en jeu

    La ministre de l’Agriculture Teresa Bellanova la réclamait depuis le mois de janvier, avant l’épidémie de coronavirus qui a provoqué dans certaines régions une baisse de 50 % des récoltes. L’Italie, deuxième producteur de fruits et légumes en Europe avec un chiffre d’affaires de 13 milliards d’euros, ne peut se le permettre. Selon la Coldiretti, 40 % des produits de la terre pourraient ne pas être récoltés cette année. La prolongation des permis de séjour et l’instauration prochaine de « couloirs verts » pour faire venir de Roumanie près de 110.000 travailleurs saisonniers et leur garantir un contrat jusqu’au mois de décembre sont des mesures nécessaires mais insuffisantes.

    « Il y va de , insiste la ministre qui rappelle que l’urgence, déterminée par l’absence de main-d’oeuvre, met en danger les produits, le travail, les investissements, la nourriture. La régularisation des sans-papiers est une question économique mais aussi sociale et humanitaire. Dans le sud, ils vivent dans des bidonvilles et sont exposés à la faim, aux risques sanitaires et à . »

    Polémique sur les clandestins

    La Ligue de Matteo Salvini s’insurge et dénonce « un nouvel appel d’air pour une invasion de migrants avec un retour des débarquements sur les côtes italiennes ». Les chiffres du ministre de l’Intérieur offrent un démenti avec 2.800 arrivées au cours du premier trimestre 2020 et des frontières qui restent fermées. L’économiste et ancien président de la Sécurité sociale italienne Tito Boeri propose quant à lui d’aller plus loin en régularisant la totalité des clandestins. La moitié est constituée de femmes d’Europe de l’Est et d’Amérique du Sud travaillant comme aides aux personnes âgées mais aussi de nombreux ouvriers des travaux publics. Autant de secteurs indispensables pour surmonter la crise et envisager la relance de l’économie.

    https://twitter.com/LesEchos/status/1252181051889332231

    #régularisation #sans-papiers #Italie #travailleurs_étrangers #travail

    Ajouté à la métaliste agriculture / coronavirus :
    https://seenthis.net/messages/836693

    ping @karine4 @isskein

    • L’appello di economisti, giuristi e virologi : « Regolarizzare gli immigrati in tutti i settori economici »

      La proposta di una sanatoria per dare un permesso di soggiono agli invisibili, potenziale bacino di manovalanza per la criminalità organizzata.

      Un appello con 360 firmatari - tra economisti, immunologi, virologi, giuristi ed esperti di immigrazione - per sollecitare la regolarizzazione degli immigrati irregolari non solo in agricoltura ma anche in tutti gli altri settori economici del Paese. Gli «invisibili», infatti, rischiano di essere uno dei maggiori fattori di rischio nella nascita di nuovi focolai dell’epidemia di coronavirus. Inoltre rappresentano un potenziale bacino di manovalanza per la criminalità. La via legislativa potrebbe essere quella di una sanatoria tramite dichiarazione di un datore di lavoro, che consente di ottenere un permesso di soggiorno e lavoro temporaneo che, finita la fase di emergenza, sarà sottoposto all’iter previsto per questi tipi di permesso.

      «Sta circolando in questi giorni nelle commissioni parlamentari la bozza di un disegno di legge per la regolarizzazione degli immigrati irregolari in agricoltura - si legge nel documento - In questo nostro appello vogliamo sottolineare l’opportunità di estendere la proposta agli irregolari che lavorano in tutti gli altri settori economici del Paese (e, in primis, in quelli cruciali dei servizi alla persona, dell’artigianato, dell’industria e dei servizi ad essa collegati). Non soffermandoci sulle evidenti motivazioni umanitarie ma su quelle di carattere sanitario, di sicurezza, economico e sociale».

      I firmatari espongono poi le motivazioni e i contenuti della proposta.
      Motivazioni
      "I costi psicologici, sociali ed economici della paralisi della vita sociale ed economica a cui siamo stati costretti per combattere il coronavirus sono drammatici e sotto gli occhi di tutti. E’ urgente passare il prima possibile alla fase 2 ma dopo 6 settimane di distanziamento sociale il declino dei nuovi positivi, e soprattutto dei decessi, appare ancora troppo lento, soprattutto nella regione Lombardia, che è il cuore produttivo del paese e anche, di gran lunga, la regione più colpita con più del 50 percento dei decessi.

      E’ stato sottolineato di recente come la presenza di centinaia di migliaia di migranti irregolari e «invisibili» possa essere un problema serio in questo frangente. Secondo le stime più recenti (ISPI, 2020) i migranti irregolari sono circa 600mila vivono in genere occupando in molti piccole abitazioni e, anche in caso di malattia, ritardano il contatto coi medici a meno di versare in condizioni veramente gravi. Un’indagine ISFOL (2014) sottolinea come gran parte di essi lavora fuori dal settore agricolo (13.6% sono artigiani, operai specializzati o agricoltori e 72,6% svolgono professioni non qualificate che includono badanti, colf e piccolo commercio in grandi centri urbani). Non si hanno stime della loro distribuzione regionale ma è del tutto presumibile che siano concentrati in misura maggiore nelle regioni a maggiore attività economica del paese che sono anche le più colpite (in Lombardia, applicando le percentuali di migranti regolari gli irregolari sarebbero almeno 100mila). E’ del tutto evidente dunque che la presenza di un gran numero di irregolari nelle aree oggi più a rischio rende di fatto altamente aleatorie le probabilità di successo di attività di somministrazione di test sanitari, tracciamento e monitoraggio di massa necessarie per assicurare il successo della fase due. In parallelo, con la graduale riapertura delle attività economiche gli irregolari rischiano di essere uno dei maggiori fattori di rischio nella nascita di nuovi focolai".

      "Oltre a queste dirimenti motivazioni di carattere sanitario - continua il testo - è ben noto che gli irregolari costituiscono un potenziale bacino di manovalanza per la criminalità con rischi che aumentano quando, in momenti come questi, condizioni di vita decente sono ulteriormente precluse. Da un punto di vista economico è stato sottolineato più volte come lavoratori immigrati irregolari e poco qualificati sottrarrebbero opportunità occupazionali a lavoratori italiani e determinerebbero una concorrenza al ribasso sul costo del lavoro che finisce per peggiorare dignità del lavoro e condizioni di vita anche dei lavoratori italiani a bassa qualifica. L’improvvisa scarsità di stagionali stranieri a seguito della chiusura delle frontiere per la pandemia ha evidenziato come i mercati del lavoro non siano in realtà così flessibili da ipotizzare una facile sostituzione tra lavoratori italiani e stranieri, lontani per mansioni e localizzazione. La regolarizzazione dei lavoratori stranieri avrebbe in questo caso un potenziale doppio beneficio. Rendere più facile lo spostamento tra diverse aree di chi già si trova nel nostro paese e, attraverso la sanatoria e la regolarizzazione, ridurre quelle condizioni di scarsa dignità e precarietà che rendono purtroppo il lavoro degli immigrati irregolari più «competitivo» rispetto a quello di lavoratori italiani che non accettano quelle condizioni.

      In linea di principio, come sostenuto da forze politiche del nostro Paese, gli irregolari potrebbero essere espulsi. I dati recenti insegnano però che, neanche nella stagione politica nella quale il ministro dell’interno ha sostenuto con forza questa strategia, i «risultati» delle politiche di rimpatrio sono stati significativi. L’espulsione di massa degli irregolari si è dimostrata non praticabile per diversi motivi (onerosità dei costi complessivi di identificazione e trasferimento nei paesi di origine, difficoltà di stipulare accordi con i paesi di origine). Tanto meno si può pensare sia praticabile per sventare i rischi sanitari di cui sopra in breve tempo e in un momento difficile come questo.

      In conclusione, motivazioni non soltanto umanitarie, ma anche sanitarie, di sicurezza, economiche e sociali suggeriscono l’opportunità della regolarizzazione degli irregolari seguendo una via già tracciata dal governo portoghese".
      Contenuti e forma legislativa
      «Trovando fondamento in queste motivazioni - sostengono ancora i firmatari - proponiamo dunque di estendere a tutti gli altri settori produttivi oltre quello agricolo la regolarizzazione dei migranti irregolari. La via suggerita è quella di una sanatoria tramite dichiarazione di un datore di lavoro che consente di ottenere un permesso di soggiorno e lavoro temporaneo che, finita la fase di emergenza, sarà sottoposto all’iter previsto per questi tipi di permesso. In questo modo, seppure in misura limitata, la regolarizzazione potrà contribuire con il versamento di contributi al finanziamento dell’ingente impegno di spesa pubblica necessario per superare questa crisi.

      Per rendere operativa la nostra proposta sarebbe necessario modificare la proposta di decreto legge attualmente in discussione in Commissione Lavoro che limita questa possibilità ai settori dell’agricoltura, della pesca e della silvicoltura estendo la misura agli altri settori produttivi. Inoltre dato che la regolarizzazione è innanzitutto per ragioni di salute pubblica, occorre rilasciare a tutti gli stranieri in condizioni di soggiorno illegale un permesso di soggiorno per asilo, in base ad art. 11 DPR 394/1999 e art. 10 Cost., prevedendo che sia utilizzabile da subito per iscriversi al SSN e al Centro per l’impiego e per accedere alle provvidenze di assistenza sociale. Le motivazioni umanitarie spesso non bastano a convincerci a realizzare passi avanti verso il progresso civile. Sarebbe però un grave errore per la nostra classe politica non fare quei passi quando queste s’incontrano, come in questo caso, con ragioni di convenienza ed opportunità».

      https://www.repubblica.it/politica/2020/04/25/news/appello_regolarizzazione_immigrati_agricoltura-254873997

      –--------

      @karine4 et @isskein —> faits intéressants :
      – il y a aussi des virologues qui ont signé
      – on met en avant le fait que la régularisation réduit les #risques liés à la #sécurité (et notamment le #risque que ces personnes appelées dans l’appel « invisibles » risquent de tomber dans les mains de la #criminalité (et notamment la #criminalité_organisée)
      – le fait de souligner que "en théorie les irréguliers pourraient être expulsés, mais dans les faits il ne le sont pas (et ils expliquent les raisons qu’on connaît)

      Mais... la proposition se base sur des permis de séjours temporaires temporaires en un premier temps, mais au-delà du secteur de l’agriculture comme d’autres propositions le suggèrent :

      Per rendere operativa la nostra proposta sarebbe necessario modificare la proposta di decreto legge attualmente in discussione in Commissione Lavoro che limita questa possibilità ai settori dell’agricoltura, della pesca e della silvicoltura estendo la misura agli altri settori produttivi. Inoltre dato che la regolarizzazione è innanzitutto per ragioni di salute pubblica, occorre rilasciare a tutti gli stranieri in condizioni di soggiorno illegale un permesso di soggiorno per asilo, in base ad art. 11 DPR 394/1999 e art. 10 Cost., prevedendo che sia utilizzabile da subito per iscriversi al SSN e al Centro per l’impiego e per accedere alle provvidenze di assistenza sociale.

    • Italy to give 600,000 migrants the right to stay

      Ministers thank unregistered workforce that proved essential during lockdown.

      More than half a million illegal migrants in Italy will be given permits to stay and work under plans put forward by the government, which said they had proved essential for caring for the elderly and picking crops in recent weeks.

      https://www.thetimes.co.uk/article/italy-to-give-600-000-migrants-the-right-to-stay-n3l8935bj

      #paywall

    • La grande bufala della regolarizzazione

      Permettere ai migranti già presenti in Italia di rimanerci solo per spaccarsi la schiena corrisponde ad una visione del mondo opposta rispetto a quella di chi chiedeva una sanatoria.

      Nella mattinata di mercoledì 13 maggio la battaglia portata avanti dalla Ministra delle politiche agricole, alimentari e forestali Teresa Bellanova ha finalmente sortito qualche effetto, facendo trovare a Partito Democratico e Movimento Cinque Stelle un accordo che per settimane era sempre stato rinviato: quello sulla regolarizzazione dei migranti.

      Il motivo per cui la Ministra la stessa sera nell’annunciarlo era quasi in lacrime non è l’aver riconosciuto a tante persone la possibilità di vivere legalmente su territorio italico, ma il fatto di aver in cuor suo abbandonato la lotta per l’uguaglianza che l’aveva portata nei lontani anni Ottanta ad essere in prima fila nella lotta al caporalato. La scelta di indicare Bellanova lo scorso settembre per un ministero che ha così tanto a che fare con il mondo del lavoro era stata accolta positivamente da molti, perché per quanto abbia come titolo di studio la terza media avrebbe potuto compensare con l’esperienza diretta, essendo stata una bracciante a partire dai 14 anni, poi una sindacalista della CGIL e solo in seguito una deputata dei Democratici di Sinistra prima e del Partito Democratico poi, per passare infine a Italia Viva.

      Nonostante i suoi trascorsi, negli ultimi anni il suo interesse per le tematiche delle migrazioni e del lavoro ha definitivamente cambiato segno: ha sostenuto convintamente sia il Jobs Act (contestato persino dai sindacati confederali di cui era stata paladina), sia l’abolizione dell’articolo 18 dello Statuto dei lavoratori, ossia la legge sui licenziamenti, scontrandosi più volte con i lavoratori in qualità di vice ministra dello Sviluppo economico tra il 2016 e il 2018. Per tutti questi motivi, quando a metà aprile Bellanova ha rilanciato sulle pagine del Il Foglio la proposta di una regolarizzazione, gli attivisti per i diritti dei migranti hanno appreso con moderato entusiasmo la notizia e hanno continuato a ritenere quella della sanatoria l’unica soluzione percorribile.

      Questo naturalmente non certo per la scelta singolare della ministra di intervenire su un quotidiano di destra (a bassa diffusione e di cui non è nemmeno nota la tiratura) e non solo per l’uso di espressioni quali “dare risposte al presente per mettere a dimora il futuro” che allontanano la Ministra dai giorni in cui rimproverava a Bersani di utilizzare termini vaghi o incomprensibili. Senza contare che mentre a fine marzo il Portogallo votava un’ordinanza per dare maggiori tutele alle persone in attesa di regolarizzazione (cioè non una regolarizzazione a tutti gli effetti come alcuni hanno scritto, ma un decisivo passo avanti in termini di tutele), Bellanova faceva pubblicare sul sito del suo ministero un appello alla Grande Distribuzione Organizzata in vista della Pasqua che diceva: «Acquistate ancora più prodotti italiani, assicurate anche la presenza nei vostri negozi dei prodotti della tradizione pasquale».

      Non esattamente le stesse priorità degli attivisti (Legal Team Italia, Campagna LasciateCIEntrare, Progetto MeltingPot Europa e Medicina Democratica in primis) che poco dopo l’inizio dell’emergenza avevano chiesto una sanatoria subito, senza fare distinzioni legate all’esercizio o meno di una professione, e senza avere come riferimento un datore di lavoro (cosa che invece era stata richiesta da altre realtà). Giorno dopo giorno questa idea raccoglieva consensi e gli attivisti si incontravano virtualmente, fornendo riflessioni e analisi che sarebbero state molto utili al Governo, ma anche ai tanti che non sanno che il migrante irregolare, tanto per fare un esempio pratico, non può proprio iscriversi al Sistema Sanitario Nazionale, e non ha di conseguenza un medico di base cui rivolgersi, e se va al Pronto Soccorso c’è l’eventualità di un controllo che può portare alla sua espulsione o ad essere recluso in un CPR. Ma in realtà tutti noi rischiamo la salute per il suo silenzio forzato, dunque c’è un valido motivo in più per regolarizzare la sua presenza. E poi ci sono i tanti migranti che sono stati regolari per un po’, ossia finché hanno avuto un lavoro, ma poi l’hanno perso e sono così divenuti irregolari. Moltissimi lavoratori originari dell’Europa Orientali sono infatti usciti dall’Italia allo scoppio della pandemia e non sono potuti tornare a causa della chiusura delle frontiere

      Colpevolmente la ministra non ha mai condiviso queste informazioni necessarie per arrivare ad una valutazione, e forse ha fatto leva prodotta sulla confusione creata da anni di allarmismi ingiustificati in tema di immigrazione quando nel suo intervento sul Foglio il 14 aprile ha delineato due urgenze: «la salute, in primis, e poi fronteggiare l’urgenza, determinata dall’assenza di manodopera, che sta investendo in modo pesantissimo l’agricoltura del nostro paese e che mette a repentaglio prodotti, lavoro, investimenti, cibo. Che rischia di mandare in enorme sofferenza le nostre aziende agricole e che nelle prossime settimane, quando saranno arrivati a maturazione molti raccolti, può determinare l’irreparabile. Mentre la filiera alimentare è impegnata con enormi sforzi a garantire cibo al paese, non si può, allo stesso tempo, lasciare marcire i prodotti nei campi e fare i conti con l’emergenza alimentare che sta investendo parti sempre più ampie della popolazione». Insomma: «siano i migranti a spaccarsi la schiena per noi: regolarizzare conviene!».

      E aggiungeva una sentenza: «Sia ben chiaro. Non esistono filiere sporche».

      Filiere che invece sono ben documentate. Ne hanno scritto numerose ong e associazioni nei loro report, e poi autori come Stefano Liberti, Yvan Sagnet, Antonello Mangano, Francesco Caruso, Stefania Prandi e il compianto Alessandro Leogrande. Ne hanno parlato attraverso il cinema Andrea Segre, Andrea Paco Mariani, Stefano Liberti ed Enrico Parenti. Con la legge 199/2016 di cui la ministra va fiera il caporalato non è certo defunto, anzi; come sintetizza il sindacalista Giovanni Minnini sul Manifesto è “inapplicata proprio nella parte che oggi sarebbe più necessaria, cioè: l’incontro della domanda e offerta di lavoro (il collocamento) e l’accoglienza dignitosa per i lavoratori stagionali.” Ed è un altro sindacalista la persona che più si è spesa sul campo per una degna regolarizzazione, Aboubakar Soumahoro (USB), che dando conto quotidianamente delle condizioni nei campi si è sempre rivolto tanto alle istituzioni, quanto ai consumatori. Così siamo arrivati ad una concessione fatta dal governo solo a chi si trova già sul territorio con un permesso scaduto, o con un lavoro irregolare, previa domanda del datore di lavoro, che dovrà autodenunciarsi rivolgendosi poi all’Inps o alla Questura e pagare 400 euro a domanda (soldi che magari vorrà farsi ridare poi dal lavoratore, come già successo in casi analoghi), più altri costi che non sono ancora chiari.

      Di tutto questo dibattito conclusosi male ieri sera con la ministra che non spiega tali limiti dell’accordo (o scambio?) con i Cinque Stelle non resta che una distanza incolmabile, quella tra due visioni opposte sulla regolarizzazione, e in definitiva due visioni opposte del mondo.

      Da un lato il discorso opportunista della ministra, che annuncia al paese la sua vittoria personale, un provvedimento di cinque pagine compreso all’interno di un decreto contenente essenzialmente misure economiche. Bellanova presenta infatti i migranti come corpi destinati irrimediabilmente - e indipendentemente dalle qualità personali - al lavoro fisico, minus habentes che proprio a causa dei loro deficit trovano un collocazione nei termini della locuzione do ut des: non bisogna far marcire i prodotti nei campi, si è ripetuto, perciò ora nella Fase 2, possiamo integrarvi nella norma, includervi temporaneamente in ragione di una condizione eccezionale, sempre se rispettate le regole e rimanete confinati nel vostro ruolo di oppressi. Il messaggio è che non vi vogliamo, ma adesso ci servite per raccogliere frutta sotto il sole e pulire il sedere agli anziani, costituite una scelta economica che va fatta in fretta per salvarci e per dare una risposta agli imprenditori che non vogliono che il paese si fermi nemmeno per un attimo. Ma poi, più o meno tra la Fase 3 e la 4, finita la pandemia o comunque scaduti i sei mesi concessi, tutti illegali come prima, senza alcuna soluzione giuridica prevista, pronti a farvi umiliare dalle peggiori destre e a rappresentare un problema di difficile risoluzione per quel che resta della sinistra. I profitti prima delle persone.

      Dal lato opposto c’è invece il discorso umanitario, quello degli attivisti che hanno sì esposto tutte le ricadute positive che una sanatoria slegata dalla volontà dei datori di lavoro avrebbe avuto, ma che sono legati da ragioni più profonde. Per indole si schierano dalla parte di tutti i subalterni, hanno costruito le proprie relazioni nel corso delle mobilitazioni in nome dell’antirazzismo e contro le guerre che causano migrazioni. Muovono da considerazioni basilari, come quelle alla radice del principio di uguaglianza tra tutti gli esseri umani. Principio che può essere condiviso da chi conosce bene la Storia, anche quella violenta e coloniale dell’Italia. In questo specifico caso, le persone prima dei profitti.

      Ma in tempi di antipolitica Bellanova ha gioco facile e con le sue lacrime ne esce meglio di tutti, e così tanti le scrivono su Twitter che in quel momento di commozione hanno visto quello che non avevano ancora trovato dall’inizio lockdown: un comprensibile crollo dovuto ad una grande impresa, un’ammissione della paura di prendere decisioni prima impensabili. Le emozioni vincono sempre, ed è curioso che già un’altra ministra, Elsa Fornero, abbia singhiozzato proprio mentre annunciava le misure rispetto ad un’altra questione del mondo del lavoro, quella degli esodati nel 2011 e sia ricordata anche per questo. «Lo Stato è più forte del caporalato» e «gli invisibili saranno meno invisibili» sono gli slogan con cui Bellanova ha chiuso la partita. E tra lei e la società civile c’è la stessa distanza che c’è tra sfruttamento e dignità.

      https://www.globalproject.info/it/in_movimento/la-grande-bufala-della-regolarizzazione/22780

    • Italy’s coronavirus amnesty: Migrant rights or economic self-interest?

      ’The systematic use of this tool has always postponed the bigger problem: a long-term legalisation solution.’

      The Italian government passed a law on 13 May paving the way for around 200,000 undocumented workers to apply for six-month legal residency permits. But just a few weeks later, the initial atmosphere of hope has quickly faded to a lukewarm welcome.

      The amnesty was one measure in a 55 billion euro ($59.6 billion) stimulus package meant to support Italy’s economy as the country struggles with the effects of the coronavirus. Italy has had one of the most severe outbreaks in the world, with nearly 230,000 confirmed cases and more than 32,500 deaths as of 25 May.

      The new regularisation law was initially greeted as a major step forward for migrant rights and as an example of good migration policy during the coronavirus pandemic. “From now on, the invisible will be a bit less invisible,” Italy’s minister of agriculture, Teresa Bellanova, said at a press conference announcing the law.

      Supporters still say the new law is an important, if tentative, improvement. But critics argue that it amounts to little more than a temporary amnesty that puts economic interests ahead of human rights and will do little to address the rampant exploitation of migrant labour, especially in Italy’s agricultural industry.

      Italy’s fields have long attracted migrant workers from eastern Europe, hundreds of thousands of whom flock to the country to work the harvest every year. They are joined in the fields by thousands of Africans and other non-Europeans who have crossed the Mediterranean to apply for asylum or to seek better lives in the EU. Nearly 500,000 people have made the journey since 2015. Many intended to move on to northern Europe but found themselves stuck with little choice but to try to find work in Italy’s informal economy.

      “[The law] is not exactly what we were hoping for because it is a very limited regularisation. But at this point, after decades of total invisibility, anything is better than nothing. It is a starting point,” Francesco Piobbichi, a social worker with the migrant support organisation Mediterranean Hope, told The New Humanitarian.

      Not everyone agrees.

      The Unione Sindacale di Base (USB), an Italian trade union that represents agricultural workers, called a national strike on 21 May to protest the law’s shortcomings. The union argues that the law is too limited in scope and will do little to protect exploited migrant agricultural workers. “Legal papers don’t necessarily protect you from exploitation,” said Michele Mililli, a USB representative in Sicily. “This is a structural problem that should not have been addressed during a healthcare emergency, but much earlier.”
      Exclusions, and only temporary

      There are an estimated 560,000 undocumented migrants in Italy. But the new law only applies to people working in agriculture or as domestic helpers, leaving out people who work in other sectors of the economy that rely heavily on undocumented labour, such as construction and food services.

      To regularise their status, undocumented migrants need the support of an employer or proof they were working in one of the eligible sectors prior to October 2019. “There is no guarantee that many [employers] will do it,” Enzo Rossi, a professor of migration economics at Tor Vergata University in Rome, told TNH. “And when the six months… expire, these people will be faced with the same dilemma as before the pandemic.”

      The amnesty also excludes people who were stripped of humanitarian protection or legal status by a series of anti-migrant security decrees issued in late 2018 by former far-right interior minister Matteo Salvini that Human Rights Watch said “eviscerated Italy’s asylum procedure and reception system”.

      The law focuses instead on people working in sectors of the economy deemed to be “essential” during the coronavirus crisis, such as undocumented agricultural workers who account for about 25 percent of Italy’s agricultural workforce, about double the amount of other economic sectors, according to Italy’s National Institute of Statistics.

      Portugal’s decision in March to treat people with pending immigration applications as residents for the duration of the coronavirus crisis has been regarded as an effort to guarantee that undocumented migrants have access to healthcare and social services during the pandemic. But Italy’s regularisation is seen by USB and other trade unions and humanitarian groups as a more cynical attempt to plug its labour gap – an estimated 250,000 worker shortfall stemming from coronavirus-related travel restrictions and fears.

      It’s also not the first time Italy has offered a path toward temporary regularisation for undocumented workers, mainly in agriculture. Over the past 35 years, there have been at least five amnesties, but they’ve never led to a comprehensive solution, according to Rossi.

      “The systematic use of this tool has always postponed the bigger problem: a long-term legalisation solution,” Rossi said. “That’s why the numbers of undocumented workers have always been so high.”
      Exploitation in Italy’s south

      Every week, Monday through Saturday, Bachir Ahmed Ali wakes up at the crack of dawn in the tented slum near the village of Cassibile in eastern Sicily and quickly runs to a nearby road where his employer waits for him in a truck with a dozen other migrant workers.

      In less than an hour, they are dropped at the edge of one of the many fruit and vegetable fields in the province of Syracuse where migrant workers pick produce, mostly strawberries and potatoes, from 6am to 2pm, earning 35 euros (about $38) per day.

      This is the daily reality for more than 430,000 migrants working irregularly in Italy’s agricultural sector who are at risk of exploitation. Many of them live in makeshift encampments close to Italy’s agricultural fields, especially in the country’s south.These informal settlements consist of improvised tents or derelict buildings and often lack access to running water and electricity. The people who live in them are caught in what is known as the caporalato system, a 17 billion euro ($18.45 billion) a year industry of illegal employment and labour exploitation run by organised criminal groups and agricultural speculators.

      In #Cassibile, Ali shares his tent with eight other farmworkers from Senegal, Gambia, Sudan, and Burkina Faso. He doesn’t complain about the overcrowding. During the Muslim holy month of Ramadan, which ended on 24 May, he appreciated having the company. “They make me feel part of a family. I haven’t seen my real one since I was 14,” he told TNH.

      Ali is now 30 years old. Originally from a village in Chad, bordering Sudan, he fled his home in 2006 when the country was on the brink of civil war and settled in Libya where he scraped by as a day labourer until the Libyan revolution erupted in 2011.

      “I decided to leave, like many other African migrants, because it was no longer safe for us there,” he said. “We all embarked on boats heading to Europe, so overwhelmed with fear that we couldn’t fully grasp what was happening. But I thought… I could at least get an education, maybe a job.”

      But none of that happened. Ali didn’t receive any guidance on how to rebuild his life at the migrant reception centres in Sicily he stayed in after he arrived. Eventually, the only job he could find was in the agricultural fields outside of Rome. “I worked there for four years then I returned to Sicily. I just couldn’t find anything else,” he explained.

      Ali was granted political asylum and has legal residency. Nonetheless, he has been living in the makeshift camp of Cassibile, home to around 300 people, since 2015. Even during the coronavirus crisis, he has continued harvesting potatoes in Syracuse’s fields. “For me, the virus is not as scary as war or hunger. But I think our conditions should get more attention,” he said.

      Staying afloat

      Ali’s story highlights the limitations of Italy’s new regularisation law: if people with refugee status and legal residency have no choice but to work in the caporalato system, how will the new law help undocumented migrants escape exploitation?

      Employers know that undocumented migrants are desperate for jobs and use that as leverage to continue explotative practices. “[Migrants] accept whatever gig and conditions that keep them afloat and allow them to send money home,” Mililli, the labour organiser from USB, said.

      Most of the migrants working in Sicily’s fields have been in Italy for an average of 10-12 years, according to Mililli. Salvini’s security decrees made them even more vulnerable and, in certain cases, made it more difficult for them to access healthcare.

      The 5,500 farms in the southeastern area of Sicily, home to southern Italy’s biggest wholesale produce market, employ about 30,000 workers. Sixty percent of them are foreigners making as little as 15 euros ($16.35) per day, according to USB. More than half of the migrant labourers continued to work throughout the coronavirus crisis – despite the health hazards and intensified police checks – because they had no access to financial relief from the government.
      ‘Health hazard’

      While the coronavirus has intensified the situation, health risks are nothing new for Italy’s exploited migrant labourers. In the past six years, around 1,500 agricultural workers have died due to the living conditions in the informal camps, from suffocating in overcrowded trucks used to transport undocumented workers or from car accidents on the way to the fields, according to the Italian NGO Doctors with Africa.

      When potato harvesting season ends at the beginning of summer, Ali heads for the tomato fields in Apulia, a region covering the heel of Italy’s boot. Seven informal settlements close to the town of Foggia host up to 6,500 people during the summer months.

      “These places are a health hazard. They were before the virus came, and [they] became a reason of great concern during the pandemic,” Alessandro Verona, the leader of a medical team for the Italian NGO Intersos, told TNH. “If one person gets sick here, it can turn the whole ghetto into a mass slaughter.”

      “Paradoxically, it took a pandemic to improve the situation here. We were granted more water access and toilets,” Verona continued. “But to tame what we consider no less than a humanitarian crisis, these ghettos need to disappear completely. And that will only happen when all undocumented workers are recognised and can rent real places to live [in] decently.”

      In opting for a temporary amnesty, Verona added, Italy lost a great opportunity to promote human dignity.

      On 18 May, five days after Italy’s regularisation law passed, a 33-year old Indian migrant working in a field outside of Rome was fired after asking his employer for a face mask for protection while at work. When the worker requested his daily wage, he was beaten up and thrown in a nearby canal.

      https://www.thenewhumanitarian.org/feature/2020/05/25/Italy-coronavirus-migrant-labour

    • ’Cynical’: Critics slam Italy’s amnesty for undocumented migrants

      New measure that grants temporary permits to migrants in agriculture and care work is act of ’cynicism’, activists say.

      A partial six-month amnesty for Italy’s undocumented migrants was announced this month in a move described by some as “a watershed moment” in the country’s migration policy and “an act of cynicism” by others.

      “Thanks to the choice made by this government, the invisible will become less invisible,” said Teresa Bellanova, Italy’s agriculture minister, in her emotional announcement speech on May 13.

      The former trade unionist was referring to people working in the agriculture and fishing industries, as well as care workers who have been without a residency permit.

      The measure, which grants a six-month residency, has been praised by CGIL-FLAI, the country’s biggest farmworkers’ union, as an “historic achievement”.

      But migrant activists have criticised the limited nature of the amnesty, which will affect only about 200,000 people, according to the Italian government’s estimates.

      The total number of undocumented migrants in the country ranges between 560,000 to 700,000, according to various estimates.
      ’Farcical scene’

      “The tears of the minister provided a really farcical scene,” said Abdel El Mir, a spokesperson of Movement of Migrants and Refugees of Naples (MMRN) - a group of migrants and Italians of foreign origin with up to 300 members, based in the southern city of Naples.

      The group held some of the first street protests in the city after the recent easing of the coronavirus lockdown.

      “If there are about 700,000 undocumented people in Italy and you choose to regularise only a small fraction of them, that is not an act of courage, but of cynicism. You’re only giving papers to the workforce you need, not caring at all about people’s health,” El Mir told Al Jazeera.

      Italy made it clear that its provision was only intended to fill gaps in the labour market as the coronavirus pandemic hit the country.

      Agriculture lobbies had warned the government that Italy would have to throw away huge amounts of fruit and vegetables because there was nobody to pick them, worsening the effects of a shutdown costing the food sector seven billion euros ($7.58bn).

      “We are not making a favour to immigrant citizens by giving them a residence permit,” said Bellanova. “We are simply addressing our need for additional workforce.”

      Under her scheme, the power to regularise migrants lies predominantly with landowners, who will be able to request residence permits for their workers by providing an employment contract and paying a 500-euro ($548) fee.

      In response, the country’s migrant agriculture workers went on a nationwide strike on May 21, protesting against employment sponsorship being the basis for residency permits.

      Aboubakar Soumahoro, the strike organiser, accused the government of “putting fruit and vegetables above people’s lives”.

      The strike was not endorsed by any major union.

      “In Italy, immigration is only ever understood as permissible when it is seen as having economic utility,” said Camilla Hawthorne, an assistant professor of sociology at the University of California Santa Cruz, who has studied migrant activism in Italy.

      The country passed its first comprehensive immigration legislation in 1990, in the wake of the racially motivated murder of Jerry Masslo. He was an asylum seeker from apartheid South Africa who worked as an undocumented agriculture labourer in the region of Naples.

      ‏According to Hawthorne, the current situation resembles the 1990 case, because a humanitarian rhetoric was used to pass immigration laws at the time, but “every subsequent law linked residence permits to work contracts”.
      More vulnerable

      El Mir said the recession caused by the coronavirus pandemic was likely to produce a spike in the number of undocumented people as the employment rates fall, leaving them more vulnerable.

      “Lacking a document means lacking every right, including ordinary access to healthcare,” he said.

      The group of migrants and refugees El Mir is associated with run a free legal help desk, a small health surgery and an Italian language school in Naples. They are providing assistance to more than 4,000 people.

      During the coronavirus lockdown, the group set up a mutual aid network that delivered food and other essential goods to 120 migrant households.

      Their activities also serve as a point of inquiry into the challenges faced by migrants, and informs the political strategy of the movement.

      A citizen of Bangladesh, who has asked not to be identified, requested their assistance shortly after the amnesty was introduced.

      He has been living and working in Italy without a permit for fours years, but as a shoe factory worker he is excluded from the regularisation initiative.

      “An employer asked me to pay 5,000 euros (about $5,487) for a work contract in agriculture. But where am I going to get that money?” he wrote in a text message to El Mir.

      El Mir said such cases were frequent, and were a direct result of the government’s discriminatory provision, but even before the pandemic, foreigners in Italy were under major stress.

      He pointed to the so-called “security decrees”, a set of measures passed last year by the former Interior Minister Matteo Salvini that restricted access to asylum and drastically cut public services available to migrants.
      Salvini’s legacy

      After the far-right leader was removed from office in September last year, the new government failed to deliver on an initial pledge to reverse his most controversial anti-migrant legislation.

      In a further blow to the expectations of human rights groups, Italy renewed a much-criticised deal with Libya to curb migration, and closed its ports to asylum seekers during the pandemic.

      “Too many people think that not having a minister that shouts against migrants means that migration policy has changed. Reality says otherwise,” El Mir said.

      The fact that “even after the fall of Salvini the government has continued many of the same right-wing policies” has pushed migrant activists “to create autonomous political spaces, away from the more traditional sights of political organising in Italy”, said Hawthorne.

      “What gets lost in mainstream anti-racist activism - with its emphasis on tolerance and inclusivity as the antidote to the far-right rhetoric - is the structural critique of racism that is not just about populist leaders saying really racist things,” Hawthorne said.

      “It is part of a broader system of capitalist globalisation and border fortification and militarism that work together to produce a racist system that disadvantages Black people across the spectrum, whether they were born in Italy, or they migrated to Italy,” she added.

      In their demonstrations, the Naples activists tried to address the daily issues affecting migrants’ lives, such as the delay in issuance of residence permits or access to healthcare while also pointing at what they see as the structural causes of racism in Italy.

      “We can’t skip over the fact that Italy openly sells arms to dictators and deals with criminal organisations in Africa; or that ENI [Italy’s state-owned oil and gas company] ravages entire African regions,” El Mir said.

      He said such criticism does not always go down well with the wider anti-racist movement.

      “They tell us that these issues are divisive. But what for them is divisive in terms of political consent, for us is a matter of life,” he said.

      https://www.aljazeera.com/news/2020/05/critics-slam-italy-amnesty-undocumented-migrants-200526104154789.html

    • Il gioco crudele della regolarizzazione 2020

      Il provvedimento del governo sui migranti senza permesso di soggiorno è confuso e iniquo. Abbiamo perso una grande occasione. La rubrica di Gianfranco Schiavone dell’Associazione per gli studi giuridici sull’immigrazione

      Olga è ucraina, fa la badante di una anziana malata; è arrivata in Italia quasi per caso ormai quattro anni fa, per sostituire per un mese una sua amica. È arrivata regolarmente non avendo obbligo di visto. Poi ha trovato un lavoro in nero e ha deciso di rimanere. Il lavoro è pesante ma lei ha bisogno di soldi da mandare a casa e c’è poco da discutere. Tutti conoscono Olga e tutti possono attestare che vive con quella anziana donna alla quale si è affezionata. Olga ha saputo della sanatoria e pensa che finalmente si metterà in regola. Non sa ancora che non sarà così perché non è mai stata fotosegnalata e neanche espulsa (sulla carta) ed essere stati fotosegnalati, o almeno disporre di una attestazione di presenza rilasciata da organismi pubblici, è condizione essenziale per “fare” la regolarizzazione. Olga è, per così dire, troppo invisibile, come lo sono quasi tutte le donne straniere che nel nostro Paese fanno un lavoro di cura.

      Abdul è un richiedente asilo con ricorso pendente contro il diniego della domanda; da quando, nel 2018, è stata abrogata la protezione umanitaria dal primo decreto (in)sicurezza, sono tante le domande come le sue che sono finite così.
      Ma Abdul ha già da un anno un lavoro regolare e con contratto a tempo indeterminato; è disponibile ad abbandonare il suo ricorso per un permesso di soggiorno per lavoro; crede che sia arrivato il momento giusto ma non sa che non è così perché è, per così dire, troppo regolare e non è possibile la conversione da richiesta asilo a lavoro. Abdul resterà in Italia con il suo lavoro a tempo indeterminato fino al momento della decisione sul ricorso; se, come probabile, lo perderà, diventerà un “clandestino”, dopo avere vissuto e lavorato in Italia per anni.

      Asif è pakistano, un tempo aveva un permesso di soggiorno ma poi non è riuscito a rinnovarlo. Gestisce un albergo; il suo datore di lavoro sa che lui parla quattro lingue e con i turisti ci sa fare. Asif ha deciso che è la volta buona: il padrone non può dirgli di no. Ma Asif ancora non sa che la regolarizzazione è solo per i settori agricoli e il lavoro domestico e di cura. Per lui non c’è niente da fare neanche questa volta.

      Mohammed è un bracciante agricolo, vive da dieci anni in Italia ed è stato espulso, sempre sulla carta, già tre volte. Ogni anno, per tre mesi raccoglie i pomodori, poi per altri due raccoglie le olive, per altri due ancora le arance e poi fa lavori qua e là. Nessuno lo mai assunto e non vive da nessuna parte e nello stesso tempo ovunque in giro per la penisola, sempre in qualche baracca vicino al campo di raccolta. Ha sentito che questa è la sanatoria dei braccianti, proprio la sua, “Stavolta è fatta”. Chiederà a tutti i suoi padroni che l’hanno sfruttato in questi anni per 25 euro al giorno (dieci ore al giorno di lavoro) di fargli un contratto; anche brevissimo, solo per avere finalmente quel maledetto documento, e poi, s’intende, l’ammenda la paga lui. Nessuno dei suoi molti padroni lo farà, perché mai dovrebbero? Per due mesi di lavoro all’anno non se ne parla neanche; che se ne vada pure al diavolo e avanti un altro senza pretese.

      Olga, Abdul, Asif, Mohammed sono nel gioco crudele della regolarizzazione 2020, che non è né aperta né restrittiva ma divide i migranti salvati da quelli sommersi senza alcuna ragionevolezza trattando le persone come merce a disposizione. Il testo di legge afferma, non senza solennità, che il fine della norma è quello di “garantire livelli adeguati di tutela della salute individuale e collettiva in conseguenza della contingente ed eccezionale emergenza sanitaria connessa alla calamità derivante dalla diffusione del contagio da Covid-19 e favorire l’emersione di rapporti di lavoro irregolare”. Intenzioni annunciate ma non realizzate. Neppure questa volta, nell’anno della pandemia, abbiamo infatti scelto di fare emergere gli stranieri senza permesso di soggiorno sulla base della loro semplice presenza, con semmai poche e nette esclusioni connesse a seri profili penali, dando loro un permesso per “ricerca lavoro”. Per permettere di cercarlo o di tenerlo o ancora di cambiarlo e soprattutto di liberarsi dallo sfruttamento di chi li ricatta. Per permettere a loro, e a noi, di vivere in una società migliore.

      https://altreconomia.it/il-gioco-crudele-della-regolarizzazione-2020

    • La protesta di #Aboubakar_Soumahoro

      Si è incatenato vicino a #Villa_Pamphilj e alla fine è stato ascoltato da Conte, chiedendogli una riforma della filiera agricola, un «piano nazionale emergenza lavoro» e una modifica delle politiche migratorie

      Martedì 16 giugno, il sindacalista dell’USB Aboubakar Soumahoro si è incatenato vicino a Villa Pamphilj, a Roma, dove sono in corso gli “Stati generali dell’economia”, una serie di incontri organizzati dal governo tra il governo stesso, istituzioni internazionali, sindacati e associazioni di categoria. Accompagnato da altri attivisti del sindacato, Aboubakar Soumahoro ha anche iniziato uno sciopero della fame e della sete, chiedendo al presidente del Consiglio Giuseppe Conte di essere ascoltato. Alla fine, dopo oltre otto ore di presidio, il sindacalista è stato ricevuto nel pomeriggio da Conte alla presenza del ministro dell’Economia Gualtieri e della ministra del Lavoro Catalfo. Il colloquio è durato circa mezz’ora.

      Aboubakar Soumahoro, impegnato attivamente da anni per le persone migranti e i braccianti, ha presentato al governo tre richieste in particolare: una riforma della filiera agricola, un “piano nazionale emergenza lavoro” e una modifica delle politiche migratorie.

      Sul primo punto: l’USB vuole l’approvazione della cosiddetta “patente del cibo” per dare cioè alle persone, ha spiegato Aboubakar Soumahoro, un cibo «eticamente sano». La “patente del cibo” prevede che vengano esplicitate una serie di informazioni che dicano dove quel cibo è stato prodotto e che garantiscano che sia stato prodotto senza sfruttamento. Il “piano nazionale emergenza lavoro” è stato spiegato per ora in modo piuttosto generico: l’obiettivo è comunque quello di tutelare «coloro che rischiano di perdere il posto di lavoro a causa della crisi sanitaria». Le richieste legate al terzo e ultimo punto, sulle politiche migratorie, sono invece più definite: «Regolarizzazione di tutti gli invisibili con rilascio di un permesso di soggiorno per emergenza sanitaria convertibile per attività lavorativa», cancellazione degli accordi con la Libia, dei decreti sicurezza, riforma radicale per le politiche dell’accoglienza, abolizione della legge Bossi-Fini e cittadinanza per chi è cresciuto o nato in Italia. «Si tratta di una lotta di civiltà», ha spiegato Aboubakar Soumahoro.

      Nel cosiddetto “decreto rilancio“, che contiene decine di nuove misure per sostenere l’economia dopo il picco della pandemia da coronavirus, il governo aveva inserito anche una procedura per regolarizzare una parte dei migranti irregolari che vivono in Italia, legando il provvedimento al problema della raccolta della frutta nei campi agricoli. Aboubakar Soumahoro e l’USB chiedono invece che la regolarizzazione non venga legata alla raccolta della frutta, ma alla crisi sanitaria e che il permesso sia poi convertibile per attività lavorativa.

      All’inizio di febbraio il governo italiano aveva rinnovato il controverso Memorandum d’intesa (PDF) firmato nel 2017 con il governo di unità nazionale libico guidato da Fayez al Serraj, servito soprattutto ad addestrare e fornire mezzi alla cosiddetta Guardia costiera libica, formata da milizie private spesso in combutta coi trafficanti di esseri umani, e finanziare quelli che il documento chiama «centri di accoglienza» in Libia, dove i migranti sono sistematicamente torturati, stuprati e al centro di richieste di riscatto per essere liberati. Aboubakar Soumahoro ne chiede la cancellazione, così come dei “decreti sicurezza”.

      I cosiddetti “decreti sicurezza“ sono le due leggi molto restrittive sull’immigrazione fortemente volute dall’ex ministro dell’Interno Matteo Salvini e approvate durante il governo precedente. Il primo “decreto sicurezza” è entrato in vigore il 5 ottobre 2018 e interviene soprattutto sul sistema di accoglienza italiano. La principale misura contenuta nel decreto è l’abolizione del permesso di soggiorno per motivi umanitari, una forma di protezione molto diffusa della durata di due anni, sostituita da altri permessi più specifici e quasi impossibili da ottenere. Il secondo “decreto sicurezza” modifica invece le norme che riguardano gli sbarchi dei migranti soccorsi in mare attraverso la cosiddetta politica dei “porti chiusi”, ingenti multe per i comandanti delle navi che ignorano il divieto di ingresso, e nuovi fondi per il rimpatrio dei migranti irregolari, cioè senza alcun tipo di permesso per rimanere in Italia.

      Entrambi hanno peggiorato le condizioni del sistema di gestione e accoglienza dei migranti: non hanno portato alla diminuzione degli sbarchi né dei morti in mare, non hanno portato alla riduzione del numero di irregolari né del numero dei rimpatri. Aboubakar Soumahoro chiede la cancellazione anche della legge Bossi-Fini del 2002, che rende impossibile trovare un lavoro regolare per quasi tutti gli stranieri extracomunitari.

      Dopo l’incontro con Conte, Aboubakar Soumahoro ha spiegato che l’idea della “patente del cibo” ha trovato grande riscontro nel governo: «Il presidente Conte ha detto che è un’idea bellissima, un’idea geniale e che si attiverà per metterla in pratica». Sul piano del lavoro, Conte ha chiesto “proposte articolate in merito” che l’USB presenterà dunque al più presto. La risposta più deludente è stata sui “decreti sicurezza”: «Ci ha detto che il programma di governo prevede di riformarli, non ha mai parlato di cancellarli come noi chiediamo». Il sindacalista ha infine detto di aver informato Conte che stanno lavorando «alla convocazione degli Stati popolari. Loro hanno fatto gli Stati generali, noi faremo gli Stati popolari nelle prossime settimane a Roma: chiameremo a parlare giovani, precari, disoccupati».

      https://www.youtube.com/watch?v=_z5xME3T7WM&feature=emb_logo

      https://www.ilpost.it/2020/06/17/protesta-aboubakar-soumahoro

    • Regolarizzazioni, le Acli: «Migliaia di pratiche gestite, ma poca chiarezza»

      Ci sono casi di lavoratori che emergono, poi i datori scompaiono (si pensi ai badanti di anziani) e loro restano nel limbo

      Migliaia di pratiche gestite per la regolarizzazione degli stranieri prevista dal decreto Rilancio che è legge da metà luglio, ma ancora tante incertezze a riguardo.

      E’ quel che emerge dai Patronati dell’Acli, in prima fila nella vicenda. «Abbiamo gestito finora circa 6000 pratiche» racconta Marco Calvetto, Capo Area dei Nuovi Servizi di Tutela del Patronato Acli «e devo dire che una buona percentuale sta andando avanti senza problemi però ci sono anche tante domande che si scontrano con criticità e ambiguità che la norma non ha affrontato. Parliamo in percentuale di un quinto delle domande, quindi non sono poche quelle che aspettano dei chiarimenti, prima di tutto da parte del Ministero dell’Interno che da giorni ha preannunciato la pubblicazione di una circolare che dovrebbe dirimere una serie di questioni sollevate da parte di tutte le associazioni coinvolte nella regolarizzazione. A poche settimane dalla scadenza dei termini per presentare le domande di emersione, che rimane il 15 agosto, desta un po’ di sconcerto che non siano ancora chiare e certe le normative e le procedure che a cui dovranno attenersi datori di lavoro e cittadini stranieri».

      Tra gli stranieri che si sono rivolti al Patronato Acli per chiedere la regolarizzazione, si conta la stessa percentuale nazionale di un 90% di stranieri categorizzabili nel lavoro domestico e 10% di stranieri che invece fanno parte del mondo agricolo.

      «Ai dubbi relativi all’invio dell’istanza si aggiunge anche - continua Calvetto - l’incertezza sull’esito e, spesso, la gestione degli eventi che possono incidere sul regolare soggiorno o sul rapporto di lavoro instauratosi fra il momento dell’invio dell’istanza e la convocazione in prefettura per il rilascio del permesso di soggiorno. Purtroppo la verità è che si tratta di almeno 5-6 mesi prima che le parti vengano chiamate per la firma definitiva e in questi mesi, si sta già verificando, il datore di lavoro purtroppo può morire, visto che spesso si tratta di persone anziane affette da qualche malattia grave, con il risultato che lo straniero è ormai emerso, perché ha fatto richiesta di regolarizzazione, però non ha più la possibilità di continuare l’attività lavorativa collegata con l’istanza di emersione e non sa bene come potrebbe essere assunto da altro datore di lavoro, non avendo ancora il titolo di soggiorno, o come si dovrebbe regolare il datore di lavoro in caso di infortunio del lavoratore, visto che il contratto di lavoro sarà comunicato agli enti solo in fase di presentazione allo Sportello Unico. Ad oggi non abbiamo nessuna risposta in merito, abbiamo sollecitato sia le amministrazioni che il Ministero degli interni affinché diano a tutti delle linee guida chiare con delle FAQ che rispondano a tutti i dubbi e le criticità che stanno insorgendo in queste settimane».

      Certo, sono situazioni limite, ma non si tratta certo di casi isolati. «Spesso, i datori di lavoro sono molto anziani o comunque non sono autosufficienti, - aggiunge Giamaica Puntillo, Segretaria Nazionale Acli Colf - non è scontato che possano presentarsi in procura per la firma delle parti. Quando ci sono queste sacche di disinformazione non si fa che alimentare la paura di fare qualsiasi passo in avanti e in qualche modo si scoraggiano persone magari ben intenzionate.»

      Il decesso del datore di lavoro durante l’iter dell’istruttoria di regolarizzazione non è il solo caso limite che è arrivato agli sportelli delle Acli in queste settimane: per esempio ci sono molti stranieri titolari di permesso di soggiorno diversi da quello per motivi di lavoro, permessi «deboli» o che a breve andranno a scadere (come ad esempio permesso per attesa asilo o per studio...), che stanno svolgendo un regolare rapporto di lavoro, ma che vorrebbero usufruire della regolarizzazione per avere maggiori garanzie a livello di stabilità , ma ancora non sanno se potranno collegare quel lavoro, anche se in uno dei settori coinvolti dalla regolarizzazione, con l’istanza di emersione. Oppure c’è il caso di un minore che ha un permesso di soggiorno non rinnovabile e non convertibile il cui datore di lavoro attuale sarebbe disponibile a mettere in regola, ma cosa succede in questo caso? Non è chiaro insomma se è possibile procedere con una novazione del contratto, ad oggi, che permetterebbe al datore di tenere in piedi lo stesso tipo di contratto o bisogna per forza far cessare il vecchio rapporto di lavoro.

      «Anche nel settore agricolo - sottolinea Gianluca Mastrovito Vicepresidente di Acli Terra - c’è poca chiarezza. Ad esempio i datori di lavoro fanno fatica a capire qual sia il minimo economico richiesto per poter accedere alla regolarizzazione. Si tratta di piccoli imprenditori agricoli che non fanno neanche il Modello unico perché spesso sono coltivatori da soli, oppure sono realtà familiari di poche persone, senza una vera struttura. In questa incertezza legislativa, con interpretazioni che variano anche da territorio a territorio, hanno gioco facile i faccendieri».

      Stupisce, inoltre, viste le finalità della regolarizzazione strettamente connesse a ragioni sanitarie, che non sia ancora stato esplicitato come sia possibile per i soggetti coinvolti dall’emersione, possessori di una mera istanza di regolarizzazione, ottenere un Codice Fiscale e iscriversi al Servizio Sanitario Nazionale.

      «Fra tante incertezze e dubbi colpisce che in fase di conversione a legge del Decreto Rilancio siano stati accolti auna serie di emendamenti e modifiche in materia di bonus e di politica fiscale, per esempio, ma non sia stato accolto nemmeno un emendamento sulla norma delle regolarizzazioni, ed erano centinaia , compresi i nostri e soprattutto compresi quelli presentati dalla maggioranza stessa - dichiara Emiliano Manfredonia, Presidente del Patronato Acli - è chiaro che ci troviamo di fronte ad uno scontro politico. Così perdiamo una grande occasione, il decreto si poteva e andava migliorato, dopo una risposta iniziale dettata anche dall’emergenza.»

      L’altro problema, a cui la legge di conversione non ha posto rimedio, riguarda il fatto che la norma sia applicabile solo agli stranieri irregolari che lavorino in tre settori specifici: agricoltura, assistenza alla persona, lavoro domestico. «Dai dati resi noti dal Ministero dell’Interno emerge che molti lavoratori domestici coinvolti dalla regolarizzazione appartengono a nazionalità che tradizionalmente vedevano bassi indici di coinvolgimento nel settore. O ci troviamo di fronte ad un positivo superamento dell’etnicizzazione che caratterizza il lavoro domestico del nostro Paese o forse ad un vincolo legislativo che genera delle distorsioni.... » - ha aggiunto Calvetto - e d’altronde più la normativa è stringente più si fa il gioco di chi non ha peli sullo stomaco. Basti pensare che le istanze di emersione le possono inviare giustamente i singoli, ma forse un po’ più di perplessità le suscita il fatto che ogni soggetto privato può inviare fino a 5 istanze per altri. Facile capire come si possa trasformare in un’occasione di lucro per la criminalità organizzata e anche per la microcriminalità delle comunità straniere presenti nel nostro Paese: si illudono persone bisognose, in situazioni di fragilità, chiedendogli magari i risparmi di una vita o facendoli indebitare, creando legami di subalternità che rischiano di alimentare l’illegalità invece di processi di autonomia e partecipazione a cui l’emersione dovrebbe tendere. E non sono poche le domande che gli operatori Acli non accolgono perché palesemente in contrasto con i requisiti. «Chiediamo maggiore chiarezza, mancano ormai pochi giorni, visto che si avvicina anche la chiusura estiva - ha concluso Manfredonia - e crediamo che sia una questione di rispetto sia per chi ha intenzione di regolarizzare uno straniero ma anche per gli operatori dei patronati che si trovano a non poter dare le giuste risposte a persone che magari ne avrebbero il diritto.»

      https://www.repubblica.it/economia/miojob/lavoro/2020/08/04/news/regolarizzazioni_le_acli_migliaia_di_pratiche_gestite_ma_poca_chiarezza_-

    • Migrants in Italy: 220,000 workers applied for regularization

      Since a new decree went into effect in Italy this summer, 220,000 migrants have applied to get temporary papers, according to Deputy Interior Minister Matteo Mauri. Meanwhile, he also said that the exploitation of undocumented farmworkers in the Foggia region had to be stopped.

      Deputy minister Mauri announced the numbers on October 13 after a meeting at the prefecture of Foggia in the region of Puglia.

      “207,000 people applied for the regularization, in addition to 13,000 who asked for a permit to look for a job, so we are talking about 220,000 people,” Mauri said. “In the report we drafted before the start of the regularization, we wrote on a piece of paper that we would probably regularize 220,000 people, which is exactly what happened.”

      Permit extension for migrant workers

      The decree that allowed these people to apply for temporary papers came into force on June 1: Foreigners who had a stay permit that expired after October 31, 2019 could apply for a new six-month-long permit. The decree applied to migrant workers employed in specific sectors, including agriculture and domestic work, as well as unemployed migrants who previously worked in these sectors.

      “More legality, more regularity and as a consequence more benefits for all, because producing conditions for high-quality integration is in everybody’s interest,” deputy minister Mauri said.

      He said his administration was actively fighting the exploitation of undocumented migrants in agriculture in the Foggia region. “We have met with law enforcement, the prefecture, unions and associations. Unfortunately, we are not dealing with an emergency but with a problem that has existed for a very long time,” he said.

      Exploitation of farmworkers

      The Foggia region is known for makeshift migrant camps where gangmasters look for workers. Living conditions in these shanty towns are poor. This summer, several inhabitants caught COVID-19, and one migrant died in a fire.

      Mauri said that “a different, dignified living solution must be found” for migrant workers, and that ending exploitative work situations was key to this.

      “At the center of everything there is always the problem of exploitation, because if a person is not paid for what he or she does but is underpaid and in some cases enslaved, these situations become inevitable,” he said.

      https://www.infomigrants.net/en/post/27936/migrants-in-italy-220-000-workers-applied-for-regularization

  • « Il faut se serrer un peu plus la ceinture » : quand chômage partiel rime avec fiche de paie amputée, Bertrand Bissuel, Julie Carriat
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/18/il-faut-se-serrer-un-peu-plus-la-ceinture-quand-chomage-partiel-rime-avec-fi

    A l’arrêt du fait de l’épidémie due au coronavirus, près de 9 millions de salariés en chômage partiel voient leurs revenus baisser. « Le Monde » a récolté les témoignages de certains d’entre eux.

    Thierry a beau s’y être préparé, le manque à gagner qu’il vient de subir lui a causé une petite émotion. Cadre dans un restaurant de la région parisienne, il ne travaille presque plus depuis la mi-mars, l’établissement qui l’emploie ayant dû fermer ses portes, comme tous les « lieux, recevant du public, non indispensables à la vie du pays ». Thierry a, du même coup, basculé en « activité partielle », dispositif plus connu sous le nom de chômage partiel ou chômage technique. Un changement de situation synonyme de salaire amputé : pour le mois de mars, « l’écart est de 340 euros net », affirme-t-il, soit environ « 10 % » de sa rémunération habituelle.

    Thierry ne se lamente pas, conscient du fait qu’il se situe en haut de l’échelle des revenus. Mais il va essuyer une perte financière plus importante sur avril, puisque cette période-là sera intégralement chômée. « Je suis locataire et n’ai donc pas de crédit immobilier à rembourser, confie cet homme, encarté à Force ouvrière (FO). Mais si mes ressources sont diminuées pendant trois ou quatre mois, je vais commencer à rencontrer des difficultés. »

    Aujourd’hui, ils sont près de 9 millions à relever, comme Thierry, de l’activité partielle, soit près d’un salarié du privé sur deux. Une situation sans précédent, en France. Le gouvernement a voulu faire jouer ce mécanisme au maximum, afin que les patrons conservent, autant que possible, leur main-d’œuvre durant la récession déclenchée par la pandémie due au coronavirus. Dans cette optique, les règles ont été revues en profondeur, le but étant de bâtir le système « le plus protecteur » d’Europe, selon la formule de la ministre du travail, Muriel Pénicaud. Grâce à ce dispositif, cofinancé par l’Etat et par le régime d’assurance-chômage (Unédic), les salariés perçoivent une indemnité correspondant, en moyenne, à 84 % de leur salaire net. L’employeur peut, s’il le souhaite, mettre la main à la poche pour compenser la différence et assurer, ainsi, le maintien de la paye.

    Un filet de sécurité, mais des limites

    Si le filet de sécurité dressé par l’exécutif préserve une large part du pouvoir d’achat des personnes concernées, il comporte des limites. Ainsi, certaines composantes de la rémunération du salarié ne sont pas prises en considération pour fixer le montant de l’indemnité d’activité partielle : parmi elles, il y a l’intéressement, la participation et les « primes ou indemnités ayant le caractère de remboursement de frais professionnels » – par exemple, la prime de panier, précise Patrick Bordas, vice-président du Conseil supérieur de l’ordre des experts-comptables.

    Maçon coffreur dans une entreprise de travaux publics, Ibrahim indique, lui, avoir perdu un peu plus de 200 euros sur sa paye du mois de mars – période durant laquelle il a chômé plusieurs jours. Un manque à gagner qu’il impute à la non-prise en compte de la prime de panier et de l’indemnité de transport. « Ça a des conséquences sur mon budget », souligne ce délégué syndical CGT, père de six enfants et dont l’épouse est sans profession. Il envisage « de supprimer certaines dépenses », sans trop savoir lesquelles à ce stade : peut-être cessera-t-il de participer au règlement des assurances des voitures appartenant à ses fils.

    Dans certains cas, les baisses de ressources s’avèrent plus importantes, à en croire les propos de salariés qui ont répondu à un appel à témoignages lancé sur Lemonde.fr. Salarié d’un grossiste pour la restauration dans les pays de la Loire, Lkif est au chômage partiel depuis le 14 avril. Sa rémunération fixe – 1 350 euros par mois – lui sera payée à 100 %, grâce à un coup de pouce de son employeur. En revanche, faute de clients, il fait son deuil des quelque 500 euros mensuels de commission qu’il empoche habituellement. « On [le salarié porte parole du patron, un must pour Le Monde] a trois emprunts à payer, jusqu’à quand ça va durer ? Je ne vais pas toucher mon salaire d’avant-crise avant plusieurs mois », présage-t-il. Pour autant, il estime ne pas être « à plaindre ». Sa compagne travaille, ce qui permet au couple de faire face aux mensualités de ses crédits, non négligeables, de 1 400 euros en tout.

    En activité partielle depuis le 23 mars, Mathilde, elle, a demandé à sa banque de décaler de trois mois les remboursements d’un prêt immobilier. « Ils me réclamaient presque 1 000 euros de frais de dossier pour accepter ma requête, j’ai refusé », raconte cette commerciale dans un laboratoire pharmaceutique, qui continue, du coup, à honorer ses créances.
    Il arrive que des ménages cumulent les manques à gagner. Assistante maternelle à proximité de Toulouse, Pascale perçoit 300 euros de moins qu’à l’accoutumée. Pour son conjoint, employé 39 heures par semaine, la perte se monte à un peu plus de 800 euros, notamment parce que le travail effectué à partir de la 36e heure a été exclu du calcul de l’indemnité en mars – ce qui ne devrait, toutefois, plus être le cas par la suite (la réglementation ayant très récemment évolué). Au total, les revenus du couple dégringolent de plus de 1 000 euros. Et la banque « refuse de me décaler les mensualités » d’un emprunt immobilier, soupire-t-elle.

    « Il y a une diminution de salaire, bien évidemment, mais pas de diminution des loyers ou des charges, donc il faut se serrer un peu plus la ceinture », abonde Pauline, 28 ans, responsable de salle dans un restaurant d’Annecy, qui est passée de 1 800 à 1 650 euros en mars. Désormais, il faut tenir les comptes au cordeau, entre la location du logement (650 euros par mois) et les achats plus fréquents de produits alimentaires, puisqu’elle ne mange plus avec ses collègues, avant le service. Si l’envie de retourner à son poste la tenaille – « les journées sont très longues » –, elle craint aussi le pire pour la saison d’été, plusieurs événements, dont le Festival international du film d’animation, ayant été annulés.

    « C’est un vol »

    Dans le monde de l’hôtellerie-restauration, les incidences du passage au chômage partiel sont fortes, observe Nabil Azzouz (FO) : les pourboires non déclarés échappent au calcul de l’indemnité. Et s’agissant des salariés dont la paye est indexée sur le chiffre d’affaires de leur société, le préjudice pourrait, là aussi, être important, complète M. Azzouz.
    Parfois, le chômage partiel n’a rien de chômé : sous pression de leur hiérarchie, des personnes poursuivent leurs missions
    Cependant, une rémunération amoindrie n’entraîne pas forcément des sacrifices supplémentaires. « Depuis que je suis au chômage partiel, je gagne 100 euros de moins que d’ordinaire, mais je ne le ressens pas », confie Laura, 27 ans, rédactrice dans une agence de relations presse en Ile-de-France. Avec le confinement, certaines dépenses ont disparu : l’abonnement aux transports en commun, les achats de livres… Elle en viendrait même à conclure qu’elle « épargne plus qu’avant ». Ce qui ne l’empêche pas d’être inquiète pour l’avenir : l’inactivité pourrait se prolonger « au moins jusqu’à l’été », relate-t-elle, et des « rumeurs » de licenciements économiques commencent à circuler parmi le personnel.

    Parfois, le chômage partiel n’a rien de chômé. Sous la pression de leur hiérarchie, des personnes sont contraintes de poursuivre leurs missions, en dépit des mises en garde répétées de Mme Pénicaud qui a martelé que de telles pratiques étaient contraires à la loi.
    Cadre dans une entreprise de rachat de crédits, Christophe, qui témoigne sous un prénom d’emprunt, se souvient du jour où son supérieur lui a annoncé qu’il était désormais en activité partielle : « Il m’a demandé directement de continuer à faire avancer les projets, pour qu’on ne soit pas en perte de vitesse. » Occupant une position élevée dans la société, il a protesté mais continue, toutefois, de travailler, à son domicile, pendant les siestes de ses enfants, par conscience professionnelle. Avec ce dispositif financé par des deniers publics, « ils ont limité la casse, fortement », dit-il, mais en agissant de manière « immorale ».

    « C’est un vol au détriment de la collectivité », renchérit Nathalie, employée dans une société de services à la personne, dont le prénom a été modifié. En théorie, elle est au chômage partiel à 90 % mais dans les faits, elle consacre beaucoup plus de temps à son métier : « Il n’y a pas d’injonction directe, mais l’entreprise fonctionne avec une culture du “travailler plus”. C’est un choix qui est fait, au nom de la sauvegarde des emplois, mais ce n’est pas honnête car aucun cadre clair n’a été posé. »

    Consultant dans un cabinet de conseil parisien, spécialisé en santé et sécurité au travail, Nicolas, qui témoigne également sous un prénom d’emprunt, se trouve dans une situation similaire. « Les choses sont dites à l’oral, il est conseillé à tout le monde de travailler, même durant ses congés, RTT, et au chômage partiel », rapporte-t-il, en dénonçant une « organisation hypocrite et opportuniste ». « Il y a un intérêt bien compris entre les consultants et les associés, qui est de dire : “Vous continuez à bosser parce que sinon, la boîte se casse la gueule”, ajoute-t-il, amer. On l’accepte parce qu’on comprend pourquoi c’est fait, mais sur le principe, ça choque. »

    Le chômage partiel en deux chiffres
    8,7 millions
    C’est le nombre de personnes concernées par une demande de chômage partiel déposée par leur employeur, à la date du 14 avril. Quelque 732 000 entreprises avaient accompli une démarche en ce sens, selon les services du ministère du travail.
    84 %
    C’est la part que représente l’indemnité allouée à la personne au chômage partiel, par rapport à son salaire net. Autrement dit, sa rémunération est amputée de 16 %. Il s’agit d’une moyenne, le pourcentage pouvant varier selon les situations, comme le montrent des simulations faites pour Le Monde par l’ordre des experts-comptables. Ainsi, dans l’hypothèse où la personne n’a pas du tout travaillé au cours du mois, la somme qui lui est versée correspond à 100 % de son salaire net, si elle est au smic. Pour un individu touchant 2 000 euros brut par mois, l’indemnité d’activité partielle représente 88,6 % de sa rémunération nette, soit une perte de 179,80 euros. Dans le cas d’un salarié payé 3 000 euros brut par mois, le manque à gagner équivaut à 17 % de son salaire net, soit près de 408 euros.

    30 mars 2020 : Coronavirus : le chômage partiel entraîne une perte de revenus de 1,2 milliard par mois pour les ménages, selon l’OFCE
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/03/30/coronavirus-le-chomage-partiel-entraine-une-perte-de-revenus-de-1-2-milliard

    (...) Parmi les éléments étudiés par les économistes de l’OFCE figure l’impact du dispositif de chômage partiel, sollicité vendredi 27 mars par 220 000 entreprises pour 2,2 millions de salariés au total. Ce chiffre pourrait plus que doubler et atteindre 5,7 millions d’employés − soit 21 % de l’emploi salarié en France − si l’ensemble des entreprises touchées par la baisse de l’activité économique déposent une demande de chômage partiel auprès des services du ministère du travail.

    Au global, selon les calculs de l’OFCE, ce dispositif représente, pour les salariés, un « manque à gagner » de 1,2 milliard d’euros pour un mois de chômage partiel. Soit, en moyenne, pour un salarié, 216 euros en moins sur la fiche de paie. Sous réserve que « les entreprises ne compensent pas les pertes de revenus des salariés », précise l’Observatoire.

    En effet, si le gouvernement a fait le choix d’indemniser à 100 % les salariés qui touchent le smic, ceux au-dessus du smic, eux, ne touchent que 84 % de leur salaire net dans la limite de 4,5 smic. Mais chaque employeur conserve, bien évidemment, la latitude de prendre à sa charge cette perte de revenus pour ses salariés. Le coût pour les finances publiques du dispositif atteindrait, lui, 12,7 milliards d’euros par mois, chiffre auquel il faut ajouter une perte de cotisations sociales de 8,7 milliards, soit un total de 21,4 milliards d’euros mensuels.

    Une aide proratisée

    L’OFCE a également examiné la situation des salariés des entreprises dont la fermeture a été ordonnée par le gouvernement (commerces non alimentaires, hôtels, restaurants…). Ils représentent un effectif de total 2,4 millions de personnes, dont 2 millions de salariés. Pour eux, le chômage partiel se traduit par une baisse globale de revenus de 349 millions d’euros par mois de chômage, soit environ 175 euros par mois pour chaque salarié concerné. Le coût pour les finances publiques, lui, est de 3,8 milliards d’euros d’indemnités versées et de 2,4 milliards de cotisations sociales non versées, soit 6,2 milliards d’euros par mois.
    Les personnes employées en contrats courts (CDD, fins de mission d’intérim…) pourront toucher une indemnisation, à condition d’avoir travaillé suffisamment longtemps

    A noter que la baisse de l’activité, qu’elle soit imposée du fait du confinement ou non, impacte également environ 1,2 million de personnes dont le statut n’ouvre pas droit au chômage partiel. Une partie d’entre elles est non salariée. Elles peuvent alors prétendre − si elles remplissent les conditions − au fonds de solidarité créé par Bercy. Selon les dispositions présentées lundi 30 mars, une aide forfaitaire de 1 500 euros sera versée aux personnes dont l’activité a été totalement arrêtée. Celles qui ont subi une perte d’au moins 50 % de leur chiffre d’affaires toucheront une indemnité proratisée, à concurrence de 1 500 euros.

    Restent enfin les personnes employées en contrats courts (CDD, fins de mission d’intérim, fin de période d’essai…), soit entre 140 000 et 150 000 personnes, qui ne peuvent non plus prétendre au chômage partiel. A condition d’avoir travaillé suffisamment longtemps, elles pourront toucher une indemnisation de l’assurance-chômage. Mais ce « seront, au final, les plus impactés », souligne Bruno Ducoudré, économiste à l’OFCE. L’organisme de prévision prévoit d’analyser plus en détail dans les jours qui viennent les conséquences du choc économique dû au confinement et à la baisse d’activité sur les revenus des ménages.

    Rappel, sous peu on aura au moins 11,1 millions de salariés payés hors emploi : Les salariés en arrêt de travail pour garde d’enfants et les personnes vulnérables vont passer au chômage partiel
    https://seenthis.net/messages/844741

    #chômage_partiel #revenu_garanti

    • Coronavirus : déjà 11 milliards de pertes de revenus pour les ménages en France
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/21/coronavirus-deja-11-milliards-de-pertes-de-revenus-pour-les-menages-en-franc

      Cette dégradation du pouvoir d’achat, pour l’instant due à l’arrêt de l’activité, risque de s’amplifier dans les mois à venir.

      Si la crise économique liée à l’épidémie de coronavirus est d’une ampleur inégalée, elle ne pèse encore que peu, en France, sur les ménages. Les 120 milliards d’euros perdus depuis le début du confinement, le 17 mars dernier, n’ont affecté les particuliers qu’à hauteur de 11 milliards d’euros, selon les scénarios établis par les économistes de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Soit 7 % du total. Les entreprises, elles, « perdent » environ 35 % du total, tandis que l’Etat essuiera, via le déficit public, le reste de l’ardoise.

      « Pour les ménages, cela représente une perte de pouvoir d’achat d’environ 50 euros par semaines, soit 400 euros sur la totalité de la période de confinement » , précise Xavier Timbeau, économiste à l’OFCE. Un chiffre moyen, qui recouvre une grande hétérogénéité de situations : les salariés au smic bénéficient dans le dispositif du chômage partiel du maintien intégral de leur salaire, ceux au-dessus du smic touchent 85 % de leur rémunération.

      Une « cassure »

      Les indépendants, à eux seuls, qui se rémunèrent directement avec leur activité, participent pour 2 milliards d’euros à cette baisse des revenus. Les salariés en fin de contrat court, ou en fin de mission d’intérim, et dont la mission n’a pas été renouvelée du fait de la crise voient eux leur revenu pris en charge par l’assurance-chômage – dans la mesure où les droits leur sont ouverts, et pour une durée variable.

      « Nous estimons que 460 000 personnes vont se retrouver sans emploi à l’issue du confinement, précise Bruno Ducoudré, économiste à l’OFCE. Parmi elles, environ 180 000 personnes en contrat court, et 288 000 personnes qui étaient en période d’essai, par exemple, ou qui sont licenciées – éventuellement pour d’autres raisons que le Covid-19. » Enfin, une dernière catégorie de personnes subit une amputation significative de leurs revenus – ce sont celles qui subsistaient en partie grâce à « l’économie grise » , comme le dit Xavier Timbeau, c’est-à-dire ce qui est à la frontière de la légalité et dont le nombre est par nature difficile à évaluer.

      « Seul le recul de l’inflation (importée notamment) permet d’amortir le choc et de redonner un peu d’oxygène à la dépense des ménages » , estime l’institut Xerfi.
      Toutefois, pour les ménages français, ce recul relativement faible du pouvoir d’achat risque de n’être que temporaire. En sortie de crise, l’arrêt des mesures de soutien aux entreprises, et notamment du chômage partiel, peut donner un coup d’accélérateur à la dégradation des revenus, notamment avec l’arrivée des premières défaillances d’entreprises ou des plans de licenciement. L’institut Xerfi fait l’hypothèse d’une « forte cassure de la dynamique du pouvoir d’achat des ménages » sur l’année 2020. « En 2019, le gain de pouvoir d’achat avait été de 1,9 % en moyenne » , rappelle-t-il. « En 2020, le pouvoir d’achat devrait reculer de près de 1 %. On observe donc un ralentissement de 2,5 à 3 points du pouvoir d’achat entre 2019 et 2020. Ce dernier pourrait stagner encore en 2021. »

      Xerfi explique cette « cassure » par plusieurs éléments : au chômage partiel, déjà cité, qui va entamer de 0,9 point le pouvoir d’achat des ménages et à la forte dégradation du revenu des indépendants, il faut ajouter les heures supplémentaires et les primes perdues, et enfin le recul de l’emploi à venir. « Seul le recul de l’inflation (importée notamment) permet d’amortir le choc et de redonner un peu d’oxygène à la dépense des ménages » , conclut Xerfi. Ajoutons à cela l’impact des politiques salariales à venir, qui seront « fragilisées » , de même que l’emploi, par la récession, comme le souligne Philippe Waechter, chef économiste chez Ostrum Asset Management.

      Or, si ces dernières années l’Etat a soutenu le pouvoir d’achat, notamment par les baisses d’impôt, le scénario à venir pourrait fort bien être différent. « Le rôle massif de la dépense publique en 2020 pour soutenir le pouvoir d’achat ne peut qu’être temporaire » , analyse Olivier Vigna, chef économiste chez HSBC France. « Prévus pour atteindre des niveaux record en 2020, déficit public et dette publique devront revenir ensuite sur des trajectoires plus soutenables, ce qui rendra l’évolution du pouvoir d’achat tributaire des choix fiscaux à venir. » Au programme de l’année, il faudra sans doute prévoir un retour du débat sur le partage des richesses entre les entreprises et les salariés et les politiques de redistribution.

      #travailleurs_indépendants #économie_grise

    • Les jeunes sont les premiers et les plus touchés par les effets de la récession
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/21/les-jeunes-sont-les-premiers-et-les-plus-touches-par-les-effets-de-la-recess


      Hassan, étudiant confiné dans sa chambre de la residence Evariste Galois, à Villeneuve d’Ascq (Nord), le 18 avril 2020. Sarah Alcalay pour Le Monde

      Les secteurs très affectés par les mesures de confinement sont aussi ceux qui emploient beaucoup de 18-25 ans. Les étudiants récemment diplômés vont également en pâtir.

      Si les jeunes sont les moins touchés par la pandémie, ils sont en première ligne de la crise économique. Ils sont particulièrement employés par les entreprises qui ont dû fermer à cause du confinement : restaurants, commerces, centres de loisirs… Au Royaume-Uni, par exemple, 30 % des employés de moins de 25 ans travaillent dans ces secteurs, contre seulement 13 % des plus de 25 ans, selon l’Institute for Fiscal Studies (IFS), un centre d’études économiques. En France, la situation est similaire.

      « Contrairement à la crise de 2008, qui a aussi touché la finance ou les services professionnels, l’effet est cette fois-ci plus concentré sur les moins qualifiés, les bas salaires et les plus jeunes » , explique Xiaowei Xu, auteure de l’étude de l’IFS.

      Non-renouvellement des CDD

      Le deuxième effet négatif pour les jeunes est qu’ils vont entrer sur le marché du travail au pire moment. Les quelque 700 000 personnes qui vont sortir cette année de formation en France seront les premières victimes de la hausse inévitable du chômage, et leur carrière professionnelle va être durablement affectée. « Lorsque l’entreprise fait face à des chocs, elle essaie de conserver les salariés qualifiés et arrête d’embaucher » , rappelle Camille Landais, professeur à la London School of Economics.

      « La première forme de régulation de l’entreprise en période de crise est le non-renouvellement des CDD et des contrats d’intérim : or, les jeunes sont massivement représentés sur ces postes » . Cet effet s’était fait durement ressentir lors de la crise financière de 2008-2009, lorsque le taux de chômage des 15-24 ans avait augmenté de moitié, atteignant un niveau record de 26,2 % fin 2012.

      Les études au long cours montrent également que démarrer sa vie professionnelle sur fond de crise est pénalisant sur le long terme. Les enquêtes « Génération » menées par le Céreq (Centre d’études et de recherches sur les qualifications) à partir d’un échantillon représentatif de jeunes quittant le système éducatif à tout niveau de formation permettent de suivre leur trajectoire sur le marché du travail jusqu’à sept ans. Leurs conclusions sont sans appel. « On assiste à un ralentissement de la dynamique professionnelle, plus de temps passé au chômage et une trajectoire de stabilisation plus lente vers un CDI » , résume Florence Lefresne, directrice générale du Céreq et docteure en économie du travail.

      Baisse des salaires médians

      Ainsi, au bout de sept ans de vie active, les jeunes qui sont sortis en 2010 − qui ont donc vécu la crise de 2008 − avaient passé 73 % de leur temps en emploi, contre 80 % pour les jeunes sortis de formation en 1998. Pour 13 % des jeunes de 2010, la trajectoire professionnelle a été dominée par le chômage, contre 7 % seulement pour les jeunes de 1998. Seuls 55 % des jeunes de 2010 ont vu leur trajectoire se stabiliser sur un CDI, contre 66 % de ceux de la génération 1998. Toutefois, comme le précise la directrice du Céreq, « l’érosion de la norme du CDI dans le recrutement des jeunes tient sans doute autant de la transformation structurelle du marché du travail que de la crise elle-même » .

      Le choc a été observé de la même façon outre-Manche. Après la crise de 2008, les salaires médians réels ont baissé pour toutes les tranches d’âge pendant quelques années, avant de se redresser et de revenir à peu près au même niveau en 2019. Une exception : ceux qui ont aujourd’hui une trentaine d’années, et qui étaient en début de carrière il y a une décennie. Leur salaire médian demeure d’environ 7 % inférieur à leur niveau de 2008.
      Cet impact de la crise sur les carrières professionnelles n’est pas uniforme pour tous les jeunes. « Il y a de fortes chances que la crise amplifie les écarts observés entre les sans-diplôme et les diplômés , souligne Florence Lefresne. Il ne faut pas oublier que les non-diplômés sont plus durablement atteints en période de crise et connaissent une période plus longue d’exclusion du marché du travail. »

      A titre d’exemple, un non-diplômé de la génération 2010 a passé moins de la moitié des sept premières années de vie active en emploi. A cet égard, l’évolution des dispositifs d’apprentissage, qui sont très dépendants de la bonne santé des entreprises, jouera un rôle crucial. « L’impact de la crise actuelle sur les moins diplômés dépendra pour beaucoup des dispositifs de formation, en particulier des possibilités de maintenir et d’accroître les places en apprentissage, en dépit de la chute de l’activité » , ajoute Mme Lefresne.

      #jeunes #revenu

    • Chômage partiel, hôtellerie-restauration, tourisme
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/22/coronavirus-macron-en-deplacement-en-bretagne-les-ministres-rendent-leur-cop

      ...#hôtellerie-restauration, où 9 salariés sur 10 sont au chômage partiel, et le #BTP, où 93 % des salariés sont également au chômage partiel, a (...) détaillé [la manageure Pénicaud].

      A l’issue du conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a dit ne « pas confirmer » l’hypothèse d’une réouverture des cafés-bars-restaurants pour le 15 juin, dans l’attente du plan d’aide promis par le gouvernement pour ce secteur sinistré. (...)

      Les embauches dans le secteur privé ont connu une baisse mensuelle historique au mois de mars, selon les données de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) : le nombre de déclarations d’embauche de plus d’un mois dans le secteur privé, hors intérim, a plongé de 22,6 % le mois dernier.

      Lors d’une audition par la commission des affaires sociales du Sénat, Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, a prévenu que l’épidémie de Covid-19 allait faire exploser le déficit de la Sécurité sociale à plus de 41 milliards d’euros, « du jamais-vu », même au plus fort de la crise financière en 2008. Le record de 2010 (28 milliards) est effacé et ce montant, « qui peut donner le tournis » , reste de surcroît « une hypothèse favorable », compte tenu notamment de probables annulations de cotisations dans « certains secteurs » , comme la #restauration, l’#hôtellerie ou le #tourisme, a précisé M. Darmanin.

    • Je suis depuis peu en emploi dans une association. On va passer au chômage technique partiel, 3/5 de mai à août compris, avec rémunération complétée par l’asso pour nous laisser à 100 % de la rémunération. Je suis en CDD et j’ai un peu peur que ça grève mes droits au chômage pour plus tard...

      Et puis surtout notre activité n’a pas baissé avec la pandémie, on a annulé un truc massif de l’activité de l’association mais ça prend aussi plein de temps et c’est remplacé par d’autres trucs. Les revenus de l’asso ne sont pas impactés, on n’a pas de clients à servir qui auraient disparu (la baisse est à craindre plus tard, avec la récession économique).

      L’équipe salariée craint que dans cette asso en récession continue depuis des années (démographie assez âgée) cet épisode fasse partie d’un mouvement continu de baisse de la masse salariale. Faire financer par l’État une baisse de productivité pendant la pandémie (les premières semaines on n’a pas fait nos heures, entre les difficultés de concentration et les soucis techniques), c’est réglo, mais en profiter pour faire raquer pour deux mois d’été moins actifs, ça l’est beaucoup moins. Donc on se retrouve à dire non quand on nous demande d’assurer des tâches...

      Et moi je flippe à mort parce que j’ai choisi de ne pas faire de démarche pour renouveler mon revenu garanti (marre d’être une machine à bouffer-chier mon AAH dans un environnement social dont la qualité ne doit qu’à mes efforts) et c’est pile au moment où je n’ai plus aucune chance de retrouver un boulot. J’avais imaginé cette possibilité mais trouver enfin à me caser quelques mois à ma 93e candidature à un boulot de larbin, ça m’avait regonflé le moral et je retombe d’un peu haut.

    • La crise sanitaire entraîne déjà des chiffres du chômage
      catastrophiques

      https://www.mediapart.fr/journal/economie/280420/la-crise-sanitaire-entraine-deja-des-chiffres-du-chomage-catastrophiques

      Sur le front de l’emploi, les mauvaises nouvelles étaient attendues, mais la gravité de la situation a de quoi inquiéter même les plus blasés des experts. Lundi 27 mars, la Dares – la direction statistique du ministère du travail – a exceptionnellement dévoilé les statistiques des inscriptions à Pôle emploi pour le mois de mars, alors que le gouvernement avait décidé de publier ces chiffres seulement tous les trimestres. La situation est totalement hors du commun : fin mars, Pôle emploi a décompté 246 100 personnes de plus inscrites en un mois dans sa catégorie A, celle qui recense les chômeurs n’ayant effectué aucune activité durant le mois.

      Cette hausse mensuelle de 7,1 % est un record, du jamais vu depuis la création de ce décompte statistique en 1996. Au total, l’effectif des catégories A, B, C (qui comprennent des demandeurs d’emploi ayant un peu travaillé le mois précédent) a augmenté de 177 500 personnes en un mois (+ 3,1 %). C’est là aussi une situation inédite, de loin : pour trouver le « record » précédent, il faut remonter à avril 2009, en pleine crise économique déclenchée par le secteur des subprimes aux États-Unis, et la hausse était deux fois moindre, de 86 300 personnes.

      [...] Dans Le Parisien, Muriel Pénicaud reconnaît être « inquiète pour l’emploi » mais « refuse » tout pronostic, arguant de la bonne dynamique de l’emploi jusqu’au début de l’année et promettant des mesures supplémentaires, notamment pour les jeunes. Elle annonce aussi qu’une réflexion avec les partenaires sociaux va s’engager sur les règles de l’assurance-chômage.

      En guise de mesure d’urgence, la ministre a annoncé que, comme en avril, les allocations des chômeurs arrivant en fin de droit seraient reconduites pour le mois de mai. Le second volet de la réforme de l’assurance-chômage, qui devait entrer en vigueur le 1er avril, particulièrement dur pour les plus précaires des demandeurs d’emploi, est quant à lui toujours annoncé comme étant reporté au 1er septembre.

      De quoi exactement vont discuter le gouvernement et les partenaires sociaux ? Mystère.
      En tout cas, il n’est pour l’heure pas question d’abandonner ce second volet de la réforme. Encore moins d’annuler la première partie de la réforme, mise en place en novembre, et qui devait toucher négativement 710 000 personnes en un an.

      [...] Dans une note publiée ce mardi 28 avril en fin de journée, l’Unédic, qui gère le régime, a rendu publics ses calculs. Et l’addition est à l’aune du tsunami qui s’annonce pour l’emploi : cataclysmique. La baisse des cotisations pourrait coûter à l’assurance-chômage 3,5 milliards d’euros entre mars en juin, quand la facture du versement des allocations supplémentaires s’élèverait à plus de 1,3 milliard. Des sommes auxquelles il faut ajouter un milliard d’euros par semaine pour financer le chômage partiel, et encore une centaine de millions hebdomadaires pour assurer le transfert des arrêts maladie vers le chômage partiel.

      Le chômage partiel se doit d’être involontaire : si les enfants peuvent être accueillis à l’école garderie, c’est zéro euro
      https://fr.news.yahoo.com/coronavirus-pas-chomage-partiel-si-refusez-envoyer-enfants-ecole-0853

      « A partir du 1er juin, les parents devront fournir une attestation à leur employeur pour justifier que l’établissement scolaire de leur enfant n’est pas en mesure de l’accueillir. Sans ce justificatif, ils n’auront plus droit au chômage partiel. »

    • Version française, que j’ai découverte après, ici :
      https://twitter.com/VictorPereir1/status/1245355065046687744

      Aproveito o confinamento para rever milhares de fotografias tiradas em vários arquivos franceses e portugueses.
      Vou fazendo uns threads sobre a história da imigração portuguesa em França no século 20.
      Começo pelo início : a Primeira Guerra mundial

      Tudo começa em #1916.
      No século 19 e início do século 20, os Portugueses emigravam muito mas iam principalemente para o Brasil.

      Quase não havia trabalhadores portugueses em França antes de 1916. No fim do século 19, até os censos franceses deixaram de contar Portugueses.

      Porque é que isto muda em 1916 ?
      A França está em guerra e precisa de braços : os homens estão, na maioria, a combater e é necessário aumentar a produção de armas.
      Procura-se mão-de-obra em toda a parte. Recrutam-se trabalhadores nas colónias francesas e até na China.

      Em 1916 começa-se a pensar na hipótese de fazer vir Portugueses. Porquê ?
      O governo de Lisboa – com #Afonso_Costa e #Norton_de_Matos – pretende entrar na guerra europeia (por vários motivos que não posso explicar aqui) e oferece os seus préstimos militares à Inglaterra e à França

      A França aproveita a oportunidade e pede trabalhadores (o que não era a ideia do governo português que queria apenas mandar soldados)
      Mas para conseguir o seu objetivo principa, o governo português cede.

      Em 28 de outubro de 1916, depois de várias semanas de negociações (e de desentendimentos) é assinado um acordo que permite a vinda detrabalhadores portugueses em França.

      Os trabalhadores – que devem ter mais de 32 anos ou estarem livres das obrigações militares – podem obter um contrato de trabalho válido 6 meses

      O governo francês envia a Portugal #Georges_Le_Gentil – especialista de literatura espanhola que mais tarde será um dos precursos do ensino do português e da língua portuguesa em França – para recrutar a mão-de-obra.

      Não se sabe nada, nesta altura, sobre os trabalhadores portugueses porque não existia uma corrente migratória prévia.
      Vários estereótipos nascem neste período. Privilegia-se o recrutamento no norte de Portugal para evitar os lisboetas e alentejanos considerados mais politizados

      Le Gentil instala uma missão francesa de recrutamento da mão-de-obra no Porto. Nas cartas que envia para Paris Le Gentil fala dum Portugal que sofre com as consequências da guerra e com a fome

      Entre 15 000 e 2000 homens chegam em França (por barco ou por comboio). Instala-se um depósito de trabalhadores em Bayonne, no Sul da França, para receber os trabalhadores e envia-los onde foram contratados.

      Os trabalhadores são dispersos em várias áreas, trabalhando em fábricas de guerra em Montluçon, em Givors, perto de Lyon, em Rouen.
      Alguns trabalham nas florestas como lenhadores.
      (aqui nota-se já a presença de emigrantes vindos de Tomar, Pombal e Vila Nova de Ourém)

      O objetivo das autoridades é tirar uma produtividade máxima dos trabalhadores coloniais e estrangeiros.
      É feito um esforço para oferecer comida adatada aos trabalhados. Um dos conselhos dado para agradar os portugueses é propor bacalhau

      Durante a guerra, as autoridades francesas tentam controlar as deslocações dos trabalhadores estrangeiros. Teme-se os espiões. Asim, é em 1917, que aparecem os primeiros bilhetes de identidade que devem ter os estrangeiros.

      Teme-se também que os trabalhadores mudem de patrão para ter melhores salários (originando uma subida dos salários). Outro motivo para vigiar de perto os Portugueses como aqui em Montluçon.

      Como a imensa maioria dos trabalhadores portugueses nunca foram à escola, temos muito poucos documentos escritos por eles.
      Como viviam a vida na fábrica ? como viviam em barracas ? como é que viviam sem saber falar francês num país onde quase ninguém falava português?

      Aqui temos um dos raros documentos escrito por um operário português numa fábrica de #Givors.
      Nota-se a escrita insegura

      No fim da guerra, a maioria dos trabalhadores volta para Portugal. Mas alguns ficam em França, renovando o contranto ou mudando de fábrica.
      Veremos noutro thread o que se passa nos anos 1920 !

      #WWI #première_guerre_mondiale #travailleurs_étrangers #effort_de_guerre #accord #accord_bilatéral

    • Segundo thread sobre a história da imigração portuguesa em França.
      Desta vez, vou falar dos anos 1920. Nesta década a França é o principal país de imigração no mundo.
      Pelo menos 75 000 Portugueses vão emigrar em França nestes anos


      Depois da Primeira Guerra mundial, a França precisa de mão-de-obra estrangeira (já era o caso antes e durante a Guerra).
      A Grande Guerra provocou a morte de quase 1,4 milhão de pessoas, centenas de milhares de pessoas ficaram inválidas (os famosos gueules cassées)

      O norte e o leste do país foram destruídos pelos bombardeamentos e os combates.
      Algumas cidades foram quase completamente destruídas como aqui Arras, no Pas-de-Calais

      As autoridades francesas pretendem atrair imigrantes mas querem escolhê-los.
      A ideia é que é preciso atrair trabalhadores europeus – Portugueses incluídos – porque são considerados assimiláveis.
      Os trabalhadores que vinham das colónias e da China são mandados embora

      Em 1919-1920, a França assina acordos de mão-de-obra com a Itália, a Polónia e a Checoslováquia.
      Uma proposta é feita ao governo português mas é recusada. Já nesta época, a vontade é de guardar a mão-de-obra (para manter os baixos salários) e enviar colonos em Africa

      Assim, nos anos 1920, milhares de Polacos (500 000), de Italianos (alguns fugindo o fascismo), de Espanhois e de Russos chegam em França

      Em 1931, a França é o país que conta a % mais forte de estrangeiros (mais que os USA que limitaram fortemente as entradas em 1920 e 1924 com quotas)
      Apesar da ausência de acordo, uma imigração portuguesa desenvolve-se.
      Um depósito para acolher os trabalhadores portugueses é criado perto da estação de comboio de Hendaye, junto à fronteira espanhola

      O depósito abre em 1 de Junho de 1919.
      Este criação não agradou muito as autoridades municipais : teme-se que os trabalhadores portugueses possam introduzir doenças (como a gripe espanhola – que não era espanhola)

      O papel do depósito é de receber os trabalhadores, vacina-los, verificar os documentos e contrato de trabalho (não caso de o trabalhador ter tal contrato), dar contratos de trabalho aos que não tinham contatos prévios

      Tira-se fotografias dos trabalhadores que, muitas vezes, viajaram bem vestidos. Mas muitos deles não assinam o salvo-conduto que lhes é dado para prosseguir viagem, não sabendo ler e escrever

      Esta imigração serve perfeitamente os objetivos das autoridades francesas que conseguem diversificar a mão-de-obra estrangeira.
      Em período de desemprego, fecha-se o depósito e a fronteira e os imigrantes ficam bloqueados em Irun, do #lado espanhol.

      Entre 1920 e 1930, 71 472 Portugueses passam pelo depósito

      Quem são e onde é que vão trabalhar os Portugueses?

      Em primeiro lugar, 85% são homens que pensam ficar apenas alguns meses

      Muitos vão nas regiões ditas libertadas, no norte e no leste.
      Algumas cidades como Reims foram quase completamente destruídas.
      Em 1924, vivem 3500 Portugueses em #Reims

      O fato dos estrangeiros irem reconstruir cidades destruídas não impede discursos racistas.
      nesta notícia de 1920 é dito que os estrangeiros – incluído os Portugueses - são perigosos e podem introduzir doenças (não se pensa no covid-19 mas na gripe espanhola)

      Depois desta notícia um inquérito é feito junto dos trabalhadores portugueses que tinham chegado recentemente (alguns estavam doentes)

      Encontra-se também portugueses no #Pas-de-Calais e na Somme, zonas onde combateu o Corpo Expedicionário Português em 1917-1918

      Alguns soldados ficaram (alguns depois de terem encontrado noivas francesas). Outros, depois duma estadia em Portugal, regressaram na terra que conheciam e onde a mão-de-obra estrangeira era necessária para a reconstrução

      Em 1924 é criado uma sociedade portuguesa de assistência mutual em Arras.
      Esta sociedade junta trabalhadores portugueses e antigos soldados que todos os anos comemoram a batalha de La Lys (9 de abril de 1918)

      No resto do país, trabalhadores portugueses trabalham nas obras e na construção civil. Por exemplo, várias empresas do país basco francês empregam portugueses.
      São trahalhadores pouco qualificados, a maioria é analfabeta

      Também encontram-se trabalhadores portugueses em fábricas – perto de Rouen – ou nas minas – perto de #Saint-Etienne

      Vivem muitas vezes à parte da sociedade francesa, em barracas, em cantinas, junto das obras (como aqui numa cantina junto duma barragem em construção)


      Muitos deles mudam muito frequentemente de patrão e de lugar (para tentar ganhar mais dinheiro e voltar depois para Portugal)

      Sinal que é uma migração temporária, apenas há 15% de mulheres.
      Algumas delas não se limitam a acompanhar o marido : trabalham em fábricas como no caso das indústrias de conservas de peixe do país basco

      No fim dos anos 1920, algumas algarvias – o Algarve tinha uma importante indústria de conservas de peixe mas que entra em crise nos fim dos anos 1920 – vão trabalhar no país basco

      A região parisiense já atrai muitos portugueses que se encontram nos arredores (pobres) de Paris como em Saint-Ouen
      Em 1931, 26% dos Portugueses vivem na região parisiense

      Sinal duma certa estabilização de parte dos Portugueses um Portugal football Club à Paris é criado em Saint-Ouen em 1930

      Estes Portugueses têm muito bom gosto como se pode ver no documento

      Não se sabe muito sobre este clube mais em 1930 ele participa num torneio internacional anti-fascista
      Como veremos o Partido Comunista Francês tenta politizar os Portugueses dos arredores parisienses, nomeadamente em Saint-Ouen

      Além da imigração regular que passava por Hendaye, já existia uma imigração irregular com falsos documentos e travessias clandestinas dos Pirineus com passadores

      Na imprensa da altura, já se critica os passadores e os falsificadores de documentos.
      Um exemplo de 1927

      Mas como os trabalhadores eram na maioria analfabetos, quase não existem documentos escritos por eles e que nos permitem conhecer melhor como (sobre)viviam num país estrangeiro, onde não dominavam a língua

      O próximo thread será sobre um período mais difícil para os Portugueses (e os estrangeiros em geral) : os anos 1930 onde milhares de Portugueses tiveram que sair de França

      Para mais informações sobre os anos 1920 e o depósito de Hendaye, podem dar uma olhadela aqui (mas é em francês)

      https://www.academia.edu/37726596/Trier_et_inspecter_les_travailleurs_%C3%A9trangers_les_d%C3%A9p%C3%B4ts_de

      #sauf-conduit #frontières

    • 3e thread sur l’histoire de l’immigration portugaise en France.
      On arrive aux terribles années 1930 : crise économique, #xénophobie et #expulsions.
      Les Portugais sont loin d’être épargnés et des milliers d’entre eux sont contraints au départ

      On revient d’abord un peu en arrière.
      En 1929 et 1930, 30 000 Portugais arrivent en France.
      En 1930, autant de Portugais partent en France qu’au Brésil, principale destination de l’émigration portugaise jusqu’alors.
      Le Brésil est durement touché la crise économique dès 1930

      En 1931, le recensement français compte 49 000 Portugais (loin des 250 000 Belges, 350 000 Espagnols, 500 000 Polonais, 800 000 Italiens
      La France est alors le premier pays d’immigration au monde

      Les effets du krach de Wall Street touchent la France en 1931.
      Une des conséquences est la réduction des entrées d’immigrés (sauf pour les travailleurs agricoles)
      En août 1932, une loi impose des quotas d’étrangers par profession ou branche de l’industrie ou du commerce

      Le dépôt des travailleurs portugais ferme ses portes au milieu des années 1930.
      Il n’est plus question de faire venir de nouveaux travailleurs.
      Dans les années 30 la France rechigne aussi à accueillir des milliers de réfugiés qui fuient le nazisme et les persécutions franquistes

      En seulement 5 ans, la population portugaise se réduit de 42%.
      Il n’y a plus que 28 000 Portugais selon le recensement de 1936.
      Face aux expulsions, les Portugais n’ont pas un traitement de faveur car ils sont peu nombreux ou prétendument bien "intégrés". Au contraire.

      Les Portugais sont souvent les derniers arrivés – le pic des arrivées est en 1929-1930.
      Derniers arrivés, premiers à être virés par leurs employeurs.
      Ils sont souvent seuls, sans leurs épouses, vivant en marge (dans des garnis, des baraquements). Ils sont désormais inutiles

      La plupart sont en France que depuis quelques mois : ils parlent peu ou mal le français, ils n’ont pas de qualifications particulières, sont peu connus de leurs employeurs ou des maires. Ils sont donc souvent les premiers à être renvoyés.

      Pas d’accord de main-d’oeuvre entre le Portugal et la France. Donc les Portugais ne touchent pas de nombreuses aides sociales dont le chômage (l’allocation est versée par les municipalités et réservée aux Français et aux nationaux d’un pays qui a signé un accord de réciprocité).

      Sans emploi, sans revenus, beaucoup partent donc au Portugal d’eux-mêmes.

      Dans certains cas, ils n’ont pas l’argent pour payer le voyage. Ils obtiennent d’être rapatriés par un consulat portugais (les consulats essaient évidemment de réduire cette dépense)

      Pour réduire ces retours (et la prise en charge financière de ces rapatriements et l’arrivée d’une population sans emploi et potentiellement subversive), les diplomates portugais essaient de défendre leurs ressortissants en France

      Les diplomates demandant qu’on donne des papiers et des allocations chômage aux anciens combattants de la Grande guerre, à ceux étant en France depuis plus de 10 ans, aux mariés avec des Françaises, ou ayant des enfants légitimés de mères françaises.
      Mais c’est du cas par cas

      En 1935, le gouvernement Flandin (droite) finance le #rapatriement des travailleurs étrangers au #chômage. Il s’agit de faire partir le plus possible d’étrangers (communiqué du ministère du travail reproduit dans l’Humanité en mai 1935)

      Dans les années 30, les Portugais ont des difficultés pour rester légalement en France : on ne leur renouvelle pas toujours leur carte d’identité de travailleur, document qu’ils doivent posséder pour rester légalement en France. Sans ce document, ils reçoivent des refus de séjour

      Ne pas avoir d’emploi, travailler dans un secteur où des travailleurs français sont au chômage, autant de motifs pour ne pas renouveler les cartes d’identité.

      On refuse le séjour de Joaquim Alves alors qu’il vit en France depuis 1916. Mais il est sans ressources, ni logement...

      De nombreux Portugais sont donc ainsi refoulés car ils n’ont plus de documents en cours de validité

      Et un des moyens pour les autorités françaises de réduire les étrangers « en trop » (on dit parfois indésirables), c’est de les expulser.
      On expulse alors à tour de bras : après un délit (parfois même mineur comme un vol) les arrêtés d’expulsions tombent

      On expulse aussi ceux dont on considère qu’ils font de la politique (ce qu’un étranger ne doit pas faire). Ainsi, avoir participé à une manifestation ou à une grève, avoir exprimé une opinion politique dans un café, un propos défaitiste en 1939-1940 amène souvent à l’expulsion

      Les Portugais - et les étrangers en général - vivent donc toujours avec cette épée de Damoclès : ils risquent l’expulsion au moindre écart, s’ils osent participer à des mouvements sociaux. L’expulsion permet de brider les revendications de ces travailleurs

      Les motivations fournies par les services de police sont souvent moralistes et reposent parfois sur de simples "mauvaises réputations". Un tel boit, un tel est querelleur.
      Je vous laisse apprécier la prose ci-dessous

      Face à ces pratiques d’éloignement, les Portugais sont souvent démunis : ils sont analphabètes, isolés, ne parlent pas le français, n’ont pas de capital social.
      Beaucoup ne font appel ni à leur consul, ni à leur employeur, ni au maire ou à un député

      Beaucoup disent ainsi accepter de se conformer à l’arrêté d’expulsion qui leur est notifié par les gendarmes ou la police et prétendent rentrer au Portugal (mais certains restent parfois en France dans l’illégalité)

      Il y a toutefois des exceptions. Certains demandent de l’aide : à des amis et/ou à des personnalités politiques.
      Ici un travailleur d’Ivry qui est appuyé par Maurice Thorez, le fils du peuple

      Certains font écrire des lettres par des connaissances françaises.
      Ils plaident leur cause, donnant l’image de l’immigré parfait aux yeux des autorités : un bon travailleur, qui ne fait pas de politique, s’occupe de sa famille et aspire à devenir Français

    • 4e thread sur l’histoire de l’immigration portugaise en France au 20e siècle.
      Cette fois, j’évoque l’exil et les mobilisations politiques entre 1927 et 1939
      Cela parle de révoltes, de grèves, de bombes, d’Espagne et de... Sénégal

      Le 28 mai 1926, des militaires – dont d’anciens officiers ayant participé à la Première guerre mondiale – organisent un coup d’état à Braga, ville plutôt conservatrice du nord du pays
      Les insurgés descendent ensuite vers Lisbonne et prennent le pouvoir, sans trop de résistances

      Ces militaires prétendent « sauver » le Portugal du chaos et mettre fin la domination du Parti Démocratique qui est le plus souvent au pouvoir. La situation financière du pays est mauvaise, notamment à cause des effets de la participation du pays à la Première Guerre mondiale

      C’est la fin de la Première République (1910-1926). Mais tout le monde n’en a pas conscience à l’époque.
      Car cette République a été très instable : 45 gouvernements en 16 ans, des coups d’état, une guerre civile, deux dictatures.

      Beaucoup pensent donc qu’au bout de qqs mois, la situation va revenir à la normale.
      Les militaires du 28 mai 1926 ont d’ailleurs des objectifs différents, certains veulent instaurer une république conservatrice, d’autres une dictature à la Primo de Rivera ou à la Mussolini

      D’ailleurs les militaires sont divisés et le pouvoir reste fort instable.
      Ces divisions permettront à un peu connu professeur de l’Université de Coimbra - António de Oliveira Salazar - de prendre progressivement le pouvoir après son arrivée au ministère des Finances en 1928

      Les dirigeants républicains - qui pour la plupart son restés au Portugal - pensent qu’ils vont pouvoir reprendre le pouvoir et organisent une insurrection avec des militaires fidèles à la république en février 1927 à Lisbonne et à Porto.
      Mais c’est un échec

      Plusieurs dirigeants s’exilent en France et notamment Bernardino Machado, deux fois président de la République (et deux fois chassé par une révolution). A Paris réside déjà Afonso Costa – leader historique républicain - qui n’est pas rentré au Portugal après la PGM

      Au fil des révolutions, la France a accueilli de nombreux exilés portugais : libéraux à la fin des années 1820, républicains chassés par Sidonio Pais en 1917-1918, etc
      Par ex, un des chefs monarchistes - Paiva Couceiro - a vécu dans le pays basque avant la PGM

      En 1927 les exilés républicains fondent la ligue de défense de la République, (la ligue de Paris). Leur objectif est notamment d’éviter que la dictature obtienne une reconnaissance internationale officielle.

      La ligue organise une campagne pour que la SDN ne cautionne pas un emprunt sollicité par le gouvernement portugais pour équilibrer ses comptes fortement déficitaires

      Les exilés essaient aussi de faire tomber la dictature par la force. On appelle cela le reviralho, la volonté de revenir en arrière, à la République. Jusqu’en 1931, plusieurs coups d’état sont planifiés

      Certains sont déjoués par la dictature qui se dote de polices politiques. D’autres explosent comme la révolte à Madère, en Guinée Bissau et aux Açores en avril 1931.
      Mais à chaque fois la dictature militaire résiste. Les insurgés sont emprisonnés et certains d’entre eux envoyés dans les colonies

      Certains déportés dans les colonies – où ils sont laissés en liberté – ne renoncent pas et essaient de reprendre le combat.
      C’est notamment le cas de Silvino Augusto Ferreira, un des plus tenaces opposants à la dictature

      Silvino est né en 1899. Ouvrier à l’arsenal de Lisbonne, un des bastions du mouvement ouvrier portugais, il participe aux organisations du syndicalisme révolutionnaire de tendance anarchiste.

      Dans les années 1920, il est l’un des principaux dirigeants du Parti Communiste Portugais, parti crée en 1921, d’une scission au sein du mouvement anarchiste.
      Il est déporté en Guinée-Bissau en 1928 avec d’autres insurgés à cause de sa participation aux tentatives d’insurrection

      Avec des camarades, il traverse la Guinée-Bissau pour se rendre au Sénégal. A Dakar, il réussit à prendre un bateau qui va à Marseille. Une fois en France, il rejoint la ligue de Paris pour continuer son combat contre la dictature

      Il reste quelques mois en France puis repart clandestinement au Portugal en 1932 pour continuer ses activités politiques et syndicales

      Cependant, après l’échec de la grève générale révolutionnaire lancée le 18 janvier 1934 par les anarchistes et quelques communistes, il s’exile en Espagne.
      Il n’arrête cependant pas le combat.

      Il revient encore au Portugal et participe à la tentative d’assassinat de #Salazar qui a lieu le 4 juillet 1937

      Salazar, Premier ministre depuis 1932, va tous les dimanches à la messe. Des opposants mettent une bombe dans les égouts, devant l’église où il se rend. Mais la bombe est mal placée et Salazar en sort indemne (en 1973, Carrero Blanco lui n’aura pas cette chance)

      Silvino Augusto Ferreira est arrêté en 1940 et reste 19 ans en prison. Il s’exilera de nouveau en France en 1960, fortement malade et diminué physiquement par son incarcération

      Après l’échec de 1931, le reviralho s’essoufle. Les exilés se déchirent souvent entre eux, de multiples tensions opposent certaines personnalités qui continuent de ruminer les échecs de la république et des différentes insurrections.

      De plus, en 1931, plusieurs exilés quittent la France pour aller en Espagne où s’est implantée la République le 14 avril 1931

  • Dans les quartiers populaires, « si on remplit le frigo, on chope le corona », Louise Couvelaire, le 18 avril 2020
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/04/18/dans-les-quartiers-populaires-si-on-remplit-le-frigo-on-chope-le-corona_6036


    File d’attente pour une distribution de nourriture organisée par AC Le Feu et le centre social Toucouleurs à Clichy-sous-Bois, le 15 avril. GUILLAUME HERBAUT POUR « LE MONDE »

    Les quartiers populaires entament leur deuxième mois de confinement à bout de souffle, mais encore soutenus par un faisceau de solidarités inédites, réinventées dans l’urgence.

    Il y a ceux qui ont encore un travail et prennent tous les risques pour le garder. Ceux qui craignent pour l’avenir de leurs enfants. Et il y a ceux qui ont faim. Ce sont souvent les mêmes. Les quartiers populaires entament leur deuxième mois de confinement à bout de souffle, mais encore soutenus par un faisceau de solidarités inédites, réinventées dans l’urgence.

    Ce matin-là, à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), les premiers sont arrivés à 8 heures, soit trois heures avant l’ouverture des portes de la maison de la jeunesse de la ville. A 11 heures, la file d’attente s’étirait sur 300 mètres. Mercredi 15 avril, ils étaient des centaines à patienter pour remplir leurs caddies de salades, courgettes, pommes, yaourts et crème fraîche. Sans débourser un centime. Organisée par le collectif AC Le Feu et le centre social Toucouleurs, avec le soutien de la Fondation Abbé-Pierre, cette distribution alimentaire était la troisième en huit jours. 190 personnes se sont présentées la première fois, 490 la seconde, puis 750.

    Les 50 palettes de nourriture données par des anciens des quartiers, grossistes, semi-grossistes et vendeurs – « qui n’ont pas oublié d’où ils venaient », se félicite le cofondateur de l’association, Mohamed Mechmache –, n’ont pas suffi à répondre à la demande. Du jamais vu. « Il y a urgence dans ces territoires, tout va se casser la gueule, alerte le cofondateur d’AC Le Feu. Des centaines de personnes que nous ne connaissions pas sont en train d’apparaître sur nos radars. On ne sait pas comment ils vont trouver les ressources un mois de plus pour se nourrir. »

    Dans la queue, il y avait Samia*, une aide-soignante de 42 ans, mère de quatre enfants, dont le salaire ne suffit plus à financer le budget nourriture du foyer, qui a été multiplié par trois depuis le début du confinement. Il y avait Evana* aussi, la mine lasse, assise sur son déambulateur, le visage recouvert d’une épaisse couche de fond de teint trop clair. Evana a 48 ans mais elle en fait vingt de plus. Elle ne s’est jamais remise d’un accident de voiture qui l’a laissée avec un bassin cassé. C’était en 2014. Depuis, elle n’arrive pas à rester debout plus de quelques minutes et vit d’une petite pension d’invalidité qui ne suffit pas à payer son loyer. Le confinement est en train de la clouer sur place. Jusqu’à présent, ses amis et sa famille l’aidaient à boucler ses fins de mois en lui donnant des « petits billets de 10 euros ou 20 euros par-ci par-là, mais ils ne peuvent plus venir me voir, alors j’accumule les dettes et je n’ai plus rien pour nous nourrir, moi et ma fille ».
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    Pour des familles, la cantine est le seul repas de l’enfant

    Lors de son allocution du 13 avril, Emmanuel Macron a annoncé le versement d’une aide financière exceptionnelle pour « les familles modestes avec des enfants afin de leur permettre de faire face à leurs besoins essentiels ». Chaque famille bénéficiaire du RSA ou de l’Allocation de solidarité spécifique (ASS) recevra 150 euros, plus 100 euros par enfant, et les familles touchant des aides au logement percevront 100 euros par enfant. « Pffff…, souffle Ahmed*, ça ne va pas suffire. » Ahmed n’est pas du genre commode. Père autoritaire de sept enfants, il est au chômage partiel depuis que le restaurant dans lequel il fait la plonge a fermé ses portes. « A force de rester là sans rien faire, mes enfants ont faim toute la journée et ce que je touche ne suffit pas ! », lance-t-il, sur les nerfs. Avec l’arrêt de la cantine à 1 euro le déjeuner, il n’a plus les moyens de subvenir aux besoins de sa famille. Une situation qu’il vit comme une humiliation. A peine évoqué les paniers repas qui lui sont offerts par une association et il raccroche sans préavis.

    « Dans certaines familles très modestes, le repas de la cantine est le seul repas de la journée de l’enfant, témoigne Eddy*, 42 ans, éducateur de vie scolaire dans un lycée du département, qui, « en temps normal », distribue des barquettes à emporter composées des restes du jour aux élèves les plus démunis. « Avec le confinement, nous avons créé un groupe WhatsApp pour tenter d’identifier les plus en difficultés et chacun de nous achète ce qu’il peut pour eux. Le Coronavirus a un effet loupe sur tous les dysfonctionnements et toutes les inégalités. »


    A Clichy-sous-Bois, le 15 avril. GUILLAUME HERBAUT POUR « LE MONDE »

    Ahmed reçoit ses paniers de l’association Têtes grêlées, lancée par Sylla Wodiouma, surnommé « Djoums » dans le quartier des Quatre-Chemins, à Pantin. Le jeune homme de 34 ans distribue chaque semaine quelques dizaines de « kits » composés de nourriture et de produits d’hygiène qu’il a pu financer grâce à l’appel aux dons lancé sur la plate-forme Leetchi. Il a récolté un peu plus de 6 000 euros en trois semaines. « Beaucoup de familles qui travaillaient en tant qu’intérimaires ou non déclarées n’ont plus rien, elles ont tenu deux semaines et puis tout s’est effondré », raconte Djoums. Les listes de personnes à soutenir, dont les noms lui sont signalés par des voisins, des travailleurs sociaux et des amis, « explosent », témoigne-t-il.
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    Tenaillée par la « honte »

    Sur ces listes, figure désormais Nassira*. La jeune femme de 29 ans parle à voix basse pour ne pas réveiller ses quatre filles âgées de 13 ans à cinq mois. Il est pourtant midi. « Les aînées se couchent vers 2 heures du matin et je les laisse dormir le matin, je les réveille à l’heure du déjeuner, peu avant de mettre les petites à la sieste, comme ça, elles peuvent être un peu tranquilles pour faire leurs devoirs. » Sans travail ni mari, elle vit des allocations familiales et accueille dans son petit deux pièces de 41 mètres carrés du quartier des Courtillières son père de 65 ans atteint d’un cancer du foie. Elle dort avec ses quatre filles dans une chambre minuscule et ne veut surtout pas qu’elles sachent qu’elle n’a plus les moyens de les nourrir. « Qu’est-ce que mes enfants vont penser de moi, que je ne suis pas capable de prendre soin d’elles ? » confie-t-elle, tenaillée par la « honte ».

    Fatoumata* elle aussi a honte. Et peur. Sans-papiers ivoirienne, elle se terre avec ses trois enfants dans une modeste HLM d’une cité de l’Essonne qu’elle sous-loue pour 300 euros par mois. Elle n’est pas sortie de chez elle depuis le début du confinement, pas même pour faire des courses, terrorisée à l’idée d’être contrôlée par la police omniprésente et susceptible de lui demander attestation et pièce d’identité à tout instant. Impossible de se faire livrer, elle n’a plus un sou. La nourriture commence à manquer. Fatoumata travaillait jusqu’au début du mois de mars : elle faisait des ménages dans des hôtels en « empruntant » les papiers d’une autre moyennant 20 % sur les sommes qu’elle rapporte. Mais il ne reste rien des 800 euros gagnés entre le mois de février et le début du mois de mars. C’est sa fille aînée de 16 ans qui a fini par lancer un SOS à la responsable d’une association de quartier qu’elle a l’habitude de fréquenter. La directrice a mis 80 euros de sa poche pour lui faire un premier marché et le déposer devant sa porte. « Toutes les associations et les centres sociaux sont fermés, les gens ne savent pas vers qui se tourner », dit-elle. L’une de ses collègues a pris la suite la semaine suivante.

    Au moment où certaines familles apparaissent pour la première fois sur les radars des associations, d’autres, au contraire, ne répondent plus à l’appel. Comme en témoigne une professeure de français dans un collège de Seine-Saint-Denis qui dit avoir perdu le contact avec 40 % de ses élèves. Dans les quartiers Nord de Marseille, Fatima Mostefaoui tire la sonnette d’alarme. Dans un texte rédigé au nom du collectif des femmes des quartiers populaires, elle écrit : « Je suis pauvre, triste, un peu en colère ; non, beaucoup en colère (…). Hier déjà dans ma cité, la réussite scolaire était un rêve inaccessible. Alors là, pour moi, l’école à la maison, c’est un tsunami qui va me noyer et emporter mes enfants ». Fondatrice de l’association Avec Nous, la militante a lancé l’opération « Partage ton Wi-Fi » pour inciter les résidents qui disposent d’un réseau Internet à en faire bénéficier leurs voisins en dévoilant leurs codes d’accès.

    A deux doigts de « tout lâcher »

    Nadia*, elle, est à deux doigts de « tout lâcher », le suivi des devoirs à la maison auxquels elle « ne comprend rien », les courses au rabais qui l’obligent à nourrir ses deux enfants de pain fait maison et de pâtes, les négociations « qui n’aboutissent à rien » avec son bailleur social pour lui permettre d’échelonner le paiement de son loyer. A 45 ans, elle vit dans le 3e arrondissement de Marseille, l’un des plus pauvres de la cité phocéenne. Le 17 mars, premier jour du confinement, elle a perdu son travail − au noir, en tant que femme de ménage pour des particuliers − et la rémunération qui allait avec − un peu moins de 500 euros par mois. « Ma voisine est en dépression, je ne vais pas tarder à la suivre », annonce-t-elle en aspirant sur sa cigarette. Elle n’a qu’une crainte : que cette épidémie de Covid-19 « détruise l’avenir de [ses] enfants ». Son fils, lycéen, et sa fille, collégienne, sont en train de « perdre le fil », dit-elle, et d’accumuler un retard qu’ils ne sont pas sûrs de pouvoir rattraper malgré le prêt d’un ordinateur via l’association Avec Nous.


    750 personnes sont venues récupérer de la nourriture lors de la distribution du 15 avril à Clichy-sous-Bois. GUILLAUME HERBAUT POUR « LE MONDE »

    A 800 kilomètres de là, on a croisé Sofia* sur un bout de trottoir de Clichy-sous-Bois, un cabas dans chaque main remplis de denrées gracieusement distribuées par AC Le Feu. 16 ans à peine, silhouette fluette, mots écorchés, cette « fervente lectrice » d’Emile Zola évoque sa mère, femme au foyer, son père, qui a pris la poudre d’escampette, elle raconte les efforts « immenses » qu’elle fournit pour figurer parmi les premières de sa classe de 2nde, parle de « l’influence de son milieu » qui la condamne « à la misère » pour résumer l’angoisse de ce confinement et des conséquences « tragiques » sur sa vie, elle raconte les « droits qu’elle n’a jamais eus » et les « chances qu’elle n’aura jamais plus ». Elle en est convaincue. Sofia est en colère, elle est en train de décrocher, et elle le sait. Impossible de suivre le rythme de l’école à la maison. Chez elle, « pas d’ordinateur, pas d’imprimante, un seul téléphone pour quatre enfants ». Tout est dit. Elle tourne les talons. « Si ceux qui ont de la chance dans la vie s’inquiètent de l’après, interroge Mohamed Mechmache, imaginez ce que ressentent ceux qui n’ont rien. » Ou si peu.

    Le père Patrice Gaudin les voit chaque matin aux arrêts de bus, les aides-soignantes, les caissières, les livreurs, les travailleurs du BTP, les éboueurs. Chaque matin, il voit ces « colonnes de travailleurs de l’ombre » passer devant son église du christ Ressuscité plantée au cœur de Bondy Nord, en Seine-Saint-Denis, tous ces « héros silencieux de nos cités » dont il admire le « sens du devoir ». Le « père Patrice », comme l’appellent les résidents du quartier, se dit « horrifié » par les inégalités que génère ce confinement. Avec sa carrure de rugbyman et son franc-parler − « avant d’arriver ici il y a cinq ans, j’y connaissais que dalle aux cités » −, il veut défendre l’honneur de ceux dont « on dit trop souvent depuis quelques semaines qu’ils ne respectent pas les règles du confinement » et à qui « on ne rend pas assez justice » malgré les risques auxquels ils sont exposés au quotidien.
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    La conviction d’avoir « un rôle important »

    Keltoum* a subi les foudres de son mari, furieux qu’elle se mette en danger. « Il aurait préféré que je m’arrête, mais finalement il a compris. » La jeune femme de 36 ans a dix ans de labeur dans la grande distribution derrière elle et la conviction d’avoir « un rôle important ». Elle occupe le poste de manager dans les rayons d’un petit supermarché du 93. Six de ses collègues ont fait valoir leur droit de retrait. Ils ont été remplacés par des étudiants de l’université Paris 8 Vincennes Saint-Denis. « Il faut faire tourner le magasin, dit-elle. Si je m’absente, il n’y aura plus rien dans les rayons. »

    Keltoum est responsable des commandes et du réapprovisionnement. A l’occasion, elle fait aussi des remplacements en caisse. Depuis le 17 mars, le panier moyen du consommateur a presque doublé, passant de 12 euros à 22 euros. « Les gens achètent plus, du coup, j’ai une charge de travail deux à trois fois supérieure à la normale, le tout dans une atmosphère très pesante », confie-t-elle. Tous les jours depuis un mois, la jeune femme adopte le même rituel en rentrant chez elle : elle ouvre la porte, pose son sac à terre, retire ses chaussures, se déshabille dans l’entrée, met le tout à laver et fonce sous la douche. « J’essaie de pas être parano mais il y a de l’angoisse, et encore, heureusement qu’on a des visières maintenant pour nous protéger des clients. »

    Depuis trois semaines, Phaudel Khebchi passe ses journées à imprimer des visières en 3D qu’il distribue ensuite aux caissières et aux personnels soignants des commerces et hôpitaux voisins. Directeur du musée numérique la Micro-Folie, à Sevran (93), il a déjà fabriqué plus de 200 visières qu’il a appris à confectionner grâce aux fiches techniques partagées sur Internet par les « makers » des visières solidaires. « Le plus pénible, se désole Keltoum, c’est de voir que beaucoup de gens n’ont rien changé à leurs habitudes, ne serait-ce que par respect pour nous. Ils viennent faire leurs courses tous les jours, parfois plusieurs fois par jour, et parfois, seulement pour s’acheter une barquette de fraises. »

    « Si on se retire, qu’est-ce que les gens vont devenir ?, lance Sosthène*, le directeur du supermarché, tout aussi habité par sa mission que sa manager des rayons. On est un peu comme le personnel de santé, on a besoin de nous. » Lorsqu’il a entendu la ministre du travail, Muriel Pénicaud, le 1er avril, inviter les entreprises privées à verser une « prime exceptionnelle de pouvoir d’achat » (défiscalisée et exonérée de charges salariales et patronales) de 1 000 euros destinée à « soutenir ceux qui sont au front », il a cru pouvoir annoncer une bonne nouvelle à ses 25 salariés. « Sauf que pour l’instant, personne ne nous en a parlé, s’inquiète le directeur. Cette prime, c’est une aide financière, oui, mais pas seulement, c’est aussi une forme de reconnaissance dont nous avons tous besoin pour tenir le coup psychologiquement. »

    « Moi, la prime de 1 000 euros, je n’y ai pas droit ! », affirme Stéphane Lafeuille. Depuis trois ans, le quadragénaire est éboueur intérimaire à Champigny-sur-Marne (Seine-et-Marne). Il n’a jamais décroché de CDI, il enchaîne les contrats journaliers payés au smic. « Avec mes collègues intérimaires, on vit dans la grande précarité. Si on remplit le frigo, on chope le corona. » Avant l’intervention de Mamadou Sy, commercial et conseiller municipal, qui a dégoté un lot de 100 masques qu’il a distribué aux éboueurs de la ville, il travaillait sans aucune protection. « Aujourd’hui encore, on fait nos tournées avec des petits gants en plastique alors que les poubelles des particuliers débordent et que les gens jettent leurs déchets médicaux, leurs mouchoirs, leurs masques et leurs gants en vrac dans les poubelles aux couvercles jaunes normalement exclusivement dédiées au tri sélectif, dénonce-t-il. L’angoisse est permanente, si j’attrape le virus, je n’ai rien, aucun filet de sécurité. » Impossible d’exercer un quelconque droit de retrait, il n’est pas salarié.

    « A ce rythme, dans un mois, nous, travailleurs au noir, travailleurs précaires, habitants des quartiers, enfants des quartiers, on va se retrouver définitivement hors-jeu, redoute Nadia, de Marseille. Pour l’instant, on tient grâce aux solidarités locales et parce qu’on ne veut pas se laisser faire. Mais pour combien de temps encore ? »

    #travailleurs_précaires #solidarité

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