• #Hubert_Védrine, le #bâillon en bandoulière
    https://afriquexxi.info/Hubert-Vedrine-le-baillon-en-bandouliere

    Costume et cravate sombres, chemise bleu ciel, lunettes rectangulaires à bords épais sur le bout du nez et aplomb caractéristique : ce 25 mars, devant les juges de la 17e chambre du tribunal de Paris, Hubert Védrine affirme ne pas avoir « une doctrine de poursuite » mais que « trop, c’est trop », raison pour laquelle il attaque pour « complicité de diffamation publique envers particulier » le journaliste Patrick de Saint-Exupéry. De quoi s’agit-il ? Le 3 mars 2021, invité dans l’émission À l’air libre du journal Mediapart pour la sortie de son livre La Traversée (Les Arènes), l’ancien reporter du Figaro, l’un des premiers journalistes à avoir mis en cause la France dans le #génocide des #Tutsis, qui a fait près de 1 million de morts entre le 6 avril et le 15 juillet 1994, s’en prend violemment à l’ancien secrétaire général de l’Élysée (de 1991 à 1995).

    Selon Patrick de Saint-Exupéry, Hubert Védrine est un « négationniste », qu’il compare à Robert Faurisson (négationniste de la Shoah). Il lui reproche de relayer depuis trente ans la thèse du « double génocide ». Pour lui, les propos de l’ancien ministre sont même comparables à ceux de Théoneste Bagosora, le « cerveau » du génocide qui a nié son existence durant son procès au Tribunal pénal international pour le #Rwanda (#TPIR), admettant du bout des lèvres « des massacres excessifs ». La thèse du double génocide, interrogée dès novembre 1994 par François Mitterrand1, entend minimiser celui, avéré, perpétré contre les Tutsis au Rwanda, en invoquant d’autres #massacres dans l’est du Congo qui auraient fait 3 à 4 millions de morts depuis 1994. En d’autres termes, si génocide des Tutsis il y a eu, un génocide des Hutus aurait également eu lieu.

    #rdc

  • Récits de rescapés du génocide des Tutsi en préfecture de Gikongoro

    Sous la direction de Florence Prudhomme et Michelle MullerAvec la collaboration d’Odette MukantagaraClassiques Garnier, 2024 Trente ans ont passé depuis le début du Génocide des Tutsi, en avril 1994 au Rwanda. En 2004, pour accompagner les rescapé·es vers la reconstruction de soi, nous avons construit avec et pour elles et eux une Maison de quartier à Kigali

    En 2004, pour accompagner les rescapé.es vers la reconstruction de soi, nous avons construit avec et pour elles et eux une Maison de quartier à Kigali. Dix ans plus tard, nous avons créé au sein de cet espace un Atelier de mémoire, qui a donné naissance à deux publications : Cahiers de mémoire, Kigali 2014 et Cahiers de mémoire, Kigali 2019 (Classiques Garnier).

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/03/11/recits-de-rescapes-du-genocide-des-tutsi-en-pr

    #international #rwanda #genocide #tutsi

  • Entendez-nous

    Par leurs témoignages, par leurs réflexions, par leur Appel final à l’Humanité, Espérance, Annonciata, Esther, Chantal, Immaculée, Dancille, Sylvie… Treize membres fondatrices de l’association des veuves du génocide perpétré contre les Tutsi (AVEGA-AGAHOZO) font vivre l’extermination radicale de la filiation, le génocide au féminin. « Elles » content pas à pas la fondation de l’association nationale des veuves du génocide, la première reviviscence de la Nation rwandaise alors que les hommes avaient disparu.

    Nation dont les enfants du groupe humain ciblé en tant que tel ont arrêtés, seuls, le génocide. Héros avec lesquels les veuves rescapées ont inventé les premières solutions de mémoire, de solidarité, de sécurité, de santé physique et mentale, de sauvegarde de l’enfance, permettant au Rwanda de commencer à renaître alors que plus rien n’existait.

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/02/17/entendez-nous

    #tutsi #genocide

  • « Les négationnistes poursuivent l’œuvre des génocidaires. » Luttes mémorielles juives et rwandaises. Entretien avec Jessica Gérondal Mwiza et Jonas Pardo
    Par Judith Chouraqui et Elvina Le Poul

    Les génocides font systématiquement l’objet de discours les dépolitisant et les remettant en cause. Autour de l’extermination des Juif·ves d’Europe et de celle des Tutsi au Rwanda, des thèses s’insinuent qui nient aussi bien la volonté d’anéantissement guidant les génocidaires que la réalité des massacres qu’iels ont perpétrés. Discussion croisée avec Jessica Gérondal Mwiza, militante afroféministe franco-rwandaise travaillant notamment au sein de l’association Ibuka France, et Jonas Pardo, membre du Réseau d’action contre l’antisémitisme et tous les racismes.
    Cet entretien est issu du dernier numéro de la revue papier Jef Klak, intitulé « Feu follet » et traitant des relations entre les vivant⋅es et les mort⋅es.

    https://www.jefklak.org/%e2%80%85les-negationnistes-poursuivent-loeuvre-des-genocidaires-%e2%80%85

  • Décryptage du rapport Duclert : une analyse superficielle qui exonère à tort l’État français
    https://survie.org/themes/genocide-des-tutsis-au-rwanda/la-france-et-le-genocide-des-tutsis/article/decryptage-du-rapport-duclert-une-analyse-superficielle-qui-exonere-a-tort-l

    Survie a lu et analysé le rapport de la #commission_Duclert sur les archives relatives au rôle de la #France au #Rwanda entre 1990 et 1994. En attendant la publication annoncée de milliers de documents, il n’apporte pas vraiment d’éléments nouveaux... mais occulte ou édulcore les questions les plus compromettantes. La commission se permet ainsi de conclure "responsable mais pas coupable", au sujet d’une complicité qu’elle a par ailleurs évité d’aborder en ne travaillant que sur les #archives. A ce titre, elle fait pire que la mission d’information parlementaire de 1998, qui avait déjà contribué, dans un exercice similaire, à masquer la complicité de l’ #État_français.

    La manière dont l’État français s’est engagé auprès du régime génocidaire étant connue et documentée depuis longtemps, ce rapport ne contient rien de véritablement nouveau. En travaillant à partir d’un matériau parcellaire (les archives versées uniquement), la commission ne pouvait pas mener l’enquête approfondie qui aurait permis d’éclairer certaines zones d’ombre. Pour cela, il aurait fallu qu’elle croise les documents avec d’autres sources (témoignages en particulier) et qu’elle les confronte avec les travaux existant sur la question pour tirer les conclusions qui s’imposent.

    Des points cruciaux ne sont abordés que de manière superficielle, comme la formation du Gouvernement Intérimaire Rwandais sous la houlette de l’ #ambassade de France, ou l’abandon à leurs tueurs de 2 000 #Tutsis à #Bisesero, sans que la hiérarchie militaire ne donne l’ordre de les secourir [1]. De plus, les aspects les plus controversés de la présence française au Rwanda sont occultés, comme le rôle éventuel joué par des militaires ou des mercenaires français dans l’attentat du 6 avril 1994 et dans la défense de #Kigali entre avril et juillet 1994, les raisons de la présence officieuse de soldats français pendant le génocide, les livraisons d’armes pendant le #génocide, l’ordre donné de réarmer les auteurs du génocide une fois ceux-ci passés au #Zaïre, ou encore le soutien apporté par les autorités françaises au projet de reconquête du Rwanda par le régime génocidaire.

    Par ailleurs, en désignant des boucs émissaires, l’état-major particulier du chef de l’État et l’ambassadeur de France à Kigali notamment, la commission attribue l’essentiel des responsabilités de la faillite de la politique française au Rwanda au président #François_Mitterrand, aujourd’hui décédé, à ses conseillers militaires, à l’ambassadeur #Georges_Martres, sans qu’un lien soit fait avec la politique ordinaire de la France en #Afrique.

    Car si ces acteurs, prisonniers de représentations idéologiques erronées – ethnicisme, lutte d’influence avec les « Anglo-Saxons » - se sont montrés incapables de prendre en compte le génocide en préparation puis en cours, beaucoup d’éléments montrent que ces représentations n’étaient pas le propre de Mitterrand et d’un petit cercle de conseillers. Elles étaient largement partagées au sein du Quai d’Orsay et de l’état-major des armées. Cette analyse des réalités africaines en termes ethnicistes et de rivalité géopolitique avec les Anglo-Saxons remonte à la #colonisation et imprégnait en 1994 toutes les structures de l’État ayant à faire avec l’Afrique. La commission s’exonère ainsi d’évoquer la #Françafrique et de questionner le fonctionnement global des institutions.

    Pour finir, c’est une « responsabilité accablante » qui est évoquée, mais en rejetant toute idée de complicité. La commission donne pour cela une définition très étroite de la #complicité_de_génocide, selon laquelle le complice doit partager l’intention. La commission exclut donc que les autorités françaises aient pu se rendre complices des auteurs du génocide. Cette définition est erronée. Se rend en effet complice celui qui aide le criminel, en connaissance de cause, avec un effet sur le crime commis, sans pour autant partager son intention. A l’évidence la commission est sortie de son rôle d’analyse historique pour endosser un rôle politique au service du pouvoir.

    [1] Ils seront secourus à l’initiative de militaires français. Sur cet épisode, voir cet article : https://survie.org/themes/genocide-des-tutsis-au-rwanda/nos-actions-en-justice/article/dossier-judiciaire-bisesero-mobilisation-des-parties-civiles-pour-eviter-un

    • Commission Duclert sur le rôle de la France au Rwanda : l’Elysée privilégie « l’aveuglement » pour masquer la complicité française

      https://survie.org/themes/genocide-des-tutsis-au-rwanda/la-france-et-le-genocide-des-tutsis/article/commission-duclert-sur-le-role-de-la-france-au-rwanda-l-elysee-privilegie-l

      La « commission Duclert » vient de remettre à #Emmanuel_Macron le fruit de 2 ans de travail sur le rôle de la France au Rwanda, avant et pendant le génocide des Tutsis : un rapport de 1200 pages, dont l’ #Élysée a savamment fait la promotion auprès des journalistes en annonçant qu’il concluait à une « responsabilité accablante », basée sur une « faillite de l’analyse » et un « aveuglement » des décideurs français. Selon les éléments communiqués par l’exécutif français, la commission Duclert rejette l’accusation de « complicité de génocide », au prétexte que l’intention génocidaire n’était pas partagée par Paris.

      Pour l’association #Survie, qui dénonce depuis 1994 le soutien de la France aux génocidaires rwandais, ces premiers éléments rappellent les conclusions édulcorées de la mission d’information parlementaire de 1998, ou encore les propos du Président #Sarkozy en 2010 qui faisaient état de "graves erreurs d’appréciation" au sujet du Rwanda.

      Comme l’explique #Patrice_Garesio, co-président de Survie, « Si l’Élysée matraque de tels éléments avant même que chercheurs et associations aient pu lire le rapport, c’est mauvais signe : c’est une tentative de saborder tout débat. Parler de "faillite de l’analyse" et d’"aveuglement" est un recul, car on savait avant même la création de la commission que des analyses très lucides et pertinentes ont été transmises jusqu’à la tête de l’État et qu’elles ont été sciemment écartées par les décideurs de l’époque. La complicité est documentée, l’enjeu serait plutôt de compléter le tableau, hélas très cohérent sur la base de ce qui est déjà public. »

      Aujourd’hui, il n’y a plus de doute, seulement des dénégations. Le soutien français aux génocidaires n’avait rien d’aveugle ; il s’est même poursuivi après le génocide, alors que les faits étaient connus. Comme l’association Survie l’a déjà montré dans ses publications [1] : il y a bien eu #complicité, dans le sens d’un appui effectif qui a facilité le crime,et en connaissance de cause. Rappelons que #Maurice_Papon a été condamné pour complicité de crime contre l’humanité malgré l’absence "d’intention génocidaire".

      L’association Survie, à travers un travail collectif de ses militants, va analyser en profondeur le rapport et en publiera prochainement un compte rendu ; ainsi, le débat pourra s’établir sur des bases concrètes, plutôt que sur des effets d’annonce du Palais.

      Contact presse : Mehdi Derradji - chargé de la communication et des relations externes (+33 6 52 21 15 61) mehdi.derradji@survie.org

      [1] Voir notamment : Raphaël Doridant et François Graner, L’État français et le génocide des Tutsis au Rwanda, coll. Dossiers noirs, Agone-Survie, Marseille, 2020. https://agone.org/livres/letatfrancaisetlegenocidedestutsisaurwanda/9782748903942

    • Rwanda : les créanciers du génocide
      https://cadtm.org/Rwanda-les-creanciers-du-genocide

      Les principaux fournisseurs d’armes au Rwanda entre 1990 et 1994 sont la France, la Belgique, l’Afrique du Sud, l’Égypte et la République populaire de Chine. Cette dernière a fourni 500 000 machettes. L’Égypte - dont le vice-ministre des Affaires étrangères, chargé des relations avec l’Afrique, n’était autre que Boutros Boutros-Ghali - a offert au Rwanda un crédit sans intérêt pour lui permettre d’acheter des armes d’infanterie pour un montant de six millions de dollars en 1991. Une fois le génocide déclenché, alors que l’ONU avait décrété, le 11 mai 1994, un embargo sur les armes, la France et la firme britannique Mil-Tec ont fourni des armes à l’armée criminelle via l’aéroport de Goma au Zaïre (Toussaint, 1996). Une fois Kigali, capitale du Rwanda, prise par le FPR, plusieurs hauts responsables du génocide ont été reçus à l’Élysée. Les autorités rwandaises en exil ont installé à Goma avec l’aide de l’armée française le siège de la Banque Nationale du Rwanda. Celle-ci a effectué des paiements pour rembourser l’achat d’armes et en acheter de nouvelles jusque fin août 1994. Les banques privées Belgolaise, Générale de Banque, BNP, Dresdner Bank... ont accepté les ordres de paiement des génocidaires et ont remboursé les créanciers du génocide.

    • The Silence: 25 Years Since the Rwandan Genocide
      https://www.magnumphotos.com/newsroom/conflict/gilles-peress-silence-25-years-since-rwandan-genocide
      Author Philip Gourevitch’s memories and Gilles Peress’ images: the importance of documenting atrocity


      Gilles Peress Near the border of Rwanda. Goma. Zaire. 1994. © Gilles Peress | Magnum Photos

      “The immensity of this crime is beyond our imagination and is only surpassed by the unbelievable indifference of the West”
      – Gilles Peress

  • #Rwanda : un document prouve l’ordre de la France de laisser s’enfuir les génocidaires

    Juillet 1994. Les principaux membres du gouvernement responsable du #génocide des #Tutsis sont dans une zone contrôlée par l’#armée_française. Leur arrestation est possible et même réclamée. Un document inédit, émanant du cabinet du ministre des affaires étrangères de l’époque, #Alain_Juppé, prouve aujourd’hui que la #France a préféré les laisser partir. Il est signé de l’actuel patron de la DGSE.

    L’#ordre_politique de laisser s’enfuir à l’été #1994 les principaux membres du gouvernement responsable du génocide des Tutsis au Rwanda, alors que leur arrestation était possible et même demandée, a été directement pris par le #gouvernement_français, selon un document inédit émanant du ministère des affaires étrangères.

    Le massacre des Tutsis du Rwanda, dernier génocide du XXe siècle, a fait près d’un million de morts en cent jours, entre avril et juillet 1994.

    Le document, dont Mediapart a pu prendre connaissance, apparaît vingt-cinq ans après les faits comme la pièce manquante de l’un des épisodes les plus sombres de la #responsabilité française dans la tragédie rwandaise.

    Il a été obtenu par le chercheur François Graner, auteur de plusieurs livres sur le Rwanda et membre de l’association Survie, qui a récemment pu accéder à des #archives inexplorées de la présidence Mitterrand grâce à une décision du Conseil d’État. La plus haute juridiction administrative a mis fin, en juin dernier, à des années d’entraves orchestrées par les gardiens de la mémoire de l’ancien chef de l’État et de la politique de la France durant le génocide des Tutsis.

    Le document en question est un télégramme « confidentiel diplomatie » émis le 15 juillet 1994 par le cabinet du ministre des affaires étrangères de l’époque, Alain Juppé, aujourd’hui membre du Conseil constitutionnel, et adressé à l’ambassadeur #Yannick_Gérard, alors représentant du Quai d’Orsay auprès des militaires français envoyés au Rwanda dans le cadre de l’#opération_Turquoise.

    L’ambassadeur Gérard avait réclamé le jour même des « instructions claires » du gouvernement (pour lui et pour l’armée française) afin de procéder sur place à l’#arrestation des autorités qui, écrivait-il dans un télégramme, « portent une lourde responsabilité dans le génocide ». Le fait est que les principaux membres du gouvernement génocidaire, au premier rang desquels son président, #Théodore_Sindikubwabo, se trouvaient alors dans une zone intégralement contrôlée par l’armée française, à proximité du Zaïre (aujourd’hui République démocratique du Congo), pays frontalier du Rwanda.

    « Nous n’avons pas d’autre choix, quelles que soient les difficultés, que de les arrêter ou de les mettre immédiatement en résidence surveillée en attendant que les instances judiciaires internationales compétentes se prononcent sur leur cas », soulignait le haut fonctionnaire, conscient d’avoir des génocidaires identifiés à portée de main.

    La réponse du gouvernement français fut pourtant à l’exact opposé de la requête de l’ambassadeur Gérard. Dans le télégramme du 15 juillet, rédigé à 18 h 22 et adressé à « Yannick Gérard seul », le cabinet du ministre Juppé donne ainsi pour instruction de transmettre aux autorités génocidaires « notre souhait qu’elles quittent » la #zone_contrôlée par les forces armées françaises.

    Le message à transmettre semble si délicat que le cabinet Juppé demande à son ambassadeur de ne pas s’entremettre personnellement avec les génocidaires. « Vous pouvez en revanche utiliser tous les canaux indirects et notamment vos contacts africains, en ne vous exposant pas directement », peut-on lire dans le télégramme, qui a d’ailleurs pour titre : « Le département vous autorise à passer notre message de manière indirecte ».

    « Vous soulignerez que la communauté internationale et en particulier les Nations unies devraient très prochainement déterminer la conduite à suivre à l’égard de ces soi-disantes autorités », précise encore le télégramme, qui, insistant de la sorte sur une décision à venir de la communauté internationale, offre un #sauf-conduit au gouvernement génocidaire pour quitter sans la moindre anicroche le territoire sous contrôle français. Et passer au #Zaïre.

    Le document porte la signature « #EMIE ». Il s’agit de #Bernard_Émié, l’actuel directeur de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), l’un des principaux #services_secrets français, qui était à l’époque conseiller d’Alain Juppé au ministère des affaires étrangères, avant de rejoindre l’Élysée sous la présidence de Jacques Chirac.

    Sollicité par Mediapart, Alain Juppé a fait savoir qu’il ne souhaitait pas répondre à nos questions. Également sollicité, Bernard Émié n’a, pour sa part, pas donné suite.

    Un quart de siècle après la tragédie rwandaise, il n’y a aujourd’hui pas de doute sur le fait que la France savait qui étaient les organisateurs et commanditaires du génocide, et où ils se trouvaient. C’est donc en toute connaissance de cause que le gouvernement et l’Élysée les ont laissés filer.

    D’innombrables documents et témoignages, obtenus depuis des années par des historiens, des journalistes ou des juges, ont déjà largement permis de documenter que la France avait connaissance d’un génocide en préparation avant que celui-ci n’ait lieu et qu’elle a maintenu un soutien indéfectible aux autorités en cause quand le pire a commencé.

    Cela est si vrai que le gouvernement génocidaire, constitué au lendemain d’un attentat ayant tué le président #Habyarimana, jugé trop modéré par la frange la plus radicale du pouvoir hutu, a été formé, le 8 avril 1994, dans les locaux mêmes de l’#ambassade de France à Kigali, sous le nom de « #gouvernement_intérimaire_du_Rwanda » (#GIR).

    C’est un certain Théodore #Sindikubwabo, ancien président de l’Assemblée nationale, qui sera choisi pour diriger le pays avant que celui-ci ne s’enfonce dans les ténèbres. Pédiatre de formation, Sindikubwabo est considéré comme l’un des commanditaires du génocide, soupçonné d’avoir personnellement incité aux #massacres – notamment à l’occasion d’un discours retransmis le 19 avril sur Radio Rwanda – et d’avoir démis de leurs fonctions les préfets et autorités qui ne tuaient pas assez.

    Sindikubwabo fait partie des responsables politiques du génocide qui ont pu rallier le Zaïre en juillet 1994 avec l’aval du gouvernement français. Il est mort en 1998 dans des circonstances mal connues et sans jamais avoir été inquiété pour ses crimes.

    L’ordre de Juppé, l’ombre de Védrine

    Il existe dans les archives disponibles la trace d’un contact, en mai 1994, entre Sindikubwabo et le général #Christian_Quesnot, le chef d’état-major particulier du président de la République. Dans une note du 6 mai écrite à l’attention de #François_Mitterrand, après son échange avec le nouveau chef de l’État génocidaire – les massacres ont débuté un mois plus tôt –, le militaire indique que le dignitaire rwandais le « remercie » pour tout ce qu’il a « fait pour le Rwanda ».

    Dans ses commentaires personnels à la fin du document, le général Quesnot préconise alors d’appuyer, même au prix d’une « #stratégie_indirecte », le pouvoir rwandais face aux forces armées tutsies. Le général Quesnot dit, en effet, craindre l’établissement d’un « #Tutsiland » (sic), le tout « avec l’aide anglo-saxonne et la complicité objective de nos faux intellectuels remarquables relais d’un lobby tutsi auquel est également sensible une partie de notre appareil d’État ». Le document est annoté de la main du secrétaire général de la présidence de la République, #Hubert_Védrine, d’un mot : « Signalé ».

    Pourtant, sur le terrain, la diplomatie et les services de renseignements français ne cessent d’accumuler des éléments sur la responsabilité du gouvernement intérimaire dans le génocide.

    Un télégramme « confidentiel diplomatie » daté du 10 juillet 1994 de l’ambassadeur Gérard, également découvert par le chercheur François Graner grâce à la décision du Conseil d’État de juin dernier, évoque même « un témoignage digne de foi qui confirme la responsabilité collective et personnelle des autorités de #Gisenyi [le gouvernement génocidaire – ndlr] dans les massacres ». Le diplomate ajoute que, selon d’autres témoignages « directs et concordants », le président Sindikubwabo a personnellement appelé à plusieurs reprises à « l’élimination totale des Tutsis » et que l’une de ses ministres a, en particulier, réclamé le massacre « des femmes et des enfants ».

    Cinq jours plus tard, c’est donc en parfaite connaissance de cause que l’ambassadeur Gérard demande des « instructions claires » au gouvernement pour pouvoir mettre aux arrêts ou, au moins, en résidence surveillée les génocidaires.

    En vain.

    À Paris, la question de l’arrestation des membres du gouvernement génocidaire a pourtant été source de confusion au sommet de l’État, comme le prouvent plusieurs autres documents.

    Dans les archives de l’Élysée figure notamment la copie d’une dépêche émise depuis Paris, le 15 juillet en fin de matinée, par l’agence de presse Reuters sous un titre éloquent : « Paris prêt à arrêter les membres du gouvernement ». « Les membres du gouvernement intérimaire rwandais […] seront mis aux arrêts s’ils tombent aux mains de soldats de français dans la #zone_humanitaire_protégée par l’opération Turquoise », indiquait l’agence de presse internationale, qui disait tenir ses informations d’une « source autorisée à Paris ».

    Seulement voilà : une annotation manuscrite, inscrite par Hubert Védrine dans la marge de la dépêche imprimée par les services de l’Élysée, montre qu’il n’en était, en réalité, rien. « Lecture du Président : ce n’est pas ce qui a été dit chez le Premier ministre », peut-on lire sous la plume du secrétaire général de l’Élysée.

    Le document du cabinet Juppé sur l’ordre de laisser filer les génocidaires, daté lui aussi du 15 juillet, vient aujourd’hui conforter le soupçon d’un ministre des affaires étrangères, Alain #Juppé, en accord avec la politique élyséenne, bien qu’appartenant à un gouvernement de cohabitation dirigé par #Édouard_Balladur. Ce dernier fera d’ailleurs savoir à ce sujet, en 1998, qu’il « n’était pas question » aux yeux de Mitterrand « de châtier les auteurs hutus du génocide ». « Et il n’était pas question aux miens, ajoutait-il, de permettre à ceux-ci d’aller se mettre à l’abri au Zaïre ».

    C’est pourtant exactement ce qui s’est passé, et ce, sur ordre de son propre ministre Alain Juppé. Sur le terrain, l’#exfiltration est pilotée par le lieutenant-colonel #Jacques_Hogard, qui commande le groupement Sud-Turquoise au Rwanda, formé de troupes de la #Légion_étrangère.

    Dans un supplément spécial consacré aux opérations au Rwanda, la revue militaire Képi blanc a résumé des années plus tard la situation dans un style d’une raideur militaire qui ne fait guère dans la contorsion : « L’#EMT [#état-major_tactique] provoque et organise l’#évacuation du gouvernement de transition rwandais vers le Zaïre. »

    Le lieutenant-colonel #Hogard confirmera lui-même à plusieurs occasions les faits, notamment au journaliste David Servenay et à l’universitaire Gabriel Périès, auteurs du livre Une guerre noire (La Découverte). Dans cet ouvrage, le militaire raconte être allé voir en ces termes son homologue zaïrois pour lui parler des génocidaires qu’il s’apprêtait à laisser partir : « Vous ne fermez pas les #frontières, vous les laissez poreuses, je ne veux pas que vous empêchiez ces gens-là de partir, le Zaïre est grand, ils n’ont que ça pour partir. »

    Dès le 16 juillet, c’est-à-dire au lendemain du télégramme envoyé par le cabinet Juppé, le lieutenant-colonel Hogard rencontre le chef de l’État du Rwanda pour lui faire savoir que lui et ses hommes doivent – et peuvent – partir dans les vingt-quatre heures. Et c’est ainsi que la France escorte du Rwanda à la frontière zaïroise parmi les principaux responsables politiques du génocide.

    Un militaire de l’opération Turquoise, Guillaume Ancel, a raconté des années plus tard dans un livre (Rwanda, la fin du silence, éditions Belles Lettres) avoir vu le lieutenant-colonel Hogard quelque temps après cette scène. « Certes, il est convaincu que ce n’est pas notre rôle de rendre justice, mais escorter poliment des décideurs qui ont de terribles responsabilités dans les massacres et “du sang jusqu’au cou” le tourmente. Il aurait pu les arrêter, il aurait même pu les neutraliser, mais ses ordres ne lui laissaient pas le choix », a-t-il témoigné.

    Un document déclassifié de l’état-major de l’armée française confirme que les membres du gouvernement génocidaire « ont franchi la frontière rwando-zaïroise » le 17 juillet en fin de journée, « l’option clairement avouée étant de replier également le reste des #FAR [#forces_armées_du_gouvernement – ndlr] avec leur armement au Zaïre, afin de poursuivre la #résistance depuis ce pays ».

    En un mot : que les génocidaires soient à l’abri pour que le sang, lui, continue de couler.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/140221/rwanda-un-document-prouve-l-ordre-de-la-france-de-laisser-s-enfuir-les-gen
    #génocide #Quesnot #Balladur #Edouard_Balladur

    signalé par @arno : je mets ici le texte complet

    • Une guerre noire. Enquête sur les origines du génocide rwandais (1959-1994)

      Au printemps 1994, au Rwanda, près d’un million de personnes ont été exterminées en quelques semaines. À un rythme trois fois plus élevé que le génocide des juifs d’Europe. Comment un tel crime de masse a-t-il été rendu possible ? Quelle est la responsabilité des grandes puissances occidentales et de la France, surtout, si proche des génocidaires ? Après quatre ans d’enquête, dans les archives du monde entier, sur le terrain, auprès des militaires français, rwandais et belges, à interroger diplomates et politiques, Gabriel Périès et David Servenay tentent de répondre à ces questions. À l’aide de témoignages inédits et de documents confidentiels, ils lèvent le voile sur l’une des origines secrètes du génocide rwandais : la doctrine française de la « guerre révolutionnaire ». Des opérations clandestines menées dans le « pré carré » au moment de la décolonisation, en passant par le trouble jeu du général De Gaulle, ils établissent la généalogie de ce qui fut pendant des décennies un véritable savoir-faire de l’armée française. Formalisé pendant la guerre d’Indochine et appliqué en Algérie, il a largement inspiré les dispositifs répressifs mis en place dans un grand nombre d’États africains… dont le Rwanda des années 1960. Et ce n’est pas le fruit du hasard si l’un des meilleurs élèves africains de la « guerre révolutionnaire » perpétra, plus de trois décennies plus tard, le dernier génocide du XXe siècle : hiérarchies politico-militaires parallèles, gardes présidentielles transformées en escadrons de la mort, action psychologique, quadrillage administratif et militaire des populations formèrent un système efficace susceptible de mobiliser toute une société au service du projet exterminateur de ses dirigeants. Cette histoire inconnue éclaire d’un jour nouveau la responsabilité de l’État français dans le génocide rwandais.

      https://www.editionsladecouverte.fr/une_guerre_noire-9782707149145

      #livre #Gabriel_PÉRIÈS #David_SERVENAY

    • Rwanda, la fin du silence. #Témoignage d’un officier français

      Au lourd secret qui entoure le véritable rôle de la France et de son armée lors du génocide des Tutsi au Rwanda, #Guillaume_Ancel oppose la vérité de ses carnets de terrain, témoignage des missions auxquelles il a participé durant l’opération Turquoise. La fin du silence est aussi le récit du combat mené par cet ancien officier pour faire savoir ce qui s’est réellement passé durant cet été 1994 et « rendre hommage, dignement, aux centaines de milliers de victimes rwandaises que nous n’avons pas su empêcher. »
      Officier de la Force d’action rapide, détaché au sein d’une unité de la Légion étrangère, le capitaine Ancel mène avec ses hommes des opérations d’extraction de personnes menacées. Sous couvert d’une opération humanitaire destinée à mettre fin aux massacres, cet officier comprend vite que la France soutient le gouvernement génocidaire rwandais dont elle a formé l’armée. Il décrit les errements de l’armée française, ballotée au gré de décisions politiques dont les motivations sont toujours tenues secrètes, les archives officielles restant inaccessibles. Ce témoignage dévoile également certains épisodes méconnus de cette opération « #humanitaire » durant laquelle l’armée française a tué. Parfois pour défendre, parfois pour des raisons moins avouables.

      https://www.lesbelleslettres.com/livre/3565-rwanda-la-fin-du-silence
      #opération_humanitaire

  • L’État français et le génocide des Tutsis au Rwanda

    Ernest London

    https://lavoiedujaguar.net/L-Etat-francais-et-le-genocide-des-Tutsis-au-Rwanda

    « L’État français a, par pur cynisme, choisi le camp qui lui apparaissait le plus à même de maintenir le Rwanda dans sa zone d’influence. » Raphaël Doridant et François Graner reprennent tous les éléments constitutifs de la complicité française rassemblés et analysés depuis vingt-cinq ans. Diplomatique, militaire, financière, médiatique, celle-ci remonte à la préparation du génocide, s’est poursuivie pendant et après. Idéologique même, puisque les responsables politiques et militaires français ont largement répandu la propagande hutue, la négation du génocide et celle de leur propre rôle.

    Ils reviennent sur l’histoire du pays. Avant la colonisation par l’Allemagne à partir de 1894, puis par la Belgique à partir de 1916, la société est articulée autour de groupes sociaux qui ne sont aucunement des catégories ethniques : les Hutus étaient agriculteurs, les Tutsis éleveurs et les Twas potiers. « Les Européens, imprégnés de l’idée de hiérarchie des races humaines, projettent ce paradigme sur les peuples qu’ils découvrent en pénétrant à l’intérieur du continent africain. » Les colonisateurs s’appuient sur une élite tutsie, assimilée à une « race » supérieure, pour asseoir leur domination et enseignent cette supériorité sur la base pseudo-scientifique du mythe d’un ancien peuplement hamitique éthiopien venu « civiliser » les « Nègres » de la région. Dans les années 1930, une immatriculation « éthique » est mise en place. (...)

    #Afrique #France #Rwanda #Hutus #Tutsis #génocide #archives #Mitterrand #Juvénal_Habyarimana #Interahamwe #DGSE

  • Base de données sur le rôle de la France
    dans le génocide des Tutsi

    http://francegenocidetutsi.org/index.html.fr

    But de cette base de données


    FgtDb comme France Genocide Tutsi Database est une base de données relative au rôle de la France dans le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994.

    Le génocide des Tutsi a été exécuté par des Rwandais. Mais nous formulons les hypothèses :

    1) Le génocide n’aurait pas eu lieu si la France n’était pas intervenue militairement au Rwanda, si elle n’avait pas fourni des armes et entraîné l’armée gouvernementale rwandaise, et si elle n’avait pas soutenu les politiciens et militaires rwandais qui depuis 1990 voulaient éliminer les Tutsi.

    2) Le coup d’État des 6-8 avril 1994, qui a coûté la vie au président Habyarimana, au Premier ministre Agathe Uwilingiyimana et à d’autres ministres et personnalités politiques n’aurait pu réussir qu’avec le soutien de la France par son ambassadeur à Kigali et sa représentation au Conseil de sécurité des Nations Unies.

    3) À tout moment du 7 avril au 18 juillet, la France aurait pu commander à ses alliés de cesser les massacres.

    Partis d’une démarche de citoyens français responsables, nous nous efforçons de tester ces hypothèses de manière aussi scientifique que possible en rassemblant des documents. Nous n’excluons pas a priori des documents qui vont à l’encontre de nos hypothèses, pourvu qu’ils rapportent des faits vérifiables.

    Sur ce site web http://francegenocidetutsi.org plus de 9.000 documents sont accessibles, triés par date, auteur, journal ou source. Un moteur de recherche permettant d’interroger suivant plusieurs critères et d’accéder à la fiche descriptive des documents est accessible ici
    Historique

    Ces documents ont été réunis depuis 2001 pour la rédaction du livre La France au coeur du génocide des Tutsi, publié en 2010 en quelques 300 exemplaires, épuisé depuis, mais restant déchargeable à l’adresse : http://francegenocidetutsi.org/FranceCoeurGenocideTutsi-IP.pdf

    L’idée initiale était de donner au lecteur du livre en format pdf de Adobe l’accès à une copie du document original en utilisant les pointeurs hypertextes pris en compte par Acrobat reader ou les logiciels équivalents.

    De là est née la conception d’une fiche descriptive des documents et la préoccupation de les étudier pour eux-mêmes dans un souci d’objectivité.

    Depuis de nouveaux documents ont été trouvés qui débordent maintenant de beaucoup la portée de ce livre. Le besoin de les publier comme preuve s’en est fait sentir.

    Cette base de données, commencée début 2013, existe sur un ordinateur. Elle répertorie environ 24.000 documents, 4.000 auteurs provenant de 700 journaux ou sources et d’une centaine de fonds d’archives.

    Il reste à faire une publication systématique des documents sur le web, ce qui est une exigence de chercheur mais qui est encore largement à faire. Les collaborations sont souhaitées.

    Avant avril 2016, ce site web était à l’adresse http://www.francerwandagenocide.org/documents

  • #Déogratias

    Derrière ce dessin, il y a plus d’un million de morts. Qui peut imaginer un million de morts ? C’est un chiffre qui ment, proie des comptables de l’horreur chicanant sur les dizaines, les unités. Un million, notre esprit se montre incapable de nous en transmettre une image précise. Un million de #morts, c’est le résultat de l’#indifférence devant le premier homme assassiné parce qu’il est Tutsi. Au deuxième, il est déjà trop tard pour arrêter l’#abomination. Alors, des êtres comme le jeune Hutu Déogratias célèbrent comme un trophée la corde à linge où pendouillent les dessous de femmes violées et, sans doute, trucidées. Corde qui signale « ici commence l’#horreur ». Avril #1994, Rwanda : le fleuve de sang emporte l’amour de Déogratias pour une jeune Tutsi. Et ce flot se nourrit du sang des Tutsi que Déogratias a tués de ses mains


    https://www.dupuis.com/seriebd/deogratias/284
    #Hutus #Tutsis #viol #guerre_civile #massacre
    #génocide #Rwanda #histoire #BD #livre

  • Eva_Joly balance tout sur la Françafrique La Rédaction - 23 Juillet 2019 - Investigaction
    https://www.investigaction.net/fr/eva-joly-balance-tout-sur-la-francafrique

    Nous ne résistons pas à l’envie de publier pour nos lecteurs ces extraits du dernier livre de la députée française Eva Joly, détaillant les « crimes » de la France en Afrique en général et au Cameroun en particulier ; elle parle notamment du massacre des #Bamilékés par son pays.
     
    Je n’avais rien compris à ce que l’écrivain #Slimane_Zeghidour appelle « le secret de famille de la République ». Lorsque j’ai pris en charge l’instruction de l’affaire #Elf, j’avais en face de moi les puissants du pétrole français, je n’aimais pas leur arrogance, la façon qu’ils avaient de se servir dans les caisses, mais lorsqu’ils invoquaient les intérêts supérieurs du pays, j’étais prête à les croire.

    Je sortais de plusieurs années en détachement au Ministère des Finances, entourée de hauts fonctionnaires intègres, d’une compétence absolue.

    J’avais confiance dans les institutions de mon pays d’adoption. Je n’imaginais pas que la finalité des dirigeants des sociétés nationales du #pétrole fut autre chose que le bien commun. Je traquais les dérives et non le système lui-même.

    Pourtant au fil de mon enquête, j’ai découvert un monde souterrain. Magistrate, limitée par le cadre de ma saisine et des compétences nationales, je devais m’arrêter sur le seuil de certaines portes, qui menaient vers l’étranger.

    Je découvrais des chemins qu’il aurait été passionnant de remonter, des connexions qui m’ahurissaient. Avec des chiffres, des comptes, nous avions sous nos yeux le déchiffrage d’un vaste réseau de #corruption institutionnalisé, dont les fils étaient reliés en direct à l’#Elysée.

    Ce n’était pas mon rôle d’en tirer les conclusions politiques, mais j’en ai gardé l’empreinte. Nous avions dessiné alors un vaste schéma, que j’ai toujours avec moi. Il fait huit mètres une fois déplié.

    Il serpente depuis le bureau d’un directeur des hydrocarbures d’Elf, jusqu’à des comptes obscurs alimentés par le Gabon, aux mains d’#Omar_Bongo : quarante ans de pouvoir et une difficulté récurrente à distinguer sa tirelire et sa famille d’une part, le budget de l’Etat et le Gouvernement d’autre part.

    J’emporte souvent ce schéma avec moi, au fil des rendez-vous. Je l’étale sur les tables, un peu comme un capitaine au combat sort ses vieilles cartes.

    Les positions ont sans doute varié, les techniques de camouflage se sont sophistiquées, mais le système est là : les tyrans sont des amis que la France a placés au pouvoir et dont elle protège la fortune et l’influence par de vastes réseaux de corruption ; en échange ils veillent sur les intérêts et les ressources des entreprises françaises venues creuser le sol. Tout ce beau monde a intérêt à ce que rien, jamais, ne stimule ni les institutions ni l’économie des pays.

    La France aide à appauvrir le Gabon.
    Et si je m’arrête un instant au Gabon, qu’est-ce que j’y vois ? Un pays riche qui exporte plus de treize milliards de dollars de pétrole brut par an et affiche un PIB par habitant largement au-dessus de la moyenne africaine (6 397 $) ? Ou un pays pauvre où l’espérance de vie est estimée à 55 ans pour les femmes et 53 pour les hommes, ce qui leur laisse un an de moins que les Malgaches nés sur un sol sans pétrole ? Le taux de mortalité infantile est au Gabon particulièrement élevé, le taux de vaccination contre la rougeole est de 40% contre une moyenne de 79% dans les pays en développement.

    Voilà où en est le Gabon, chasse gardée de la France, fournisseur des trésors du pétrole et de l’uranium, fief de #Total-Elf, la première capitalisation boursière française.

    Si les habitants de Libreville n’ont pas bénéficié de la richesse de leur pays, c’est parce que la France s’est accaparée ses ressources minières, avec la complicité d’un Président, enrôlé dès son service militaire par l’armée française et ses services secrets, placé à la tête du pays à 32 ans par Paris, il était alors le plus jeune Chef d’Etat du monde. La France contrôle son armée, ses élections et protège sa fortune.

    En retour, Omar Bongo fait table ouverte plusieurs fois par an, Avenue Foch ou l’Hôtel Crillon, où il reçoit les hommes politiques, des publicitaires et les journalistes français qui comptent. Chacun se presse à ces audiences.

    Dans les années 1990, un homme politique français de premier plan, alors en fonction, bénéficiait en parallèle d’un contrat de « consultant » signé par Omar Bongo et largement rémunéré. De #Roland_Dumas, le Président gabonais dit qu’il est un « ami intime ». Prévoyant, il apprécie aussi #Nicolas_Sarkozy, venu « prendre conseil » en tant que candidat à l’élection présidentielle.

    Lorsqu’au cours de l’instruction, nous avons perquisitionné au siège de la #FIBA, la banque franco-gabonaise, nous avons consulté le listing des clients qui paraissait tenu à la plume sergent-major. C’était une sorte de Who’s Who de la France en Afrique, qui en disait long sur l’envers de la République et des médias.

    La France fait semblant d’aider des pays qui sont riches en matières premières.

    A ceux qui croient encore à l’aide désintéressée de la France en Afrique, il suffit de consulter les chiffres du #PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement). La corrélation est régulière entre le montant de l’aide française et la richesse en matières premières.

    En clair, celui qui n’a rien dans son sous-sol ne doit pas attendre grand-chose de Paris. Il n’est pas étonnant de retrouver le Gabon comme l’un des premiers bénéficiaires de l’aide publique française au développement. Le résultat est affligeant en termes de système de santé et d’éducation. L’argent s’est perdu en route. Il est justement fait pour cela.

    Il ne s’agit pas d’une dérive mais d’une organisation cohérente et raisonnée. Dans chaque audition durant notre instruction, nous entendions parler de pressions physiques, d’espionnage permanent et de #barbouzes.

    Les perquisitions dans la tour Elf à la Défense livraient une moisson de documents révélant la confusion des genres, nous les transmettions au Parquet de Nanterre, qui se gardait bien d’ouvrir des enquêtes.

    Car #Elf hier, Total aujourd’hui, est un Etat dans l’Etat, conçu par #Pierre_Guillaumat, un ancien Ministre de la Défense, patron des services secrets et responsable du programme nucléaire français afin de servir les intérêts géopolitiques de Paris.

    La Norvège a utilisé son pétrole pour construire et assurer le paiement des retraites futures. La France se sert d’Elf Total pour affirmer sa puissance.

    La compagnie intervient dans le Golfe de #Guinée, au #Nigeria, au #Congo-Brazzaville, en #Angola… Tous ces pays ont connu la guerre civile et la dictature, derrière laquelle la main française s’est fait sentir. Le chaos, lorsqu’il se produit, ne trouble pas le système. Il n’est qu’à voir l’Angola en guerre pendant des dizaines d’années, mais dont aucune goutte de pétrole, jamais, n’a raté sa destination.

    Pendant la guerre, les affaires continuaient…les banques françaises, #Bnp-Paribas en tête, ont même profité de l’occasion pour élaborer des montages financiers destinés aux pays en guerre, à des taux affolants, tout en sachant qu’elles ne prenaient pas le moindre risque. L’argent, là aussi, n’a pas été perdu pour tout le monde. C’est un miroir dans lequel il ne faut pas trop souvent regarder les élites françaises.

    Depuis que j’ai ouvert le dossier Elf dans mon bureau de la galerie financière, j’ai voyagé physiquement et intellectuellement bien loin de la Seine et de ses quais gris et bleus…j’ai appris en marchant. A l’arrivée, le tableau est effrayant.

    L’Afrique a refait de moi une Norvégienne, fière de l’être. Mon pays est riche, mais, il se souvient avoir été pauvre, un peuple d’émigrants regardant vers le nouveau monde américain.

    Son esprit de conquête, ses allures vikings sont des traces d’un passé très lointain, vinrent ensuite les tutelles danoise puis suédoise, dont il fallut se libérer, Il envoya vers l’Afrique des missionnaires protestants, personnages austères au visage buriné, taillé par la parole chrétienne et l’œuvre humanitaire, plutôt que des nouveaux colons, comme on les croise encore dans les quartiers d’expatriés blancs.

    Pendant que la France fondait Elf, la Norvège mettait en place l’exploitation des ressources de la mer du Nord, accumulant un fonds de réserve, aussitôt placé pour les générations futures et soigneusement contrôlé. Ce petit pays des terres gelées est devenu la première nation donatrice en dollars par habitant.

    Bien sûr, les pétroliers norvégiens ne sont pas des enfants de chœur. De récentes enquêtes ont montré que certains d’entre eux ont versé des commissions et que la tentation d’abuser de leur pouvoir est permanente. Mais la Norvège n’a pas à rougir de ce qu’elle a fait de son pétrole. Ce que j’ai vu, les rapports internationaux qui l’attestent, est une œuvre d’espoir.

    La République française, à la même époque, a mis en place en Afrique un système loin de ses valeurs et de l’image qu’elle aime renvoyer au monde. Comment des institutions solides et démocratiques, des esprits brillants et éclairés, ont-ils pu tisser des réseaux violant systématiquement la loi, la justice et la démocratie ? Pourquoi des journalistes réputés, de tout bord, ont-ils toléré ce qu’ils ont vu ? Pourquoi des partis politiques et des ONG, par ailleurs prompts a s’enflammer, n’ont-ils rien voulu voir ?

    L’Occident a fermé les yeux sur les #crimes de la France.
    Je ne condamne pas. J’ai partagé cet aveuglement. J’étais comme eux, avant de glisser l’œil dans le trou de la serrure et de prendre la mesure de ce secret de famille : la France reste un #empire et ne se remet pas de sa puissance perdue. L’indépendance politique a été largement une mascarade en Afrique de l’Ouest.

    L’Occident a fermé les yeux, car la France se prévalait d’être le « gendarme » qui défendait la moitié du continent contre le communisme. Les Français ont laissé faire, car astucieusement, De Gaulle et ses successeurs ont présenté leur action comme un rempart contre l’hydre américaine. Elf était l’une des pièces maîtresses de cette partie géopolitique.

    Le double jeu a été facilité par la certitude, ancrée dans les mentalités, que « là-bas, c’est différent ». Là-bas, c’est normal la corruption, le #népotisme, la #guerre, la #violence. Là-bas, c’est normal la présence de l’armée française, les proconsuls à l’ambassade ou à l’état-major, les camps militaires. Là-bas, c’est normal l’instruction des gardes présidentielles. Là-bas, c’est normal la captation des richesses naturelles.

    D’ailleurs, « tout le monde fait pareil ». Jeune ou vieux, de gauche ou de droite, nul Français ne songe à s’offusquer de voir nos soldats mener, presque chaque année, une opération militaire en Afrique, au #Tchad, en Côte_d_Ivoire, au #Rwanda, quand tous se gaussent de cette Amérique venue faire la police en Irak, en maquillant d’un fard démocratique les intérêts géopolitiques et pétroliers de Washington. Il y a pourtant bien des symétries.

    J’ai vu récemment un documentaire sur la guerre du #Biafra, quatre ou cinq demi-heures de témoignage brut des principaux acteurs, sans commentaires. Je suis restée sans voix. A ceux qui sont nés après 1970, le Biafra ne dit rien. Dans cette région du #Nigeria, riche en pétrole, une ethnie, chrétienne et animiste armée par la France, réclama l’indépendance. S’ensuivit une guerre meurtrière de trois ans, révolte financée depuis l’Elysée via des sociétés #suisses.

    La télévision française aimait alors montrer les enfants affamés que les militaires français ramenaient par avion pour les soigner, jamais elle ne laissait voir la cargaison de l’aller, remplie d’armes. A l’image maintenant, les anciens collaborateurs de #Jacques_Foccart, repus dans leurs fauteuils Louis XV, détaillent sans émotion ces montages illégaux. Les officiers, lieutenants d’alors, généraux d’aujourd’hui, racontent ce bon tour le sourire aux lèvres. Fin du documentaire. Pas un mot, pas une ligne dans les livres d’histoire.

    La France au cœur de la guerre du Biafra et du massacre des #Bamilékés au Cameroun
    Des drames comme celui-ci, l’Afrique en contient des dizaines, soigneusement passés sous silence. Les massacres des Bamiléké au Cameroun par la France du Général De Gaulle, le génocide des #Tutsi commis par un régime soutenu par #François_Mitterrand, les assassinats d’opposants, les manipulations d’élections.. Le passif de la France sur le continent africain n’a rien à envier à l’#impérialisme américain en Amérique latine ou au Moyen-Orient.

    Il est à la mode parmi les intellectuels français de se plaindre du mouvement de repentance qui s’est répandu depuis quelques années. Les bienfaits de la colonisation, à inscrire dans les manuels scolaires, ont même fait l’objet d’une proposition de loi, largement soutenue par les députés.
    Bien sûr, l’histoire de la France en Afrique ou en Asie du sud-est a compté aussi des aventuriers sincères, exportateurs, instituteurs ou pionniers, qui ont fait corps avec les pays qu’ils ont découverts. A Madagascar, les #Vazas, ces pieds noirs malgaches, ne cessent de louer devant moi l’état des routes et des infrastructures françaises au moment de l’indépendance.

    Mais les peuples sont comme les familles. On ne peut pas faire le tri de la mémoire. Il est des secrets soigneusement cachés dont l’onde portée va bien au-delà d’une ou de deux générations. Les enfants héritent de tout : du malheur comme du bonheur, de la richesse comme des dettes.

    La République française paie aujourd’hui la facture de son passé. Il suffit de dérouler la liste des appellations officielles des Maghrébins nés dans un département français avant 1962 ou sur le sol hexagonal depuis les années 1970. Par la loi, ils furent et sont des Français comme les autres.

    Les gouvernements successifs n’ont pourtant cessé d’inventer des périphrases : « indigène musulman », « sujet africain non naturalisé », « JFOM » (Jeune français originaire du Maghreb), « jeune issu de l’immigration », « fils de harkis », « jeune des quartiers », « Arabo-musulman », « Français d’origine arabe », « Français musulman »…

    La France vit encore comme si en Afrique, elle était chez elle, et comme si, ses enfants d’ascendance africaine n’étaient pas Français. Le développement de la Françafrique, notre tolérance vis-à-vis des réseaux, tout ramène à ce secret colonial, cet empire qui hante les esprits comme un fantôme. Oui, Total, la première entreprise française, est riche et prospère.

    Mais la manière dont la firme s’est bâtie fait partie de l’héritage. Qui osera un jour rendre au Nigeria, au Cameroun, au Gabon, au Congo-Brazzaville ce que la France leur doit ? Qui contestera les contrats conclus par #Areva pour l’#uranium du #Niger ou ceux des mines d’or de #Sadiola au #Mali, deux pays parmi les plus pauvres du globe, qui ne touchent qu’une part dérisoire des richesses prélevées dans leur sol ? La République a contracté une dette qu’il lui faudra bien honorer.

    Notre prospérité est nourrie de #richesses que nous détournons. A certains de ces sans-papiers qui risquent leur vie pour gagner l’Europe, il pourrait-être versé une rente au lieu d’un avis d’expulsion. Je rêve pour ce pays que j’aime, d’un réveil collectif.

    Une France digne de son idéal et de son héritage de 1789 est incompatible avec la Françafrique : ce qu’une génération a fait, une autre peut le défaire. C’est possible.
     
    Extrait de : La force qui nous manque. Eva Joly. Editions des Arènes (Paris) 190 pages. https://www.jmtvplus.com/eva-joly-balance-toutmeme-sur-le-cameroun-40110

    #françafrique #afrique #france  #colonialisme #tchad #armée_française #centrafrique  #francafrique #armée #guerre #Livre #Eva_Joly #Femme

  • Une diplomatie des excuses ? Le #Saint-Siège et le #Rwanda

    Le 25 mars 1998, le président Bill Clinton se rendait à l’aéroport de Kigali et, sans en sortir, présentait ses excuses pour l’inaction des États-Unis au cours du génocide. Deux années plus tard, le Premier ministre Guy Verhofstadt présentait à son tour les excuses officielles de la Belgique lors de la commémoration officielle du génocide au site de Gisozi. Il réitérait ses propos en 2004 à l’occasion de la dixième #commémoration du #génocide au stade Amahoro. D’autres pays, en premier lieu la France, ont toujours refusé de participer à cette « diplomatie des #excuses 1 » (à ce sujet, voir Rosoux ; Gibney & Howard-Hassmann).

    Depuis 1994, des associations de rescapés ainsi que les autorités rwandaises réclamaient des excuses officielles de l’#Église_catholique rwandaise et du #Vatican pour leurs rôles dans le #génocide des #Tutsi. Vingt-trois années après ces premières demandes, et après bien des controverses, le pape François a officiellement imploré en mars 2017 « le pardon de Dieu » pour les échecs de l’Église au Rwanda.

    Afin de comprendre ce geste politique, il est nécessaire de revenir sur les débats relatifs à la responsabilité de l’Église catholique au Rwanda avant et pendant le génocide ainsi que sur les étapes ayant conduit aux excuses officielles.

    https://www.memoires-en-jeu.com/inprogress/une-diplomatie-des-excuses-le-saint-siege-et-le-rwanda
    #mémoire #Eglise

  • Macron sans surprise, chaque jour plus minable que le précédent.

    Génocide au Rwanda : des historiens écartés de la future commission d’enquête

    https://www.la-croix.com/Monde/Afrique/Genocide-Rwanda-historiens-ecartes-future-commission-denquete-2019-03-29-1

    Deux spécialistes français du #génocide contre les #Tutsis au #Rwanda en 1994 auraient été récusés par le pouvoir politique français, quelques jours avant la probable annonce, vendredi 5 avril, par Emmanuel Macron de la création d’une commission d’enquête sur les archives françaises sur le rôle de la France au Rwanda.

  • Massacre de Bisesero au Rwanda : les parties civiles mobilisées pour éviter un déni de justice - Survie
    https://survie.org/themes/genocide-des-tutsis-au-rwanda/nos-actions-en-justice/article/massacre-de-bisesero-au-rwanda-les-parties-civiles-mobilisees-pour-eviter-un

    Comme le révèle aujourd’hui Mediapart, les parties civiles ont été informées le 27 juillet dernier de la volonté des juges du Pôle « Crimes contre l’humanité, crimes et délits de guerre » du tribunal de Paris (auquel le dossier a été transmis en 2012), de clore cette instruction, sans que plusieurs points cruciaux n’aient été éclaircis.

    Pas d’étonnement pour ma part mais un dégoût total !
    #françafrique #génocide #Rwanda #impunité #Bisesero #tutsis #massacre #turquoise #armée_française

  • The Rise and Fall Of the Watusi - The New York Times
    https://www.nytimes.com/1964/02/23/the-rise-and-fall-of-the-watusi.html
    En 1964 le New York Times publie un article sur l’extermination imminente des Tutsi. C’est raconté comme une fatalité qui ne laisse pas de choix aux pauvres nègres victimes de forces plus grandes qu’eux. Dans cette optique il s’agit du destion inexorable du peuple des Tutsi arrivant à la fin de son règne sur le peuple des Hutu qui revendique ses droits. L’article contient quelques informations intéressantes déformées par la vison colonialiste de l’époque.

    ELSPETH HUXLEYFEB. 23, 1964

    FROM the miniature Republic of Rwanda in central Africa comes word of the daily slaughter of a thousand people, the possible extermin­ation of a quarter of a million men, women and children, in what has been called the bloodiest tragedy since Hitler turned on the Jews. The victims are those tall, proud and graceful warrior­aristocrats, the Tutsi, sometimes known as the Watusi.* They are being killed

    *According to the orthography of the Bantu language, “Tutsi” is the singular and “Watutsi” the plural form of the word. For the sake of simplicity. I prefer to follow the style used in United Nations reports and use “Tutsi” for both singular and plural.

    Who are the Tutsi and why is such a ghastly fate overtaking them? Is it simply African tribalism run riot, or are outside influences at work ? Can nothing be done?

    The king‐in‐exile of Rwanda, Mwamni (Monarch) Kigeri V, who has fled to the Congo, is the 41st in line of suc­cession. Every Tutsi can recite the names of his 40 predecessors but the Tutsi cannot say how many centuries ago their ancestors settled in these tumbled hills, deep valleys and vol­canic mountains separating the great

    Nor is it known just where they came from—Ethiopia perhaps; before that, possibly Asia. They are cattle folk, allied in race to such nomadic peo­ples as the Somali, Gatlla, Fulani and Masai. Driving their cattle before them, they found this remote pocket of cen­tral Africa, 1,000 miles from the In­dian Ocean. It was occupied by a race of Negro cultivators called the Hutu, who had themselves displaced the ab­original pygmy hunters, the Twa (or Batwa). First the Tutsi conquered and then ruled the Hutu. much as a ??r‐man ruling class conquered and settled

    In the latest census, the Tutsi con­stitute about 15 per cent of Rwanda’s population of between 2.5 and 3 mil­lion. Apart from a handful of Twa, the rest are Hutu. (The same figures are true of the tiny neighboring king­dom of Burundi.)

    For at least four centuries the Tutsi have kept intact their racial type by inbreeding. Once seen, these elongated men are never forgotten. Their small, narrow heads perched on top of slim and spindly bodies remind one of some of Henry Moore’s sculptures. Their average height, though well above the general norm, is no more than 5 feet 9 inches, but individuals reach more than 7 feet. The former king, Charles III Rudahagwa, was 6 feet 9 inches, and a famous dancer and high jumper—so famous his portrait was printed on the banknotes—measured 7 feet 5 inches.

    THIS height, prized as a badge of racial purity, the Tutsi accentuated by training upward tufts of fuzzy hair shaped like crescent moons. Their leaps, bounds and whirling dances delighted tourists, as their courtesy and polished manners impressed them.

    Through the centuries, Tutsi feudal­ism survived with only minor changes. At its center was the Mwami, believed to be descended from the god of lightning, whose three children fell from heaven onto a hilltop and begat the two royal clans from which the Mwami and his queen were always chosen. Not only had the Mwami rights of life and death over his subjects but, in theory, he owned all the cattle. too — magnificent, long‐horned cattle far superior to the weedy native African bovines. Once a year, these were ceremonially presented to the Mwami in all their glory — horns sand‐polished, coats rubbed with butter, foreheads hung with beads, each beast attended by a youth in bark‐cloth robes who spoke to it softly and caught its dung on a woven straw mat.

    “Rwanda has three pillars.” ran a Tutsi saying: “God, cows and soldiers.” The cows the Mwami distributed among his subchiefs, and they down the line to lesser fry, leaving no adult Tutsi male without cows.

    Indeed, the Tutsi cannot live with­out cattle, for milk and salted butter are their staple food. (Milk is con­sumed in curds; the butter, hot and perfumed by the bark of a certain tree.) To eat foods grown in soil, though often done, is thought vaguely shame­ful, something to be carried out in private.

    THE kingdom was divided into dis­tricts and each had not one governor, but two: a land chief (umunyabutaka) and a cattle chief (umuuyamukenke). The jealousy that nearly always held these two potentates apart prompted them to spy on each other to the Mwami, who was thus able to keep his barons from threatening his own au­thority.

    Below these governors spread a net­work of hill chiefs, and under them again the heads of families. Tribute — milk and butter from the lordly Tutsi, and

    Just as, in medieval Europe, every nobleman sent his son to the king’s court to learn the arts of war, love and civil­ity, so in Rwanda and Burundi did every Tutsi father send his sons to the Mwami’s court for instruction in the use of weapons, in lore and tradition, in dancing and poetry and the art of conversation, in manly sports and in the practice of the most prized Tutsi virtue —self‐control. Ill‐temper and the least display of emotion are thought shameful and vul­gar. The ideal Tutsi male is at all times polite, dignified, amiable, sparing of idle words and a trifle supercilious.

    THESE youths, gathered in the royal compound, were formed into companies which, in turn, formed the army. Each youth owed to his company commander an allegiance which continued all his life. In turn, the commander took the youth, and subsequently the man, under his protection. Every Tutsi could appeal from his hill chief to his army com­mander, who was bound to support him in lawsuits or other troubles. (During battle, no commander could step backward, lest . his army re­treat; at no time could the

    The Hutu were both bound and protected by a system known as buhake, a form of vassalage. A Hutu wanting to enter into this relationship would present a jug of beer to a Tutsi and say: “I ask you for milk. Make me rich. Be my father, and I will be your child.” If the Tutsi agreed, he gave the applicant a cow, or several cows. This sealed the bargain­

    The Hutu then looked to his lord for protection and for such help as contributions to­ward the bride‐price he must proffer for a wife. In return, the Hutu helped from time to time in the work of his pro­tector’s household, brought oc­casional jugs of beer and held himself available for service

    The densely populated king­doms of the Tutsi lay squarely in the path of Arab slavers who for centuries pillaged throughout the central Afri­can highlands, dispatching by the hundreds of thou­sands yoked and helpless hu­man beings to the slave mar­kets of Zanzibar and the Persian Gulf. Here the explor­er Livingstone wrote despair­ingly in his diaries of coffles (caravans) of tormented cap­tives, of burnt villages, slaugh­tered children, raped women and ruined crops. But these little kingdoms, each about the size of Maryland, escaped. The disciplined, courageous Tutsi spearmen kept the Arabs out, and the Hutu safe. Feudalism worked both ways.

    Some Hutu grew rich, and even married their patrons’ daughters. Sexual morality was strict. A girl who became pregnant before marriage was either killed outright or aban­doned on an island in the mid­dle of Lake Kivu to perish, unless rescued by a man of a despised and primitive Congo tribe, to be kept as a beast of burden with no rights.

    SINCE the Tutsi never tilled the soil, their demands for labor were light. Hutu duties included attendance on the lord during his travels; carry­ing messages; helping to re­pair the master’s compound; guarding his cows. The reia­tionsiiip could be ended at any time by either party. A patron had no right to hold an unwilling “client” in his service.

    It has been said that serf­dom in Europe was destroyed by the invention of the horse

    UNTIL the First World War the kingdoms were part of German East Africa. Then Bel­gium took them over, under the name of Ruanda‐Urundi, as a trust territory, first for the League of Nations, then under the U. N. Although the Belgian educational system, based on Roman Catholic mis­sions, was conservative in out­look, and Belgian adminis­trators made no calculated attempt to undo Tutsi feudal­ism, Western ideas inevitably crept in. So did Western eco­nomic notions through the in­troduction of coffee cultiva­tion, which opened to the Hutu a road to independence, by­passing the Tutsi cattle‐based economy. And Belgian authori­ty over Tutsi notables, even over the sacred Mwami him­self, inevitably damaged their prestige. The Belgians even de­posed one obstructive Mwami. About ten years ago, the Belgians tried to persuade the Tutsi to let some of the Hutu into their complex structure of government. In Burundi, the Tutsi ruling caste realized its cuanger just in time and agreed to share some of its powers with the Hutu majority. But in Rwanda, until the day the system toppled, no Hutu was appointed by the Tatsi over­lords to a chief’s position. A tight, rigid, exclusive Tutsi aristocracy continued to rule the land.

    The Hutu grew increasingly

    WHEN order was restored, there were reckoned to be 21,­000 Tutsi refugees in Burundi, 14,000 in Tanganyika, 40,000 in Uganda and 60,000 in the Kivu province of the Con­go. The Red Cross did its best to cope in camps improvised by local governments.

    Back in Rwanda, municipal elections were held for the first time—and swept the Hutu into power. The Parmehutu —Parti d’Emancipation des Hu­tus—founded only in October 1959, emerged on top, formed a coalition government, and after some delays proclaimed a republic, to which the Bel­gians, unwilling to face a colonial war, gave recognition in terms of internal self‐gov­ernment.

    In 1962, the U.N. proclaimed Belgium’s trusteeship at an end, and, that same year, a general election held under U.N. supervision confirmed the Hutu triumph. With full in­dependence, a new chapter be­gan — the Hutu chapter.

    Rwanda and Burundi split. Burundi has the only large city, Usumbura (population: 50,000), as its capital. With a mixed Tutsi‐Hutu govern­ment, it maintains an uneasy peace. It remains a kingdom, with a Tutsi monarch. Every­one knows and likes the jovial Mwami, Mwambutsa IV, whose height is normal, whose rule

    As its President, Rwanda chose Grégoire Kayibanda, a 39‐year‐old Roman Catholic seminarist who, on the verge of ordination, chose politics in­stead. Locally educated by the Dominicans, he is a protégé of the Archbishop of Rwanda whose letter helped spark the first Hutu uprising. Faithful to his priestly training, he shuns the fleshpots, drives a Volkswagen instead of the Rolls or Mercedes generally favored by an African head of state and, suspicious of the lure of wicked cities, lives on a hilltop outside the town of Kigali, said to be the smallest capital city in the world, with some 7,000 inhabitants, a sin­gle paved street, no hotels, no telephone and a more or less permanent curfew.

    Mr. Kayibanda’s Christian and political duties, as he sees them, have fused into an im­placable resolve to destroy for­ever the last shreds of Tutsi power—if necessary by obliter­ating the entire Tutsi race. Last fall, Rwanda still held between 200,000 and 250,000 Tutsi, reinforced by refugees drifting back from the camps, full of bitterness and humilia­tion. In December, they were joined by bands of Tutsi spear­men from Burundi, who with the courage of despair, and outnumbered 10 to 1, attacked the Hutu. Many believe they were egged on by Mwami Ki­geri V, who since 1959 had been fanning Tutsi racial prideand calling for revenue.

    THE result of the attacks was to revive all the cumula­tive hatred of the Tutsi for past injustices. The winds of anti‐colonialism sweeping Af­rica do not distinguish be­tween white and black colo­nialists. The Hutu launched a ruthless war of extermina­tion that is still going on. Tut­si villages are stormed and their inhabitants clubbed or hacked to death, burned alive or herded into crocodile‐infest­ed rivers.

    What will become of the Tutsi? One urgent need is out­side help for the Urundi Gov­ernment in resettling the masses of refugees who have fled to its territory. Urundi’s mixed political set‐up is rea­sonably democratic, if not al­ways peaceful (witness the assassination of the Crown Prince by a political opponent

    In a sense the Tutsi have brought their tragic fate on themselves. They are paying now the bitter price of ostrich­ism, a stubborn refusal to move with the times. The Bourbons of Africa, they are meeting the Bourbon destiny—to be obliterated by the people they have ruled and patron­ized.

    The old relationship could survive no longer in a world, as E. M. Forster has described it, of “telegrams and anger;” a world of bogus democracy turning into one‐party states, of overheated U.N. assemblies, of press reports and dema­gogues, a world where (as in the neighboring Congo) a for­mer Minister of Education leads bands of tribesmen armed with arrows to mutilate women missionaries.

    THE elegant and long‐legged Tutsi with their dances and their epic poetry, their lyre­horned cattle and superb bas­ketwork and code of seemly behavior, had dwindled into tourist fodder. The fate of all species, institutions or individ­uais who will not, or cannot. adapt caught up with them. Those who will not bend must break.

    For the essence of the situ­ation in an Africa increasingly

    NOW, not just the white men have gone, or are going; far more importantly, the eld­ers and their authority, the whole chain of command from ancestral spirits, through the chief and his council to the obedient youth are being swept away. This hierarchy is being replaced by the “young men,” the untried, unsettled, uncer­tain, angry and confused gen­eration who, with a thin ve­neer of ill‐digested Western education, for the first time in Africa’s long history have taken over power from their fathers.

    It is a major revolution in­deed, whose first results are only just beginning to show up and whose outcome cannot be seen. There is only one safe prediction: that it will be vio­lent, unpredictable, bloody and cruel, as it is proving for the doomed Tutsi of Rwanda.

    #Ruanda #Burundi #histoire #Tutsi #Congo

  • Rwanda : « On était venus empêcher la victoire de ceux qui combattaient les génocidaires » - Libération
    http://www.liberation.fr/planete/2018/03/15/rwanda-on-etait-venus-empecher-la-victoire-de-ceux-qui-combattaient-les-g

    Guillaume Ancel, capitaine de l’armée française en 1994, a participé à l’opération « Turquoise ». Il publie aujourd’hui un livre sur cette intervention qui, d’après son témoignage, visait à protéger le gouvernement rwandais en déroute.

    C’est un soupçon monstrueux qui ne cesse de ressurgir, depuis près de vingt-cinq ans : la France a-t-elle déclenché une opération humanitaire dans un pays d’Afrique avec comme but inavoué de sauver un gouvernement qui venait tout juste de massacrer près d’un million de personnes ? L’accusation peut paraître énorme. Elle revient pourtant régulièrement, comme un serpent de mer qui interroge, encore et encore, le rôle pour le moins ambigu de la France lors du génocide qui s’est déroulé au Rwanda en 1994.

    Cette année-là, dans ce petit pays de l’Afrique des Grands Lacs, une extermination est déclenchée contre la minorité tutsie du pays. Pour y mettre un terme, alors que la communauté internationale a vite plié bagage, il n’y aura que l’offensive d’un mouvement rebelle, le Front patriotique rwandais (FPR), formé quatre ans plus tôt par des exilés #tutsis. Contre toute attente, le #FPR fait reculer le gouvernement génocidaire. Et c’est au moment où le FPR semble proche de la victoire finale que la France décide soudain d’intervenir. Sous label « humanitaire ». Guillaume #Ancel y était. Officier intégré dans une unité de la Légion étrangère, il a participé à cette opération « #Turquoise », dont il raconte la face cachée, dans le livre qu’il publie aujourd’hui (1).

    Depuis que vous avez quitté l’armée en 2005, et même encore récemment, vous avez souvent témoigné sur l’opération Turquoise. Pourquoi publier encore un livre aujourd’hui ?
    Pour empêcher que le silence ne devienne amnésie, et sur les conseils d’un historien, Stéphane #Audoin–Rouzeau, qui m’a aidé à écrire ce livre. C’est le témoignage écrit cette fois-ci, de ce que j’ai vécu, ce que j’ai vu. En nous envoyant là-bas, personne ne nous a briefés avant le départ. On ne savait rien. C’est totalement inédit dans les pratiques de l’armée. Et ce n’est qu’en arrivant sur place qu’on a compris : en guise « d’action #humanitaire », on était d’abord venus pour stopper le FPR, donc empêcher la victoire de ceux qui combattaient les génocidaires. Qu’on a tenté de remettre au pouvoir, puis qu’on a aidé à fuir, avant de les réarmer de l’autre côté de la frontière au Zaïre [aujourd’hui république démocratique du Congo, ndlr]. C’est comme si à la fin de la Seconde Guerre mondiale, le corps expéditionnaire français avait été envoyé aux côtés des nazis pour stopper, par exemple, l’avancée des troupes russes. En aidant les nazis à se réarmer, faute d’avoir pu finalement les réinstaller au pouvoir. L’opération Turquoise a été menée « au nom de la France ». Mais vingt-quatre ans plus tard, on refuse toujours d’en ouvrir les #archives. Pour quelle raison, si ce n’était qu’une simple opération humanitaire ?

    Au sein de l’armée il y a d’autres témoignages qui contredisent le vôtre…
    En réalité, il y a surtout très peu de témoignages. Beaucoup se taisent car il existe une culture du silence dans l’armée française, qu’on ne retrouve pas d’ailleurs chez les Anglo-Saxons. Il y a pourtant cet ancien officier du GIGN qui a raconté l’horreur d’avoir compris qu’il avait formé des troupes qui commettront ensuite le génocide. Parmi les anciens de Turquoise, certains, en revanche, répètent la parole officielle, par peur d’être mis en cause. Mais il y a aussi cet ancien commandant de marine qui, lui, explique clairement qu’il était là pour aider ceux qui commettent les massacres ! J’ai également des camarades qui avaient écrit au ministre de la Défense, à l’époque de l’opération, pour dénoncer le réarmement des troupes génocidaires en déroute. Ils se sont fait tacler.

    Mais pour quelle raison la France se serait-elle fourvoyée dans ce bain de sang ?
    Aucun responsable ne s’est réveillé un matin, en se disant « tiens je vais aider ceux qui commettent un #génocide ». Mais il y a eu une part d’aveuglement, dans le cercle étroit autour du président François #Mitterrand. Quand le génocide commence, la France vient de passer quatre ans aux côtés du régime rwandais. Sur place on a vu le fichage des Tutsis, on a su pour l’entraînement des miliciens, les premiers pogroms, simple répétition du « grand soir ». Et on n’a pas réagi. En revanche dès le début du génocide, des divergences apparaissent au sein même des services de renseignements : la #DGSE pointe tout de suite la responsabilité du pouvoir en place dans l’organisation de massacres et conseille de s’en dissocier. Puis, la direction du renseignement militaire va contredire cette analyse, tenter de détourner l’attention sur la responsabilité du FPR dans l’attentat contre l’avion du président rwandais Juvénal #Habyarimana [attentat du 6 avril 1994, considéré comme l’événement déclencheur du génocide] avec une photo de missiles qui avait tout d’une manip.

    Or quand l’avion du président Habyarimana est abattu, après des mois de tensions, ce dernier venait justement d’accepter de partager le pouvoir avec le FPR. Au fait, pourquoi n’a-t-on jamais retrouvé la boîte noire ? L’un des premiers sur les lieux du crash, c’est un officier français : Grégoire de Saint Quentin. Mais quand je l’ai rencontré et que je lui ai demandé ce qu’était devenue la boîte noire, il s’est brusquement refermé comme une huître. Il n’est pas en cause, on lui a ordonné de se taire.

    Vous refusez d’accuser vos anciens compagnons d’armes, qui n’auraient fait qu’« obéir aux ordres », mais vous évoquez aussi ce prisonnier qui aurait été jeté d’un hélicoptère pendant l’opération Turquoise. Est-ce que l’armée n’est pas parfois hors contrôle dans ces opérations ?
    C’est un cas particulier. Une équipe qui, je pense, a disjoncté toute seule. Pour le #Rwanda, ce qui est inquiétant, c’est ce lourd silence qui continue à s’imposer, et la gravité des faits qui pourrait impliquer une complicité de génocide. Mais aujourd’hui, alors que les questions sécuritaires sont de plus en plus fortes, on est de moins en moins informé sur les opérations militaires, en #Afrique notamment. Sur le moment c’est parfois périlleux de dévoiler les détails d’une opération. Mais après coup ? Si l’opinion, les médias, ne se montrent pas plus exigeants sur ce qui est fait en notre nom à tous, c’est la démocratie qui est en péril.
    (1) Rwanda, la fin du silence (éditions les Belles Lettres), 21 euros
    Maria Malagardis

    En parlant de soupçon au début de l’interview c’est comme si Libération découvrait ce que de nombreux livres, chercheurs et témoignages n’ont cessé de répéter depuis plus de 20 ans. Ce ne sont pas des soupçons, ce sont des faits avérés mais niés par les responsables politiques français contre toute évidence. Les mots sont importants.
    #françafrique #armée

    • déjà en 2014…

      Guillaume Ancel. Hanté par Turquoise - Libération
      http://www.liberation.fr/planete/2014/07/02/guillaume-ancel-hante-par-turquoise_1055863

      Il atterrit au bord du lac Kivu, à la frontière du Rwanda et de ce qui était alors le Zaïre (devenu république démocratique du Congo). Finalement, il n’y aura pas de raid sur la capitale. « Mais nous étions bien venus pour nous battre et trouver le moyen de sauver le pouvoir en place alors en pleine débandade », souligne-t-il. Quelques jours plus tard, un deuxième ordre pour stopper la progression des rebelles sera aussi annulé in extremis. « Ce n’est qu’après cette deuxième annulation que l’opération Turquoise devient vraiment humanitaire et qu’on va être encouragés à aller sauver des rescapés », explique-t-il. Il en garde le souvenir de s’être enfin rendu utile : « Chaque vie sauvée était une victoire. »Mais au niveau politique, un certain flou demeure. « On a renoncé à sauver ouvertement le régime génocidaire mais on lui a permis de traverser la frontière. Et on lui a fourni des armes », accuse l’ex-officier qui fut le témoin direct d’une livraison d’armes, « cinq à dix camions qui ont franchi la frontière dans la seconde partie de juillet. Moi, ce jour-là, j’étais chargé de "divertir" les journalistes présents sur place. »

  • Paul Kagamé, autocrate certes éclairé du #rwanda, mais autocrate tout de même
    https://www.mediapart.fr/journal/international/040817/paul-kagame-autocrate-certes-eclaire-du-rwanda-mais-autocrate-tout-de-meme

    Paul Kagamé en 2012, à Londres. © Department for #International Development Vingt ans après le #génocide des #Tutsis, il est difficile de ne pas admirer les réussites du président rwandais. Mais les éléments les plus sombres de son régime, tus pendant longtemps, menacent de le rattraper.

    #Afrique #autoritarisme #Hutus #Paul_Kagamé #République_démocratique_du_Congo #ressources_naturelles

  • Le saisissant « examen de conscience » d’un historien face au #génocide des #Tutsis
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/160517/le-saisissant-examen-de-conscience-d-un-historien-face-au-genocide-des-tut

    Stéphane Audoin-Rouzeau, historien de la Grande Guerre, a été ébranlé par ses séjours au #rwanda. Il livre un texte à la fois personnel, scientifique et cinglant sur l’implication de la #France dans le génocide des Tutsis, qui résonne d’un poids particulier sous la plume de ce « conservateur », spécialiste de l’anthropologie du combat et des massacres de masse.

    #Culture-Idées #armée #commémoration #François_Mitterrand #Histoire #sciences_sociales #Stéphane_Audoin-Rouzeau

  • Le #rwanda va enquêter sur le rôle de 20 militaires français dans le #génocide
    https://www.mediapart.fr/journal/international/011216/le-rwanda-va-enqueter-sur-le-role-de-20-militaires-francais-dans-le-genoci

    Lassé par l’interminable instruction française sur l’attentat déclencheur du génocide des #Tutsis, Kigali a décidé d’ouvrir une enquête sur l’implication de vingt militaires français dans ce qui s’est passé en 1994.

    #International #Afrique #Responsabilité #soldats_français

  • Ces frises chronologiques présentent en images les principaux événements survenus au #Rwanda depuis la période coloniale à la fin du XIXème siècle jusqu’à aujourd’hui.
    http://www.un.org/fr/preventgenocide/rwanda/timeline/timeline.shtml

    1er janvier 1932 : La #Belgique introduit des cartes d’identité qui distinguent #Tutsis, #Hutus et #Twas

    #génocides #responsabilités

  • Le #génocide des #Tutsis rwandais dans la bande dessinée

    Pour sa séance de décembre, le séminaire « Les écritures visuelles dans la bande dessinée » s’est penché sur « le génocide des Tutsis rwandais et la constitution d’un réseau visuel », en invitant un spécialiste de la question, Nathan Réra, maître de conférences en histoire de l’art contemporain à l’Université de Poitiers.


    http://casesdhistoire.com/le-genocide-des-tutsis-rwandais-dans-la-bande-dessinee
    #Rwanda #BD #livre #guerre #conflit #bande_dessinée

    via @ville_en
    cc @marty

  • Des exilés burundais racontent leur pays en proie à la violence
    https://www.mediapart.fr/journal/international/211215/des-exiles-burundais-racontent-leur-pays-en-proie-la-violence

    Depuis que le président du #Burundi #Pierre_Nkurunziza a décidé en avril 2015 de se faire réélire pour un troisième mandat théoriquement inconstitutionnel, il a réprimé toute l’opposition d’une main de fer, précipitant la fuite de 200.000 personnes et les craintes de massacres interethniques.

    #International #accords_d'Arusha #Afrique #Hutus #opposants #putsch #réfugiés #rwanda #Tutsis

  • Rwanda, la vie après - Paroles de mères on Vimeo, des témoignages forts et dignes qui nous laissent sans voix.

    http://vimeo.com/98410642

    J’ai été violée par plus de trois hommes, de ce viol est né une fille... Elle est grande maintenant, c’est une adolescente, elle a 18 ans. je n’ai jamais rejeté ma fille. Je l’ai aimée dès le début, même quand elle était bébé.

    Car si je l’avais détestée, j’aurai alors donné raison à ceux qui m’ont violée.

    Bien sur je ne l’ai pas conçue comme je l’aurai souhaité, mais j’ai survécu à cette grossesse pour aimer l’enfant qui en est venu.

    Un film de Benoit Dervaux et André Versaille

    Ce film est constitué des témoignages de six femmes tutsies provenant du Rwanda profond. Elles racontent leur parcours, de la fin du génocide à aujourd’hui : les viols multiples ; le sida ; l’accouchement d’un enfant de génocidaire ; le rejet par ce qui leur restait de famille pour qui il était inconcevable d’accueillir le fils ou la fille d’un tueur ; leur solitude ; la difficulté pendant des années d’assumer cet « enfant de la haine », avant d’apprendre à l’aimer…
    En contrepoint, une fille et un garçon issus des viols de ces femmes, racontent à leur tour ce que fut leur enfance.

    Coproduction Dérives – Carpe Diem Icare

    #rwanda

  • Patrick de Saint-Exupéry : « C’est le propre du génocide qu’on efface tout » - France - RFI
    http://www.rfi.fr/afrique/20140404-patrick-saint-exupery-genocide-rwanda-1994-on-efface-tout

    C’est tout simple à raconter. Nous sommes quelques journalistes qui accompagnent des soldats [de l’opération militaire française, ndlr] Turquoise. Le 27 juin 1994, nous découvrons avec les soldats un groupe de rescapés tutsis qui sont pourchassés depuis des semaines, des mois, et qui sont encore vivants. Ces soldats font leur travail, informent la hiérarchie, l’état-major de Turquoise. Rien ne se passe. Et au bout de trois jours, ces gens-là, tous #Tutsis, vont être sauvés par un autre groupe de soldats Turquoise. Mais pourquoi ce groupe de soldats Turquoise va intervenir ? Parce que des soldats vont décider de désobéir aux ordres. Cet épisode-là pose d’évidentes questions du rôle de la #France au #Rwanda dans le #génocide.