• « Nous voulons exprimer ici notre #solidarité avec les #universitaires français », par #Angela_Davis, Gayatri Spivak, Achille Mbembe...
    https://www.nouvelobs.com/idees/20210317.OBS41524/nous-voulons-exprimer-ici-notre-solidarite-avec-les-universitaires-franca

    En tant que #chercheurs et activistes internationaux, nous nous engageons à être solidaires de nos homologues de France. Nous nous engageons à suivre attentivement la situation, à faire connaître les cas de #répression à l’échelle mondiale, à inviter ceux qui sont confrontés à la répression et à la censure à s’exprimer dans nos pays, à co-rédiger des essais avec elles et eux et à les aider à traduire leur travail, à co-encadrer des étudiant.e.s et des jeunes #collègues, et à s’engager dans d’autres formes de #collaboration qu’elles et ils désirent.

    187 signataires :
    https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSc46U844ETt0fBsq-6v9n1pcaVIx_U8LLMiU16VpMo5NwgU_w/viewform

  • #Islamo-gauchisme : « Nous ne pouvons manquer de souligner la résonance avec les plus #sombres moments de l’histoire française »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/03/04/islamo-gauchisme-nous-ne-pouvons-manquer-de-souligner-la-resonance-avec-les-

    Nous écrivons pour exprimer notre profonde consternation devant la récente requête de la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Frédérique #Vidal, demandant au Centre national de la recherche scientifique (#CNRS) de diligenter une enquête sur les agissements « #islamo-gauchistes » dans les universités françaises.

    Nous regrettons qu’après le passage par le gouvernement français d’une loi sur le « #séparatisme » ayant déjà accentué la #stigmatisation de musulmans en France, ce soit désormais aux #universitaires d’être accusés de polariser les débats publics. L’idée que l’on puisse surveiller des enseignants-#chercheurs sous prétexte du « dévoiement #militant de la recherche » est dans les faits une #menace directe de censure qui nous inquiète à plus d’un titre.

    Tout d’abord, l’Etat n’a ni le droit ni la compétence pour #censurer les travaux d’universitaires qui s’appuient sur leur expertise pour contribuer à l’avancée du savoir dans nos #sociétés. C’est un précédent dangereux qui ne saurait être toléré dans une #société_démocratique.

    • fin du texte :
      Fanon, Sartre, Bourdieu…
      L’argument selon lequel des universitaires, soi-disant « islamo-gauchistes », risquent de diviser la société est dans les faits un effort visant à diffamer nos collègues. Cette attaque est de surcroît justifiée au nom de la protection de la République face à l’alliance supposée entre une partie de la gauche et un groupe religieux.

      Nous ne pouvons manquer de souligner la résonance avec les plus sombres moments de l’histoire française, et notamment avec un discours attaquant les « judéo-bolcheviques » qui déjà servait à créer l’amalgame entre engagements politiques et religieux.

      Lire cette tribune : Islamo-gauchisme : « S’il y a un effet de mode, quant à ce nouveau type de recherche, notre rôle n’est pas de les censurer, mais de les encadrer »
      Par ailleurs, les approches actuellement sous le feu de la critique ont été directement inspirées par quelques-unes des plus brillantes figures de la tradition philosophique, littéraire et sociologique française. En tant que chercheurs travaillant aux Etats-Unis et ailleurs, nous sommes redevables intellectuellement envers la France pour avoir contribué par ses universités à l’émergence de penseurs tels que Frantz Fanon, Albert Memmi, Hélène Cixous, Aimé Césaire, Paulette Nardal, Jean-Paul Sartre, Pierre Bourdieu, Louis Althusser, Jacques Derrida et Michel Foucault.

      La plupart de ces figures n’étaient pas seulement des penseurs, mais aussi des individus impliqués dans des luttes politiques prolongées pour rendre nos sociétés meilleures. Ces intellectuels engagés sont devenus les piliers des diverses approches qui sont désormais attaquées sous le nom de « postcolonialisme. »

      Censure
      Qu’un pays qui a tant contribué à faire avancer la pensée critique tourne ainsi le dos à son patrimoine national n’est pas seulement alarmant, c’est aussi dénué de vision à long terme. Nous ne demandons pas que tout le monde embrasse ces approches et reconnaisse leurs mérites, mais simplement que les universitaires français puissent en débattre et les partager avec leurs étudiants, si tel est leur bon vouloir.

      Lire cette tribune : Islamo-gauchisme : « L’introduction de certains termes, comme “racisé” ou “féminicide”, ne fait que rendre visibles des préjudices déjà existants »
      Enfin, ceux qui gouvernent l’enseignement supérieur feraient mieux de chercher des solutions concrètes au problème de la discrimination raciale en France, plutôt que de se lancer dans une chasse aux sorcières contre des chercheurs. Las, plutôt que de soutenir des universitaires afin de faire avancer la lutte commune pour l’égalité, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche les menace de censure.

      Plutôt que de répondre à la souffrance des étudiants dans un contexte de pandémie globale, ou aux problèmes économiques auxquels est confrontée l’éducation publique, Frédérique Vidal et ses collègues désignent des enseignants comme la principale menace pesant sur les universités françaises.

      Article réservé à nos abonnés Lire aussi « L’éthique de la recherche, c’est la capacité à distinguer les enjeux, à ne pas glisser de la théorie vers l’idéologie »
      De nombreux signataires de la présente tribune ont bénéficié de leurs échanges prolongés avec des universités françaises, que ce soit avec des individus ou au niveau institutionnel. Nous souhaitons que cette collaboration avec nos collègues français se poursuive dans un esprit de débat ouvert et libre. C’est pourquoi nous attirons à nouveau votre attention sur les graves dangers que ces menaces de censure font peser sur la liberté académique.

  • Les #universitaires, des travailleur.euse.s comme les autres ? Au sujet de la #grève à l’#université

    Rédigé par deux jeunes chercheurs·ses précaires, Anna Brik et Andréas Albert, ce texte voudrait contribuer à un débat déjà ancien, mais rouvert récemment à l’occasion de l’entrée des enseignant.e.s-chercheur.euse.s dans la lutte contre les réformes en cours, le débat sur la grève à l’université.

    Il cherche à montrer que les différentes positions sur la question de la grève exprimées par les membres de la communauté universitaire sont en grande partie déterminées par les visions spécifiques de l’évolution historique et du rôle social de l’université et des enseignant.e.s-chercheur.euse.s, visions qui sont elles-mêmes à saisir en lien avec les différentes positions sociales au sein du champ universitaire.

    Exercice de sociologie spontanée sans doute, mais qui essaye de parvenir à une meilleure compréhension des impasses et des perspectives du mouvement dans lequel Anna Brik et Andréas Albert sont engagé.e.s.

    *
    Au nom de la défense du « service public »

    L’université a connu d’importantes mutations au cours de la deuxième moitié du XXe siècle : l’institution autrefois réservée à l’élite cultivée, responsable de la formation des médecins, juristes et professeur.e.s, traverse une période de massification progressive à partir des années 1960[1] et connaît une véritable explosion des effectifs au cours des trente dernières années à la faveur de la politique « 80 % au bac »[2]. Pourtant, depuis une quinzaine d’années, les universités sont de plus en plus soumises à des mesures d’austérité, d’une part, et à la logique managériale de performance et de compétitivité, d’autre part. Pour parer au manque des fonds publics, les réformes successives incitent les universités à recourir à des sources de financement privées, à favoriser la recherche par projets, à mettre en place des projets de fusion, à augmenter les frais d’inscription pour les étudiant.e.s extra-communautaires, à employer toujours davantage de vacataires, etc. Les différents rapports préparant le projet de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR) préconisent un pas supplémentaire en direction de l’« université capitaliste » : atteinte au statut de fonctionnaire, accentuation de la précarité à tous les niveaux, généralisation de l’évaluation quantitative de la productivité des chercheur.euse.s par les organismes externes comme condition d’accès aux financements. En cela, la LPPR est une réforme de la même magnitude que la loi LRU 2009 qui met en place l’autonomie budgétaire des établissements de l’enseignement supérieur, et le décret qui l’accompagne et qui modifie le statut des enseignant.e.s-chercheur.euse.s. Aujourd’hui, les inquiétudes sont particulièrement fortes du côté des sciences humaines et sociales qui se trouveraient fortement marginalisées par la mise en place de ces nouvelles règles du jeu.

    Face à ces attaques, les membres de la communauté universitaire avancent généralement deux types de discours. Le plus ancien, dont la première formulation date du milieu du XIXe siècle, consiste à opposer l’« idée de l’université » humaniste, centrée sur la conservation, le développement et la transmission des savoirs, à toute tentative de la soumettre à des critères instrumentaux[3]. Ce discours qui défend l’autonomie de la science et des scientifiques prétend s’appuyer sur les caractéristiques essentielles de l’enseignement et de la recherche universitaires, en insistant sur l’incompatibilité de principe entre les fins de développement de la personne et la professionnalisation, entre la recherche de la vérité et la collaboration de la science et de l’industrie.

    Le second type de discours n’exclut pas la dimension instrumentale de l’université, ou plutôt la vision de l’université comme étant au service de la société, mais elle la pense uniquement sous la forme d’une subordination des activités universitaires au principe de l’intérêt général. C’est le discours de l’université comme « service public », dont on peut distinguer de manière schématique trois versions. La première insiste sur l’atteinte que porte la marchandisation de l’université et la destruction du statut de fonctionnaire à l’idéal républicain qui est au fondement de l’État moderne. Un des meilleurs exemples de cette position est formulé par Pierre Bourdieu dans divers écrits : le champ scientifique doit son indépendance scientifique (vis-à-vis du marché notamment) au fait d’être dépendant financièrement de l’État[4]. Servir l’État serait la condition nécessaire pour pouvoir se libérer de l’emprise de l’État et du marché sur la recherche scientifique. La deuxième version est celle d’un réformisme social-démocrate qui, contrairement à la version républicaine, reconnaît l’existence d’intérêts de classe divergents : l’université ouverte aux enfants de la classe ouvrière ne serait pas une institution intrinsèquement républicaine, mais le produit de la lutte des classes, un « acquis social » arraché à la classe dominante après la Seconde Guerre mondiale sous la pression continue des luttes sociales. Par rapport à cet acquis, qu’il s’agirait de préserver avec les autres acquis sociaux tels que les transports et les hôpitaux publics, la sécurité sociale, les congés payés, etc., la marchandisation récente représente une régression[5]. Enfin, la troisième version du discours sur l’université en tant qu’institution non marchande est celle de la tradition post-opéraïste qui radicalise le paradigme du service public : l’université, « précapitaliste » par son organisation, son procès de travail et ses valeurs, ferait partie des « communs » qui jusque-là ont échappé à la valorisation par le capital. Les transformations actuelles témoigneraient d’une tentative de capture de ce commun par le capital à travers la soumission de la recherche à des intérêts privés. On peut le voir par exemple à travers divers symptômes comme le système d’évaluation de la recherche par des critères quantitatifs et des critères de productivité, au détriment d’une slow science plus soucieuse de produire des résultats durables. Cette emprise reste cependant extérieure, car la coopération autonome de la communauté des producteur.rice.s de la connaissance reste essentielle au travail de la connaissance[6].

    L’insuffisance d’une approche en termes de service public

    Sans même parler du premier type de discours qui porte un regard essentialiste sur l’université, le discours du « service public », dont les versions républicaine et social-démocrate sous-tendent les modes d’argumentation d’une grande partie des enseignant.e.s-chercheur.euse.s titulaires, implique une vision naïve des rapports entre l’université et le capital d’avant les années 1980. Tout se passe comme si l’université des Trente Glorieuses avait mené une existence parallèle et complètement autonome par rapport au capitalisme fordiste, grâce aux robustes remparts construits par l’effort conjoint des enseignant.e.s-chercheur.euse.s et du mouvement étudiant.

    Ce présupposé ne résiste pas à l’analyse dès que l’on s’intéresse à la structure duale de l’université française, divisée entre grandes écoles et écoles préparatoires, d’un côté, et universités, de l’autre. Pourtant, l’université comme une simple branche de l’enseignement supérieur, dont les formations sont concurrencées par d’autres établissements plus prestigieux (écoles de commerce pour l’économie et la gestion, école normale supérieure pour les sciences humaines et sociales et les sciences expérimentales, etc.) est une spécificité française qui empêche la production d’un discours unifié sur l’enseignement supérieur et qui détermine la représentation du métier d’enseignant.e comme une forme de travail social. En adoptant un point de vue d’ensemble, il est pourtant aisé de voir que l’université n’est ni contrepoids, ni un remède aux établissements sélectifs et/ou privés : elle forme avec eux un seul système qui consiste à trier et à former de manière différenciée la future force de travail ou à retarder simplement son entrée sur le marché de l’emploi. Nous y reviendrons plus loin.

    Le processus progressif de massification de l’université a commencé dans les années 1960 sous les effets conjoints du baby-boom, de la croissance du taux de scolarisation, des nécessités économiques et de la lutte des classes. Les départements des sciences humaines et les nouvelles disciplines comme la sociologie et la psychologie sont celles qui ont accueilli le plus d’enfants de cette première « démocratisation » universitaire, principalement à cause de la place qu’elles occupaient dans la hiérarchie des disciplines et du fait que les normes d’encadrement étaient les moins exigeantes[7]. Cependant, il faut rappeler que même en 1985, seulement 29 % d’une génération obtient le bac, contre 78 % en 2015[8]. L’accès aux titres universitaires des enfants de familles ouvrières et de familles issues de l’immigration est le résultat de la politique « 80 % au bac » promue par les socialistes à la fin des années 1980, en plein tournant néolibéral, avec pour but explicite d’enrayer le chômage des jeunes. Là encore, les départements des sciences humaines et sociales ont largement absorbé ces populations étudiantes, en bénéficiant d’une augmentation du nombre de postes tout au long des années 1990. Il serait donc erroné d’opposer l’ancienne « université ouverte à tou.te.s » et la nouvelle « université néolibérale » : l’émergence de la première est allée de pair avec la restructuration du capitalisme français dans les années 1980 et a constitué une condition préalable de la seconde.

    Enfin, force est de reconnaître que l’idée de l’université comme une république démocratique des enseignant.e.s-chercheur.euse.s fondée sur la coopération et l’autonomie de la recherche pure est une utopie immanente à la mobilisation plus qu’une description fidèle du présent : les rapports entre les enseignant.e.s-chercheur.euse.s titulaires et non-titulaires ont gardé tout au long de leur histoire les traits des rapports de pouvoir clientélistes. La vision que les enseignant.e.s-chercheur.euse.s ont de leur métier est beaucoup trop irénique et contribue à faire oublier que le recrutement se fait souvent par cooptation : les liens directs ou indirects des laboratoires avec les entreprises et les pouvoirs publics sont nombreux, la concurrence entre les universités, les disciplines, les départements, les laboratoires et les individus n’a jamais été absente de l’institution. En cela, nous ne disons rien de nouveau lorsque nous affirmons qu’il ne faut pas « sauver l’université »[9].

    L’approche marxiste fonctionnaliste

    Contre l’idée selon laquelle l’université serait directement au service de l’intérêt général par opposition aux intérêts privés, qu’elle représenterait une sphère autonome voire antinomique par rapport à sphère de la production et de l’échange capitalistes, on peut évoquer les approches marxistes fonctionnalistes de l’université comme celles d’Emmanuel Barot[10] (qui s’appuie principalement sur l’analyse des appareils idéologiques d’État chez Althusser[11]) ou de Harry Cleaver[12]. Pour résumer, disons que ces approches défendent la thèse selon laquelle l’université moderne est une partie intégrante de la société capitaliste et de son histoire, voire que l’université est fonctionnelle à l’économie capitaliste, et qu’elle tend à adopter, avec toujours un certain retard, la même structure que la firme capitaliste.

    L’université assume en effet au moins deux fonctions : celle de la reproduction de la force de travail pour ce qui est de sa qualification spécialisée, et celle de la reproduction des rapports de production, c’est-à-dire du consentement à l’ordre social existant. Ainsi, prenant le relais de l’enseignement primaire et secondaire, l’université représente un maillon central dans le maintien de la division sociale mais aussi technique du travail, puisque les formations relevant du même champ disciplinaire n’ouvrent pas l’accès aux mêmes types de postes selon le prestige de l’établissement et les matières enseignées. Elle accomplit ainsi, d’un seul coup, la répartition largement prédéterminée des individus au sein de la structure de classe, et la justification de cette structure en la faisant passer au crible de la méritocratie scolaire. Autrement dit, l’École, de la maternelle à l’université, divise les jeunes selon leur classe sociale d’origine, et les distribue dans des filières plus ou moins qualifiantes selon les besoins plus ou moins immédiats du capital. Dans L’École capitaliste en France, Christian Beaudelot et Roger Establet affirmaient dès 1972 que le système scolaire affiche une unité de façade. La soi-disante « mission éducatrice » des enseignant.e.s, quel que soit le niveau, ne serait qu’un mirage puisqu’une filière professionnalisante de courte durée était destinée aux enfants du peuple, tandis qu’une filière prestigieuse et de longue durée était destinée aux enfants de la bourgeoise et de la petite-bourgeoisie. Ces analyses des années 1970 seraient à revoir, notamment en raison de l’allongement de la durée d’études et des besoins plus importants des entreprises en termes de qualification de la main-d’oeuvre, mais restent pertinentes.

    La production du consentement passe par le contenu même des savoirs produits et transmis, ainsi que par la forme de leur transmission, forme qui tend à neutraliser la force subversive des savoirs les plus critiques. Sur ce point, les enseignant.e.s-chercheur.euse.s ne se lassent pas de défendre l’idée d’une université et de savoirs critiques. Pourtant, il est légitime de se demander en quoi consiste le caractère critique d’un savoir et si, malgré leur enrobage dans un langage radical, ces savoirs ne sont pas, en fin de compte, compatibles avec la société capitaliste. Sur ce point, on pourrait aussi remettre en question l’idée souvent défendue par les enseignant.e.s-chercheur.euse.s impliqué.e.s dans la mobilisation contre la LPPR, selon laquelle pratiquer des « savoirs critiques » ou donner des cours « alternatifs » serait en soi une forme d’action efficace contre les réformes. Souvent ces cours n’ont rien de fondamentalement différent des cours assurés habituellement et ils nécessitent de la part des enseignant.e.s autant de préparation et de travail en amont qu’un cours normal[13]. Enfin, on peut rajouter qu’en tant qu’institution d’enfermement, même très relatif, l’université remplit une fonction directement coercitive de maintien de l’ordre public, et il semblerait que c’est en partie pour cette raison que la « démocratisation » de l’université est apparue dans les années 1980 comme une solution viable au problème du chômage des jeunes.

    Si l’université a pu jusqu’ici jouir d’une autonomie relative bien réelle (« franchise universitaire », principe de collégialité, liberté pédagogique, relative indépendance dans la conduite de la recherche, etc.), c’est peut-être parce que les processus de reproduction possèdent leurs propres impératifs. Ce que les nouvelles règles du jeu tendent à remettre en question, ce n’est donc pas l’opposition entre le privé et le public, entre l’intérêt général et les intérêts du capital, mais le rapport ancien entre les processus de production et de reproduction. L’intégration directe d’une partie des activités d’enseignement et de recherche dans les processus d’accumulation, ainsi que la transposition généralisée dans la sphère de la reproduction des modes de gestion propres à la sphère de la production représentent un pari dangereux pour la classe dominante elle-même.

    Malgré les atouts indéniables de l’appareil critique du marxisme fonctionnaliste, il nous semble nécessaire de pointer quelques-unes de ses limites. Premièrement, en balayant d’un revers de main la possibilité réelle du détournement des ressources financières et humaines de l’université au profit des enseignements et des programmes de recherche à contenu anti-systémique par l’argument de l’intégration capitaliste du moment critique, cette approche tend à simplifier les choses. Au lieu de déserter l’université comme lieu de reproduction sociale et de production de l’idéologie dominante, il est possible d’imaginer une science et un enseignement qui se mettent véritablement au service des dominé.e.s, qui dialoguent avec ces dernièr.e.s et qui co-construisent un savoir subversif. En effet, l’approche de l’université en termes d’appareil idéologique d’État conduit à l’idée d’un système de domination parfaitement achevé, en négligeant les contradictions internes à l’institution et l’influence de la lutte de classes, alors qu’on peut penser, à l’instar de Gramsci, que l’université représente l’un des terrains privilégiés de celle-ci[14]. Deuxièmement, alors qu’elle critique à juste titre le paradigme du « service public » en tant qu’instrument de l’analyse du présent, en s’en détournant avec mépris, elle s’empêche de voir l’aspect subversif et utopique (au sens positif du terme) que ce paradigme peut représenter à titre de norme immanente au travail de l’enseignant.e-chercheur.euse.

    Les obstacles à la grève des enseignant.e.s-chercheur.euse.s titulaires

    Dans «  »Sauver » l’université ? », texte publié en 2009 suite à l’échec du mouvement anti-LRU, Emmanuel Barot avait déjà suggéré que le paradigme social-démocrate de l’université comme service public avait constitué l’obstacle principal à l’extension de la grève à l’université. Cependant, c’est finalement à partir de l’analyse de l’ethos ou de l’habitus académiques que Barot a tenté d’expliquer cet échec : ceux-ci auraient empêché les enseignant.e.s de se mettre en grève contre la loi LRU et favorisé des méthodes d’action symboliques dont l’inefficacité était flagrante. À notre sens, il faudrait revenir à l’hypothèse initiale et présenter quelques réflexions à propos des conditions structurelles et épistémologiques de l’engagement dans la grève que le paradigme du service public ne permet pas de réunir.

    Premièrement, faire grève, pour un travailleur dont la force de travail est déjà devenue une marchandise, veut dire refuser de continuer à la fournir à l’acheteur. Or, les enseignant.e.s-chercheur.euse.s titulaires ne se conçoivent pas comme (et de par leurs conditions de recrutement, de travail et de rémunération ne sont pas) des travailleur.euse.s salarié.e.s exploité.e.s au sens propre du terme. Sans même parler du fait que la production directe de la valeur n’occupe pas la place centrale de leur activité, on peut remarquer que sur le plan juridique d’abord, en tant que fonctionnaires, ils et elles reçoivent un traitement annualisé et non un salaire au taux horaire ; sur le plan des rapports de pouvoir ensuite, les universitaires ne sont pas en principe subordonné.e.s au pouvoir disciplinaire de l’employeur[15], et participent tou.te.s à l’auto-gouvernement de leurs établissements (en siégeant dans diverses instances administratives ou scientifiques), tandis que le recrutement, les promotions, les publications et l’évaluation reposent en grande partie sur le principe de collégialité ; enfin, sur le plan du procès immédiat de travail, une liberté pédagogique et de recherche reste pour l’instant relativement grande selon les disciplines.

    Deuxièmement, faire grève impliquerait la reconnaissance du fait que l’université est déjà une entreprise, ou qu’elle remplit une fonction de reproduction au sein de la société capitaliste. Or, en mettant en avant la dimension désintéressée du savoir produit et transmis, la stratégie argumentative du paradigme du service public consiste justement à refuser cette prémisse. Si le capital est conçu comme quelque chose d’extérieur à l’université, alors arrêter la machine universitaire ne peut être pensé qu’en termes d’autopunition et de punition infligée aux étudiant.e.s.

    Enfin, la tentation corporatiste qui empêche de concevoir la grève universitaire comme un facteur de renforcement du mouvement de grève plus général dans le cadre de la lutte contre la réforme des retraites, apparaît aussi comme une conséquence presque inévitable de la ligne d’argumentation en termes de « service public ». Puisqu’elles/ils pensent incarner l’intérêt universel, les fonctionnaires tendent à prendre la défense de leur intérêt corporatif pour la défense de l’intérêt de tou.te.s, ce qui conduit au désengagement relatif par rapport aux luttes des autres secteurs.

    Les précaires à l’avant-garde

    On ne peut qu’être frappé par le fait que les mots d’ordre et les stratégies de lutte des enseignant.e.s-chercheur.euse.s précaires dépassent les obstacles décrits ci-dessous. L’appel du collectif de précaires de l’enseignement supérieur et de la recherche d’Île-de-France, diffusé le 30 janvier sur le site de Médiapart, ne saurait être plus clair : il faut étendre la grève sous toutes ses formes ; refuser le corporatisme par l’inscription de la grève universitaire dans la grève générale ; jeter les ponts entre les enseignant.e.s-chercheur.euse.s et les étudiant.e.s dans la lutte commune contre la précarité comme phénomène général qui touche de larges couches de travailleur.euse.s, présent.e.s et futur.e.s.

    La radicalité de cet appel, et l’engagement quotidien réel qui lui donne sa consistance, sont à première vue paradoxaux. On pourrait en effet penser que les enseignant.e.s-chercheur.euse.s titulaires n’auraient rien à perdre à se mobiliser, notamment en termes de statut ou de salaire, alors que ce n’est pas le cas des précaires : dans les conditions de concurrence croissante pour les postes, la mobilisation constitue à la fois une perte de temps de travail précieux et un risque de s’exposer aux sanctions informelles de la part des collègues responsables des recrutements. Mais en fait, c’est précisément la position des précaires dans le champ universitaire et le niveau actuel de concurrence pour les postes qui rend ce type de lutte possible.

    Au-delà de la conviction bien réelle de l’efficacité de la grève à l’université, l’appel à la « grève totale » (des enseignements, de la délivrance des diplômes, et jusqu’à l’arrêt de publication d’articles et la suspension de toute activité individuelle de la recherche) contient la revendication du statut de « travailleur.euse.s », qui doit notamment passer par la reconnaissance de tout le travail invisible effectué par les précaires. En d’autres termes, contrairement aux enseignant.e.s-chercheur.euse.s titulaires qui ont tendance à ne pas compter les heures parce que le traitement du fonctionnaire n’est ni inférieur, ni supérieur, mais par définition incommensurable avec la quantité de travail fourni, les précaires se positionnent comme des travailleur.euse.s salarié.e.s de l’université déjà pensée comme une entreprise. Dans ces conditions, l’appel à la grève totale apparaît aussi comme une arme symbolique : elle permet de visibiliser l’armée de travailleur.euse.s précaires qui assure désormais une grande partie des cours dans les universités. C’est au titre de travailleur.euse.s de l’université que les précaires revendiquent également le droit à la parole, notamment à travers la participation à toute prise de décision collective au sein de leurs équipes de travail – droit qui leur est souvent refusé.

    Dans l’université en crise, où la possession des titres scolaires et universitaires ne peut plus garantir l’accès à un poste, l’illusion du rapport entre le maître et l’apprenti, qui n’aurait qu’à attendre patiemment son tour, ne peut plus être maintenue. Le travail de thèse, la participation aux colloques, les charges de cours, etc. ne se présentent plus comme un processus de formation nécessaire (et suffisant) pour accéder à la maîtrise, mais comme l’exploitation d’un travail précaire mal payé, voire comme l’appropriation pure et simple du travail gratuit par l’institution. Ce n’est qu’en effectuant cette conversion de regard – que beaucoup d’universitaires titulaires n’ayant pas connu la précarité, ou l’ayant connu il y a longtemps, lorsque les conditions d’accès aux postes n’étaient pas les mêmes qu’aujourd’hui, refusent d’effectuer – que les thèses non financées, les vacations payées en-dessous du salaire minimum et avec plusieurs mois de retard peuvent apparaître pour ce qu’elles sont aux yeux de celles et ceux dont l’espoir des retours futurs sur l’investissement se réduit à peau de chagrin : un scandale eu égard au droit du travail.

    L’analyse bourdieusienne de la crise qui a secoué le champ universitaire en Mai 68 s’avère d’une actualité frappante lorsqu’il s’agit d’éclairer le conflit qui oppose aujourd’hui les enseignant.e.s-chercheur.euse.s titulaires et précaires, et qui porte ces dernièr.e.s à adopter des positions et des modes d’action à la fois plus radicaux et moins corporatistes au sein de la mobilisation contre les réformes en cours. Homo academicus (1984) propose une histoire structurelle des changements que le champ universitaire a subi au cours des années 1950-1960[16]. Dans l’ancienne université, le corps des enseignants subalternes (ou précaires comme on dirait aujourd’hui), constitué presque exclusivement d’hommes agrégés avec une forte proportion de normaliens, n’était pas beaucoup plus nombreux que celui des professeurs titulaires, permettant un accès quasi garanti des jeunes enseignants à la carrière universitaire. Mais la « reproduction heureuse » de l’institution grâce à ce mécanisme d’identification anticipée a été fortement perturbée par la première vague de la « démocratisation » de l’université. Face à l’augmentation rapide de la population étudiante, qui a triplé entre 1949 et 1969, l’université a répondu par un recrutement massif d’enseignant.e.s précaires, dont le nombre dans certaines facultés dépassait désormais de dix fois le nombre de professeurs titulaires. Alors que la nouvelle situation a imposé au corps professoral la révision de l’ancienne norme de recrutement, fondée sur la détention du titre de normalien et d’agrégé, les nouveaux entrants dépourvus de ces titres ont rapidement découvert que le maintien de l’ancienne norme d’accès au poste de titulaire rendait leur promotion largement illusoire. C’est cette « contradiction entre les promesses inscrites dans leur recrutement et l’avenir réellement assuré par des procédures inchangées de carrière »[17] qui a mis le feu aux poudres, engageant les enseignant.e.s précaires, aux côtés des étudiant.e.s affecté.e.s par la dévalorisation analogue de leurs titres scolaires, dans la lutte contre l’institution comme telle et le monde social qui la produit.

    « Et l’on peut sans doute reconnaître là une réalisation particulière d’un modèle général des processus révolutionnaires : la rupture objective du cercle des espérances et des chances conduit une fraction importante des moins dominés parmi les dominés (ici les catégories intermédiaires d’enseignants, ailleurs les petits-bourgeois) à sortir de la course, c’est-à-dire d’une lutte de concurrence impliquant la reconnaissance du jeu et des enjeux posés par les dominants, et à entrer dans une lutte que l’on peut dire révolutionnaire dans la mesure où elle vise à instituer d’autres enjeux et à redéfinir ainsi plus ou moins complètement le jeu et les atouts permettant d’y triompher[18]. »

    Sans nier les limites de tels rapprochements historiques, on peut risquer l’hypothèse que la période que traverse actuellement l’université partage avec celle décrite par Bourdieu le caractère de transition et de crise, qui se cristallise subjectivement autour des souffrances liées à la précarité et à la concurrence accrue pour les postes. La logique concurrentielle se voit redoublée par l’ouverture de l’université française à la concurrence internationale et par l’imposition de nouvelles règles d’avancement des carrières, à travers la substitution des normes de productivité exprimées en termes quantitatifs à celles fondées sur les titres scolaires et les réseaux interpersonnels.

    La ligne stratégique des précaires au sein du mouvement, qui correspond à leur position actuelle au sein du champ universitaire, peut être résumée de manière suivante. Elle consiste, premièrement, à rejeter simultanément les règles de jeu, anciennes et nouvelles. Contrairement aux enseignant.e.s-chercheur.euse.s titulaires, les précaires ont moins la tentation de formuler une critique de l’ « université capitaliste » au nom du statu quo. En effet, très peu d’entre eux/elles sont prêt.e.s à se mobiliser pour l’université telle qu’elle existe aujourd’hui. Deuxièmement, la perspective d’une période de précarité plus ou moins prolongée pousse également à refuser la focalisation sur la réforme du statut de l’enseignant.e-chercheur.euse, et à s’engager résolument dans la lutte contre la réforme des retraites. Enfin, l’accent central mis sur la précarité offre une possibilité réelle de convergence des luttes, de par le lien explicitement établi entre la précarité des enseignant.e.s et des personnels administratifs et la précarité étudiante, ainsi que celle des larges couches des travailleur.euse.s d’autres secteurs.

    Pour une grève totale à l’université

    L’importance de la grève à l’université n’est pas à minimiser. Une « grève totale », qui inclurait, outre des actions symboliques comme les grèves des revues, une grève des enseignements et des examens, avec possiblement une rétention des notes, pourrait créer une alliance stratégique entre enseignant.e.s-chercheur.euse.s titulaires, précaires, BIATSS et étudiant.e.s. dans la mobilisation. Les précaires seraient en quelque sorte « couverts » par la grève des enseignant.e.s-chercheur.euse.s titulaires, tandis que les étudiant.e.s ne seraient plus tenu.e.s de préparer des partiels ou de rendre des travaux, ce qui leur permettrait de se consacrer entièrement à la lutte. Les BIATSS[19], dont le travail est fondamental pour le fonctionnement des départements et des laboratoires, seraient pour leur part déchargé.e.s du travail que leur donnent les enseignant.e.s-chercheur.euse.s. Pourtant, force est de constater que les enseignant.e.s-chercheur.euse.s hésitent encore entre différents modes d’action. La grève des revues scientifiques et des activités de recherche est ce qui retient le plus l’attention des médias, malgré sa dimension symbolique et son impact très limité[20]. Comme le remarque aussi le bureau de l’ANCMSP dans un mail envoyé le 14 janvier sur la liste interne, ce genre d’actions n’a d’effet que s’il est accompagné d’un soutien des titulaires aux enseignant.e.s-chercheur.euse.s précaires sur le long terme (intégration dans des équipes de recherche, dans des comités de rédaction de revues scientifiques, etc.). Enfin, on ne peut que constater que les enseignant.e.s-chercheur.euse.s se sont très peu adressé.e.s au mouvement étudiant, répétant la configuration de 2007-2009, où les étudiant.e.s ont été les premièr.e.s à se mobiliser, suivi.e.s par les enseignant.e.s-chercheur.euse.s un an plus tard. Aujourd’hui, la mobilisation des enseignant.e.s-chercheur.euse.s a lieu elle aussi deux ans après celle des étudiant.e.s contre Parcoursup.

    Cet article n’a pas pour ambition de distribuer les bons et les mauvais points mais de proposer une analyse tendancielle qui puisse contribuer à formuler des propositions stratégiques pour le mouvement à l’université : celles-ci s’élaborent collectivement dans les multiples assemblées et réunions qui ont rythmé les dernières semaines. Pour nous, la motion issue de la coordination nationale des facs et des labos en lutte du 1er et du 2 février va dans le bon sens, puisqu’elle se positionne résolument contre la précarité qui affecte une grande partie des enseignant.e.s-chercheur.euse.s, tout en appelant à mettre à l’arrêt l’université le 5 mars. Pourtant, la question de la grève reconductible reste en suspens. Nous avons voulu simplement essayer d’expliciter quelques obstacles auxquels se heurte l’extension de la grève. Pour les arguments en faveur de sa nécessité, de son urgence même, nous nous permettons de renvoyer les lecteur.rice.s à quelques textes qui nous semblent utiles :

    1/ « Précaires de l’enseignement et de la recherche : on ne soutient pas la grève, on la fait ou on l’empêche » : https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/300120/precaires-de-l-enseignement-et-de-la-recherche-ne-soutient-pas-la-gr

    2/ Oskar Ambrepierre, « Grève à l’Université ? À propos des débats stratégiques dans le mouvement » : https://revolutionpermanente.fr/Greve-a-l-Universite-A-propos-des-debats-strategiques-dans-le-m

    3/ Lune Riboni, « Pourquoi être en grève dans l’#enseignement_supérieur et la recherche » : http://lmsi.net/Pourquoi-etre-en-greve-dans-l-ESR-Enseignement-superieur-et-recherche

    4/ Kevin Vacher, « Dis-moi, c’est quoi une grève (dans la recherche et à l’université) ? » : https://blogs.mediapart.fr/kevin-vacher/blog/040518/dis-moi-c-est-quoi-une-greve-dans-la-recherche-et-l-universite

    https://www.contretemps.eu/greve-universite-precaires
    #travail #ESR

  • Coronavirus : « Soit le plan est réaliste et s’applique dans l’ordre, soit il ne l’est pas et s’appliquera dans le désordre »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/04/27/covid-19-soit-le-plan-est-realiste-et-s-applique-dans-l-ordre-soit-il-ne-l-e

    Un collectif d’universitaires et de médecins, dont Bernard Kouchner, réunis par l’Institut Santé présente dans une tribune au « Monde » les conditions nécessaires à un plan de sortie de crise qui permette de réussir le déconfinement, à compter du 11 mai.

    Tribune. L’allocution du président de la République du 13 avril a esquissé un plan de sortie de crise en précisant la date du 11 mai de fin du confinement général. L’Institut Santé, à l’aide de son large réseau d’expertise transdisciplinaire, a publié, le 9 avril, un plan détaillé de sortie de crise Covid-19 comprenant 7 recommandations stratégiques. Si les deux plans reposent sur des hypothèses de travail très proches, dont l’inscription du plan sur un temps long jusqu’à la sortie d’un vaccin (2021), des divergences existent et nous amènent à distinguer les mesures qui devraient faire l’objet d’un débat et celles qui sont peu discutables.

    La première mesure inévitable est la disponibilité de l’arsenal de protection sanitaire indispensable pour permettre une sortie du confinement général contrôlée. Tests sérologiques, tests PCR, masques de types différents, kits de protection complets, gel hydroalcoolique… C’est une course contre la montre pour disposer du matériel en quantité et qualité adéquates par rapport aux besoins identifiés. Le déconfinement se prépare bien dès maintenant.

    La deuxième mesure inévitable est la prise en compte des statuts immunitaires des personnes vis-à-vis du Covid-19. Il existe trois groupes : les immunisés (après test sérologique positif, groupe A), les porteurs du virus (après test PCR positif, groupe B), les non-immunisés et les non-porteurs (groupe C). Même si des questions demeurent, les membres du groupe A peuvent être déconfinés dès un test sérologique fiable réalisé et participer à toute activité économique et sociale tout en respectant les règles de protection. Le groupe B doit être strictement confiné pendant au moins 14 jours, à l’écart de toute personne du groupe C, dans des lieux à prévoir. Tous les contacts récents de ce groupe B sont à tester en PCR.

    Un contrôle sanitaire aux frontières

    Le déconfinement s’applique à l’ensemble de la population, sauf au groupe B. Parce que nous sommes sur un temps long avant le retour à une vie normale, chaque citoyen doit maîtriser la distanciation sociale et les gestes barrières. Toute personne à risque (âgée et/ou avec des comorbidités) doit redoubler de vigilance et être encadrée de conseils et services dédiés si nécessaire.
    La continuité du confinement pour une partie de la population est de toute façon inapplicable car incontrôlable en démocratie en général et en République française en particulier. Soit le plan est réaliste et s’applique dans l’ordre, soit il ne l’est pas et s’appliquera dans le désordre.

    Un contrôle sanitaire strict aux frontières du territoire français doit s’appliquer à toute personne avec prise de température systématique et informations sur le parcours de chacun pour être facilement identifiable si la personne devient un cas contact. Tout cas suspect est à contrôler par test PCR sur place pour vérifier la présence du virus et à confiner strictement en cas de résultat positif, dans des lieux à prévoir.

    Des recommandations pour une grande loi santé en 2021

    Une information massive aux frontières, aéroports et gares sur les règles de protection et de comportement à respecter dans plusieurs langues est à préparer. Le déconfinement, c’est vraiment maintenant ! Un comité national de refondation de notre système de santé (incluant le médico-social et la dépendance) est à instaurer pour concevoir les recommandations stratégiques et opérationnelles qui serviront de base pour une grande loi santé en 2021.

    La sortie de crise par le haut passe par notre capacité à tirer les leçons de cette crise sanitaire, à nous inspirer des expériences internationales qui ont fonctionné et à profiter de la concorde nationale (transitoire) pour agir. C’est en mai 1943 que le Conseil national de la Résistance a été créé pour transformer la société française en octobre 1945, avec notamment la création de la Sécurité sociale. Demain se prépare maintenant.

    Les modalités à mettre en place pour garantir le respect du confinement individualisé strict des personnes testées PCR Covid + (groupe B) et l’identification de tous les cas contacts sont à débattre tant c’est le point névralgique du plan de sortie qui touche aux libertés fondamentales. Le non-contrôle de ces personnes a forcé la France, et d’autres pays, à entrer en confinement général et cela aura les mêmes conséquences si la situation se poursuit (c’est étonnamment toujours le cas aujourd’hui).

    Un usage du traçage numérique limité dans le temps

    En revanche, le contrôle strict de ces personnes a permis à plusieurs pays de ne jamais confiner collectivement leur population. L’Institut Santé recommande, sur la base du consentement éclairé de personnes, l’usage du traçage numérique (strictement limité dans le temps), des applications mobiles et l’attribution d’attestation nominative du statut immunitaire le temps du plan.

    La reprise des activités économiques et sociales nécessitant la réception du public et une interaction sociale intensive (restaurants, rassemblements sportifs, culturels…) est un point sensible. Un cahier des charges des conditions de fonctionnement pourrait être défini pour garantir la capacité de ces activités à faire respecter les règles de protection des personnes (masques, distanciations, gels…).
    Une autorisation spéciale pourrait être délivrée par une force sanitaire départementale dédiée. La faisabilité de telles modalités est à débattre secteur par secteur. Pour les transports publics, leur remise en marche est indispensable mais, là aussi, la garantie du respect d’un cahier des charges est nécessaire et à préparer dès maintenant.

    Un besoin d’information et d’approbation individuelle

    Le cas de l’école est un des plus complexes. Même si la reprise normale des cours semble difficile avant septembre, se pose la question des critères de choix de ceux qui peuvent y retourner dès le déconfinement, sans risque pour les enseignants car le faible nombre d’élèves peut se gérer dans les règles de sécurité. Les élèves les plus en difficulté pendant l’enseignement à distance, les enfants de parents sans possibilité de garde et sans options de télétravail, les familles monoparentales pourraient être considérés comme prioritaires.

    La liste des points peu discutables révèle déjà l’intensité et l’urgence de mobiliser certaines ressources dès maintenant pour déconfiner début mai. Les points qui font débat montrent les enjeux démocratiques que le plan final de sortie de crise engendre. Pour débattre, il faut un plan stratégique gouvernemental écrit dès maintenant pour débattre et décider des points discutables.

    Enfin, le succès de tout plan de sortie reposera sur l’information et l’appropriation individuelle par chaque citoyen de ce plan. C’est une véritable démocratie sanitaire qui est à créer en quelques semaines, ce que nous avons omis de faire ces vingt dernières années.

    Les signataires de cette tribune sont : Jean-Marc Ayoubi, chef de service de gynécologie obstétrique hôpital Foch, professeur à la faculté de médecine de l’UVSQ ; Evelyne Bersier, docteure en droit de la santé ; Frédéric Bizard, professeur d’économie affilié ESCP, président de l’Institut Santé ; Pierre-Henri Bréchat, médecin spécialiste en santé publique ; Florence de Rohan-Chabot, psychiatre, praticienne hospitalière ; Alain Coulomb, ancien directeur de la Haute Autorité de santé ; Christelle Galvez, directrice des soins, Centre Léon-Bérard, Lyon ; Alain Deloche, professeur de chirurgie, cofondateur de Médecins du monde, fondateur de l’association La Chaîne de l’espoir ; René Frydman, gynécologue obstétricien, professeur des universités ; Richard Hasselmann, président de Libr’Acteurs ; Bernard Kouchner, fondateur de Médecins du monde et de Médecins sans frontières, ancien ministre de la santé ; Patrizia Paterlini-Bréchot, professeure de biologie cellulaire et d’oncologie à l’Institut Necker ; Olivier Saint-Lary, médecin généraliste, président des universités ; Philippe Sansonetti, professeur au Collège de France, microbiologiste.

    #universitaires #médecins #biopouvoir #crise_sanitaire #déconfinement attestation_de_statut_immunitaire ou #certificat_d'immunité

  • En Turquie, les #universitaires subissent une répression d’ampleur inégalée

    Plus de 6 000 enseignants et chercheurs ont perdu leur poste à l’université ces dernières années, accusés, sans aucune explication, de « liens » ou « d’appartenance à un groupe terroriste ».

    #Tuna_Altinel, professeur de mathématiques à l’université Lyon 1, a été acquitté vendredi 24 janvier par le tribunal de Balikesir, une ville de la région de Marmara, en Turquie. Cet acquittement a eu lieu au terme d’un procès qui l’avait privé de ses élèves – il avait interdiction de quitter la Turquie – mais aussi de sa liberté, puisque le mathématicien a passé près de trois mois dans une prison turque, accusé de « propagande terroriste ».


    Même s’il a été acquitté, la décision ne doit pas faire oublier qu’au pays du président Recep Tayyip Erdogan, les universitaires subissent une répression d’ampleur inégalée.
    6 081 enseignants limogés

    En Turquie, 6 081 enseignants et chercheurs ont perdu leur poste à l’université ces dernières années. Ils ont tous été limogés, virés par décret dans les deux ans qui ont suivi le coup d’État manqué du 15 juillet 2016. Accusés, sans aucune explication, de « liens » ou « d’appartenance à un groupe terroriste ». Une partie d’entre eux (407, précisément) le savent : ils ont été punis pour avoir signé, en janvier 2016, une #pétition réclamant l’arrêt des violences dans le sud-est de la Turquie à majorité kurde. La plupart – et c’était le cas du mathématicien Tuna Altinel, qui affrontait en fait deux procès – ont été jugés pour « #propagande_terroriste » à cause de cette signature.

    Sauf qu’il y a six mois, le 26 juillet 2019, la #Cour_constitutionnelle turque a donné raison à ces « #universitaires_pour_la_paix », ainsi qu’ils se désignent eux-mêmes. Et pourtant, ils restent bannis de l’#enseignement_supérieur... alors qu’ils ont finalement été acquittés ! Or, être limogé, en Turquie, cela veut dire perdre son salaire, ses droits à la sécurité sociale et à la retraite, et toute possibilité d’enseigner à nouveau dans le public ou le privé. Ils n’ont plus qu’un seul recours : une commission d’état d’urgence, qui traîne à se prononcer pour finalement, souvent, rejeter les requêtes.

    Un « sentiment d’insécurité »

    Ces situations sont très difficiles pour ces enseignants, professionnellement et personnellement. C’est ce que raconte Hülya Dinçer. Cette francophone a été limogée en février 2017, alors qu’elle venait juste de terminer son doctorat en droit à l’université publique Marmara. Depuis quelques jours, la jeune femme travaille à nouveau au sein d’un Institut de recherche européen à Istanbul. Mais elle ne s’en cache pas : les trois dernières années ont été éprouvantes.

    C’est très difficile de se concentrer et de rester motivé pour la recherche dans une situation où vous êtes complètement privé de statut de chercheur, où vous n’avez aucune légitimité institutionnelle… Ce sentiment d’#insécurité quant à l’avenir me rend émotionnellement très fragile.

    Cette répression qui frappe les universitaires turcs provoque-t-elle ce qu’on pourrait appeler une « fuite des cerveaux » vers des pays plus accueillants ? Non, parce qu’être limogé, en Turquie, cela signifie aussi que votre #passeport est annulé. Vous ne pouvez pas quitter le pays, sauf à bénéficier d’une autre nationalité. C’est le cas de #Hülya_Dinçer. Grâce à sa double nationalité turco-bulgare, elle a pu se rendre à Paris dans le cadre d’une bourse post-doctorale accordée par le #programme_Pause, programme de soutien aux universitaires en danger instauré par le #Collège_de_France. Elle y est restée un an et huit mois.

    Cette liberté retrouvée n’a pas pour autant été une parenthèse enchantée : « Quand vous partez, certes vous pouvez travailler et vous avez la tranquillité d’esprit et les moyens de faire votre recherche, mais vous êtes beaucoup plus isolé ». Selon elle, « il y a une #solidarité en Turquie entre les universitaires, un soutien régulier qui vous permet de survivre, de garder espoir. Ça m’a beaucoup manqué et c’est une des raisons pour lesquelles j’ai toujours voulu rentrer. »

    Depuis quelques mois, certains universitaires limogés peuvent déposer une requête auprès du ministère de l’Intérieur pour tenter de récupérer leur passeport. Une requête à l’issue très incertaine. Mais c’est la seule avancée concrète en trois ans et demi pour ces milliers d’enseignants turcs.

    https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/en-direct-du-monde/en-turquie-les-universitaires-subissent-une-repression-dampleur-inegale

    #université #Turquie #répression #terrorisme

  • Une question qui fâche ? Pourquoi les #universitaires qui disposent des outils intellectuels et de la protection statutaire pour résister, acceptent-ils de se soumettre au processus de #gestionnarisation de l’#Université ?

    http://sms.hypotheses.org/8471

    Yves Dupont, socioanthropologue spécialiste du monde rural, a publié un essai qui mérite à nos yeux d’être présenté sous forme de tribune. Son questionnement essentiel est le suivant : comment se fait-il que les universitaires, disposant pourtant des outils intellectuels et de la protection statutaire pour résister aux sirènes néolibérales, acceptent presque silencieusement de se soumettre au processus de gestionnarisation de l’Université française, c’est-à-dire à une logique basée sur la productivité et la rentabilité contrôlées par des procédures normées et des indicateurs chiffrés de performance.

    Autrement dit, comment se fait-il que les chercheurs consacrent de moins en moins de temps à des questions proprement scientifiques et de plus en plus à la rédaction de « projets » dont beaucoup n’aboutissent jamais ? Comment se fait-il que les assemblées générales de laboratoire s’éternisent souvent en brainstormings d’agence de communication à la recherche de la meilleure rhétorique pour s’inscrire dans des réseaux, des structures, des axes, des appels ? Comment se fait-il que ceux qui hier étaient voués à critiquer, au sens noble, les innovations rutilantes de la modernité se présentent comme de simples accompagnateurs du changement social ? (...)

  • More academics and students have mental health problems than ever before

    In the past few years, a lot of attention has been devoted to mental health on university campuses. Primarily explored from the perspective of students, poor mental health has been reported widely all around the world – it seems university students are not mentally well.

    Studies show a large proportion of students experience high levels of depressive symptoms. In the UK, the All Party Parliamentary Group on Students – a forum established for MPs and their peers to discuss issues that affect students in higher education – found 33% of students had experienced suicidal thoughts in the past academic year.

    Poor mental health at university is a big problem, not only because it affects how students learn, but because it also impacts whether they actually finish their degrees. Ultimately, symptoms of poor mental health affect the career potential and overall lives of students greatly.

    Most research has pointed to challenges caused by the transition from high school to university life, coursework deadlines, exams and financial difficulties.
    Helping students

    Recent research in the UK has shown that university students have a limited understanding of mental health issues and are hesitant to seek support. Administrators have noted the high prevalence of poor mental health and low levels of mental health literacy of students.

    Across the UK, universities have taken different approaches to raising awareness of mental health disorders and addressing stigma associated with poor mental health.

    Posters, websites and apps have sprung up in an effort to get students to seek care, and to encourage them to visit campus well-being clinics.
    What about academics?

    But it seems the poor mental health of academics has received comparatively little attention. This is concerning because research has shown that many academic staff are stressed and at risk of burnout. Like students, academics are not mentally well.

    One recent survey found that 43% of academic staff exhibited symptoms of at least a mild mental disorder. This is nearly twice the prevalence of mental disorders compared with the general population. Primarily to blame are the increased workloads of academics and demands to publish and obtain external revenue.

    High levels of poor mental health have a profound impact on the professional competence and productivity of academics, affecting administrative, teaching and research quality – as well as impairing communication and work relationships among staff. Of course, poor mental health also affects the personal lives of these individuals.
    Silent stigma

    But academic staff have far fewer options for well-being support than students. Most universities will offer their staff the chance to see an occupational health nurse or contact an employee assistance program by telephone – but information about both services is limited and often difficult to find. And both options direct staff to services outside the university campus.

    With limited, hard to find services and the stigma that surrounds poor mental health, it is unsurprising that only 6.7% of UK academic staff have ever disclosed a mental health condition. In a sense then, a culture of “silence of mental health issues within university environments” exists.

    It is clear that more must be done to help address the poor mental health of academics. Meaningful structural changes are needed to address the underlying factors associated with poor mental health, like job security, workload and pay. Though these changes will not be easy or come quickly. Unfortunately, in the current political climate, and with the high costs of education, governments are under pressure to satisfy students and their parents with rubrics of excellence – putting further stress on academics.
    Changing attitudes

    Improving mental health literacy among academics – including symptom identification, self-care practices (such as engaging in physical activity), and knowing where to seek support – is one potential strategy. Like the work being done with students, academics need information about mental health and help to change their attitudes towards seeking care.

    One study found that academics who were more physically active and meeting the recommended guidelines of 150 minutes of moderate or vigorous intensity activity every week, were more likely to report higher levels of well-being and lower levels of distress.

    But telling academics about physical activity is not enough and changes to the university environment are needed to support behaviour change.

    The creation of physical activity options for staff, including social walking groups, free exercise facilities, and heavily subsidised cycle to work schemes, may help. Using physical activity to connect people around mental health, similar to England Athletics’ Mental Health Ambassador Programme, may further provide support. And increased physical activity isn’t something that would only help academics, everyone on campus could benefit.

    Poor mental health among academics has serious consequences in terms of the future of universities. And if nothing is done to promote good mental health, we will continue to lose academics because of burnout. This could lead to a decrease in the standards of teaching and research – at a time when the UK arguably needs them most.

    https://theconversation.com/more-academics-and-students-have-mental-health-problems-than-ever-b
    #université #étudiants #santé_mentale #santé #travail #universitaires

    v. aussi:
    https://seenthis.net/messages/601011

    • How academics can improve their quality of life

      At a time when stress and mental health issues are endemic within universities, Erin K. Wilson considers the small steps she is determined to take in order to be part of the solution.

      Two years ago, I acknowledged that my academic work was seriously affecting my health. Indeed, I had to. I had no choice.

      In 2012, I relocated from Australia to the Netherlands to take up a position as the founding director of a research centre. This role involved transitioning from politics and international relations to a Faculty of Theology and Religious Studies. I worked intensely for five years, researching, presenting at conferences and teaching; designing new educational and research programmes; organising seminars and workshops; taking on policy work with supra-national European institutions and foreign ministries. I spent my evenings, weekends and holidays writing grant applications, book chapters, journal articles; preparing course guides; editing books and journal issues. In 2017, I moved directly from this role to head of department. This, in hindsight, was a mistake.

      The signs were there well before I eventually admitted it. For six months, I had not been sleeping. For over 12 months, I would wake in the middle of the night sweating, my heart pounding, hands shaking, teeth grinding, for no apparent reason. I became irritable, snapping at friends, colleagues and loved ones. I knew I was overreacting to inconsequential things yet was unable to stop myself. I couldn’t find joy or fulfilment in anything. Colleagues and friends were deeply worried about me but felt powerless to do anything.

      In the end, the acknowledgement that I was not OK came in the middle of an impromptu, informal conversation with my dean. He came to speak to me about arranging additional administrative assistance for all heads of department. In order to organise it, he asked me for a list of tasks that the assistant would undertake. That short list, which would not have taken more than 10 minutes to put together, and would have resulted in additional support, was the proverbial last straw.

      “It’s just one more thing I have to do,” I said, as I began to cry, uncontrollably, overwhelmed by the seemingly insurmountable expectations and demands of academic life.

      I am privileged to be in a supportive workplace, and immediately received the assistance I needed to rest and recover from years of working myself into the ground. Many others are nowhere near so fortunate.

      My story is in no way unique. I’ve encountered this never-ending work pressure in both Australia and the Netherlands. Colleagues in the US, the UK and elsewhere also recognise it. This culture is taking a severe toll on people’s physical and mental health, from students to established senior scholars. It is discouraging many of the brightest and most talented thinkers and researchers from pursuing academic careers.

      That academia requires total commitment is in essence taken for granted. Examples from many different disciplines highlight the same stresses as contributors to this relentless work culture:

      · Constant pressure to publish

      · Increasing instability and insecurity of academic positions. I spent the first seven years of my academic career on temporary contracts, after a protracted and traumatic PhD experience. Many colleagues have spent far longer in unstable employment

      · The demand that we be academic superheroes, able to do everything from teaching to marketing, despite little if any training in anything except research

      · The pressure put on families and relationships by one partner having to live in another city, country or continent in order to have meaningful and relatively stable work (frequently with consequences that more detrimentally affect women)

      · The constant grant application cycle, with deadlines at the end of vacation periods, meaning researchers use their holidays to write proposals, instead of taking an actual break.

      These pressures are familiar to most academics, yet there is no doubt that they are systemic and there seems little prospect of relief any time soon.

      In the Netherlands, following advice from the Commissie van Rijn, funding will be redirected to technical universities from general research universities, reducing staff capacity and undermining the quality of education. This funding reallocation takes place alongside planned 2020 budget cuts to the Dutch education sector of nearly €150 million (£130 million). At a cross-continental level, the new European Commission does not have a commissioner for research and education. These areas have been subsumed under the broader portfolio of “innovation and youth”. In the draft EU 2020 budget, more than €400 million have been cut from Horizon 2020, with the European Research Council alone losing almost €200 million from its annual budget. Meanwhile, back in my native Australia, the government announced that it would be cutting almost A$350 million (£188 million) over the next three years from university research funding.

      In this ever-widening climate of financial scarcity and job insecurity, it’s no wonder that early and mid-career researchers are working themselves to the bone just to have a fighting chance of staying in the game. Many scholars are giving up and walking away entirely – and that should worry us. Impoverishing research and education damages our societies and weakens our democracies.

      Huge structural shifts are certainly required to address these broader constraints. At the same time, I wonder whether we are also somewhat complicit in these pressures. Academia is shrouded in prestige and mystique, more like a vocation than a career. Yet endowing it with an almost sacred quality contributes to sustaining unhealthy working cultures: if you aren’t prepared to devote your evenings, weekends and holidays to writing and research, then maybe you should reconsider whether you are cut out to be an academic. It is these cultural dynamics internal to academia that we have some power to change.

      I have spent a lot of time thinking about how to navigate these pressures as I transition back into full-time work. It’s an issue that’s recently become more urgent, since I accepted the position of faculty vice-dean and director of teaching. One of my main priorities is to avoid reproducing the cultures and behaviours that made me ill in the first place. It’s not easy. These behaviours and cultures are deeply entrenched. Financial pressures on universities can make it impossible to implement change.

      Sometimes, though, it is not about what is possible. It is about who we are, who we want to be, what we want our universities to be, holding fast to what we value, even (especially) when those values are under threat or entirely absent. I want to go home at the end of each day knowing that, regardless of the outcome, I have done what I can to create an environment where people feel secure, protected and valued. In my view, this can only enhance the quality of our research and our education.

      I don’t pretend to have the answers for how to do this without broader systemic reforms as well. Nonetheless, I do have some steps that I am trying in places and spaces where I do have some control and influence:

      1. Resist the 24/7 work culture. I try as far as possible not to work evenings or weekends. If for some reason I have to, I take time off during the week to compensate. I encourage my colleagues and students to do the same. Rest and relaxation are as important for good scholarship as time spent actually working.

      2. Promote and value diversity. I would like to see diversity sensitivity and implicit bias training introduced throughout my university, and indeed the sector as a whole. Yet even now, when hiring or promoting people, for example, we can make sure we consider the whole picture. What is their life outside work like? What caring responsibilities do they have? What circumstances, including discriminatory structures and practices, may have affected their ability to write, apply for grants, hold demanding leadership roles?

      3. Advocate for greater security and stability in employment contracts. A colleague of mine, who has been on short-term contracts for many years, was recently offered a permanent job. When the faculty concerned offered it to her, they honestly admitted that they had funding secured for only the first two and a half years, but they felt that offering her a permanent role was “the ethical thing to do”, and they would figure out how to make up the shortfall. They chose to do what was right for the person, not for the budget.

      4. Allow people to choose their own priorities in research, teaching and social engagement. As far as possible, don’t insist that people teach subjects they know nothing about or apply for grants before they’re ready. There are, of course, times when we all have to do things we don’t want to do. Yet such efforts and sacrifices should be acknowledged, honoured and compensated in some way, not just expected and taken for granted.

      5. Promote transparency and open communication.Decision-making in higher education can be opaque and exclusionary. While this is intended to shield staff from worries about broader political and economic trends, it can leave them feeling disempowered. Involving all staff in discussions about present and future challenges can generate energy, community and solidarity to work together to address them.

      6. Get involved with political actions to support academia and other social and political causes. Academia can feel like a solitary environment. Joining action groups, or even just wearing symbols of solidarity at work, can remind us that we are part of a global community of scholars committed to resisting unrealistic work pressure while upholding quality education and research. One such symbol is the red felt square, which first appeared as part of student demonstrations against tuition fee increases in Montreal and has since become a central component of protests against funding cuts, workforce casualisation, mounting workloads and commercialisation in Dutch academia.

      7. Build relationships and support networks with colleagues. I am lucky to have a wonderful group of supportive colleagues. We discuss ideas about research and teaching, share life struggles, talk about issues that really matter to us.

      8. Ask for help. I use these support networks when I am struggling, and support others when they are. We need to remove the taboos that prevent people from acknowledging that they are not OK, ask each other how we’re doing and get help when we need it.

      9. Take time to look after ourselves and our families. I try to exercise every day, have a healthy diet and get enough sleep. I try to spend regular quality time with my husband. I started singing lessons. We need to make time for the people and things we love and that give us joy.

      These are small measures and not always easy to carry out. Yet they can make a real difference in themselves and lay the groundwork for the systemic changes we would like to see. It is, after all, in the small places and spaces that our work and our lives happen. That is where we have power for change and where, I believe, the most necessary and most revolutionary change can occur.

      https://www.timeshighereducation.com/features/how-academics-can-improve-their-quality-life

    • @freakonometrics a twitter ce dernier article :


      https://twitter.com/freakonometrics/status/1199646026879176704

      J’ai réagi ainsi :

      Merci d’avoir ht ce texte. Je ne l’ai pas commenté sur seenthis, mais je trouve le titre problématique : ça met l’accent sur les actions individuelles des chercheur·es pour améliorer leur qualité de la vie au lieu de pointer du doigt les responsabilités institutionnelles.
      La première cause de la dégradation de la qualité de vie des chercheur·es = diminution des ressources et la gestion néo-libérale des #universités.

      Et j’ai reçu, d’une collègue aux Pays-Bas, une réponse qui ressemble fortement à ce que j’ai écrit... Non pas en réaction à l’article ci-dessus, mais en réaction à la mise en place, à l’Université d’Amsterdam, d’une « semaine anti-stress ». Le texte est simplement parfait, je me permets donc de le reproduire ici, sans mentionner l’auteur à qui je n’ai pas demandé si je pouvais le diffuser :

      "The week of 11th of November is the week of work stress. It is the week where the university brings out its petting puppies, makes you bikeblend your smoothie, and has you beat a few djembe tunes to let go of your stress. Some might argue that it is a nice gesture of the employer, but we of the FNV in the OR find it a slap in the face of the employee. It adds insult to injury.

      This waste of money again shows that the faculty is not taking work pressure seriously. We said it last year, and we said it again this year: “stop monkeying around and actually deal with the causes of work pressure”. Work pressure is not that difficult. There are either too many tasks for the number of people, or there are not enough people for the number of tasks. So the answers are also simple. If an organization is financially healthy, you hire more people. If the organization is financially unhealthy, you are stuck with reducing the tasks. There is no rocket science involved.

      Yet as you can see in this week of work stress, the faculty seems keen to responsiblize the individual for the work pressure he or she is experiencing. This leads to offers such as time management (we just received an email that there are two spots still available), yoga, and mindfulness. But these are just bandaids ("lapjes voor het bloeden" as the Dutch expression goes) that obscure the structural faults of the system. There are too many administration processes. There is too much institutional distrust that you are not doing your work correctly leading to for instance to ’jaargesprekken’ being moments where you defend yourself instead of discussing how you would like to grow as an professional. There are criteria for promotion that seem to change during the process. We have to accept budget cuts in our teaching programme while at the same time the faculty wants to start new programmes that make new claims on budget and staff.

      Recently, our support staff at EOSS was confronted with a report that was framed as research about the high work pressure they are experiencing. Yet it actually placed all the blame at the staff of EOSS and suggested their so-called inefficient work and non-conformance to instructions from management was the cause of their work pressure. Another signal that work pressure is not taking seriously by management and the individual employee is again responsibilized for his or her work’ stress’.The Works Council will keep pushing the Faculty and the UvA to make meaningful structural changes that address work pressure instead of blaming the victim. Namaste"

      #stress #anti-stress #stress-management #yoga

    • ça me met mal à l’aise ce genre de semaine... oui, ça reconnaît un problème, mais ça reste du maquillage ! c’est comme l’université qui dit d’un côté qu’il faut avoir une pensée écologique, mais que de l’autre imprime des stocks énormes de brochures sur papier glacé pour les portes ouvertes, ou qui te refuse des subventions si tu ne fais pas venir des stars à un colloque qui viennent du bout du monde pour 2 jours ! « The Works Council will keep pushing the Faculty and the UvA to make meaningful structural changes that address work pressure instead of blaming the victim » oui, entièrement d’accord... et après ?

  • US academics feel the invisible hand of politicians and big #agriculture | Environment | The Guardian
    https://www.theguardian.com/environment/2019/jan/31/us-academics-feel-the-invisible-hand-of-politicians-and-big-agriculture

    [...] over the past 30 years, as public funding for university research has dried up, private industry money has poured in. And with industry money comes industry priorities. #agribusiness has funded research that has advanced its interests and suppressed research that undermines its ability to chase unfettered growth. The levers of power at play can seem anecdotal – a late-night phone call here, a missed professional opportunity there. But interviews with researchers across the US revealed stories of industry pressure on individuals, university deans and state legislatures to follow an #agenda that prioritises business over human health and the environment.

    Take Iowa, a state that is, in both identity and capacity, American farm country. According to data released by the US Department of Agriculture (USDA) in October 2018, the state produces more commodity corn and hogs – and in many years, soybeans – than any other US state. In Iowa, pigs outnumber people by nearly eight to one.

    For decades, deep relationships have existed between the agriculture industry and the state’s politicians – and increasingly those alliances are catching the state’s universities in their crosshairs. In 1980, when the federal government passed the Bayh-Dole Act, encouraging universities to partner with the private sector on agricultural research, leaders at academic institutions were incentivised to seek money from agribusiness. Two of the state’s universities in particular seem to have felt the reach of this policy: Iowa State, which is a land-grant institution, and the University of Iowa, which doesn’t have an agriculture school but feels the pressure of agribusiness #influence. Researchers at both institutions told us they had felt the direct impact of agribusiness dollars on their work.

    #etats-unis #recherche #universités #universitaires#partenariat#corruption #décideurs #conflit_d'intérêt

  • « #Gilets_jaunes » : une #enquête pionnière sur la « révolte des revenus modestes »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/11/gilets-jaunes-une-enquete-pionniere-sur-la-revolte-des-revenus-modestes_5395

    Une équipe de 70 #universitaires mobilisée
    Collectif d’universitaires, nous avons lancé, dès la fin du mois de novembre, une enquête de terrain pour comprendre le mouvement des « gilets jaunes ». Nous sommes allés les rencontrer dans différentes régions de France, dans les manifestations et sur les ronds-points. Nous livrons ici les premiers résultats sur les profils et les motivations qui apparaissent derrière les « gilets jaunes ».

    Le 21 octobre, Priscillia Ludosky crée une pétition en ligne « Pour une baisse des prix du carburant à la pompe ! ». Rapidement et massivement diffusée sur les réseaux sociaux, relayée par les médias, la pétition atteint 200 000 signataires en quelques jours, et plus de 1 million aujourd’hui.

    Une journée d’action est prévue le 17 novembre, avec pour mots d’ordre la baisse des taxes et du prix des carburants. Cette mobilisation est préparée de manière décentralisée et autonome par des groupes locaux et nationaux, qui s’organisent notamment sur la plate-forme Facebook. Le 17 novembre, ce sont plus de 280 000 personnes, vêtues d’un gilet jaune, qui participent à cette mobilisation dans la France entière, principalement à travers des actions de blocage des routes, au niveau des ronds-points ou péages. A Paris, une manifestation a lieu sur les Champs-Elysées et certains manifestants tentent de se rendre au palais de l’Elysée, avant d’être bloqués par la police. Dans les jours qui suivent cette journée de mobilisation, les blocages continuent et d’autres journées de manifestations sont lancées pour les samedis suivants.

    Au lendemain du 17 novembre, des chercheuses du Centre Emile-Durkheim (Bordeaux) lancent un appel à participation auprès de la communauté des chercheurs et chercheuses en science politique pour comprendre le mouvement. Le collectif compte aujourd’hui près de 70 personnes, qui sont des enseignants-chercheurs, des chercheurs au #CNRS et à l’#INRA, des docteurs sans poste, des étudiantes et étudiants. #Sociologues, #politistes et #géographes travaillent ensemble sur la base du volontariat.

    L’ampleur du mouvement et la rapidité avec laquelle il s’est constitué, en dehors des organisations syndicales et des partis, tout comme ses modes d’action et ses mots d’ordre interpellent. Qui sont les « gilets jaunes » ? Que souhaitent-ils ? Assiste-t-on à un renouvellement profond des modalités de la protestation et de la politique ? Faut-il y voir un retour de formes traditionnelles de révoltes populaires ? Comment un tel mouvement est-il susceptible d’évoluer dans le temps et comment comprendre sa portée ?

    166 #questionnaires analysés
    L’objectif de l’enquête « gilets jaunes » est de récolter des données pour saisir sociologiquement ce mouvement. Il s’agit de comprendre sa complexité, sa composition et son évolution, de recueillir les revendications de ses participants et participantes et de mesurer la variété de ses modalités d’organisation et de mobilisation. Des groupes de travail se sont mis en place à partir de différentes méthodes : observation sur le terrain, analyse lexicométrique des réseaux sociaux, questionnaires, entretiens, cartographie. Parallèlement à ce questionnaire, une équipe de géographes mène une enquête complémentaire en Normandie. Les données sont toujours en cours de décryptage. Les premiers résultats présentés ici sont basés spécifiquement sur l’analyse des questionnaires administrés dans les manifestations, sur les ronds-points et aux péages.

    • Nous partons du terrain pour établir nos résultats. La parole des personnes et leurs attentes sont au cœur de l’enquête, notre objectif a été de les récolter et de les restituer le plus fidèlement possible. Les données sont traitées selon des méthodologies croisées qui rendent compte du mouvement d’une manière plus approfondie et complexe qu’un seul point de vue ne permet de le faire.

      L’équipe « questionnaires » se compose de 13 personnes basées à Bordeaux et sa région, Marseille, Caen et sa région, Rennes, Montpellier, Grenoble et sa région. Pour cette enquête, nous avons décidé de nous concentrer sur les personnes actives dans le mouvement, ayant participé au moins à une manifestation ou un blocage, et avons pu analyser jusqu’ici 166 questionnaires diffusés les 24 novembre et 1er décembre. L’enquête est toujours en cours et se poursuivra dans les semaines qui viennent. Nous avons choisi de mener des entretiens en face à face, démarche qui permet de recueillir des témoignages plus riches, plus précis et plus longs que la passation de questionnaires indirecte ou en ligne. Le questionnaire compte en tout 28 questions, 5 d’entre elles sont ouvertes, et nous avons en outre pris soin de noter les commentaires sur l’ensemble des questions posées. Concernant les sujets abordés, 15 questions portent sur les motivations des participants, les réformes souhaitées, les modes d’action privilégiés et leur rapport au politique ; les 13 dernières portent sur le profil sociodémographique des personnes mobilisées.

      Les questionnaires ont été majoritairement administrés par les enquêteurs. Le temps requis à recueillir les réponses varie d’une dizaine de minutes à quarante minutes. L’administration de questionnaires en manifestation est un exercice délicat en raison de la mobilité et, dans ce contexte particulier, de l’incertitude sur le parcours du cortège et des dispositifs de maintien de l’ordre. Cette recherche est réalisée sans fonds spécifiques et n’a été rendue possible que par le travail de nombreuses et nombreux collègues, étudiantes et étudiants volontaires.

    • S’il n’y a pas de portrait type des manifestants, puisqu’une des caractéristiques du mouvement est sa diversité, les « gilets jaunes « sont d’abord des personnes, hommes et femmes, qui travaillent (ou, étant retraités, ont travaillé), âgées de 45 ans en moyenne, appartenant aux classes populaires ou à la « petite » classe moyenne.
      Les résultats, encore très provisoires, présentés ici s’appuient sur l’analyse de 166 questionnaires distribués auprès des participants aux actions sur les ronds-points et aux péages, ou lors des manifestations ayant eu lieu les 24 et 1er décembre, par une équipe d’une dizaine de chercheurs et d’étudiants. Le questionnaire a été élaboré de manière à recueillir des informations détaillées et précises sur les participants.

      • Une surreprésentation des employés et une sous-représentation des cadres
      Certaines catégories apparaissent comme particulièrement surreprésentées au sein des « gilets jaunes » qui nous ont répondu. C’est le cas des employés, qui constituent 33 % des participants (soit 45 % des actifs présents, contre 27 % de la population active française). Ils sont plus de deux fois plus nombreux que les ouvriers, qui représentent 14 % des participants. Les artisans, commerçants et chefs d’entreprise sont également particulièrement nombreux : 10,5 % des participants (14 % des actifs présents, contre 6,5 % de la population active française).
      A l’inverse, les professions intermédiaires et les cadres sont peu représentés : les premiers comptent pour 10 % des participants (13 % des actifs présents, contre 26 % de la population active française) ; les seconds sont à peine 5 % des participants (7 % des actifs présents, contre 18 % de la population active française) dans les cortèges et blocages qui ont eu lieu entre le 24 novembre et le 1er décembre. Un quart des participants au mouvement des « gilets jaunes « appartiennent à la catégorie « inactifs » ; pour la majeure partie, il s’agit de retraités.

    • • Des manifestants « d’âge moyen »
      Les « gilets jaunes » participant à l’enquête ont en moyenne 45 ans, un peu plus que l’âge moyen de la population française, qui s’élève à 41,4 ans. Les classes d’âge les plus mobilisées sont les 35-49 ans (27,2 %), puis les 50-64 ans (26,6 %) et les 25-34 ans. Les 18-24 ans représentent 6,2 % des participants ; les plus de 65 ans, 17,3 %.
      • Un mouvement mixte
      Les hommes (54 %) sont un peu plus nombreux que les femmes (45 %). Cependant, la forte proportion de femmes, appartenant souvent aux classes populaires, une catégorie sociale traditionnellement peu mobilisée politiquement, est un fait notable. On y lit une propension de femmes à manifester identique à celle que nous avons observée dans les cortèges des 24 novembre et 1er décembre. Un écart comparable (55 % d’hommes, 44 % de femmes parmi les répondants) était observé dans le questionnaire administré dans la Manif pour tous du 16 octobre 2016.
      Les femmes ont toujours manifesté, comme le montrent de nombreux travaux historiques. Elles sont en revanche ici plus visibles. A cela plusieurs raisons : sans porte-parole officiel, représentants syndicaux et politiques, qui sont habituellement des hommes, et en absence de structures, les médias sont contraints de tourner le regard vers les participantes et participants « ordinaires ». La forte dimension sociale du conflit et la centralité des revendications sur les conditions matérielles d’existence dans le mouvement social participent à la visibilité des femmes.
      • Une surreprésentation des bacheliers et des titulaires de CAP et BEP
      Quelque 20 % des personnes interrogées sont diplômées du supérieur (contre 27 % de la population générale, données Insee 2014) ; 5 % des participants ont un bac + 4 et au-delà, tandis que les deux niveaux de diplôme les plus représentés sont les détenteurs de BEP et CAP, qui sont 35 % (contre 24 % dans la population générale), et les bacheliers (29,3 % des répondants, contre 16,5 % de la population générale). Seuls 15,4 % des participants ont un diplôme inférieur au brevet (31,4 % de la population générale). Toutefois, le 8 décembre, nous avons reçu davantage de réponses de la part de personnes ayant un diplôme de master ou équivalent. Se dessine ainsi une population de participants ayant des niveaux de qualification intermédiaires.
      • Des mobilisés aux revenus modestes
      Quelque 55 % des répondants nous déclarent être imposables (une proportion presque identique à la population générale) et 85 % indiquent posséder une voiture. Le revenu médian du foyer déclaré représente 1 700 euros par mois, soit environ 30 % de moins que le revenu médian moyen déclaré de l’ensemble des ménages (enquête « Revenus fiscaux et sociaux » 2015 de l’Insee). Les participants aux actions des « gilets jaunes » sont donc pour la majorité d’entre eux des individus aux revenus modestes. Ils n’appartiennent pas aux catégories les plus précarisées économiquement : 10 % d’entre eux déclarent avoir un revenu inférieur à 800 euros par mois (contre 519 euros pour les 10 % des ménages français les plus pauvres).
      • Des primo-manifestants en nombre et des modes d’action variés
      Pour presque la moitié des répondants (47 %), le mouvement des « gilets jaunes » constitue leur première mobilisation. Seuls 44 % ont déjà participé à une grève. Il s’agit donc de participants peu rompus à l’action collective. Aux questions posées sur les formes d’action collective que la personne serait prête à accomplir ou à laquelle elle a déjà participé, la manifestation est le mode d’action le plus plébiscité (81 %), suivi par la pétition (69,4 % d’entre eux déclarent en avoir déjà signé une). Presque 9 participants sur 10 rejettent les modes d’action impliquant des violences aux biens, mais 58,8 % d’entre eux se déclarent par exemple prêts à occuper un bâtiment administratif. La moitié exclut également l’idée d’aller manifester à Paris, les répondants évoquant des raisons économiques, la violence et la nécessité de rester visible en province pour justifier ce choix. Sur le consentement à l’impôt, seuls 5 % des participants déclarent avoir déjà refusé de payer l’impôt, tandis que 58,4 % l’excluent complètement comme moyen d’action. Des analyses séparées ont d’ailleurs relevé très peu de différences entre les réponses des hommes et des femmes.
      • Un rejet des organisations représentatives traditionnelles et des orientations politiques atypiques
      Notre enquête confirme également le large rejet des organisations représentatives traditionnelles : 64 % considèrent que les syndicats n’ont pas leur place dans le mouvement, 81 % pensent de même pour tous les partis politiques.
      Ce rapport de distance ou de méfiance à l’égard du système de représentation institué se retrouve lorsque les répondants sont invités à se situer sur l’échelle gauche-droite. La réponse dominante consiste à se déclarer comme apolitique, ou « ni de droite ni de gauche » (33 %). En revanche, parmi ceux qui se positionnent, 15 % se situent à l’extrême gauche, contre 5,4 % à l’extrême droite ; 42,6 % se situent à gauche, 12,7 % à droite et, surtout, seulement 6 % au centre. En comparaison, un sondage conduit par Ipsos en avril montrait que 22 % des Français rejettent le clivage gauche-droite, quand 32 % se situent à gauche et 39 % à droite. Cette grande diversité du rapport au politique est un élément majeur de la singularité du mouvement.

    • • Les motivations : pour le pouvoir d’achat et contre une politique favorable aux riches
      Pour les répondants, il s’agit moins d’une révolte contre une taxe en particulier, ou pour la défense de l’usage de la voiture, qu’une révolte contre un système fiscal et de redistribution jugé inique. Une révolte contre les inégalités, mais aussi contre une parole politique qui les méprise et les infériorise symboliquement. Il s’agit à la fois de défendre leur pouvoir d’achat et leur accès à un standard de vie (notamment les loisirs, de plus en plus inaccessibles) et d’une exigence de respect à leur égard et de reconnaissance de leur dignité de la part du personnel politique (gouvernement et président de la République).

      Nous avons invité les participants à s’exprimer sur leurs motivations à travers une question ouverte en début du questionnaire (« Pourquoi manifestez-vous aujourd’hui ? »). Un pouvoir d’achat trop faible est le premier motif évoqué (plus de la moitié des répondants). Plusieurs personnes se plaignent de ne plus pouvoir s’offrir le moindre plaisir (« J’ai la vingtaine et j’ai pas une thune. Si je veux sortir, je dois me mettre à découvert »). Des mères de famille nous font part de leurs fins de mois difficiles (« J’aimerais bien que mes enfants puissent avoir à manger dans leurs assiettes, et pas que des patates les deux dernières semaines du mois »), qui entraînent parfois des difficultés de logement, dont ont témoigné aussi bien des jeunes étudiants (« Je n’ai pas les moyens de me loger, je vis dans la dépendance d’une amie ») que cette mère de famille (« Nous étions obligés de descendre dans le Sud pour vivre chez ma belle-mère »).
      Suit, dans la liste des motivations, le fardeau fiscal trop important (69 répondants, dont 18 qui pointent explicitement le prix élevé du carburant). Près d’un sur cinq déclare être là pour protester contre le gouvernement actuel et demande la démission d’Emmanuel Macron, évoquant l’« arrogance » de l’exécutif. Les termes de « monarchie », d’« oligarchie » ou de « dictature » reviennent pour souligner son caractère illégitime. On voit poindre le 24 novembre, puis se confirmer le 1er décembre, la demande de réformes institutionnelles. Un dixième des enquêtés demandent des réformes institutionnelles. Cette tendance semble accentuée chez les participantes et participants aux cortèges du 8 décembre.
      Une deuxième question ouverte portait sur les mesures que le gouvernement devrait prendre pour répondre aux revendications des « gilets jaunes ». La réponse la plus fréquente est sans surprise une baisse des taxes et impôts, évoquée spontanément par un tiers des répondants. Pour 48 enquêtés, des mesures pour augmenter le pouvoir d’achat sont également nécessaires. Parmi eux, 28 personnes demandent une augmentation du smic, voire des salaires en général, 14 une augmentation générale du pouvoir d’achat, 8 une augmentation des retraites. Des demandes de reditsribution des richesses reviennent dans les réponses de 36 participants : 19 demandent spontanément la réintroduction de l’ISF, 5 une répartition plus juste des impôts.

      « Une des spécificités de ce mouvement est la présence de revendications institutionnelles, en plus des revendications sociales »

      Plus d’un cinquième des répondants demandent d’ailleurs tout simplement que le gouvernement écoute les citoyens, « qu’il se mette à [leur] place ». Il s’agit ainsi d’une des préoccupations principales des personnes rencontrées. Enfin, une des spécificités de ce mouvement est la présence de revendications institutionnelles, en plus des revendications sociales. Ainsi, 26 personnes ont déclaré que des réformes institutionnelles importantes seront nécessaires pour qu’elles puissent considérer que le mouvement est un succès : 18 en demandant des changements parfois fondamentaux (par exemple, en réclamant une « réforme totale de l’Etat », « un autre système politique »), 8 en demandant la fin des privilèges des parlementaires et 4 en se disant convaincus de la nécessité d’une VIe République.
      Il est à noter que seulement 2 des 166 personnes interrogées ont mentionné la gestion de l’immigration dans leurs réponses aux deux questions présentées. Cela invite à reconsidérer les analyses qui font du mouvement une émanation de l’extrême droite.

      « Les deux principales motivations des personnes mobilisées apparaissent comme étant une plus grande justice sociale et la demande d’écoute de la part du pouvoir »

      Les deux principales motivations des personnes mobilisées apparaissent donc comme étant une plus grande justice sociale (qu’il s’agisse d’un système fiscal faisant davantage participer les plus aisés, d’une meilleure redistribution des richesses ou encore du maintien des services publics) et la demande d’écoute de la part du pouvoir. Au contraire, les revendications nationalistes, liées notamment à l’identité ou à l’immigration, sont très marginales, démentant l’idée d’un mouvement qui serait noyauté par les électeurs ou les militants du Rassemblement national. Comme le souligne le sociologue Alexis Spire, auteur de Résistances à l’impôt, attachement à l’Etat (Seuil, 312 pages, 22 euros), c’est avant tout le sentiment d’injustice fiscale, plus prégnant chez les classes populaires, qui explique cette mobilisation.

      En résumé, cette révolte est bien celle du « peuple » – comme se revendiquent nombre de personnes interrogées – au sens des classes populaires et des « petites » classes moyennes, celle des revenus modestes. Dès lors, plusieurs éléments font des « gilets jaunes » une contestation singulière par rapport aux mouvements sociaux des dernières décennies. Outre son ampleur, la forte présence des employés, des personnes peu diplômées, des primo-manifestants et, surtout, la diversité des rapports au politique et des préférences partisanes déclarées font des ronds-points et des péages des lieux de rencontre d’une France peu habituée à prendre les places publiques et la parole, mais aussi des lieux d’échange et de construction de collectifs aux formes rarement vues dans les mobilisations.

      Camille Bedock, Centre Emile-Durkheim, Sciences Po Bordeaux, CNRS �Antoine Bernard de Raymond, Irisso, université Paris-Dauphine, INRA �Magali Della Sudda, Centre Emile-Durkheim, Sciences Po Bordeaux, CNRS �Théo Grémion, diplômé d’un master de géopolitique de l’université de Genève et d’une maîtrise d’urbanisme de l’université Paris-X �Emmanuelle Reungoat, Centre d’études politiques de l’Europe latine, université de Montpellier �Tinette Schnatterer, centre Emile-Durkheim, Sciences Po Bordeaux, CNRS

  • Une question qui fâche ? Pourquoi les #universitaires qui disposent des outils intellectuels et de la protection statutaire pour résister, acceptent-ils de se soumettre au processus de #gestionnarisation de l’#Université ?

    http://sms.hypotheses.org/8471

    #université, #universitaire, #emploi, #gestion, #personnel, #travail, #néolibéralisme, #néolibéral, #management, #capitulation

  • Solidarité avec les universitaires turcs dont les procès s’ouvrent mardi 5 décembre

    Parmi les soutiens possibles (document intitulé What do do) :
    1. Partager l’appel à solidarité ; montrer votre solidarité en suivant les procès et en les commentant sur vos réseaux sociaux, ou en écrivant des articles de blogs ou de journaux sur le sujet. Des informations sont disponibles ici : https://barisicinakademisyenler.net or http://mesana.org/pdf/Turkey20171017.pdf
    2. Contacter bakuluslararasi@gmail.com si vous souhaitez assister aux procès en tant qu’observateur, ou écrivez à une association des droits de l’homme pour qu’elle envoie un délégué.
    3. Signer la pétition https://academicboycottofturkey.wordpress.com/petition pour soutenir le boycott des universités complices en Turquie ;
    4. Informer vos organisations professionnelles ou le sénat de votre université pour qu’elles prennent acte contre les institutions complices telle le Scientific and Technological Research Council of Turkey (TUBITAK ; www.tubitak.gov.tr/en) ;
    5. Soutenir financièrement les enseignants-chercheurs démis de leurs fonctions en faisant un don au syndicat qui les soutient, ici https://www.youcaring.com/academicsforpeaceinturkey-763983

    N’hésitez pas à faire circuler dans vos réseaux universitaires, syndicaux, et militants.

    #solidarité #résistance #Turquie #université #purge #coup #universitaires_pour_la_paix #procès

    @isskein : je vais essayer de mettre sur ce fil ce que je trouve sur cet horrible procès

    • 147 universitaires au tribunal d’Erdogan

      Ils comparaissent à partir de ce mardi pour avoir signé une pétition réclamant la paix au Kurdistan turc. Les purges du président continuent.

      Ce mardi débute à Istanbul les procès de près de 150 universitaires turcs, accusés de « propagande terroriste », pour avoir signé une pétition appelant à la paix. Ces derniers mois, leur pays semble sorti des radars médiatiques européens. Comme s’il existait une lassitude face à la répétition, la répression interminable, cette purge sans fin. Dans ce silence relatif, la dérive autocratique se poursuit pourtant, le pays s’enfonce. Et ces procès de chercheurs illustrent bien la paranoïa, l’arbitraire, dans lesquels se débattent désormais les démocrates turcs.

      https://lesjours.fr/obsessions/la-bascule/ep21-proces-universitaires

    • Blog dédié au procès:
      Academics for Peace - A Case Study. Documenting and Contextualizing the Instrumentalization of the Law in Turkey

      The law is usually associated as antagonistic to despotism, thought of as a source of freedom. But events in Turkey and other countries have shown how is the law instrumentalised in order to suppress academic freedom. This blog documents judicial proceedings against the Academics for Peace as an example to study a phenomenon that can be witnessed all over the globe.

      At the end of 2015, the predominantly Kurdish regions of Turkey entered an intensifying spiral of violence. Curfews were enforced in different cities and districts lasting for days, weeks and even months. Entire neighbourhoods were razed to the ground. People were left homeless, many lost their lives. In the face of these developments, 1128 academics decided not to remain silent and issued a statement titled “We will not be a party to this crime!”. It called on the government and the security forces to abide by domestic and international law and to return to the peace process that had been interrupted after the national elections of June 7, 2015. After the petition was made public, the Academics for Peace were specifically targeted by President Recep Tayyip Erdogan and subsequently turned into objects of hatred and defamation in the media. Since then, they have been attacked and threatened and became subject to administrative and criminal investigations. Some were arrested and kept in prison for more than one month. Hundreds of them have been dismissed from their positions by order of the Council of Education and university administrations. Under the state of emergency declared after the coup attempt of July 15, 2016, hundreds of Academics for Peace were removed from universities and banned from public service. Their passports have been invalidated hindering these academics from travelling abroad. In December 2017, judicial proceedings begin against the signatories, on the charge of “propaganda for a terrorist organization.”

      This blog is curated by Academics for Peace Germany e.V. Its aim is, on the one hand, to create an archive of factual and up-to-date information on the ongoing developments that researchers, journalists and others with an interest in the topic can rely on. On the other hand, this blog will provide contextualization and analysis from a variety of different disciplines and theoretic approaches, in preparation of a planned research network on the instrumentalization of law for the suppression of academic freedom in Turkey and elsewhere.


      https://afp.hypotheses.org

    • A Commentary on the Indictment against Academics for Peace

      The following text consists of a summary of the body of the Bill of Indictment with relevant commentaries in the footnotes. Although the penal case against the Academics for Peace petition has been filed on an individual basis regarding the signatories, each case shares a uniform Bill of Indictment [1]. Several Assize Courts in Istanbul have been appointed as the court-on-duty for the cases—each of them using this uniform Bill of Indictment as the basis of the criminal process. You can also read this commentary as a PDF.

      https://afp.hypotheses.org/59

    • INFORMATION NOTE ON THE ONGOING CRIMINAL PROCEEDINS AND RECENT RULLINGS AGAINST ACADEMICS FOR PEACE IN TURKEY. CALL FOR SOLIDARITY

      The criminal proceedings against several hundreds of academics in Turkey who signed a petition for peace (Academics for Peace) continue in Istanbul. They are individually sued in various Assize Courts. Some cases are recently concluded, the courts of first instances found the academics guilty for “carrying out terrorist propaganda” and sentenced them to 15 months of prison. We are currently waiting the decision of the Court of Appeal.
      We want to highlight these rulings against the signatories and request for urgent international support from our European colleagues.
      In a petition made public in January 2016 , more than two thousand academics and researchers from Turkey, supported by several hundred international academics—called on the Turkish government to abide by domestic and international law and to return to the peace process that had been interrupted in July 2015. After the petition was made public, the signatories were specifically targeted by President Erdoğan and subsequently attacked, threatened and became subject to administrative and criminal investigations. Some were arrested and kept in prison. In October 2017, some signatories of the petition, mostly the ones who are or were working at the universities in Istanbul, started to receive subpoenas, summoning them to the court with an accusation of carrying out terrorist propaganda.
      As of April 30, 2018, more than 260 signatories are individually sued in various Assize Courts of Istanbul. They are separately tried according to hundreds of copy-pasted indictments with an identical content. There is also one group case against four signatories who read a second press statement of Academics for Peace on March 10, 2016. This statement condemned the persecution of signatory academics and affirmed signatories’ commitment to the wording of the petition of January 2016. The four signatories are arrested and were held in pre-trial detention for 40 days.
      There are 2212 signatories of the petition, only around 300 of them have been sued so far. Furthermore 386 signatories have been officially listed as persons affiliated to terrorist organisations in the state of emergency decree-laws, dismissed from their positions, banned from public service for life and had their passports cancelled. But there is only a limited overlapping between the “sued signatories” and the “decreed signatories”.
      The indictment included no attestations that are based on factual evidences, was full of inconsistencies and even manipulated the facts by altering the translated versions of the petition . Against this arbitrariness, the signatories have defended themselves with emphasizing their responsibility as academics that instigates them not to remain silent against historical occurrences. As researchers, lecturers and scientists from numerous fields, they have all underlined their responsibility as a point of intersection, which made them come together through the demand for peace.
      The differences between the qualifications of the “crime” committed by the signatories by different courts demonstrate also arbitrariness of the judicial proceedings. The individual cases against the signatories are engaged with the charge of carrying out terrorist propaganda. The indictment in the group case against the four academics also, initially accused them under Article 7/2 of the Anti-Terror Act . However, at the first hearing on April 22, 2016, the Public Prosecutor announced that he considered a different qualification for the “crime” committed and intended to launch a new investigation under Article 301 of the Penal Code. That article prohibits “degrading the Turkish Nation and the State of the Republic of Turkey and the organs and institutions of the State.” The Prosecutor requested the Court to stop the proceedings under Article 7/2 pending the required permission by the Minister of Justice for an investigation on charges under Article 301. The awaited decision by the Ministry of Justice in relation to the request for permission for an investigation under Article 301 of the Penal Code has reached the Court in November 2017.
      In order to define an act as propaganda for a terrorist organization under Article 7/2 of the Anti-Terror Act, there must be an act having the characteristics of propaganda, which carried out in such a way that legitimizes or praises the coercive, violent and threatening actions of terrorist organizations or encourages the employment of these methods. In the Academics for Peace’s petition, there is no single expression having the characteristics of propaganda in favour of a terrorist organization. Neither does it legitimize or praise the coercive, violent and threatening methods of a terrorist organization nor does it encourage the employment of such methods.
      As to the charge under Article 301 of the Penal Code, the act of signing the petition cannot be considered an offence under the third paragraph of the article, which explicitly excludes from its scope “expressions of an opinion for the purpose of criticism”.
      The focal point of all the hearings against Academics for Peace was the lack of clarity regarding the charges. Along with the requests for immediate acquittal, defence lawyers underlined the uncertainty surrounding the definition of the charges by pointing to the decision of the Minister to grant permission for an investigation under Article 301 in the case against four academics. Lawyers of some signatories requested the courts to merge the cases of all academics, including the one viewed before the 13th Assize Court against four signatories. They emphasized the need to avoid inconsistencies in the charges on which the prosecution will proceed and in the conclusions to be reached by different courts in relation to one identical act. On similar grounds, the courts with the exception of 35th Assize Court, dismissed the requests for rejoinder of the cases.
      This routine of requests, pleas, rejections and objections had kept going on until the 23th of February, where the 34th Assize Court of Istanbul had given its first expedited judgment and found three of the academics guilty for “carrying out terrorist propaganda” under article 7/2 of the Anti-Terror Act. They have been sentenced to 15 months of imprisonment as the courts have decided that the punishment shall be aggravated as the crime of carrying out terrorist propaganda has been deemed to be committed through means of media.
      The courts, relying on the Penal Procedure Code, have offered the academics an option: the deferment of the announcement of the verdict, which enables the court not to announce the decision, and in the case that the defendant will not be found guilty for another crime in a certain period, to foreclose the case. When the accused accepts this mechanism to be applied, then the qualification of the action as a crime becomes officialised and the accused becomes deprived of any rights on appealing the case at a higher court .
      Until today 13 academics have their judgments delivered and 12 of them have accepted to resort to the mechanism of the deferment of the announcement of the verdict. And so far, one signatory had refused the application of this mechanism. As can be seen in the verdict (which is available in the appendices), the Court had rejected the suspension of the punishment upon the grounds that she had not exhibited any expression of remorse. This academic has applied to the Court for Appeal (Istinaf) and she faces the risk of imprisonment.
      Hundreds of other proceedings against other signatories are still on the course. It is still not clear in which way these 13 first rulings will affect the copy-pasted cases considering that the judiciary of the country is collapsing day by day under the state of emergency regime. The first case before the Court of Appeal will probably create a strong judicial precedent that will be highly persuasive while the decisions are made in the future cases against the other signatories. All signatories are tried before various Assize Courts in Istanbul. Istanbul Regional Court of Justice is the competent court for the appeals. The cases will be reviewed by the same two criminal chambers of this Regional Court having competence on cases related to the Anti-Terror Act.
      Today, it is crucial to ask an international support for our colleagues.
      – We would like to invite you to write a short analysis on the verdicts delivered so far. For this purpose, we send you in the appendices the translation of the verdict against the signatory academic, who faces the risk of imprisonment. Please let us know if you were to write an analysis and to publish it on a blog of your choice so that we can also cross post it on the Blog of the Academics for Peace-Germany. If you wish to publish your analysis on this blog, you can directly send it to us.
      – Many academics from different countries assist the hearings as observers. You can be in solidarity in the courtrooms. The presence of international observers during the hearings is crucial.
      Please also feel free to distribute this call for solidarity among scholars who would be interested in supporting our call by either participating in the hearings or by writing a short analysis.
      These actions for solidarity will certainly not suffice to change the course of this politically motivated trials, but certainly influence the way the hearings are held, strengthen the legal struggle of the Academics for Peace under judicial harassment.
      Thank you for your concern and solidarity.

      Academics for Peace – Germany
      Legal Working Group
      afp.jurists@gmail.com

      For more information about the judicial proceedings against Academics for Peace, including the reports and comments of the international observers, please check our blog: https://afp.hypotheses.org
      For a detailed flow of the hearing processes, please check: https://bianet.org/konu/trial-of-academics
      For the calendar of the hearings, please check: https://calendar.google.com/calendar/embed?src=nstr2fppd37d7o0ekp83qu6e7g@group.calendar.google.com&ctz=Europe/Istanbul&pli=1

      Document word reçu via email le 14.05.2018, et que j’ai copié-collé ici.
      Texte accompagnant le message:

      Plus de 260 universitaires signataires de pétition des Universitaires pour la Paix sont actuellement en procédures et plusieurs décisions ont déjà été prises. Certains de nos collègues ont traduit l’acte d’accusation, et plusieurs textes analytiques discutent des procédures et de leurs conséquences.

    • Avant d’entrer en prison à Istanbul, #Füsun_Üstel traite de l’histoire de la citoyenneté en Turquie…

      Toujours aussi déterminée et ferme sur ses principes, notre collègue historienne et professeure de sciences politiques à l’Université de Galatasaray, Füsun Üstel, a prononcé il y a quelques jours à Istanbul une dernière conférence publique avant d’entrer en prison pour 15 mois (https://www.youtube.com/watch?v=fLU7Vu-hyGU

      ). Le thème abordé traitait, et ce choix ne devait évidemment rien au hasard, de « L’histoire de la citoyenneté dans la Turquie républicaine », une histoire sur laquelle Füsun a beaucoup travaillé et publié.


      https://questionsorientoccident.blog/2019/05/03/avant-dentrer-en-prison-fusun-ustel-traite-de-lhistoire-de

      Je découvre dans ce même article qu’elle a travaillé à #Grenoble :

      « Pour la connaître depuis longtemps, et avoir travaillé et enseigné avec elle à Istanbul et à Grenoble, nous ne doutons pas que Füsun saura continuer derrière les barreaux de sa prison pour femmes d’Istanbul son activité d’intellectuelle engagée et de pédagogue… »

      Petite recherche et je me rends compte qu’elle est chercheuse extérieure dans le « Groupe d’études sur la Turquie et l’Europe » à #Pacte :

      https://www.pacte-grenoble.fr/node/23734
      #université_grenoble_alpes

    • Pétition pour la réouverture immédiate du carnet Russeurope, par Jacques Sapir
      Pour une science ouverte à la liberté d’expression des chercheurs.
      Demande de réouverture du Carnet en ligne de Jacques Sapir

      https://www.change.org/p/marin-dacos-demande-de-r%C3%A9ouverture-du-carnet-en-ligne-de-jacques-sapir?

      Le 26 septembre 2017, les responsables de la plateforme Hypotheses.org et de OpenEdition décidaient de suspendre le carnet de recherche (blog) de Jacques Sapir, Russeurope.

      Cette décision, que de nombreux juristes considèrent comme sans fondements et arbitraire, a immédiatement suscité une grande émotion dans le monde universitaire et au-delà. Cette décision met en cause le principe de la liberté des chercheurs.
      Elle s’avère contradictoire avec le fait que ces chercheurs, et en particulier dans les sciences humaines et sociales, sont directement et immédiatement insérés dans l’espace politique. Enfin, cette mesure est de nature à porter un immense préjudice aux institutions de recherches en France, et à les déconsidérer aux yeux des chercheurs étrangers.
      Des protestations très nombreuses ont été envoyées à M. Marin Dacos, responsable d’Hypotheses.org ainsi qu’à son supérieur au Ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche, M. Alain Beretz. Pour l’instant, M. Marin Dacos se refuse de répondre.

      Cette pétition sera remise à Marin Dacos, OpenEdition

      Premiers signataires
      *M. Denis Alland, Professeur en Droit Public, Université de Panthéon-Assas (Paris-2)

      *Bernard Cassen, Professeur émérite d’Anglais à l’Université de Paris-8.

      *David Cayla (Maître de Conférences en économie à l’université d’Angers).

      *Franck Collard, Professeur d’Histoire Médiévale à Paris-Ouest (Paris-10, Nanterre)

      *Daniel Bachet, Professeur des Universités, Sociologie, Université Paris-Saclay

      *Michel Bergès, Professeur de Sciences Politiques, Université de Bordeaux

      *Olivier Berruyer, actuaire et blogueur (Lescrises.fr)

      *Bernard Bourdin, Professeur à l’Institut Catholique de Paris, Historien des idées, philosophe politique.

      *Coralie Delaume, écrivain et blogueur (l-arene-nue.blogspot.fr)

      *Eric Desmons, Professeur de Droit Public, Université de Paris-XIII

      *Marcel Gaucher, Directeur d’études (retraité) à l’EHESS, Philosophe.

      *Jacques Généreux, économiste, maitre de conférences des Universités, professeur à l’IEPP – Sciences Po.

      *Jacques A. Gilbert, Professeur de Littérature comparée, Université de Nantes

      *Brigitte Granville, Professor of International Economics and Economic Policy, Chevalier des Palmes Academiques, Fellow of The Higher Education Academy (FHEA), School of Business and Management, Queen Mary University of London

      *Alain Guery, Directeur de recherche au CNRS, Historien.

      *Éric Guichard, Philosophe de l’internet et du numérique, Enssib-Ens, Ancien Directeur de programme au Collège international de philosophie

      *Annie Lacroix-Riz, professeur émérite d’histoire contemporaine, université Paris 7.

      *Dominique Lecourt, Philosophe, professeur émérite des universités, ancien recteur d’académie, président d’honneur des Presses Universitaires de France.

      *Laurent Loty, Historien des imaginaires et des idées scientifiques et politiques au CNRS, Président d’honneur de la Société Française pour l’Histoire des Sciences de l’Homme

      *Roseline Letteron, Professeur des Universités, professeur de Droit à Paris-Sorbonne.

      *Laurent Loti, Chargé de recherche au Centre d’Étude de la Langue et des Littératures Françaises (CNRS—Université Paris-Sorbonne)

      *Jérôme Maucourant, Maître de conférences (HDR) en sciences économique à l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne

      *Laurent Pinsolle, blogueur (gaullistelibre.com)

      *Nicolas Pons-Vignon, Senior researcher in development economics, University of the Witwatersrand, Afrique du Sud

      *Benedetto Ponti, professeur de Droit administratif au département de Science Politique de l’Université de Perugia, professeur de droit des médias numériques.

      *Bertrand Renouvin, Journaliste et écrivain.

      *Stéphane Rials, professeur de relations internationales et de philosophie politique à Panthéon-Assas (Paris 2).

      *Claude Roddier, Professeur des universités, retraitée depuis 2001. Professeur d’astronomie à l’université Aix-Marseille

      *François Roddier, Professeur des universités, retraité depuis 2001. Directeur du département d’Astrophysique de l’Université de Nice

      *Antoni Soy, Honorary Professor of Applied Economy, University of Barcelona. Former Deputy Minister of Industry and Business, Government of Catalonia. Former Mayor of Argentona

      *Serge Sur, Professeur émérite à l’Université Panthéon-Assas (Paris 2)

      *Pierre-André Taguieff, philosophe et historien des idées, directeur de recherche au CNRS

      *Véronique Taquin, écrivain, normalienne et agrégée de Lettres modernes, professeur de chaire supérieure en khâgne au lycée Condorcet.

      *Bruno Tinel, économiste, Maître de conférences, HDR, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

      *Michèle Tribalat, démographe

      *Jérôme Valluy, Maître de Conférences (HDR) de Sciences Politiques à Paris-1

      *Alain Venturini, archiviste-paléographe, conservateur général du patrimoine, directeur des Archives départementales de l’Aveyron

  • En parallèle du PS, #Benoît_Hamon mise sur une « campagne intello »
    https://www.mediapart.fr/journal/france/160317/en-parallele-du-ps-benoit-hamon-mise-sur-une-campagne-intello

    Thomas Piketty présentant le projet européen de Benoît Hamon © DR Le candidat socialiste s’est entouré de nombreux #chercheurs dans son équipe de campagne pour contribuer au programme présenté ce jeudi 16 mars. Une rupture de plus avec le quinquennat de François Hollande.

    #France #Dominique_Méda #élection_présidentielle #Julia_Cagé #présidentielle_2017 #Sandra_Laugier #Thomas_Piketty #Thomas_Porcher #universitaires

  • En #Turquie, les #Universitaires_pour_la_paix face à l’« erdoganisation » de l’académie

    En janvier, un groupe de chercheurs lance un appel réclamant la fin des opérations contre le #PKK. Le président #Erdogan réagit férocement et signe le chapitre le plus retentissant dans la mainmise du pouvoir sur les universités.


    http://www.lacite.info/politiquetxt/2016/3/30/en-turquie-les-universitaires-pour-la-paix-face-lerdoganisation-de-lacadmie
    #université #répression #chercheurs
    cc @reka

  • How computer-generated fake papers are flooding academia
    http://www.theguardian.com/technology/shortcuts/2014/feb/26/how-computer-generated-fake-papers-flooding-academia

    Insolite : quand des articles générés par #ordinateur s’invitent chez les éditeurs #universitaires
    http://www.clubic.com/insolite/actualite-686226-insolite-articles-generes-ordinateur-editeurs-universaires.

    Un programme informatique permettant de générer de faux articles universitaires a permis à de nombreux chercheurs de composer des textes complètement incohérents, et pourtant publiés, ces dernières années. Un système développé par un universitaire français a récemment révélé la supercherie.

    Un article généré par SciGenConçu en 2005 par 3 étudiants de l’Institut de technologie du Massachusetts (MIT), le logiciel #SciGen permet de générer aléatoirement des résumés d’études scientifiques. Cette usine à #canulars est disponible gratuitement sur #Internet depuis près de 10 ans, et une découverte récente a permis de constater qu’elle était utilisée depuis longtemps par des #scientifiques pour soumettre de faux sujets de recherches à l’occasion de congrès, ou à destination de #maisons_d'édition.

    A la base conçu pour critiquer et tester la rigueur du secteur universitaire concernant des sujets d’études parfois totalement incompréhensibles – et pour cause – SciGen a fini par piéger des éditeurs sérieux. Lundi 24 févier, Springer et IEEE, deux maisons d’édition basées aux USA et en Allemagne, ont ainsi annoncé la suppression de 120 articles totalement erronés de leurs archives. Ils avaient tous été conçus via SciGen.

    Un Français découvre le pot-aux-roses

    La découverte de cette supercherie est due à Cyril Labbé, un chercheur de l’université Joseph-Fourier de Grenoble. Ce dernier a conçu en 2012 un système qui permet d’identifier les articles composés à l’aide de SciGen. Car le système, qui créé des phrases aléatoires à l’aide de chaînes de mots et intègre même des tableaux, des graphiques et des sources, compose des articles qui tiennent du #charabia_scientifique pour les profanes, et n’attire pas nécessairement l’attention si on ne se penche pas concrètement dessus. La méthode de détection de Cyril Labbé, disponible en ligne, permet de rechercher du vocabulaire spécifique utilisé par SciGen. Des dizaines d’articles erronés ont ainsi été décelés.

    Springer et IEEE ne sont pas les seules victimes du phénomène : le site Nature explique que des dizaines de documents générés par SciGen sont disponibles en ligne, notamment sur #Google_Scholar.

    Reste à savoir comment de tels documents peuvent circuler et même être publiés alors qu’ils n’ont pas de sens réel. Cyril Labbé évoque le fait que de nombreux articles sont associés à des conférences tenues en Chine, et associées à des auteurs chinois. Les éditeurs pris au piège se font quant à eux discrets sur la question.

  • Depuis 24 heures, grosse #polémique dans le petit monde de la #sociologie universitaire française, avec un clash sur #facebook entre Didier #Eribon (qui a l’air d’avoir un sacré melon) et Jean-Louis #Fabiani, qui prenait la défense de #Boltanski accusé par Eribon d’être un « idéologue catholique ».
    Gros #bordel, mais il n’est pas inintéressant de voir jusqu’où mène l’appropriation (pas si ancienne que ça dans les sciences sociales) par des #universitaires des réseaux sociaux : vers une publicité des clashs et des invectives qui restaient jusque là dans les salles de séminaires.

    REMARQUES SUR LA PENSÉE RÉACTIONNAIRE ET SUR LES OPÉRATIONS DE RECHRISTIANISATION DE LA VIE INTELLECTUELLE
    http://didiereribon.blogspot.fr/2014/01/remarques-sur-la-pensee-reactionnaire.html

    On me raconte que, pour défendre son maître Boltanski, un certain Jean-Louis Fabiani (?) m’attaque sur sa page Facebook en me reprochant de n’avoir « jamais fait » de sociologie. Il s’indigne même qu’on ait pu me donner une « chaire » dans l’université française !
    Est-ce le même Fabiani que celui qui a publié un livre pathétiquement mauvais sur l’histoire de la philosophie en France, il y a quelque chose comme 25 ans, et qui, sans doute devenu conscient de ses limites après cela, n’a plus jamais rien fait depuis ?
    Et qui, bien sûr, siège (il a tout le temps pour ça) dans toutes les instances de contrôle (le CNU) de ce qu’il considère comme « sa » discipline ?
    Si c’est le cas, je suis fier de n’avoir jamais fait de « sociologie » au sens où il l’entend, et l’on comprendra aisément pourquoi je suis favorable à la suppression du CNU : pour que de telles nullités intellectuelles ne soient plus en mesure d’exercer leur faculté de nuisance et de reproduction éternelle de leur médiocrité.

    Jean-Louis Fabiani
    https://www.facebook.com/jeanlouis.fabiani?fref=ts

    Je voudrais rappeler à ceux qui, honte à eux, osent me traiter d’homophobe que je suis le seul universitaire français à avoir accepté de diriger la thèse de Geoffroy Daniel de Lagasnerie, au nom de la liberté d’expression, sans partager un seul de ses points de vue ?

    • D’ailleurs, comme lien vers les articles ou commentaires, il faudrait essayer de trouver les vrais liens y amenant directement et non le flux général, car une semaine, une mois, un an plus tard, ce ne sera plus pareil. Souvent ces liens sont sur les dates ou horaires (twitter, facebook, seenthis, etc). Par exemple là le vrai lien c’est :
      https://www.facebook.com/jeanlouis.fabiani/posts/10152112650029651

    • C’est vrai, mais la solution supérieure serait sans doute de réussir à intégrer le message lui-même dans le corps du billet, ce qui faciliterait la lecture et permettrait de le conserver même s’il est effacé.
      Je pense notamment au système des articles sur lemonde.fr, qui réussit à intégrer le post facebook ou twitter et sa mise en forme au corps de l’article. Mais j’avoue que je n’ai aucune idée de comment ils font…

    • C’est avec #Oembed, de la même manière que pour les vidéos ou images ici : on donne l’URL uniquement, et le système sait afficher le contenu distant en interne.

      Pour Twitter, ça pourrait être ajouté à @seenthis, car on sait que c’est court, mais si chaque lien FB (je parle du vrai lien du post) était intégré en entier, ça pourrait être énorme (sans parler des droits), sauf si on force la citation en n’affichant que les premiers N caractères.

    • J’ai une petite question, je ne suis pas sur moi même : pensez-vous qu’il st intéressant de donner autant de visibilité à ces querelles microcosmique ? Je n’ai pas trop l’impression ici qu’on soit dans une critique constructive utile, qui fait avancer le schmilblick (si je puis dire), mais je m trompe peut-être, l’alternative est que ce soit un stupide règlement de compte auquel cas l’intérêt pour le public est à peu près proche de zéro.

      Mais bon, je ne sais pas trop comment interpréter cela.

      #dubitatif

    • Le sociologue Luc Boltanski a écrit des pièces de théâtre en versets claudéliens, pas nulles d’ailleurs, mais qui rejoignent clairement des positions anti-IVG dans un style catholico-mystique assez fumeux. Vu le contexte ("Manif pour Tous", interdiction de l’avortement en Espagne, etc), Didier Eribon fait son boulot en le signalant. Non ?

    • @rastapopoulos, ok, merci beaucoup, mais quels problèmes de droits ça pourrait créer, si (comme en l’occurrence) le post est public ? Tu veux dire que c’est facebook que ça pourrait gêner ?
      @reka, Effectivement vu le tour que ça prend je suis en train d’être de plus en plus dubitatif moi-même. Cela dit, à la base, c’était plutôt parce que ça permet d’identifier un certain nombre de fractures et de chapelles différentes dans le milieu, ce qui n’est pas sans influence sur le contenu des travaux. Ce n’est pas vraiment le cas ici, mais en général je trouve que ça donne un arrière-texte intéressant à avoir en tête quand on lit certaines productions (notamment des articles ou des comptes-rendus critiques), que seuls quelques habitués des séminaires (dont je ne suis pas) peuvent vraiment contextualiser au sein du paysage universitaire.

    • En effet, pas simple, oui Irène et oui Alexandre. Je signale qu’en Norvège, puisqu’on parle de régression, la droite et l’extrême droite (coalition au pouvoir) proposent un projet de loi qui permettraient aux médecins de refuser de procéder à des avortements. La Norvège aussi, donc...

    • @cie813 Peut-être, mais pour le coup je n’ai pas l’impression que ça réponde à une grande nécessité du moment, et franchement (vu le ton) ça m’a plutôt l’air d’un réglement de comptes pour des motifs extérieurs de la part d’Eribon. Je n’ai pas particulièrement entendu Boltanski ces derniers temps, et je ne vois donc pas vraiment de raison de convoquer sa personne et ses écrits passés sur le débat, d’autant que c’est assez sévèrement ad hominem :

      ce pauvre Boltanski se situait du côté de la pensée critique quand ça lui semblait être payant (il était un disciple de Bourdieu), puis a dénoncé la pensée critique quand il est devenu payant de se rattacher à la révolution néo-conservatrice (rejoignant les cénacles chrétiens et insultant Bourdieu, et jusqu’au jour de sa mort), et il est fort probable qu’il cherche désormais à récupérer la « critique » qu’il a pratiquée puis dénoncée (ou de faire croire qu’il la récupère, tout en maintenant ses options idéologiques spiritualistes en assimilant notamment la sociologie critique à une théorie paranoïaque du complot - vieux discours de la droite, vieille rengaine de la pensée bourgeoise), puisque cela redevient peut-être payant...

      Enfin, je suis un poil sceptique sur la notion de « boulot » pour un sociologue dénonçant des sociologues, surtout qu’en l’occurrence l’ironie est qu’Eribon passe son temps à se lâcher sur « les flics de la pensée »

    • @alexandre, par défaut, sans licence explicitant autre chose, un texte appartient à son auteur, et seul lui peut décider où il veut le publier. Si tu le mets autre part, tu ne peux en mettre que des petits bouts : c’est le « droit de citation ». Mais pas plus. Un texte publié (donc public) ne veut pas dire qu’il est dans le « domaine public » !

      Avec tes références au « monde universitaire », j’eus cru que tu savais cela. :)

    • @rastapopoulos Je comprends, mais en l’occurrence c’est la notion de « texte » qui me paraît problématique : un post facebook aurait ce statut et pas un tweet ? Parce que lemonde.fr (pour y revenir) ne se gêne pas pour intégrer des tweets, y compris (me semble-t-il mais je ne suis plus certain tout à coup) anciens voire effacés par leurs auteurs.
      A partir de là, j’ai supposé (sans doute abusivement) que la différence était que la publicité du message sur twitter permettait de contourner ça.
      Donc par curiosité, tu sais si c’est la licence de twitter qui permet ça, ou si c’est juste le statut journalistique du monde.fr qui fait qu’ils ne s’encombrent pas de ça en disant qu’ils ne font que rapporter des infos ?

      Mais je suis loin d’être tout-terrain sur le « monde universitaire », d’autant que (comme on le voit un peu), quand il se transfère sur le numérique ça fait un beau bordel à tous points de vue ;)

    • C’est différent suivant plusieurs critères : la longueur du texte de base, et le but et l’auteur de la citation. Lorsqu’il s’agit pour un journal de « rendre compte de l’actualité », il peut être permis de citer un texte en entier, par exemple.

      De plus Twitter c’est une phrase ou fort peu de phrases, donc à mon avis ça revient à citer une parole de quelqu’un à l’oral, qu’il aurait prononcé à la radio ou à la télé. Quand ça devient un texte de plusieurs paragraphes, ce n’est pas forcément de la même nature.

    • @cie813, entendu dire (…) que Boltanski ayant changé de femme, il a moins de goût pour le catholicisme (réac), avec la réussite de sa carrière, cela irait jusqu’à "expliquer" son retour à des thèses plus critiques (?). Mais si on ne s’en tient pas qu’à cet aspect, on lira une recension critique de son livre phare Le Nouvel Esprit du Capitalisme dont le conservatisme des thèses de Boltanski ne sortent guère indemnes :

      La thèse qui court tout au long du « Le nouvel esprit du #capitalisme » est la suivante : la #critique_artiste (fondée sur, et revendiquant la liberté, l’autonomie et l’#authenticité) et la #critique_sociale (fondée sur, et revendiquant la solidarité, la sécurité et l’#égalité) « sont le plus souvent portées par des groupes distincts » et sont « incompatibles ».[1] Le flambeau de la critique artiste, transmis par les artistes aux étudiants de #mai_68, aurait été repris par la suite par les gens « branchés » qui travaillent dans les médias, la finance, le show business, la mode, Internet, etc., c’est-à-dire, les « créatifs » du « haut de la hiérarchie socioculturelle ». La critique sociale, par contre, portée par les ouvriers de 68, aurait été reprise par les petits gens, les subordonnés, les exclus du libéralisme. Critique artiste et critique sociale sont donc « largement incompatibles ».

      La « critique artiste » suscite un malaise chez les auteurs, voir un certain mépris, qu’ils ont du mal à cacher. De leur point de vue, cela se comprend aisément, puisque la « critique artiste […] n’est pas spontanément égalitaire ; elle court même toujours le risque d’être réinterprétée dans un sens aristocratique » et « non tempérée par les considérations d’égalité et de solidarité de la critique sociale peut très rapidement faire le jeu d’un libéralisme particulièrement destructeur comme nous l’ont montré les dernières années ». D’ailleurs, la critique artiste n’est « pas en soi nécessaire à la mise en cause efficace du capitalisme comme le montrent les succès antérieurs du mouvement ouvrier sans les renforts de la critique artiste. Mai 68 était, de ce point de vue, exceptionnel ». A la lecture, on sent aussi que le livre est parcouru par un ressentiment contre mai 68 qui, depuis quelques années, traverse les élites intellectuelles françaises, et dont font les frais, ici aussi, comme chez l’ancien ministre de l’Education Nationale, Michel #Foucault, Gilles #Deleuze et Félix #Guattari, qui, en tant que maîtres de la pensée 68, auraient déposés des germes de libéralisme dans les têtes de gens sans y prendre garde.

      Donc non seulement la critique artiste n’est pas nécessaire, sinon à « modérer le trop d’égalité de la critique sociale » qui risque de « faire fi à la liberté » (sic), mais en plus elle joue le cheval de Troie du libéralisme, à qui elle est apparenté par le goût aristocratique de la liberté, de l’autonomie et de l’authenticité que les artistes auraient transmis d’abord aux « étudiants », et qui aurait ensuite transité chez les « bobos ». Boltanski et Chiapello nous rejouent ici l’opposition de la liberté et de l’égalité , de l’autonomie et de la sécurité, d’une autre époque, sur laquelle d’ailleurs se sont cassés les dents aussi bien le socialisme et le communisme,.

      extrait de Les malheurs de la « critique artiste » et de l’emploi culturel
      http://eipcp.net/transversal/0207/lazzarato/fr

      @alexandre, quand même, Didier Eribon, entre son Retour à Reims et son D’une révolution conservatrice et de ses effets sur la gauche française, où les #socialistes sont de façon tout à fait argumentée vigoureusement étrillés, c’est un des rares académiques dont les travaux relèvent au moins pour partie de la question de l’émancipation, non ?

      #Maurizio_Lazzarato

    • @colporteur, pour être très honnête je n’ai pas lu Eribon, mais j’ai lu et entendu pas mal de choses intéressantes sur ces deux livres qui m’ont effectivement plutôt donné envie de me rattraper, encore qu’il me semble que tout cela n’a un rapport qu’assez lointain avec une démarche et une méthode sociologique. Ce n’est pas un mal, et peut-être qu’une lecture détaillée montrerait que je me trompe, mais puisque toute cette histoire est partie de là (et que c’est à cause de ça qu’Eribon a pris le bourdon)…

      Cela dit, ça n’était franchement pas mon propos (d’ailleurs je n’avais pas de propos à la base, je signalais juste le truc), mais simplement ça me paraît curieux cette mentalité mi-cour de récré, mi-ubu roi, où la situation au final c’est un type qui traite la terre entière (et notamment des universitaires qui ne sont pas tout à fait insignifiants) d’intégristes cathos, de nains de la pensée et de flics universitaires, et des réactions qui se centrent autour du fait qu’il écrit des bons bouquins à côté (ce qui me paraît un peu à côté du souci du moment).

      Au final, un propos qui a quand même fini par mûrir, c’est que voir comme ça les conflits d’égos éclater en place publique numérique, ça permet de mesurer la relativité d’une certaine pondération/nuance qu’on attend généralement des chercheurs, et de se rappeler qu’un bon paquet d’entre eux attendent essentiellement de s’engueuler comme des poissonniers (c’est juste qu’on le voit).
      Et, accessoirement, qu’il me paraît vraiment très discutable de convoquer des notions de « boulot » pour une sorte de veille documentaire intellectuelle des idées de la terre entière (btw, @cie813, Eribon a sauté dessus et a repris la chose sur sa page facebook) - mais c’est discutable, et ça peut faire partie de l’éthique d’engagement de certains. Je suis loin de supporter les anti-IVG et leurs soutiens idéologiques, mais enfin Boltanski a quand même le droit de penser et d’écrire ce qu’il veut (surtout quand c’est aussi dépourvu d’intention militante que ce qu’on convoque là) sans qu’on le rabatte sur un débat où il n’a pas voulu se pointer (à ma connaissance), pour lui faire porter une responsabilité indirecte sur une bande d’allumés.

  • Academics Who Defend Wall St. Reap Reward - NYTimes.com
    http://mobile.nytimes.com/2013/12/28/business/academics-who-defend-wall-st-reap-reward.html?pagewanted=4&_r=0

    .. interviews with dozens of academics and traders, and a review of hundreds of emails and other documents involving two highly visible professors in the commodities field — Mr. Pirrong and Professor Scott H. Irwin at the University of Illinois — show how major players on Wall Street and elsewhere have been aggressive in underwriting and promoting academic work.

    #conflit_d’intérêt #Wall-street #économie #finance #universitaires

  • Paradigm Shift in the Global IP Regime : The Agency of Academics by Jean-Frédéric Morin : : SSRN
    http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=2278410

    The global intellectual property (IP) regime is in the midst of a paradigm shift in favor of greater access to protected work. Current explanations of this paradigm shift emphasize the agency of transnational advocacy networks, but ignore the role of academics. Scholars interested by global IP politics have failed to engage in reflexive thinking. Building on the results from a survey of 1,679 IP experts, this article argues that a community of academics successfully broke the policy monopoly of practitioners over IP expertise. They instilled some skepticism concerning the social and economic impacts of IP among their students, as well as in the broader community of IP experts. They also provided expert knowledge that was widely amplified by NGOs and some intergovernmental organizations, acting as echo chambers to reach national decision makers. By making these claims, this article illustrates how epistemic communities actively collaborate with other transnational networks, rather than competing with them, and how they can promote a paradigm change by generating rather than reducing uncertainty.

    Le rôle des #universitaires dans le changement d’attitude politique vis-à-vis de la #propriété_intellectuelle ; quand on fouille les archives du @mdiplo il y a 30 ou 40 ans, on trouve des articles exhortant les pays du Sud à se doter de législations sur la PI, de manière à défendre leurs droits… funeste erreur.