Retour sur la nucléarisation et la militarisation des Utopiales 2019 | La Volte
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Nous nous étions alarmé.e.s à la fin du mois d’octobre au sein des éditions La Volte en découvrant la grille de programmation du festival.
Motifs : la présence du Ministère des Armées en la personne d’Emmanuel Chiva, Directeur de l’agence d’innovation de défense (invité par le festival), et l’accueil d’un concours d’écriture co-organisé par l’ANDRA et le magazine Usbek et Rica.
Le Ministère des armées est invité depuis 2017 au festival. C’est aux Utopiales qu’est née et qu’a été testée l’idée de la future “red team”. Calquée sur le modèle US et censée réunir des auteur.e.s de SF pour “préparer les technologies et innovations qui seront nécessaires à nos futurs systèmes d’armement“, la création de cette fameuse équipe a été annoncée cet été à grand bruit dans la presse.
Les Utopiales comme terrain d’expérimentation et source d’inspiration pour l’armée : c’est un point dont le principal intéressé, Emmanuel Chiva, ne s’est jamais caché, n’hésitant pas à en faire étalage dans divers médias ainsi qu’auprès du Sénat.
Si le Ministère des armées est invité à recruter sa red team d’auteur.e.s en plein festival, pourquoi ne pas convier également Amnesty International ?
Si l’on invite l’ANDRA à faire campagne auprès du public des Utopiales, pourquoi ne pas solliciter dans le même temps GreenPeace ou le réseau Sortir du Nucléaire ?
Mais ce que nous soulignons par-dessus tout, c’est cette tentative de détournement massive de la littérature de science-fiction qui a éclaté au grand jour avec l’article paru sur le site de France Culture le 31 octobre, premier jour des Utopiales.
Pour reprendre les propos d’Alain Damasio, qui était invité à intervenir à la table ronde “Secret Défense” le vendredi 1er novembre : est-ce là le rôle d’auteur.e.s de science-fiction que de se faire les promoteurs d’un “genre utile”, au service d’un état de guerre permanent, tel que l’a décrit Emmanuel Chiva sur scène ?
À utiliser la science-fiction dans un but militaire, cet imaginaire de la guerre risque fatalement d’impacter notre vision du monde. La guerre est-elle un horizon souhaitable et désirable ?
Bon, l’ANDRA ou les Armées ne sont pas « invitées », mais sponsors. Les festivals ne peuvent plus, malgré le succès comme celui des Utopiales, boucler leurs budgets sans l’apport de « partenaires » intéressés (au double sens du terme). C’est aussi ce recul de l’allocation sociale par le biais de l’impôt et des collectivités territoriales qui est en jeu. Quand les 1% captent tout l’argent, ils ont donc plus d’argent à dépenser pour servir leurs propres intérêts, y compris au travers d’activités culturelles ou sociales. L’imaginaire est donc réduit à ne voir l’avenir qu’au prisme des intérêts de ces 1%... très peu imaginatif donc. C’est comme les chercheurs (aussi présents aux Utopiales) qui ne peuvent plus voir l’avenir de leurs travaux qu’au filtre des « appel d’offre » immédiats et formatés en fonction des besoins des subventionneurs. L’imagination scientifique en prend un coup elle aussi.
Je soutiens pleinement ce texte.
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