• La police après les émeutes, enquête sur un corps social à vif

    Les #violences_urbaines qui ont secoué le pays en début d’été ont fortement marqué les fonctionnaires engagés en première ligne. L’enquête du « Monde » montre à quel point cette séquence ultra-violente a nourri leur mal-être et un sentiment d’injustice de plus en plus profond.

    Ce sont des blessures qui s’accumulent comme autant de plaies ouvertes, puis de cicatrices jamais complètement refermées au sein du monde policier. Un corps social à vif, meurtri, désorienté. Les #émeutes de fin juin et début juillet, après la mort de Nahel M. à Nanterre, tué par un tir policier pour un refus d’obtempérer, ont ajouté une couche de colère sur un terreau fragilisé, sinon explosif. « Un moment de crispation qui peut être un point de non-retour », s’alarme un préfet, parmi les plus hauts cadres du ministère de l’intérieur, très marqué par l’extrême violence des émeutes et par le mouvement de contestation d’une partie des forces de l’ordre, en juillet, en colère après le placement en détention provisoire d’un agent de la brigade anticriminalité (BAC) de Marseille accusé de violences volontaires pendant les émeutes.

    Des blessures ? Ce vendredi 1er septembre, Stéphane, un major de 52 ans, ouvre la porte de sa chambre dans l’hôtel banal d’une zone artisanale banale où une partie de la CRS 20 a établi son camp de base à Grande-Synthe (Nord), en banlieue de Dunkerque. Trois semaines près de #Calais pour tenter d’empêcher les #migrants de traverser la Manche. Puis deux semaines de repos à Limoges, là où vivent les familles des fonctionnaires. Et, à nouveau, trois semaines de mission à Nice, cette fois pour empêcher les migrants d’entrer sur le territoire, dans cette mission cyclique, parfois étrange [sic], que leur confie la République.

    .... D’autres sont convaincus que le calme est revenu grâce à leur travail, mais également en raison des consignes données par les trafiquants de drogue, gênés dans leur « business » par les émeutes, qui rebutent la clientèle, et inquiets d’une présence durable des forces de l’ordre.

    « Ce qui m’a frappé, c’est ce que m’ont dit des #policiers sur le terrain, relate au Monde Frédéric Veaux, le directeur général de la police nationale (#DGPN). Tous, tous, tous ont dit : “On n’a jamais vu ça.” Même ceux confrontés à 2005. Ils ont tous été marqués par cette détermination chez les émeutiers à se préparer, à aller au contact des policiers pour faire mal. Les fois précédentes, s’il y avait contact, c’est en général les policiers qui en prenaient l’initiative. Là, ce sont eux qui sont venus. Ce qui était manifestement nouveau, aussi, c’est l’aspect coordonné et préparé de certaines actions. »
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/09/27/de-chasseurs-on-est-passe-a-chasses-au-sein-des-forces-de-police-le-malaise-
    https://justpaste.it/d2gel

    #police #ouin_ouin #barbarie_et_larmes_à_l'oeil

  • « On évite les conflits » : deux mois après les émeutes, ce qui a changé pour les policiers de terrain - Le Parisien
    https://www.leparisien.fr/faits-divers/on-evite-les-conflits-deux-mois-apres-les-emeutes-ce-qui-a-change-pour-le

    Dans le Val-de-Marne, un des départements franciliens où les violences urbaines ont été les plus fortes lors des #émeutes qui ont suivi la mort de Nahel à Nanterre (Hauts-de-Seine) le 27 juin, les policiers expriment leurs craintes lors des interventions.

    Ce n’est pas demain la veille qu’ils seront de nouveau à court de munitions. Tous les commissariats ont été réapprovisionnés. C’est à peu près le seul point positif que les policiers du Val-de-Marne retiennent des #violences_urbaines qui ont éclaté il y a deux mois après la mort de Nahel tué par un policier, le 27 juin. Car pour le reste, ils en ont gros sur la patate. Au mieux de la désillusion, au pire de la haine.

    [...] « Aujourd’hui quand on sort, c’est catastrophique, lâche un brigadier d’un service départemental. Les types en face sont dans un sentiment d’impunité. Ils nous disent on vous a bien défoncés, hein. »

    #police

  • Comment le Raid, novice en maintien de l’ordre, a provoqué la mort de Mohamed Bendriss à Marseille | Gauche Police
    https://www.mediapart.fr/journal/france/280823/comment-le-raid-novice-en-maintien-de-l-ordre-provoque-la-mort-de-mohamed-

    L’enquête sur le tir de #LBD fatal à un jeune homme de 27 ans, à laquelle Mediapart et « Libération » ont eu accès, montre comment cette unité d’exception a été mise au service d’un rétablissement de l’ordre spectaculaire alors qu’elle n’avait ni l’équipement, ni les compétences, ni le raisonnement adaptés à cette situation d’émeute. 
    Camille Polloni

    Le 2 juillet, à 00 h 58, au niveau du 73, rue de Rome à Marseille, #Mohamed_Bendriss, au guidon de son scooter, est atteint par deux tirs de lanceur de balles de défense (LBD). Il remonte alors le long d’une colonne de véhicules du #Raid, déployés pour « rétablir l’ordre » à #Marseille. Le jeune homme de 27 ans parvient à continuer sa route et s’effondre deux minutes plus tard devant chez sa mère, cours Lieutaud. 
    Mohamed Bendriss est le seul mort recensé lors de ces nuits d’émeutes qui ont suivi la mort de Nahel Merzouk, tué par un tir policier à Nanterre. L’un des deux impacts de #LBD, au thorax, a provoqué une crise cardiaque ayant entraîné sa mort. L’autre a laissé une marque sur l’intérieur de sa cuisse droite. Sous l’effet d’un troisième projectile, un « #bean_bag » tiré à trois ou quatre mètres, le phare de son scooter a éclaté. 
    Le 10 août, soit six semaines après les faits, trois policiers du Raid soupçonnés d’être à l’origine de ces tirs sont mis en examen pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner ». L’information judiciaire, qui se poursuit, vise à déterminer s’ils ont agi dans les règles et de manière proportionnée. L’enquête confiée à l’Inspection générale de la #police nationale (IGPN) et à la police judiciaire (PJ), à laquelle Mediapart et Libération ont eu accès, permet d’éclaircir dans quelles conditions le Raid est intervenu ce soir-là à Marseille et pourquoi il a décidé d’ouvrir le feu. 
    Les dépositions des mis en cause et d’une trentaine de témoins (policiers ou non), ainsi que l’exploitation de nombreuses vidéos, révèlent que cette unité d’exception au sein de la police, particulièrement peu préparée à assurer des missions de maintien de l’ordre, obéit à des logiques à part. Elles montrent aussi que très tôt, le Raid a eu conscience de sa possible implication dans le décès de Mohamed Bendriss et a préféré en discuter collectivement, en interne, plutôt que d’en référer à la justice .
     
    « Mohamed a été tué par une balle de LBD 40, tirée avec une arme non adaptée et illégale, par une unité spéciale inadaptée au #maintien_de_l’ordre, couverte par la hiérarchie du Raid qui a dissimulé le crime en connaissance de cause », affirme Arié Alimi, l’avocat de la veuve de Mohamed Bendriss. 

    Au soir du 1er juillet, comme les deux jours précédents, le Raid est déployé à Marseille pour faire face à des #émeutes et #pillages de magasins. Sur décision de #Gérald_Darmanin, c’est la première fois que cette unité d’élite, spécialisée dans les prises d’otages et les interventions antiterroristes, est ainsi employée à lutter contre des #violences_urbaines en métropole. 
    « On se demandait ce qu’on foutait là », résume en garde à vue Alexandre P., un des policiers mis en examen. « C’était ma toute première nuit d’émeute dans ma carrière, ajoute son collègue Jérémy P. Nous ne sommes pas du tout formés pour ce genre d’émeute, nous ne sommes pas habitués à cela. Nous n’avons même pas de protection adaptée. » 
    Dans les rues de Marseille, le Raid se déplace en convoi de sept véhicules. À sa tête, le « PVP » (« petit véhicule de protection »), un blindé très reconnaissable avec un opérateur du Raid juché sur une tourelle. Ce soir-là, c’est Alexandre P. qui s’y colle. Son rôle : « signaler aux autres des faits suspects » et « assurer la protection du convoi ». Pour ce faire, il dispose d’un #LBD_multicoups, approvisionné par six munitions. 
    « Nous devions suivre le PVP où qu’il aille, sans jamais nous séparer ni changer la position de la colonne », explique un opérateur assis dans un autre véhicule. Le convoi est là pour impressionner, mais aussi pour interpeller si nécessaire, ou disperser un attroupement.  
    Si les fonctionnaires du Raid sont novices en maintien de l’ordre, ce sont de bons tireurs : habilités à toutes les armes, ils s’entraînent plus souvent que les autres policiers. Signe qu’ils appartiennent à une unité à part, chacun d’entre eux peut choisir ses armes et les embarquer en mission sans formalités particulières. Au point que leur hiérarchie est incapable de déterminer, a posteriori, qui a pris quoi. 
    Au total, dans la nuit du 1er au 2 juillet, les 22 opérateurs composant la colonne ont tiré 107 « bean bags » (des projectiles en petits sacs compacts remplis de billes), 30 munitions de LBD, 10 #grenades lacrymogènes et 4 grenades de désencerclement . Ils n’ont rempli aucune « fiche TSUA » (traitement et suivi de l’usage des armes), obligatoire après chaque tir pour les policiers classiques, en gage de traçabilité. Ils ne sont pas non plus équipés de caméras-piétons et leurs échanges radio, en circuit fermé, ne font l’objet d’aucun enregistrement.

    Un premier tir depuis la tourelle 
     
    Lors du « briefing », la hiérarchie du Raid a appelé ses troupes à faire preuve d’une vigilance particulière sur les deux-roues, qui pourraient leur tourner autour et s’attaquer à elles. « Nous avions la sensation que les scooters étaient les leaders d’une guérilla urbaine, explique l’un des policiers placés en garde à vue, puis relâché sans suite. Nous avions la crainte de recevoir des cocktails Molotov comme les collègues de Strasbourg, qui se sont même fait tirer dessus à la kalachnikov… Les collègues de Nîmes se sont fait tirer dessus au 9 mm. » 
    C’est dans ce contexte que les policiers assistent, peu avant 1 heure du matin, à une scène qui attire leur attention. Alors qu’ils sont requis en centre-ville, pour sécuriser un magasin Foot Locker pillé, ils voient un piéton courir vers eux, tenant à la main un sac de marchandises volées. À sa hauteur, un scooter semble le suivre et se livrer à un étrange manège : il pourrait être son complice ou essayer d’arracher son butin. Dans tous les cas, « il y a matière à interpeller », estime Alexandre P. depuis sa tourelle. 
    Alors que certains de ses collègues mettent pied à terre, le policier tire au LBD à deux reprises. Il vise d’abord le piéton, puis se retourne vers le scooter de Mohamed Bendriss, qui « continue d’avancer alors qu’on lui demande de s’arrêter ». 
    « J’ai considéré son geste d’accélérer en direction du convoi comme un geste d’agression », explique Alexandre P., estimant sa distance de tir à dix mètres. « Je n’ai pas visé la tête, je voulais arrêter ce putain de scooter », qui « fonce sur nous », « met en péril notre capacité opérationnelle » et pourrait représenter « une menace », ajoute-t-il. « Je me protégeais et je protégeais les personnels du convoi à terre. »

    Le policier constate que le scooter continue sa route. Sur le moment, il n’aurait même pas été certain de toucher Mohamed Bendriss. Les images, qu’il a visionnées par la suite, le lui confirment : « On voit mon projectile sortir de la veste du scooter du conducteur. […] C’est ma balle de défense qui sort de sa veste et qui vient tomber par terre. » C’est probablement ce tir qui a atteint Mohamed Bendriss en pleine poitrine. 
    « J’ai toujours fait mon travail dans les règles de l’art ; je ne veux pas la mort des gens », a indiqué Alexandre P. aux enquêteurs. « J’ai jamais été aussi stressé alors que j’ai vécu l’Hyper Cacher. C’est le ciel qui me tombe sur la tête. » Contacté par Mediapart et Libération, son avocat, Dominique Mattei, n’a pas souhaité s’exprimer. 

    Un « bean bag » dans le phare 

    « Au départ, c’est le monsieur du fourgon qui était sur le toit qui tirait et ses collègues se sont mis à faire pareil », indique à l’IGPN une riveraine, témoin de la scène. Une fois le scooter hors de portée d’Alexandre P., d’autres fonctionnaires prennent effectivement le relais : ils sortent du deuxième véhicule de la colonne, un multivan Volkswagen.
    Les agents « E » et « F » (désignés ainsi dans l’enquête pour préserver leur #anonymat) tirent chacun un « bean bag » en direction du piéton, touché dans le dos, et parviennent à l’interpeller. Nabil B. sera condamné à quatre mois de prison ferme pour le vol de deux paires de Nike
    Au même moment, Jérémy P., le passager arrière gauche du multivan, se retrouve face au scooter. Celui-ci n’est plus qu’à une dizaine de mètres et fait « des embardées de droite à gauche ». Depuis leur fenêtre, des riveraines en déduisent que « le conducteur a dû être touché » et tente de garder l’équilibre. « Je me suis senti clairement en danger […] car je ne parvenais pas à comprendre ses intentions », avance de son côté Jérémy P. Il crie « stop » et met en joue Mohamed Bendriss avec son fusil « bean bag ». 
    « Le scooter n’a jamais ralenti, j’ai vu qu’il n’avait pas les mains sur les freins car il se rapprochait de plus en plus. À trois mètres de moi, je me suis rendu compte qu’il était trop près pour que je lui tire dessus, alors j’ai visé la calandre. […] Je l’ai impacté au phare, qui était éclairé et qui a explosé. Il a volé en mille morceaux, il y avait des éclats au sol. » 
    Quatre jours après les faits, c’est bien une munition « bean bag », fichée dans le phare du scooter, qui met les enquêteurs sur la piste du Raid . « Je suis certain d’avoir tiré en direction de son scooter et non de sa personne », répète Jérémy P. face à la juge d’instruction qui le met en examen. Son avocate, Chantal Fortuné, n’a pas souhaité s’exprimer. 
    Le troisième mis en examen soupçonné du tir à la cuisse 
    Malgré ce nouveau tir, le scooter continue à remonter le convoi. Grâce aux #vidéos récoltées au fil de l’enquête, l’IGPN établit qu’en quelques secondes, six détonations – des tirs de LBD ou de « bean bags » – retentissent. Ils ont du mal à attribuer la dernière, mais considèrent qu’il pourrait s’agir du tir de LBD qui a touché Mohamed Bendriss à la cuisse. 
    Un fonctionnaire fait office de suspect privilégié : Sylvain S., conducteur de la Laguna en troisième position dans le convoi. Sur certaines images, le canon de son LBD dépasse de sa fenêtre. « Je n’ai pas fait usage de cette arme », faute de « fenêtre de tir » satisfaisante, assure pourtant ce policier. « Le tir éventuel qui m’est reproché, c’est une blessure au niveau de la cuisse et c’est improbable au niveau de l’angle de tir », ajoute-t-il. Il est tout de même mis en examen. Son avocat, Nicolas Branthomme, n’a pas souhaité s’exprimer. 
    Comment comprendre que le Raid ait vu Mohamed Bendriss comme une menace ? Par des réflexes propres à son fonctionnement, mais inconnus du grand public. « Tout ce qui s’approchait de notre bulle de protection était considéré comme dangereux », résume l’un des opérateurs lors de sa garde à vue. « Il faut vraiment être stupide pour forcer un barrage de convoi du Raid », complète un autre, pour lequel « on ne pouvait pas se retrouver avec des émeutiers au milieu [du] convoi ». 
    Tous le répètent : au sein de leur colonne, deux médecins sont là pour prendre en charge d’éventuels blessés. Ils ont d’ailleurs porté assistance à Nabil B., le voleur de baskets. S’ils ne se sont pas inquiétés du sort de Mohamed Bendriss, c’est parce qu’il a continué sa route sans encombre et paraissait en bonne santé. 
     
    Vingt-six jours pour envoyer une vidéo

    Pour aboutir à la convocation de toute la colonne du Raid les 8 et 9 août, le placement en garde à vue de cinq fonctionnaires susceptibles d’avoir tiré et la mise en examen de trois d’entre eux, les juges d’instruction et les enquêteurs de l’IGPN ont mené un énorme travail de collecte et de recoupement d’indices pendant un mois. 
    La nuit des faits, le scooter de Mohamed Bendriss, abandonné devant chez sa mère et volé dans la foulée, est retrouvé par un équipage de la brigade anticriminalité (BAC) à 3 heures du matin. Coïncidence : deux des trois policiers qui contrôlent et interpellent le voleur seront mis en examen, trois semaines plus tard, pour des « violences aggravées » contre Hedi R. la même nuit.  
    À la recherche du deux-roues, l’IGPN apprend le 6 juillet qu’il est stocké dans un commissariat marseillais et découvre qu’un « bean bag » est resté encastré dans le phare. Comprenant alors que le Raid pourrait être impliqué, la « police des polices » envoie une série de réquisitions à cette unité pour connaître l’équipement de ses membres, la chronologie de ses interventions au cours de la nuit et la composition de ses équipages. Elle obtient des réponses rapides, mais pas toujours complètes. 

    En parallèle, la #géolocalisation téléphonique de Mohamed Bendriss montre qu’il se trouvait au 54, rue de Rome à 00 h 57, puis sur le cours Lieutaud une minute plus tard. L’IGPN lance aussitôt une enquête de voisinage, récupère les images issues de caméras de la ville et de plusieurs commerces. Certaines retracent le trajet de Mohamed Bendriss, d’autres la progression de la colonne du Raid dans le centre-ville. 
    Une vidéo amateur de 25 secondes, tournée par une habitante de la rue de Rome depuis sa fenêtre, s’avère même cruciale. Elle montre l’interaction entre les policiers et le scooter, et permet aux enquêteurs de distinguer, à l’oreille, six détonations. Auditionnée par l’IGPN, la vidéaste prête un étrange serment sur procès-verbal : « Conformément à vos instructions, je m’engage à ne pas diffuser ce film à qui que ce soit ou à le montrer. Je prends acte qu’en cas de diffusion je pourrais être poursuivie par la justice. J’ai compris ce que vous me dites, je m’engage à respecter la loi. » La loi n’impose pourtant rien de tel. 
    Le 11 juillet, au détour d’un courrier sur la géolocalisation de ses véhicules, la patronne locale du Raid mentionne l’existence d’une caméra sur le « petit véhicule de protection », filmant en continu la progression du convoi. « Je vous précise que je tiens à votre disposition les enregistrements », indique la commissaire divisionnaire qui coordonne les antennes de l’échelon zonal sud du Raid (Marseille, Nice, Montpellier et Toulouse). 
    Cette vidéo n’est finalement transmise à l’IGPN que le 28 juillet, deux jours après une nouvelle réquisition formelle et presque un mois après les faits. Ce sont pourtant ces images de bonne qualité qui montrent, le plus clairement, le tir probablement fatal à Mohamed Bendriss. 
    Comme l’écrit l’IGPN dans son exploitation, « alors que le scooter progresse face au convoi, la veste de Mohamed Bendriss fait un mouvement soudain et s’étire de manière brusque du côté gauche. Au même instant, un objet rond et noir de petite taille se détache de la silhouette de Mohamed Bendriss semblant provenir du pan de la veste qui vient de sursauter et chute au sol ». Cet objet, qui tombe sur les rails du tram, « ressemble au projectile tiré par un LBD ». 

    Un visionnage collectif
    Pourquoi le Raid n’a-t-il pas, de lui-même, transmis cette vidéo ? Si l’on se fie à leurs dépositions, les policiers de l’unité, dont le chef de l’antenne marseillaise et la coordinatrice zonale elle-même, craignaient pourtant depuis plusieurs semaines que le Raid soit impliqué dans le décès de Mohamed Bendriss. 
    Le 4 juillet, les premiers articles de presse évoquent le décès d’un conducteur de scooter touché par un tir de LBD à Marseille, dans des circonstances encore floues. A posteriori, les policiers du Raid expliquent s’être posé la question d’un lien avec leur intervention, mais l’adresse où a été retrouvé le jeune homme a tendance à les rassurer : ils ne se sont pas rendus cours Lieutaud. « L’adjoint au chef d’antenne a dit que nous n’étions pas concernés », affirme Alexandre P., pour qui « l’information était classée ». 
    Le doute persiste cependant, raconte leur chef d’antenne. « Des sources internes à la police semblent insister en pensant que le tir pourrait être celui d’une personne de la colonne. Avec mon adjoint, nous décidons par acquit de conscience de questionner les gars de manière globale. Certains nous font remonter qu’un scooter a traversé le dispositif au moment de l’interpellation rue de Rome et certains disaient qu’en traversant le dispositif, il a certainement essuyé des tirs. Ces déclarations ont motivé chez nous le souhait de visionner les images du PVP. » 
    Plusieurs opérateurs du Raid confirment qu’un débriefing ou une « réunion de crise » a eu lieu pour clarifier la position de chacun, regarder ensemble les images et identifier les potentiels tireurs. Si aucun ne donne la date de ce visionnage collectif, la coordinatrice zonale la situe « avant » la réception des réquisitions de l’IGPN, c’est-à-dire entre le 4 et le 6 juillet. Alexandre P., lui, estime qu’elle a eu lieu « suite aux réquisitions IGPN ». « Ça fait à peu près un mois qu’on sait qu’on est reliés à la mort de ce jeune homme », résume-t-il. 
    Selon ses dires, la coordinatrice a déjà connaissance des images lorsqu’elle rédige sa première réponse à l’IGPN , le 6 juillet, dans laquelle elle relate les événements marquants de la nuit du 1er au 2. Et semble s’appuyer dessus quand elle décrit, avec précision, « l’interpellation d’un individu sortant du magasin Foot Locker un sac à la main ». 
    « Un individu en scooter venait à sa rencontre. Les deux individus prenaient la fuite, le scooter forçait le passage de la colonne du Raid et parvenait à s’enfuir malgré l’usage de MFI [moyens de force intermédiaires – ndlr]. L’auteur du vol était interpellé rue de la Palud, en état d’ébriété et impacté par un tir de MFI. » Pour autant, dans son courrier, la #commissaire_divisionnaire ne propose pas à l’#IGPN de lui transmettre la vidéo du PVP. 
    D’après elle, plusieurs agents « se sont signalés rapidement » à leur hiérarchie, « beaucoup pensant avoir tiré, sans certitude cependant ». Mobilisés plusieurs nuits de suite sur les émeutes à Marseille, ils ne se souviennent pas de tous leurs faits et gestes et confondent parfois les scènes entre elles. Le 26 juillet, le Raid transmet finalement à l’IGPN une liste de cinq fonctionnaires « se trouvant sur le flanc gauche » du convoi – donc « susceptibles d’avoir utilisé » leurs armes contre Mohamed Bendriss. Au moment de se rendre à la convocation de l’IGPN, ils ont eu plus d’un mois pour préparer leurs réponses.

  • Émeutes : comment la police traque les délinquants qui avaient échappé aux arrestations


    Des policiers poursuivent des manifestants, le 1er juillet, sur les Champs-Élysées, lors des émeutes qui ont suivi la mort de Nahel, le 27 juin à Nanterre. NACHO DOCE/REUTERS

    ENQUÊTE - Les enquêteurs de la police ont effectué un travail colossal, tout au long du mois de juillet, pour retrouver 314 délinquants qui avaient échappé aux arrestations pendant les nuits de violence.

    Tandis que la France chavirait soudain dans le chaos lors d’émeutes consécutives à la mort de Nahel, tué le 27 juin dernier après un refus d’obtempérer à Nanterre (Hauts-de-Seine), les forces de l’ordre ont dû encaisser un double choc. D’abord celui, filmé heure par heure, d’un tsunami de violences qui s’est soldé par un bilan de 3800 interpellations, commises en temps réel et en flagrant délit, sur l’ensemble du territoire. Puis un second, beaucoup moins connu, d’une #traque_judiciaire hors norme dont Le Figaro est en mesure de révéler le détail. Selon un bilan qui s’arrête au 31 juillet dernier, pas moins de 314 émeutiers, casseurs et incendiaires supplémentaires ont été interpellés par des services d’investigations de la sécurité publique et de la police judiciaire. À elle seule, cette dernière s’est vu confier le soin de mener un peu plus de 170 #enquêtes particulièrement sensibles, portant sur les actes les plus graves. « Dès les premiers jours, l’autorité judiciaire a ainsi saisi la PJ sur des événements emblématiques, qu’il s’agisse de destructions et d’incendies de mairies, d’attaques de locaux de police ou de pillages importants, voire de menaces ou d’agressions sur des élus, confie le contrôleur général Frédéric Laissy, chef du service de la communication de la police nationale. Alors même que les dispositifs d’ordre public étaient encore maintenus à leur maximum, les premières #interpellations étaient effectuées à domicile, souvent avec le concours de la BRI ou du Raid. »
    Ainsi, dès le 5 juillet, la sûreté urbaine de Lille interpellait avec l’appui du Raid une demi-douzaine de voyous impliqués dans l’attaque, menée lors de la deuxième soirée des émeutes, de l’hôtel de police municipal abritant un centre de supervision. Les assaillants ont notamment pu être confondus grâce à leur #ADN retrouvé sur des cocktails Molotov. Cinq d’entre eux ont été placés en détention provisoire dans l’attente de leur jugement d’ici à la fin du mois, tandis qu’un de leurs complices est activement recherché. Au même moment, les policiers du Rhône ont appréhendé, au terme d’une enquête éclair, six des délinquants à l’origine de l’incendie volontaire d’un immeuble d’habitation à Saint-Fons, le 2 juillet dernier. Le feu avait été mis dans le local à poubelles avant de se propager aux étages et de provoquer d’importants dégâts dans le supermarché attenant. Là, les limiers de la sûreté ont obtenu des preuves par l’image : l’exploitation de la vidéoprotection d’un commerce voisin a permis d’identifier un premier suspect en raison d’une tenue caractéristique correspondant à celle d’une personne contrôlée peu auparavant par la police municipale. Là encore, les incendiaires présumés ont été placés derrière les barreaux en attendant d’être jugés, tandis que 62 personnes évacuées espèrent toujours être relogées.

    À travers le pays et à la faveur des investigations, les unités spécialisées d’intervention ont investi à l’heure du laitier des dizaines de domiciles, alors que le soufflé des violences destructrices n’était pas retombé. L’engagement hors norme des policiers en civil et les opérations ciblées ont sans nul doute douché les ardeurs au cœur des quartiers, battant en brèche tout sentiment d’impunité et participant de facto à une stratégie globale de retour à l’ordre. « Si le temps judiciaire est parfois considéré comme plus long, il faut bien constater que la mobilisation des services d’enquête a joué un rôle à la fois dans la dissuasion au moment des #violences_urbaines et dans la dissuasion à plus long terme, avec des interpellations et des incarcérations décidées par les tribunaux qui ont pu poursuivre sur la base d’investigations », assure-t-on à la Direction générale de la police nationale. Sur le terrain, face à la déferlante, l’heure a été à l’union sacrée. La PJ, fortement mise à contribution, a ainsi bénéficié de l’énorme investissement des petits groupes d’enquêtes dans les commissariats des villes moyennes ayant elles aussi payé un lourd tribut en termes de dégâts. Ainsi, à Niort (Deux-Sèvres), les policiers locaux ont multiplié les enquêtes de voisinages et passé au crible des bandes #vidéo avant de lancer un coup de filet.
    Entre les 3 et 12 juillet, ils ont intercepté six membres d’une horde de jeunes #émeutiers qui avaient mis le centre-ville à sac, tendant des embuscades à la #police, pillant des #commerces et brûlant des véhicules dans la nuit du 30 juin au 1er juillet.
    https://www.lefigaro.fr/actualite-france/emeutes-comment-la-police-traque-les-delinquants-qui-avaient-echappe-aux-ar
    https://justpaste.it/amtj3

    #révolte #émeutes #police_judiciaire #justice #prison

    • Avec méthode, les experts ont en effet passé au crible des pierres, des projectiles divers, des armes de fortune retrouvées sur les champs de bataille, des bouteilles utilisées pour les liquides incendiaires ou encore des traces de sang. Même les briquets ou les étuis de mortiers abandonnés sur place ont été soumis aux analyses. Selon nos informations, le Service national de #police_scientifique, basé à Écully et qui dispose de cinq laboratoires, a été saisi de 317 dossiers, représentant près de 1800 scellés pour les affaires les plus importantes et sensibles.

      [...]

      Outre l’analyse des indices, des réseaux sociaux et l’examen des vidéos - même si un millier de caméras ont été détruites lors des émeutes -, les enquêteurs se sont appuyés sur la connaissance de la population locale par les policiers de quartier, ainsi que sur la #géolocalisation. À ce titre, un téléphone portable dérobé dans l’habitacle d’un camion de pompiers volé à Vernon (Eure), au premier soir des émeutes, a permis de retrouver la trace d’un délinquant puis de ses quatre complices. Le profil des interpellés, qui devrait faire l’objet d’une analyse plus poussée, laisse apparaître, comme l’a révélé Gérald Darmanin le 19 juillet devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, que la moyenne d’âge est entre 17 et 18 ans. Les plus jeunes sont âgés de 12 ans et les deux tiers n’avaient jusqu’ici pas de casier.

      [...]

      Les services de #renseignements sont invités à « renforcer, dès à présent, leurs dispositifs d’anticipation de ce type d’événement ». L’idée est de prévenir tout débordement à l’approche de la Coupe du monde de rugby et des JO de Paris,

  • Face aux émeutes, la justice a dû s’adapter dans l’urgence pour répondre à l’afflux des dossiers à traiter
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/07/04/face-aux-emeutes-la-justice-a-du-s-adapter-dans-l-urgence-pour-repondre-a-l-

    Selon la Chancellerie, il y a déjà eu 380 incarcérations à la suite des affrontements de ces derniers jours. Les tribunaux ont multiplié les comparutions immédiates, y compris pendant le week-end.
    Par Abel Mestre

    L’équation à résoudre est des plus complexes. Comment rendre la #justice normalement dans une situation anormale ? (...) Dupond-Moretti, ministre de la justice, a publié une circulaire vendredi 30 juin demandant une réponse pénale « ferme, rapide et systématique ». Il semble avoir été entendu : ce mardi soir, la Chancellerie avançait le nombre de « 380 incarcérations » à la suite des émeutes. Au-delà de cette dimension, M. Dupond-Moretti attendait aussi des juridictions une organisation optimale pour faire face à un surcroît d’activité jamais vu depuis plusieurs années, notamment une bonne articulation de l’action avec les préfectures.

    Sans attendre les consignes de leur ministre, les magistrats ont pris les choses en main pour absorber la surcharge de travail. La cour d’appel de Versailles était la première concernée. C’est dans son ressort que la mort de Nahel M. est survenue. Les affrontements ont été quasi immédiats et très violents. Le tribunal d’Asnières a notamment été incendié. Il a fallu relocaliser les activités en urgence à Colombes. Ce qui fut fait en très peu de temps. « Les juridictions ont fait face, elles se sont mobilisées dès le premier jour. Nous avons mis en place plusieurs niveaux d’opérations : le transfert du tribunal de proximité d’Asnières à Colombes, la mise en place d’une cellule d’aide psychologique, mais aussi le renforcement de la sécurité des bâtiments dans les Hauts-de-Seine, détaille Jean-François Beynel, premier président près la cour d’appel de Versailles. On a aussi mis en place une cellule de crise pilotant les opérations qui servaient également à la collecte et à la remontée des informations. »

    A quelques kilomètres de là, au tribunal de Créteil, on a aussi très vite pris la mesure de la situation. « Dès les premières heures, on a vu que c’était un phénomène grave, assure Stéphane Hardouin, procureur de Créteil. Tout le monde s’est très vite porté volontaire, on a mis en place un système de brigades. En une heure, treize magistrats, soit un tiers du parquet, répondaient présents. » Eric Mathais, procureur de Bobigny, évoque lui aussi une « très grande solidarité » du monde de la justice avec une scène quasiment identique : « Ce week-end, on a fait un appel à candidatures et on a presque doublé le nombre de magistrats mobilisés. » Marc Cimamonti, procureur général près la cour d’appel de Versailles, explique : « Il y a eu une priorisation du service pénal d’urgence et un renfort des plateaux de permanence du parquet. Le ressort est composé de trois grands parquets et d’un plus petit. Ils ont fait face avec leurs effectifs en se mobilisant fortement. » Résultat : aucune de ces juridictions n’a eu à faire appel à des renforts extérieurs, tout s’est passé par des mouvements internes et ponctuels.
    Lire aussi le récit : Article réservé à nos abonnés Pillages, incendies, agressions : le bilan effarant des jours et des nuits d’émeutes en France

    « S’adapter de manière exceptionnelle »

    Le président du tribunal judiciaire de Bobigny, Peimane Ghaleh-Marzban, résume les deux impératifs à remplir pour la justice : « La capacité à adapter le fonctionnement de la juridiction à la surcharge d’activité et s’adapter de manière exceptionnelle tout en assurant le fonctionnement normal de l’institution. » Autre défi : faire face à un nombre très important de procédures qui ne doivent pas être bâclées si l’on veut qu’elles aboutissent. C’est là que le parquet joue un rôle de filtre. « J’ai donné des instructions très claires allant dans le sens d’une ligne de fermeté mais il faut aussi toujours rappeler qu’il faut contrôler la régularité des procédures et voir si les charges sont suffisantes », explique encore M. Hardouin. Un souci partagé par ses homologues de la cour d’appel de Versailles et du tribunal de Bobigny.

    Ainsi, fait rarissime, des audiences en #comparution_immédiates ont eu lieu ce week-end dans certains tribunaux comme à Nanterre ou Bobigny. Dans d’autres, c’est le cas de Créteil, trois juges de la liberté et de la détention (JLD) ont siégé – dont le président du tribunal Eric Bienko Vel Bienek – pour décider de la mise en détention ou le placement sous contrôle judiciaire des personnes déferrées, dans l’attente de leur jugement en comparution immédiate à partir du 3 juillet. Dans le Val-de-Marne, ces audiences sont d’ailleurs doublées. La réponse judiciaire par la voie des comparutions immédiates ne satisfait pas l’ensemble du monde judiciaire, à commencer par les avocats des prévenus qui, souvent, dénoncent une forme de justice expéditive et d’une particulière sévérité.

    Pour les traiter le plus rapidement possible, les différents tribunaux ont dû « prioriser » les dossiers. M. Beynel confirme : « On a décalé le boulot du quotidien. A titre d’exemple, à Nanterre, on a mobilisé pour le week-end neuf magistrats du siège, neuf du parquet et neuf fonctionnaires. On a réorienté les audiences pour nous concentrer sur les comparutions immédiates concernant les #violences_urbaines. »

    [...]

    Ces jours de violences ont, en tout cas, été une sorte de test grandeur nature à un an des Jeux olympiques qui auront lieu à Paris à l’été 2024. Et les résultats, à en croire les magistrats, sont plutôt rassurants : « On se dit que cela va nous aider dans la façon de nous organiser, espère Eric Mathais. Par exemple quelle configuration adopter en cas de surcroît d’activité non prévu, comment organiser des audiences le week-end, comment renforcer les plateaux de permanence… » Stéphane Hardouin résume : « La clé de la réussite, c’est d’être capables de s’organiser en quelques heures. »

    Marc Cimamonti estime quant à lui qu’« un bilan est nécessaire pour nous permettre de tirer tous les enseignements et affiner les dispositifs de crise spécialement dans le cadre de la préparation des #JO 2024 ». Il conclut : « Il faut montrer que la justice peut continuer à avoir lieu normalement, même dans des circonstances exceptionnelles. »

  • #Nahel : ces #milices d’#extrême_droite qui se substituent à la #police | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/030723/nahel-ces-milices-d-extreme-droite-qui-se-substituent-la-police?userid=eb4
    #revoltes
    #violences_urbaines

    Un autre marche, mains attachées dans le dos et tête maintenue baissée, entouré par ceux qui l’ont « interpellé ». Plusieurs témoins rapportent à Mediapart des tabassages, notamment d’une personne qui tentait de mettre le feu à une poubelle. Plus gênant, une partie de ces faits se seraient déroulés avec la complicité de la police. Un employé d’un magasin de bricolage confie en effet avoir vu un équipage de la #BAC, dans une Skoda noire, « faire le lien entre la milice et le reste des #effectifs_de_la_police » lors de trois interpellations sauvages auxquelles il dit avoir assisté. « On les a également vus courir à côté des #policiers en tenue… », poursuit-il.

    « On a laissé faire en début de soirée, parce que ça nous a soulagés, confie un policier au Télégramme. Mais en fin de “séquence”, certains d’entre nous ont finalement décidé de les disperser, se rendant compte qu’ils y allaient un peu fort. »

    Trois autoproclamés « #anticasseurs » ont accordé une interview à la radio locale Jaime, dans laquelle ils n’ont aucune difficulté à reconnaître leur bonne entente avec les forces de l’ordre. « On se concertait avec la BAC qui nous disait où ne pas aller. Quant aux émeutiers, dès qu’ils nous voyaient, ils couraient. On courait aussi. Si on les attrapait, on leur mettait des Serflex aux mains. » Les #Serflex sont ces colliers de serrage qui font office de menottes de fortune. Leur utilisation contredit les propos tenus à la #radio, lorsqu’ils expliquent que leur action était improvisée.

    Qui sont les membres de cette milice soi-disant « spontanée » ?

    Les trois « anticasseurs » interviewés par la radio nient appartenir à un groupuscule d’extrême droite. Même si leur rhétorique, sommaire, reprend ses codes. « Non, nous sommes juste des personnes qui veulent sauver la France », résume une jeune femme. « On est des civils qui veulent sauver la France, on est des patriotes, complète un jeune homme. Je ne voulais pas voir ma ville brûler, c’est tout. Cela aurait pu être des “#extrême droite”, des “extrême gauche”, des centristes, des écologistes, j’aurais agi pareil. »

    Voir le Rassemblement national au pouvoir les effrayerait-il ? leur demande le journaliste de Jaime Radio. Réponse : « Est-ce que c’est une bonne ou une mauvaise chose, on ne peut pas savoir tant que ça n’arrive pas… »

    Des militants de Reconquête, le parti d’Éric Zemmour, ou du syndicat d’extrême droite La #Cocarde étudiante ont été vus cette nuit-là à Lorient au moment de l’intervention de la milice. « Mais c’était trop bien rodé, l’organisation était millimétrée. Jamais les partisans locaux de Reconquête ne seraient capables de cela », veut croire l’employé de magasin de bricolage précité.

    Au sein d’une ville connue pour abriter 4 000 militaires de la marine nationale, l’hypothèse d’une participation, au sein de la milice, de fusiliers marins ou de commandos marine, des anciens ou d’active, revient avec insistance. Ceux qui les ont vus agir en sont convaincus. Lors de l’entretien accordé à la radio locale, l’un des « anticasseurs » répète à plusieurs reprises « en tant que civil », une expression plutôt propre aux #militaires. Mais à ce stade, Mediapart n’a pas pu confirmer leur participation.

    • Nahel : l’armée ouvre une enquête sur la milice de Lorient
      https://www.mediapart.fr/journal/france/040723/nahel-l-armee-ouvre-une-enquete-sur-la-milice-de-lorient

      Ces derniers jours, les forums de discussion militaires et paramilitaires sur les réseaux sociaux évoquaient les événements. Lundi 3 juillet au soir, un certain « Coyote », affichant le logo des fusiliers marins augmenté d’un coyote en tenue militaire et armé, avait publié un message d’alerte : « À tous, urgent. Il semblerait que la DRM [Direction du renseignement militaire, c’est-à-dire le service de renseignement des armées – ndlr] se soit saisie de l’affaire de l’autre soir à Lorient pendant les émeutes. J’invite chacun d’entre vous qui ont des informations sur l’événement et qui en ont parlé à leurs potes de supprimer tout ça et ceux y ayant participé de serrer les fesses. »

      [...]

      Lundi soir, les démentis du maire de Lorient et de la responsable policière – qui n’ont pas répondu à nos sollicitations – ont été encore plus spectaculairement contredits par des éléments recueillis par Ouest-France.
      Le quotidien régional a publié le témoignage d’un des anticasseurs qui affirme : « Certains policiers nous ont remerciés et ont accepté notre aide, d’autres préféraient nous mettre à distance. Je comprends que ça puisse créer un malaise. Comme le maire de Lorient qui a dit que notre présence n’était qu’une rumeur : n’importe quoi ! »
      L’homme de 25 ans se présente comme un militaire ayant déjà à son actif plusieurs missions à l’étranger dans des zones de conflit. Il détaille avoir agi avec une trentaine d’autres « collègues » militaires, âgés « entre 20 et 25 ans », « mais aussi de quelques civils ». Il évoque « des fusiliers, peut-être des commandos. Il y avait différentes unités ».

      [... Enfin, une réalité statistique peut s’avérer gênante pour les garants du maintien de l’ordre. Dans la nuit de vendredi à samedi, les émeutes à Lorient ont donné lieu à quatre interpellations, comme l’a confirmé à Mediapart le procureur de la République. Or, Ouest-France compte, d’après le témoignage du milicien, quatre personnes livrées par les anticasseurs à la police. Lundi, un salarié d’un magasin de bricolage racontait à Mediapart avoir assisté à « au moins » trois interpellations sauvages .
      Faut-il en déduire que les seuls à être parvenus à appréhender des émeutiers à Lorient vendredi soir étaient des miliciens ?

      Matthieu Suc et Marine Turchi ne semblent guère soucieux du sort de leur source...

      #militaires

    • Chambéry : un homme reçoit un coup de marteau à la tête en marge d’un défilé de l’ultradroite
      https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/chambery-un-homme-recoit-un-coup-de-marteau-a-la-tete-en-marge-d-un-defil

      À Chambéry, un groupe d’une cinquantaine d’individus d’ultradroite s’est rassemblé dans le centre-ville ce lundi soir, dans le secteur du Carré Curial. Des bagarres ont ensuite éclaté et un homme a été gravement blessé à la tête après avoir reçu un coup de marteau.

    • Nahel : l’armée ouvre une enquête sur la milice de Lorient | Mediapart
      https://www.mediapart.fr/journal/france/040723/nahel-l-armee-ouvre-une-enquete-sur-la-milice-de-lorient

      L’article 73 du Code de procédure pénale prévoit les interpellations par de simples citoyens : « Dans les cas de crime flagrant ou de délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement, toute personne a qualité pour en appréhender l’auteur et le conduire devant l’officier de police judiciaire le plus proche. »

      Mais en l’état, plusieurs éléments interrogent. D’abord, le fait que les membres de ce groupe se soient dissimulés sous des cagoules et des cache-nez pour interpeller d’autres citoyens. Ensuite, le caractère musclé de leur intervention, qu’a reconnu le milicien interviewé par Ouest-France : « Ça aurait pu être moins violent. Quand certains allaient un peu fort, on leur disait de se calmer. »

      Enfin, une réalité statistique peut s’avérer gênante pour les garants du maintien de l’ordre. Dans la nuit de vendredi à samedi, les émeutes à Lorient ont donné lieu à quatre interpellations, comme l’a confirmé à Mediapart le procureur de la République. Or, Ouest-France compte, d’après le témoignage du milicien, quatre personnes livrées par les anticasseurs à la police. Lundi, un salarié d’un magasin de bricolage racontait à Mediapart avoir assisté à « au moins » trois interpellations sauvages.

      Faut-il en déduire que les seuls à être parvenus à appréhender des émeutiers à Lorient vendredi soir étaient des miliciens ? 

      Dans Ouest-France, le jeune homme interviewé assume en tout cas son action : « Finalement, qu’importe qu’on soit “mili”, pharmacien ou vendeur de vélos, l’essentiel, c’est ce qu’on a fait », explique-t-il. Avant de conclure : « On est fiers de ce qu’on a fait et on recommencera si le besoin se présente. Quand tu veux tout brûler, tu dois t’attendre à des réponses. »

    • Je me réjouis que des jeunes militaires de #Lorient aient apporté spontanément leur concours à la #Police dans la lutte contre les émeutiers. Ils ont ainsi concouru à éviter le pire et à protéger les personnes et les biens.

      https://twitter.com/marclefur/status/1676513406298251264

      Marc LE FUR, Député des Côtes d’Armor, Conseiller régional de Bretagne. Whitey né à Dakar, haut fonctionnaire, LR.
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Marc_Le_Fur

  • Mort de #Nahel : « Ils sont rattrapés par le réel »

    #Ali_Rabeh, maire de #Trappes, et #Amal_Bentounsi, fondatrice du collectif Urgence, notre police assassine, reviennent dans « À l’air libre » sur la mort de Nahel, 17 ans, tué par un policier à Nanterre, et les révoltes qui ont suivi dans de nombreuses villes de France.

    https://www.youtube.com/watch?v=euw03owAwU8&embeds_widget_referrer=https%3A%2F%2Fwww.mediapart.fr%2

    https://www.mediapart.fr/journal/france/290623/mort-de-nahel-ils-sont-rattrapes-par-le-reel
    #violences_policières #banlieues #quartiers_populaires #naïveté

    • « #Emmanuel_Macron ne comprend rien aux banlieues »

      Ali Rabeh, maire de Trappes (Yvelines), a participé à l’Élysée à la rencontre entre le chef de l’État et quelque 200 maires, le 4 juillet, pour évoquer la révolte des quartiers populaires. Il dénonce sans langue de bois l’incapacité du Président à comprendre ce qui se joue dans les banlieues et son manque de perspectives pour l’avenir.

      Vous avez été reçu mardi 4 juillet à l’Élysée par le président de la République avec des dizaines d’autres maires. Comment ça s’est passé ?

      Ali Rabeh : Le Président a fait une introduction très courte pour mettre en scène sa volonté de nous écouter, de nous câliner à court terme, en nous disant à quel point on était formidable. Puis ça a viré à la #thérapie_de_groupe. On se serait cru aux #alcooliques_anonymes. Tout le monde était là à demander son petit bout de subvention, à se plaindre de la suppression de la taxe d’habitation, de la taille des LBD pour la police municipale ou de l’absence du droit de fouiller les coffres de voiture… Chacun a vidé son sac mais, à part ça et nous proposer l’accélération de la prise en charge par les #assurances, c’est le néant. La question primordiale pour moi n’est pas de savoir si on va pouvoir réinstaller des caméras de surveillances en urgence, ou comment réparer quelques mètres de voiries ou des bâtiments incendiés. Si c’est cela, on prend rendez-vous avec le cabinet du ministre de la Ville ou celui des Collectivités territoriales. Mais ce n’est pas du niveau présidentiel.

      Quand on parle avec le président de la nation, c’est pour cerner les #causes_structurelles du problème et fixer un cap afin d’éviter que ça ne se reproduise. Et là-dessus on n’a eu #aucune_réponse, ni #aucune_méthode. Il nous a dit qu’il avait besoin d’y réfléchir cet été. En fait, Emmanuel Macron voulait réunir une assemblée déstructurée, sans discours commun. Il a préféré ça au front commun de l’association #Ville_&_Banlieue réunissant des maires de gauche et de droite qui structurent ensemble un discours et des #revendications. Mais le Président refuse de travailler avec ces maires unis. Il préfère 200 maires en mode grand débat qui va dans tous les sens, parce que ça lui donne le beau rôle. En réalité, on affaire à des #amateurs qui improvisent. Globalement ce n’était pas à la hauteur.

      Le Président n’a donc rien évoqué, par exemple, de l’#appel_de_Grigny ou des nombreuses #propositions déjà faites par le passé sur les problématiques liées aux #banlieues et qui ne datent quand même pas d’hier ?

      Non. Il a fait du « Macron » : il a repris quelques éléments de ce qu’on racontait et il en fait un discours général. Il avait besoin d‘afficher qu’il avait les maires autour de lui, il nous a réunis en urgence pendant que les cendres sont brûlantes, ce qu’il a refusé de faire avant que ça n’explose. Et ce, malgré nos supplications. Pendant des mois, l’association Ville & Banlieue a harcelé le cabinet de Mme Borne pour que soit convoqué un Conseil interministériel des villes conformément à ce qu’avait promis le Président. Cela ne s’est jamais fait. Macron n’a pas tenu sa parole. On a eu du #mépris, de l’#arrogance et de l’#ignorance. Il n’a pas écouté les nombreuses #alertes des maires de banlieue parce qu’il pensait que nous étions des cassandres, des pleureuses qui réclament de l’argent. C’est sa vision des territoires. Elle rappelle celle qu’il a des chômeurs vus comme des gens qui ne veulent pas travailler alors qu’il suffirait de traverser la route. Emmanuel Macron n’a donc pas vu venir l’explosion. Fondamentalement, il ne comprend rien aux banlieues. Il ne comprend rien à ce qu’il s’est passé ces derniers jours.

      A-t-il au moins évoqué le #plan_Borloo qu’il a balayé d’un revers de main en 2018 ?

      Je m’attendais justement à ce qu’il annonce quelque chose de cet acabit. Il ne l’a pas fait. Il a fait un petit mea-culpa en disant qu’à l’époque du rapport Borloo, sur la forme il n’avait pas été adroit mais il affirme que la plupart des mesures sont mises en œuvre. Il prétend, tout content de lui, qu’il y a plus de milliards aujourd’hui qu’hier et que le plan Borloo est appliqué sans le dire. C’était #grotesque. J’aurais aimé qu’il nous annonce une reprise de la #méthode_Borloo : on fait travailler ensemble les centaines de maires et d’associatifs. On se donne six mois pour construire des propositions actualisées par rapport au rapport Borloo et s’imposer une méthode. Lui a dit : « J’ai besoin de l’été pour réfléchir. » Mais quelle est notre place là-dedans ?

      Dans ses prises de paroles publiques, le Président a fustigé la #responsabilité des #parents qui seraient incapables de tenir leurs enfants. Qu’en pensez-vous ?

      Qu’il faut commencer par faire respecter les mesures éducatives prescrites par les tribunaux. Pour ces mamans qui n’arrivent pas à gérer leurs enfants dont certains déconnent, les magistrats imposent des éducateurs spécialisés chargés de les accompagner dans leur #fonction_parentale. Or, ces mesures ne sont pas appliquées faute de moyens. C’est facile après de les accabler et de vouloir les taper au porte-monnaie mais commençons par mettre les moyens pour soutenir et accompagner les #familles_monoparentales en difficulté.

      Le deuxième élément avancé ce sont les #réseaux_sociaux

      C’est du niveau café du commerce. C’est ce qu’on entend au comptoir : « Faut que les parents s’occupent de leur môme, faut les taper aux allocs. Le problème ce sont les réseaux sociaux ou les jeux vidéo… » Quand on connaît la réalité c’est un peu court comme réponse. On peut choisir d’aller à la simplicité ou on peut se poser la question fondamentale des #ghettos de pauvres et de riches. Pour moi l’enjeu c’est la #mixité_sociale : comment les quartiers « politique de la ville » restent des quartiers « #politique_de_la_ville » trente ans après. Or personne ne veut vraiment l’aborder car c’est la montagne à gravir.

      Vous avez abordé cette question lors de votre intervention à l’Élysée. Comment le Président a-t-il réagi ?

      Il a semblé réceptif quand j’ai évoqué les ghettos de riches et les #maires_délinquants qui, depuis vingt-deux ans, ne respectent pas la #loi_SRU. Il a improvisé une réponse en évoquant le fait que dans le cadre des J.O, l’État prenait la main sur les permis de construire en décrétant des opérations d’intérêt national, un moyen de déroger au droit classique de l’#urbanisme. Il s’est demandé pourquoi ne pas l’envisager pour les #logements_sociaux. S’il le fait, j’applaudis des deux mains. Ça serait courageux. Mais je pense qu’il a complètement improvisé cette réponse.

      En ce moment, on assiste à une #répression_judiciaire extrêmement ferme : de nombreux jeunes sans casier judiciaire sont condamnés à des peines de prison ferme. Est-ce de nature à calmer les choses, à envoyer un message fort ?

      Non. On l’a toujours fait. À chaque émeute, on a utilisé la matraque. Pareil pour les gilets jaunes. Pensez-vous que la #colère est moins forte et que cela nous prémunit pour demain ? Pas du tout. Que les peines soient sévères pour des gens qui ont mis le feu pourquoi pas, mais ça ne retiendra le bras d’aucun émeutier dans les années qui viennent.

      Vous avez été dans les rues de Trappes pour calmer les jeunes. Qu’est-ce qui vous a marqué ?

      La rupture avec les institutions est vertigineuse. Elle va au-delà de ce que j’imaginais. J’ai vu dans les yeux des jeunes une véritable #haine de la police qui m’a glacé le sang. Certains étaient déterminés à en découdre. Un jeune homme de 16 ans m’a dit « Ce soir on va régler les comptes », comme s’il attendait ce moment depuis longtemps. Il m’a raconté des séances d’#humiliation et de #violence qu’il dit avoir subies il y a quelques mois de la part d’un équipage de police à #Trappes. Beaucoup m’ont dit : « Ça aurait pu être nous à la place de Nahel : on connaît des policiers qui auraient pu nous faire ça. » J’ai tenté de leur dire qu’il fallait laisser la justice faire son travail. Leur réponse a été sans appel : « Jamais ça ne marchera ! Il va ressortir libre comme tous ceux qui nous ont mis la misère. » Ils disent la même chose de l’#impunité des politiques comme Nicolas Sarkozy qui, pour eux, n’ira jamais en prison malgré ses nombreuses condamnations. Qui peut leur donner tort ?

      Il se développe aussi un discours politique extrêmement virulent sur le lien de ces #violences_urbaines avec les origines supposément immigrées des jeunes émeutiers. Qu’en pensez-vous ?

      Quand Robert Ménard a frontalement dit, dans cette réunion des maires, que le problème provenait de l’#immigration, le président de la République n’a pas tiqué. Une partie de la salle, principalement des maires LR, a même applaudi des deux mains. Il y a un #glissement_identitaire très inquiétant. Culturellement, l’extrême droite a contaminé la droite qui se lâche désormais sur ces sujets. Ces situations demandent de raisonner pour aller chercher les causes réelles et profondes du malaise comme l’absence d’#équité, la concentration d’#inégalités, d’#injustices, de #frustrations et d’#échecs. C’est beaucoup plus simple de s’intéresser à la pigmentation de la peau ou d’expliquer que ce sont des musulmans ou des Africains violents par nature ou mal élevés.

      Comment ces discours sont-ils perçus par les habitants de Trappes ?

      Comme la confirmation de ce qu’ils pensent déjà : la société française les déteste. Dans les médias, matin, midi et soir, ils subissent continuellement des #discours_haineux et stigmatisant de gens comme Éric Zemmour, Marine le Pen, Éric Ciotti, etc. qui insultent leurs parents et eux-mêmes au regard de leur couleur de peau, leur religion ou leur statut de jeune de banlieue. Ils ont le sentiment d’être les #rebuts_de_la_nation. Quotidiennement, ils ont aussi affaire à une #police qui malheureusement contient en son sein des éléments racistes qui l’expriment sur la voie publique dans l’exercice de leur métier. Ça infuse. Les jeunes ne sont pas surpris de l’interprétation qui est faite des émeutes. En réalité ils l’écoutent très peu, parce qu’ils ont l’habitude d’être insultés.

      D’après vous, que faut-il faire dans l’#urgence ?

      Il faut arrêter de réfléchir dans l’urgence. Il faut s’engager sur une politique qui change les choses sur dix à quinze ans. C’est possible. On peut desserrer l’étau qui pèse sur les quartiers en construisant des logements sociaux dans les villes qui en ont moins. Moi, je ne demande pas plus de subventions. Je veux que dans quinze à vingt ans, on me retire les subventions « politique de la ville » parce que je n’en aurai plus besoin. C’est l’ambition qu’on doit porter.

      Et sur le court terme ?

      Il faut envoyer des signaux. Revenir sur la loi 2017 car cela protégera les policiers qui arrêteront de faire usage de leurs armes à tort et à travers, s’exposant ainsi à des plaintes pour homicide volontaire, et cela protégera les jeunes qui n’auront plus peur de se faire tirer comme des lapins. Il faut aussi engager un grand #dialogue entre la police et les jeunes. On l’a amorcé à Trappes avec le commissaire et ça produit des résultats. Le commissaire a fait l’effort de venir écouter des jeunes hermétiquement hostiles à la police, tout en rappelant le cadre et la règle, la logique des forces de l’ordre. C’était très riche. Quelques semaines plus tard le commissaire m’a dit que ses équipes avaient réussi une intervention dans le quartier parce que ces jeunes ont calmé le jeu en disant « on le connaît, il nous respecte ». Il faut lancer un #cercle_vertueux de #dialogue_police-population, et #jeunesse en particulier, dans les mois qui viennent. La police doit reprendre l’habitude de parler avec sa population et être acceptée par elle. Mettons la police autour de la table avec les jeunes, les parents du quartier, des éducateurs, les élus locaux pour parler paisiblement du ressenti des uns et des autres. Il peut y avoir des signaux constructifs de cet ordre-là. Or là on est dans la culpabilisation des parents. Ça ne va pas dans le bon sens.

      https://www.politis.fr/articles/2023/07/emmanuel-macron-ne-comprend-rien-aux-banlieues
      #Macron #ignorance

    • Entre Emmanuel Macron et les banlieues, le #rendez-vous_manqué

      En 2017, le volontarisme du chef de l’Etat avait fait naître des #espoirs dans les #quartiers_populaires. Malgré la relance de la #rénovation_urbaine, le rejet du plan Borloo comme son discours sur le #séparatisme l’ont peu à peu coupé des habitants.

      Il n’y a « pas de solution miracle ». Surtout pas « avec plus d’argent », a prévenu le chef de l’Etat devant quelque 250 maires réunis à l’Elysée, mardi 4 juillet, sur l’air du « trop, c’est trop » : « La santé est gratuite, l’école est gratuite, et on a parfois le sentiment que ce n’est jamais assez. » Dans la crise des violences urbaines qui a meurtri 500 villes, après la mort du jeune Nahel M. tué par un policier, le président de la République a durci le ton, allant jusqu’à rappeler à l’ordre des parents. Une méthode résumée hâtivement la veille par le préfet de l’Hérault, Hugues Moutouh, sur France Bleu : « C’est deux claques, et au lit ! »

      L’urgence politique, dit-on dans le camp présidentiel, est de rassurer une opinion publique encore sous le choc des destructions et des pillages. « Une écrasante majorité de Français se raidit, avec une demande d’autorité forte, confirme Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos. Déjà sous Sarkozy, l’idée dominait qu’on en faisait trop pour les banlieues. Les dégradations réactivent cette opinion. Emmanuel Macron est sur une crête difficile à tenir. »

      Ce raidissement intervient sur fond de #fracture territoriale et politique. « L’opposition entre la France des quartiers et celle des campagnes nous revient en pleine figure. Si on met encore de l’argent, on accentuera la fracture », pense Saïd Ahamada, ex-député de la majorité à Marseille. « Les gens en ont ras le bol, ils ne peuvent plus entendre que ces quartiers sont abandonnés », abonde Arnaud Robinet, maire de Reims, qui abrite sept #quartiers_prioritaires_de_la_politique_de_la_ville (#QPV), et membre du parti d’Edouard Philippe.

      (#paywall)

      https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/07/06/entre-emmanuel-macron-et-les-banlieues-le-rendez-vous-manque_6180759_823448.

  • Pourquoi les #services_publics sont pris pour #cible

    Médiathèques, écoles ou centres sociaux ont été pris pour cibles dans la nuit du 28 au 29 juin dans différentes villes de France. À l’éternelle question de savoir pourquoi, les sciences sociales apportent des réponses de plus en plus précises depuis les émeutes de 2005.

    À chaque affrontement entre forces de l’ordre et jeunes des #quartiers_populaires, après chaque nuit de #soulèvement_urbain, une question revient parmi les observateurs mais aussi les habitant·es : pourquoi s’en prendre aux #équipements_publics qui offrent encore quelques #services sur des territoires le plus souvent déshérités en la matière ?

    Derrière cette interrogation se loge aussi une question plus souterraine : qu’y a-t-il dans la tête des #jeunes qui affrontent la police, mettent le feu ou défoncent des vitrines ? Les sciences sociales ont largement travaillé la question, particulièrement depuis les émeutes de 2005, et montrent qu’il est impossible de voir dans ces gestes le simple #nihilisme, voire le #banditisme auxquels certaines voix voudraient les réduire.

    Une réponse préliminaire à la question oblige à commencer par passer au tamis ce que signifient « #services » ou « #équipements » publics dans un contexte de #révoltes et de #tensions_urbaines. S’en prendre à un commissariat au lendemain du meurtre d’un adolescent par un policier, ou même à une mairie qui a autorité sur une partie des forces de l’ordre, n’a pas nécessairement la même signification que s’en prendre à une école, un CCAS (centre communal d’action sociale), une salle des fêtes ou une bibliothèque...

    Un second préliminaire contraint aussi de rester prudent, au-delà même de la nature des institutions visées, sur ce qu’elles peuvent représenter, et dont la signification peut rester opaque ou confuse. Un des jeunes ayant participé aux ateliers d’écriture organisés par l’écrivain et éducateur Joseph Ponthus dans une cité de Nanterre affirmait ainsi, à propos des émeutes de 2005 : « On a commencé par discuter de ce qu’il fallait pas brûler. Pas les voitures des gens, pas l’école, pas le centre commercial. On voulait s’attaquer à l’État. » De manière symptomatique, alors même que la volonté de s’en prendre à l’État est affirmée, l’école, pourtant l’institution publique qui maille l’ensemble du territoire, est mise de côté…

    Cela dit, et bien qu’il soit encore trop tôt pour mesurer l’ampleur du soulèvement actuel et répertorier ou cartographier précisément ce à quoi il s’attaque, il semble bien que les #équipements_publics soient particulièrement visés.

    Le seul ministère de l’éducation nationale a ainsi dénombré jeudi « une cinquantaine de structures scolaires impactées à des degrés divers » par les incidents survenus après la mort de #Nahel, aboutissant à la fermeture d’une « dizaine » d’entre elles, principalement dans les académies de Versailles, de Créteil et de Lille.

    Pour le sociologue Sebastian Roché, il y aurait même une distinction à faire à ce sujet entre aujourd’hui et l’automne 2005. Interrogé sur France Info jeudi 29 juin, il jugeait en effet que la révolte actuelle « était beaucoup plus tournée vers les #institutions_publiques », tandis que les émeutes de 2005 auraient en priorité visé « beaucoup plus les voitures », même si des attaques contre des institutions publiques – gymnases, crèches, bibliothèques – s’étaient alors produites.

    Le #livre sans doute le plus précis sur le sujet a été publié aux éditions Presses de l’Enssib en 2013 par le sociologue Denis Merklen et s’intitule Pourquoi brûle-t-on des bibliothèques ? (lire l’entretien que Mediapart avait conduit avec lui sur le sujet à l’occasion du dixième anniversaire des émeutes de 2005 : https://www.mediapart.fr/journal/france/021115/pourquoi-les-emeutiers-s-attaquent-aux-equipements-publics). Le chercheur y montrait qu’environ 70 bibliothèques avaient été incendiées en France entre 1996 et 2013, et que 2005 ne constituait pas une scène inédite ou inaugurale.

    Toutefois, soulignait #Denis_Merklen à propos de ces attaques commises envers les institutions publiques, « leur interprétation a changé après les émeutes qui ont eu lieu en France cette année-là, sûrement comme conséquence de l’ampleur de la mobilisation. Auparavant, elles étaient perçues comme des actes irrationnels, nihilistes, on parlait alors de “#violences_urbaines” et pas encore d’émeutes. Pourquoi s’attaquer à une école maternelle ou à un gymnase ? Pourquoi les bénéficiaires détruisaient-ils ce qui leur était destiné ? Ce n’était pas compréhensible. La plupart des lectures en faisaient la manifestation d’un déficit, voire d’une absence de #socialisation_politique. »

    Cette interprétation « nihiliste » demeure active dans certains secteurs de la société et du champ politique. Elle est propre à une manière de regarder les #marges de la ville-centre comme une zone peuplée de populations « ensauvagées », incapables de respecter le #bien_commun ou même de distinguer leur propre intérêt.

    Le sociologue et anthropologue #Jérôme_Beauchez, professeur à l’université de Strasbourg, a tout récemment retracé l’histoire longue de ce regard négatif dans un livre intitulé Les Sauvages de la civilisation. Regards sur la Zone, d’hier à aujourd’hui, publié par les éditions Amsterdam l’an dernier.

    Toutefois, même lorsque n’est pas entonné le refrain de la nécessaire remise en ordre d’un monde prétendument décivilisé à coups de renforts policiers, de couvre-feux ou d’états d’urgence, la dimension politique des attaques contre les institutions politiques demeure encore parfois déniée. Lorsque les institutions publiques visées sont des écoles ou des centres d’action sociale, mais aussi quand ceux qui les visent n’appartiennent pas à des organisations référencées et sont en outre le plus souvent cagoulés et racisés.

    À l’inverse, lorsque le mouvement poujadiste s’en était pris à des centres des impôts, lorsque des militants de la FNSEA ont attaqué manu militari des préfectures ou lorsque des marins-pêcheurs ont incendié le Parlement régional de Bretagne en février 1994, la dimension politique du geste a été immédiatement lue comme telle. Ce n’est donc pas la violence en elle-même qui distinguerait le bon grain politique de l’ivraie et de l’ivresse émeutières.

    Pour Denis Merklen, le ciblage des institutions publiques lors d’épisodes de #soulèvements_urbains est bien de nature politique, et même en quelque sorte au carré. « Aujourd’hui, affirme-t-il, les chercheurs en sciences sociales – sociologues, politistes, anthropologues – sont d’accord pour y voir au contraire un geste éminemment politique. Pourquoi cela ? Parce que les personnes vivant dans les quartiers populaires, plus que les autres, sont en contact permanent avec des institutions publiques pour résoudre les problèmes de leur vie quotidienne. S’en prendre à elles est une manière de signifier ce face-à-face. Ce n’est pas un déficit de #politisation, mais un changement dans la #politicité_populaire – c’est-à-dire de la manière de faire de la politique par les catégories populaires – par la #territorialisation des #conflits_sociaux. »

    Pour le sociologue, les émeutiers manifestent ainsi « le conflit dans lequel ils sont pris quotidiennement. Aux guichets des administrations, lieu principal des interactions, les #exclusions et les difficultés d’accès prennent la forme d’un #mépris fortement ressenti ».

    L’anthropologue #Alain_Bertho, professeur émérite à l’université Paris VIII, a consacré une grande partie de son travail aux #émeutes_urbaines, en France et à l’étranger, pour comprendre la mondialisation de ce vocabulaire de la protestation et en repérer les formes nationales ou locales. Il en a tiré deux ouvrages, Le Temps des émeutes, publié chez Bayard en 2009, puis Les Enfants du chaos, paru à La Découverte en 2016.

    Dans ces deux ouvrages, le chercheur insiste, lui aussi, pour prendre en compte la dimension politique des émeutes, précisément quand celle-ci est parfois occultée par le fait que ces soulèvements n’empruntent pas les voies de la politique institutionnelle, ni celles de la geste révolutionnaire qui vise les lieux incarnant le pouvoir en majesté, et non un gymnase ou l’antenne d’un centre de sécurité sociale.

    Il y a eu un débat en 2005, nous expliquait Alain Bertho au moment du soulèvement des « gilets jaunes », « sur la question de savoir si ces émeutes étaient un mouvement politique, proto-politique ou apolitique. La réponse que m’ont donnée ceux qui avaient alors brûlé des voitures est restée gravée dans ma tête : “Non, ce n’est pas politique, mais on voulait dire quelque chose à l’État.” Comment dire de façon plus claire que la politique partisane et parlementaire, à leurs yeux, ne servait à rien pour dire quelque chose à l’État ? ».

    Dans ce même entretien, Alain Bertho insistait également sur la nécessité d’être « attentif au répertoire d’action qu’est le langage de l’émeute », faisant une distinction notamment entre les émeutes avec et sans #pillage.

    Dans ce répertoire d’action en réalité pluriel de l’émeute, parfois masqué par les images répétitives des fumées et des affrontements, les attaques visant des équipements publics tiennent une place spécifique et paradoxale.

    Cependant, le #paradoxe n’est sans doute pas seulement celui qui se formule d’ores et déjà à large échelle, dans des micro-trottoirs se demandant pourquoi certains jeunes attaquent des institutions censées les et leur servir, ou même dans la bouche de chercheurs, à l’instar de #Sebastian_Roché jugeant, toujours sur France Info, qu’on assiste en ce moment à un « #désespoir que les populations retournent contre elles-mêmes ».

    Il réside aussi dans ce que souligne Denis Merklen, à savoir que, pour les personnes vivant dans les quartiers populaires, « les #services_publics sont leur seul recours pour leurs besoins les plus élémentaires, liés à l’éducation, à la santé, au transport, au logement, à l’énergie et à la culture. Quasiment tous les aspects de leur vie quotidienne sont entre les mains d’institutions publiques. C’est une situation paradoxale, car cela tient aussi à la solidité et à la pénétration de notre État social qui assure tant bien que mal des filets solides de protection ».

    Ces filets de protection sont certes moins nombreux et solides aujourd’hui qu’il y a dix ans, en raison du délitement des services publics, mais il n’en reste pas moins qu’une spécificité des soulèvements urbains en France, par rapport à d’autres pays, est de viser les institutions publiques, en partie parce qu’il existe – ou existait – encore un #espoir en leur effectivité et efficacité.

    C’est en tout cas ce qui ressortait de l’ouvrage codirigé par les sociologues #Hugues_Lagrange et #Marco_Oberti l’année suivant les émeutes de 2005, intitulé Émeutes urbaines et protestations et publié aux Presses de Sciences Po. Le livre collectif proposait notamment une comparaison entre les situations italienne et britannique en rappelant que la société française se « caractérise par un État centralisé, de puissants services publics, une référence forte à la laïcité, une immigration ancienne liée à une histoire coloniale et à une décolonisation douloureuses ».

    Pour les directeurs de cet ouvrage, la comparaison internationale des protestations urbaines conduisait à un « étrange paradoxe. La plus grande efficacité de la société française à lutter contre les inégalités sociales et à assurer une meilleure protection sociale produit simultanément un fort sentiment d’#exclusion, surtout dans les quartiers populaires et immigrés les plus ségrégués ».

    D’autant qu’à lire Hugues Lagrange et Marco Oberti, les Français, contrairement aux Britanniques, étaient « équipés de lunettes construites pour ne pas voir cette #ségrégation_ethnique ». Une situation largement liée à une pensée de la République et une #organisation_territoriale de ses services publics qui, à force de vouloir être « #colour_blind », s’avèrent aveugles aux #discriminations_ethnoraciales que leurs propres institutions publiques peuvent pourtant reproduire.

    C’est évidemment le cas avec cette institution particulière qu’est la #police, comme l’avait déjà montré le sociologue #Didier_Fassin dans son ouvrage La Force de l’ordre, qui explorait le #racisme présent à l’intérieur de certaines unités de la #BAC en particulier et l’éloignement croissant entre les #forces_de_l’ordre et les habitant·es des quartiers populaires de façon plus générale.


    Mais c’est aussi vrai d’institutions qui ont, au contraire, tenté de réduire la distance entre les institutions et les populations auxquelles elles s’adressent. Concernant le cas particulier des #bibliothèques, Denis Merklen notait ainsi qu’elles « ont fait un immense travail de réflexion autocritique. Elles ont renouvelé leurs approches ; elles se sont ouvertes ».

    Mais, poursuivait-il, elles ne peuvent, pas plus qu’aucun service public pris isolément, « résoudre les problèmes économiques et sociaux qui se posent dans ces quartiers », en raison « de la situation catastrophique du marché du travail » qui fait que « beaucoup d’habitants ne peuvent plus compter sur leur salaire » et n’ont plus que les services publics – et non plus les employeurs - comme interlocuteurs de leur situation sociale. Ce qui peut amener à détruire une salle des fêtes plutôt que séquestrer un patron…

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/290623/pourquoi-les-services-publics-sont-pris-pour-cible
    #quartiers_populaires #France #émeutes #sciences_sociales #SHS #ressources_pédagogiques #banlieues #violence
    ping @cede

    • « Pourquoi ont-ils brûlé les écoles ? »

      Pourquoi s’attaquer à l’école, laquelle est le plus grand symbole de l’égalité, un sanctuaire du savoir
      Et, c’est gratuit ! Ils se pénalisent eux-mêmes !
      Comme ils sont bêtes et barbares dans les quartiers !

      Si c’était plus compliqué  ?

      L’école est sans doute la première institution marquant les jeunesses populaires (des banlieues) en appliquant une domination, une ségrégation, une violence.
      Sûrement même avant celle de la police.
      Derrière un idéal et des valeurs théoriques, on ne peut nier l’effet de l’école.

      Quand l’école transforme l’inégalité sociale en inégalités scolaires, quand l’école humilie les familles et les élèves.
      Quand on forme des ghettos scolaires et que l’école n’offre pas de bonnes perspectives.

      La gauche quinoa ne comprend pas
      « il faut s’attaquer aux méchantes banques qui ont refusé mon deuxième crédit ! »
      Mais, l’école est aussi un lieu d’exclusion et de répression pour une partie de la population.

      Dans
      « Quand les banlieues brûlent Retour sur les émeutes de novembre 2005. »

      Laurent Ott écrit un texte assez intéressant.
      J’ai le pdf si besoin.

      Une école qui brûle ce n’est pas bien. Je le précise quand même.
      Mais, ce n’est sans doute pas un acte qui sort de nulle part et qui peut s’expliquer calmement.
      Sans l’encourager, je précise encore.

      https://www.cairn.info/quand-les-banlieues-brulent--9782707152176-page-126.htm

      https://twitter.com/Banlieuedeprof/status/1674813901874114560

    • Pourquoi les émeutiers s’en prennent-ils aux services publics ?

      À chaque émeute urbaine que la France connaît depuis maintenant près de quatre décennies, les symboles de l’État et les équipements collectifs semblent concentrer la colère d’une partie de la jeunesse des quartiers concernés. Cette situation suscite d’autant plus d’interrogations que des moyens significatifs ont été consacrés à la rénovation des banlieues françaises dans le cadre de la politique de la ville, en particulier depuis le début des années 2000. Cet article apporte des éléments de réponses à ce paradoxe apparent, en montrant que le besoin de participation et de reconnaissance des habitants reste peu pris en compte par les pouvoirs publics et explique largement le ressentiment d’une frange de la population.

      https://www.cairn.info/revue-francaise-d-administration-publique-2017-3-page-631.html

    • Emeutes urbaines : « Ce qu’elles révèlent, ce n’est pas tant l’échec de la politique de la ville que celui de toutes les politiques publiques »

      Les crédits de la #politique_de_la_ville ont toujours été limités et ne compensent pas l’inégale allocation des budgets affectés au logement, à l’emploi, à la santé ou à la sécurité, qui s’opère au détriment des quartiers défavorisés, rappelle le sociologue #Renaud_Epstein, dans une tribune au « Monde ».

      Depuis le début des années 1980, les vagues émeutières embrasant les quartiers populaires s’accompagnent de controverses interprétatives enflammées dans les médias. Les explications proposées ont varié au fil du temps, mais un argument traverse les décennies qui semble faire consensus chez tous les commentateurs : l’émeute marquerait l’échec de la politique de la ville. La politique ainsi mise en cause a pourtant connu d’importantes évolutions au cours des quarante dernières années, le plus souvent à la suite d’épisodes émeutiers. Si échec de la politique de la ville il y a, ce n’est pas la même politique qui a échoué au début des années 1990, en 2005 ou aujourd’hui.

      Le jugement d’échec semble d’autant plus incontestable en 2023 que l’Etat aurait mobilisé, depuis une quinzaine d’années, des budgets considérables pour les quartiers populaires. Les annonces récurrentes d’un nouveau « plan banlieue » ont pu donner crédit à cette idée d’une politique de la ville richement dotée. Bien que ces annonces soient le plus souvent restées des annonces, elles ont ouvert la voie à la dénonciation des « milliards pour les banlieues », au profit de populations qui ne le mériteraient pas.

      Portée par des entrepreneurs de fracture sociale, cette critique a été d’autant plus ravageuse qu’elle s’est prolongée par une mise en concurrence des souffrances territoriales, opposant les quartiers défavorisés des métropoles et une « France périphérique » aux contours flous mais dont la couleur est claire. Les premiers bénéficieraient d’une discrimination positive, au détriment des villes moyennes, des espaces périurbains et des territoires ruraux, dont les populations sont pourtant durement affectées par les recompositions industrielles et la précarisation de l’emploi, les politiques d’austérité et les fermetures de services publics, ainsi que par l’augmentation du coût de la vie.

      La critique de l’inefficacité se mue alors en une mise en cause de la légitimité même de la politique de la ville, illustrée par cette formule qui fait florès à l’extrême droite : on déshabille la « France périphérique » pour habiller celle qui vit de l’autre côté du périph.

      (#paywall)

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/06/emeutes-urbaines-ce-qu-elles-relevent-ce-n-est-pas-tant-l-echec-de-la-politi

      déjà signalé sur seenthis :
      https://seenthis.net/messages/1008999

  • #Violences, #interpellations_abusives... : le retour d’un #maintien_de_l’ordre qui sème le chaos

    Alors que le recours au 49-3 a entraîné une multiplication des rassemblements et actions spontanés partout en France, le #dispositif_policier a renoué avec ses travers : #interpellations_massives et mal fondées, violences gratuites, #mépris des libertés fondamentales.

    Les #manifestations unitaires, intersyndicales et globalement pacifiques qui ont rythmé les deux derniers mois ont fait long feu. Elles n’ont ni fait capoter la réforme des retraites, ni infléchi ses modalités. Les responsables syndicaux comme les simples manifestants ont eu beau mettre en garde l’exécutif contre les conséquences de sa sourde oreille – un risque d’exaspération populaire, de « radicalisation » du mouvement et de violences –, il n’a rien fait de cet avertissement.

    Le 49-3 dont personne ne voulait a bien eu lieu, jeudi 16 mars. Depuis, les #rassemblements_spontanés, #blocages, actions coup de poing et #cortèges_sauvages fleurissent partout en France. Comme toujours en pareil cas, des #forces_de_l’ordre sûres de leur légitimité et sujettes à une légère panique mettent un point d’honneur à endiguer tout ce qui déborde du cadre. Lundi 20 mars, le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, a dénoncé « une augmentation de la #répression des manifestants qui n’est pas justifiée ».

    Depuis jeudi, la majorité des 61 compagnies de #CRS sont missionnées sur le maintien de l’ordre, en particulier à #Paris, #Nantes, #Rennes, #Bordeaux, #Marseille, #Lyon et #Dijon. « Les missions qui relevaient du plan national de sécurité renforcée notamment à Calais ou à Marseille, pour lutter contre la drogue ou l’insécurité, sont passées aux oubliettes, explique un responsable syndical chargé des CRS au niveau national. La priorité pour Darmanin, c’est de sécuriser Paris et les sites institutionnels sensibles comme l’Élysée, et le mot d’ordre est de “disperser tout mouvement non déclaré”, donc illégal. »

    Ce policier n’a pas souhaité témoigner sous son identité. « La situation est difficile. Le jeudi, je manifeste contre cette réforme que je trouve violente, confie-t-il, et je vais continuer », dit-il avant d’ajouter au sujet du 49-3 : « Était-ce vraiment utile vu le déferlement de #colère que cela a provoqué ? »

    « On est à la veille d’une insurrection. J’ai peur qu’un de mes gars tue un manifestant », confie un commandant de compagnie de CRS à Mediapart. « J’espère que la motion passera et que la dissolution de l’Assemblée sera prononcée. On reviendrait ainsi à une gestion plus démocratique du pays. » Ce haut gradé qui dirige près de 70 hommes précise que ce sont les préfets qui transmettent les ordres du ministre.

    « Pour le moment, ceux que j’ai reçus en participant au maintien de l’ordre, dans deux villes importantes, restent relativement “républicains”. Mais il n’y a aucune garantie qu’un drame ne se produise pas », rappelant qu’un CRS a sorti un fusil HK G36 à Nantes, lors de la manifestation du 18 mars.

    « C’est évidemment dangereux et inquiétant que cela ne questionne pas davantage dans nos rangs. Cela montre que des policiers ne sont absolument pas résilients. C’est pour cela que le président s’amuse à un jeu très dangereux qui peut se terminer par un drame, que je redoute : le décès d’un manifestant. »

    « On a été entraînés pour la “percussion” »

    La semaine du 49-3, Mathieu* était, avec sa compagnie de CRS, à Châteaudun, près d’Orléans, pour un « #recyclage », c’est-à-dire une remise à niveau organisée chaque semestre. Le vendredi soir, ces CRS ont été « appelés en renfort pour intervenir dès lundi à Paris ». Pour la seule journée de lundi, plus de trente unités mobiles, CRS et escadrons de #gendarmerie, sont déployées à Paris, soit près de 2 000 fonctionnaires.

    « Depuis le 49-3, le maintien de l’ordre se durcit nettement face aux rassemblements spontanés. Nous avons d’ailleurs été formés durant notre semaine de recyclage à aller davantage au contact des “#nébuleuses”, des #black_blocs », explique-t-il. « On a été entraînés pour la “#percussion”, une technique plus offensive. Dès qu’on les repère, on n’attend pas, on intervient sur eux. »

    Mathieu ne cache pas son embarras sur le contexte actuel et la difficulté de « charger de simples manifestants, dont la cause est juste ». Après les sommations, « si les manifestants restent sur notre passage, il n’y a plus de distinction. Il peut y avoir des dommages collatéraux ».

    Malgré plus de vingt ans d’expérience dans le maintien de l’ordre, Mathieu appréhende cette semaine. « Ce n’est pas tant pour moi, qui suis formé et protégé, mais pour ceux qui manifestent. Sur les rassemblements sauvages à Paris, ça arrange la préfecture de faire appel aux #Brav-M [#Brigades_de_répression_de_l’action_violente_motorisée – ndlr]. Non seulement ils sont utilisés pour intervenir très vite en moto, ce qui peut être terrorisant, mais le préfet a une mainmise directe sur eux contrairement à nous CRS, où on a un commandant ou un capitaine qui relaie les ordres du commissaire sur le terrain et qui peut les adapter. »

    Les Brigades de répression des actions violentes motorisées, Mathieu les a vues à l’œuvre pendant les manifestations des « gilets jaunes ». « Ils mettent le bordel plus qu’autre chose. Ils matraquent dans tous les sens. Après ce sont des collègues parfois mais on n’a pas le même état d’esprit. Il y a pas mal de policiers passés par la BAC dans leur rang et formés à aller au contact, peu importe qui ils ont en face. C’est cela le danger. »

    À Paris, le retour de la BRAV-M

    Les dernières semaines ont marqué un glissement progressif dans l’attitude des forces de l’ordre à Paris. Le 20 janvier dernier, le préfet de police #Laurent_Nuñez revendiquait de tenir ses troupes à distance des cortèges : « Je ne veux pas qu’on nous accuse de faire dégénérer les manifestations. De la sorte, on ne nous voit pas. Ça évite que les militants ultras qui cherchent à en découdre avec les forces de l’ordre ne viennent au contact. En contrepartie, je demande à nos effectifs d’être extrêmement réactifs. Dès la moindre dégradation, ils doivent intervenir. À chaque fois, nous intervenons puis nous nous retirons. »

    À la préfecture de police, certains contestaient ce choix. Les BRAV-M se seraient notamment plaintes de ne plus aller au contact, regrettant l’époque de Didier Lallement. Certaines manifestations ont toutefois été marquées par de violentes charges. Dès le 19 janvier, un jeune photographe grièvement blessé lors d’une charge policière a dû être amputé d’un testicule.

    Depuis deux semaines, les témoignages et vidéos de violences policières se multiplient, de Paris à Rennes en passant par Nantes (où quatre étudiantes accusent des policiers de violences sexuelles lors d’une fouille), tandis que des centaines d’interpellations ont eu lieu. Des journalistes dénoncent aussi diverses atteintes à la liberté de la presse (entrave à leur travail, coups, bris de matériel).

    Selon une source interne à la préfecture de police de Paris, le « #durcissement » du maintien de l’ordre serait lié à « la montée en gamme des violences » de certains manifestants jusqu’ici « inconnus », qui « se radicalisent depuis le début du mouvement » et surtout « depuis le #49-3 ». Le fait que ces manifestants deviennent plus mobiles justifierait un recours accru aux compagnies d’intervention et aux policiers motorisés de la BRAV-M. 

    Mises en place au début des gilets jaunes, fin 2018, et relativement discrète depuis le début du mouvement contre les retraites, la BRAV-M a réinvesti les rues de Paris. Depuis vendredi soir, les images de ces binômes de policiers à moto – souvent comparés aux « #voltigeurs » dissous après la mort de Malik Oussekine en 1986 – matraquant à tout-va, sans raison apparente et sans distinction les manifestants, circulent sur les réseaux sociaux.

    De son côté, la source préfectorale précédemment citée met en avant les six policiers blessés samedi, « dont deux ont reçu un pavé sur la tête », sans s’exprimer sur les violences imputées aux policiers.

    Des #gardes_à_vue sans suites

    À Paris, dès l’annonce du 49-3, la place de la Concorde s’est remplie de manifestants. Le préfet de police de Paris a bien tenté d’interdire ce rassemblement, déposé à l’avance par Solidaires, mais le tribunal administratif lui a donné tort.

    À l’issue de ces quelques heures sur la place, 292 personnes ont été arrêtées à Paris (sur 310 en France). Ces interpellations, mal motivées, ont cependant débouché sur un résultat judiciaire ridicule : seules neuf personnes ont été déférées devant la justice, et encore, pour « des avertissements probatoires solennels, des classements sous condition ou encore une contribution citoyenne », écrit BFMTV. Soit les sanctions les plus basses possibles.

    64 personnes ont encore été interpellées vendredi soir à Paris, dont 58 libérées sans aucune charge au bout de quelques heures. Dans certains cas, cela a duré un peu plus longtemps. Dans une séquence filmée par le correspondant de l’agence de presse turc Anadolu, une jeune femme se débat et essaie d’expliquer qu’elle « n’a rien fait ». La scène a lieu aux environs de 21 h 45, place de la Concorde.

    « Je respire pas, s’époumone une jeune femme au visage cramoisi.

    -- Laisse-toi faire, tu respires ! », lui rétorque le policier qui l’étrangle.

    Celle qui est aussi violemment interpellée, Chloé Gence, est développeuse web du Média. Mais comme le précisera dans un communiqué son employeur, elle a l’habitude de couvrir certaines manifestations et mouvements sociaux. Selon Le Média, Chloé était en train de « capter des images » avec d’autres journalistes, vendredi soir, quand elle a été « arrêtée de manière très brutale par les forces de l’ordre ».

    Chloé Gence est ensuite conduite en garde à vue. Malgré l’assistance d’un avocat et « les preuves qu’elle couvrait bien la manifestation pour Le Média », sa garde à vue est prolongée. Dimanche, #Chloé_Gence finit par sortir du commissariat, libre, sans qu’aucune charge ne soit retenue contre elle. Au bout de 40 heures…

    Un autre journaliste, #Paul_Ricaud, a subi le même sort que Chloé. Le Syndicat national des journalistes (SNJ) a dénoncé samedi, dans un communiqué, ces nouvelles atteintes à la liberté de la presse. Le syndicat regrette qu’après une période durant laquelle « les relations entre forces de l’ordre et journalistes paraissaient s’être apaisées », cela ne soit plus le cas depuis le 7 mars. « Nous voyons, à nouveau, des tensions comme sous l’ère Lallement, déplore le SNJ. Les forces de l’ordre semblent désormais vouloir réprimer durement le mouvement d’opposition à la réforme. »

    Depuis samedi, il est de nouveau interdit de manifester place de la Concorde. Ce nouvel arrêté préfectoral (qui n’a toutefois pas été publié) a entraîné une dissémination des rassemblements parisiens vers d’autres lieux. Samedi soir, 169 interpellations ont eu lieu en France, dont 122 à Paris (principalement dans le XIIIe arrondissement et place de la Concorde), donnant lieu à 118 gardes à vue (dont douze mineurs). Sollicité pour connaître les suites judiciaires détaillées des interpellations du weekend, le parquet de Paris n’a pas donné suite. Depuis, la préfecture a pris un nouvel arrêté que nous publions ici.

    Ces arrestations massives, donnant lieu à un maigre résultat judiciaire, rappellent les interpellations « préventives » assumées par le parquet de Paris lors du mouvement des gilets jaunes, en 2018-2019. À l’époque, le procureur Rémy Heitz (désormais procureur général) assumait ses objectifs dans une note interne : empêcher les gardés à vue de « retourner grossir les rangs des fauteurs de troubles », quitte à les priver illégalement de liberté plus longtemps que nécessaire.

    Dans un communiqué diffusé lundi 20 mars, le Syndicat de la magistrature (classé à gauche) rappelle que « l’autorité judiciaire n’est pas au service de la répression du mouvement social », condamne « toutes les violences policières illégales » et déplore une « utilisation dévoyée de la garde à vue qui illustre les dérives du maintien de l’ordre, qui détourne l’appareil judiciaire pour le mettre entièrement à son service ».

    « #Nasses », #charges et « #intimidation »

    De son côté, le Syndicat des avocats de France dénonce une « réaction une fois de plus démesurée et particulièrement violente » face aux mouvements spontanés, citant notamment l’utilisation de la technique de la « nasse », « jugée illégale par le Conseil d’État ».

    Cette #technique_policière, consistant à encercler et retenir un groupe de manifestants sans leur laisser d’issue, avait été largement utilisée pendant les mouvements contre la loi « travail » (2016), des gilets jaunes (2018-2019), contre la loi « sécurité globale » et la précédente réforme des retraites (2019-2020). En juin 2021, le Conseil d’État avait annulé les dispositions sur la « nasse » dans le Schéma national du maintien de l’ordre (SNMO) mis au point par Gérald Darmanin un an plus tôt. Il considérait que cette technique était « susceptible d’affecter significativement la liberté de manifester et de porter atteinte à la liberté d’aller et venir » lorsqu’elle ne laisse pas d’échappatoire.

    Le Syndicat des avocats de France s’inquiète également de #charges_sans_sommation, de #coups_de_matraques aléatoires et d’une « intimidation des manifestant·es ». Il appelle le ministère de l’intérieur à « mettre un terme immédiatement à cette escalade de la violence » et les magistrats à « faire preuve d’indépendance et de responsabilité » devant les affaires qui leur sont confiées par la police.

    De nombreuses vidéos montrent aussi des membres des forces de l’ordre sans #numéro_d’identification sur leur uniforme (numéro #RIO), malgré son caractère obligatoire régulièrement rappelé par la hiérarchie.

    À Lille, le soir du 16 mars, la police a violemment chargé le cortège des Jeunes communistes faisant deux blessés graves parmi leur service d’ordre. L’un a eu des points de suture sur le crâne, le second, l’épaule fracturée. « On s’est retrouvés complètement séparés du cortège syndical, gazés devant et derrière, et finalement seuls dans les petites rues de Lille, explique Pierre Verquin, coordinateur départemental des Jeunes communistes, à Mediapart. On avait deux cents jeunes avec nous, on s’est fait charger à ce moment-là, alors que le cortège ne présentait aucun danger. Tout le monde s’est pris des coups. Les gens à l’arrière se sont pris d’énormes coups de matraque aussi. » La Ligue des droits de l’Homme (LDH) a demandé au préfet du Nord « des explications sur les dérives brutales qui ont émaillé le maintien de l’ordre à Lille en cette soirée du 16 mars ».

    Le même jour, 14 personnes sont interpellées à Rennes pour des violences, des dégradations et des pillages dans le centre-ville. À la différence de Paris, la quasi-totalité fait l’objet de poursuites. Le lendemain, le ministre de l’intérieur annonce l’envoi à Rennes de la #CRS_8, une « #supercompagnie » créée en 2021 pour répondre en urgence à des « #violences_urbaines » sur n’importe quel point du territoire.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/200323/violences-interpellations-abusives-le-retour-d-un-maintien-de-l-ordre-qui-

    –---

    Les déclarations de deux policiers ont été ajoutées à cette métaliste de #témoignages de #forces_de_l'ordre, #CRS, #gardes-frontière, qui témoignent de leur métier :
    https://seenthis.net/messages/723573

  • Défense de l’emploi, de l’entreprise, du salaire, les violences urbaines ont tout pour plaire, expansion de la guerre entre pauvres inclus.
     : A Alençon, de nouvelles violences urbaines ont éclaté dans le quartier de Perseigne
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2022/09/28/a-alencon-de-nouvelles-violences-urbaines-ont-eclate-dans-le-quartier-de-per

    Des renforts de sécurité étaient attendus en fin de journée après la flambée de violences qu’a connues le quartier dans la nuit de mardi à mercredi.

    Quasiment un an après des faits similaires, un quartier d’Alençon a connu une flambée de violences dans la nuit de mardi 27 à mercredi 28 septembre. La préfecture de l’Orne a annoncé en fin de journée mercredi l’arrivée de renforts de sécurité.
    « Après la nuit de violences urbaines qu’a connu le quartier de Perseigne à Alençon », le préfet de l’Orne « a demandé la mise en place d’un dispositif renforcé de sécurisation », selon un communiqué de la préfecture. Seront ainsi « engagés trois sections de la compagnie républicaine de sécurité (CRS) 27 de Toulouse » ainsi que « deux équipages de brigades anticriminalité du Calvados et de la Sarthe, soit plus de 65 policiers déployés », précise la préfecture, en ajoutant que des renforts supplémentaires pourront être mobilisés en cas de besoin, dans la ville de 26 000 habitants.

    Mardi soir, « à partir de 23 h 15, une trentaine d’individus ont mené une action coordonnée de violences urbaines, avec la volonté manifeste d’attirer les forces de l’ordre dans un guet-apens : vingt-quatre véhicules ont été incendiés, trois véhicules ont été retournés pour freiner la progression des forces de l’ordre, un abribus a été détruit », avait déploré mercredi matin le préfet de l’Orne dans un communiqué. Les faits ont duré jusqu’à 2 heures du matin dans le quartier de Perseigne, a précisé la procureure de la République d’Alençon, Laetitia Mirande.

    « Scène de guérilla urbaine »
    « Cela fait mal au cœur », a confié à un photographe de l’Agence France-Presse une retraitée du quartier dont l’unique voiture a été brûlée. « Mon mari n’a que 600 euros de retraite, moi 1 100, mais avec 500 euros de loyer, la lumière, tout ça… c’est pas possible » de racheter un véhicule, a expliqué l’habitante de cette ville où le taux de chômage atteint 21 %.
    Le syndicat UNSA-Police a évoqué dans un communiqué « une véritable scène de guérilla urbaine ». « Les fonctionnaires locaux ont fait face à une cinquantaine d’émeutiers armés avec des barres de fer », selon lui. Le syndicat de policiers Alliance 61 fait état de « soixante mortiers (d’artifice) tirés en direction des forces de l’ordre ».
    Selon la préfecture, une quarantaine de policiers et gendarmes de l’Orne « ont été mobilisés pour sécuriser l’action des pompiers ». Vingt pompiers et trois engins-pompes ont été engagés pour éteindre les incendies, a ajouté la même source. « Une présence des forces de sécurité sera maintenue à un haut niveau dans les prochains jours », assure la préfecture.

    « Opérations coups de poing contre les réseaux »
    Dans la nuit du 26 au 27 octobre 2021, des faits similaires s’étaient produits dans ce quartier populaire d’Alençon : treize véhicules avaient été incendiés et les forces de l’ordre avaient également été la cible de tirs de mortiers d’artifice. « Ce qu’on a connu hier soir, c’est la conséquence directe du travail que fait la police sur le quartier (…). La police [y] conduit un combat acharné contre le trafic de stupéfiants », a ajouté Sébastien Jallet, le préfet de l’Orne, sur BFM-TV.
    « Depuis plusieurs mois, nous menons des opérations coups de poing (…) contre les réseaux. Il y a quinze jours, on a encore démantelé (…) un laboratoire clandestin (…). La semaine dernière, on a interpellé deux dealeurs en bas d’un immeuble sur le quartier de Perseigne, et hier après-midi, de nouveau, deux jeunes ont été interpellés par la police et on peut penser qu’il y a un lien assez direct entre cette action de la police (…) contre la drogue à Perseigne et ce qu’on a connu hier soir sur le quartier », a avancé M. Jallet. Interrogé par l’AFP sur ce point, le parquet n’a pas donné suite. Alliance dénonce un « manque cruel d’effectif » et demande, comme l’UNSA, des renforts.
    Le maire d’Alençon, Joaquim Pueyo, « en retrait du Parti socialiste », déplore lui aussi qu’« il n’y a pas assez de policiers la nuit » en dépit de postes supplémentaires, quatre selon le préfet, créés à Alençon à la suite des faits d’octobre 2021. Le 28 octobre 2021, Marine Le Pen, alors candidate du Rassemblement national à l’élection présidentielle, avait fait le déplacement à Alençon pour dénoncer un « laxisme », selon elle, des politiques face aux #violences_urbaines.

    #drogues #deal #police

  • Maintien de l’ordre et violences policières : ce que l’histoire nous apprend
    http://theconversation.com/maintien-de-lordre-et-violences-policieres-ce-que-lhistoire-nous-ap

    Les manifestations des gilets jaunes de ces dernières semaines ont soulevé à nouveau la question des violences policières et d’un usage accru de la violence par les forces de l’ordre, une question déjà posée en 2016 à l’occasion du mouvement contre la « loi travail ». On voudrait apporter un éclairage historique sur ce phénomène supposé de « retour » de la violence. Il ne s’agit pas de relativiser les agissements policiers, mais d’inscrire les événements dans l’évolution du maintien de l’ordre en France.
    Calmer le « citoyen momentanément en colère »

    Le maintien de l’ordre repose en France depuis longtemps sur des unités spécialisées : les gendarmes mobiles, apparus en 1921, complétés par les CRS, à partir de 1944, avec le recours à certaines périodes à des unités non permanentes comme les compagnies d’intervention de la Préfecture de Police à Paris dans les années 1950-1960.

    A l’origine de ces forces se trouve la préoccupation de ne plus recourir à l’armée, de ne plus traiter le manifestant comme un « ennemi » mais un « citoyen momentanément en colère ».

    La montée de ces forces est aussi liée au développement de la manifestation canonique dans les formes légitimes d’expression politique depuis la fin du XIXème siècle. Les moyens mortels (armes à feu) sont évacués, remplacés après-guerre par des instruments en principe non létaux dont la matraque est l’emblème, puis les gaz à partir de 1947 et enfin les grenades assourdissantes.
    Les grévistes forcent le barrage de police le 20 mars 1906. Wikimedia
    Un matériel plus sophistiqué

    Depuis Mai 68 (qui avait pris la police au dépourvu), la sophistication du matériel s’est accentuée avec le développement des protections individuelles et des véhicules, le perfectionnement de l’armement. Le maintien de l’ordre s’est aussi technicisé, puisqu’après de longues décennies d’apprentissage « sur le tas » au sein des unités, il fait l’objet d’un enseignement spécifique, comme au centre de Saint-Astier, créé par la gendarmerie au lendemain de Mai 68 puis devenu permanent, où les unités s’entraînent régulièrement dans le décor d’une ville fictive. Les agents s’aguerrissent aux manoeuvres et aussi à la maîtrise de soi nécessaire au métier. Un répertoire s’est alors fixé, fondé sur son caractère défensif, la planification, le contrôle à distance des manifestants, le retardement de l’usage de la force, et le dialogue, voire la cogestion avec les organisateurs des manifestations pour faciliter leur encadrement policier. Depuis quarante ans, les effectifs de ces forces sont restés stables, autour de 30 000 hommes (17 000 gendarmes mobiles, 13 000 CRS). Elles peuvent recevoir le renfort d’autres forces de police, dont le maintien de l’ordre n’est cependant pas le « métier ». Ces interventions ont été à l’origine de violences policières (comme la mort de Malik Oussekine à Paris le 6 décembre 1986).
    CRS et manifestants pendant la lutte contre l’extension du camp militaire, Larzac, France, années 1970. Community of the Ark of Lanza del Vasto/Wikimedia, CC BY-ND
    Quel critère pour définir la violence policière ?

    La question du niveau de violence policière et de son évolution est éminemment complexe. Quel critère retenir en effet ?

    Le seul nombre de morts, souvent retenu, montrerait cependant que le maintien de l’ordre devient plus meurtrier en France à partir de 1879, en particulier pendant la période de l’après-guerre, marquée par la guerre froide et la guerre d’Algérie.

    En témoignent les épisodes sanglants du 17 octobre 1961 et du 8 février 1962, qui ont fait respectivement au moins cent morts et 8 morts à Paris.

    Cette seule courbe contredit l’existence d’un processus séculaire graduel de « réduction de la violence » et de pacification du maintien de l’ordre. En dehors de rares grands événements très meurtriers, il est difficile pour certains spécialistes de juger du niveau de violence policière le critère du nombre de morts dissimule d’autres formes de violence (charges, interpellations et intensité de la répression) et le « niveau de violence » renverrait avant tout aux perceptions de la manifestation.

    Si on s’en tient à ce seul critère mesurable, depuis un siècle, des phases d’apaisement relatif alternent avec des cycles de violence : celui qui oppose les organisations communistes à la police et culmine avec les manifestations contre le général Ridgway en mai 1952, puis la police aux Algériens en 1960-1962. Ces épisodes montrent que la violence policière fait toujours partie du répertoire d’action de l’État et a pu être un recours dans certaines circonstances.
    Contact plus fréquent

    La question du « retour » des violences policières doit être lue à la lumière des transformations du maintien de l’ordre depuis les années 2000. Celui-ci a été modifié par la lutte contre les « violences urbaines », autrement dit les émeutes des quartiers populaires (2005 et 2007). Les unités sont devenues plus mobiles et plus offensives, tant grâce à un armement plus agressif qu’en projetant des forces destinées à interpeller les émeutiers en vue d’une répression judiciaire.

    Il s’ensuit une transformation notable des formes de maintien de l’ordre, où le contact est plus fréquent, avec toutes les occasions de violence que peuvent provoquer de telles situations. Aux dispositifs adoptés lors des manifestations parisiennes des gilets jaunes, on peut appliquer des constats dressés à l’occasion du mouvement contre la loi travail en 2016 .
    Manif du 11 novembre 2018 contre l’invitation de Donald Trump pour les commémorations du 11 novembre 1918 par M. Macron. Jeanne Menjoulet/Flickr, CC BY-SA

    On note ainsi une dimension offensive marquée, avec des tirs de lanceur de balle de défense (LBD) (communément appelé Flashball), le déploiement massif d’unités dédiées à l’interpellation de manifestants par un pouvoir politique désireux d’afficher le soir même « la restauration de l’ordre », en utilisant des agents venus des BAC et de la BRI, et non des professionnels du maintien de l’ordre.

    Tout cela tend à brouiller les frontières entre encadrement des manifestations et police des « violences urbaines ». De telles interventions, perçues comme un usage indiscriminé de la force, ne manquent pas de générer des phénomènes de solidarisation des manifestants et de nouvelles violences.
    Des pratiques françaises pointées du doigt

    A cet égard, les spécialistes pointent des pratiques françaises à rebours des stratégies de « désescalade » menées dans d’autres pays européens, qui passent par le dialogue continu avec les organisateurs et les manifestants : depuis la présence d’officiers de liaison médiateurs, comme les Peace Units aux Pays-Bas, les « officiers de dialogue » en Suède, jusqu’à des panneaux lumineux donnant les instructions de la police à ceux qui défilent.
    Intervention de ‘Peace Units’ néerlandais lors d’une manifestation sportive.

    La sophistication de l’arsenal n’est pas non plus synonyme de pacification : le LBD et les grenades de désencerclement sont des armes susceptibles d’entraîner de graves blessures. Les forces de l’ordre conservent aussi des instruments archaïques, comme les grenades offensives (responsables de la mort de Rémi Fraisse à Sivens en 2014).

    Si l’on peut évoquer un apaisement tendanciel ou relatif de la violence du maintien de l’ordre depuis 1968, la situation reste ouverte : l’usage de la violence dépend in fine du degré de légitimité des protestataires aux yeux de l’autorité politique et des forces de l’ordre.

    #maintien_de_l'ordre

  • « Face aux “#gilets_jaunes”, l’action répressive est d’une ampleur considérable », #Fabien_Jobard, docteur es police, propos recueillis par Marc-Olivier Bherer
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/face-aux-gilets-jaunes-l-action-repressive-est-d-une-ampleur-considerable_54


    Un « gilet jaune » blessé secouru par d’autres manifestants, le 15 décembre, à Nantes. JEREMIE LUSSEAU / HANS LUCAS POUR "LE MONDE"

    Le sociologue Fabien Jobard note que le bilan, en termes de blessés, de ce mouvement social est sans précédent depuis Mai 68.
    Propos recueillis par Marc-Olivier Bherer

    Fabien Jobard est directeur de recherches au CNRS, au sein du Centre de recherches sociologiques sur le #droit et les institutions pénales (Cesdip). Il est également chercheur au Centre Marc-Bloch à Berlin. Il a coécrit, avec Jérémie Gauthier, #Police : questions sensibles (PUF, 108 pages, 9,50 euros), et, avec Jacques de Maillard, #Sociologie de la police. Politiques, organisations, réformes (Armand Colin, 2015).

    Les forces de l’ordre ont réalisé un nombre record d’interpellations préventives le 8 décembre, en amont des mobilisations des « gilets jaunes ». Près de 1 500 personnes ont été arrêtées en France. Que vous inspire ce chiffre ?

    A strictement parler, ces interpellations ne sont pas préventives : elles répriment une incrimination créée sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qui consiste à se regrouper en vue de se préparer à commettre, par exemple, des dégradations. « En vue de la préparation » permet d’interpeller un très grand nombre de personnes dans un très large périmètre et, in fine, de les empêcher de manifester. Ce n’est pas la Préfecture de police, ce ne sont pas les policiers qui empêchent de manifester, mais bel et bien notre droit ordinaire, et c’est le signe d’une évolution marquante.

    Le droit n’exige plus des éléments matériels incontestables, comme une arme par destination [un objet qui, sans être une arme, peut être employé comme tel], pour empêcher des gens de prendre part à une manifestation, mais une simple intention déduite d’éléments incertains, mais suffisants pour placer en garde à vue durant le temps de la manifestation. Beaucoup de responsables aujourd’hui souhaiteraient réserver aux manifestants le même traitement qu’aux supporteurs de football : identifier ceux qui sont potentiellement violents dans un fichier et les assigner à résidence le jour de la manifestation.

    Mais on ne peut pas, car manifester est un #droit_fondamental (à la différence d’assister à un match de foot). Alors, l’incrimination qui permet d’interpeller sur un motif très large tout petit groupe proche du lieu de la #manifestation est un mécanisme de substitution, à coûts très élevés. Il est très coûteux car il est très consommateur de forces sur place et multiplie les occasions de face-à-face en amont de la manifestation. Près de 1 500 gardes à vue en une journée, c’est un record, bien au-delà de ce que l’on a vu à l’occasion de sommets internationaux tels que, dernièrement, le G20 de Hambourg, pourtant marqué par des destructions et, plus rarement, des pillages. Articulée à cette #justice très particulière, là aussi propre à la France, qu’est la comparution immédiate, l’action répressive est d’une ampleur considérable.

    Est-ce que le dispositif du 8 décembre, avec beaucoup de policiers mobiles, plus offensifs, s’il venait à faire référence, pourrait menacer la liberté de manifester ?

    Le déploiement de groupes très mobile de policiers est principalement dû à la nature du mouvement. Le mouvement des « gilets jaunes » n’est pas un mouvement encadré et il se revendique comme tel – c’est du reste sa force. Une manifestation consiste donc plus en l’agrégation de petits groupes d’affinité, « montés » ensemble à Paris, Bordeaux, Toulouse ou ailleurs, pour rejoindre un lieu de défilé incertain, indécis, mouvant. Quelques-uns de ces groupes voient l’acte protestataire dans le fait de manifester en un lieu symbolique fort, parfois interdit, comme, à Paris, les abords de l’Elysée ou les Champs-Elysées.

    Si les pouvoirs publics décident d’empêcher toute présence sur ces lieux, ils sont contraints de déployer autant de forces mobiles qu’il y a de groupes protestataires, avec énormément de forces statiques immobilisées par ailleurs aux points d’entrée des zones interdites. Dans la journée, aux petits groupes protestataires très vite radicalisés par le cours même de l’action (l’accueil sur les lieux par les gaz lacrymogènes, par exemple) viennent se greffer des groupes qui, eux, font de la casse ou de l’affrontement avec les policiers des modes d’expression politique, puis des groupes opportunistes de pilleurs. Dans cette configuration, le maintien de l’ordre se délite en une somme confuse de courses-poursuites visant l’interpellation en flagrant délit [ben voyons, une sociologie sans terrain, sans même scruter quelques images !, on lira pas une fois le terme offensif à propos des actes de la police "étudiée", ndc] .

    Quel bilan tirez-vous de l’action de la police ?

    En #maintien_de_l’ordre, c’est le donneur d’ordres qui est en première ligne, c’est-à-dire le politique. C’est, j’insiste, la spécificité de ce métier, alors que les autres métiers policiers (sécurité publique et même police judiciaire) donnent une bien plus large marge de manœuvre aux policiers et à leur encadrement. Du reste, le #gouvernement ne s’est pas privé de faire savoir qu’il était aux commandes, à grand renfort de présence télévisuelle en salle de commandement. Une telle immixtion du politique dans la conduite des forces policières est, il faut le noter, une particularité française.

    Dans le cas d’espèce, les interventions policières ont entraîné en maintes occasions des dommages considérables : mains arrachées par les grenades, défigurations ou énucléations par des tirs de balles de défense, décès à Marseille : le bilan dépasse tout ce que l’on a pu connaître en métropole depuis Mai 68, lorsque le niveau de violence et l’armement des manifestants étaient autrement plus élevés, et le niveau de protection des policiers, au regard de ce qu’il est aujourd’hui, tout simplement ridicule.

    Encore une fois, on est en maintien de l’ordre et ce sont moins les policiers qui sont en cause ici que l’#armement dont ils disposent et les ordres qu’on leur donne. On ne trouve pas en Europe, en tout cas ni en Allemagne ni en Grande-Bretagne, d’équipements tels que les #grenades explosives et les lanceurs de balles de défense [#LBD40], qui sont des armes qui mutilent ou provoquent des #blessures_irréversibles. Engager ces armes face à des protestataires inexpérimentés, qui, pour beaucoup (on l’a vu lors des audiences de comparution immédiate), se trouvaient pour la première fois à Paris, amène une dynamique de radicalisation qui entraîne les deux camps dans une escalade très dangereuse : les uns sont convaincus qu’ils répondent à une violence excessive, donc illégitime, et les policiers, se voyant agressés, usent de tous les moyens à leur disposition.

    Seule l’arme à feu est restée inemployée, du fait de l’expérience des policiers français en matière de maintien de l’ordre. Lors du sommet de Göteborg en 2001, les policiers dépassés avaient fait usage de l’arme à feu ; et au sommet de Gênes, la même année, les policiers, chauffés à blanc, avaient pour les uns tué, pour les autres torturé.

    Que signifie à vos yeux la présence de la brigade de recherche et d’intervention (BRI) lors des manifestations des « gilets jaunes » ?

    La présence de la BRI ne doit pas être surinterprétée. Elle est liée au fait qu’absolument toutes les forces disponibles ont, à Paris, été mobilisées. Cela va des sections sportives aux policiers de la brigade d’assistance aux sans-abri, en passant par les brigades équestres ou motocyclistes. C’est la conséquence de la recherche à tout prix de l’interpellation et, de ce point de vue, le politique a fait le choix de prendre des risques élevés de dérapage, d’autant plus élevés que le #Flash-Ball relève de l’équipement individuel de la plupart de ces forces d’appoint. Le tir de balles de défense contre les personnes a ainsi été au centre du dispositif, et c’est l’un des faits majeurs de ces week-ends successifs.

    Il signale, je pense, une tolérance sociale établie à l’usage de la force par la police, quand bien même un tribunal administratif estimait en 2015 que ces armes « comportent des risques exceptionnels ». En 1986, François Rigal, étudiant, perdit un œil à la suite d’un tir de grenade lacrymogène et cet événement entraîna une émotion très forte et de longues discussions, y compris parlementaires, autour des tirs tendus.

    Depuis la fin des années 1990, les tirs de balles de caoutchouc, dont le diamètre est inférieur à ce qu’une orbite oculaire peut bloquer, ont entraîné l’#énucléation d’une trentaine de personnes [à vérifier, ndc] , mais rien ne semble aujourd’hui s’opposer à l’usage banalisé de cette arme. La doctrine dite de maintien de l’ordre cède ici du terrain face à une notion en usage dans les forces de l’ordre, celle de « #violences_urbaines  », beaucoup plus incertaine et périlleuse.

    La police a récemment été confrontée et à du terrorisme et à des manifestations massives. Qu’est-ce que cette concomitance implique pour les policiers ?

    A mes yeux, le terrorisme joue à trois niveaux dans la conduite des événements. Le premier est idéologique. Les policiers sont convaincus, et les politiques l’ont répété à l’envi, qu’ils sont en première ligne dans la guerre livrée contre le terrorisme. Les faits ne sont pas non plus de nature à les contredire : ils sont pris pour cibles dans de nombreuses attaques et l’ont parfois payé de leur vie. Dans un tel contexte anxiogène, lorsque le gouvernement centre toute sa communication sur la circulation d’armes à feu parmi les « gilets jaunes », sur la volonté de tuer, sur les risques mortels auxquels s’exposent les policiers à l’occasion des manifestations, on comprend que ces derniers en viennent à très vite puiser dans l’arsenal qu’on leur met entre les mains. Dans ces conditions, avoir évité un Gênes 2001 commence à relever du miracle.

    Le deuxième niveau est juridique. La loi d’octobre 2017 reprend, parmi les dispositions des lois successives sur l’état d’urgence, la facilitation des mesures d’#interdiction_de_manifestation. La manifestation est de plus en plus envisagée comme un problème d’ordre public plus que comme une #liberté_fondamentale, et cela marque les dispositifs mis en place – à commencer par les dispositifs judiciaires : on veut interpeller pour déferrer.

    Le troisième niveau est l’épuisement des forces de l’ordre, sursollicitées depuis 2015. Beaucoup parmi les policiers ne comprennent alors pas pourquoi, dans un contexte de guerre contre le terrorisme et avec les possibilités aujourd’hui offertes par le droit, on n’interdit tout simplement pas les manifestations en amont, plutôt que de les envoyer seuls face à la contestation sociale. Face aux manifestants, l’impatience et l’épuisement sont d’emblée à leur comble. L’épilogue était, pour une fois, écrit d’avance : à leur tour, les policiers demandent des comptes à l’Etat.

    Recensement provisoire des blessés graves des manifestations du mois de novembre-décembre 2018
    https://desarmons.net/index.php/2018/12/11/recensement-provisoire-des-blesses-graves-des-manifestations-du-mois-de-d

    #Politique_pénale #mutilations #terreur (version #extra_judiciaire)

  • « Le maintien de l’ordre à la française a explosé en vol » - Le Point
    https://www.lepoint.fr/societe/le-maintien-de-l-ordre-a-la-francaise-a-explose-en-vol-14-12-2018-2279276_23

    Le Point : Vous avez signalé sur Twitter plus de 120 potentiels abus de violence de la part des forces de l’ordre à la suite du mouvement des Gilets jaunes. Que souhaitez-vous montrer avec ces preuves ?

    David Dufresne : Cela fait 25 ans que je m’intéresse aux questions de police, et que j’écris des livres sur le maintien de l’ordre, sur l’affaire Tarnac, Tarnac, magasin général (Calmann-Lévy, prix des Assises du journalisme 2012). Quand j’ai commencé à voir apparaître des vidéos et photos sur Twitter, j’ai commencé à les pointer sans me douter que je rentrais dans un maelstrom de signalements. «  Allô Place Beauvau  » signifie «  chacun son rôle  ». Il y a les journalistes, les citoyens mais aussi la police, l’IGPN, le défenseur des droits, la justice. En ces temps troubles, je suis pour que chacun fasse son travail. Moi, je signale, recoupe, contextualise. C’est un travail de veille, de lanceur d’alerte, de citoyen. Pendant une semaine, il y a eu un déni politique et médiatique sur ces questions-là. Un déni qu’on a encore dans l’allocution d’Emmanuel Macron qui a dit « quand la violence se déchaîne, la liberté cesse. » Je ne sais pas de qui il parle, car la violence se déchaîne dans les deux sens. Il n’y a pas eu un mot sur les blessés, pas un mot sur ceux qui ont été mutilés, blessés à vie. Ce déni de démocratie est vraiment insupportable

    #Maintien_de_L'ordre #police #gilets_jaunes

    • Ce qui au départ était un bloc-note de réflexions et de liens devient en cette fin de journée un gros recoupement de vidéos pour comprendre comment un flic en est venu à sortir son flingue contre la foule, et, sans aucune surprise, constater que les motards ont balancé des grenades contre une foule qui passait ... sans les avoir calculés ! C’est encore plus flagrant grâce à la vidéo live de Remy Buisine qui était justement dans la foule à ce moment là.
      https://seenthis.net/messages/746539
      Effectivement le « maintient » de l’ordre a totalement explosé en vol...
      Cependant toutes ces vidéos me mettent très mal à l’aise car elle vont servir à inculper des gens alors qu’elles devraient servir à les disculper et à questionner les choix policiers...

    • Je crois que la séquence des motos de l’avenue Georges V est une indication forte que les tactiques agressives de maintien de l’ordre ont atteint leurs limites.

      L’emploi réglementaire des grenades dites de « désencerclement » ou du LBD, lanceur de balle dite de « défense » est censé être réservé à des situations critiques. Mais on voit bien que leur utilisation déborde de plus en plus largement de ce cadre, selon un principe qui veut que lorsqu’on dispose d’une arme, on s’en sert ; d’autant plus qu’à de très rares exceptions (cf. https://fr.reuters.com/article/topNews/idFRKBN1JV1VY-OFRTP ) rien ne vient sanctionner l’usage disproportionné.

      Au fil des répétitions des confrontations hebdomadaires, les protestataires, et parmi eux des groupes déterminés, ont bien compris que leur mobilité couplée à la surprise tactique était leur meilleur atout face à une police en limite de capacité qui commence à ressentir une forme d’épuisement. Il est d’ailleurs probable que certains cadres commencent à douter très fortement des conditions de leur emploi tactique (cf. l’Arc de triomphe le 1er décembre ou la séquence de l’av. Georges V d’hier) et donc de leur commandement voire du bien-fondé des principes tactiques. Voire de la direction politique des opérations.

      Il serait grand temps qu’une logique « républicaine » reprenne le dessus (le maintien de l’ordre n’est pas la guerre !) et mettent enfin en place des méthodes de désescalade. Il y a peu de chances que ce soit dans ce sens que la situation évolue, d’une part parce que la base policière et, en particulier, sa composante « dure » est favorable à une option « musclée », que l’échelon politique n’est pas loin de ne plus la contrôler (les primes et augmentations ne sont pas du tout bon signe - ça a toujours été le réflexe des gouvernements non démocratiques face à des troubles) mais aussi parce que la répétition des affrontements fait qu’à chaque fois la barre est un peu plus haute (cf. toutes proportions gardées les manifestations de deuil tous les 40 jours en Iran en 1978).

      Enfin, avec un niveau politique qui, pataugeant dans les hésitations, commence à laisser percevoir les différends internes, dont la communication tourne à vide et, surtout, recourt à des habiletés de maquignon (les « 100 euros »…) propose une réponse véritablement indigente à la crise, l’exaspération des protestataires ne peut que croître.

      Au rythme où ça va, on peut s’attendre, sous peu, à des incidents dramatiques (des morts lors des affrontements, p. ex.)

    • Effectivement, leur comportement n’a aucun sens.
      Ne pas prévoir à ce point les conséquences de leurs actes me stupéfie.

      On se retrouve avec la bonne vieille question entre l’incompétence et la malhonnêteté. Et on sait qu’ils sont parfaitement malhonnêtes, puisqu’il ne se passe pas un jour sans qu’ils nous insultent ou nous mentent comme des arracheurs de dents, en nous prenant effectivement pour un ramassis de crétins.

      J’en déduis que c’est leur agenda qui leur dicte leurs actes, car personne n’est assez con pour penser qu’en tapant sur l’ennemi et en le traitant de nom d’oiseaux en permanence, il ne va rien se passer.

      Donc, ils nous provoquent depuis 18 mois à présent et je dirais plutôt qu’ils ont dû être terriblement dépités par notre absence de réaction en face. La colère qui éclate, elle couve depuis une trentaine d’années, mais ils l’excitent délibérément depuis l’élection de Macron, le candidat du capitalisme, un mec qui n’a pas une once de charisme et qui incarne tout ce qui est détestable dans ce pays → pourquoi ce choix de la caste des possédants… surtout d’un type qui n’est pas vraiment des leurs ?

      Je pense très sincèrement que la caste des possédants en a assez de nous faire les poches petit à petit, qu’elle s’impatiente, qu’elle a faim… de pouvoir absolu, de curée sans vergogne. Je pense qu’elle pousse à la roue pour que nous nous révoltions enfin d’une manière qui légitimera l’emploi de la force brute et absolue et la fin de la mascarade démocratique qui, même avec la séparation des pouvoirs aux chiottes comme nous le vivons depuis l’arrivée de Macron, ne va ni assez vite, ni assez loin à leurs yeux.

      Ils cherchent délibérément le fait émeutier suffisant pour déclencher la loi martiale. Je pense qu’à ce titre, Macron et ses élus sont totalement sacrifiables (même si, clairement, personne ne leur a dit en leur filant le job) et que les ordres donnés aux flics laissent penser que leurs commanditaires espèrent enfin avoir un lynchage.

      Si tu penses les derniers mois avec le filtre de la mise en place délibérée d’une dictature financière, alors, subitement, plus personne n’agit comme un con.
      Par défaut, c’est probablement l’explication la plus logique.

    • Un point pratique (y a pas que Macron dans la vie... de la police) : c’est depuis la mobilisation contre la loi Travaille en 2016 que les grenades « de désencerclement » sont utilisées de manière offensive, souvent par salve, complétant lacrymogènes propulsées et manuelles, LBD, tonfas, télescopiques et canon à eau pour tronçonner les cortèges et disperser les manifestants. En mars 2016, il y a eu tant de blessés à Paris que le gouvernement avait du craindre qu’il ya ait des tués, il y a même eu ensuite une manif et une seule, le 4 avril 206, ou les flics ont tout fait « à la main » (lacrymos, tonfa, télescopique, violente ratonnade d’un bout nassé du cortège de tête).

      Menace. L’une des différences c’est que entre le 1er et le 8 décembre 2018, généraux de gendarmerie, experts et médiatiques annonçaient tous qu’il pouvait, qu’il y aurait des morts.

    • Article du dimanche 16/12/2018 du Parisien, à relire après coup…

      Policiers armés à moto : les « voltigeurs » sont-ils de retour dans les rues ? - Le Parisien
      http://www.leparisien.fr/faits-divers/policiers-armes-a-moto-les-voltigeurs-sont-ils-de-retour-dans-les-rues-16

      Pour écarter tout risque de débordement ce week-end [15-16/12/2018], les autorités ont ratissé large et mobilisé presque autant d’effectifs que lors de l’acte 4, marqué par 1700 interpellations, soit pas loin de 90 000 policiers et gendarmes, dont 8000 à Paris.

      Cette mobilisation hors-norme a notamment eu pour effet d’affecter au maintien de l’ordre des unités habituellement chargées d’autres types de mission. Selon nos informations, c’est le cas des compagnies de sécurisation et d’intervention (CSI), les fonctionnaires filmés dans la vidéo incriminée.

      « Economie de moyens »
      Mises en place lorsque Nicolas Sarkozy était ministre de l’Intérieur, en 2003, les CSI officient surtout dans l’anti-criminalité en zone sensible et interviennent par exemple dans le cadre de filatures, de flagrants délits ou de délits de fuite.

      Elles disposent pour cela d’armes létales et non-létales, comme des lanceurs de balle de défense, de tenues anti-émeutes similaires à celles des CRS mais aussi d’unités à moto, généralement des Yamaha TDM 900, le modèle vu samedi à Paris.

      « Economie de moyens oblige, les motos de la CSI 75 sont moins nombreuses que les motards susceptibles de les utiliser, explique au Parisien Philippe Capon, secrétaire général de l’Unsa Police. Les effectifs fonctionnant par roulement, une moto peut servir 20 heures sur 24, sur trois services. »

      Blessures
      Cette situation n’est ponctuellement plus tenable si les effectifs sont surmobilisés, comme c’était le cas samedi. D’où ces images, inhabituelles, de motos transportant deux fonctionnaires à la fois. « Mais jamais ces duos de policiers ne sont intervenus sur le maintien de l’ordre, assure-t-il. Ils ont seulement pu effectuer du ravitaillement de matériel, en apportant par exemple des grenades de désencerclement à des unités à court de munitions. »

      L’utilisation de lanceurs de balle de défense à l’arrière d’une moto, à l’arrêt et plus encore en mouvement, paraît improbable. Elle serait en outre extrêmement dangereuse.

      Malgré des restrictions d’utilisation, cette arme de dissuasion est à l’origine de blessures graves et parfois mortelles. Dans un rapport remis en 2017, le Défenseur des droits estimait que cette arme devait « s’utiliser horizontalement, un genou à terre » pour viser les membres inférieurs, ou « debout et portée à l’épaule » pour viser le torse.

    • Je bisse…

      L’utilisation de lanceurs de balle de défense à l’arrière d’une moto, à l’arrêt et plus encore en mouvement, paraît improbable. Elle serait en outre extrêmement dangereuse.

      Alors, pourquoi les en équiper ? Quant aux armes létales dont ils sont aussi équipés, on a bien vu le pistolet, pour l’instant (?) simplement brandi …

      c’était le 16 décembre…

    • Policiers agressés aux Champs-Elysées : les motos de tous les dangers - Libération
      https://www.liberation.fr/france/2018/12/24/policiers-agresses-aux-champs-elysees-les-motos-de-tous-les-dangers_16995

      L’évolution de cette doctrine est résumée par un acronyme à la préfecture de police de Paris : DAR, pour dispositif d’action rapide. Ces groupes plus légers que les unités spécialistes du maintien de l’ordre (CRS et gendarmes mobiles) ont pour consigne d’aller justement au contact des manifestants pour disperser le plus vite possible et interpeller. Parmi ces DAR, on retrouve le groupe moto de la compagnie de sécurisation et d’intervention de Paris. L’utilisation de ces policiers à moto rappelle forcément les « voltigeurs », dissous après la mort de Malik Oussekine. D’autant plus qu’ils ont pour mission, comme leurs ancêtres, de disperser la manifestation. Avec une différence cependant, au lieu d’un « bidule », ces policiers sont désormais équipés de fusils à balles en caoutchouc (LBD40) et de grenades explosives. Ils ne foncent donc pas dans la foule mais peuvent se positionner à proximité d’un cortège pour tirer. Les samedis 8 et 15 décembre, ils étaient ainsi une cinquantaine, « destinés à pouvoir se rendre rapidement en tout point de la capitale pour intervenir en cas de troubles » avait expliqué la préfecture à Libération.

      Samedi dernier, ce sont donc quatre policiers à moto de la compagnie de sécurisation et d’intervention de Paris qui sont envoyés face aux « gilets jaunes ». Ces agents, rompus aux interventions de lutte contre la criminalité, ne sont pas du tout des spécialistes de la gestion de foule, un savoir-faire bien spécifique dans la police et la gendarmerie. La scène, filmée et largement relayée depuis, est un parfait exemple du risque pris par les autorités dans l’utilisation de telles unités pour intervenir lors de manifestations.

      Seul rempart : leur arme à feu

      A l’aide de grenades - trois détonations correspondant à des grenades de désencerclement sont audibles sur la vidéo, une arme qui propulse 18 galets en caoutchouc à très forte vitesse et peut gravement blesser au visage - ces policiers tentent de disperser la foule. Le samedi 8 décembre, David Dufresne, journaliste et auteur d’un livre référence sur le maintien de l’ordre, avait assisté à une scène similaire, où les policiers avaient cette fois réussi leur manœuvre : « Trois motos dont une avec deux policiers s’étaient arrêtées, ils avaient lancé des grenades de désencerclement, puis étaient partis tout aussi vite qu’ils étaient arrivés. » Mais ce samedi, les policiers ne parviennent pas à se replier assez rapidement. Les explosions des grenades provoquent une réaction d’hostilité des manifestants, qui fondent sur les fonctionnaires, peu nombreux. Les « unités constituées », capables de faire face sans tirer à balle réelle sont trop éloignées. Les quatre motards sont en danger, avec pour seul rempart leur arme à feu. Une situation redoutée par les forces de l’ordre et qui apparaît en contradiction avec la tradition du maintien de l’ordre en France.

      Interrogée à propos de cet événement, la préfecture de police de Paris n’a pas répondu à nos questions. « On considère que l’on est face à des violences urbaines et non plus une manifestation traditionnelle », expliquait récemment à Libération un haut gradé de la préfecture pour justifier cette nouvelle méthode. La scène des Champs-Élysées résonne désormais comme un avertissement pour les autorités.

      #Maintien_de_L'ordre #Police #Voltigeurs

    • Grenadocratie, affiche collée près de la station Anvers, à Paris
      https://twitter.com/Humaginaire/status/1077173221898809344

      Pourquoi, mais pourquoi ? Parce que en terme de com #violences_urbaines, de #casseurs et de #séditieux, en terme pénal aussi ça ratisse large et flou pour renouveler/étendre la fonction de la #justice en tant que service rendu à la police (cf. Michel Foucault, quand même) qui sait pouvoir compter sur la loi son application, ses catégories pour une légitimation permanente : #bandes #association_de_malfaiteurs #attroupement_en_vue_de_commettre_des_violences...etc.

  • #souillage_en_reunion
    #semences_chaotiques
    Justice. Où sont passés les #émeutiers, les vrais ? | L’Humanité
    https://www.humanite.fr/justice-ou-sont-passes-les-emeutiers-les-vrais-664723

    Autant de preuves irréfragables pour l’appareil judiciaire qui a la lourde charge de juger, en trois jours, 227 personnes majeures déférées devant les tribunaux. La réponse se veut à la hauteur des #violences_urbaines, jamais vues à Paris depuis #Mai_68. C’est dans ce contexte que le jeune Wissam se présente dans le box des accusés de la salle 6.05 du nouveau tribunal de grande instance (TGI) de Paris. Tout semble le désigner, sur le papier, comme l’un des casseurs qui ont « souillé » l’#Arc_de_triomphe, comme l’a dénoncé le président de la République. Un de ceux qui se sont employés à dégrader un monument national, à « semer le chaos » sur la plus belle avenue du monde.

    Sur 57 personnes jugées lundi, 47 ont été condamnées, dont 20 à des peines de #prison_ferme.

    C’est un autre son de cloche une fois à la barre. « Je ne suis ni un manifestant ni un gilet jaune ou quoi que ce soit. J’y suis allé parce que c’était un événement impressionnant. Je voulais aller voir », raconte ce jeune homme de 19 ans en service civique dans un foyer pour personnes souffrant de handicap mental. Son CV mentionne plusieurs engagements associatifs. Une fois l’audience terminée, rien ne permet d’incriminer ce Breton, hormis le fait d’avoir ramassé par terre ces deux pièces, d’une valeur de 2 euros chacune. Du point de vue de la loi, c’est du recel. Il s’en sortira avec une amende de 200 euros avec sursis. À la sortie de l’audience, son copain Tom n’en revient pas. Si Wissam a été localisé dans la zone d’émeutes, « c’est parce qu’il était chez moi, rue Boissière, pas très loin de l’Arc de triomphe. On a joué à Fifa (un jeu vidéo – NDLR) une bonne partie de la journée ».

    Comme cet homme venu de la Marne qui, poursuivi par des CRS, a filé droit vers la place de la Concorde, remplie de gendarmes mobiles. Ou ces manifestants incapables de situer le jardin des Tuileries. « Paumé » dans la capitale, Mickaël, étancheur à Nevers, suivait « les gilets, le mouvement » quand il se retrouve « bloqué entre deux groupes de policiers ». Il lance alors un bout de goudron pour les faire reculer. Il a été condamné à quatre mois de prison ferme. D’autres sont venus du Jura, de la Meuse, de la Drôme… la plupart ont été condamnés à une interdiction de venir à Paris pendant plusieurs mois.

  • How community gardens and block associations help stem urban violence

    Last summer, this small garden also became a testing ground for an experiment in crime prevention. Thanks to the Chicago Safe and Peaceful Communities Fund, a “rapid-response” charitable initiative giving seed money to communities suffering disproportionately from crime, the garden received a small stipend to run a Saturday program for kids, Planting and Playing Summer Garden Arts. One of 121 small grants, the funds provided an entire summer of Saturday activities for neighborhood kids.

    Community gardens, and other neighborhood-level organizations like block clubs and arts groups, aren’t typically viewed as direct solutions to violence. Decades of ”broken window” policing persuaded many cities to adopt top-down crime-prevention plans focused on punishing small offenses (recent research, however, indicates that this strategy had the opposite effect).


    https://www.curbed.com/2018/2/27/17058094/chicago-crime-neighborhood-group-community
    #jardinage #urban_matter #violence #villes #violences_urbaines #agriculture_urbaine #jardins_communautaires #USA #Etats-Unis #alternatives #Chicago

  • Urbaniser pour dépolitiser : la rhétorique du #spatialisme et du #localisme

    #Jean-Pierre_Garnier s’intéresse ici aux #violences_urbaines, s’interroge sur leur définition et sur leurs origines. Il précise ainsi qu’il s’agit des violences « qui troublent l’#espace_public urbain ». Il montre ensuite que le fait de qualifier un problème d’urbain est une façon de neutraliser le conflit et de nier la division, en un mot de dépolitiser le problème.

    Il s’intéresse ensuite au traitement de ces violences par le recours à deux idéologies : l’idéologie du spatialisme et celle du localisme. Le spatialisme consiste à transfigurer les problèmes sociaux en problèmes dus à un certain type d’espace. C’est une idéologie en vertu de laquelle le cadre de vie détermine très largement le mode de vie : la configuration du bâti conditionne les comportements. Le localisme est une démarche qui consiste à formuler, étudier et traiter les problèmes là où ils se posent : au lieu de remonter aux processus globaux générateurs des violences, on se borne à traiter les conséquences locales.

    https://www.canal-u.tv/video/ecole_normale_superieure_de_lyon/urbaniser_pour_depolitiser_la_rhetorique_du_spatialisme_et_du_localisme.5037
    #urbanisme #urban_matter #villes #violence

    • "Urbaniser" pour dépolitiser. La rhétorique du spatialisme et du localisme

      “ Tant que la misère est rangée quelque part, ça arrange beaucoup de monde. Le problème, c’est qu’au bout d’un moment, ça déborde. ”
      Jean-Louis Borloo, ministre de la ville

      La “politique de la ville” porte bien mal son nom. Du moins si l’on entend par politique un champ et des pratiques qui ont partie liée avec la division et le conflit. Non pas que l’une et l’autre soient absents des préoccupations qui sont à l’origine de la dite politique. Bien au contraire, puisque sa raison d’être majeure, aussi inavouée soit-elle dans sa présentation officielle, est précisément de chercher coûte que coûte à neutraliser le conflit et à nier la division. Pour ce faire, il suffira de qualifier d’“ urbaine ” la question posée. Et de circonscrire à “la ville” les réponses qui lui seront apportées.
      Cette question est celle de la (ou des) “violence(s)” et de “l’insécurité” qu’elle(s) engendre(ent). Mais pas n’importe lesquelles. On ne parlera guère, sinon sur le mode allusif, des violences d’ordre économique, institutionnel ou symbolique infligées aux couches populaires dans une société de plus en plus inégalitaire, pas plus que l’insécurité qui en résulte pour elles au plan matériel (professionnel, résidentiel, sanitaire, alimentaire...), mais aussi psychologique et existentiel. Cette violence sociale s’aggrave, pour les générations issues de l’immigration, des vexations racistes en tout genre (discrimination à l’embauche ou dans l’accès au logement, “contrôles d’identité” à répétition, jugements iniques dans les tribunaux, etc.) suscitées par leur “faciès” ou leur nom.

      http://1libertaire.free.fr/JPGarnier04.html

  • La colère monte dans les rangs de la #Police
    https://www.mediapart.fr/journal/france/111016/la-colere-monte-dans-les-rangs-de-la-police

    L’exaspération des policiers est à son comble, après l’agression dont ont été victimes leurs collègues ce week-end à #Viry-Châtillon. Depuis deux ans, la menace terroriste et l’encadrement des manifestations contre la loi sur le travail ont épuisé des hommes et des femmes qui doivent vivre avec l’idée qu’on peut s’en prendre à eux sur leur lieu de travail comme à leur domicile.

    #France #Grande_Borne #Violences_urbaines

  • Troisième nuit de violences urbaines à Tourcoing
    http://www.lemonde.fr/police-justice/article/2015/06/04/troisieme-nuit-de-violences-urbaines-a-tourcoing_4647520_1653578.html

    Vingt personnes ont été placées en garde à vue dans la nuit de mercredi à jeudi. Les échauffourées avaient débuté avec la mort, lundi, d’un automobiliste ayant tenté d’échapper à un #contrôle de #police.

    #violences_urbaines disent-ils