• Violette ou l’impossible laideur féminine au cinéma | contreligne
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    La laideur comme signature
    Pour Violette Leduc, la laideur fut une signature. Quel dilemme pour un cinéaste, surtout un cinéaste homme ! S’il va pour la laideur, va-t-on l’accuser de misogynie, de la haine des femmes ? Et d’ailleurs comment trouver une leading lady assez laide pour l’incarner ? Car au cinéma, comme dans la vie, la laideur masculine se distingue de la laideur féminine. Pour un homme, avoir une belle gueule (Bogart, Gabin, Depardieu) est un atout. Pour une femme, cela vous condamne aux seconds rôles.
    Dans un article récent du New Yorker, Adelle Waldman aborde cette asymétrie avec perspicacité, en accusant les romanciers d’avoir du mal à admettre combien la beauté féminine compte dans le comportement des hommes et des femmes :
    “On considère souvent la beauté comme un sujet essentiellement féminin, quelque chose de trivial et de frivole qui ne devrait pas autant préoccuper les femmes. Tandis que les hommes sont connus pour avoir un rapport direct et simple avec la beauté : la beauté les attire. On admet que cette situation est fâcheuse, moralement suspecte—mais on n’y peut rien, c’est naturel, biologique. Quelle ironie ! Les femmes sont sujettes à un interminable contrôle, exténuant et humiliant. En même temps on se moque de leur façon de se préoccuper de leur beauté, de leurs efforts pour la rehausser, pour la maintenir, tandis que les hommes…il leur suffit juste d’être des hommes.”
    C’est ici qu’il faut évoquer Maurice Sachs, avec qui Violette Leduc a vécu une relation houleuse pendant la guerre, faite de marché noir, de complicité littéraire, et de sado-masochisme,…. Dans un journal publié après sa mort, Maurice Sachs la transpose en une certaine Lodève :
    “Elle porte cette croix, la pire, d’être incroyablement laide et de le savoir. Ah ! Ce nez grotesque qui au-dessus d’un menton ravalé lui fait une figure de gargouille, ce front bas, ces pommettes larges et saillantes, cette peau épaisse, cette bouche indiscrètement sensuelle, ces gros yeux à fleur de peau, quelle fée vicieuse les a assemblés en un seul visage comme pour one caricature de caricatures ? Un exemple absurde de ce que jamais la nature ne serait assez cruelle pour retenir en one seule figure. Ce masque monstrueux et risible surmonte un très beau corps, long, mince, élancé, souple, élégant. Ah ! Vraiment quel partage extrême, quel excès ici et là !”

    cc @beautefatale

    #femmes #beauté #laideur #Violette-Leduc