• La betterave, la gauche, le peuple - et nous Chez Renard - Tomjo

    Le 12 janvier 2023, la coopérative sucrière #Tereos est condamnée à une amende record d’un demi-million d’euros pour l’ #écocide de l’Escaut en 2020 [1]. Que ce soit au moment de la catastrophe, lors de l’audience en décembre 2022, ou du délibéré quelques semaines plus tard, on n’a vu ni le député local ni le maire exiger des comptes du deuxième groupe sucrier mondial devant une foule vengeresse. Non plus qu’on n’a entendu le « député reporter » #François_Ruffin, dans sa cuisine ou aux portes de l’usine, dénoncer les méfaits du sucre sur la #santé et de Tereos sur la vie. On n’a pas vu le ministre de l’industrie Renaud Lescure taper du poing en sous-préfecture, ni #Xavier_Bertrand, président du Conseil régional, défiler dans les rues. Le président des Hauts-de-France préférant manifester à Paris le 7 février 2023, juché sur les tracteurs des betteraviers pour défendre l’épandage de #néonicotinoïdes : « Il n’est pas question de faire les mêmes conneries sur l’agriculture que sur le nucléaire ! »

    
À l’inverse, aucun élu n’a manqué pour défendre l’usine à l’annonce de la fermeture de la sucrerie d’Escaudoeuvres le 7 mars suivant. A entendre nos représentants du peuple, non seulement celle-ci ferait la prospérité des gens du Nord, mais elle participerait d’un patrimoine digne d’être défendu – demandez à la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles), appelée à la rescousse de l’usine pendant les procès pour relancer le mythe de la betterave sucrière, impériale et napoléonienne. Seul Renart s’échine à briser le silence d’une région, de ses habitants et # ses élus, sur leurs méfaits.

    #Pollution historique, amende record. Le 9 avril 2020, un bassin de décantation de la #sucrerie d’Escaudoeuvres déverse 100 000 m3 d’eau contaminée dans l’Escaut. Le préfet n’ayant pas prévenu les autorités belges, la pollution a tout loisir de passer les écluses, descendre la rivière, et supprimer toute trace de vie sur plus de 70km, poissons, batraciens, libellules. Les autorités belges et des associations françaises attentent un procès à Tereos. Trois ans plus tard, le 12 janvier 2023, le juge inflige neuf millions d’euros de dommages et intérêts pour restauration de la rivière, et une amende de 500 000 euros – laissant l’État français, lui aussi muet depuis le début, sauf de toute responsabilité pour sa négligence. L’avocat des betteraviers se réjouit que le montant soit « très inférieur aux demandes qui ont été faites [2]. » C’est tout de même plus que la dernière grande catastrophe écologique survenue en France, le naufrage de l’Erika en 1999, qui avait valu à Total une amende de 375 000 euros, soit 424 000 euros d’aujourd’hui.

    Les 123 salariés et les habitants d’Escaudœuvres s’apprêtaient à célébrer les 150 ans de leur sucrerie quand Tereos annonce sa fermeture le 7 mars, à peine deux mois après le délibéré. Ces élus qui n’avaient rien dit, et rien à dire, sur la catastrophe de Tereos, se précipitent pour dénoncer sa fermeture [3]. Parmi les trémolos, ceux du député Guy Bricout et du maire Thierry Bouteman :

    Cambrai, terre agro-alimentaire depuis 150 ans : c’est notre passé, c’est notre présent, et nous croyons que c’est notre avenir. Nous demandons l’arrêt de tout processus qui conduirait à la fermeture de notre sucrerie à Escaudœuvres. Il faut être déconnecté, ou perdre confiance, pour prendre une telle décision. Je ne les crois pas déconnectés, je crois qu’ils ont perdu confiance. Pas nous. Pas les sucriers, pas les saisonniers, pas les intérimaires, pas les sous-traitants depuis 150 ans. Pas les élus, pas les habitants.

    En écho, le ministre délégué à l’industrie #Renaud_Lescure se déplace quelques jours plus tard pour déclarer que « l’industrie, c’est une arme anti-colère, l’industrie c’est une arme d’espoir. » Il annonce trois millions d’euros pour un « rebond industriel dans le Cambrésis ». Puis c’est au sénateur communiste Eric Bocquet de rappeler combien « la sucrerie, c’est l’ADN de la commune » (bonjour le diabète), une « véritable institution dans l’arrondissement de Cambrai », dont l’« histoire » et la « richesse » rendent sa fermeture « particulièrement violente » [4].
    
Chacun sa partition, mais le premier arrivé devant l’usine pour donner le ton, c’est l’« insoumis » amiénois François Ruffin : la betterave à sucre serait selon notre « député reporter », comme il se présente, une « production industrielle qui appartient à notre patrimoine » national, un fruit de « l’intelligence humaine » inventé pendant le blocus continental entre 1806 et 1815, justifiant par là que « l’État intervienne dans l’économie, construise des filières dans la durée, et fasse que les vies, les usines, l’économie ne dépendent pas seulement des cours de bourse. » 

    Si les cours de bourse ne doivent pas décider de la fermeture d’une usine (dont le groupe Tereos empoche cette année des profits records : 6,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires sur 2022/2023, +29 % en un an), au nom de quoi doit-elle tourner ? Son utilité sociale ? Son histoire centenaire ?

    Le « député-reporter » attaque son discours-reportage par la glorification de l’épopée scientifique du sucre. Nous, on commencerait plutôt par toutes ces maladies de l’ #agro-industrie, et du sucre en particulier, qui représentent désormais la première cause de mortalité dans le monde. Savez-vous, lecteur, qu’entre le #diabète, l’ #obésité, les maladies cardiovasculaires et l’ #hypertension artérielle, la bouffe tue désormais plus que la faim ! Vu la progression actuelle du diabète (+ 4,5 % par an en France par exemple), la revue scientifique The Lancet prédit 1,3 milliard de malades du sucre en 2050 dans le monde - presque 10 % de la population mondiale [5] ! Du sucre, on en trouve partout, dans les sodas bien sûr, mais aussi dans les chips, les pizzas, le pain de mie, le pesto, et toutes les pâtées préparées. Le sucre, c’est la drogue de l’industrie alimentaire.
    
Accordons à Ruffin qu’avec une telle entrée en matière – « Vous êtes la première cause de mortalité dans le monde » –, l’accueil eut été réservé. Mieux vaut seriner combien la betterave, comme toute autre nuisance industrielle, est objet de fierté dans une région de labeur et pour un peuple courageux. Ce que Ruffin rabâche depuis dix ans [6]. Ce qu’il est venu rabâcher sur les lieux mêmes d’une catastrophe historique qui élimina toute trace de vie sur 70 km, des poissons aux batraciens :

    Les salariés me disent combien ils aiment leur travail, combien ils aiment le sucre. Je pense que cet amour du métier, quand on est prof, soignant ou dans l’industrie... faut pas croire que le travail ce soit seulement un salaire. C’est aussi un amour de son métier. Les gens me disent : "Tereos, c’est notre famille, c’est notre maison, on y est bien, on est prêts à passer quatre noëls d’affilée sans voir nos enfants. Mon gamin il a quatre ans et je n’ai pas passé un seul noël avec lui. On est prêts à faire 190 heures par mois pour faire le boulot".

    Accordons encore que douze heures de turbin, que l’on soit salarié d’une sucrerie ou esclave d’un champ de canne à sucre, finissent en effet par créer des liens fraternels, mais ne peut-on jamais dans ce Nord funèbre tisser de liens fraternels ailleurs que dans les tranchées, au fond des mines, ou sur une ligne de production ? Sommes-nous à jamais enfermés dans un roman de Zola ou de Van der Meersch ?
    
Il en a fallu des mensonges, des récits grandioses et des mythes fondateurs, répétés de gauche à droite, par les patrons et parfois par les ouvriers, pour excuser les saloperies dont on se rend coupable ou consentir à son exploitation. Demandez aux combattants de la « Bataille du charbon », quand les mines nationalisées, gérées par un accord gaullo-communiste, restauraient le salaire à la tâche, augmentaient les cadences, les taux de silicose et de mortalité, en échange de congés payés [7]. Est-ce là votre « progrès » ?

    Aujourd’hui, Ruffin et ses pareils, qui n’ont pas perdu leurs quatre derniers noëls dans la mélasse, entendent utiliser « l’histoire grandiose du sucre de betterave » afin de justifier le sauvetage de l’industrie betteravière. Mais c’est un mythe que l’invention du sucre de betterave par Benjamin Delessert, et la création d’une filière sucrière par un Plan d’investissements de Napoléon. Une mystification que Le Betteravier français propage à l’envi pour justifier l’œuvre supérieure de la corporation devant ses calomniateurs écologistes [8], que Le Monde répète pour magnifier le Génie technoscientifique [9], ainsi que Fakir, le journal de François Ruffin, pour célébrer le volontarisme étatique [10].
Reprenons donc depuis le début la véritable histoire du sucre de betterave, bien plus passionnante que la fausse.

    Arnaque impériale chez les sucriers lillois
    Ou le mythe de la betterave napoléonienne

    Suivant la version courante, le prix du sucre sur le continent aurait été multiplié par dix à la suite du blocus continental décrété en 1806 contre l’Angleterre par Napoléon. La canne à sucre, cultivée par des esclaves, arrivait jusqu’alors des Antilles, avant d’être raffinée en métropole. Il aurait fallu trouver d’urgence une solution à la pénurie. Sur les conseils du célèbre chimiste Jean-Antoine Chaptal, #Napoléon signe le 25 mars 1811 un décret d’encouragement de la betterave à sucre : il réserve 32 000 hectares de culture à la betterave, dont 4 000 dans le nord de la France et en Wallonie (alors française), et promet un prix d’un million de francs à qui ramènerait le premier pain de sucre.
    
Vient ensuite la scène légendaire. Le 2 janvier 1812, Chaptal court chez l’empereur. Un industriel versé dans la science, Benjamin Delessert, aurait relevé le challenge dans son usine de Passy. L’empereur et le chimiste se seraient hâtés pour admirer les pains de sucre et, dans son enthousiasme, Napoléon aurait décroché sa propre croix de la Légion d’honneur pour en décorer Delessert.
Moralité : dans l’adversité de la guerre et de la pénurie, l’œuvre conjuguée d’un chef d’État volontaire (Napoléon), d’un scientifique compétent (Chaptal) et d’un industriel ingénieux (Delessert), nous aurait offert le premier pain de sucre de betterave – et l’abondance à portée de main.
A peu près tout est faux. En rétablissant certains faits, en observant les autres d’un autre point de vue, on découvre en réalité une sombre affaire de #vol_industriel et de #copinage au plus haut de l’État, suivie d’une lamentable défaite commerciale.


    Napoléon 1er, protecteur de l’agriculture et de l’industrie, Bronze, Henri Lemaire, 1854, Palais des Beaux-arts de Lille.

    Premier mythe : l’urgence du blocus. Dans un article assez complet sur le sucre de betterave, l’historien Ludovic Laloux est formel :
    Prévaut souvent l’idée que le blocus britannique instauré en 1806 aurait empêché de débarquer du sucre dans les ports français et, en réaction, donné l’idée à Napoléon d’encourager la production de sucre à partir de la betterave. Or, la première intervention de l’Empereur en ce sens date de 1811. En fait, dès 1791, la situation saccharifère s’avère plus complexe en Europe avec un effondrement des approvisionnements en sucre de canne [11].

    Pourquoi cet effondrement ?
Dans les remous de la Révolution française, les esclaves de Saint-Domingue s’insurgent fin août 1791 et obtiennent leur affranchissement. La main d’œuvre se rebiffe. Le prix du sucre explose. Il faut s’imaginer Saint-Domingue comme une île-usine, et même la première du monde. 500 000 esclaves produisent à la veille de l’insurrection 80 000 tonnes de canne à sucre par an (à titre de comparaison, 600 000 esclaves travaillent alors dans les colonies américaines) [12]. Une « crise du sucre » éclate immanquablement à Paris en janvier 1792. Les femmes attaquent les commerces, les hommes la police, puis on réclame du pain. Rien d’original. On peut recommencer la scène autant que vous voulez, avec du Nutella ou des paquets de cigarettes.
    
Mais le blocus ? En 1810, quatre ans après son instauration, dans une lettre à son frère Louis-Napoléon, l’empereur doit admettre l’efficacité de la contrebande : « C’est une erreur de croire que la France souffre de l’état actuel. Les denrées coloniales sont en si grande quantité qu’elle ne peut pas en manquer de longtemps, et le sirop de raisin et le miel suppléent partout au sucre [13]. » Le blocus n’inquiète en rien l’empereur.

    Deuxième mythe : l’invention du sucre de betterave. A partir des découvertes du chimiste Andreas Marggraf, son maître, le chimiste prussien Franz Achard, fils de huguenots du Dauphiné et membre de l’Académie royale des sciences, plante ses premières betteraves à sucre en 1796. Le roi Frédéric-Guillaume III lui accorde un terrain et des subsides pour une première raffinerie en 1801. L’Allemagne est la plus avancée dans le sucre local. Son procédé inquiète le gouvernement anglais, producteur et importateur de sucre de canne, qui se lance dans une manœuvre de déstabilisation industrielle. Il tente de soudoyer Achard, contre 50 000 écus d’abord puis 200 000 ensuite, afin que ce dernier publie un article scientifique dénigrant ses propres recherches. L’honnête Achard refuse et il revient au chimiste anglais Humphry Davy d’expliquer combien la betterave sera à jamais impropre à la consommation.

    La « désinformation » paraît fonctionner. En France, l’Académie des sciences sabote ses propres recherches sur la betterave, et Parmentier, le célèbre pharmacien picard qui fit le succès de la pomme de terre, milite encore en 1805 en faveur d’un sucre extrait du raisin.

    Les précurseurs français du sucre de betterave ne sont pas à l’Académie, ni dans les salons impériaux, mais à Lille, à Douai et en Alsace. Leurs Sociétés d’agriculture connaissent depuis longtemps la betterave fourragère et suivent de près les progrès du raffinage de la betterave réalisés en Belgique, aux Pays-Bas et en Allemagne. Le scientifique François Thierry expose ses recherches dans La Feuille de Lille en avril 1810, et récolte ses premiers pains de sucre à l’automne. Expérience concluante au point que le préfet du Nord envoie des échantillons au ministre de l’Intérieur Montalivet le 7 novembre, et cette lettre à M. Thierry : « Votre sucre a la couleur, le grain, le brillant, j’ose dire même la saveur de celui des colonies [14]. » Le ministre Montalivet envoie à son tour remerciements et gratification au Lillois.

    Quelques jours plus tard, le 19 novembre, un pharmacien peu scrupuleux présente devant l’Académie des sciences de Paris deux pains de sucre sortis mystérieusement du laboratoire du chimiste Jean-Pierre Barruel, chercheur à l’École de médecine de Paris. L’affaire est bidon et Barruel confondu en « charlatanisme » par ses pairs [15]. Elle prouve cependant que les milieux scientifiques parisiens s’intéressent à la betterave sucrière.
Au même moment, les commerçants lillois Crespel, Dellisse et Parsy améliorent les procédés d’Achard, d’abord en séparant le sucre de la mélasse grâce à une presse à vis, puis en utilisant le charbon animal (de l’os calciné) pour blanchir le sucre [16]. Ils remettent leur premier pain de sucre en décembre 1810 au maire de Lille, M. Brigode, puis installent leur sucrerie rue de l’Arc, dans le Vieux-Lille. En février 1811, un pharmacien lillois du nom de Drapiez parvient également à tirer deux pains de sucre de qualité.

    Le 10 janvier, le ministre Montalivet vante auprès de l’empereur les progrès du sucre de betterave… dans les pays germaniques, sans mentionner les Lillois. Quand deux mois plus tard, Napoléon (aidé de Chaptal) publie son fameux décret à un million de francs, il sait qu’à Lille on fabrique des pains de sucre de qualité commercialisable.

    Troisième mythe : l’empereur visionnaire. Pour saisir l’entourloupe, il faut s’attarder sur la culture de la betterave. La betterave se plante fin mars. Un campagne de production suivant un décret signé le 25 du même mois n’a donc aucune chance de réussir. Il aurait fallu de surcroît disposer d’un stock de graines que la France ne possède pas : la betterave est bisannuelle, elle fleurit une année, et ne donne des graines que l’année suivante.
Aussi, connaissant la nature assez peu aventureuse des paysans, il est compréhensible que ceux-ci s’abstiennent de cultiver en grande quantité, et du jour au lendemain, une espèce inconnue. Enfin, le peu de betteraves récoltées à l’automne 1811 s’entasse devant des raffineries inexistantes ou des raffineurs encore incompétents.
    
Bref, la planification de la betterave à sucre ressemble davantage à un caprice d’empereur qu’à une décision mûrement établie par un technocrate visionnaire. Dans son rapport du 30 décembre 1811, Montalivet doit masquer le fiasco. C’est alors que Napoléon se tourne vers #Chaptal pour sa politique sucrière.

    Quatrième mythe : l’épisode de l’intrépide Benjamin Delessert. Jean-Antoine Chaptal est en 1811 un chimiste réputé, professeur à l’école Polytechnique, membre de l’Académie française, mais aussi l’ancien ministre de l’Intérieur de Napoléon de 1801 à 1804 – auteur de cette loi qui instaura le département, l’arrondissement, le canton, et la commune. Chaptal est enfin un industriel d’acide sulfurique, et le propriétaire depuis 1806 de terres et d’une raffinerie de betterave à sucre dans l’Indre-et-Loire. C’est en bref, au sens le plus actuel du mot un technocrate polyvalent. Tout à la fois scientifique, politique et entrepreneur, jouant successivement et simultanément de ces diverses compétences.
    
Un autre historien résume la politique betteravière française : « Non seulement il [Chaptal] est à l’origine de tous les décrets qui lui ont donné naissance mais encore il l’a pratiquée lui-même à Chanteloup, sur ses propres terres, dès 1806 [17]. » Un banal conflit d’intérêts.
Chaptal a pour ami proche Benjamin Delessert, riche banquier issu d’une riche famille suisse et calviniste de banquiers, propriétaire d’une usine textile à Passy. Sa mère était amie avec Benjamin Franklin, et lui-même rencontra Adam Smith et James Watt pendant son voyage d’études en Écosse. Delessert fut maire du 3ème arrondissement de Paris en 1800 et avait déjà monté une raffinerie de sucre de canne en 1801 alors que son cousin Armand œuvrait lui-même dans le raffinage, à Nantes, avec Louis Say (future #Béghin-Say, future Tereos). En 1801, Delessert avait aidé Chaptal, alors ministre de l’Intérieur, à monter sa Société d’encouragement pour l’industrie nationale, puis avait été nommé Régent de la Banque de France en 1802. Voilà le C.V. de nos deux combinards quand l’empereur s’apprête à soutenir la production betteravière de son premier décret.

    A la fin de l’année 1811, la raffinerie du Vieux-Lille a déjà produit 500 kilos de sucre, et elle en produira 10 000 l’année suivante. Ainsi…

    Lorsqu’en 1812, Derosne [un chimiste proche de l’Empereur] et Chaptal arrivèrent à Lille avec mission d’y installer une sucrerie, leur surprise fut extrême en apprenant, dès leur arrivée, que le problème était résolu et que la petite fabrique de Crespel et Parsy fonctionnait depuis près de deux années. Ils s’en retournèrent à Paris, mais il ne paraît pas qu’ils aient averti Napoléon de ce qu’ils avaient vu, car les industriels lillois n’entendirent point parler de la récompense promise. Celle-ci fut décernée, la même année, à B. Delessert qui, occupé des mêmes recherches, obtint, mais deux ans plus tard, les mêmes résultats que Crespel et Parsy. […] Il est bon de constater qu’au moment même où Delessert était supposé découvrir le moyen de tirer du sucre de la betterave en 1812, Crespel et Parsy livraient déjà régulièrement leurs produits, à raison de 10 000 kilogrammes par an, à la consommation, précise un Dictionnaire encyclopédique et biographique de l’Industrie et des arts industriels de 1883 [18].

    Quand Napoléon débarque chez Delessert, celui-ci vient d’extraire 74kg de sucre à partir de cinq tonnes de betteraves, soit la quantité produite un an auparavant par les Lillois. Le duo Chaptal-Delessert semble bien avoir intrigué pour se réserver le million à investir dans le sucre. En 1812, Chaptal double ses terres de betterave, qui passent à cinquante hectares. Il y récolte vingt tonnes par hectare, emploie seize personnes, et prétend utiliser le procédé inventé par Delessert.
Delessert quant à lui ajoute le sucre de betterave à ses multiples affaires. Il fondera en 1818 la Caisse d’Épargne et – comme cette histoire est décidément riche de ricochets ! – notre populaire Livret A.

    Cinquième et dernier mythe : le Plan qui créa la filière. Le 15 janvier 1812, Napoléon signe un second décret qui cette fois réserve 100 000 hectares de terres à la betterave, offre 500 licences de raffinage, et crée quatre raffineries impériales. La France doit trouver 500 tonnes de graines qu’elle n’a pas, et les paysans sont d’autant plus réticents que la campagne précédente fut désastreuse. Seuls 13 000 hectares sont plantés. La récolte atteint péniblement 1,5t de sucre, 27 % de plus que l’année précédente.
    
L’impérial fiasco de Napoléon cesse là. La guerre l’appelle, il perd et abdique au printemps 1814. Les rois Bourbons installent leur Restauration. Fin du blocus. La politique betteravière française est enterrée. Les faillites se multiplient. Seul le Nord continue de planter de la betterave sucrière, et le Lillois Crespel, parti à Douai, demeure longtemps l’unique fabricant de sucre de betterave de France. Il résiste tant et si bien au « lobby » du sucre colonial qu’un boulevard porte aujourd’hui son nom à Arras, où trône sa statue. Le mythe napoléonien est quant à lui bien plus répandu. On doit au patronat lillois, en 1854, un bronze de Napoléon premier du nom, aux pieds duquel sont gravés les décrets relatifs à la betterave, ainsi qu’une grosse betterave. La statue est restée jusqu’en 1976 au milieu de la Vieille Bourse, sur la Grand’Place de Lille, avant d’être remisée dans la rotonde Napoléon du Palais des Beaux-Arts.

    Si l’invention du sucre de betterave par Napoléon est devenue un mythe au XIX° siècle, il s’agit d’abord d’un mythe patronal.

    On peine à le saisir, mais la « question des sucres » est pendant la première moitié du XIX° siècle un sujet politique des plus épineux. Le roi Louis-Philippe taxe le « sucre indigène » en 1838 et va jusqu’à menacer d’interdiction le commerce de betterave. La bataille est commerciale autant qu’idéologique. Avec la canne à sucre, les armateurs, les ports et les propriétaires coloniaux défendent les rentes de leur vieille économie agraire/féodale, et donc la monarchie. Avec le « sucre indigène » extrait de la betterave, les industriels défendent une nouvelle économie plus dynamique, plus scientifique, plus moderne, et donc un système politique bourgeois. Contre les monarchistes, les rentiers, les esclavagistes, et les Anglais : la betterave !

    Louis-Napoléon publie en 1842, depuis sa geôle picarde du fort du Ham, une Analyse de la question des sucres [19]. Faut-il favoriser le travail des esclaves ou celui des ouvriers français libres ? « Il est impossible d’arrêter la marche de la civilisation, répond le futur empereur, et de dire aux hommes de couleur qui vivent sous la domination française : ‘’Vous ne serez jamais libres.’’ » Vive la betterave.

    Alors que la production française ne passe que de 4 000 tonnes de sucre en 1814 à 10 000 en 1830, la production décolle avec l’arrivée de Louis-Napoléon sur le trône. De 26 000 tonnes en 1841, elle passe à 92 000 tonnes en 1850, monte à 381 000 à la fin de l’empire en 1870, pour atteindre le million en 1900, avant que la guerre 14-18 ne détruise 75 % des sucreries, concentrées dans le nord de la France [20].
Si l’actuelle union sacrée de la betterave devait déposer une gerbe aux pieds d’un empereur, c’est à ceux de Louis-Napoléon III qu’il faudrait la déposer, tant la production betteravière explose sous le second empire.
    Les promesses de paradis terrestre à Escaudœuvres et dans le monde
    En septembre 2022, deux ans après la catastrophe, et à quelques semaines du procès, la Direction régionale des affaires culturelles (la DRAC) envoie ses artistes en résidence dans le Cambrésis pendant six mois pour « une série d’actions permettant aux habitants une meilleure appréhension et compréhension de la sucrerie d’Escaudœuvres et de son ‘’écosystème’’ dans le cadre des 150 ans ». 

    Que peut-on attendre d’un « laboratoire original d’action culturelle patrimoniale » en lien « avec la sucrerie et les tissus agricole et économique », sinon une couche de caramel sur un tas d’ordures [21] ?
Des questions se posent, trop simples sans doute pour les esprits raffinés. En un siècle et demi, la sucrerie a-t-elle fait d’Escaudœuvres un pays de Cocagne pour habitants comblés ? Vivait-on mieux dans la région, ou moins bien, avant la monoculture de la betterave ? Quel bilan tirer de l’industrie alimentaire pour le canton, pour la région et pour le monde ?

    Imaginons que vous rejoigniez Cambrai en voiture depuis Amiens : que vous preniez l’autoroute à Péronne ou la nationale par Albert, vous traversez la même désolante plaine agro-industrielle, une terre lourde désertifiée aux herbicides en hiver, rythmée non par des haies mais par des éoliennes. Certains villages de ce coin perdu de la Somme semblent ne devoir leur survie qu’à quelques propriétaires d’exploitations, dont on compte le nombre d’hectares en centaines. A peine les villages autour de Pozières accueillent des touristes anglais, canadiens et australiens, dans leur Musée de la guerre 14 et leurs innombrables cimetières militaires. On conseille la visite pendant les neuf mois d’hiver. Notre tableau n’est certes pas bucolique, mais les offices du tourisme ne participent pas non plus aux concours du plus beau village de France.

    Arrivés sur place, Escaudœuvres n’est séparée de Cambrai que par la zone commerciale, aujourd’hui le premier employeur de la ville, avec ses restaurants de « bouffe rapide » et sucrée bourrés les mercredis et week-ends. Escaudœuvres est une zone-village sans attrait, s’étirant le long de la départementale 630, qui elle-même longe l’Escaut, qui lui-même s’en va mourir en Mer du nord sous le toponyme flamand de Schelde. La sucrerie fut longtemps le cœur battant du village, qui vit au rythme des récoltes depuis 150 automnes. Mais à côté de la sucrerie et de la zone commerciale, Escaudœuvres est également connue pour sa fonderie Penarroya-Metalleurop qui rejetait avant sa fermeture en 1998 une tonne de plomb dans l’air tous les ans. Une digue, encore une digue, avait cédé en 1976, décimant les troupeaux alentours et interdisant la consommation des légumes« Pollution par le plomb près de Cambrai », [22]. Pour tout souvenir indélébile de l’épopée métallurgique, les riverains sont depuis le début du mois de juillet 2023 invités à un dépistage de plombémie dans le sang [23]. La fonderie est devenue une usine de « recyclage » de batteries de voitures électriques. Si la filière est d’avenir, elle en aura toujours moins que le saturnisme, la maladie du plomb.

    La Sucrerie centrale de Cambrai fut fondée en 1872 par l’inventeur de la râpe à betterave, l’ingénieur des Arts et Métiers Jules Linard [24]. Son invention lui offre un avantage compétitif sérieux. La sucrerie d’Escaudoeuvres est réputée la plus grande du monde avant sa destruction en 1914. Reconstruite et modernisée grâce aux indemnités des dommages de guerre, elle est rachetée par Ferdinand Béghin en 1972, alors patron du sucre et de la presse de droite. Un C.V. s’impose :
La famille Béghin raffine du sucre depuis que Ferdinand 1er (1840-1895) s’est vu léguer la raffinerie de Thumeries en 1868, dans le Pas-de-Calais. Ses fils Henri (1873-1945) et Joseph (1871-1938) font prospérer l’entreprise : ils rachètent plusieurs sucreries dans la région, et construisent à Corbehem en 1926 leur propre papeterie-cartonnerie, pour assurer eux-mêmes l’emballage. 

    Ce faisant, pourquoi ne pas fabriquer aussi des journaux ?, leur suggère le patron roubaisien du textile et des médias Jean Prouvost (1885-1978). Banco : voilà un marché porteur. Le groupe #Béghin prend la moitié de Paris-Soir, de Marie Claire et de Match vers 1936-1938, si bien qu’il doit acheter 34 000 hectares de forêt en Finlande pour couvrir ses besoins de papier. 

    Pendant ce temps, le village de Thumeries est devenu une « ville-usine », une coopérative géante dominée par la main paternelle des Béghin. Entre leurs cinq châteaux, ils construisent les logements de leurs ouvriers, mais aussi leur stade de foot, leur gymnase leur piscine, leur club de basket, et rénovent encore leur église après les bombardements de 1940. Les Béghin emploient, logent, distraient leur main d’œuvre, qui les gratifie du poste de maire à plusieurs reprises. L’enfermement industriel si répandu dans les corons.

    La papeterie-cartonnerie de Corbehem, où l’on fabrique le papier magazine satiné, surclasse la concurrence, et Ferdinand le jeune (1902-1994) investit à son tour dans l’édition. Il prend en 1950 le contrôle de Paris-Match, Le Figaro et Télé 7-jours, en même temps qu’il devient leader du marché des mouchoirs, papiers toilette, et serviettes hygiéniques (Lotus, Vania, Okay). Sucre et papier, de la bouche au c… cabinet.
    
Bref, Ferdinand Béghin s’associe à la famille Say en 1972 pour créer le groupe Béghin-Say. Mais les investissements hasardeux s’enchaînent, le groupe familial se délite, et finit racheté par son banquier historique Jean-Marc Vernes – intime de Serge Dassault et de Robert Hersant, argentier de la presse de droite et du RPR, trafiquant en tous genres, et notamment d’influence.

    Les grandes manœuvres capitalistes se poursuivent. Béghin-Say passe sous la coupe du chimiste italien Ferruzzi en 1986, puis de l’autre groupe chimique italien, Montedison, en 1992. L’entreprise s’installe au Brésil en 2000 alors que les betteraviers réorganisent, en 2003, leur activité sucrière sous la forme coopérative et sous le nom de Tereos. Investie dans la canne à sucre, la coopérative peut prendre part à la déforestation de l’Amazonie, à la culture de canne transgénique [25], à la perpétuation de l’esclavage [26]. Tereos est aujourd’hui le deuxième producteur mondial de sucre, présent sur les cinq continents, en République tchèque, à La Réunion, en Indonésie, au Kenya, en Inde, pour produire du sucre et des dérivés comme le glucose, l’amidon, l’éthanol, etc.

    Dans les Hauts-de-France, près de la moitié des agriculteurs produisent de la betterave à sucre, qui rapporte à elle seule 350 millions d’euros à la région tous les ans. Cette manne sucrière alimente ensuite la filière régionale des chocolateries, sucreries et sodas, fournissant par exemple Coca-Cola à Dunkerque à raison de 42 morceaux de sucre par bouteille de deux litres, mais aussi les usines Cémoi (Dunkerque et Villeneuve d’Ascq), Häagen-Dazs (Arras), Nestlé (Nesquik, Chocapic, Lion, Kitkat, près de Saint-Quentin), et encore Ferrero (Nutella, Kinder, à Arlon en Belgique) – une filière aussi prospère que des salmonelles dans des œufs Kinder. Coïncidence ou non : l’obésité touche presque un quart de la population des Hauts-de-France (22 %), soit cinq points de plus que la moyenne nationale. Le haut du podium.

    Revenons à Escaudœuvres et longeons le canal un instant. D’un côté les poules d’eau font connaissance, de l’autre les bassins de rétention de l’usine s’étendent sur deux kilomètres derrière les talus. Ce sont les bassins de rétention éventrés en mai 2020. Et si ça pue autant la pourriture pourrie, « c’est à cause des bassins, nous confirme un promeneur. Et encore, c’est pire pendant les 120 jours de la campagne ! »
    
Lui prétend s’être habitué – mais on s’habitue à tout. Notre promeneur est « né à Escaudœuvres en face de la sucrerie ». Étudiant en chimie, il attendait une réponse de Tereos pour un stage, réponse qui ne viendra plus. Il désigne les cuves rutilantes « qui n’ont peut-être jamais servi », et la nouvelle chaudière à gaz en remplacement de celle à charbon : 24 millions d’investissements en 2021 « pour que ça ferme », conclut-il dépité. Mais il a son explication :

    Tout ça, c’est à cause des écolos, pour faire bonne figure. Ça a été décidé là-haut. On est le seul pays à interdire les néonicotinoïdes. D’un côté ça va faire tomber la production, et la sucrerie ne sera plus rentable ; de l’autre la France va acheter du sucre aux pays qui peuvent encore utiliser des pesticides, et on sera encore moins rentables.

    Ce sont les mots de l’industriel, du syndicat de la betterave, et des gens du coin – qu’il s’agit de vérifier : la Cour de justice européenne n’accorde ni à la Belgique ni à l’Allemagne ni à la Pologne de dérogation sur les néonicotinoïdes. En revanche l’importation de sucre aux néonicotinoïdes hors de l’UE semble en effet autorisée, et des discussions seraient en cours au Parlement pour aligner les réglementations.

    Quoi qu’il en soit : que l’on considère l’interdiction des néonicotinoïdes, ces « tueurs d’abeilles », comme une victoire ou une défaite, cette histoire aux mille rebondissements tend à masquer tout le reste des produits « phytos » qui entrent dans la production de sucre, d’alcool, de carburant ( #bioéthanol ), et de gel hydroalcoolique produits à partir de la betterave. Or, les trois départements qui en France consomment le plus de produits cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques - ces substances dites « CMR » parmi les plus meurtrières du catalogue -, sont la Somme, le Pas-de-Calais et le Nord. En cause : la pomme de terre, la plus consommatrice, et la betterave, juste derrière.
    
Quant aux herbicides, le Ministère nous informe que « L’Oise tout comme l’Aisne, la Marne et la Somme sont les quatre premiers départements en terme de superficie de culture de betteraves. Or, [...] la culture de betteraves reçoit un nombre moyen de traitements en herbicides très élevé par rapport à d’autres cultures (13,7 contre 2,9 sur le blé tendre par exemple) [27]. »

    Le plus épandu est le fameux #glyphosate, que les coopérateurs de la betterave défendent avec acharnement. Tout comme ils défendaient dernièrement le s-métolachlore, un herbicide si persistant dans les nappes phréatiques qu’il devrait interdire de consommation l’eau des deux tiers des robinets de la région, logiquement la plus touchée [28], 11 avril 2023.]]. À peine son interdiction évoquée par l’Agence sanitaire nationale (ANSES) que la Confédération générale de la Betterave, le syndicat de la corporation, s’insurgeait contre la « longue liste des moyens de productions retirés progressivement aux agriculteurs, obérant ainsi leur capacité à exercer leur rôle premier : nourrir les populations [29]. » Le ministre de l’agriculture Marc Fresnau leur a déjà garanti plusieurs années de S-metolachlore.

    Cette interdiction des néonicotinoïdes révèle le bourbier où pataugent les scientifiques, les journalistes scientifiques, comme les associations environnementales : l’interdiction des néonicotinoïdes, votée à l’Assemblée nationale le 15 mars 2016, n’est effective que depuis janvier 2023... sous pression de Bruxelles ; et après les dérogations successives du ministre actuel de l’agriculture et de la précédente ministre de l’environnement Barbara Pompili (une autre Amiénoise). Cette interdiction fut arrachée après plus de dix années de voltes-faces politiques, de pseudo-controverses scientifiques, de coups de pression des syndicats agricoles, et de menaces sur l’emploi.

    Si pour chaque molécule, le spectacle médiatique et parlementaire doit mettre en scène ses expertises et contre-expertises, discutailler les protocoles et les résultats, la sixième grande extinction nous aura fauché que l’expertocratie bruxelloise n’aura pas encore tranché le cas du glyphosate. D’ailleurs cette digue de papier qu’on appelle « Droit de l’environnement », comme d’autres digues, n’empêche pas Tereos, au Brésil par exemple, de poursuivre ses épandages aériens d’Actara 750 SG, un insecticide interdit depuis 2019 [30]. Le sucre industriel est essentiellement catastrophique, de sa culture à sa transformation jusqu’à sa consommation.

    Poser les questions de nos besoins en sucre, de l’automobile à betterave, de l’utilité de Tereos pour les Hauts-de-France et de la filière agro-alimentaire pour l’Humanité, et plus généralement encore du modèle industriel qui domine la région et le monde depuis deux cents ans, nous feraient sans doute gagner du temps. Mais ce qui nous ferait gagner du temps, leur ferait perdre de l’argent. Encore une fois, leurs profits et nos emplois valent plus que nos vies.

    L’industrie – mines, filatures, chemins de fer, hauts fourneaux, sucreries –, s’est développée tout au long du XIX° dans un acte de foi promettant l’avènement du paradis terrestre. Acte de foi répété aussi bien par les économistes libéraux que communistes, par les partisans du roi que par ceux de l’empire ou de la république. Deux-cents ans plus tard, avec des taux de chômage, de pollution, et de maladies associées parmi les plus hauts du pays, le paradis terrestre s’avère être un enfer – et nous devrons encore gérer des déchets mortellement radioactifs, ceux de Gravelines par exemple, pendant des milliers d’années.

    Voilà ce que nul élu local – et surtout pas François Ruffin –, parfaitement informé des nuisances de la société industrielle, ne peut ignorer. Voilà pourtant ce que le candidat à la prochaine élection présidentielle, « biolchevique » revendiqué et partisan de l’alliance « rouge/verte », entre « sociaux-démocrates » et écologistes, ouvriers et petits-bourgeois, a pris soin de dissimuler à ses lecteurs et électeurs depuis vingt-cinq ans. A tort d’ailleurs, toutes ces choses vont sans dire chez les gens du Nord comme chez ceux du Sud. Tout ce qui leur importe c’est la pâtée, bien sucrée, et des écrans pour se distraire en digérant. Le pouvoir et l’élu qui peuvent tenir cette double-promesse n’auront jamais de problème avec sa population et ses électeurs.
    Tomjo
    Notes
    [1] « Nos betteraviers sont des tueurs », Chez Renart, 13 janvier 2023.
    [2] France Bleu Nord, 12 janvier 2023.
    [3] « De l’Escaut à l’Amazonie : Beghin-Say ou la catastrophe permanente », Chez Renart, 10 mai 2020.
    [4] ericbocquet.fr
    [5] Le Monde, 24 juin 2023.
    [6] Cf. Métro, Boulot, Chimio, Collectif, Le monde à l’envers, 2012. Cancer français : la récidive. A propos d’Ecopla et de l’aluminium, Pièces et main d’œuvre, 2016. D’Amiens nord à Blanquefort, délivrons les ouvriers, fermons les usines, Tomjo, Pièces et main d’œuvre, 2017.
    [7] Cf. le film Morts à 100 % : post-scriptum, de Tomjo et Modeste Richard, 45 mn, 2017. Ou encore La foi des charbonniers, les mineurs dans la Bataille du charbon, 1945-1947, Evelyne Desbois, Yves Jeanneau et Bruno Mattéi, Maison des sciences de l’homme, 1986.
    [8] « Quand Napoléon engageait la bataille du sucre », 31 janvier 2023.
    [9] « La Bataille du sucre », Le Monde, 10 septembre 2007.
    [10] Fakir, mai-juin 2023.
    [11] « La bataille du sucre ou la défaite méconnue de Napoléon Ier », Ludovic Laloux, Artefact, 2018.
    [12] « Histoire : les Antilles françaises, le sucre et la traite des esclaves », Futura sciences, 10 janv. 2019.
    [13] Cité par Ludovic Laloux, art. cit.
    [14] Idem.
    [15] Lettre d’Andriel et Wolft au ministre de l’Intérieur, 18 juillet 1813, citée par Laloux, art. cit.
    [16] L’Industrie sucrière indigène et son véritable fondateur, Pierre Aymar-Bression, 1864.
    [17] « Le sucre de betterave et l’essor de son industrie : Des premiers travaux jusqu’à la fin de la guerre de 1914-1918 », Denis Brançon, Claude Viel, Revue d’histoire de la pharmacie, n°322, 1999.
    [18] Dictionnaire encyclopédique et biographique de l’Industrie et des arts industriels, Vol. 3, art. « Louis Crespel », Eugène-Oscar Lami, 1883. On peut lire aussi L’Industrie sucrière indigène et son véritable fondateur, op. cit.
    [19] A retrouver ici.
    [20] « Le sucre de betterave et l’essor de son industrie... », art. cit.
    [21] Appel à candidature « Une sucrerie, un territoire », culture.gouv.fr, 29 juillet 2022.
    [22] Le Monde, 25 mars 1977.
    [23] La Voix du nord, 12 juillet 2023.
    [24] Jules Linard (1832-1882), multi-propriétaire de sucreries, est l’inventeur de la râpe à betterave, toujours utilisée aujourd’hui, pour laquelle il fut récompensé lors de l’Exposition universelle de 1878.
    [25] « De l’Escaut à l’Amazonie... », art. cit.
    [26] « Des plantations brésiliennes accusées de travail forcé fournissent l’Europe en sucre », Le Monde, 31 déc. 2022.
    [27] « État des lieux des ventes et des achats de produits phytopharmaceutiques en France en 2020 », mars 2022.
    [28] « Eau du robinet : les Hauts-de-France est la région où les concentrations de pesticides sont les plus élevées », [[France bleu Nord
    [29] cgb-france.fr, 16 février 2023.
    [30] « Au Brésil, les géants du sucre responsables d’une pluie toxique », Mediapart, 25 avril 2023.

    Source : https://renart.info/?La-betterave-la-gauche-le-peuple-et-nous

  • La Troisième révolution industrielle des Mulliez artificialise la vie (la vraie) Chez Renard - Tomjo
    https://chez.renart.info/?La-Troisieme-revolution-industrielle-des-Mulliez-artificialise-la-vie

    Après le textile et la grande distribution, la famille roubaisienne réunie autour de Gérard Mulliez investit fort dans le photovoltaïque. Sa multinationale Voltalia transforme déjà, dans vingt pays, la terre des paysans en champs de panneaux solaires. Partout où elle s’implante, du Brésil à l’Aveyron, des voix s’élèvent contre cette « transition énergétique » qui dévore et défigure forêts, bocages et pâturages. A l’artificialisation des terres par ses centres commerciaux et usines renouvelables, la Famille répond par des protéines de laboratoire et des serres automatisées. A chaque problème, sa fuite en avant, pilotée par le fonds d’investissements familial Creadev. Voilà la « Troisième révolution industrielle » initiée dans la région par les Verts il y a dix ans, amplifiée par Xavier Bertrand et Gérard Mulliez à leur suite.


    Centrale agrivoltaïque de Voltalia à Cabanon, France.

    Parmi les méfaits de l’Association familiale Mulliez (Auchan, Decathlon, Norauto, Leroy Merlin, etc), si on ne regarde que le climat, et pour celui-ci uniquement le carbone, le groupe émet trois millions de fois plus de CO2 qu’un ménage moyen [1]. Devant cette mauvaise presse, Auchan et Decathlon multiplient à la hâte les montages techniques et financiers pour ne consommer à terme que des énergies renouvelables, qu’ils font produire par la boîte de leur groupe familial, Voltalia.

    La grande famille de la Transition
    Née en 2005 en Guyanne française, rachetée en 2009 par Mulliez, Voltalia est aujourd’hui présidée par Laurence Mulliez et l’habile André-Paul Leclercq, membre de la Famille. Ce dernier, après trente années au service d’Auchan et Decathlon, est élu en 2015 au Conseil régional des Hauts-de-France près Xavier Bertrand. Il siège en son nom à « Picardie Énergie et Développement durable », un fonds d’investissements pour « l’émergence et le renforcement de filières régionales liées au secteur énergétique » ; il vote pendant six ans les budgets de la Troisième révolution industrielle, dont ceux pour le solaire [2] ; puis il quitte ses fonctions en 2021 pour rejoindre, dans une démarche « people and planet [3] », le conseil d’administration de Voltalia. Une affaire rondement menée.

    Avec la Troisième révolution industrielle, on vous parle d’un temps que les Jeunes pour le climat ne peuvent pas connaître. En ce temps-là, circa 2012, Jean-François Caron et les autres élus Verts de la Région invitent le prophète américain Jeremy Rifkin à élaborer un Plan de transition économique fondé sur le renouvelable et les réseaux électriques intelligents. Libération le présente alors comme le « trait d’union entre les écolos chevelus et les patrons », et le dégarni Caron, toujours maire de Loos-en-Gohelle (62), ajoute que « Ce n’est pas un écolo avec du persil dans les oreilles. Il y a avec lui un effet de séduction et d’efficacité. Il crée du désir. Quand Bouygues fait de l’écoconstruction et EDF des énergies renouvelables, ça me va [4]. »

    Dix ans plus tard, si désir il y a, ce n’est pas dans les campagnes et les forêts où Voltalia pose ses panneaux solaires. En France ou au Brésil, les populations s’élèvent systématiquement contre leurs destructions. En Angleterre, Voltalia parvient presque à se mettre la reine à dos.

    Vendre et partir


    Centrale photovoltaïque Voltalia de Sierra Branca, Brésil

    Voltalia vient d’annoncer la construction de la plus grande usine photovoltaïque et éolienne du monde, dans l’État de Rio Grande do Norte, au Brésil. Cet État au bord de l’océan Atlantique, couvert de 530 000 hectares de forêt primaire, et peuplé de ces communautés autochtones qui font sa richesse, est depuis cinq siècles la proie des colonisateurs. D’abord les Portugais, puis les Français, puis les Hollandais, puis encore les Portugais. C’est pourquoi les paysans dénoncent le « racisme écologique », quand ils voient débarquer Voltalia [5]. L’entreprise arrive d’abord en missionnaire du développement durable. Son cinéma solaire et itinérant trimballe dans les villages sa promotion des énergies renouvelables, et projette Le Roi lion aux gamins. Plus tard, les machines écrasent les champs, éventrent les forets, menacent les oiseaux déjà menacés, en dépit des protestations. « Un homme a parlé à mes frères et m’a demandé si nous voulions vendre. Nous ne pouvons pas vendre parce que c’est là que nous vivons. Si nous vendons, où irions-nous ? », demande une habitante de l’État de Bahia, confrontée à un autre projet de Voltalia [6]. Plusieurs associations tentent aujourd’hui de suspendre les travaux, « indignés par l’attitude et le manque de respect de l’entreprise et de l’agence environnementale de l’État [7]. »

    Autre hémisphère, mêmes pratiques. Voltalia vient d’obtenir en Angleterre un marché des plus symboliques : alimenter en énergie solaire la « City », le quartier d’affaires de Londres, avec ses banques, ses salles de marché, sa bourse, ses compagnies d’assurance. Pour ce faire, 200 km plus au sud, Voltalia s’apprête à défigurer la région paisible et bocagère du Dorset avec 150 000 panneaux solaires étalés sur l’équivalent de 140 terrains de foot. Tant pis pour les cultivateurs. « Les agriculteurs récoltaient autrefois la lumière pour faire pousser des céréales, maintenant ils récoltent la lumière pour produire de l’électricité », analyse un conseiller municipal de Spetisbury [8]. C’est qu’il faut se mettre au niveau des exigences de la #COP26 qui vient de se clôturer à Glasgow ! Le Conseil régional du Dorset a reçu des centaines de lettres pour sauver cette « vallée des petites laiteries », comme on la surnomme depuis le XIX° siècle. Parmi elles, celle de l’honorable Campaign to protect rural England, association de défense des campagnes patronnée par Sa Majesté la Reine elle-même. Elle dénonce le « paysage industriel » qui remplacera la bucolique Blackmore Vale, la privatisation et la destruction des chemins, et la fin de l’agriculture sur la zone. Sans doute n’a-t-elle pas intégré les intérêts supérieurs de la « Transition énergétique ».

    En Aveyron, sur le très calcaire causse Comtal, Voltalia est parvenu à se mettre à dos une quarantaine d’associations, des amis de la Terre et des oiseaux, des défenseurs des paysages et monuments, des paysans, des écolos, des opposants aux nuisances renouvelables. Auchan et Decathlon ont promis d’alimenter leurs magasins depuis des centrales du sud-est de la France. Ils ont déjà trouvé 80 hectares sur ce causse, en partie cultivés par un paysan en fermage, prêt à se faire exploitant agro-électrique. Loïc Santiago, opposant au projet et membre de la Confédération paysanne, nous résume la situation des agriculteurs :
    Un fermage agricole se négocie entre 100 et 150 € l’hectare. Les terres louées pour de l’agrivoltaïsme se négocient jusqu’à 2 500 €, vingt-cinq fois plus. L’ ADEME avance qu’il faudra 120 000 hectares de photovoltaïque en France, ce qui correspond à peu près aux annonces de Macron d’installer 100 Gw. Vu le taux d’endettement général des agriculteurs d’un côté, et la rentabilité des installations électriques de l’autre, ils n’auront pas de difficultés à trouver les terres nécessaires. Sachant que cette solution est plus rentable que d’installer les panneaux sur des toits.

    Le syndicat agricole majoritaire, la productiviste #FNSEA, a donné sa bénédiction au modèle « agrivoltaïque », qui prétend faire paître des ruminants sous des panneaux. Reste a savoir si l’herbe y sera aussi verte, ensoleillée et hydratée. Voltalia prétend que l’ombre des panneaux limite l’évapotranspiration et améliore le bien-être des animaux – ce qu’un arbre fait tout aussi bien. D’autres études démontrent plutôt la perte d’un tiers de la biomasse sous les panneaux [9]. Quoi qu’il en soit, la question demeure du genre de travail agricole, de terres, de paysage, de vie, que l’on souhaite.

    Ce modèle est une attaque de l’agriculture paysanne et de notre autonomie. Avec ces panneaux, tu ajoutes à ta dépendance envers les centrales d’achat une autre envers des industriels de l’énergie. L’ironie est qu’ici, ce sont les mêmes ! », note encore Loïc.

    La Foodtech, ou la malbouffe artificielle


    Piscines de protéines de l’entreprise Kingfish, Pays-Bas

    En résumé de la Troisième révolution industrielle des Mulliez : pour sauver la Terre, il faut détruire des terres. La grande distribution sait mieux que quiconque les tensions qui pèsent sur celles-ci, entre stérilisation chimique, canicules, sécheresses, et artificialisation, sous l’effet de ses zones commerciales et parkings. Mais elle a sa solution aux pénuries qu’elle provoque. La société d’investissements Creadev, propriété des Mulliez, multiplie les prises d’intérêts dans les industries de l’alimentation artificielle - et les Hauts-de-France, grâce aux investissements conjoints du groupe régional #Roquette et aux subventions du Plan « France Relance », dominent déjà le marché des substituts protéiniques [10]. La start-up lilloise NxtFood commercialise des steaks saignants à base de légumineuses ultra-transformées. Ynsect, rachetée en 2018 par Mulliez, bâtit près d’Amiens la plus grande ferme verticale du monde, entièrement automatisée, pour y élever des scarabées communs destinés à devenir des croquettes de protéines pour animaux d’élevage. La boîte vient de racheter le néerlandais Protifarm qui propose des recettes aux humains. A quelques kilomètres de là, leur principal « concurrent » est lui aussi une émanation de Creadev : Innovafeed, à Nesle dans la Somme, produit avec l’américain #Cargill des protéines d’insectes pour poissons d’élevage.

    Cette malbouffe s’accompagne d’investissements dans l’agriculture automatisée, urbaine, hors-sol et sous serre. Mulliez a investi, en 2018, 29 millions de dollars dans la firme new-yorkaise Gotham_Greens. Celle-ci avait posé sa première serre hydroponique sur un toit de Brooklyn en 2011, puis dans le Queens, puis à Chicago, Providence, San Francisco, etc. Ces serres urbaines sont « pilotées par les données et climatisées », toujours plus productives grâce aux progrès de « l’apprentissage automatique et de l’analyse des données » pour offrir au consommateur « un produit plus frais et plus délicieux » [11]. Mulliez investit comme ça dans une dizaine d’entreprises de « Foodtech », la malbouffe high tech, que ce soit pour des steaks végétaux ( Growthwell à Singapour, Jackfruit dans le Colorado), ou les usines de poissons et crevettes ( Kingfish aux Pays-Bas, Noray_Seafood en Espagne), nourris aux farines d’insectes qu’il produit par ailleurs.

    Que ce soit avec des centrales renouvelables ou des entreprises de techno-bouffe, la Troisième révolution industrielle des Mulliez leur permet toujours de s’accaparer les terres et détruire les savoir-faire. Qu’en disent les écologistes ? Rien.

    L’enfer vert des Mulliez
    Il est fréquent d’entendre des leaders écologistes déplorer le manque de « prise de conscience » des élus et patrons, et leur « inaction » face aux enjeux climatiques – scénarios et plans de transition à l’appui. L’action de la famille Mulliez, sixième fortune française, prouve pourtant qu’elle agit en conscience.
La Lettre que Voltalia envoie à ses actionnaires deux fois par an leur rappelle le leitmotiv de l’entreprise : « Améliorer l’environnement mondial en favorisant le développement local ». Puis le démontre, chiffres à l’appui : +10 % de gigawatts renouvelables installés au premier semestre 2021 dans le monde, et +78 % de revenus à se partager.

    Le virage écologique ne sera pas le fait d’une opposition très minoritaire, dépourvue de moyens, mais de la bourgeoisie dirigeante, le jour où elle ne pourra faire autrement. Ce seront les divers responsables de la ruine de la terre qui organiseront le sauvetage du peu qui en restera, et qui après l’abondance géreront la pénurie et la survie. Car ceux-là n’ont aucun préjugé, ils ne croient pas plus au développement qu’à l’écologie ; ils ne croient qu’au pouvoir, qui est celui de faire ce qui ne peut être fait autrement.

    Ce constat de Bernard Charbonneau fut maintes fois cité et réédité depuis 1980 [12]. L’inconscience des leaders écologistes devant la Troisième révolution industrielle du Conseil régional et de la famille Mulliez indique que l’on pourra continuer à rééditer Le Feu vert encore quelques années.

    Tomjo
    Notes
    [1] Selon le rapport de Greenpeace et Oxfam « Les milliardaires font flamber la planète et l’État regarde ailleurs », février 2022.
    [2] 27 millions en 2018, par exemple, dont 12 pour les énergies renouvelables. En 2022, le budget de la « T.R.I. » s’élève à 21 millions. Cf. délibérations « FRATRI » du Conseil régional.
    [3] Eco121, 30 avril 2021.
    [4] Libération, 24 décembre 2012. Cf. L’Enfer vert, Tomjo, L’échappée, 2013.
    [5] Rota de Colisão, racismoambiental.net, 30 mars 2022.
    [6] Idem.
    [7] Ibid.
    [8] The Telegraph, 31 décembre 2021.
    [9] « Combiner panneaux solaire photovoltaïque et cultures pour optimiser les surfaces disponibles : vers des systèmes agrivoltaïques », INRA Montpellier, 2011.
    [10] « Le marché des protéines en Hauts-de-France », Nord France Invest, non daté, vérifié le 7 juillet 2022.
    [11] Voir le site de Gotham Greens.
    [12] Le Feu vert, réédité par L’Échappée, 2022.

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  • Xavier Bertrand : le vrai visage social du président des Hauts-de-France Ian Hamel - Médiacités Lille
    https://www.mediacites.fr/enquete/lille/2021/09/17/xavier-bertrand-le-vrai-visage-social-du-president-des-hauts-de-france

    Le patron du conseil régional nordiste se revendique d’une « droite sociale », proche du peuple, incarnée en son temps par Philippe Séguin. Mais pour les syndicats de cette collectivité, l’ancien maire de Saint-Quentin serait davantage un tenant de la droite la plus réactionnaire, fort peu ouvert au dialogue social.

    Peu après l’arrivée de Xavier Bertrand au #conseil_régional, au début 2016, l’ambiance s’est tendue. Le nouveau président a demandé aux services techniques de « déminer » son bureau, persuadé que des micros y avaient été cachés. Un peu plus tard, France 3 Nord-Pas-de-Calais https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/conseil-regional-nord-pas-de-calais-picardie-xavier-ber révélait qu’Éric Gavoille, le chef de cabinet adjoint, s’était doté d’une arme à feu pour protéger Xavier Bertrand. Il ferait l’objet « de menaces depuis la campagne pour les régionales ».

    #Éric_Gavoille était l’un des gardes du corps du ministre Bertrand. Il l’a suivi à la mairie de #Saint-Quentin, occupant les fonctions de directeur du service proximité de la ville. Xavier Bertrand avait aussi nommé #Michel_Bion, un autre de ses gardes du corps, à la tête de la #police municipale, le promouvant également directeur de la sécurité et de la tranquillité publique. Deux officiers de sécurité, en charge habituellement des hautes personnalités, pour une sous-préfecture de l’Aisne ?

    À Saint-Quentin, l’image de l’élu simple et souriant, qui serre les mains le samedi matin au marché, s’est un peu écornée. « Au conseil municipal, il était carrément méprisant. Quand je tentais de poser une question, Xavier Bertrand m’apostrophait d’un “C’est fini Monsieur Lançon ? Vous avez terminé ?“ », raconte Jean-Pierre Lançon, ancienne tête de liste socialiste. Olivier Tournay, conseiller municipal communiste, n’est guère plus tendre avec le futur candidat à l’élection présidentielle : « Tous les élus de droite étaient au garde-à-vous. Il n’y avait pas de débat au conseil municipal. Bertrand ne travaille que pour Bertrand. Je n’ai jamais pu avoir un échange avec lui ». Quant à Sylvie Saillard-Meunier, du Rassemblement national, elle décrit « un homme odieux, insultant, cherchant à m’humilier ».

    Malaise à tous les étages ?
    Xavier Bertrand se conduirait-il de la même façon avec les agents du conseil régional ? « Je n’irai pas jusqu’à dire qu’il est paranoïaque, mais il a un #comportement_tribal. Il traite les agents publics, y compris les cadres, comme des sous-fifres à qui on aboie des ordres. Nous sommes des républicains, nous étions prêts à se nous mobiliser pour cette nouvelle majorité. Mais il n’y a pas eu de retour », assure un cadre contraint de conserver l’anonymat.
    https://www.mediacites.fr/enquete/lille/2017/05/04/conseil-regional-lenquete-qui-fait-mal

    Dans une enquête intitulée « #Malaise à tous les étages », parue en 2017, le syndicat Sud-Solidaires dénonçait déjà « un manque de confiance et de considération des agents du fait du comportement d’élus suspicieux, condescendants et refusant le contact avec les agents ». Mais aussi « un management frappé par l’ #opacité et l’ #arbitraire » et « une absence de reconnaissance des compétences des agents ».

    Très loin de l’image d’un Xavier Bertrand attentif aux soucis des petites gens des Hauts-de-France, les salariés de la région décrivent, au contraire, un personnage #autoritaire, #cassant, parfois même #désagréable. Ils dénoncent surtout les méthodes de #management dignes d’un patronat rétrograde. « Certaines personnes ont été changées de bureau quatre, cinq, six fois, pour les pousser à la démission », assure un autre agent. Les mutations et les #licenciements qui se succèdent au conseil régional ne font que rarement les gros titres de la presse locale.
    « Xavier Bertrand ne négocie, pas il concède »

    Bref, en quoi l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy serait-il le digne représentant de la droite sociale ? Les relations plus que conflictuelles avec les syndicats de la région ne plaident pas vraiment dans ce sens. L’audit du cabinet Secafi, publié en 2018 auprès de trois mille agents, montrait déjà que 78 % des salariés estimaient que la fusion des régions Nord-Pas-de-Calais et Picardie n’a pas “amélioré leurs conditions de travail“ ; 62 % des agents trouvaient leur charge de travail “importante“, voire “excessive“, en raison de la nouvelle organisation. D’autres chiffres ? 53 % jugent l’organisation de leur direction incohérente, 42 % ne sont pas associés aux décisions concernant directement leur travail, 38 % se sentent parfois inutiles à leur poste… Bonjour l’ambiance.

    Un an plus tard, la situation ne s’est pas vraiment améliorée. L’intersyndicale (CFDT, CGT, FA, Unsa, Sud, SNU-Ter) boycotte les négociations avec Xavier Bertrand. « On sent que le président de région fait de la politique en cherchant à faire la démonstration qu’il sait assumer une réduction de la dépense publique par la baisse du nombre de fonctionnaires », dénonce Joseph Demeulemeester, responsable CGT. Il évoque des conditions de travail dégradées, des suppressions d’emplois, des désorganisations des services, des inégalités de traitement entre agents du Nord-Pas-de-Calais et ceux de la Picardie.

    Moins de cinq rencontres avec les syndicats
    Manifestement, le responsable syndical n’a pas vraiment changé d’avis concernant le comportement de Xavier Bertrand : « Un homme de dialogue ? Pas vraiment. Les rencontres peuvent se compter sur les doigts de la main. C’est simple, Xavier Bertrand ne négocie pas, il concède. Depuis 2016, cinq cents emplois permanents ont disparu. Je ne vois pas en quoi la politique sociale de Xavier Bertrand diffère de celle menée par Emmanuel Macron ».

    Quarante ans d’activité au sein des services de collectivités territoriales ou de l’État dans le Nord-Pas-de-Calais puis dans les Hauts-de-France, cela laisse forcément des traces. Benoît Guittet porte un jugement posé, mais sans concession, sur Xavier Bertrand et sur son action au conseil régional depuis son arrivée en 2016. « Au départ, il n’y connaissait rien, ce qui est normal, il n’avait aucune expérience du pilotage de la région, comme l’équipe autour de lui, à l’exception de Valérie Létard. Mais elle a quitté dès 2017 la vice-présidence de la région pour celle du Sénat », constate l’ancien co-responsable de la CFDT.

    « Xavier Bertrand est un bourreau de travail et il a pris immédiatement les dossiers à bras le corps. Vous lui envoyez un SMS à 8 heures, il vous répond à 8 h 10, reconnaît-il. Le problème, c’est que c’est un chef d’orchestre, il décide de tout et fonctionne en #vase_clos. En cela, il est pire que Macron, tout doit passer par lui. Il n’a absolument pas tenu compte des équipes en place, ni de l’intérêt de leurs expériences ou expertises pour faire fonctionner une collectivité singulière comme la région. »

    En tant que syndicaliste, il garde en mémoire les négociations particulièrement difficiles avec le président de région. « Parce que nous n’acceptions pas ses dernières propositions, pour lui, non discutables, il a rompu, brutalement, annonçant qu’il ne travaillerait plus avec nous, mais avec deux syndicats minoritaires, FO et la CFTC », se souvient Benoît Guittet. « Il peut être bienveillant, presque copain, mais uniquement quand ça ne mange pas de pain, que la concession est minime. En fait, avec lui, il faut le servir et être assez docile ».

    « La région Hauts-de-France est devenue la région Bertrand »

    Egalement cadre, le syndicaliste voit d’abord en Xavier Bertrand un homme qui donne la priorité à la #communication sur l’action. « Il lui faut sans cesse lancer des “trucs“ dont les médias vont parler ». Toutefois, il lui reconnaît « des idées pas complètement idiotes. Je ne l’attaquerai pas sur sa non-sincérité. Tout n’est pas feint chez lui. Je l’ai vu intervenir immédiatement, et être affecté réellement, quand un collègue a été assassiné en Corse, ou quand une salariée a été agressée chez elle ».

    Benoît Guittet reproche surtout au candidat à l’élection présidentielle son manque de vision. « Dans ce domaine, c’est le vide sidéral. Il n’a pas écrit une ligne sur ce que sera la région dans vingt ans. Il n’a pas d’idées, il ne se projette pas dans l’avenir, les Hauts-de-France n’étant qu’un marchepied pour lui », déplore-t-il. « Son manque de réflexion, de puissance intellectuelle, il le compense par une présence constante sur le terrain. Il est partout et comme il a de l’instinct, du “pif“, il comprend ce qu’il faut faire. Mais ses “trucs“, c’est epsilon. Proch’emploi, Proch’ceci ou cela ne fait pas une politique. En fin de compte, on retiendra que ça n’a pas été un très bon président de région », conclut l’ancien délégué syndical CFDT.

    Le dircab’ se prend une soufflante
    Un autre cadre, en poste à Amiens, fait une analyse similaire. Dès son arrivée en 2016, Xavier Bertrand a mis sur la table son ambition présidentielle : « La région des Hauts-de-France est devenue la région Bertrand, analyse-t-il. Il a donc rayé de la carte toute prospective. Un peu comme un repreneur d’entreprise qui, pour gagner rapidement de l’argent, couperait la recherche et le développement ».

    Le témoignage de Kaddour Qassid, représentant dans le Nord d’ #Anticor, l’association de lutte contre la corruption, concernant sa relation avec Xavier Bertrand ne manque pas d’intérêt. En mars 2017, il est reçu par le président des Hauts-de-France, qui entend faire de la déontologie l’un des marqueurs de son mandat. A priori, c’est une excellente initiative. « Je lui ai annoncé un dysfonctionnement grave remontant à plusieurs années, avant sa prise de fonction. Il s’agit d’un cumul d’activités interdit à tous les agents publics », raconte Kaddour Qassid. Xavier Bertrand s’énerve aussitôt, vocifère qu’il « n’y a pas d’ #impunité au conseil régional ». Puis le président du conseil régional s’en prend à son directeur de cabinet. « Comment se fait-il que je ne sois pas au courant ? » se met-il à hurler. « J’ai vu de la peur dans les yeux du directeur de cabinet, il était livide. Xavier Bertrand l’engueulait comme s’il s’agissait d’un gamin », se souvient le responsable. Depuis, les relations entre Anticor et la région n’ont cessé de se dégrader... avant de cesser. 


    J’ai écrit cet article à la demande de Mediacités parallèlement au travail d’actualisation de mon ouvrage sur Xavier Bertrand paru en 2010 sous le titre « Xavier Bertrand, les coulisses d’une ambition », aux éditions de l’Archipel. La nouvelle version augmentée, intitulée « Xavier Bertrand L’obstiné », paraît le 23 septembre. 

    Mon éditeur m’a rappelé fin 2020 pour actualiser l’ouvrage, en raison des ambitions présidentielles de Xavier Bertrand. Pour le premier opus, celui-ci m’avait reçu, sans difficultés, à plusieurs reprises. En revanche, je n’avais eu aucun écho de sa part après la parution. Pour cette nouvelle édition, j’ai bien évidemment effectué plusieurs demandes auprès de la région afin d’entrer en contact avec Xavier Bertrand et recueillir sa version des faits. Il n’y a pas qu’une vérité mais des vérités. A ce jour je n’ai même pas essuyé de refus, je n’ai pas reçu de réponse.

    L’attitude de l’ancien ministre ne m’a nullement empêché de poursuivre mon travail d’investigation, interviewant ses amis comme ses adversaires politiques, des syndicalistes, des élus, des salariés du conseil régional des Hauts-de-France, de simples particuliers, et des journalistes locaux et parisiens. En 2010, Xavier Bertrand maniait déjà avec dextérité le « faire savoir », mais ne négligeait pas pour autant le « faire ». En 2021, J’ai découvert un politicien autoritaire et sans vision, privilégiant la communication, au détriment de l’action.

    Ian Hamel, journaliste au Point, est l’auteur d’essais politiques dont Sarko et Cie, la république des copains (2011), L’Affaire Bettencourt, derniers secrets (2013), Notre ami Bernard Tapie (2015)

    #Haut_de_france #xavier_bertrand #Région #Nord #Pas_de_calais #Oise

  • Le parti technologiste : tant de rivaux pour un projet unique
    https://chez.renart.info/?Le-parti-technologiste-tant-de-rivaux-pour-un-projet-unique

    Les taux d’abstention sont-ils indexés sur les subventions aux industries automobile et électrique ? Autrement dit : à quoi bon user de son droit de vote quand les candidats sont d’accord sur le « projet de société » : la croissance, la puissance et l’emploi techno-industriels. Ainsi, E. Macron et X. Bertrand, concurrents aux prochaines Présidentielles, se bousculent pour s’attribuer leur commune victoire : la construction d’une deuxième usine de batteries pour voitures électriques dans les Hauts-de-France. Tous les candidats aux Régionales, vainqueur (Bertrand) et vaincus (K. Delli, S. Chenu) soutenaient également le projet. Le nouvel hémicycle régional sera unanime sur l’essentiel : le seul horizon possible des plaines de l’Aisne aux côtes de la Mer du nord, c’est celui de la zone industrielle.


    L’Europe s’apprête à accueillir ses quatre premières usines de batteries pour voitures électriques. Deux en Allemagne et deux en Hauts-de-France, à trente kilomètres d’écart : à Douvrin https://chez.renart.info/?Electrique-ou-non-la-bagnole-nous-roule-et-nous-ecrase et maintenant Douai. On reconnaît un argument électoral de prime importance aux stratégies de communication qui l’entourent. Ne souhaitant pas interférer dans la campagne régionale, l’Élysée devait repousser son annonce après les élections. Mais Xavier Bertrand, candidat à sa réélection dans les Hauts-de-France, claironne sur Twitter qu’il a « obtenu » une deuxième usine de batteries automobiles dès le 24 juin, quatre jours avant le vote. La ministre de l’industrie Agnès Pannier-Runacher, par ailleurs ancienne directrice « Recherche & Développement » de l’équipementier automobile #Faurecia, s’empresse de préciser que ce projet est « intégralement porté par L’État [1] ». Qui de bonnes nouvelles apporte, frappe hardiment à la porte, dit le proverbe.

    Le lendemain matin d’une abstention électorale historique (65 %), le président de la République et Xavier Bertrand célèbrent à #Douai leur « victoire » commune. Et les concurrents à la présidentielle de souligner leurs investissements respectifs : l’État devrait apporter 200 millions d’euros et la Région 35 millions – l’industriel chinois Envision prévoyant deux milliards. L’abstention de la veille n’est déjà plus qu’un souvenir. Ou bien espèrent-ils raviver la flamme républicaine des électeurs avec des promesses d’embauche, de gigawatts, et de bagnoles sur les routes : 1 000 emplois, 9 gigawatts heures et 400 000 Renault électriques par an à partir de 2024. Car voilà du lourd, du concret. Des milliards et des emplois arrachés par des politiciens qui mouillent la chemise et se retroussent les manches. Qui va critiquer ce que tout le monde est censé attendre d’un Chef d’État techno-industriel ? Pas les nouveaux élus du Conseil régional, qu’ils soient dans l’opposition ou la majorité.

    Plus de plus
    Sébastien Chenu, le candidat local du Rassemblement national, dénonçait chez ses concurrents l’attitude « spectatrice passive de la désindustrialisation » et promettait de faire de « la réindustrialisation la première des priorités » [2]. Une seconde usine de batteries de voitures est donc pour lui une bonne nouvelle.

    Pour l’Union de la gauche et des écologistes rassemblée derrière la verte #Karima_Delli, nostalgique d’une ville prétendument « riche d’un passé industriel fastueux » (Roubaix, sa ville de naissance), « Le temps est venu de s’absoudre d’un passé dévitalisé par la désindustrialisation. [3] » Si la gauche considère encore que la région souffre de la désindustrialisation plutôt que de l’industrie elle-même, de ses nuisances passées et futures, son programme est logiquement industrialiste : vélos électriques, trains à hydrogène, fret ferroviaire, éoliennes tant que le permet l’opinion publique, canal Seine-Nord, et bien évidemment : voitures électriques. L’opposition de la gauche et des écologistes à Xavier Bertrand n’a donc qu’à applaudir les deux usines automobiles annoncées.

    Quand bien même la liste du candidat LREM, le déjà oublié #laurent_pietraszewski avec ses cinq ministres co-listiers, aurait eu quelques strapontins dans l’hémicycle régional, on se demande quelles différences fondamentales il aurait pu faire valoir. Son « Plan de réindustrialisation » s’égrène ainsi : vélos électriques, trains et bus à hydrogène, fret ferroviaire, éoliennes tant que le permet l’opinion publique, canal Seine-Nord, et bien évidemment : voitures électriques.

    Plus de moins
    Si l’abstention est un marqueur de classe (80 % dans les communes pauvres), le vote est un marqueur d’adhésion à un projet hégémonique depuis le Second Empire. Partageant une même volonté de puissance industrielle, les candidats ne se distinguent plus que sur les moyens de cette puissance. Le débat sur l’éolien, notamment sur le projet offshore d’EDF-Dunkerque https://chez.renart.info/?De-Dunkerque-au-Treport-un-panier-de-crabes-au-pied-des-eoliennes-off , en fut le révélateur. Le nouvel hémicycle régional nous en promet d’autres, aussi passionnés et passionnants, sur la dose de participation publique aux investissements industriels, sur la gestion publique ou privée (des TER par exemple), si ce n’est coopérative (l’éolien), de telle ou telle entreprise. Et surtout, surtout, sur l’inclusion des chômeurs, femmes et « minorités », à tous les échelons de la hiérarchie industrielle, eu égard à leurs « compétences » et diplômes.

    L’urgence n’est pas de savoir comment déplacer les conteneurs de marchandises et d’humains, mais pourquoi en déplacer toujours plus. L’urgence écologique ne réclame pas de remplacer tel moyen de transport par tel autre, ou telle énergie fossile par telle autre prétendument « alternative », mais de discuter des effets et des fins de notre passage sur Terre. Quand la classe technocratique bourre les urnes de considérations superflues, l’essentiel se discute hors des bureaux de vote.

    Renart
    p.s. : en politique comme en foot, on n’est pas toujours obligé de prendre parti. Qu’on soutienne telle équipe ou telle autre, que les supporters soient racistes ou anti-racistes, que les joueurs mettent ou non un genou à terre, le vainqueur est toujours la Foot-Industry ; et tous, supporters, sportifs, fédérations, sponsors, industriels de l’hôtellerie, du soda, du BTP, de l’audiovisuel, du sportswear, des paris en ligne ou de l’aéronautique défendront leur business au Mondial 2022 dans une techno-théocratie, esclavagiste, misogyne, criminelle (déjà 6 500 morts sur les chantiers du Mondial) et financière du djihadisme.

    Notes
    [1] La Voix du nord, 26 juin 2021.
    [2] France Culture, 11 mai 2021.
    [3] « Pour le climat, pour l’emploi », Programme de l’Union de la Gauche et des écologistes en Hauts-de-France aux Régionales 2021.

    #Haut_de_france #voitures_électriques #pollution #empoisonnement #transports #edf #éoliennes #xavier_bertrand #Douai #Douvrin

  • Haute-voltige de basse politique Harry Cover - 30 Juillet 2019 - La Brique Lille
    http://labrique.net/index.php/thematiques/politicaille/1069-haute-voltige-de-basse-politique

    Le 24 juillet 2019, Violette Spillebout , après bien des péripéties, a finalement été investie candidate En Marche à la Mairie de Lille... Une occasion de revenir sur le duel qui l’a opposé à Valérie Petit.

    Sortez les pop-corn, le premier round pour le trône municipal commence ! Et ça pique déjà, à coup de petites phrases, de coups bas, trahisons et improbables alliances ! Fermez les yeux, ça va cogner ! Certain.es des futur.es candidat.es dégustent d’ores et déjà quand d’autres esquivent de justesse pour s’assurer la victoire. Le camp En Marche, divisé avec deux candidates à la Mairie, ne sait pas où donner de la tête, pour le plus grand plaisir de Martine.

    À la fin de l’été 2018, Valérie Petit, l’actuelle députée LREM de la 9ème circonscription se porte candidate au beffroi lillois. Trois mois plus tard, Christophe Itier, candidat naturel de la macronie locale, renonce à se présenter 1. Mais c’était sans compter sur la candidature de Violette Spillebout, une politicienne nourrie au grain socialiste, aujourd’hui largement soutenue par le clan Itier pour remporter la Mairie sous blason d’En Marche. Le match risque d’être serré et les candidates vont tout donner pour monter les marches du podium.

    Une même couleur, deux camps irréconciliables
    À peine la candidature de Valérie Petit est-elle déclarée que Violette Spillebout s’annonce porte drapeau du clan Itier. Entrée dans le cabinet de Mauroy en 1997, Violette Spillebout a été la dir’cab d’Aubry entre 2008 et 2012 et s’est depuis recyclée à la SNCF en tant que Directrice de la Relation Client et des situations sensibles. Dans le sillage de Violette Spillebout se pressent autant de rejets de la macronie féodale que d’ennemi.es d’Aubry. À commencer par Bernard Charles, ancien conseiller municipal et ex-président de la Mairie de quartier de Lille-Sud qui avait, en 2017, fait l’affront de soutenir le candidat Itier aux législatives.

    L’outrage lui avait d’ailleurs valu une séance publique de destitution pour le moins humiliante en conseil municipal. Mais l’aversion est réciproque, entre Violette et Martine. En janvier 2018, la Maison de la photographie, tenue par Olivier Spillebout 2, le mari de Violette Spillebout, doit affronter la fin des subventions municipales, mettant ainsi à mal les finances du lieu culturel 3. Le coup de grâce est dans la foulée donné par l’annonce de Xavier Bertrand et de Martine Aubry de la création de « l’Institut de la photographie » dans le Vieux-Lille. Le couple Spillebout a décidément plus d’une dent contre Aubry…

    C’est qui la taulière ?
    Ne cherchez pas de photos publiques de Valérie Petit avec Violette Spillebout, même lorsque ces deux-là se trouvent le même jour au même endroit, ni de soutien « républicain » de l’une envers l’autre. Coté presse locale, si Violette Spillebout snobe volontairement sa concurrente, Valérie Petit, elle, voit rouge écarlate ! Fin janvier 2019, lors de ses vœux aux lillois.es, une petite phrase de Valérie Petit fait d’ailleurs bondir les gratte-papiers locaux. Reprises texto, les phrases tombées du camion font les choux gras de la presse : « "Je subis des pressions pour me décourager (...) C’est dur", […] évoquant des "intimidations" et des "menaces physiques" » Pas de noms mais... suivez mon regard. Et c’est le premier coup de savate d’un travail de sape qui vise à savonner la campagne minutieuse et durable de Spillebout à coup de petites phrases assassines 4. Spillebout, elle, garde le cap, tacle plutôt Aubry et prône le rassemblement des candidatures d’En Marche sans jamais citer sa concurrente.

    De son côté, Valérie Petit ne perd jamais une occasion de rappeler qu’elle a le soutien du national. Ses rares apparitions médiatiques sont d’ailleurs faites de cérémonies officielles avec Jean-René Lecerf (président LR du département), Gérald Darmanin (Ministre LREM des Comptes Publics) et… Martine Aubry.

    Et si, au final, tout ce rififi ne profitait qu’à une seule personne ? Martine Aubry ? La proposition est pour le moins intéressante5. En torpillant le camp d’En Marche via Darmanin, donc via Valérie Petit, Aubry divise les militant.es marchistes, fait la nique à son ancienne dir’cab’ et… s’assure plus facilement une place au second tour. La contrepartie d’un petit dîner en tête à tête entre Aubry et Darmanin ? « À moi la mairie, à toi la MEL... »
     

    1. VDN du 16 mai 2018 « Mettons la pression sur ceux qui rencontrent Itier »
    2. La Brique n°14, A qui profite Lille 3000 ?, « Dans la chambre noire des transphotographiques »
    3. Vous pouvez retrouver, sur le site de la maison de la photographie, la longue litanie et lente décomposition du lieu sous le terme « presse politique » !
    4. Dans Le Point du 25/04/19 Valérie Petit ose même dire « Je ne l’ai jamais croisée, ni à La République en marche ni ailleurs »… un peu gros à notre goût.
    5. Les Échos du 12/09/2018 « A Lille, les tractations auraient déjà commencé en vue des municipales », l’article dénonce une rencontre entre Aubry et Darmanin qui auraient dîné ensemble à l’hôtel de ville.

    La suite : La laborieuse campagne de Spillebout dans les quartiers populaires
    Le lien http://labrique.net/index.php/thematiques/politicaille/1069-haute-voltige-de-basse-politique

    #Lille #Mairie_de_Lille #enMarche #Violette_Spillebout #Valérie-Petit #LREM #Christophe_Itier Maison de la #Photographie #Xavier_Bertrand #Martine_Aubry #Gérald_Darmanin #Jean-René_Lecerf #Dailynord

  • Le « mur des cons » du professeur Wauquiez
    https://www.mediapart.fr/journal/france/190218/le-mur-des-cons-du-professeur-wauquiez

    Ce ne serait pas un couac ! Il n’a pas fallu trois jours pour que l’affaire Wauquiez change de registre. Des experts en communication estiment que son dérapage était peut-être une fine manœuvre, façon Donald Trump. Wauquiez a pourtant dérapé, et choqué jusqu’à son camp.

    #France #étudiants #Laurent_Wauquiez #Nicolas_Sarkozy #Xavier_Bertrand #“Mur_des_cons”

  • Dans le #Nord, Wauquiez tente de remobiliser des militants traumatisés
    https://www.mediapart.fr/journal/france/071217/dans-le-nord-wauquiez-tente-de-remobiliser-des-militants-traumatises

    Meeting de #Laurent_Wauquiez © LD Pour l’un de ses derniers meetings de campagne, Laurent Wauquiez a fait face à Lille à des militants de la fédération du Nord qui accusent le coup des défaites successives. La participation au scrutin de dimanche pour élire le prochain président ou la prochaine présidente de LR s’annonce assez faible.

    #France #Gérald_Darmanin #Les_Républicains #Xavier_Bertrand

  • Une #usine en #France : les chausse-trapes de la #reprise pour les « Sapag »
    https://www.mediapart.fr/journal/france/120916/une-usine-en-france-les-chausse-trapes-de-la-reprise-pour-les-sapag

    © MG Mediapart s’attache au sort des « #Sapag », salariés de l’usine #Pentair, à Ham dans la Somme. La #fermeture de leur entreprise pourrait être enclenchée fin septembre, mais deux repreneurs potentiels se sont manifestés. Les #syndicats et les salariés, laissés à l’écart du processus, craignent un repreneur aux reins trop fragiles, et la fermeture à retardement.

    #Macron #robinetterie #Xavier_Bertrand

  • En régions, le violent face-à-face de la #droite et du #FN
    https://www.mediapart.fr/journal/france/220216/en-regions-le-violent-face-face-de-la-droite-et-du-fn

    Dans les deux conseils régionaux où la gauche est absente, en #PACA et dans le #Nord-Pas-de-Calais-Picardie, le FN est bien décidé à jouer son rôle d’opposition face à la droite. Invectives, menaces judiciaires, votes contradictoires… Sur la forme, comme sur le fond, l’affrontement est violent.

    #France #Christian_Estrosi #Conseil_régional #extrême_droite #Les_Républicains #LR #politique #régionales #UMP #Xavier_Bertrand

  • Dunkerque : dans les Arena du pouvoir

    http://labrique.net/index.php/thematiques/hors-canard/759-dunkerque-dans-les-arena-du-pouvoir

    « Entre 2009 et 2014, Michel Delebarre, maire PS de Dunkerque et président de la Communauté Urbaine, rêvait d’une grande salle multi-sport Arena à la hauteur de son ego. Au final, ce projet aura précipité sa chute aux élections municipales de mars 2014 en faveur de Patrice Vergriete (divers gauche). Si ce dernier a fait campagne en dénonçant les pratiques non-démocratiques du maire bâtisseur, son vernis de politique de concertation publique commence à s’écailler : c’est dans l’entre-soi cher aux élus que vient de se décider la construction d’une autre version de l’Arena. Retour sur ce projet qui ne cesse de cristalliser les rancœurs contre un système politique local à bout de souffle. »

    #dunkerque #arena #democratie #sport_spectacle

  • Dunkerque, dans les Arena du pouvoir - La Brique Lille, 22 Janvier 2016
    Entre 2009 et 2014, Michel Delebarre, maire PS de Dunkerque et président de la Communauté Urbaine, rêvait d’une grande salle multi-sport Arena à la hauteur de son ego. Au final, ce projet aura précipité sa chute aux élections municipales de mars 2014 en faveur de Patrice Vergriete (divers gauche). Si ce dernier a fait campagne en dénonçant les pratiques non-démocratiques du maire bâtisseur, son vernis de politique de concertation publique commence à s’écailler : c’est dans l’entre-soi cher aux élus que vient de se décider la construction d’une autre version de l’Arena. Retour sur ce projet qui ne cesse de cristalliser les rancœurs contre un système politique local à bout de souffle.


    Les arguments ne manquaient pas pour s’opposer au projet de la salle Arena qui pointe son nez à l’été 2009 : projet sur-dimensionné (10.700 places pour un territoire de 200.000 habitant.es), contrat décrié (Partenariat Public-Privé et donc perte de la maîtrise publique) entre les mains d’un géant du BTP (Vinci), coût faramineux (260 millions d’euros), lieu d’implantation à proximité d’une usine pharmaceutique classée SEVESO, et construction d’un centre commercial « Grand Nord » attenant à la salle, qui fragiliserait des commerces de proximité déjà affaiblis par la présence massive de grandes surfaces sur l’agglomération. Et pourtant le projet a été voté les yeux fermés par la majorité des élu.es de la Communauté Urbaine de Dunkerque (CUD). Il aura fallu attendre que des habitant.es, environnementalistes et syndicalistes s’emparent du sujet pour que le débat sorte du conseil communautaire et enflamme la vie politique dunkerquoise à un an des élections municipales. La Brique a passé au scalpel ce Grand Projet Inutile qui assomme aujourd’hui les Dunkerquois.es d’une dette de 30 millions d’euros.
     
    Unanimité forcée
    http://labrique.net/index.php/thematiques/hors-canard/759-dunkerque-dans-les-arena-du-pouvoir

    Aux grands maux... les grands remèdes
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    Versatile Vergriete
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    Une enquête publique pour la forme
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    Game of Thrones
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    La sanction de la Cour des Comptes
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    Autisme ou syndrome d’hubris ?
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    #Arena #PS #Communauté_Urbaine #Patrice_Vergriete #entre-soi #système_politique_local #Partenariat_Public_Privé #PPP #Vinci #AGUR #USDK #Soginorpa #Lagardère_Unlimited #oligarchie #politique_locale #mégalomanie #démesure #Xavier_Bertrand #Saint-Pol-sur-Mer #béton #Lille #La_Brique_Lille #Grand_Projet_Inutile #dunkerque #democratie #sport_spectacle

  • Dans le Nord, les socialistes enragent de ce 21-Avril bis
    https://www.mediapart.fr/journal/france/111215/dans-le-nord-les-socialistes-enragent-de-ce-21-avril-bis

    Ils sont militants, élus ou simples électeurs dans la métropole lilloise. Ils ont rejoint le PS avant ou après le 21 avril 2002. Treize ans plus tard, ils doivent choisir, à nouveau, entre la droite et le Front national au second tour. Sauf qu’entre-temps, le curseur de la droite s’est déplacé et le parti de Marine Le Pen est à 40 %…

    #France #élections_régionales_2015 #Les_Républicains #Lille #Martine_Aubry #parti_socialiste #Pierre_de_Saintillon #politique #Roubaix #Xavier_Bertrand

  • #Xavier_Bertrand : #Dourak de service ou simplement cynique ?
    https://reflets.info/xavier-bertrand-dourak-de-service-ou-simplement-cynique

    Comment peut-on en arriver là ? Par pure bêtise ou par cynisme débridé ? La question mérite d’être posée à la lecture de ce document. Bien sûr, il y a cette idée de renvoyer les #Migrants qui commettent des délits à Calais… Où ça ? En Grande-Bretagne peut être ? Hum… Ah, non, ça ne […]

    #Breves #Les_Républicains