• En #Algérie, la France coloniale a aussi détruit la #nature

    L’accaparement colonial de la terre en Algérie a détruit des modes d’organisation et de gestion de la terre en commun. Le développement des monocultures et d’une agriculture d’exportation a aussi bouleversé l’environnement.

    Après avoir été suspendu de RTL début mars pour avoir évoqué les massacres français en Algérie au XIXe siècle, Jean-Michel Apathie a décidé de quitter la station. En pleine surenchère du ministre Bruno Retailleau avec l’Algérie et face à une extrême droite qui clame les bienfaits de la colonisation, le flot de réactions hostiles aux propos de l’éditorialiste rappelle que nombre de Français ne connaissent pas l’ampleur des crimes coloniaux commis par la France en Algérie.

    Face aux tentatives de révisionnisme historique, Reporterre s’est intéressé à un pan méconnu de la colonisation française en Algérie : ses dégâts sur la nature. À l’aube de la colonisation, le socle de la société algérienne reposait sur la paysannerie, l’agriculture était la principale source de richesse et rythmait la vie des populations qui alternait entre le travail de la terre et les transhumances saisonnières. Mais de 1830 jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale, l’accaparement des terres par les colons a complètement bouleversé cet équilibre.

    « L’arrivée des colons en Algérie signe l’accaparement des ressources environnementales et celle du foncier. C’était une pratique d’expropriation sans explication, sans excuse et avec une grande brutalité. Pour les Algériens, c’est un monde qui s’effondre littéralement », relate Antonin Plarier, maître de conférence à l’université Lyon 3 et spécialiste de l’histoire environnementale des sociétés coloniales.

    Au total, d’après ses calculs, plus d’1,2 million d’hectares ont été transférés aux Européens entre 1830 et 1917 : soit l’équivalent de 1 000 fois la superficie de Paris, et trois fois celle de la Belgique.

    Pour réquisitionner des terres algériennes, la France a développé un arsenal juridique légalisant un paradoxe : celui d’une société qui défendait le droit à la propriété et d’une colonisation qui foulait au pied celle des Algériens. L’administration coloniale pouvait ainsi s’emparer de n’importe quelle propriété algérienne, qu’elle soit celle d’un individu comme d’une tribu entière.
    Détruire la paysannerie pour « soumettre le pays »

    La doctrine coloniale et militaire se lit à travers les écrits du maréchal Bugeaud, le militaire qui a permis d’étendre la conquête de l’Algérie. Voici notamment ce que précise cette violente figure de la colonisation, spécialiste des enfumades (pratique consistant à asphyxier des personnes réfugiées ou enfermées dans une grotte en allumant devant l’entrée des feux) : « J’y ai réfléchi bien longtemps, en me levant, en me couchant ; eh bien ! Je n’ai pu découvrir d’autre moyen de soumettre le pays que de saisir l’intérêt agricole ». Il faut donc empêcher les populations « de semer, de récolter, de pâturer », pour les priver des moyens d’existence, souligne l’historien Hosni Kitouni, chercheur en histoire à l’université d’Exeter.

    En filigrane, il s’agissait de punir tous ceux qui tentaient de se révolter, et de dissuader ceux qui en avaient l’intention. En 1838, l’ordonnance royale du maréchal Bugeaud indiquait que toute tribu s’insurgeant contre la domination française pouvait voir ses terres séquestrées. Cette politique monta encore d’un cran en 1871 à la suite d’une insurrection initiée contre la puissance coloniale.

    Cette « tempête des spoliations », selon l’expression d’Hosni Kitouni, a non seulement dispersé les populations, contraintes d’abandonner leurs maisons, leurs cultures, leur bétail, mais a également entraîné leur paupérisation, voire pire, leur famine, puis leur mort. En parallèle, la violence des razzias, ces opérations militaires menées dans des campements, a détruit les habitations et les récoltes. Les arbres fruitiers étaient rasés dans les zones de guerre.
    Spoliation de l’eau et des forêts

    « Devenus des paysans sans terre, sans bétail, sans abris, n’ayant que la force de leurs bras à vendre, ils vont alimenter la masse des candidats à toutes les servitudes », écrit Hosni Kitouni. D’anciens propriétaires algériens sont alors parfois revenus sur leurs terres louer leur force de travail aux colons français. « Des paysans algériens vont revenir cultiver la terre, fournir les semences, et les instruments agraires, en échange de quoi ils vont pouvoir récupérer un ou deux cinquièmes de la récolte, le reste revenant au propriétaire », raconte à Reporterre Antonin Plarier.

    Au-delà des terres, la colonisation s’est emparée des communs que sont les forêts et l’eau. Au XIXe siècle, plusieurs opérations de maîtrise des cours d’eau ont fleuri, toujours dans le but d’irriguer les terres des colons. Dans les années 1860, un projet de barrage a vu le jour dans le département d’Oran. Antonin Plarier pointe ainsi ce qui tient de l’évidence : « Lorsqu’une source en eau est maîtrisée, elle l’est uniquement au bénéfice des colons, et donc au détriment des agriculteurs algériens qui en sont de fait dépossédés. »

    La question de l’eau a entraîné plusieurs conflits, tout comme celle des forêts. Dès les années 1830, l’imposition du Code forestier par les colons a restreint peu à peu aux Algériens l’artisanat, le passage du bétail, le ramassage du bois de chauffe, et la coupe de bois pour les diverses constructions.

    Résultat : entre un tiers et la moitié des ressources économiques de la paysannerie algérienne a été menacée par ce nouveau cadre légal, estime Antonin Plarier. Il faut dire que l’administration coloniale y a très vite vu un filon : l’exploitation des forêts en vue de leur commercialisation.

    Dans la montagne de Beni Khalfoun, dans la vallée de l’Isser, l’administration octroya par exemple une concession d’environ 1 000 hectares de chênes-lièges, un bois cher et prisé pour la fabrication de bouchons, à un exploitant français. Difficile de donner un chiffre précis, mais cet accaparement de ressources essentielles n’a pas été sans conséquences sur l’écosystème algérien.

    « C’est toute une série d’éléments liés à la colonisation qui vont contribuer à dégrader l’environnement algérien. En asséchant les sols via la déforestation, l’État colonial a par exemple favorisé l’érosion des sols », dit l’historienne Hélène Blais, professeure d’histoire contemporaine à l’ENS et autrice de L’empire de la nature. Une histoire des jardins botaniques coloniaux.
    Monocultures et rentabilité

    En Algérie, comme ailleurs, la colonisation s’est accompagnée de l’introduction de nouvelles espèces jugées plus rentables, et d’un bouleversement dans les pratiques agricoles tournées vers une pratique intensive et exportatrice correspondant davantage aux besoins de la métropole.

    Ce qui fait dire à Alain Ruscio, historien spécialiste de la période coloniale, que « la totalité de l’écosystème algérien a été affectée par la colonisation » : « Au fur et à mesure que l’armée française considérait qu’une région était complètement contrôlée, des monocultures étaient rapidement mises en place. D’où aussi la construction de routes servant à acheminer ces marchandises vers la France », nous explique-t-il.

    C’est l’exemple de la vigne et de sa vinification, qui priva une partie de la population d’un accès à la culture de céréales, et entraîna la disparition de terres en jachères — qui fournissaient des pâturages jusqu’ici essentiels pour le bétail des paysans algériens. Mais aussi de l’introduction massive de l’eucalyptus, cette plante endémique d’Australie, dès les années 1860 pour tenter d’assainir les zones humides dans lesquelles le paludisme décimait des colons.

    « Des millions d’arbres ont ainsi été plantés. Dans certains endroits, cela a asséché plus qu’il était nécessaire, au détriment d’autres espèces endémiques qui ont été abattues ou abandonnées dans ce cadre », analyse Hélène Blais. L’historienne a également observé des tentatives d’introduction de moutons mérinos, apporté pour sa laine prisée en Europe.
    Chasses coloniales

    Sans oublier les chasses coloniales qui attiraient des Français originaires de tout l’Hexagone venus traquer hyènes, panthères, lions et autres animaux sauvages. Considérés comme des animaux nuisibles, leurs têtes furent mises à prix via une circulaire du général Bugeaud de 1844 offrant une récompense pour tout animal tué « proportionné à la puissance de chaque bête ». D’après les recherches d’Hosni Kitouni, rien qu’en 1860, ce ne furent pas moins de 61 panthères et 38 lions qui avaient été abattus. Si bien qu’à la fin du XIXe siècle, le plus gros de la faune sauvage avait disparu. Le dernier lion fut abattu en 1958.

    « L’ordre colonial s’accommode peu avec la différence biologique, écologique, humaine qui résiste à sa domination, conclut l’historien auprès de Reporterre. D’où la politique de mise en ordre à force de violence et de juridictions d’exception, empêchant la société autochtone de se développer à son rythme selon ses lois naturelles. »

    Au-delà des crimes commis sur les Algériens, peu d’historiens se sont jusqu’ici emparés des destructions des écosystèmes. L’ampleur d’un éventuel écocide lié à la colonisation française reste à quantifier et est un angle de mort de la recherche.

    https://reporterre.net/En-Algerie-la-France-coloniale-a-aussi-detruit-la-nature
    #destruction #paysage #colonisation #France #France_coloniale #histoire #terres #accaparement_des_terres #communs #agriculture #exportation #monoculture #paysannerie #foncier #expropriation #brutalité #violence #réquisition #droit_à_la_propriété #lois #maréchal_Bugeaud #enfumades #moyens_d’existence #insurrection #paupérisation #famine #razzias #arbres_fruitiers #eau #forêts #forêt #barrage #conflits #Code_forestier #érosion_des_sols #ressources #montagne #déforestation #environnement #érosion_des_sols #rentabilité #routes #vigne #jachères #terres_en_jachères #céréales #pâturages #eucalyptus #zones_humides #paludisme #arbres #laine #chasse #chasses_coloniales #ordre_colonial #animaux_sauvages #écocide
    #géographie_culturelle #géographie_du_droit #legal_geography

  • Beavers reintroduced to southwest #Oregon to restore wetlands

    Project Beaver worked with the Bureau of Land Management to restore the large rodents to the #Cascade-Siskiyou National Monument.

    In February, over a dozen beaver enthusiasts donned snowshoes and filed to a headwaters creek in southwest Oregon to watch as five beavers were introduced to their new home.

    One by one, the furry rodents clambered out of cloth bags and slid down the snowy bank into the frigid water.

    The release marks a milestone for the Vesper Meadow Education Program, which has been rehabilitating wet meadow habitat on private land nearby.

    Experts and volunteers have spent the past six years setting the table for beavers, said Jeanine Moy, Vesper Meadow’s program director. “We’ve been partnering with state federal agencies as well as local nonprofits, school groups, artists, independent biologists to get the ecosystem to the point where beavers could come back.”

    Beaver dams and activity can help store water, improve water quality, boost biodiversity, and even create firebreaks. But the loss of these “ecosystem engineers,” along with cattle grazing, water diversions and logging, have degraded wet mountain meadows.

    To reverse the damage, volunteers have worked to make the area more beaver-friendly.

    They have planted hundreds of willow stakes — a favorite beaver food — and helped Project Beaver install dozens of structures in area creeks on both public and private land. Constructed with small-diameter trees and branches, these structures emulate beaver dams and activity, helping to slow down and retain water.

    “We’re just packing the wound in the sense that waterways have collapsed into these gashes in the landscape,” said Jakob Shockey, executive director of Project Beaver. “By packing the wound, we help slow the force of the water in such a way that beavers can go in there and take over.”
    State legislation to protect beavers

    In Oregon, as elsewhere, beavers were widely trapped for their fur and killed as “nuisance animals” that caused flooding and killed trees. Now, wildlife managers are recognizing beavers as a “keystone species” whose activity can improve the health and resilience of ecosystems.

    Oregon lawmakers have introduced several bills recognizing the beaver’s important role. HB 3464, passed in 2023, reclassified beavers from predatory animals to furbearers on private land. Under the new law, landowners can still kill beavers, but they must obtain a permit and report their “take” to the Oregon Department of Fish and Wildlife.

    A new bill, HB 3143, builds on this legislation, said state Rep. Pam Marsh, whose district includes southern Jackson County. The bill, which enjoys broad bipartisan support, would create a fund to help landowners deploy non-lethal tools like fencing or tree wrapping to deter beavers.

    “What we’re trying to do with all this beaver legislation is to help beavers do their thing, to our benefit,” Marsh said. “If we want [landowners] to look at other options, we should provide some support for doing that.”

    Landowners kill hundreds, if not thousands, of “nuisance” beavers every year. The beavers released in February were lucky: Project Beaver rescued them from a ditch in the Gold Hill Irrigation District. Shockey said funding could have paid for flow devices that keep beaver dams from completely blocking (and flooding) a waterway and allowed the beaver family to stay in Gold Hill.

    A second bill, HB 3932, would prohibit the hunting or trapping beavers on public land where the state has deemed the waterways “impaired.”

    Shockey said protecting beavers on public land could help safeguard investments in beaver-based restoration.

    Many of the streams Project Beaver has targeted for restoration once hosted beavers; now, most of the colonies have disappeared.

    The day of the release, Shockey and volunteers left apples, carrots and willow cuttings for the beavers to snack on. While there’s no guarantee the family will stay in the area, Moy hopes they become partners in bringing back the wet meadow ecosystem.

    “I certainly hope they stay and it’s a good home for them,” she said. “It could be really wondrous for just carrying on the restoration work that we’ve started.”

    Both Vesper Meadow and Project Beaver recently lost federal funding for their restoration projects. Moy says they will likely scale back their ambitions for this year, but they will still work with volunteers to plant more willows and shore up beaver structures at Vesper Meadow this summer. She believes their project can help other landowners who want to partner with beavers.

    “I hope to set as a model and provide information about how to do that as a resource for other conservation groups or landowners, land managers, and just really demonstrate some best practices in being in relation with the land,” she said.

    https://www.opb.org/article/2025/03/23/beavers-return-vesper-meadow
    #castors #castor #réintroduction #zones_humides #USA #Etats-Unis

  • En pleine élection agricole, le Sénat vote le retour des #insecticides tueurs d’abeilles

    Lundi 27 janvier, le Sénat a voté le retour des #néonicotinoïdes et des facilitations accordées à la construction des #mégabassines. Une proposition de #loi venue du sénateur et ancien élu de la #FNSEA Laurent Duplomb, qui devra passer en deuxième lecture à l’Assemblée nationale.

    Au Sénat, lundi 27 janvier, deux positions se sont opposées. Les tenant·es du « pragmatisme » et de la « compétitivité » l’ont emporté face à des élu·es qui craignent un « grand recul » et défendent des « alternatives ». En définitive la réintroduction des néonicotinoïdes a été votée, pour « sauver » les filières des #betteraves_à_sucre et de la #noisette. Ces insecticides tueurs d’abeilles étaient interdits en France depuis 2018. Le débat a été tout aussi enflammé concernant le #stockage_d’eau pour des fins agricoles et la redéfinition des #zones_humides, et là aussi ce sont les défenseurs de l’agriculture productiviste qui l’ont emporté.

    À l’origine de cet affrontement : la #proposition_de_loi (#PPL) visant à « lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur » à l’initiative du sénateur Les Républicains (LR) #Laurent_Duplomb, finalement adoptée à 233 voix contre 109. Cet agriculteur, ancien élu de la FNSEA-JA (Jeunes Agriculteurs) et ancien président de la chambre d’agriculture de Haute-Loire, et dont le fils est lui-même, depuis l’an dernier, président des #Jeunes_Agriculteurs du département, a réussi à mettre son texte à l’agenda du Sénat en pleine élection agricole, après avoir déjà présenté la semaine dernière un amendement au budget pour supprimer l’Agence Bio.

    La PPL a ainsi court-circuité la poursuite du travail parlementaire sur la #loi_d’orientation_agricole – dont l’examen par la chambre haute est suspendu depuis la dissolution de juin 2024 et doit commencer le 4 février –, parfois en le doublonnant, mais surtout en allant encore plus loin dans la remise en cause de mesures environnementales.

    « La plume officielle de la FNSEA »

    La réintroduction des néonicotinoïdes, emblématique de ce texte, concerne l’#acétamipride, une molécule qui, après son interdiction, avait bénéficié d’une dérogation jusqu’en 2020. Elle est destinée à lutter contre les insectes suceurs dans les cultures de végétaux feuillus et de fruits à coque. Même si l’amendement de compromis présenté par la ministre de l’agriculture, Annie Genevard, a nuancé le texte initial porté par Laurent Duplomb, le faisant évoluer d’une réautorisation stricto sensu de la substance à une nouvelle #dérogation, la gauche et les écologistes étaient unanimes contre tout aménagement ouvrant la voie à un retour de ce produit toxique dans les champs.

    L’opposition a tenté, en vain, de « débunker » les assertions des défenseurs du texte – les deux rapporteurs, le président de la commission des affaires économiques, la ministre de l’agriculture et, plus largement, les élu·es des partis gouvernementaux. Ainsi, pour Daniel Salmon, du groupe Écologiste Solidarité et territoires, élu en Ille-et-Vilaine : « Ce genre de procédure [la dérogation – ndlr] nous amène à traîner sans chercher les alternatives. Or les alternatives existent déjà. Certes, sans néonicotinoïdes, les rendements baissent. Mais regardons les betteraves à sucre : on produit 70 % de sucre en plus de ce qu’on consomme. Produire plus, pourquoi pas, mais ça se fait au détriment de la santé et de la biodiversité. »

    Le socialiste Jean-Claude Tissot, lui-même agriculteur et membre de la Confédération paysanne, a dénoncé avec cette PPL « un contresens historique » et « un populisme rétrograde en rupture totale avec la transition écologique », et rappelle qu’en avril 2023, le directeur scientifique de l’Inrae avait été auditionné dans l’enceinte du Sénat. « Il nous avait expliqué que l’acétamipride est pire que l’imidaclopride [autre néonicotinoïde interdit – ndlr], et que c’était le #chlordécone de l’Hexagone, relate le sénateur de la Loire. Ce que vous faites s’appelle de l’#obscurantisme. Vous niez la #science car vous mettez le rendement économique devant tous les paramètres. Qu’allez-vous dire à nos petits-enfants qui vont subir des #dérèglements_hormonaux ? » L’opposition a, à plusieurs reprises, dénoncé une remise en cause du principe de non-régression du droit de l’environnement.

    À des années-lumière de ces interrogations, Laurent Duplomb n’a cessé d’assurer, lui, que cette PPL ne constituait en aucun cas « une #régression ». Tout au contraire, l’éleveur de Haute-Loire s’est vanté de « mettre fin à dix années d’interdiction » pour reconquérir des parts de marché perdues face à d’autres pays européens où l’acétamipride est autorisé, comme la Pologne, sur un ton qui frisait bon le paternalisme face à une opposition interloquée. « L’enfant, quand il fait une erreur, on le lui dit et on l’éduque. Eh bien, pour une fois, on va éduquer en corrigeant les erreurs que nous avons faites dans le passé. »

    « Ayons le courage de sortir de l’#obscurantisme_vert », « Continuez, madame, de mettre les agriculteurs dans le corner », a également lancé le sénateur FNSEA, incriminant au passage « le lobby de la Confédération paysanne ».

    Mais c’est surtout un discours collant aux éléments de langage de la FNSEA-JA et de la #Coordination_rurale qui a dominé l’hémicycle lundi soir, alors qu’agricultrices et agriculteurs sont appelés ces jours-ci, jusqu’à vendredi, à élire leurs représentantes et représentants syndicaux : il fallait « sauver la ferme France », et le corapporteur du texte Franck Menonville (Union centriste) fustigeait « une surtransposition mortifère » et « une avalanche de normes toujours plus contraignantes »...

    Nicole Bonnefoy, pour les socialistes, a ainsi dénoncé « la plume officielle de la FNSEA au Sénat, qui en cette période électorale veut montrer son influence au Parlement ». « Jamais les mots #santé et #biodiversité ne sont utilisés, alors que ce sont des choses essentielles. On ne parle ici que d’#économie », a déploré la sénatrice.

    #Pulvérisation de #pesticides par #drone

    Dans son introduction générale, le président de la commission des affaires économiques, Pierre Cuypers, avait souligné que le texte était « né du constat que le projet de loi agricole évitait soigneusement les sujets qui fâchent, comme l’utilisation des #produits_phytosanitaires. […] Le texte se veut court, pour s’attaquer à quelques irritants majeurs, comme la séparation du conseil et de la vente des produits phytosanitaires ». Force est de constater que la discussion au Sénat n’a en rien levé les profonds désaccords sur ces sujets.

    Le gouvernement a toutefois apporté quelques nuances : la séparation de la vente et du conseil vaudra pour les distributeurs de produits phytosanitaires, pas pour les fabricants comme le voulait le texte initial. L’exécutif a également bloqué sur la volonté des rapporteurs du texte de lever l’interdiction du rabais sur les pesticides : c’était là une « ligne rouge », a expliqué Annie Genevard, qui a fait retirer ce point.

    Pour le reste, la ministre de l’agriculture a suivi les orientations de la PPL, proposant des modifications à la marge pour « sécuriser le texte » d’un point de vue juridique, et elle a remis à la Conférence de l’eau promise par le premier ministre lors de sa déclaration de politique générale la discussion sur une nouvelle « hiérarchie des usages de l’#eau ».

    Pulvérisation de pesticides par drone, possibilité pour le ministère de demander à l’Anses l’examen prioritaire d’un produit en vue de son autorisation de mise sur le marché, facilitation des projets de bâtiments d’élevage et de stockage d’eau ouvrant la voie à de nouvelles #retenues_collinaires et mégabassines pour « #intérêt_général_majeur », assouplissement de la définition des zones humides : les principales mesures contenues dans cette PPL ont donc été adoptées et constituent autant de périls pour la préservation des écosystèmes et la santé des populations. L’opposition a pointé en outre, sur plusieurs dispositions, le risque de se mettre en porte-à-faux vis-à-vis du droit européen.

    L’avenir du texte, cependant, n’est pas acquis. La deuxième lecture, à l’Assemblée nationale, pourrait faire apparaître beaucoup plus de réserves parmi les député·es MoDem et Renaissance, où l’on défendait, pendant les débats sur la loi d’orientation agricole au printemps dernier, une approche plus modérée face à la levée des garde-fous environnementaux.

    https://www.mediapart.fr/journal/politique/280125/en-pleine-election-agricole-le-senat-vote-le-retour-des-insecticides-tueur

  • En Méditerranée, les oiseaux des zones humides menacés par la montée du niveau de la mer
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2024/05/17/en-mediterranee-les-oiseaux-des-zones-humides-menaces-par-la-montee-du-nivea

    D’ici à 2100, un tiers à la moitié des zones humides côtières de huit pays du bassin méditerranéen pourraient être partiellement ou entièrement submergées.
    Par Perrine Mouterde

    Que vont devenir les flamants roses et les avocettes élégantes ? Ces deux espèces sont parmi les plus menacées par l’élévation du niveau de la mer #Méditerranée, provoquée par le dérèglement climatique. Une étude, publiée vendredi 17 mai dans la revue Conservation Biology, met en évidence les risques forts qui pèsent sur les oiseaux inféodés aux #zones_humides du pourtour méditerranéen et rappelle l’urgence à mettre en œuvre des mesures de protection de la biodiversité face aux futures submersions marines.

    Coordonné par le centre d’#écologie et des sciences de la conservation (Muséum national d’histoire naturelle, CNRS, Sorbonne Université) et l’institut de recherche pour la conservation des zones humides méditerranéennes de la Tour du Valat, un groupe de chercheurs s’est intéressé à plus de neuf cents zones humides côtières de huit pays, dont la France. Pour chacune d’entre elles, il a évalué le risque de submersion marine d’ici à 2100, en fonction de sept scénarios de hausse du niveau de la mer, allant de 44 à 161 centimètres . L’impact de l’élévation du niveau marin sur la biodiversité est en général moins étudié que celui de la hausse des températures, mieux connu et plus simple à modéliser.
    Les résultats sont pourtant inquiétants : d’ici à la fin du siècle, un tiers à plus de la moitié des sites étudiés pourraient avoir été submergés, partiellement ou en totalité, selon les différentes hypothèses. Deux pays, la Tunisie et la Libye, hébergent le plus grand nombre de zones humides potentiellement exposées. En France, le parc naturel régional de Camargue, qui abrite la plus grande zone humide du pays, pourrait subir la submersion d’une surface de terres équivalente à quatre fois la superficie de Paris.

    Un « risque vraiment extrême »

    « L’originalité de cette étude est son échelle spatiale assez large et le fait qu’un grand nombre d’espèces soit pris en compte, explique Fabien Verniest, principal auteur de l’étude et postdoctorant au Muséum. Nous établissons un lien explicite entre la submersion et certains animaux, alors que les travaux sur l’élévation du niveau de la mer portent souvent sur l’impact potentiel sur les infrastructures humaines, ou sur les habitats en général. »
    L’étude révèle par ailleurs que les sites bénéficiant d’un statut de protection ainsi que ceux considérés comme d’importance internationale au sens de la convention de Ramsar – c’est-à-dire qui hébergent régulièrement au moins vingt mille individus, 1 % d’une population ou une espèce menacée à l’échelle mondiale – sont davantage exposés au risque de submersion marine que les autres. « On peut supposer que certaines aires protégées ont été créées justement pour se donner les moyens d’anticiper de futurs impacts du réchauffement », précise Fabien Verniest. La moitié des sites Ramsar pourraient être en partie inondés d’ici à 2100, même dans le scénario climatique le plus favorable.

    Outre les flamants roses et les avocettes élégantes, présents sur un grand nombre de sites menacés et très dépendants des lagunes côtières, le canard siffleur, le tadorne de belon, la foulque macroule, le canard chipeau ou la nette rousse font aussi partie des espèces qui pourraient être durement affectées par une perte d’habitats dans cette région.

    « Cette étude souligne le risque vraiment extrême auquel les zones humides méditerranéennes sont confrontées en raison du changement climatique, car elles sont également très vulnérables aux futures #sécheresses, réagit James Pearce-Higgins, directeur scientifique du Trust britannique pour l’ornithologie, qui n’a pas participé à ces travaux. La sécheresse et l’élévation du niveau de la mer peuvent se combiner pour augmenter la salinité dans de nombreuses zones côtières, affectant à la fois la disponibilité en eau douce et le sol. »

    Restaurer des écosystèmes

    Les zones humides, victimes notamment de pollutions chimiques, de l’urbanisation et de l’extension agricole, sont cruciales pour faire face à la fois aux phénomènes de crues et de sécheresses et pour leur rôle d’épuration, et une grande diversité de plantes et d’animaux dépend d’elles pour sa survie. Environ 70 % de ces écosystèmes ont disparu au niveau mondial depuis 1900, et les deux tiers de ces milieux ont également été éliminés en France au cours du siècle écoulé.
    Avec cette étude, les chercheurs espèrent aider les autorités à mettre en place des actions concrètes dans les zones repérées comme les plus à risque. « Cette étude identifie le besoin urgent de stratégies d’adaptation que les défenseurs de l’environnement et les gestionnaires côtiers doivent utiliser pour faire face à cette menace », salue Richard Gregory, spécialiste du suivi de la biodiversité à la Société royale britannique pour la protection des #oiseaux.

    Parmi les moyens à disposition, figurent la construction de digues ou d’autres ouvrages, le fait de permettre aux zones humides de s’étendre à l’intérieur des terres, par exemple en élargissant des aires protégées, ou encore la restauration d’écosystèmes. A l’embouchure de la Moulouya, un fleuve du Maroc, par exemple, des mesures de fixation des dunes grâce à de la végétation ont été mises en place.
    En France, les lagunes telles que les étangs de Thau (Hérault) et de Salses-Leucate (Aude et Pyrénées-Orientales), très proches de la mer, font partie des sites sur lesquels agir en priorité, souligne Fabien Verniest. « Une hausse de 50 centimètres du niveau de la mer pourrait provoquer un bouleversement total de ces écosystèmes, qui seront transformés en milieux marins, insiste le chercheur. Et l’urbanisation risque d’empêcher un déplacement de ces milieux et donc des espèces vers l’intérieur des terres. »

    #Adieu_Méditerranée #climat #réchauffement_climatique

    • L’utilisation de l’herbicide Avanza dans les rizières de Camargue validée par la justice
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2024/06/18/l-utilisation-de-l-herbicide-avanza-dans-les-rizieres-de-camargue-validee-pa

      Dans une décision étayée, rendue plus de six semaines après le dépôt du référé, un délai particulièrement long dans ce type d’affaire, le tribunal de Melun considère que l’autorisation d’utilisation sur cent vingt jours n’a pas un « effet direct et significatif sur l’environnement en l’état de l’évaluation réalisée au niveau européen ». Le tribunal a estimé que les deux associations n’avaient pas apporté la preuve de la dangerosité de ce produit. Il ajoute que les deux parties requérantes « ne font état d’aucun élément de nature à remettre sérieusement en cause les connaissances scientifiques et techniques actuelles ».
      Les riziculteurs du Gard et des Bouches-du-Rhône, qui cultivent la céréale en agriculture conventionnelle, pourront continuer à utiliser ce produit qui n’est pas encore homologué en Europe par l’Autorité européenne de sécurité des aliments. L’Avanza contient des molécules très toxiques pour les milieux aquatiques, selon l’Agence européenne des produits chimiques, qui ne le classe cependant pas au rang des produits cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques. Le ministère de l’agriculture accorde aux riziculteurs français une autorisation de pulvériser l’herbicide entre le 15 mars et le 15 juillet au titre de l’« urgence phytosanitaire ». « C’est un produit qui nous permet de lutter contre les adventices. Sans ce traitement, les récoltes sont plus que compromises, explique Bertrand Mazel, le président du Syndicat des riziculteurs français, très satisfait de la décision. Les juges se sont basés sur des éléments scientifiques et ont mis en avant le fait que la preuve qu’il y avait danger n’a pas été apportée. »

      « Le combat de ne s’arrête pas là »

      Juriste pour l’association France Nature Environnement, Olivier Gourbinot prend acte de la décision. « En effet, le juge rejette notre requête en référé, mais la requête au fond peut encore aboutir, ce n’est que le début, le combat de ne s’arrête pas là. Nous allons continuer à travailler sur l’usage des pesticides et herbicides en Camargue, car ce territoire est un hotspot de la biodiversité avec un caractère exceptionnel qu’il faut préserver plus qu’ailleurs. Il faut voir au-delà de l’Avanza. Le fait que l’on retrouve d’autres molécules, comme le bentazone, dans les eaux de Camargue nous préoccupe fortement. »

      [...]

      En Camargue, le riz est cultivé sur 12 000 hectares par 150 exploitants qui produisent 70 000 tonnes annuelles, dont 25 % en #agriculture_biologique.

  • En #Andalousie, le joyau naturel de #Doñana menacé par la sécheresse et la culture intensive de la #fraise

    Zone naturelle classée, le parc national de Doñana voit disparaître ses lagunes et ses marais. Les centaines de milliers d’oiseaux migrateurs qui ont l’habitude d’y faire halte entre l’Europe du Nord et l’Afrique sont contraints de l’abandonner. En cause, la culture intensive de fruits rouges, gourmande en irrigation, sur fond de changement climatique.
    Juan Pedro Castellano avance à vive allure sur une immense plage vierge, où courent quelques bécasseaux. A bord de son véhicule tout-terrain, le directeur du parc national de Doñana, zone humide exceptionnelle à la pointe sud de l’Espagne, inscrite au Patrimoine mondiale de l’Unesco, sillonne des dunes mobiles et des pinèdes et longe les vastes marais argileux qui forment les 60 000 hectares protégés du parc. Il croise des vaches mostrenca aux longues cornes, des daims et des chevaux sauvages, avant de s’arrêter devant la lagune de Santa Olalla. Ou plutôt ce qu’il en reste. Jaillissant de l’aquifère, elle s’est complètement asséchée cet été. Et une terre grise, craquelée, a remplacé cet écrin de biodiversité d’une valeur incalculable. Cette lagune censée être « permanente » – la plus grande du parc – abrite d’ordinaire des milliers d’oiseaux migrateurs, dont l’arrivée devrait déjà avoir commencé. En cette mi-octobre, sous un soleil éclatant et une température inhabituelle de 33 °C, elle n’est fréquentée que par les cerfs.

    « Les lagunes ne représentent que 300 hectares, tente de se consoler ce géographe, à la tête du parc depuis quatorze ans, tout en s’extasiant devant des plants de bruyère atlantique qui côtoient des espèces subdésertiques de palmiers. Maigre réconfort, alors que les 30 000 hectares de marécages, qui dépendent de l’eau de pluie et qui sont d’ordinaire le point de rencontre des oiseaux migrateurs du nord de l’Europe et d’Afrique subsaharienne, sont eux aussi à sec. « Le changement climatique est une réalité, convient M. Castellano. Il va pleuvoir de moins en moins et nous devons adapter la gestion des ressources naturelles en conséquence. »

    Cela fait treize ans que Doñana n’a pas connu de pluies abondantes. Pis, le parc souffre depuis trois ans d’une sécheresse intense. « C’est la quatrième fois depuis qu’il existe des registres que la lagune d’Olalla s’assèche, après 1983, 1995 et 2022. Mais c’est la première fois qu’elle s’assèche deux étés consécutifs, ce qui induit une grave perte de biodiversité, dit, inquiet, dans son bureau de Séville, Eloy Revilla, le directeur de la station biologique de Doñana, centre de recherche scientifique consacré à la réserve. L’écosystème de Doñana est en mauvais état. Les lagunes temporaires ont disparu, les lagunes permanentes ne le sont plus, et de plus en plus d’espèces sont menacées. Nous sommes en train de perdre un joyau environnemental, que nous avons l’obligation légale de préserver. » Pour le scientifique, cette situation est « le fruit de près de trente ans de failles de l’administration, qui n’a pas su définir un usage rationnel du sol et qui a permis l’extraction sans contrôle de l’aquifère ».
    Des milliers de puits illégaux
    A une trentaine de kilomètres du cœur de Doñana, au volant de sa vieille fourgonnette Citroën C15, l’écologiste Juan Romero peste tout haut en longeant les champs de fraises, fraîchement plantées, qui s’étendent à perte de vue. « Ce champ est arrosé illégalement. Celui-ci aussi… Et regardez comme cet agriculteur inonde sa plantation, alors que, à quelques kilomètres, les lagunes de Doñana sont asséchées », se lamente le porte-parole local de l’association Ecologistas en Accion (« écologistes en action »). Ce professeur à la retraite a consacré une bonne partie de sa vie à la défense de Doñana. Il en connaît tous les recoins. Y compris les centaines de puits illégaux qui pompent, depuis des années, l’aquifère de Doñana, officiellement classé comme « surexploité », pour arroser les fruits rouges consommés dans toute l’Europe. « C’est bien simple : ici, à Lucena del Puerto, presque toutes les exploitations situées au milieu des pins devraient être démantelées… », ajoute M. Romero, en découvrant une canalisation sauvage, qui remplit un bassin destiné à l’irrigation de champs de myrtilles.

    Au bord d’un chemin, un panneau routier a été tagué en noir. « Plus de harcèlement ! », y ont inscrit des agriculteurs en colère. Depuis que la Cour de justice de l’Union européenne a condamné l’Espagne, en juin 2021, pour ne pas avoir protégé suffisamment Doñana, les inspecteurs de la Confédération hydrographique du Guadalquivir, rattachée au ministère de la transition écologique, ont multiplié les contrôles et scellé près d’un millier de puits illégaux autour de l’espace naturel protégé. La justice aussi semble prendre le vol d’eau plus au sérieux. En septembre, cinq frères ont été condamnés à trois ans et demi de prison et 1,9 million d’euros de remboursement pour avoir puisé illégalement 19 millions de mètres cubes d’eau dans l’aquifère de Doñana entre 2008 et 2013. Et fin octobre, un tribunal de Séville a cité à comparaître la Maison d’Albe, riche famille de la noblesse espagnole, après une plainte du parquet environnemental pour un vol d’eau au travers de huit puits illégaux destinés à la culture d’orangers.

    A rebours de cette prise de conscience, le Parti populaire (PP ; droite), au pouvoir dans la communauté autonome d’Andalousie depuis 2019, a présenté au printemps un projet de loi régional pour régulariser plus de 700 hectares de terrains irrigués illégalement dans la « couronne nord » de Doñana. « Une amnistie pour les fraudeurs », ont critiqué les écologistes.

    Ici, l’agriculture de la fraise s’est développée à partir des années 1970 de manière sauvage. Chacun creusait son puits, voyant dans la culture du fruit rouge une manne économique pour une région déprimée. En 2014, le gouvernement andalou se résout à ordonner la situation, et décrète légales toutes les terres mises en irrigation avant 2004 (plus de 9 400 hectares), et illégales les autres (près de 1 000 hectares). C’est pour réparer ce qu’il considère comme une « injustice » que le PP a présenté son projet de loi, peu avant les élections municipales de mai. Sans doute aussi pour grappiller des voix chez les électeurs de la province.

    « Tout le modèle agricole est à revoir »
    L’association d’agriculteurs Puerto de Doñana, qui regroupe de nombreuses exploitations écologiques, s’y oppose, en rappelant que cet été, beaucoup de petits producteurs n’ont déjà pas pu arroser leurs plantations, car leurs puits étaient à sec. « Nous avons renoncé à plus de 70 % de nos exploitations irriguées ces trente dernières années afin de conserver Doñana, misé sur la production bio et donné des garanties à nos acheteurs. Nous ne voulons pas que les efforts de tant d’années tombent à l’eau à cause de l’obsession de croître de quelques-uns », explique son porte-parole, Manuel Delgado.

    Après des mois de controverse, les critiques des organisations écologistes, l’opposition du gouvernement espagnol et les avertissements lancés par l’Union européenne et l’Unesco ont fait reculer le gouvernement andalou, début octobre. Il a annoncé un moratoire sur le projet de loi, le temps de négocier avec Madrid de nouvelles infrastructures et des investissements massifs pour pallier le manque d’eau. Le ministère de la transition écologique, conduit par la socialiste Teresa Ribera, a promis 350 millions d’euros supplémentaires pour préserver le parc, fermer des puits, y compris légaux, construire des logements pour les travailleurs saisonniers qui dorment dans des dizaines de bidonvilles, et diversifier l’économie.
    Cette somme s’ajoute aux 350 millions d’euros d’investissement déjà prévus, notamment pour tripler la capacité de transvasement des fleuves Tinto, Odiel et Piedras, qui ne sont pas, pour le moment, en situation de stress hydrique, afin de remplacer l’irrigation effectuée au moyen d’eaux souterraines par des eaux de surface. Des barrages et des mégabassines doivent aussi être élargis. Collée à Doñana, la station balnéaire de Matalascañas est une autre menace à endiguer. Presque déserte en hiver, elle accueille plus de 160 000 touristes en été, et les puits qui servent à approvisionner la ville en eau et à remplir les piscines privées sont accusés d’avoir provoqué la disparition de plusieurs lagunes temporaires. Ils devraient être déplacés, le temps de construire une canalisation qui acheminera l’eau de la ville de Moguer, plus au nord.

    Mais chez les écologistes, on craint que ces infrastructures ne créent un effet d’appel chez les agriculteurs, alors que plus de 11 % du produit intérieur brut de la province de Huelva dépend déjà du secteur de la fraise, dont la surface agricole a bondi de 30 % en dix ans. « Pour le moment, nous avons dit aux agriculteurs qu’ils ne peuvent plus croître, qu’ils doivent maintenir leur taille actuelle. Mais si les travaux d’infrastructures sont menés à bien, il sera possible de reprendre la croissance… », confirme Alvaro Burgos, délégué du gouvernement andalou chargé de l’agriculture dans la province de Huelva.

    « Ce n’est pas seulement le problème des puits illégaux, c’est tout le modèle agricole qui est à revoir », considère Carlos Davila, responsable de l’association SEO Birdlife, dans le village singulier El Rocio, porte d’entrée de Doñana, où les rues en terre et les édifices en bois évoquent un paysage de Far West. Selon les estimations de l’association, le nombre d’oiseaux migrateurs a déjà chuté de 500 000 à 200 000. Les populations de canards sauvages, de spatules blanches, d’ibis, de foulques à crête, de marmaronettes marbrées, de barges à queue noire ont plongé. Et avec le réchauffement climatique, un autre ennemi met en péril le parc : « Nous n’avons jamais connu une sécheresse si longue, 46 °C enregistrés cet été, la disparition de Santa Olalla deux années de suite…, s’inquiète M. Davila. Même s’il pleuvait à peu près normalement cet hiver, la Doñana que nous avons connue a disparu. »

    https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/10/30/en-andalousie-le-joyau-naturel-de-donana-menace-par-la-secheresse-et-par-la-
    via @colporteur

    #agriculture #sécheresse #parc_national #Espagne #agriculture #culture_intensive #irrigation #eau #zones_humides #fruits_rouges #myrtilles

  • En Andalousie, le joyau naturel de Doñana menacé par la sécheresse et la culture intensive de la fraise

    REPORTAGE Zone naturelle classée, le parc national de Doñana voit disparaître ses lagunes et ses marais. Les centaines de milliers d’oiseaux migrateurs qui ont l’habitude d’y faire halte entre l’Europe du Nord et l’Afrique sont contraints de l’abandonner. En cause, la culture intensive de fruits rouges, gourmande en irrigation, sur fond de changement climatique.

    Juan Pedro Castellano avance à vive allure sur une immense plage vierge, où courent quelques bécasseaux. A bord de son véhicule tout-terrain, le directeur du parc national de Doñana, zone humide exceptionnelle à la pointe sud de l’Espagne, inscrite au Patrimoine mondiale de l’Unesco, sillonne des dunes mobiles et des pinèdes et longe les vastes marais argileux qui forment les 60 000 hectares protégés du parc. Il croise des vaches mostrenca aux longues cornes, des daims et des chevaux sauvages, avant de s’arrêter devant la lagune de Santa Olalla. Ou plutôt ce qu’il en reste. Jaillissant de l’aquifère, elle s’est complètement asséchée cet été. Et une terre grise, craquelée, a remplacé cet écrin de biodiversité d’une valeur incalculable. Cette lagune censée être « permanente » – la plus grande du parc – abrite d’ordinaire des milliers d’oiseaux migrateurs, dont l’arrivée devrait déjà avoir commencé. En cette mi-octobre, sous un soleil éclatant et une température inhabituelle de 33 °C, elle n’est fréquentée que par les cerfs.

    ... « C’est bien simple : ici, à Lucena del Puerto, presque toutes les exploitations situées au milieu des pins devraient être démantelées… »

    Depuis que la Cour de justice de l’Union européenne a condamné l’Espagne, en juin 2021, pour ne pas avoir protégé suffisamment #Doñana, les inspecteurs de la Confédération hydrographique du Guadalquivir, rattachée au ministère de la transition écologique, ont multiplié les contrôles et scellé près d’un millier de #puits_illégaux autour de l’espace naturel protégé. La justice aussi semble prendre le #vol_d’eau plus au sérieux. En septembre, cinq frères ont été condamnés à trois ans et demi de prison et 1,9 million d’euros de remboursement pour avoir puisé illégalement 19 millions de mètres cubes d’eau dans l’aquifère de Doñana entre 2008 et 2013. Et fin octobre, un tribunal de Séville a cité à comparaître la Maison d’Albe, riche famille de la noblesse espagnole, après une plainte du parquet environnemental pour un vol d’eau au travers de huit puits illégaux destinés à la culture d’orangers.

    A rebours de cette prise de conscience, le Parti populaire (PP ; droite), au pouvoir dans la communauté autonome d’Andalousie depuis 2019, a présenté au printemps un projet de loi régional pour régulariser plus de 700 hectares de terrains irrigués illégalement dans la « couronne nord » de Doñana. « Une amnistie pour les fraudeurs », ont critiqué les écologistes.

    ... L’association d’agriculteurs Puerto de Doñana, qui regroupe de nombreuses exploitations écologiques, s’y oppose, en rappelant que cet été, beaucoup de petits producteurs n’ont déjà pas pu arroser leurs plantations, car leurs puits étaient à sec. « Nous avons renoncé à plus de 70 % de nos exploitations irriguées ces trente dernières années afin de conserver Doñana, misé sur la production bio et donné des garanties à nos acheteurs. Nous ne voulons pas que les efforts de tant d’années tombent à l’eau à cause de l’obsession de croître de quelques-uns », explique son porte-parole, Manuel Delgado.


    Les installations et serres de culture de fruits rouges, aux alentours du parc national de Donaña (Espagne), le 10 octobre 2023. CESAR DEZFULI POUR « LE MONDE »

    https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/10/30/en-andalousie-le-joyau-naturel-de-donana-menace-par-la-secheresse-et-par-la-
    https://archive.ph/1oTdH

    #eau #sécheresse #biodiversité #lagunes #marais #zones_humides #agriculture #tourisme #agriculture_écologique #modèle_agricole #irrigation #écologie

  • Les mégabassines : tout comprendre en une #carte

    Une carte du bassin de la #Sèvre niortaise, avec des #bassines_artificielles et des #zones_humides, pour comprendre ce qui se passe dans cette région du #marais poitevin.

    Aujourd’hui, dans la région et plus précisément à #Sainte-Soline, on attend une grande #manifestation « anti-bassines ». Cette #mobilisation doit rassembler les opposants à ce programme de stockage de l’eau pour l’#agriculture, mais elle a été interdite par la préfecture des Deux-Sèvres, en raison de la violence des affrontements avec les forces de l’ordre lors des précédents rassemblements. Les organisateurs promettent en revanche une mobilisation historique à laquelle sont censées participer des délégations étrangères, européennes mais aussi venues d’outre-Atlantique.

    Delphine Papin, cartographe au journal Le Monde explique comment a été pensée cette carte du bassin de la Sèvre niortaise, qui coule entre les départements de la #Vendée, des #Deux-Sèvres et de la #Charente-Maritime.

    « En bleu, on a tracé les principaux cours d’eau comme la Sèvres niortaise, la Vendée ou le #Mignon. On a aussi tracé les zones humides très étendues dans cette région, puisque nous sommes ici entre terre et mer, dans la région du marais poitevin, qui est la deuxième plus grande #zone_humide de France, après la Camargue. C’est une zone qui concentre une #biodiversité très riche, mais à l’équilibre écologique fragile et qui a subi dans le temps une forte pression humaine avec entre autres la conversion de certaines prairies en zone de #cultures_céréalières.

    En 2014, cette région a retrouvé son statut de #parc_naturel_régional - qu’elle avait perdu en 1996 en raison de ces transformations - : nous avons représenté avec un liseré vert ce périmètre à l’intérieur duquel l’environnement doit être en principe préservé. En jaune justement, on voit les #zones_agricoles, qui sont prépondérantes dans cette région rurale, ponctuée de zone urbains comme #Niort : on y pratique la #polyculture et l’#élevage, mais surtout la #céréaliculture, avec des grandes étendues irriguées très gourmandes en eau. »

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-cartes-en-mouvement/les-megabassines-tout-comprendre-en-une-carte-6229163

    #cartographie #visualisation #méga-bassines #mégabassines #eau #agriculture #résistance #irrigation

  • FILM : Sivens, un c as d’école

    Le film « Gestion de l’eau – Sivens : un cas d’école » recueille des témoignages d’acteurs du projet deterritoire du bassin versant du Tescou (PTGE Tescou), du directeur de FNE Midi-Pyrénées et d’une agricultrice de la vallée. Co-financé par Attac Tarn, le Collectif Testet et Nature & Progrès Tarn, ce film a été réalisé par FNE Midi-Pyrénées.

    Articulé autour de 5 chapitres, le film :

    • apporte le point de vue de plusieurs acteurs locaux sur le PTGE du bassin versant du Tescou lancé en mars 2017,
    • rappelle l’importance des zones humides pour la biodiversité,
    • montre l’intérêt de stocker l’eau dans le sol grâce à l’agroécologie,
    • explique le cycle de l’eau sur le bassin,
    • et propose des idées de projets pour un territoire vivant.

    http://www.eauxglacees.com/FILM-Sivens-un-c-as-d-ecole

  • Les projets de méga-bassines, accusées d’assécher les rivières, alimentent la guerre de l’eau dans les campagnes - Basta !
    https://basta.media/mega-bassines-marais-poitevin-irrigation-riviere-assechee-agriculture-inten

    Un chantier de seize #réservoirs d’eau géants destinés à l’#agriculture a débuté fin septembre près du #marais_poitevin. Symboles de l’agro-industrie, asséchant les sols, ces #méga-bassines déclenchent une forte contestation.

    #fnsea

  • Tous chasseurs cueilleurs !
    https://www.franceinter.fr/emissions/comme-un-bruit-qui-court/comme-un-bruit-qui-court-08-juin-2019

    Quand la civilisation menace l’#environnement... retour à la chasse et la cueillette. Entretien avec James C. Scott autour de son livre "#HomoDomesticus, une histoire profonde des premiers Etats".

    On a tous en tête des souvenirs d’école sur les débuts de l’Histoire avec un grand H. Quelque part entre le Tigre et l’Euphrate il y a 10 000 ans, des chasseurs-cueilleurs se sont peu à peu sédentarisés en domestiquant les plantes et les animaux, inventant dans la foulée l’#agriculture, l’écriture et les premiers Etats. C’était l’aube de la #civilisation et le début de la marche forcée vers le #progrès.

    Cette histoire, #JamesScott, anthropologue anarchiste et professeur de sciences politiques, l’a enseignée pendant des années à ses élèves de l’Université de Yale. Mais les découvertes archéologiques dans l’actuel Irak des dernières années l’ont amené à réviser complètement ce « storytelling » du commencement des sociétés humaines, et par là même remettre en question notre rapport au monde dans son dernier livre : Homo Domesticus, une histoire profonde des premiers Etats (Ed. La Découverte).

    Alors même que climat et biodiversité sont aujourd’hui plus que jamais menacés par les activités humaines, James C. Scott propose de réévaluer l’intérêt des sociétés d’avant l’Etat et l’agriculture. Car ces chasseurs-cueilleurs semi-nomades ont longtemps résisté face aux civilisations agraires, basées sur les céréales et qui, en domestiquant le monde, se sont domestiqués eux-mêmes, en appauvrissant leur connaissance du monde.

    Un reportage de Giv Anquetil.
    Les liens

    James C. Scott : « Le monde des chasseurs-cueilleurs était un monde enchanté » (Le grand entretien) par Jean-Christophe Cavallin, Diakritik

    Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce, Réflexions sur l’effondrement, Corinne Morel Darleux, Editions Libertalia

    "Amador Rojas invite Karime Amaya" Chapiteau du Cirque Romanès - Paris 16, Paris. Prochaine séance le vendredi 14 juin à 20h.

    Homo Domesticus, une histoire profonde des premiers Etats, James C. Scott (Editions La Découverte)

    Eloge des chasseurs-cueilleurs, revue Books (mai 2019).

    HOMO DOMESTICUS - JAMES C. SCOTT Une Histoire profonde des premiers États [Fiche de lecture], Lundi matin

    Bibliographie de l’association Deep Green Resistance
    Programmation musicale

    "Mesopotamia"- B52’s

    "Cholera" - El Rego et ses commandos

    #podcast @cdb_77

    • Homo Domesticus. Une histoire profonde des premiers États

      Aucun ouvrage n’avait jusqu’à présent réussi à restituer toute la profondeur et l’extension universelle des dynamiques indissociablement écologiques et anthropologiques qui se sont déployées au cours des dix millénaires ayant précédé notre ère, de l’émergence de l’agriculture à la formation des premiers centres urbains, puis des premiers États.
      C’est ce tour de force que réalise avec un brio extraordinaire #Homo_domesticus. Servi par une érudition étourdissante, une plume agile et un sens aigu de la formule, ce livre démonte implacablement le grand récit de la naissance de l’#État antique comme étape cruciale de la « #civilisation » humaine.
      Ce faisant, il nous offre une véritable #écologie_politique des formes primitives d’#aménagement_du_territoire, de l’« #autodomestication » paradoxale de l’animal humain, des dynamiques démographiques et épidémiologiques de la #sédentarisation et des logiques de la #servitude et de la #guerre dans le monde antique.
      Cette fresque omnivore et iconoclaste révolutionne nos connaissances sur l’évolution de l’humanité et sur ce que Rousseau appelait « l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes ».


      https://www.editionsladecouverte.fr/homo_domesticus-9782707199232

      #James_Scott #livre #démographie #épidémiologie #évolution #humanité #histoire #inégalité #inégalités #Etat #écologie #anthropologie #ressources_pédagogiques #auto-domestication

    • Fiche de lecture: Homo Domesticus - James C. Scott

      Un fidèle lecteur de lundimatin nous a transmis cette fiche de lecture du dernier ouvrage de James C. Scott, (on peut la retrouver sur le blog de la bibliothèque fahrenheit) qui peut s’avérer utile au moment l’institution étatique semble si forte et fragile à la fois.
      « L’État est à l’origine un racket de protection mis en œuvre par une bande de voleurs qui l’a emporté sur les autres »
      À la recherche de l’origine des États antiques, James C. Scott, professeur de science politique et d’anthropologie, bouleverse les grands #récits_civilisationnels. Contrairement à bien des idées reçues, la #domestication des plantes et des animaux n’a pas entraîné la fin du #nomadisme ni engendré l’#agriculture_sédentaire. Et jusqu’il y a environ quatre siècles un tiers du globe était occupé par des #chasseurs-cueilleurs tandis que la majorité de la population mondiale vivait « hors d’atteinte des entités étatiques et de leur appareil fiscal ».
      Dans la continuité de #Pierre_Clastres et de #David_Graeber, James C. Scott contribue à mettre à mal les récits civilisationnels dominants. Avec cette étude, il démontre que l’apparition de l’État est une anomalie et une contrainte, présentant plus d’inconvénients que d’avantages, raison pour laquelle ses sujets le fuyait. Comprendre la véritable origine de l’État c’est découvrir qu’une toute autre voie était possible et sans doute encore aujourd’hui.

      La première domestication, celle du #feu, est responsable de la première #concentration_de_population. La construction de niche de #biodiversité par le biais d’une #horticulture assistée par le feu a permis de relocaliser la faune et la flore désirable à l’intérieur d’un cercle restreint autour des #campements. La #cuisson des aliments a externalisé une partie du processus de #digestion. Entre 8000 et 6000 avant notre ère, Homo sapiens a commencé à planter toute la gamme des #céréales et des #légumineuses, à domestiquer des #chèvres, des #moutons, des #porcs, des #bovins, c’est-à-dire bien avant l’émergence de sociétés étatiques de type agraire. Les premiers grands établissements sédentaires sont apparus en #zones_humides et non en milieu aride comme l’affirment les récits traditionnels, dans des plaines alluviales à la lisière de plusieurs écosystèmes (#Mésopotamie, #vallée_du_Nil, #fleuve_Indus, #baie_de_Hangzhou, #lac_Titicata, site de #Teotihuacan) reposant sur des modes de subsistance hautement diversifiés (sauvages, semi-apprivoisés et entièrement domestiqués) défiant toute forme de comptabilité centralisée. Des sous-groupes pouvaient se consacrer plus spécifiquement à une stratégie au sein d’un économie unifiée et des variations climatiques entraînaient mobilité et adaptation « technologique ». La #sécurité_alimentaire était donc incompatible avec une #spécialisation étroite sur une seule forme de #culture ou d’#élevage, requérant qui plus est un travail intensif. L’#agriculture_de_décrue fut la première à apparaître, n’impliquant que peu d’efforts humains.
      Les #plantes complètement domestiquées sont des « anomalies hyperspécialisées » puisque le cultivateur doit contre-sélectionner les traits sélectionnés à l’état sauvage (petite taille des graines, nombreux appendices, etc). De même les #animaux_domestiqués échappent à de nombreuses pressions sélectives (prédation, rivalité alimentaire ou sexuelle) tout en étant soumis à de nouvelles contraintes, par exemple leur moins grande réactivité aux stimuli externes va entraîner une évolution comportementale et provoquer la #sélection des plus dociles. On peut dire que l’espèce humaine elle-même a été domestiquée, enchaînée à un ensemble de routines. Les chasseurs-cueilleurs maîtrisaient une immense variété de techniques, basées sur une connaissance encyclopédique conservée dans la mémoire collective et transmise par #tradition_orale. « Une fois qu’#Homo_sapiens a franchi le Rubicon de l’agriculture, notre espèce s’est retrouvée prisonnière d’une austère discipline monacale rythmée essentiellement par le tic-tac contraignant de l’horloge génétique d’une poignée d’espèces cultivées. » James C. Scott considère la #révolution_néolithique récente comme « un cas de #déqualification massive », suscitant un #appauvrissement du #régime_alimentaire, une contraction de l’espace vital.
      Les humains se sont abstenus le plus longtemps possible de faire de l’agriculture et de l’élevage les pratiques de subsistance dominantes en raison des efforts qu’elles exigeaient. Ils ont peut-être été contraints d’essayer d’extraire plus de #ressources de leur environnement, au prix d’efforts plus intenses, à cause d’une pénurie de #gros_gibier.
      La population mondiale en 10 000 avant notre ère était sans doute de quatre millions de personnes. En 5 000, elle avait augmenté de cinq millions. Au cours des cinq mille ans qui suivront, elle sera multipliée par vingt pour atteindre cent millions. La stagnation démographique du #néolithique, contrastant avec le progrès apparent des #techniques_de_subsistance, permet de supposer que cette période fut la plus meurtrière de l’histoire de l’humanité sur le plan épidémiologique. La sédentarisation créa des conditions de #concentration_démographique agissant comme de véritables « parcs d’engraissement » d’#agents_pathogènes affectant aussi bien les animaux, les plantes que les humains. Nombre de #maladies_infectieuses constituent un « #effet_civilisationnel » et un premier franchissement massif de la barrière des espèces par un groupe pathogènes.
      Le #régime_alimentaire_céréalier, déficient en #acides_gras essentiels, inhibe l’assimilation du #fer et affecte en premier lieu les #femmes. Malgré une #santé fragile, une #mortalité infantile et maternelle élevée par rapport aux chasseurs-cueilleurs, les agriculteurs sédentaires connaissaient des #taux_de_reproduction sans précédent, du fait de la combinaison d’une activité physique intense avec un régime riche en #glucides, provoquant une #puberté plus précoce, une #ovulation plus régulière et une #ménopause plus tardive.

      Les populations sédentaires cultivant des #céréales domestiquées, pratiquant le commerce par voie fluviale ou maritime, organisées en « #complexe_proto-urbain », étaient en place au néolithique, deux millénaires avant l’apparition des premiers États. Cette « plateforme » pouvait alors être « capturée », « parasitée » pour constituer une solide base de #pouvoir et de #privilèges politiques. Un #impôt sur les céréales, sans doute pas inférieur au cinquième de la récolte, fournissait une rente aux élites. « L’État archaïque était comme les aléas climatiques : une menace supplémentaire plus qu’un bienfaiteur. » Seules les céréales peuvent servir de base à l’impôt, de part leur visibilité, leur divisibilité, leur « évaluabilité », leur « stockabilité », leur transportabilité et leur « rationabilité ». Au détour d’un note James C. Scott réfute l’hypothèse selon laquelle des élites bienveillantes ont créé l’État essentiellement pour défendre les #stocks_de_céréales et affirme au contraire que « l’État est à l’origine un racket de protection mis en œuvre par une bande de voleurs qui l’a emporté sur les autres ». La majeure partie du monde et de sa population a longtemps existé en dehors du périmètre des premiers États céréaliers qui n’occupaient que des niches écologiques étroites favorisant l’#agriculture_intensive, les #plaines_alluviales. Les populations non-céréalières n’étaient pas isolées et autarciques mais s’adonnaient à l’#échange et au #commerce entre elles.
      Nombre de #villes de #Basse_Mésopotamie du milieu du troisième millénaire avant notre ère, étaient entourées de murailles, indicateurs infaillibles de la présence d’une agriculture sédentaire et de stocks d’aliments. De même que les grandes #murailles en Chine, ces #murs d’enceinte étaient érigés autant dans un but défensif que dans le but de confiner les paysans contribuables et de les empêcher de se soustraire.
      L’apparition des premiers systèmes scripturaux coïncide avec l’émergence des premiers États. Comme l’expliquait #Proudhon, « être gouverné, c’est être, à chaque opération, à chaque transaction, à chaque mouvement, noté, enregistré, recensé, tarifé, timbré, toisé, coté, cotisé, patenté, licencié, autorisé, apostillé, admonesté, empêché, réformé, redressé, corrigé ». L’#administration_étatique s’occupait de l’#inventaire des ressources disponibles, de #statistiques et de l’#uniformisation des #monnaies et des #unités_de_poids, de distance et de volume. En Mésopotamie l’#écriture a été utilisée à des fins de #comptabilité pendant cinq siècle avant de commencer à refléter les gloires civilisationnelles. Ces efforts de façonnage radical de la société ont entraîné la perte des États les plus ambitieux : la Troisième Dynastie d’#Ur (vers 2100 avant J.-C.) ne dura qu’à peine un siècle et la fameuse dynastie #Qin (221-206 avant J.-C.) seulement quinze ans. Les populations de la périphérie auraient rejeté l’usage de l’écriture, associée à l’État et à l’#impôt.

      La #paysannerie ne produisait pas automatiquement un excédent susceptible d’être approprié par les élites non productrices et devait être contrainte par le biais de #travail_forcé (#corvées, réquisitions de céréales, #servitude pour dettes, #servage, #asservissement_collectif ou paiement d’un tribu, #esclavage). L’État devait respecter un équilibre entre maximisation de l’excédent et risque de provoquer un exode massif. Les premiers codes juridiques témoignent des efforts en vue de décourager et punir l’#immigration même si l’État archaïque n’avait pas les moyens d’empêcher un certain degré de déperdition démographique. Comme pour la sédentarité et la domestication des céréales, il n’a cependant fait que développer et consolider l’esclavage, pratiqué antérieurement par les peuples sans État. Égypte, Mésopotamie, Grèce, Sparte, Rome impériale, Chine, « sans esclavage, pas d’État. » L’asservissement des #prisonniers_de_guerre constituait un prélèvement sauvage de main d’œuvre immédiatement productive et compétente. Disposer d’un #prolétariat corvéable épargnait aux sujets les travaux les plus dégradants et prévenait les tensions insurrectionnelles tout en satisfaisant les ambitions militaires et monumentales.

      La disparition périodique de la plupart de ces entités politiques était « surdéterminée » en raison de leur dépendance à une seule récolte annuelle d’une ou deux céréales de base, de la concentration démographique qui rendait la population et le bétail vulnérables aux maladies infectieuses. La vaste expansion de la sphère commerciale eut pour effet d’étendre le domaine des maladies transmissibles. L’appétit dévorant de #bois des États archaïques pour le #chauffage, la cuisson et la #construction, est responsable de la #déforestation et de la #salinisation_des_sols. Des #conflits incessants et la rivalité autour du contrôle de la #main-d’œuvre locale ont également contribué à la fragilité des premiers États. Ce que l’histoire interprète comme un « effondrement » pouvait aussi être provoqué par une fuite des sujets de la région centrale et vécu comme une #émancipation. James C. Scott conteste le #préjugé selon lequel « la concentration de la population au cœur des centres étatiques constituerait une grande conquête de la civilisation, tandis que la décentralisation à travers des unités politiques de taille inférieure traduirait une rupture ou un échec de l’ordre politique ». De même, les « âges sombres » qui suivaient, peuvent être interprétés comme des moments de résistance, de retours à des #économies_mixtes, plus à même de composer avec son environnement, préservé des effets négatifs de la concentration et des fardeaux imposés par l’État.

      Jusqu’en 1600 de notre ère, en dehors de quelques centres étatiques, la population mondiale occupait en majorité des territoires non gouvernés, constituant soit des « #barbares », c’est-à-dire des « populations pastorales hostiles qui constituaient une menace militaire » pour l’État, soit des « #sauvages », impropres à servir de matière première à la #civilisation. La menace des barbares limitait la croissance des États et ceux-ci constituaient des cibles de pillages et de prélèvement de tribut. James C. Scott considère la période qui s’étend entre l’émergence initiale de l’État jusqu’à sa conquête de l’hégémonie sur les peuples sans État, comme une sorte d’ « âge d’or des barbares ». Les notions de #tribu ou de peuple sont des « #fictions_administratives » inventées en tant qu’instrument de #domination, pour désigner des #réfugiés politiques ou économiques ayant fuit vers la périphérie. « Avec le recul, on peut percevoir les relations entre les barbares et l’État comme une compétition pour le droit de s’approprier l’excédent du module sédentaire « céréales/main-d’œuvre ». » Si les chasseurs-cueilleurs itinérants grappillaient quelques miettes de la richesse étatique, de grandes confédérations politiques, notamment les peuples équestres, véritables « proto-États » ou « Empires fantômes » comme l’État itinérant de #Gengis_Kahn ou l’#Empire_Comanche, constituaient des concurrents redoutables. Les milices barbares, en reconstituant les réserves de main d’œuvre de l’État et en mettant leur savoir faire militaire au service de sa protection et de son expansion, ont creusé leur propre tombe.

      Dans la continuité de Pierre Clastres et de David Graeber, James C. Scott contribue à mettre à mal les récits civilisationnels dominants. Avec cette étude, il démontre que l’apparition de l’État est une #anomalie et une #contrainte, présentant plus d’inconvénients que d’avantages, raison pour laquelle ses sujets le fuyait. Comprendre la véritable origine de l’État c’est découvrir qu’une toute autre voie était possible et sans doute encore aujourd’hui.

      https://lundi.am/HOMO-DOMESTICUS-Une-Histoire-profonde-des-premiers-Etats
      #historicisation

    • https://www.annualreviews.org/content/journals/10.1146/annurev-polisci-032823-090908

      The
      @AnnualReviews
      has kindly just released what could be considered James Scott’s last brief autobiographical notes.👇

      Thanks
      @margaretlevi
      for making this happen. I took the liberty of adding Scott’s picture.
      free download:
      https://www.annualreviews.org/docserver/fulltext/10.1146/annurev-polisci-032823-090908/annurev-polisci-032823-090908.pdf?expires=1721637508&id=id&accname=gu

  • Communiqué important du collectif #StopCarnet contre la multiplication des violences à leur encontre ces derniers temps.

    Agressions, blanc-seing aux initiatives miliciennes, expulsions, gardes à vues, pressions, mensonges, chantages aux politiques,... tout est fait pour éradiquer la résistance à l’absurde projet de zone « éco » technologique qui engloutirait 110ha de zone naturelle dont 51 ha de zones humides en bordure de Loire🌱
    Violence écologique, violence médiatique, violence psychologique et physique, violence politique, violence de la répression, violence de l’opinion publique, violence économique et violence envers tout type d’alternatives et d’imaginaires : Stop Carnet dénonce les violences subies depuis le début de la mobilisation contre le projet de zone industrielle au Carnet
    | Collectif Stop Carnet : Stoppons le carnage au Carnet !
    https://stopcarnet.fr/2021/02/03/stop-carnet-denonce-les-violences-subies-depuis-le-debut-de-la-mobilisati

    #zones_humides #zad #ecologie

    • Petit soulagement éphémère : on me dit que tout le monde est sorti de GAV 💚
      Plus que jamais les zones à défendre comme tous les lieux de résistance, la zad du #Carnet en particulier, sont en danger, à la merci de l’appétit vorace de ceux qui en veulent toujours plus... Courage ✊

  • Déclin des #insectes : l’urgence d’agir | CNRS Le journal
    https://lejournal.cnrs.fr/articles/declin-des-insectes-lurgence-dagir

    Dans un avis publié le 26 janvier, l’#Académie_des_sciences sonne l’alarme au sujet du déclin des insectes. Explications avec Philippe Grandcolas, directeur de l’Institut de systématique, évolution, biodiversité et co-auteur du rapport scientifique sur lequel s’appuie cet appel.

    […] Cet #effondrement est un phénomène complexe, quatre facteurs principaux y contribuent : la destruction de #milieux_naturels, la #pollution, les effets de la #crise_climatique et l’introduction des #espèces_exotiques, elle-même facilitée par la #mondialisation des échanges. En ce qui concerne la conversion des milieux terrestres, autrement dit la disparition des #forêts naturelles, des #zones_humides et des #prairies, rappelons que plus de 40 millions d’hectares de forêts ont disparu depuis vingt ans dans le monde, soit plus que la superficie de l’Allemagne ! Et les plantations d’arbres — qui se limitent souvent à une seule espèce voire à un seul clone, avec un sous-bois ou des sols très simplifiés — ne suffisent pas à restaurer toute la richesse des #écosystèmes forestiers qui disparaissent.

    La diversité des #habitats dans un #paysage doit en outre être préservée. Quant à l’usage massif et irraisonné de #pesticides, il est la deuxième cause majeure de l’effondrement des populations d’insectes à proximité des zones agricoles. La dérogation récemment accordée par le gouvernement français aux producteurs de betteraves pour l’usage de néonicotinoïdes est à cet égard fort regrettable.

    Il faut aussi noter que l’intensité de ces facteurs n’est pas la même selon les régions. Par exemple, la déforestation massive touche davantage la forêt amazonienne que les forêts européennes ; tandis que les grands incendies liés à la crise climatique, comme ceux qui ont récemment frappé l’Australie, affectent des zones géographiques bien particulières.

  • Mieux « territorialiser » la #gestion des #zones_humides pour enrayer leur déclin | Banque des Territoires
    https://www.banquedesterritoires.fr/mieux-territorialiser-la-gestion-des-zones-humides-pour-enrayer

    À l’occasion ce 2 février de la Journée mondiale des zones humides, deux parlementaires présentent un rapport « tourné vers l’action » qui fourmille de propositions pour améliorer la connaissance de ces zones et mieux « territorialiser » leur gestion. Il a nécessité trois mois d’investigations et de visites de terrain. Des dizaines d’élus locaux ont été rencontrés. L’éclairage alimente les Assises de l’eau dont un prochain comité est prévu le 12 février.

    #cartographie #ign #ramsar #tourbières #mangroves

  • Assèchement du Doubs : « Dans 20 ans, l’eau vaudra plus cher que le pétrole » Coralie Claude/jzim - 31 Juillet 2018 - RTS
    http://www.rts.ch/info/monde/9746942-assechement-du-doubs-dans-20-ans-l-eau-vaudra-plus-cher-que-le-petrole-.

    Une réunion d’urgence est prévue mardi pour évoquer l’assèchement du Doubs entre Pontarlier et Morteau, en France voisine. Du jamais vu depuis plus de 40 ans, selon un garde-pêche de la fédération départementale.

    « Je crois que l’on avait pas vu cela depuis l’été 1976 », explique mardi dans La Matinale de la RTS Alexandre Cheval, chargé de développement à la Fédération de pêche et de protection des milieux aquatiques du Doubs. « Côté suisse, il n’y a pas l’air d’avoir le même problème, mais on sait que les niveaux d’eau sont relativement bas. »


    « Tous les pays européens peuvent être concernés par cette situation », ajoute Alexandre Cheval. « Chez nous, c’est particulier, l’eau s’en va aussi en raison de failles. On voit également les effets du réchauffement climatique dans la mesure où les précipitations annuelles ne sont plus du tout les mêmes aujourd’hui qu’il y a 20 ou 30 ans (...) Mais il faut aussi voir les actions entre pics sur ces secteurs, avec l’agriculture, l’urbanisation, l’étanchéification des sols. On a passé notre temps ces 60 dernières années à détruire tout ce qui était zone humide », regrette-t-il, évoquant ces zones tampons qui normalement restituent de l’eau dans les cours.

    Toucher au portefeuille des consommateurs
    « Souvent, nos politiques ou nous-mêmes avons tendance à nous décharger en disant que c’est la faute au réchauffement climatique, mais nous sommes aussi responsables, et pas seulement les entreprises », poursuit Alexandre Cheval, qui évoque pour solution celle de toucher au portefeuille des consommateurs pour qu’ils consomment moins.

    L’appellation « or bleu » prend ainsi toute sa signification quand on constate sa raréfaction dans des cas comme celui-ci, conclut l’expert : « Tant que l’eau sort du robinet, la plupart des gens ne se posent pas de questions. Mais nous, en tant que professionnels, on s’aperçoit que les 10, 15 ou 20 prochaines années, l’eau vaudra plus cher que le pétrole. »

    #Eau #Doubs #Pontarlier #Morteau #urgence #agriculture #urbanisation #destruction des #zones_humides #France #Suisse

  • Restauration réhabilitation zones humides enjeux, contextes évaluations | Sciences Eaux & Territoires, la revue d’Irstea
    http://www.set-revue.fr/restauration-et-rehabilitation-des-zones-humides-enjeux-contextes-et-evalu

    Les moyens parfois importants qui sont consacrés à la #restauration ou à la #réhabilitation des #zones_humides sont à la mesure des enjeux liés à leur conservation tant en termes de #biodiversité que de #préservation de la ressource en #eau et d’atténuation du #changement_climatique. Néanmoins, une meilleure compréhension du fonctionnement des zones humides et des implications en termes de services #écosystémiques est indispensable à l’amélioration des mesures de conservation et de réhabilitation, mais aussi à leur appropriation par les acteurs locaux et à la prise de conscience des enjeux de leur conservation. Ceci passe par le croisement des connaissances tant scientifiques que techniques et surtout par leur diffusion. Ce numéro spécial consacré à la réhabilitation des zones humides, à l’image du colloque « Réparer la Nature ? l’exemple des milieux humides », contribue à cet objectif en illustrant la complexité de ces milieux et la diversité des approches scientifiques et techniques qui leur sont appliqués.

  • #Climat : les grands pays annoncent leurs engagements de réduction des émissions
    http://www.reporterre.net/Climat-les-grands-pays-annoncent

    La Suisse s’est engagée dès le 27 février à réduire ses émissions de 50 % d’ici 2030 par rapport à 1990. L’Union européenne lui a emboîté le pas le 6 mars, avec un objectif de réduction de 40 % au moins d’ici 2030, par rapport à 1990. Elle a été rejointe le 27 mars par la Norvège, qui se fixe la même cible. Premier pays en développement à se dévoiler, le Mexique a rendu publique sa contribution dès le 30 mars : il prévoit un pic d’émissions en 2026 et une réduction de 25 % en 2030 par rapport à 2013 de ses #gaz_à_effet_de_serre et de ses polluants à courte durée de vie.

    Les États-Unis et la Russie, deux gros émetteurs de GES, ont remis leurs contributions in extremis le 31 mars. Les premiers se bornent à promettre une réduction de leurs émissions de 26 à 28 % d’ici 2025 par rapport à 2005, conformément à l’accord sino-américain de novembre 2014 ; la seconde se limite à un objectif modeste de 25 à 30% de réduction de ses émissions en 2030 par rapport à 1990. A la surprise générale, le Gabon a lui aussi révélé sa contribution le 1er avril, avec un objectif de 50 % de réduction pour 2025.

    Outre leur manque de précisions sur les politiques envisagées pour atteindre les objectifs, elles restent imprécises sur un point important : la prise en compte, ou non, des #forêts dans le calcul des #émissions. Les forêts sont des puits de carbone, au même titre que les #prairies et les #zones_humides, c’est-à-dire qu’elles sont capables d’absorber une partie du #CO2 présent dans l’atmosphère. Si les États intègrent cette capacité d’absorption dans leurs objectifs, ils raisonnent en réduction d’émissions nettes, ce qui est moins ambitieux que des réductions brutes.

    Ainsi, la Russie « compte sur l’ensemble des forêts présentes sur son territoire [elle abrite 70 % des forêts boréales et 25 % des ressources forestières mondiales, NDLR] pour atteindre ses objectifs sans faire d’efforts supplémentaires », critique Céline Ramstein, chargée de projet #COP21 à l’Iddri. En revanche, le Gabon joue le jeu, en s’interdisant de comptabiliser le carbone absorbé par la forêt, qui couvre pourtant la majeure partie de son territoire. Pour les autres, « c’est le grand flou, avec une multiplicité de règles. Chaque pays a fait ce qu’il voulait », observe Célia Gautier.

    #cartographie
    http://www.globalcarbonatlas.org/?q=en/emissions

  • « La première cause de destruction des #zones_humides, c’est l’intensification agricole »
    http://www.lemonde.fr/biodiversite/article/2015/02/03/la-premiere-cause-de-destruction-des-zones-humides-c-est-l-intensification-a

    Quelles sont les principales menaces qui pèsent sur les zones humides ? Est-ce l’urbanisation, la croissance de la population ?

    Ce n’est pas le cas en France. L’idée de favoriser la biodiversité en ville progresse. Il faut dire qu’on partait de très bas. La tendance actuelle est plutôt de remettre de l’eau quand c’est possible, en mettant au jour des rivières enterrées comme la Bièvre au sud de Paris par exemple. On aménage aussi les quais en fonction des besoins de nidification des oiseaux… En Seine-Saint-Denis, il y a des parcs urbains stupéfiants où l’on peut voir une dizaine d’orchidées différentes, du foin et des moutons, des hérons et des bécassines, en pleine banlieue nord ! Le parc Georges-Valbon à la Courneuve, par exemple, est extraordinaire.

    En réalité, la première cause de destruction de zones humides, c’est clairement l’#intensification_agricole. C’est une histoire vieille de dix-mille ans : quand les chasseurs-cueilleurs ont commencé à conserver et à planter des graines, ils sont en quelque sorte sortis de la complexité de la nature pour aller vers plus de simplicité. Tel est le principe, réduire la complexité en détruisant tout ce qui gêne : les insectes – quitte à supprimer les pollinisateurs avec les ravageurs de récoltes –, les mauvaises herbes, les oiseaux, les haies, les fossés… L’agriculture intensive assèche puis installe des pompes pour irriguer. C’est ainsi que la moitié des zones humides de l’ouest du pays ont disparu, notamment dans la région du Marais poitevin.

    #écologie #agriculture_industrielle #agriculture

  • Deux liens vers le même site : la restauration du climat corollaire de la restauration du cycle de l’eau :

    Comment la forêt peut faire revenir l’eau et restaurer le climat - Les blogs d’Attac
    http://blogs.attac.org/paix-et-mutations/article/comment-la-foret-peut-faire

    La solution couramment avancée est la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Pourtant, la solution apportée dans la vallée du rio Doce, au Brésil, à plusieurs des phénomènes évoqués plus haut a montré qu’ils avaient d’autres causes, humaines elles aussi.

    La déforestation intervient de manière majeure : elle est à la fois cause d’érosion des sols – avec la perte du couvert végétal – de réchauffement de la température (un arbre est un climatiseur naturel, par l’évapotranspiration des feuilles, il fait plus frais en forêt l’été) et de modification du cycle de l’eau (allant jusqu’à la disparition de sources, les racines des arbres favorisant l’infiltration de l’eau de pluie).

    http://blogs.attac.org/paix-et-mutations/article/restaurer-le-climat

    L’infiltration de l’eau de pluie dans le sol est indispensable pour assurer le bon déroulement du petit cycle de l’eau, qui voit l’eau de pluie s’infiltrer dans le sol, puis alimenter les nappes phréatiques et permettre la vie et la croissance de la végétation, et enfin s’évaporer pour reformer des nuages qui donneront de la pluie.

    #climat #eau #zones_humides

  • Mobilisation des opposants du Center Parcs de Roybon
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/11/30/mobilisation-des-opposants-du-center-parcs-de-roybon_4531653_3244.html

    Depuis quatre ans, les promoteurs du projet et leurs opposants se livrent une bataille judiciaire sans relâche. Le 3 octobre, le préfet de l’Isère avait pris un arrêté validant le projet, après un avis consultatif favorable du Conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires. L’enquête publique avait en revanche rendu cet été un avis défavorable, pointant l’impact néfaste du futur complexe touristique sur l’environnement. Qualifiant le projet de « rédhibitoire », elle a notamment pointé l’absence de débat public et un impact sur les zones humides évalué « a minima » entre 110 et 120 hectares. « Dix fois Sivens ! », crient les opposants.

    #ZAD #zones_humides

    voir aussi http://seenthis.net/messages/316162

  • Les #zones_humides, formidables éponges à inondations - Terra eco
    http://www.terraeco.net/Les-zones-humides-formidables,57130.html

    A l’autre bout de la France, dans le département du Nord, se joue le scénario inverse. Depuis dix ans, les communes de Hazebrouck, de Borre et de Vieux-Berquin rachètent des parcelles à une vingtaine d’agriculteurs, maïsiculteurs pour la plupart, dans l’optique de reconstituer des zones humides. Sur les berges entourant la rivière de la Bourre, un sous-affluent de l’Escaut, 50 hectares ont ainsi retrouvé leur état naturel. Ce parti pris, à contre-courant de l’#artificialisation_des_terres, a reçu un des prix du génie écologique décernés le 21 octobre par le ministère de l’Ecologie. Libellules, brochets et batraciens ne sont pas les seuls bénéficiaires du projet. Pour les élus, le respect de « l’espace de mobilité d’un cours d’eau » constitue surtout une protection contre les #inondations.
    « Depuis des années, on tente de maîtriser le cours des rivières »
    « En recréant ces zones humides, on rétablit un espace d’expansion de crues », explique Valérie Lorenski, directrice de la stratégie environnementale du syndicat des eaux du département. Pour elle, le projet témoigne d’une forte solidarité entre communes. De fait, laisser l’eau déborder sur les terres agricoles d’Hazebrouck, de Borre ou de Vieux-Berquin permet d’éviter aux 8700 habitants de Merville, une commune située à une dizaine de kilomètres en aval, de se retrouver les pieds dans l’#eau. « Les tourbières et autres terrains humides constituent des zones tampons, les surplus s’y infiltrent, ce qui ralentit le débit, explique François Gazelle, hydrologue émérite au CNRS. A l’inverse, plus on contraint un cours d’eau, plus on supprime les zones humides alentour et plus sa #crue est rapide. »

    #biodiversité #écologie

  • Le Capital naturel, un nouvel eldorado pour le business ?

    Le concept de « capital naturel » a été récemment promu par de nombreuses conférences et publications dans les arènes nationales et internationales. Pour protéger l’environnement ou permettre le maintien d’un business as usual dévastateur ? Retour sur le récent premier Forum Mondial sur le capital naturel organisé à Edimbourg fin novembre 2013.

    http://blogs.mediapart.fr/blog/maxime-combes/110214/le-capital-naturel-un-nouvel-eldorado-pour-le-business

    #capital_naturel #business #Edimbourg #Ecosse #Rio+20 #services_écosystémiques #compensation #investissement #révolution #Royal_Bank_of_Scotland #Rio_Tinto #Coca_Cola #KPMG #IUCN #scientifique #biodiversité #carbone #zones_humides #mangroves #Havas #Defra #chaines_d'approvisionnement #métrique #entreprises #PUMA #Webcor #TruePrice #internaliser #externalités #communs
    @rezo

  • Over Half of All Wetlands on Earth ’Destroyed’ in Last 100 Years | Common Dreams
    http://www.commondreams.org/headline/2012/10/17-4

    Over half of all wetlands in the world have been destroyed in the last 100 years due to residential and industrial development, water waste, over-consumption, and pollution says a new report released by the United Nations Environment Program.

    Photo by Romeo Gacad/AFP/File According to the report, the “startling figure”—a 50 percent loss of wetlands on earth—signals years of neglect of our world’s ecosystems, as industrialization and development have trumped concerns of biodiversity and water scarcity. As a result, coastal wetland losses in many regions have occurred at a rate of 1.6 percent per year.

    “Water security is widely regarded as one of the key natural resource challenges currently facing the world,” the authors of the report state. “Human drivers of ecosystem change, including destructive extractive industries, unsustainable agriculture and poorly managed urban expansion, are posing a threat to global freshwater biodiversity and water security for 80 per cent of the world’s population.”

    #zones_humides #biodiversité #eau