Rezo

Le portail des copains

    • En fait, à la réflexion, le je n’ai rien à cacher est une parole performative, c’est-à-dire, je dis quelque chose et ce quelque chose advient, c’est, depuis que je suis ce débat, et que je lis la contribution de ceux qui n’ont rien à cacher, ce qui finit par me sauter aux yeux : ils disent je n’ai rien à cacher en espérant que cela va être vrai.

      Sans compter que cela les abrite aussi de la complexité du monde et là on en revient à cette définition du droite/gauche dans l’Abécédaire de Deleuze : être de gauche c’est concevoir sa place dans le monde à la façon des adresses que l’on se construisait enfant (ce qui est repris dans Espèces d’Espaces de Perec), j’habite à tel étage de tel bâtiment dans telle rue dans telle ville, dans tel département de telle région de tel pays qui appartient à tel continent de telle planète, et donc comprendre que l’on a une place, ausi infime soit-elle, dans un monde vaste, être de droite, c’est s’effrayer prospectivement des Chinois, de la surpopulation, de la crise énergétique et écologique, voire économique, et décréter que finalement c’est trop compliqué pour s’y intéresser soi.

      On dit c’est trop compliqué et cela devient trop compliqué, et en bonne autruche on espère ne jamais être rattrapé par cette complexité, les Chinois, la surpopulation et donc l’émigration, on dit je n’ai rien à cacher et on espère que si cela n’est pas vrai cela va devenir vrai, ou bien encore que d’autres auront plus à cacher que soi-même.

      C’est pitoyable.