• Parano
    La Croix : Bruno Frappa 1/4/2016

    Nous ne sommes pas loin de la parano générale. Dès qu’en Belgique, en banlieue parisienne ou aux Pays-Bas une expédition policière ramène du fond de la vase urbaine des individus présentés comme membres d’un « réseau » qui n’a pas encore agi mais pourrait le faire, nous adhérons aux analyses affolantes vite ficelées par les médias de l’immédiat. Voilà une preuve de plus de l’omniprésence de cette hydre de Lerne dont les têtes par milliers nous environnent et nous guettent de leurs yeux mauvais.

    Et, du coup, chacun ne voit autour de lui, dans l’autobus qui le transporte ou le taxi qui se place à côté de lui que des « salafistes » présumés explosifs ou des fanatiques tapis dans notre société trop accueillante. Que de regards bizarres échangés d’inconnus à inconnus, de sacs de dame en valise à roulettes, de filoches à provisions en chariot débordant de légumes !

    À force de nous distiller l’âge et le prénom de tout ce qui, de près ou de loin, à vue de police européenne, pourrait représenter un embryon de terrorisme nous en venons à nous méfier même de notre entourage. Ce bébé est-il un vrai bébé ou un sac bourré d’explosifs ? Cette femme au ventre proéminent sous sa robe sombre ne cacherait-elle pas une ceinture d’explosifs ? Et en juin, devrons-nous affronter les frasques mortelles des « fans zones », ces grandes foules réunies devant les écrans géants de l’Euro de football ? Est-il bien prudent de prendre l’avion à l’occasion des vacances de printemps ou de se glisser dans une voiture de TGV ? Pour l’instant les autoroutes sont sûres…

    Le danger est lové dans toutes les têtes. La peur nous scie le mental, nous ronge le tempérament, elle nous hante et nous gâche même les prémices du printemps. Le changement de climat, c’est elle ! Faisons comme Augustine, la belle religieuse québécoise : résistons jusqu’à la victoire finale !