La Rotative

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  • Légalisation de l’IVG : quand les médecins de Tours organisaient le triage des femmes

    ça y est, l’article sur les premières années suivant l’adoption de la loi Veil est intégralement en ligne.

    La première partie, où il est question des commissions de triage :
    http://larotative.info/legalisation-de-l-ivg-quand-les-783.html

    En quoi consistent-elles ? Réunissant les spécialistes hospitaliers du service (professeurs agrégés et chefs de clinique), un médecin anesthésiste plein temps, un représentant du personnel soignant, une sage femme et une assistante sociale, ces commissions se fixent pour but d’étudier chaque dossier de demande d’interruption de grossesse et, par vote, d’accepter ou de refuser le droit à l’avortement. La femme est bien entendu absente de la discussion, et son dossier présenté par le médecin qui l’a vue en consultation. En plus du compte-rendu de l’examen gynécologique, ce dossier comprend des renseignements médicaux, sociaux, ainsi que — si elles existent — toutes les constatations faites par les autres spécialistes. Après discussion on groupe chaque « cas » selon la classification OMS (indications médicales, eugéniques, médico-légales, médico-sociales, sociales ou « convenance personnelle pure ») et l’on juge.

    Car il s’agit alors d’un véritable tribunal ; la défense : le médecin à qui la femme s’est adressée et qui doit théoriquement plaider sa cause ; l’accusation : l’ensemble de la commission ; le délit : tout simplement l’expression du désir d’avorter que l’on agrémentera ou non de circonstances atténuantes : proximité de la date des dernières règles, affections chroniques ou géniques prouvées, éthylisme maternel ou bilan prénatal perturbé. On procède alors au vote, et l’on inflige ou non la sanction : refus de l’interruption de grossesse.

    La deuxième partie, sur la précarité des conditions de fonctionnement du Centre IVG de Tours, aggravée par le comportement du professeur de gynéco-obstétrique du CHU :
    http://larotative.info/legalisation-de-l-ivg-quand-les-795.html

    Les médecins vacataires durent alors aménager l’accueil, les consultations, le secrétariat dans les locaux initialement prévus pour les seules interventions : c’est la raison pour laquelle ils possèdent aujourd’hui un des centres les plus exigus de France. Mais au-delà de l’étroitesse des locaux, l’attitude de M. Soutoul eut une autre conséquence plus grave : l’absence totale de collaboration des gynécologues du CHU. Désireux de ne pas compromettre leur carrière hospitalière, respectueux de la hiérarchie du service, aucun des spécialistes de gynécologie-obstétrique n’a en 5 ans pratiqué un seul avortement au centre d’IVG.

    Le salaire dérisoire versé aux vacataires (120 F pour 3h30 de travail) n’attirant aucun des spécialistes de la ville, le Centre n’a pratiquement fonctionné que grâce à la collaboration de généralistes volontaires. C’est ainsi qu’on n’y a vu aucun des étudiants voisins du Certificat d’Études Spécialisées de gynécologie-obstétrique, assurés qu’ils étaient d’échouer à leur examen s’ils osaient déplaire à M. Soutoul en travaillant à « l’avortoir ».

    La troisième partie, dans laquelle le même professeur tente de défendre ses privilèges
    http://larotative.info/legalisation-de-l-ivg-quand-les-809.html

    Dans la Revue de médecine locale [1] du mois de mai, il attaquait à nouveau sous forme d’un « Essai de plaidoyer pour Gynécologues-Accoucheurs mal aimés » dans lequel il tente de défendre les 2 234 spécialistes français de la femme (entendre par là les gynécologues accoucheurs) qui font l’objet de « pressions contradictoires dans un monde occidental agité par de frénétiques sursauts plus souvent d’inspiration politique que culturelle ».

    Suit une suite d’exemples de situations dans lesquelles le gynécologue se trouve agressé par des femmes qui le rendent responsable d’un échec dans ce qu’il nomme « la programmation d’un enfant » : l’enfant programmé étant pour M. Soutoul « un enfant pondu au jour et presque à l’heure fixée dans les calendriers largement diffusés avec la presse du cœur ». Se livrant à une grossière caricature de la presse féminine, imaginant des articles de « Ménie Claire », « W magazine », « Grands Parents » ou « Femmes de demain ».

    (...)

    Ce « mandarin aux pieds chaussés et fier de l’être » comme il se baptise lui-même inaugure en fait un mandarinat new look qui regroupe des « patrons » soudain angoissés de perdre une parcelle de pouvoir. Tous les arguments sont alors bons pour ces spécialistes. Pour peu qu’on prête à l’un d’eux une dimension nationale, apparaît alors un moralisateur scientifique usant de ses chiffres et de sa technique pour tenter d’imposer sa vérité à ceux qu’il nomme des « sujets immatures ».

    Un véritable prêtre-médecin, qui entend conserver bien à lui le corps de sa femme et le contrôle des naissances.

    #ivg #avortement #veil