Le « politiquement correct » et les médias | Eric Fassin
▻https://blogs.mediapart.fr/eric-fassin/blog/230119/le-politiquement-correct-et-les-medias
Le « politiquement correct » et les médias | Eric Fassin
▻https://blogs.mediapart.fr/eric-fassin/blog/230119/le-politiquement-correct-et-les-medias
Peut-être effectivement de tels discours sont-ils devenus si communs, et pas seulement dans cet hebdomadaire, qu’on s’y tromperait. C’est précisément ce que je voulais démontrer. Ironie des choses, L’Obs s’apprête à publier un dossier pour défendre l’humour et la liberté de pensée contre les pisse-froids et les censeurs, mais sans ma tribune. Cela en dit long. Mieux vaut en rire ; mais ce n’est pas drôle.
#humour_dominant #ironie #politiquement_correct #Éric_Fassin
Wow ! Quel texte ! J’ai failli en pleurer de véracité.
Pendant trois minuts, je me suis posé des questions... Mais je ne suis pas sur d’adhérer complètement au procédé.
Il y a un lien direct avec la théorie des 200% qu’explique Jérémy Ferrari dans les vidéos que j’ai mis l’autre jour :
▻https://seenthis.net/messages/750948
Il y explique que si dans un texte d’humour tu dis des choses pourries à 80% ou même à 100%, il y a un doute, car un raciste, un mascu, etc, pourraient dire la même chose. Mais si tu dis des trucs choquants à 200% alors là, ce n’est plus crédible, il n’y a plus de doute, ça en devient absurde, et donc drôle.
Le rapport avec Fassin, c’est que ces chiffres de 80, 100, 200, ne sont évidemment pas objectifs et permanents : ces niveaux sont culturels, ils dépendent de l’époque donnée et à qui tu t’adresses. À tel moment, une phrase va paraitre immédiatement choquante par rapport aux idées communes, et un jour peut-être, elle le sera moins.
C’est exactement ce que prouve Fassin : toutes les phrases qu’il écrit auraient été du 200% il y a quelques décennies dans un journal à peu près « de gauche », et donc personne n’aurait pris ça au sérieux, tout le monde aurait trouvé ça drôle ! Mais de nos jours, ce qu’il a écrit correspond à du 100% et donc les éditeurs ont peur que les lecteurs se trompent parce que ça semble plausible désormais.
De prime abord, je n’adhère pas non plus, mais je comprends l’expérience, et j’applaudis à sa réussite (pas drôle du tout en effet).
De base, le concept « politiquement correct » est foireux. Alors en faire tout un article... dans un journal qui se veut « de gôche »... c’est fait pour quoi, sinon continuer à alimenter le goubliboulga idéologique des fameux pourfendeurs de « politiquement correct » ?
Les Inrocks - Luz : “Tout le monde nous regarde, on est devenu des symboles”
►http://www.lesinrocks.com/2015/01/10/actualite/luz-tout-le-monde-nous-regarde-est-devenu-des-symboles-11545315
La nature du dessin changeait en fonction de la patte de son dessinateur, de son style, de son passé politique pour les uns, ou artistique pour les autres. Mais cette humilité et cette diversité de regards n’existent plus. Chaque dessin est vu comme si il était fait par chacun d’entre nous. Au final, la charge symbolique actuelle est tout ce contre quoi Charlie a toujours travaillé : détruire les symboles, faire tomber les tabous, mettre à plat les fantasmes. C’est formidable que les gens nous soutiennent mais on est dans un contre-sens de ce que sont les dessins de Charlie.
Vous êtes devenus les étendards de l’unité nationale.
Cet unanimisme est utile à Hollande pour ressouder la nation. Il est utile à Marine Le Pen pour demander la peine de mort. Le symbolisme au sens large, tout le monde peut en faire n’importe quoi. Même Poutine pourrait être d’accord avec une colombe de la paix. Or, précisément, les dessins de Charlie, tu ne pouvais pas en faire n’importe quoi. Quand on se moque avec précision des obscurantismes, quand on ridiculise des attitudes politiques, on n’est pas dans le symbole. Charb, que je considère comme le Reiser de la fin du XXe siècle et du début du XXIe, parlait de la société. Il dessinait ce qu’il y avait sous le vernis, des gens avec un gros nez, un peu moches. Là, on est sous une énorme chape de vernis et ça va être difficile pour moi.
Et aussi :
Charb estimait qu’on pouvait continuer à faire tomber les tabous et les symboles. Sauf qu’aujourd’hui, nous somme le symbole. Comment détruire un symbole qui est soi-même ?
Jeannette Bougrab, la compagne de Charb, très émue, a estimé sur BFMTV qu’ils méritaient d’entrer au Panthéon.
Charlie c’est l’inverse. Et puis ça n’a pas changé grand chose pour Marie Curie d’entrer au Panthéon.
Cela fait une belle cérémonie…
Je n’étais pas à la manifestation spontanée du 7 janvier. Des gens ont chanté la Marseillaise. On parle de la mémoire de Charb, Tignous, Cabus, Honoré, Wolinski : ils auraient conchié ce genre d’attitude. Les gens s’expriment comme ils veulent mais il ne faut pas que la République ressemble à une pleureuse de la Corée du Nord. Ce serait dommage.
Belle interview...
Mwé… comme dit @intempestive (par là : ►http://seenthis.net/messages/328954) :
intéressant entretien avec Luz, par ailleurs, dont la critique de l’unité nationale est très bienvenue, mais pas du tout convaincue par sa minimisation de la portée sociale et politique des dessins...
Le côté bande de potes qui s’amuse et méprise toute responsabilité ou conséquence, tendance #osef de tout, cette #immaturité de gamins nantis, que l’on peut observer par ailleurs autour de nous, a fini de me lasser — bien avant l’attentat contre Charlie Hebdo et indépendamment des enjeux en rapport avec celui-ci.
À relire : ►http://www.egalitariste.net/2013/04/21/lhumour-est-une-arme
déjà épinglé ici : ▻http://seenthis.net/messages/218103
Oui, et qui remet un peu les choses en perspective. Cette pseudo unité nationale à base de coups de menton primoministériel et de hashtags niais commence à me fatiguer.
DariaMarx » Rémy Gaillard, Sortir les couteaux
►http://dariamarx.com/2014/03/29/remy-gaillard-sortir-les-couteaux
C’est drôle de n’être regardée que pour sa capacité à faire éjaculer. C’est drôle d’être uniquement envisagée comme partenaire sexuelle potentielle dans l’espace public. C’est drôle de vivre chaque trajet à pieds ou en transport comme un jeu de validation de nos qualités sexuelles. Drôle de se faire insulter, de se faire reluquer, de se faire dévisager, d’entendre des commentaires sur nos seins trop petits ou trop gros, sur nos fesses trop présentes ou trop effacées, sur nos possibles capacités à nous faire baiser la bouche comme des bonnes putes, tout ca en faisant 400 mètres entre chez toi et le tabac. Tellement drôle.
Et étrangement, les personnes les plus souvent accusées de manquer d’humour sont les gens qui remettent en cause l’ordre établi, les limites existantes et intégrées par chacun (qu’elles soient bonnes ou mauvaises) : féministes, véganes, anarchistes, anti-capitalistes, anti-racistes, hétéo-solidaires et LGBT et j’en passe. Mais n’est-ce pas parce que ces personnes ont interrogé l’humour et refusent de rire de ce qui, une fois de plus, conforte l’oppresseur dans son rôle de puissant ? De la même manière, un noir -par exemple- qui refusera de rire à une blague raciste déstabilise son interlocuteur parce qu’il montre qu’il lui refuse un pouvoir. Si c’est un blanc à qui il refuse ce pouvoir, le refus prend tout son sens.
Montrer qu’on refuse de rire est donc un acte qui demande du courage car, sans qu’on s’en rende forcément compte, il y a un rapport de force qui se met en place et qu’il faut apprendre à contrer quand le besoin s’en fait sentir. Refuser ouvertement de rire à ce qui communément amuse la masse est donc un engagement social et potentiellement politique. En refusant ainsi de rire d’une catégorie opprimée avec le « meneur », on lui fait savoir qu’on ne lui reconnaît pas le droit de brimer un groupe donné (qu’on en fasse partie ou non).
L’humour est une arme : ►http://www.egalitariste.net/2013/04/21/lhumour-est-une-arme