Monolecte 😷🤬

Fauteuse de merde 🐘 @Monolecte@framapiaf.org

    • Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, nous avait pourtant prévenus, par une de ces stupéfiantes inversions du sens des mots auxquelles la macronie nous a habitués : ce qui menace la démocratie dans ce pays, ce ne sont pas les 49.3 à répétition, les lois de surveillance liberticides ni les assauts de la Brav-M contre les manifestations, c’est le « terrorisme intellectuel »de l’extrême gauche. Or ce « terrorisme intellectuel », qui consiste apparemment en un ensemble d’idées variées qui ont en commun de ne pas plaire Place Beauvau, n’ayant pas pignon sur rue, ne disposant pas des puissants relais d’un empire médiatique ni des milliards des milliardaires, se présente bien souvent sous la forme modeste de livres, brochures ou fascicules qu’on appelle dans le jargon « essais ». Et c’est à nous, libraires, qu’il revient bien souvent d’en assurer la diffusion et même, n’ayons pas peur des mots, la promotion. Si terrorisme intellectuel il y a, nous en sommes par nature les porte-voix.

      L’arrestation à Londres , sans aucun motif, du responsable des droits étrangers des éditions La fabrique alors qu’il se rendait à la foire internationale du livre, et l’invraisemblable interrogatoire qu’il a subi portant sur l’activité éditoriale de cette maison, nous oblige donc à laisser un moment l’apparente quiétude des étagères de livres, pour lui affirmer notre indéfectible solidarité.

      Détermination et enthousiasme

      Il faut d’abord dire un mot de l’heureux compagnonnage qui nous lie depuis des années à cet éditeur et à son fondateur Eric Hazan, qui a publié des livres de Jacques Rancière, André Schiffrin, Kristin Ross, Alain Badiou, Judith Butler, Grégoire Chamayou, Angela Davis, Nathalie Quintane, Enzo Traverso, Zygmunt Bauman, Françoise Vergès, Raymond Depardon, Frédéric Lordon, mais aussi Walter Benjamin, Antonio Gramsci, Victor Hugo, Auguste Blanqui et tant d’autres. Nous avons ensemble déjà traversé quelques tempêtes, comme au moment de l’affaire Tarnac en 2008 (qui a donné lieu à une relaxe collective), et nous sommes plus que jamais déterminé.es et enthousiastes à l’idée de diffuser leurs livres, avec ceux d’une cohorte d’éditeurs indépendants nés depuis deux décennies dans le sillage de La fabrique et quelques autres.

      Mais cette affaire rappelle plus généralement que le commerce de livres est une activité surveillée. Depuis l’invention de Gutenberg, les pouvoirs successifs ont censuré des écrits, embastillé leurs auteurs, saisi des imprimeries, attaqué en justice des éditeurs et, quand ça ne suffisait pas, envoyé leurs nervis saccager des librairies. Et c’est une activité d’autant plus surveillée et réprimée que le régime en place traverse une crise politique et idéologique : ce fut le cas pendant la guerre d’Algérie, quand on interdisait La question, comme dans les dernières décennies du tsarisme en Russie ou de la monarchie absolue en France. La scandaleuse arrestation du collaborateur d’une maison d’édition française en Grande-Bretagne - et notamment les curieuses questions auxquelles il a dû répondre qui laissent supposer un service rendu aux autorités françaises par les britanniques - est un signe de plus de la grave dérive autoritaire d’un gouvernement aux abois qui traite sa population en ennemi et les oppositions en criminel. C’est enfin une odieuse tentative d’intimidation envers toutes celles et ceux qui participent à la production et à la diffusion des pensées critiques, auxquelles nous, libraires, continuerons d’apporter notre concours résolu sous le manteau protecteur de nos subversives boutiques.

    • « Foire de Londres : abandon des poursuites contre un éditeur » - Marie Dosé (Avocate - Paris) & Richard Parry (Sollicitor - Londres), Communiqué de presse 27 juin 2023

      Notre client Ernest M. a été interpellé à Londres le 17 avril en vertu du Schedule 7 du Terrorism Act 2000, alors qu’il se rendait à la London Book Fair (Foire internationale du livre à Londres) pour représenter ses employeurs les Éditions La Fabrique & les Éditions La Volte. Il a été arrêté en raison de son refus de donner accès à son ordinateur portable professionnel et à son téléphone portable, placé en garde à vue puis libéré sous caution.

      Il constate avec satisfaction que le Crown Prosecution Service a, à juste titre, décidé de ne pas donner suite à cette affaire et ordonné la restitution de son ordinateur portable et de son téléphone mobile le vendredi 23 juin.

      Interpellé sans raison valable et ciblé par une procédure britannique aussi inattendue qu’injustifiée, notre client a adopté une position de principe en défendant son droit fondamental à la vie privée.
      Aujourd’hui, 27 juin 2023, des policiers se sont rendus au bureau de son avocat à Londres pour lui rendre son ordinateur portable et son téléphone mobile. Un officier du Counter Terrorism Command a assuré que ni les données de l’ordinateur portable ni celle du téléphone portable n’ont été téléchargés, seulement la carte SIM, dont le contenu n’a pas été examiné par l’équipe d’enquête du CTC. À nos yeux, l’exploitation, la conservation ou la transmission de ces données sont susceptibles d’être entachées d’illégalité au vu de l’absence d’éléments retenu à son encontre.
      Des interrogations persistent sur le rôle des autorités françaises jouées dans cette affaire, compte tenu notamment des questions exclusivement centrées sur la politique française posées à notre client durant ses interrogatoires.

      Force est de constater que malgré la mobilisation et la vague de soutien en sa faveur, les autorités françaises s’enferrent dans un silence difficilement compréhensible.

      Nous prendrons connaissance le moment venu des conclusions du rapport de l’« Observateur indépendant de la législation du terrorisme à l’Angleterre ». Notre client examinera attentivement, les mesures à prendre alors.

      En attendant, nous restons vigilants quant à l’utilisation qui pourrait être faite, en France, des éventuelles exploitations du matériel informatique et téléphonique de notre client en Angleterre.

    • malgré la mobilisation et la vague de soutien en sa faveur, les autorités françaises s’enferrent dans un silence difficilement compréhensible.

      Je ne le trouve pas si difficilement compréhensible ce silence ; c’est le silence du « circulez y a rien à voir », et en même temps celui du « j’y suis pour rien, prouvez le contraire ». Ceinture et bretelles.

      Les autorités en question, elle craignent dégun ; et elles ont atteint leur objectif : accrocher un ou deux boulets, pendant deux mois minimum, pour l’exemple, aux basques du séparatiste islamo-gauchisme chantre du terrorisme intellectuel ; légal ou pas, injuste ou abject - ou pas - OSBLC, le fait accompli fait son office.

      Au final, bien sûr, TG ; limite « sois déjà content qu’on t’ait rendu ton ordi et ton slip » ; et c’est même pas intôlérable, puis que c’est manifestement toléré, de fait :-). Eh bien, continuons.