• A la frontière franco-italienne, des refoulements « illégaux » de migrants, dénonce la Défenseure des droits

    Dans une décision-cadre inédite, au terme de deux ans d’instruction, la Défenseure des droits dénonce des violations « systématiques » des droits des personnes par les autorités françaises, en particulier des demandeurs d’asile et des mineurs isolés. Des #privations_de_liberté « arbitraires » et « indignes » sont aussi épinglées.

    C’est une décision inédite de la Défenseure des droits, Claire Hédon, qui est rendue publique jeudi 25 avril. Pour la première fois, cette autorité administrative indépendante s’est penchée avec exhaustivité sur les pratiques de la France à sa frontière avec l’Italie. Depuis 2015, des contrôles y ont été rétablis, qui contreviennent au principe de libre circulation des personnes dans l’espace Schengen, mais qui sont sans cesse justifiés auprès de la Commission européenne par la menace terroriste et les flux migratoires irréguliers en Europe.

    Pendant près de deux ans, la Défenseure a enquêté sur la façon dont ces contrôles aux frontières intérieures de l’Union européenne (UE) sont réalisés, en se rendant notamment aux postes de police de Menton (Alpes-Maritimes) et de Montgenèvre (Hautes-Alpes), en épluchant les registres des services, en visitant les locaux dans lesquels les personnes sont retenues, en interrogeant les préfectures et les forces de l’ordre. Ses conclusions sont cinglantes : « Les droits des personnes migrantes font l’objet de violations massives », soulignent les équipes de Mme Hédon auprès du Monde.

    En 2023, plus de trente mille refus d’entrée ont été réalisés à la frontière franco-italienne, quasi exclusivement au motif que les personnes n’avaient pas de document de voyage ou de titre de séjour. Sur 184 pages, les observations de la Défenseure des droits détaillent des contrôles, des interpellations, des privations de liberté et des renvois en Italie de migrants. Pour elle, ces refoulements sont « illégaux ».

    La Défenseure a par exemple constaté que des refus d’entrée sont opposés à des personnes contrôlées en dehors des points de passage frontaliers formellement identifiés. Elles se trouvent donc déjà sur le territoire français et devraient en conséquence se voir appliquer d’autres procédures de contrôle.

    Contrôles « discriminatoires »

    Sur le principal point de passage, la gare de Menton-Garavan, qui concentre « 70 % à 80 % des interpellations », Mme Hédon a aussi observé des contrôles « discriminatoires, fondés sur des caractéristiques physiques associées à une origine réelle ou supposée », mais aussi des palpations systématiques sans qu’un danger potentiel objectif ait été identifié, y compris sur des mineurs et à la vue du public.

    Une fois les personnes contrôlées amenées au poste de la police aux frontières, qu’il s’agisse de celui de Menton ou de Montgenèvre, la Défenseure des droits considère qu’elles sont éloignées sans tenir compte de leur situation individuelle et donc de façon indiscriminée et systématique, au mépris en particulier de leur souhait de demander l’asile. Mme Hédon s’étonne que les autorités « assument » de procéder ainsi. « Cette pratique illégale est pleinement avalisée par la hiérarchie des forces de police ainsi que par l’autorité préfectorale », souligne-t-elle, dénonçant « une violation durable et systématique du droit d’asile à la frontière franco-italienne ».

    Les violations des droits de l’enfant sont également largement documentées. La Défenseure des droits considère que la police doit immédiatement orienter vers l’aide sociale à l’enfance des départements les jeunes se disant mineurs isolés. En lieu et place de quoi, la police aux frontières procède à des « opérations d’identification judiciaires » : elle relève leurs empreintes et consulte plusieurs fichiers biométriques. De même, lorsque les mineurs présentent des documents d’état civil tels que des actes de naissance, ceux-ci ne sont pas pris en compte. A tel point que la police fait figurer des dates de naissance différentes sur les refus d’entrée qu’elle édicte.

    « Appréciation » de l’âge des mineurs

    Dans les Alpes-Maritimes, une expérimentation est menée avec le conseil départemental depuis 2019. Des effectifs sont présents au sein des locaux de police de Menton pour procéder à une « appréciation » de l’âge des jeunes, à travers un entretien de quelques minutes. Un entretien dont les enjeux ne sont pas précisés aux personnes et qui fait l’objet d’un compte rendu qui n’est pas relu par le jeune, pas plus que celui-ci n’est informé de la possibilité de saisir un juge des enfants s’il conteste l’évaluation de son âge. Pour la Défenseure, ce protocole expérimental est illégal. De même, Mme Hédon a constaté que, si la police italienne refusait de reprendre le jeune, la police française avait pour pratique de le laisser libre en lui notifiant une obligation de quitter le territoire. Un procédé jugé, là encore, illégal.

    De façon plus générale, la Défenseure des droits a constaté que la police privait de liberté les personnes interpellées, pendant parfois toute une nuit en raison de la fermeture des services de police italiens. Les locaux préfabriqués utilisés pour, officiellement, des « mises à l’abri » de migrants, sont en réalité des lieux d’enfermement « arbitraire », puisque les personnes n’y bénéficient pas des droits afférents. Le juge n’y exerce aucun contrôle, les personnes n’ont pas accès à un avocat et les conditions matérielles d’enfermement sont qualifiées d’« indignes », en raison notamment de l’exiguïté des lieux, du manque d’hygiène, de lits et de matelas, d’aération ou encore de séparation entre les mineurs et les adultes.

    Surtout, la Défenseure des droits rappelle que, depuis une décision du Conseil d’Etat du 2 février (qui répercute un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 21 septembre 2023), le droit applicable aux étrangers à une frontière intérieure a été clarifié. La justice a ainsi rappelé que les éloignements devaient suivre une procédure de remise à l’Italie bien précise (prévue par un accord bilatéral de 1997, dit « de Chambéry »). Ces précisions de droit ont des implications importantes sur les pratiques de la police.

    Aménager des locaux spécifiques

    Les personnes contrôlées à la frontière peuvent ainsi faire l’objet, si elles se trouvent en situation irrégulière, d’une retenue administrative pour vérification de leur droit au séjour. Mais la Défenseure rappelle que ni les demandeurs d’asile ni les mineurs non accompagnés ne peuvent être placés en retenue administrative (car alors ils ne sont pas en situation irrégulière mais doivent être orientés, les premiers vers un guichet de demande d’asile et une véritable mise à l’abri, les seconds vers l’aide sociale à l’enfance pour une procédure d’évaluation). Les demandes d’asile formulées par les personnes étrangères « doivent être transmises sans délai à l’autorité préfectorale, et sans autres vérifications », insiste la Défenseure.

    Mme Hédon profite de sa décision pour se pencher sur les conséquences éventuelles de la loi relative à l’immigration adoptée en décembre 2023 et promulguée début 2024, et qui prévoit le placement en rétention administrative des demandeurs d’asile lorsqu’ils présentent un « risque de fuite ». Pour la Défenseure, cette rétention ne saurait s’appliquer de façon systématique aux migrants à la frontière et devrait faire l’objet d’un contrôle de constitutionnalité au fond.

    Quant aux personnes en situation irrégulière placées en retenue administrative, la Défenseure des droits rappelle que cette retenue ne peut excéder vingt-quatre heures, que des locaux spécifiques doivent être aménagés à cette fin, qui respectent la dignité des personnes, que le procureur doit être systématiquement averti, et qu’il doit en outre autoriser toute consultation du fichier automatisé des empreintes digitales, que les personnes doivent être informées, dans une langue qu’elles comprennent, de la possibilité d’avoir un avocat, qu’un procès-verbal de fin de retenue doit leur être notifié ainsi qu’une décision écrite de remise à l’Italie, pays qui doit formellement donner son accord à cette remise. « Aujourd’hui, rappellent les équipes de la Défenseure des droits, nous n’avons pas de garantie sur un changement de système. »

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/04/25/a-la-frontiere-franco-italienne-des-refoulements-illegaux-de-migrants-denonc

    #frontière_sud-alpine #asile #migrations #réfugiés #frontières #Italie #France #Vintimille #renvois #expulsions #défenseur_des_droits #contrôles_frontaliers #Hautes-Alpes #Alpes_Maritimes #Montgenèvre #violations_massives #refus_d'entrée #interpellations #refoulements #push-backs #droit_d'asile #illégalité #mineurs #enfants #âge #retenue_administrative

    –-> et ce terme "illégaux" mis entre guillemets... pourtant les #refoulements sont illégaux. C’est l’article 33 de la convention sur les réfugiés qui le dit, c’est le #principe_de_non-refoulement...
    #illégalité #terminologie #mots #vocabulaire

    –-

    ajouté à la métaliste autour de la Création de zones frontalières (au lieu de lignes de frontière) en vue de refoulements :
    https://seenthis.net/messages/795053

    • Respect des droits des personnes migrantes à la frontière intérieure franco-italienne : le Défenseur des droits publie une décision-cadre

      Le Défenseur des droits publie ce jour une décision-cadre sur le respect des droits des personnes contrôlées et interpellées à la frontière intérieure franco-italienne, par les forces de sécurité françaises, dans les départements des Alpes-Maritimes et des Hautes-Alpes.

      Le franchissement des frontières de l’Union européenne (UE) est régi par le règlement européen dit code frontières Schengen, qui distingue d’un côté, les « frontières extérieures » de l’UE, et de l’autre, les « frontières intérieures » entre deux États membres de l’UE. Le franchissement de chaque catégorie de frontières obéit à des conditions qui lui est propre. Concernant les frontières intérieures, le principe est la libre circulation des personnes. Le droit de l’UE assure ainsi l’absence de tout contrôle des personnes aux frontières intérieures, quelle que soit leur nationalité, lorsqu’elles franchissent ces frontières. Cependant, depuis 2015, la France a rétabli les contrôles à ces frontières, en faisant application d’une exception prévue par le code frontières Schengen mais strictement encadrée.

      La #décision-cadre n°2024-061 (https://juridique.defenseurdesdroits.fr/index.php?lvl=notice_display&id=50351) s’inscrit dans le cadre du traitement de réclamations individuelles adressées à l’institution par les personnes concernées et par l’intermédiaire d’associations. Elle est le résultat d’une instruction contradictoire menée auprès des autorités mises en cause et de la mise en œuvre des pouvoirs d’enquête et d’intervention de l’institution. À ce titre, la Défenseure des droits a effectué un déplacement avec ses équipes à Montgenèvre et Briançon les 10 et 11 février 2022. Les services de l’institution ont également mené une vérification sur place du 10 au 13 avril 2023 à Menton, au sein des locaux de la police aux frontières (PAF) et à des points de passage autorisés.

      Cette décision intervient dans un contexte inédit, dans lequel la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 4e ch., 21 septembre 2023) et le Conseil d’État (CE, section du contentieux, 2ème et 7ème ch.) ont récemment réaffirmé l’obligation pour les États membres de l’Union européenne, d’appliquer les garanties juridiques minimales prévues par la directive européenne dite retour aux personnes qui sont interpellées à la frontière intérieure, afin que leurs droits fondamentaux soient respectés.

      De manière préoccupante, cette décision-cadre conclut à l’existence de procédures et pratiques qui ne sont pas conformes à la directive retour, au droit européen et au droit national. Elle conclut également à des atteintes substantielles et multiples aux droits des personnes interpellées, à partir du moment où elles sont contrôlées, jusqu’à leur éloignement du territoire.

      Des procédures de refus d’entrée contraires au droit de l’UE

      Le Défenseur des droits constate que les personnes interpellées font l’objet d’une procédure de refus d’entrée qui ne respecte pas les garanties juridiques minimales de la directive retour telles que le recours à une procédure équitable et transparente, impliquant notamment un examen de la situation individuelle de la personne, la motivation des décisions en fait et en droit ou encore l’accès à l’interprétariat. Ces atteintes concernent un nombre de personnes d’autant plus important que la procédure est mise en œuvre sur une zone frontalière très étendue et imprécise, ce qui est en contradiction avec le droit européen.
      Une privation de liberté hors de tout cadre juridique

      Un grand nombre de personnes interpellées se retrouvent enfermées pendant plusieurs heures, voire une nuit entière, dans des locaux présentés comme des espaces de « mise à l’abri », sans fondement légal et dans des conditions indignes. Plus inquiétant encore, parmi ces personnes se trouvent des personnes vulnérables, notamment des familles, des mineurs et des demandeurs d’asile.
      Des obstacles au droit d’asile

      Concernant les demandeurs d’asile, le Défenseur des droits constate notamment que si la personne est considérée comme « non entrée » sur le territoire, elle fait l’objet d’un refus d’entrée et aucune demande d’asile n’est prise en compte. Cette pratique largement assumée est ouvertement contraire au droit d’asile, et constitue une entrave grave, généralisée et durable à l’accès à la procédure d’asile à la frontière franco-italienne.
      De lourdes atteintes aux droits des mineurs

      Concernant les mineurs, le Défenseur des droits relève de lourdes atteintes à leurs droits, qu’ils soient ou non accompagnés, en violation de l’intérêt supérieur de l’enfant et des droits des mineurs, et des garanties de la directive retour. Les procédures mises en place entravent notamment l’accès des mineurs non accompagnés à la protection de l’enfance.

      Au regard de l’ensemble de ses constats et conclusions alarmants, la Défenseure des droits formule une série de recommandations qu’elle adresse au ministre de l’Intérieur et des Outre-mer et aux préfectures concernées. Elle appelle à faire cesser, dans les plus brefs délais, les procédures et pratiques constatées et à mettre fin aux atteintes multiples portées aux droits des personnes qui sont contrôlées et interpellées à la frontière franco-italienne.

      https://www.defenseurdesdroits.fr/respect-des-droits-des-personnes-migrantes-la-frontiere-interieur

    • La France accusée de « violations systématiques » des droits des migrants à sa frontière avec l’Italie

      Une enquête très documentée publiée jeudi par la Défenseure des droits souligne des « violations systématiques » par les autorités françaises des droits des personnes migrantes souhaitant entrer sur le territoire depuis l’Italie, ainsi que des privations de liberté « arbitraires et indignes ».

      En 2023, 30 000 refus d’entrées ont été notifiés à des personnes que la police a ensuite refoulées sur le territoire italien. Dans bon nombre de cas, ces refoulements étaient illégaux. C’est ce qu’a pu constater la Défenseure des droits Claire Hédon au terme d’une enquête de deux ans, en se rendant avec ses équipes à la frontière franco-italienne. Cette « décision-cadre », un document qui fait partie des moyens d’action de la Défenseure des droits, a été publiée jeudi 25 avril et adressée au ministère de l’Intérieur.

      L’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafe) constate ces violations des droits sur le terrain depuis huit ans. « On était encore en observation à la frontière la semaine dernière, précise son président Alexandre Moreau. Ce qu’on observe, c’est qu’il n’y a toujours pas d’interprètes dans les procédures de vérification de séjour. Il n’y a pas d’information sur la procédure appliquée aux personnes, il n’y a pas d’avocat et donc pas d’assistance juridique. Il n’y a pas non plus d’information sur la procédure d’asile. Or un certain nombre de personnes fuient des situations qui leur justifieraient un besoin de protection internationale au-dessus de l’asile, il n’y a pas de toute cette explication et c’est encore pire pour les mineurs isolés. »
      Atteintes aux droits des enfants pour les mineurs non accompagnés

      Le cas des mineurs non accompagnés est particulièrement mis en lumière dans l’enquête de la Défenseure des droits. Selon la loi, une personne migrante se déclarant mineure doit notamment être prise en charge par les services départementaux de l’Aide sociale à l’enfance (ASE). Or, les pratiques de la police française aux frontières (PAF) ne reflètent pas les procédures prévues, estime Alexandre Moreau.

      « Lorsqu’on procède à une vérification du séjour pour les mineurs, on doit leur permettre un temps de répit. Mais on observe qu’il n’y a pas ce temps de répit immédiatement. Quand il y a interpellation, il y a examen. L’examen ne dure même pas 30 minutes. On ne leur explique pas pourquoi ils doivent répondre à ces questions et quels en sont les enjeux. Systématiquement, on s’aperçoit que la minorité, elle, est contestée et donc le doute ne profite pas à la minorité. Et on ne leur explique pas, par exemple, qu’ils ont droit à un avocat, qu’ils ont droit aussi de saisir le juge des enfants pour contester la décision de majorité. Or, les mineurs isolés ne sont jamais, jamais, jamais en situation irrégulière sur le territoire. »
      Privations de liberté arbitraires

      Une fois interpellées, « un grand nombre de personnes se retrouvent enfermées pendant plusieurs heures, voire toute une nuit », souligne l’enquête. Cela sous prétexte d’être « mises à l’abri », avant d’être reconduites de l’autre côté de la montagne par la police italienne. « On n’est ni dans une zone d’attente, ni dans un centre de rétention, indique Alexandre Moreau. C’est une procédure complètement illégale et arbitraire d’un enfermement dans des préfabriqués, donc en plus dans des conditions complètement indignes. Et on ne sait pas exactement dans quel cadre juridique la police pratique cet enfermement. Elle parle de mise à l’abri, mais c’est tout un code particulier qui n’est pas non plus lui-même respecté. »

      Parmi la longue liste d’entraves constatées par la Défenseure des droits dans ce rapport de 180 pages, le lieu même des contrôles policiers pose question. Les points de contrôles doivent être déclarés à la Commission européenne, condition sine qua non au rétablissement des contrôles aux frontières intérieures de l’espace Schengen. Or, à plusieurs reprises, des personnes exilées ont été interceptées à d’autres endroits que ceux officiellement prévus dans les textes.
      Le rétablissement des frontières intérieures justifié par un attentat à Moscou

      Le droit européen permet effectivement aux États membres de l’espace Schengen, dont la libre-circulation des personnes est un principe clef, de rétablir les contrôles à titre exceptionnel et pour une durée de six mois.

      Depuis 2015, en raison d’une menace terroriste après les attentats du 13 novembre 2015 à Paris, la police française aux frontières a activement repris du service. Depuis, le rétablissement des contrôles est sans cesse renouvelé, motivé par des événements aussi variés que la pandémie de Covid-19 en 2020, ou l’organisation de la Coupe du monde de Rugby en 2023.

      L’autorisation actuelle prend fin le 30 avril 2024. Au 1er mai, de nouveaux arguments ont été notifiés à la Commission européenne : la tenue des Jeux Olympiques et paralympiques à Paris et l’attentat de Moscou du 22 mars dernier.

      https://www.infomigrants.net/fr/post/56698/la-france-accusee-de-violations-systematiques-des-droits-des-migrants-

  • #Vidéo sur l’#externalisation des #politiques_migratoires européennes

    Migreurop documente depuis sa création l’externalisation des politiques migratoires européennes. Ces politiques d’externalisation ont pour objectif de tenir les exilé·e·s au plus loin de l’espace européen en sous-traitant la gestion des mouvements migratoires aux pays dits « tiers » (d’origine ou de transit), quelles qu’en soient les conséquences sur les droits des personnes migrantes. Par le biais d’un #marchandage, l’UE et ses États membres se déchargent ainsi sur des pays non-membres des obligations qui leur incombent en vertu des conventions internationales qu’ils ont ratifiées.

    L’externalisation fonctionne selon quatre principes :

    - #Délocalisation : Les pays européens délocalisent le #contrôle_frontalier et exportent leurs politiques migratoires répressives dans des États dits « tiers » qui ne sont pas soumis aux mêmes lois et obligations en matière de respect des droits des personnes. Ils déplacent ainsi de fait les frontières européennes au-delà du territoire européen.

    - #Sous-traitance : L’UE délègue le contrôle migratoire à des États non-membres, transformés en garde-frontières d’une Union européenne qu’ils aspirent à rejoindre (comme les pays des Balkans) ou dont ils sont en partie dépendants (comme le Maroc, le Niger ou la Turquie).

    #Privatisation : Les États délèguent également de nombreuses prérogatives à des acteurs privés, comme les #compagnies_aériennes qui deviennent elles aussi garde-frontières, tandis que les demandes de #visas sont gérées par des sociétés privées, tout comme la #sécurité dans les camps d’exilés.

    - #Déresponsabilisation : En externalisant leurs politiques migratoires dans des pays non-signataires des principaux textes internationaux de protection des personnes migrant·e·s et réfugié·e·s, l’UE et les États européens contournent le droit. Ils cherchent à invisibiliser les violations des droits des personnes migrantes et fuient leurs #responsabilités.

    L’externalisation bafoue en toute impunité les droits des personnes exilées et met leurs vies en péril. Elle n’empêche pas les migrations, mais les rend plus dangereuses. Stop à l’externalisation et à l’#impunité des États !

    https://vimeo.com/838312263

    #migrations #asile #réfugiés #frontières #externalisation_des_frontières #droits_humains #refoulements #principe_de_non-refoulement #marchandage #droits_fondamentaux #responsabilité #ressources_pédagogiques

  • Il principio di non respingimento ai confini dell’Unione Europea
    https://www.meltingpot.org/2022/06/il-principio-di-non-respingimento-ai-confini-dellunione-europea

    Papers, una rubrica di Melting Pot per la condivisione di tesi di laurea, ricerche e studi.Per pubblicare il tuo lavoro consulta la pagina della rubrica e scrivi a collaborazioni@meltingpot.org. Università degli studi di TorinoDipartimento di Culture, Politica e SocietàLaurea magistrale in Scienze Internazionali Il principio di non respingimento ai confini dell’Unione Europea di Valeria Contin(Anno Accademico 2020/2021)  Per scaricare la tesi crea un account: scopri come Per accedere con le tue credenziali: clicca qui Introduzione Lo scopo di questa tesi è offrire un quadro della situazione attuale circa le politiche di gestione dei flussi migratori da parte dell’Italia e dell’Unione Europea, illustrando gli strumenti normativi più (...)

  • Renvois : la pratique des autorités migratoires suisses menace les #droits_humains

    Le #Tribunal_administratif_fédéral prononce encore et toujours le renvoi de personnes vers des « #Etats_tiers_sûrs » ou des « #Etats_d'origine_sûrs » sans procéder à un examen suffisant de la situation des droits humains dans ces pays et à une évalutation minutieuse des #risques encourus par les personnes concernées. Aussi s’accumulent les #mesures_conservatoires (#interim_measures) à l’encontre de la Suisse, sur la base desquelles les comités onusiens suspendent provisoirement les menaces de renvoi. Conclusion : les #critères_d’examen des autorités suisses sont inadéquats du point de vue des droits humains.

    Une femme seule avec des enfants fuit un pays en guerre civile pour se rendre en #Bulgarie, où elle obtient le statut de réfugiée. Sur place, elle est victime de #violence_domestique. Ne recevant pas de protection de la part des autorités bulgares, elle se réfugie en Suisse avec ses enfants. Le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) rejette sa demande d’asile, invoquant qu’elle peut retourner en Bulgarie car il s’agit d’un « État tiers sûr ». Le Tribunal administratif fédéral confirme la décision du SEM*.

    Selon la loi sur l’asile (LAsi), une demande d’asile n’est généralement pas accordée si la personne requérante peut retourner dans un « État tiers sûr » dans lequel elle résidait avant de déposer sa demande en Suisse (art. 31a LAsi). En Suisse, les États de l’UE et de l’AELE sont considérés comme des pays tiers sûrs, car ils ont ratifié la Convention de Genève sur les réfugiés et la Convention européenne des droits de l’homme, qu’ils mettent en œuvre dans la pratique selon le Secrétariat d’État aux migrations. Le Conseil fédéral peut également désigner d’autres pays comme « États tiers sûrs » si ceux-ci disposent d’un mécanisme de protection efficace contre le renvoi des personnes concernées permettant de respecter le #principe_de_non-refoulement. Enfin, sont également considérés comme des « États d’origine sûrs » les pays dans lesquels les requérant·e·s d’asile sont à l’abri de toute persécution (art. 6a al. 2 let. a et b LAsi).

    Avec le soutien de l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR), la mère requérante d’asile et ses enfants déposent une plainte individuelle auprès du Comité des droits de l’enfant de l’ONU. Le Comité demande instamment à la Suisse de ne pas rapatrier la famille afin d’éviter que les enfants ne subissent un préjudice irréparable du fait des violations de leurs droits humains ; il ne peut en effet pas exclure que la famille se retrouve en danger en Bulgarie. Selon Adriana Romer, juriste et spécialiste pour l’Europe au sein de l’OSAR, cette affirmation est claire : « La référence générale au respect par un État de ses obligations en vertu du #droit_international n’est pas suffisante, surtout dans le cas d’un pays comme la Bulgarie. S’il y a des indications de possibles violations des droits humains, une évaluation et un examen minutieux sont nécessaires dans chaque cas individuel ».

    Le cas d’une demandeuse d’asile qui a fui un camp de réfugié·e·s grec pour se réfugier en Suisse illustre bien la problématique. Selon le Tribunal administratif fédéral (TAF), elle n’a pas fait valoir de circonstances qui remettraient en cause la #Grèce en tant qu’« État tiers sûr » (arrêt du TAF E-1657/2020 du 26 mai 2020). Les #viols qu’elle a subis à plusieurs reprises dans le camp de réfugié·e·s et l’absence de soutien psychologique sur place n’ont pas été pris en compte. Le Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination à l’égard des #femmes (#CEDEF) est finalement intervenu un mois plus tard. C’est un sort similaire qu’a connu un requérant ayant survécu à la #torture, reconnu comme réfugié en Grèce. Bien que celui-ci ait dû vivre dans la rue et n’ait pas eu accès aux #soins_médicaux en Grèce, l’Office fédéral des migrations et le Tribunal administratif fédéral ont décidé que la « présomption d’ État tiers sûr » s’appliquait à la Grèce dans cette affaire (arrêt du TAF E-2714/2020 du 9 juin 2020). Là encore, le Comité contre la torture de l’ONU est intervenu et a empêché le renvoi. Pour Stephanie Motz, avocate zurichoise qui a plaidé dans les trois cas, deux fois avec l’association AsyLex et une fois avec l’avocate Fanny de Weck : « La situation dans les pays tiers n’est que sommairement examinée par le SEM et l’établissement des faits n’est pas suffisant pour être conforme au droit. En outre, il est fréquent que le Tribunal administratif fédéral n’examine pas en profondeur la situation des droits humains dans ces États, mais se contente de formuler des affirmations générales. En conséquence, les comités onusiens interviennent de plus en plus dans ces procédures ».

    Les critères d’évaluation peu rigoureux des autorités suisses concernent également les transferts au titre du #Règlement_de_Dublin, par lequel les requérant·e·s d’asile sont renvoyé·e·s vers l’État membre dans lequel ils et elles ont déposé leur première demande d’asile. À la fin de l’année dernière, le Comité contre la torture de l’ONU a dû interrompre temporairement un rapatriement Dublin de la Suisse vers la Pologne (arrêt du TAF F-3666/2020 du 23 juillet 2020).

    Enfin, le Comité pour l’élimination de la #discrimination_raciale de l’ONU (#CERD) est également intervenu au début de cette année lorsque la Suisse a voulu expulser un couple de #Roms vers le nord de la #Macédoine (arrêt du TAF E-3257/2017 du 30 juillet 2020, cons.10.2). Le couple était exposé à de sérieux risques et n’était pas protégé de manière adéquate par les autorités de #Macédoine_du_Nord. Le Tribunal administratif fédéral ayant désigné la Macédoine du Nord comme un « État d’origine sûr », le couple a, avec le soutien du Réseau de solidarité Berne, déposé une plainte individuelle auprès du CERD et peut rester en Suisse à titre provisoire.

    Plusieurs années peuvent s’écouler avant que les comités de l’ONU statuent définitivement sur les cas présentés. Dans trois de ceux-ci, le SEM a entre temps accepté les demandes d’asile. Dans les deux autres cas, grâce aux mesures conservatoires, les recourant·e·s sont également protégé·e·s pendant que le Comité examine le risque concret de violations des droits humains.

    En qualifiant un grand nombre de pays de « sûrs » de manière générale, les autorités suisses font courir de graves risques aux demandeur·euse·s d’asile. Les droits humains peuvent également être violés dans des #pays_démocratiques. Les nombreuses interventions des comités de l’ONU le montrent clairement : la pratique suisse n’est pas suffisante pour respecter les droits humains.

    *Pour la protection de la famille concernée, la référence correspondante n’est pas publiée.

    https://www.humanrights.ch/fr/qui-sommes-nous/autorite-migratoires-mesures-conservatoires
    #renvois #expulsions #migrations #asile #réfugiés #Suisse #TAF #SEM #justice #ONU #Dublin #renvois_Dublin

  • La forteresse Europe opte pour l’option sécuritaire au détriment des droits fondamentaux
    https://revdh.revues.org/1304

    L’Europe devrait, malgré un contexte général marqué par réflexe de repli, voire même aujourd’hui de militarisation, travailler à tisser une solidarité plus effective entre ses Etats membres et conserver une approche généreuse dans l’accueil des demandeurs d’asile dans l’esprit de la Convention de Genève et dans le strict respect des droits fondamentaux et du principe de non-refoulement. Ce dernier n’a semble-t-il pas encore reçu de l’Union et de ses agences toutes les garanties nécessaires pouvant permettre de s’assurer de l’absence d’entorses graves à son application.

    #réfugiés #droits-fondamentaux