Ce que fait Laurent Alexandre ressemble à de la manipulation pure et dure, fort comparable aux gourous de sectes. Il utilise en particulier une technique qu’adore les transhumaniste (et tout les technogaga), annoncer le futur qu’il souhaite comme puissant et inévitable et terrifiant : « ça va arriver, on ne peut pas l’éviter, ayez peur, préparez vous, acceptez le » sans oublier le terrible « mais si on est vigilant ça peut quand même être cool et nous libérer, surtout si on le hack ». Il semble aussi aimer jouer avec les tripes de son auditoire en soufflant le froid « vous ne pissez que du code, vous allez être remplacé par des robots » et le chaud « mais ne vous inquiétez pas moi aussi je suis avec vous, je suis un geek ». Au final son discours est complétement désarmé et désarmant. Dans le même style il y a Jean-Michel Besnier, version philosophe.
Bref de fieffés réactionnaires qui veulent se parer des airs de la subversion pour coloniser notre temps de cerveau qu’ils estiment disponible.
« Les sciences sont notre avenir », annonce l’en-tête de Sciences en marche, site corporatiste des personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR). C’est-à-dire que nous n’avons pas le choix. #TINA : There Is No Alternative, comme disent les critiques du libéralisme chez qui recrutent justement les animateurs de Sciences en marche. Comme nous n’avons pas le choix, il ne nous reste qu’à aimer cet avenir inévitable, aussi haïssable et incertain qu’il puisse être. Il en va du #Progrès (de leur progrès), de l’innovation, de la compétitivité de leurs entreprises, de l’économie (de leur économie), de l’adaptation de l’homme-machine au monde-machine – et puis surtout, des crédits de la recherche et de l’emploi des chercheurs.
A défaut d’avoir le choix ou d’aimer cet avenir scientifique, nous pouvons en parler. Ça ne change rien, mais ça soulage et, qui sait ? nous pouvons même nous y faire, faire notre deuil, trouver des moyens de l’adoucir et de l’accepter. Il y a des cellules psychologiques pour ça. On peut par exemple détruire un mode de vie et lui substituer un musée cimetière où employer les survivants comme guides, gardiens, fantômes. Enfin, il y a plein de possibilités. L’important c’est de participer - pas de gagner, puisque gagner est impossible, soyez rationnels. Participer, c’est accepter l’inévitable, l’avenir scientifique en marche. Voilà une attitude mûre, rationnelle et bénéfique : se soumettre à la loi du plus fort et tirer de cette soumission les miettes symboliques.
Malheureusement la société n’est pas aussi rationnelle qu’il le faudrait pour son propre bien. Elle est agitée de courants réactionnaires, bruyants, hostiles au nucléaire, au numérique, à la robotisation, aux #OGM, aux #nanotechnologies, aux gaz de schiste, aux puces #RFID, à l’#eugénisme, à la reproduction artificielle de l’humain. A l’organisation scientifique de la société. Des mouvements de refus s’expriment ; la jeunesse déserte les carrières scientifiques ; on ne croit plus les autorités scientifiques ; les médias échouent à porter la bonne parole et à faire entendre raison ; l’expertise et la démocratie technique sont tournées en dérision ; les pseudo-débats organisés par des instances pseudo-indépendantes donnent lieu au chahut et à la colère de la société. Du moins de cette partie de la société qui ne décide pas de notre avenir, qui ne fait pas partie du personnel technoscientifique ni de leurs partenaires publics et privés. C’est très inquiétant. Un rapport gouvernemental nous le dit : on ne peut pas, par exemple, développer les nanotechnologies ni la biologie de synthèse à l’échelle industrielle, sans le soutien de la société : « Il demeure impossible de déployer ces technologies à plus grande échelle sans un #fort_consensus_social » (1). – Tiens donc ! Ainsi, finalement, nous aurions le choix. Il y aurait une alternative. Et cela ferait une différence de dire oui ou de dire non.