Monolecte đŸ˜·đŸ€Ź

Fauteuse de merde 🐘 @Monolecte@framapiaf.org

  • des croĂ»tes aux coins des yeux » Blog Archive » la fin de @tanxxx (?)
    ▻http://tanxxx.free-h.fr/bloug/archives/6997

    Ben ouais : comment passer Ă  autre chose maintenant que je suis bien coincĂ©e dans Tanxxx ? Le #dessin lĂ©chĂ© m’emmerde dĂ©sormais assez prodigieusement. Je crois que c’est Benasayag qui, parlant de progrĂšs dans une de ses confĂ©rences, expliquait qu’avec la technique on sait ce qu’on gagne mais on ne sait pas ce qu’on perd. Je remonte le temps parfois et je ressors des vieux dessins. Je vois tout de suite ce que j’ai gagnĂ© depuis, comme dit GrĂ©gory, ce que je me “suis fait chier Ă  maitriser”, mais je vois surtout, avec beaucoup d’amertume, ce que j’ai perdu. Et malheureusement c’est beaucoup plus difficile Ă  retrouver que la bĂȘte #technique.
    La technique, ça s’apprend, ça se travaille, y’a rien de sorcier Ă  ça. N’importe qui qui dĂ©cide de passer du temps et de travailler l’acquerra. Et au final, au bout de 10 ans si je sais dessiner comme je le voulais ou presque, j’ai perdu de vue le #plaisir et la spontanĂ©itĂ©. La technique a bouffĂ© tout ça.

    • Je souligne une citation dans la citation parce qu’elle me parait ĂȘtre fondamentale :

      avec la technique on sait ce qu’on gagne mais on ne sait pas ce qu’on perd

      J’aimerai bien en discuter un de ces jours. Quand on aura le temps :)

    • Je vais rebondir mais un peu plus tard, je ne suis pas en vacances, moi ! Enfin si mais non. Justement :) Je cale des pĂ©riodes pour expĂ©rimenter de nouveaux outils et/ou produire des sujets perso mais ça va de paire. Par exemple, j’ai officiellement fermĂ© boutique pour travailler sereinement sur des travaux perso en cours. L’an passĂ©, j’ai profitĂ© des vacances de NoĂ«l pour m’initier Ă  l’aquarelle parce ça faisait un petit bout de temps que ça me titillait, notamment pour la carto mais depuis je la pratique dans d’autres domaines. C’est mon cĂŽtĂ© papillon, je ne me suis pas laissĂ©e enfermĂ©e par une technique particuliĂšre, ça ne m’a jamais intĂ©ressĂ© la technique en tant que technique. Je trouve toujours enrichissant d’explorer d’autre univers. Les expĂ©riences qui en sortent sont plus ou moins heureuses mais ça me permet d’avancer. En fait, plutĂŽt que de parler de technique, je prĂ©fĂšre parler d’outil, de l’outil qu’on utilise pour exprimer des choses, celles qu’on ressent, celles qu’on veut mettre au grand jour. Parce que l’outil on fait en sorte qu’il s’adapte Ă  nos besoins, et non l’inverse. Et donc chaque fois j’aborde l’outil en tĂątonnant. Je me renseigne sur les principes de bases et rapidement ça va m’ennuyer alors j’expĂ©rimente avec ce minimum de savoir faire et je vais dialoguer avec l’outil et les matĂ©riaux pour mieux me les approprier pour parvenir Ă  mes fins, l’image que je veux communiquer. C’est un travail en perpĂ©tuel mouvement. Je dis travail mais c’est un rĂ©el plaisir de naviguer ainsi, et parfois une rĂ©elle souffrance pour parvenir Ă  ce qu’on veut.

    • @aude_v sauf qu’Illich pense l’outil dans une dimension industrielle alors que moi je le considĂšre dans une dimension artisanale, c’est complĂštement diffĂ©rent. Sinon j’aime bien sa notion d’outil convivial.

    • Ça m’intĂ©resse beaucoup ce questionnement de ni tanxxx ni Mathilde sur l’outil, la technique, l’identitĂ© ...
      Il me semble qu’il y a la question du systĂšme, la maĂźtrise de la technique peut nous enfermer dans une identitĂ© « gĂ©nĂ©tique » qui nous fait perdre notre ĂȘtre comme l’explique Benasayag. Dans mon travail j’utilise trĂšs peu d’outils, papier, bic et encre de Chine Ă  la plume. Je pense souvent Ă  ce risque d’enfermement dans le « beau dessin » et je m’y complaĂźt certainement d’un certain point de vue. Il y a une citation de Hokusai qui m’a beaucoup influencĂ©e et guidĂ©e :

      « Depuis l’ñge de cinq ans, j’ai la manie de recopier la forme des choses et depuis prĂšs d’un demi siĂšcle, j’expose beaucoup de dessins ; cependant je n’ai rien peint de notable avant d’avoir soixante-dix ans. A soixante-treize ans, j’ai assimilĂ© lĂ©gĂšrement la forme des herbes et des arbres, la structure des oiseaux et d’autres animaux, insectes et poissons ; par consĂ©quent Ă  quatre-vingt ans, j’espĂšre que je me serai amĂ©liorĂ© et Ă  quatre-vingt-dix ans que j’aurai perçu l’essence mĂȘme des choses, de telle sorte qu’à cent ans j’aurai atteint le divin mystĂšre et qu’à cent dix ans, mĂȘme un point ou une ligne seront vivants. Je prie pour que l’un de vous vive assez longtemps pour vĂ©rifier mes dires. »

      On peu y voire du « toujours plus », toujours plus de maĂźtrise, mais il me semble qu’elle n’est pas une quĂȘte en soi, ce n’est pas le but de « avoir de la technique » mais se dĂ©barrasser des contraintes technique pour avoir la possibilitĂ© de s’occuper Ă  l’ĂȘtre des ĂȘtres. Je sais plus ou j’avais lu ou entendu ça mais dessiner est une quĂȘte de comprĂ©hension, pour dessiner il faut avoir en tĂȘte qu’on observe de la lumiĂšre rĂ©flĂ©chit, que la chose dessiner est un volume de telle ou telle nature et que le fait de chercher Ă  dessiner ces choses demande de comprendre cette nature. Comme je pense ne jamais ĂȘtre capable de comprendre la « vrai nature » de quoi ou qui que ce soit puisque les choses et les ĂȘtres ne sont pas fixes, la nature est de fait insaisissable mais en mĂȘme temps cette recherche ne me semble pas vaine. C’est plutĂŽt une tentions vers qui me semble le moteur (un truc vivantes mouvement) plutĂŽt que l’arrivĂ©e a des objectifs qui me paraĂźt un truc de mort, quant on arrive au but, c’est quant on arrĂȘte de bouger soi mĂȘme et que les vers peuvent passer Ă  table.

      Bon d’un autre cĂŽtĂ© j’ai aussi souvent des doutes par rapport Ă  ce risque de systĂšme, de recettes. Des moments ou la lenteur de la technique me dĂ©courage ou me paralyse. Je suis de plus en plus lente parceque je m’enfonce de plus en plus dans des petits dĂ©tails. Il y a la contrainte de vouloir faire du beau qui me bloque, la peur de gĂącher du papier me paralyse encore. D’un cĂŽtĂ© je lĂ©gitimĂ© ma quĂȘte du beau dessin dans une idĂ©e qu’elle est une politesse faite aux regardeureuses, mais d’un autre cĂŽtĂ© je dĂ©teste les Ɠuvres que je qualifie de dĂ©coratives et je pense aussi que mon cĂŽtĂ© bourgeoise doit intervenir pour beaucoup dans mon goĂ»t pour le « beau dessin bien fait techniquement ». J’ai l’impression d’ĂȘtre toujours sur le fil du paradoxe. Il y a aussi le fait que la technique est un moyen de me protĂ©ger des attaques du style Mermet a la Fiac « un gosse de 5 ans pourrait faire mieux ». Truc qui fait que mĂȘme si une personne n’aime pas mon travail elle ne m’agresse pas en me traitant de nulle.
      Il y a quelques annĂ©es lors de la derniĂšre Ă©dition du festivals periscopage il y avait un dessinateur dont j’ai oublier le nom qui a fait une confĂ©rence hyper intĂ©ressante et surtout trĂšs dĂ©complexante sur cette question du beau dessin ou de la technique. Il expliquait que la quĂȘte de beautĂ© graphique et technique est un frein Ă  la crĂ©ativitĂ©, une idĂ©e Ă©litiste et discriminante. Je pense qu’il a tout Ă  fait raison, la maĂźtrise technique est rĂ©servĂ©e Ă  celleux qui disposent du temps, et elle exclue celleux qui n’en ont pas pour s’entraĂźner. D’une part on exclue celleux qui n’ont pas ce temps, mais on s’exclue puisque pendant qu’on travail sur la technique on oublie que le principal c’est ce qu’on veux exprimer et ressentir. Pendant qu’on lutte avec son crayon, on perd le plaisir immĂ©diat d’ĂȘtre en train de dessiner. On travail alors qu’on devrait jouir.
      J’ai l’impression d’enfiler des Ă©vidences, dĂ©solĂ© si c’est le cas.

    • Ce que tu dis @mad_meg me fait penser Ă  ces expĂ©riences que je mĂšne actuellement avec l’aquarelle (pour ne citer que celles-ci). RĂ©cemment j’ai fait une image « conceptuelle » on va dire pour mettre en comparaison des surfaces agricoles vivriĂšres et des surfaces d’agriculture intensives. La façon de reprĂ©senter ces surfaces d’agriculture vivriĂšres n’étaient pas « conformes » : les petites parcelles sont reprĂ©sentĂ©es comme vues du ciel alors que les petites maisons sont reprĂ©sentĂ©es vues de face. Tous ceux qui ont vu l’image terminĂ©e ou en train de se faire n’ont rien vu. Il y a juste une amie peintre qui m’en a fait la remarque. Je lui ai rĂ©pondu oui, je sais, mais je m’en fiche, si j’avais fait les maisons vues du dessus, ça n’aurait pas marchĂ©, alors que comme ça, ça fonctionne trĂšs bien, tout le monde comprends ce que je veux dire. C’est l’intention qui a guidĂ© la technique, en quelque sorte.

    • Le dessin et ici pour ton exemple d’aquarelle ça marche aussi est la transcription d’une idĂ©e. Ici tu voulait faire passer une information de maniĂšre plaisante, le cĂŽtĂ© « photo rĂ©aliste » ou « conforme » du sens des maisons n’a aucune importance dans la transcription de ton idĂ©e. Toi @odilon tu veux qu’on comprenne l’idĂ©e de maison par un signe, pas imiter une vue de Google earth.
      Le dessin me semble ĂȘtre la forme graphique la plus proche de ce qu’est une idĂ©e. Les sculpteurices, les peintres, les architectes, passent presque toutes par un dessin avant de matĂ©rialiser leurs idĂ©es. Le dessin est d’ailleurs utiliser comme systĂšme d’écriture dans les idĂ©ogrammes, mais mĂȘme l’écriture phonĂ©tique abstraite est aussi du dessin, les typographes ne me contredirons pas.

      La technique est trĂšs importante si on cherche Ă  imiter, je pense au dessin d’observation qui demande de la pratique Ă  mon avis mais le fait de bien savoir faire coĂŻncider le degrĂ©s de dĂ©tail nĂ©cessaire avec le message qu’on veut transmettre est aussi de la technique. En fait je sais pas si c’est la technique qui pose problĂšme, elle pose problĂšme quant elle deviens rechercher pour elle mĂȘme et que le message disparaĂźt pour elle.

    • oui oui @mad_meg, je suis tout Ă  fait d’accord. Lorsque je peins un paysage, le dessin entre dans une grande part de l’Ɠuvre finale. Par contre je vais sans doute jouer sur les couleurs et les contrastes pour donner une ambiance particuliĂšre ou mettre une partie plus en valeur. Selon ce qu’on veut faire, on va choisir telle ou telle technique. La technique doit rester un moyen, pas une fin c’est-Ă -dire rester au service du message qu’on souhaite transmettre. Sur la typo je ne vais pas te contredire, je viens des arts graphiques ;) D’ailleurs, c’est pareil pour un travail de graphisme, je commence toujours par dessiner pour poser les idĂ©es. Ou mĂȘme le jardinage, je fais des esquisses avant de faire mes plantations.

    • Tout artiste cherche Ă  dĂ©monter le mĂ©canisme de sa technique pour voir comment elle est faite et pour s’en servir, au besoin, Ă  froid. NĂ©anmoins, une Ɠuvre d’art ne rĂ©ussit que lorsqu’elle a pour l’artiste quelque chose de mystĂ©rieux. Naturel : l’histoire d’un artiste est le dĂ©passement successif de la technique utilisĂ©e dans l’Ɠuvre prĂ©cĂ©dente, par une crĂ©ation qui suppose une loi esthĂ©tique plus complexe. L’autocritique est un moyen de se dĂ©passer soi-mĂȘme. L’artiste qui n’analyse pas et qui ne dĂ©truit pas continuellement sa technique est un pauvre type.

       
      Cesare Pavese, Le métier de vivre

    • En fait je vis le dessin, la peinture, la photo ou le graphisme comme un apprentissage. Je suis toujours en apprentissage. C’est pour ça que j’explore par ci par lĂ  diffĂ©rents mode de reprĂ©sentation. J’ai pratiquĂ© la photo un temps en produisant des images trĂšs personnelles. J’avais portĂ© ce projet en moi longtemps avant de m’y mettre mais sans le penser. Et puis un jour le truc est parti, j’ai pris mon appareil, fait une petite installation et rĂ©alisĂ© une premiĂšre sĂ©rie. Ensuite j’ai travaillĂ© des mises en scĂšne avec diffĂ©rents objets et matĂ©riaux rĂ©flĂ©chissants, et j’ai produits plusieurs sĂ©ries assez diffĂ©rentes en testant d’autres choses. Et puis, comme dans ta citation @lyco, un moment je n’arrivais plus Ă  dĂ©passer cette production, un peu comme si j’étais parvenue Ă  un seuil au-delĂ  duquel je ne pourrais pas produire une nouvelle et belle Ă©motion par ce moyen. J’ai arrĂȘtĂ© la photo.

    • Pour revenir Ă  @tanxxx, je comprends bien son dilemme. Dans ma vie de graphiste, il y eu une pĂ©riode oĂč je travaillais sur des bases riches en couleurs et en contraste avec des dessins au trait que je mettais en fond, etc, bref, un truc un peu personnel qu’on reconnaissait du premier coup d’Ɠil. Et puis voilĂ , j’en avais fait Ă  peu prĂšs le tour et je suis passĂ©e Ă  des graphismes complĂštement dĂ©pouillĂ©s, zen on pourrait dire. Ça ne plaisait pas Ă  beaucoup mais ça a plu Ă  d’autres. Je crois que c’est Ă  ce moment que ma situation c’est vraiment dĂ©gradĂ©. Mais ce n’était pas Ă  cause de ça mais plutĂŽt de la conjoncture (l’arrivĂ©e de la pao dans les services com des collectivitĂ©s locales) et les circonstances (des personnels des collectivitĂ©s locales qui changent avec les prestataires de service) et du fait que je suis complĂštement nulle pour faire de la prospection. Je passe sur les dĂ©tails, c’est un peu long. Donc je me suis retrouvĂ©e Ă  manger beaucoup de pommes de terre et Ă  couper le gaz pour me chauffer uniquement avec du bois dans la petite cheminĂ©e et c’était juste :). L’option qui me restait Ă©tait de me faire embaucher dans une boite. Et lĂ , rien qu’à l’idĂ©e, j’en avais une boule dans la gorge. Non pas que je ne voulais pas ĂȘtre salariĂ©e, mais le boulot en agence, j’ai testĂ© 4 mois, ne m’intĂ©resse pas. J’ai tenu comme ça et j’ai dĂ©couvert la carto, celle notamment de quelqu’un qui nous est cher ici. Ça m’a apportĂ© un nouveau regard sur la façon de penser le comment raconter une histoire parce que finalement, faire une image, c’est raconter une image.
      Tout ça pour dire que la façon dont on exerce son mĂ©tier de dessinatrice ou de peintre ou de graphiste Ă©volue aussi en fonction de sa propre histoire, des rencontres, des dĂ©couvertes, des bouleversements. Pourquoi devrait-on avoir une production picturale linĂ©aire alors que la vie ne l’est pas. Quand on parle de maitrise d’une technique ou d’un outil, en fait j’ai le sentiment qu’il ne nous apporte plus rien, qu’il ne nous surprend plus, bref, qu’on s’emmerde. A l’inverse, on peut trouver un intĂ©rĂȘt toujours renouvelĂ© dans la perfection du dĂ©tail comme toi tu fais @mad_meg moi je trouve ton travail magnifique. Alors au-delĂ  de toute considĂ©ration, il faut tenir compte aussi du plaisir Ă  faire ce qu’on fait. Je sais pas si l’artiste doit se dĂ©passer, faire de l’art pour de l’art ça me parait pas trĂšs intĂ©ressant comme programme, il faut surtout avoir un truc Ă  raconter.