city:bergson

  • « Pédés », « Pirate somalien », mains au cul : garde-à-vue pour 4 lycéens de Bergson
    https://paris-luttes.info/home/chroot_ml/ml-paris/ml-paris/public_html/local/cache-gd2/5a/c2c8ddee2b439bbc15bba85c6971fb.jpg?1507672625
    https://paris-luttes.info/pedes-pirate-somalien-mains-au-cul-8853

    Quatre lycéens du lycée Bergson (Paris 19e) ont été mis en garde-à-vue à la suite d’une tentative de blocus ce 10 octobre. Ils passent la nuit au commissariat et y ont déjà subi harcèlement et humiliation.

    @rezo

    • Communiqué sur les arrestations devant le lycée Bergson mardi 10 octobre 2017, CGT Éduc’action Paris, CNT FTE 75, Sud éducation Paris
      https://paris-luttes.info/communique-syndical-sur-les-8873

      Mardi 10 octobre 2017 une journée de grève et de mobilisation était appelée dans la fonction publique. Des travailleuses et travailleurs du secteur privé s’y sont joints pour poursuivre la lutte contre la loi travail XXL. La grève a été très suivie dans l’éducation nationale.
      Dans la matinée, de nombreux lycées parisiens ont été bloqués par les élèves (Voltaire, Arago, Lamartine...).

      Devant le lycée Bergson (19ème arrondissement), bloqué par les élèves, quelques poubelles ont pris feu. La police est intervenue et a arrêté plusieurs collégiens et lycéens.
      Certains sont sortis après un contrôle d’identité, mais quatre d’entre eux ont été placés en garde-à-vue.

      Deux collégiens de 13 ans et deux lycéens sont restés jusqu’à 48 heures en garde-à-vue ! Ces deux derniers ont été déférés au tribunal et ont comparu devant un juge pour mineurs ce jeudi 12 octobre au matin. Nous ne savons pas ce qu’il en est.
      Les élèves relâchés après contrôle d’identité ont témoigné d’insultes à caractères racistes et homophobes, d’humiliations et de menaces de la part des policiers à l’intérieur du commissariat.

      Nous condamnons ces interpellations et l’usage d’intimidations et d’humiliations à l’égard de ces élèves qui sont resté enfermés pendant 48h !

      Déjà en 2016, pendant le mouvement contre la loi travail, des policiers avaient frappé des élèves devant le lycée Bergson. Un des policiers auteur des violences a été condamné depuis. Nous nous alarmons de cet acharnement.

      C’est la liberté de manifester pour les jeunes qui est gravement attaquée.

      Face à la répression, nous ne nous tairons pas et réaffirmons notre solidarité avec les jeunes mobilisés et leur famille.

      #Justice

    • « Que Bergson ne bouge ! », 1972, Paris XIX, lycée Bergson, trouvé dans Tiens ils ont repeint !
      https://seenthis.net/messages/656170

      Appel à manifester en soutien aux collégien.ne.s et lycéen.ne.s mobilisé.e.s Jeudi 18 janvier 2018 à 18h devant le lycée Bergson

      En 2016, pendant le mouvement contre la loi Travail, des policiers frappent des élèves devant le lycée Bergson. Le 24 mars notamment, A. reçoit un coup de poing. Un des policiers auteur de ces violences a été condamné depuis et un autre doit comparaître le 30 mars 2018.
      Ce 24 mars 2016, les lycéen.ne.s sont victimes de nombreux coups et certains subissent des gardes à vue violentes et humiliantes. Ainsi S.est frappé, perd connaissance et les pompiers doivent le ré-animer. Il est arrêté puis mis en garde à vue. S. est mineur au moment des faits.
      Trois éléments de loi essentiels à la Protection des Mineurs ne vont pas être respectés :
      – Il est gardé à vue pendant 48h sans qu’aucun responsable légal ne soit prévenu de sa détention.
      – Ses auditions ne sont pas filmées.
      – Il est relâché, seul, alors qu’il aurait dû être remis à un
      responsable légal à sa sortie du commissariat.
      Et pourtant c’est quand même lui qui a été convoqué par la justice et reconnu coupable un an et demi plus tard, le 27 novembre 2017. Condamné à 3 mois de prison avec sursis, 18 mois de mise à l’épreuve et 1 500 € d’amende ! La justice condamne, les violences policières continuent.

      Mardi 10 octobre 2017, une journée de grève et de mobilisation est appelée dans la fonction publique contre la loi Travail XXL. La grève est très suivie dans l’Éducation Nationale. Dans la matinée, de nombreux lycées parisiens sont bloqués par les élèves.
      Devant le lycée Bergson, quelques poubelles prennent feu. La police intervient et arrête plusieurs collégiens et lycéens. Certains sortent après un contrôle d’identité, mais d’autres sont placés en garde-à-vue.
      Au moins un élève de 13 ans et deux lycéens restent jusqu’à 48 heures en garde-à-vue. Ces deux derniers ont été déférés au tribunal et ont comparu devant un juge pour mineurs le jeudi 12 octobre. Certain.e.s, relâchés après contrôle d’identité, ont témoigné d’insultes racistes et
      homophobes, d’humiliations et de menaces à caractère sexuel de la part des policiers à l’intérieur du commissariat.

      Nous dénonçons ces interpellations, les violences policières et les intimidations et humiliations à l’égard des jeunes mobilisé.e.s., des pratiques qui sont quotidiennes dans ce quartier comme dans tous les quartiers populaires.

      Nous dénonçons aussi la complicité de l’administration du lycée qui filme les élèves, collabore éhontément avec la police et organise la double peine en convoquant des conseils de discipline qui votent l’exclusion des élèves « avec sursis ». Un langage emprunté aux tribunaux.

      À Bergson, comme au lycée Suger à St Denis, au lycée Léonard de Vinci à Levallois-Perret, la liste est longue des établissements qui collaborent avec la police et oublient leurs missions de protection en livrant les jeunes à la police. Plus récemment à Cachan, le 23 novembre dernier, une lycéenne a perdu un œil lors d’une manifestation devant son établissement suite à un tir de flash ball par la police. Déjà en 2010, à Montreuil, devant le lycée Jean Jaurès mobilisé contre la réforme des retraites, un autre jeune avait été mutilé après un tir de flash ball.
      Pourtant nous savons que dans d’autres établissements, des équipes éducatives s’assurent que la police n’interviendra pas lors des blocages.

      Nous dénonçons les récentes interventions de police dans les universités pour déloger une occupation ou empêcher des réunions : jeudi 7 décembre, pour la troisième fois en deux semaines, la police a expulsé de l’Université Lille 3 les étudiant-es et personnels qui tenaient une conférence. À Paris 8 le même jour, police et gendarmerie sont venus faire du recrutement au sein même de l’université lors d’un forum de l’emploi.

      Face aux violences, aux provocations, aux humiliations, visant à faire taire la jeunesse très présente et déterminée lors du mouvement contre la loi Travail, nous appelons tou-te.s les acteurs.trices du mouvement social à venir manifester pour dénoncer la répression policière, judiciaire et administrative*.

      Rendez-vous
      Jeudi 18 janvier 2018 à 18h
      devant le lycée Bergson
      rue Edouard Pailleron métro Laumière ou Jaurès
      pour aller en direction du commissariat
      du 19ème arrondissement rue Erik Satie

      *répression administrative : dans les collèges et lycées, le/la chef.fe d’établissement peut convoquer un conseil de discipline. Il est composé majoritairement de représentants de l’administration, de parents et de professeurs. Le/la chef.fe d’établissement peut cependant prononcer seul.e une sanction, sans passer par le conseil de discipline.

  • La manifestation de soutien à un lycéen frappé par la police s’achève par des incidents
    https://www.mediapart.fr/journal/france/250316/la-manifestation-de-soutien-un-lyceen-frappe-par-la-police-sacheve-par-des

    Les policiers frappant un lycéen. Une manifestation était organisée, vendredi 25 mars au matin, pour protester contre des #violences_policières sur un lycéen de Bergson à Paris. Des incidents ont éclaté : les lycéens ont jeté des projectiles sur deux commissariats dans les XIXe et Xe arrondissements.

    #France #Code_du_travail #loi_travail #manifestations #Myriam_El_Khomri

  • Une manifestation de soutien à un lycéen frappé par la police s’achève par des incidents
    https://www.mediapart.fr/journal/france/250316/une-manifestation-de-soutien-un-lyceen-frappe-par-la-police-sacheve-par-de

    capture-d-e-cran-2016-03-25-a-18-10-55 Une manifestation était organisée, vendredi 25 mars au matin, pour protester contre des #violences_policières sur un lycéen de Bergson à Paris. Des incidents ont éclaté : les lycéens ont jeté des projectiles sur deux commissariats dans les XIXe et Xe arrondissements.

    #France #Code_du_travail #loi_travail #manifestations #Myriam_El_Khomri

  • Incidents lors d’une manifestation de soutien au lycéen frappé jeudi par la police
    https://www.mediapart.fr/journal/france/250316/incidents-lors-dune-manifestation-de-soutien-au-lyceen-frappe-jeudi-par-la

    Violences policières sur un élève du lycée Bergson (Paris). © DR Une manifestation était organisée, vendredi 25 mars au matin, pour protester contre des #violences_policières sur un lycéen de Bergson à Paris. Des incidents ont éclaté : les lycéens ont jeté des projectiles sur deux commissariats dans les XIXe et Xe arrondissements.

    #France #Code_du_travail #loi_travail #manifestations #Myriam_El_Khomri

  • Edit : ceci est bien une autre vidéo d’un deuxième lycéen de Bergson qui s’est fait matraqué.

    Un policier en civil va jusqu’à frapper à coup de matraque le visage d’un lycéen

    https://twitter.com/Lies_Breaker/status/713120513846067203

    https://video.twimg.com/ext_tw_video/713120419671379968/pu/vid/360x640/WW0k1g56WIppI8uh.mp4

    La vidéo n’est pas datée, mais visiblement ça se passe à Paris. En tout cas l’extrême violence des lycéens est bien visible... Comme c’est relaté ici :

    Ce qu’il s’est passé à Bergson ce matin
    https://paris-luttes.info/ce-qu-il-s-est-passe-a-bergson-ce-5161

    Edit :

    C’était bien hier au Lycée Bergson, on reconnaît le policier sur ces photos publiées par
    @paris Luttes

    Edit :

    Pour mémoire, voici la vidéo du lycéen qui s’est pris un coup de poing. C’est celle-ci qui a fait les JT :

    https://www.youtube.com/watch?v=ETuxcaSnlc8

    Aujourd’hui une autre vidéo d’un « passant » matraqué à Nantes a été publiée :

    http://www.presseocean.fr/actualite/nantes-un-homme-blesse-en-marge-de-la-manif-la-police-des-polices-saisie

    https://www.facebook.com/nolwenn.saget/videos/10207663983670387

    https://video-cdg2-1.xx.fbcdn.net/hvideo-xlp1/v/t42.1790-2/12898919_980040708745135_1445270972_n.mp4?efg=eyJybHIiOjQ1MSw

  • Au Kenya, l’énigme des premiers outils

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2016/01/04/au-kenya-l-enigme-des-premiers-outils_4841519_1650684.html

    Sammy Lokorodi trace des signes dans la terre. Les yeux rivés au sol, il rejoue la scène. «   Vous voyez, on était là, on cherchait. Et puis, on les a vus.   » Le Kényan de 38  ans, originaire de la région du Turkana, dans le nord-ouest du pays, ouvre grand les yeux. «   Si vous n’avez pas l’œil, si vous ne les connaissez pas, vous ne les voyez pas   », s’amuse-t-il. Il enchaîne  : «   On a appelé le reste de l’équipe… On leur a dit   : “Venez, venez, venez  !” Ces pierres-là, elles n’étaient pas comme les autres.  » Sammy rigole. Ce jour-là, il avait trouvé les plus vieux outils de l’histoire de l’humanité.

    Désormais évaluée à 3,3 millions d’années, l’invention de la technologie a été repoussée 700 000  ans en arrière. La découverte ne doit rien au hasard   : elle est le résultat d’une bien longue aventure. Sammy Lokorodi, avec ses longues chaussettes blanches bien remontées le long des mollets, n’en est pas à ses premières prospections. Depuis dix ans, il est l’un des meilleurs «   prospecteurs  » de l’équipe de Sonia Harmand, archéologue à l’origine de la découverte, à la tête de la mission préhistorique française au Kenya, financée depuis 1994 par le ministère français des affaires étrangères, qui fouille ­chaque année sur la rive occidentale du lac Turkana.

    Le Turkana  : berceau et Far West de l’humanité. Lodwar, capitale de la région, avec ses rues agitées, ses armes bon marché, ses petites maisons sans étages et sa piste d’atterrissage cabossée, a tout du western.(...)

    On s’éloigne de la ville, on croise les derniers poteaux électriques, les derniers restes d’asphalte, les dernières antennes paraboliques. De jeunes bergers fouettent leurs chèvres, observent à distance des troupeaux de dromadaires sauvages. Des groupes de femmes en tuniques colorées, une trentaine de colliers autour du cou, marchent dans le désert, canne à la main et petit tabouret de bois porté sous l’aisselle. La vision est irréelle, hors du temps. Le « berceau » de l’humanité n’est pas très loin du bout du monde. A plus de 1 000 kilomètres et quatre jours de route de l’océan, la seule fraîcheur vient du lac Turkana, bijou du Grand Rift, « mer de jade » qui s’étale du nord au sud, sur 300 kilomètres de long et une trentaine de large, alimenté par les lagas, rivières éphémères et redoutables, gonflées par les orages d’altitude.

    C’est en amont de ces cours d’eau que l’on trouve les sites archéologiques. « Ne marchez pas n’importe où : vous risquez de détruire des preuves ! », prévient Sonia Harmand. En cette fin novembre, l’archéologue emmène un groupe d’étudiants à Lomekwi 3, où ont été retrouvés les outils. Les jeunes gens la suivent en file indienne, bien disciplinés. Au sol, s’étale un tapis surnaturel de fossiles de poissons et d’hippopotames préhistoriques, d’éclats brisés et d’outils taillés vieux de plus de 3 millions d’années. L’homme est là, partout.
    Pas loin, un monolithe couleur de boue célèbre le « Turkana Boy », jeune homme vieux de 1,5 million d’années, dont le squelette a été découvert derrière une petite colline effondrée. Malgré l’éloignement, on ne se sent jamais seul très longtemps au Turkana.

    « Rock Star »

    A 41 ans, dont dix-sept à fouiller le Rift, Sonia Harmand, chercheuse au CNRS et enseignante à l’université américaine de Stony Brook (New York) avec le Turkana Basin Institute, cumule les surnoms, les égrène avec plaisir. « Rock Star » depuis sa découverte, ou encore « Indiana Jones sans le fouet », elle est aussi « mama » pour les Turkanas, qui la considèrent comme faisant partie de la famille. Chef du « village gaulois » ou du « French camp », elle mène chaque année, au mois de juillet, une équipe d’une trentaine de chercheurs et de fouilleurs franco-américano-kényans sur les routes du Turkana.

    La passion du Rift, elle l’a au cœur depuis sa première visite au Kenya, à l’âge de 18 ans. « Mes parents m’avaient offert un voyage au Kenya. A l’époque, je lisais tous les aventuriers africains, Kessel, Monfreid, et les autres. » Après quelques jours de safaris, elle fait face à la faille du Grand Rift. « Ça a été un vrai choc émotionnel. J’avais impression que ce paysage m’était familier. Il y avait quelque chose de mystique dans ce que j’ai ressenti ce jour-là. »
    La jeune femme s’oriente vers l’archéologie. Parcours cinq étoiles : Sonia Harmand réalise sa première fouille à Tautavel (Pyrénées-Orientales), gratte le sol pas loin de Palmyre, en Syrie (où elle croise la route de l’archéologue Khaled Assaad, qui sera assassiné le 18 août 2015 par l’organisation Etat islamique). Mais son cœur reste fidèle au Rift, où elle débarque en 1998, dans les pas de l’archéologue Hélène Roche.

    Sonia Harmand reprend en 2011 la direction de la mission préhistorique au Kenya et décide immédiatement d’orienter les recherches vers des zones plus anciennes. Les réticences sont nombreuses. Mais l’archéologue est obstinée. Le 9 juillet 2011, elle part avec son équipe à l’assaut du Turkana. « On avait les cartes à la main, raconte-t-elle. Mais on a pris un mauvais tournant, et on s’est un peu perdus. » Le petit groupe monte sur une colline, cherche des yeux la direction du lac.
    « Et là, on a vu le site. » L’endroit est sublime : un cirque bouillonnant et minéral, aux mille nuances d’ocre et de brun. « C’était un endroit différent. On savait qu’on marchait sur des sols très anciens. On s’est dit tout de suite qu’on pourrait peut-être trouver quelque chose. »

    Lomekwi 3 comme un champ de tulipes

    L’exploration commence. La quinzaine d’archéologues et de fouilleurs marche en ligne, les yeux rivés au sol. Les minutes passent. Les groupes s’éloignent, se perdent de vue. « Et puis, soudain, j’ai entendu mon talkie-walkie grésiller, se souvient Sonia Harmand, C’était un membre de l’équipe qui m’appelait. Sammy avait trouvé quelque chose. J’ai marché dix minutes. J’ai senti que mon pas s’accélérait. »

    Au sol, les « cailloux ». La « peau » ne trompe pas : beige clair, gris pâle. « On voyait bien que ces roches n’étaient pas restées très longtemps en surface, qu’elles n’avaient pas été polies par les vents et le sable, raconte Sonia Harmand. J’ai vu les cicatrices sur les pierres, les éclats retirés délibérément : il n’y avait aucun doute. » L’équipe se regroupe, plante au sol des dizaines de petits drapeaux colorés rouges et orangés, signalant la présence d’outils ou de fossiles. « C’était comme un petit champ de tulipes. » Lomekwi 3 est né.

    Débute alors un long travail. Il n’y a pas le droit à l’erreur : sept géologues se succèdent sur le site afin de dater les outils. « Quand on travaille sur une période si ancienne, on ne peut pas faire usage du carbone 14, explique Xavier Boes, l’un des géologues de l’équipe. Il a fallu se fonder sur l’analyse stratigraphique des tufs – des roches volcaniques projetées lors des éruptions – trouvés à proximité des sites et dont on connaît l’âge radiométrique. Mais tout ça prend du temps : il faut marcher depuis l’endroit où l’on trouve les tufs jusqu’au site, compter les couches sédimentaires successives. » La publication de l’article dans Nature prendra quatre ans. Sur la couverture : deux mains, deux roches et un titre : « L’aube de la technologie ».

    Retour en arrière : moins 3,3 millions d’années. Le site de Lomekwi est alors au cœur d’une forêt galerie, faite de buissons et d’arbres de faible hauteur. Un premier grand lac vient à peine de se retirer. Mais déjà, de petits groupes d’hominidés s’activent le long des cours d’eau. « On sait très peu de chose sur eux, explique Jason Lewis, paléontologue et codirecteur du projet. On était dans une phase bipède, on ne marchait probablement pas trop mal. Les hominidés de cette époque devaient faire entre 1 mètre et 1,50 mètre. » Le visage était très proche de celui des grands singes, mais la taille des canines et de la mâchoire déjà réduite. « La capacité manuelle des hominidés était plus importante que pour le chimpanzé. Le pouce était plus long et détaché : ils pouvaient faire le salut du scout ! »

    Cent vingt pierres taillées ont été retrouvées à Lomekwi 3. Pour fabriquer les objets, deux techniques ont été employées : celle du percuteur dormant, où le bloc à tailler (dit « nucleus ») est frappé sur une enclume de pierre, afin de le faire exploser et de créer des éclats tranchants ; et celle de la percussion bipolaire sur enclume, plus élaborée, où l’on frappe avec une première pierre sur une seconde, elle-même posée sur une troisième. Les pierres retrouvées à Lomekwi 3 sont grosses. « On les appelle les “pavetons” », s’amuse Sonia Harmand. Les hominidés de l’époque n’avaient en effet probablement pas encore les capacités pour tailler des pierres de petite taille, comme on en trouve sur des sites plus « récents », tels les galets oldowayens, vieux de 2,6 millions d’années.

    Percussion bipolaire

    Mais attention : si les deux techniques sont « simples, elles ne sont pas primitives ! », insiste Sonia Harmand. La percussion bipolaire nécessite en effet une désynchronisation des deux bras et donc une capacité cognitive développée. « Lomekwi n’est pas le fruit du hasard. Pour détacher les éclats, il fallait une connaissance des angles, une maîtrise de sa propre force. Les roches ont été sélectionnées. Il y a eu un apprentissage, une transmission de la fabrication. Enfin, nos ancêtres ont fabriqué des éclats tranchants en grande quantité. Il y avait un contrôle de la production. »

    La découverte pose des défis majeurs à la paléontologie. En effet, à – 3,3 millions d’années, on n’a découvert jusqu’à présent aucun représentant du genre Homo, dont nous, Homo sapiens, l’homme moderne, sommes issus. Les restes des premiers Homo datent en effet (au mieux) de 2,8 millions d’années : 500 000 ans trop court pour les outils de Lomekwi.

    L’invention de l’outil, premier acte technologique et culturel de l’histoire, ne serait donc pas de notre fait. La découverte est vertigineuse et mettrait fin au sacro-saint Homo faber, cher à Bergson, où l’outil fait l’homme, par opposition à l’animal. « Nous devons nous redéfinir, explique Jason Lewis. Soit nous acceptons que nous faisons partie d’un ensemble plus vaste et que nous partageons la technologie avec l’animal, car les outils ont probablement été inventés par des espèces plus proches de l’ancêtre commun avec le singe. Soit on est exclusif, et on se dit que la spécificité de l’homme ne repose pas sur les outils. Peut-être davantage sur la maîtrise du feu... »

    A Lomekwi, les paléontologues du Turkana ont trois suspects. Deux australo-pithèques : Australopithecus afarensis (mieux connu du grand public sous le nom de « Lucy », découverte en Ethiopie) et Australopithecus deyiremeda (qui vivait dans la région entre 4,1 et 3 millions d’années). Le troisième candidat est plus sérieux, mais ne fait pas l’unanimité. Il s’agit de Kenyanthropus platyops, découvert en 1999 au Turkana, et dont des restes ont été retrouvés non loin du site, mais dont l’existence comme genre à part est contestée par de nombreux scientifiques.

    « Australopithecus habilis »

    Faut-il aussi débaptiser le pauvre Homo habilis, qui perd à Lomekwi son statut d’inventeur de l’outil, et donc d’« habile » ? « En fait, on pourrait même retirer Homo, explique Jason Lewis. Les récentes recherches sur le squelette et le crâne d’Homo habilis montrent qu’il est un melting-pot de différentes espèces, on trouve dans son crâne des caractéristiques d’Homo, mais aussi d’australopithèque et de chimpanzé. On pourrait même l’appeler Australopithecus habilis... »
    L’homme vient du flou, sa généalogie est embrouillée, ses origines en suspens. Quel lien entre australopithèque et Homo ? Plusieurs espèces vivaient-elles à la même période au même endroit ? Se sont-elles influencées pour l’invention des premiers outils ? La mission préhistorique tente aujourd’hui d’approfondir sa découverte. Des études tracéologiques sont en cours, traquant la présence de résidus de sang ou de végétaux sur les « pavetons » lomekwiens afin d’en déterminer l’usage. « Pour comprendre ces outils, il faut aussi les refaire », ajoute Sonia Harmand. Elle et son équipe ont collecté pour 700 kg de roches près du site et tenté en 2013 et 2014, avec succès, de récréer les outils.

    Le Turkana, il faudra y revenir. « Rappelons-nous que toutes nos conclusions ne reposent que sur un seul site ! », insiste Sonia Harmand. Seule une petite partie de Lomekwi a été excavée, d’autres sites sont à explorer. Sonia Harmand tourne aujourd’hui son regard vers les chaînes basaltiques du Turkana, plus à l’est : « Toute cette région est totalement inexplorée... », souffle l’archéologue. Sisyphe du Turkana, elle sait que les outils de Lomekwi sont déjà bien trop élaborés et sophistiqués. S’ils sont les plus anciens jamais découverts, ils ne sont certainement pas les premiers. « Les tout premiers, ils seront sûrement trop proches d’un simple caillou. Ils seront très difficiles à reconnaître. On ne les retrouvera probablement jamais. »