• How maps are used and abused in times of conflict

    Maps, although seemingly objective representations of the world, hold immense power. They shape our understanding of space, navigate our journeys and define political boundaries. But beneath the veneer of neutrality lies a potential for manipulation.

    The history of warfare is littered with examples of maps used to dehumanise the enemy. Some of these are very explicit. Satirical maps were produced by all sides in the first world war, depicting Europe as a series of caricatures to dehumanise enemy states and push a victorious war narrative.

    Other examples are less obvious. In the Vietnam war, the US military produced maps that designated specific regions of Vietnam as “free-fire zones”, meaning any person or activity within that zone could be considered hostile and targeted with military force. This tactic effectively erased the civilian population from the map, treating the entire area as an enemy stronghold.

    The dehumanising effect of maps stems from their inherent abstraction. Maps simplify reality by reducing a complex landscape teeming with life and history into lines, symbols and colours. While necessary for clarity, this simplification often has the consequence of stripping away the human element.

    For example, the below map shows the locations of known Russian military strikes and ground attacks after its invasion of Ukraine in February 2022. The map uses symbols to simplify the conflict. Later we would learn that one of these cartoon-like icons represents the Bucha massacre in which 458 Ukrainian civilians and prisoners of war were reportedly killed by Russian forces.

    Fuelling conflict

    Maps can also be used to reinforce the “us v them” mentality that fuels conflict. They create a visual distinction between “our side” and “theirs” by starkly delineating enemy territory.

    In the lead-up to the Rwandan genocide in 1994, extremist Hutu media outlets produced maps that categorised Rwandans by ethnicity: Hutu and Tutsi. These maps weren’t just geographical representations, they were tools for identification and targeting.

    The maps often used contrasting colours to sharply divide Hutu and Tutsi areas. This visual distinction created a clear separation between the in-group (Hutu) and the out-group (Tutsi), promoting the idea that Tutsis were not part of the Rwandan fabric.

    Some maps went further, using symbols like machetes or snakes to represent Tutsis, portraying them as violent and dangerous. These maps were widely distributed through newspapers and radio broadcasts. They not only identified Tutsis but also served as visual propaganda that justified violence against them.

    This visual separation fosters a sense of distance and difference, making it easier to view the enemy as an abstract threat rather than fellow human beings. Propaganda maps exploit this effect by exaggerating the size of enemy territory or depicting enemy populations as faceless masses.
    Removing the human from the map

    The Israel Defence Force’s introduction of grid maps to Gaza in December 2023 has introduced another way of dehumanising populations. Similar to the free-fire zones of the Vietnam war, Israel has divided Gaza into more than 600 blocks, ostensibly to aid in evacuating civilians.

    Each block on the map, which can be accessed through a QR code on leaflets and social media posts, can receive evacuation warnings before the bombardment of a given square. However, aid workers have warned that the map risks turning life in Gaza into a “game of battleships” in which the flattening of any grid square is justified under the pretence that it is an empty space on a map.

    Maps also have an impact on the way we, as observers, view conflict. This can extend beyond the battlefield. Maps often depict refugees as a homogeneous mass, neglecting the individual stories and desires that drove them from their homes.

    In the early stages of Russia’s invasion of Ukraine, for example, the BBC came under fire for one map in which it used arrows to depict the movement of refugees. People on social media suggested that these symbols insinuated invasion rather than fleeing. Following criticism, the BBC updated the map to use proportional circles instead.


    Lessons are being learned

    The dehumanisation inherent in war maps is not inevitable. Including civilian infrastructure and population density on military maps, for instance, can serve as a constant reminder of the human cost of conflict. Oral histories and community mapping projects can also offer alternative perspectives on the land, highlighting the human stories often erased by military cartography.

    The Gaza conflict has shown that lessons are being learned about how better to use maps during conflict. Reuters, for example, has employed maps alongside other text and visual elements to help tell a fuller story and complete what maps alone might never be able to do.

    Ultimately, maps are tools that can be used for good or ill. We must strive to see beyond the lines and symbols, and remember the human beings whose lives are impacted by the conflicts depicted on maps.

    https://theconversation.com/how-maps-are-used-and-abused-in-times-of-conflict-227077
    #cartographie #cartes #conflits #guerre #déshumanisation #propagande
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  • En Israël, les entrepreneurs face au dilemme de la main-d’œuvre palestinienne
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/03/23/en-israel-les-entrepreneurs-face-au-dilemme-de-la-main-d-uvre-palestinienne_

    En Israël, les entrepreneurs face au dilemme de la main-d’œuvre palestinienne
    Par Jean-Philippe Rémy (envoyé spécial, Jérusalem et Tel-Aviv)
    L’annulation, après l’attaque du 7 octobre, des permis grâce auxquels 200 000 travailleurs de Cisjordanie entraient chaque jour sur le territoire israélien, a plongé le secteur du BTP dans la crise.
    Au-dessus de l’autoroute saturée où les voitures roulent pare-chocs contre pare-chocs, l’échangeur inachevé semble suspendu dans les airs, comme une promesse non tenue de fluidité du trafic. Il manque des morceaux géants de tablier, à une vingtaine de mètres du sol, rendant inutilisable ce nœud autoroutier, aux abords de Tel-Aviv. Au-delà de l’embouteillage, la ville se devine au loin avec ses tours, souvent entourées de grues à l’arrêt. Partout, les chantiers d’infrastructures paraissent gelés, faute d’ouvriers pour les mener à bien. C’est l’un des effets de la guerre entre Israël et le Hamas, dont les répercussions économiques sont profondes.
    Les travailleurs palestiniens qui bâtissaient le réseau routier et qui montaient les immeubles en Israël n’ont pas déserté au début du conflit, déclenché par le massacre du 7 octobre 2023. Leurs permis ont été collectivement annulés. Sur les 200 000 habitants des territoires occupés autorisés à travailler en Israël avant la guerre, 80 000 étaient employés dans le secteur du bâtiment. Un rapport de l’Organisation internationale du travail a établi, à la mi-mars, que plus de 300 000 emplois – tous secteurs confondus – avaient été perdus au total en Cisjordanie depuis le 7 octobre. Conséquences directes : un manque à gagner de 25,5 millions de dollars par jour (23,5 milliards d’euros) et un taux de chômage qui devrait atteindre 42,7 % fin mars. Hativ Morad, un entrepreneur palestinien d’Israël, se désole pour ses ex-employés de Cisjordanie : « On était soixante au total dans la société, on n’est plus que six, dont mes trois enfants. Tous ces employés ne touchent rien, et ils n’ont pas d’économies. Leur situation est terrible. »
    Au centre de Tel-Aviv, au 11e étage de la tour Migdal Shalom – la première de la ville, construite en 1965 –, Raul Srugo, le président de l’Association des constructeurs d’Israël, fait les comptes de ce désastre, côté entrepreneurs. Le BTP représente 6,2 % du produit national brut israélien, et contribue pour près de 20 % aux taxes perçues par l’Etat, engendrant une perte de revenus fiscaux depuis le 7 octobre qu’il estime à 10 milliards d’euros. La moitié environ des chantiers du pays est à l’arrêt. Les autres fonctionnent en sous-régime. Les 80 000 travailleurs de Cisjordanie sont traditionnellement chargés du gros œuvre dans le bâtiment. Les finitions, dans une subdivision du travail aux règles non écrites, incombent aux Palestiniens d’Israël.
    Une partie des 25 000 travailleurs migrants présents en Israël avant le 7 octobre ont quitté le pays. Certains sont revenus, mais en nombre insuffisant pour assurer la continuité des travaux. « La Chine ne veut pas que ses travailleurs retournent en Israël, parce qu’ils sont dans l’autre camp, celui de la Russie et de l’Iran. Alors on cherche à faire venir, en ce moment, des Indiens », explique Raul Srugo. Derrière cette situation de crise se dessine, en filigrane, une crise plus profonde que celle donnée à voir par les statistiques macroéconomiques. Une partie de l’opinion est viscéralement opposée au retour des travailleurs palestiniens dans les villes. Et certains entrepreneurs tentent de penser un monde d’après la guerre, sans cette main-d’œuvre.
    Le PDG d’une des plus importantes compagnies de construction du pays, qui rentre d’un séjour en Moldavie pour y recruter des travailleurs, commence par avancer : « Après le 7 octobre, je ne vois pas comment nous pourrions envisager de voir les travailleurs palestiniens revenir dans nos villes. » Puis il se reprend, affirme que c’est son épouse qui le pousse dans cette voie : « Elle a peur pour les enfants, vous comprenez, on ne peut pas les laisser partir à l’école avec des Palestiniens dans la ville », plaide-t-il. Puis il demande qu’on ne cite pas son nom, embarrassé par ses propres propos, pourtant similaires à ceux tenus par de nombreuses sources.
    Raul Srugo dénonce cette « illusion dangereuse » et explique : « On peut se mettre la tête dans le sable et se dire : “On ne travaillera pas avec les Palestiniens”, mais c’est complètement irréaliste. D’abord, on a besoin de travailler ensemble, et, de plus, on ne pourra jamais remplacer totalement les gens avec qui on a l’habitude de fonctionner. » Des organisations professionnelles sont actuellement en train de recruter à tour de bras des ouvriers en Inde, en Moldavie ou au Sri Lanka, trois pays avec lesquels Israël a signé des accords bilatéraux pour favoriser les transferts de main-d’œuvre. Seuls quelques centaines de ces employés sont jusqu’ici arrivés sur le territoire israélien, une goutte d’eau.
    A Givat Shmuel, une agglomération prospère non loin de Tel-Aviv, Amit Gotlib a dû interrompre ses chantiers d’immeubles de luxe. « Balagan ! » (« C’est le chaos »), se désole-t-il. « On a travaillé avec des Palestiniens depuis toujours. On se sentait comme une famille. Certains étaient dans cette entreprise, que mon père a fondée il y a vingt-sept ans, bien avant que je ne la rejoigne moi-même. Mais ce temps est terminé. Il nous faut des travailleurs étrangers, et il faut que le gouvernement nous aide en supprimant la bureaucratie. Même les clients ne veulent plus qu’on ait des Palestiniens sur les chantiers où l’on construit leurs maisons. Moi, avant le 7 octobre, je faisais la différence entre les terroristes et les autres. Désormais, je ne sais plus… »Des maires de villes de l’étroite plaine côtière, entre Tel-Aviv et la Cisjordanie, ont fait de cette peur des Palestiniens un thème de campagne, notamment à l’approche des élections municipales du 27 février. Il s’agissait de capitaliser sur les peurs des électeurs pour bénéficier de leurs suffrages. « Les maires ont joué sur la corde de la peur des Palestiniens pour se faire élire. C’est de la schizophrénie ! Ils savent pourtant très bien qu’ils ont besoin de travailleurs, à commencer par leurs municipalités », analyse une source au sein du secteur, qui refuse de voir son nom cité. Tout comme les édiles de la région refusent de reconnaître qu’ils s’échinent à purger leurs centres-villes de toute présence palestinienne.La peur et son exploitation l’emportent largement sur le réalisme, estime Raul Srugo : « Bien sûr, rien ne sera plus jamais comme avant. Le 7 octobre constitue un traumatisme majeur. Mais il est illusoire de se figurer qu’on va se séparer des Palestiniens. Nous avons des besoins mutuels, et c’est injuste de condamner tout le monde. Il y a des gens qui ont juste besoin de gagner leur vie. Et du reste, de tous les employés du secteur de la construction, depuis vingt ans, aucun n’a été impliqué dans un acte de violence. »
    L’économie d’Israël est « dépendante des travailleurs palestiniens depuis 1967 [date de la conquête et de l’occupation de Gaza, Jérusalem-Est et de la Cisjordanie, lors de la guerre des Six-Jours], rappelle Efrat Tolkowsky, spécialiste des questions d’immobilier à la faculté Reichman, à Herzliya, au nord de Tel-Aviv, avant d’ajouter : C’est très triste ce qui est arrivé récemment. Certaines villes ont interdit aux travailleurs palestiniens de pénétrer dans le centre, après que des plaintes sont parvenues à la municipalité. » Un phénomène impossible à quantifier, mais encouragé par une partie de la classe politique, à l’instar de Gideon Saar, un ancien ministre de la justice. « Laisser pénétrer en Israël des travailleurs venus d’un territoire peuplé d’ennemis alors que nous sommes en pleine guerre serait une erreur terrible que nous paierions au prix du sang », a-t-il récemment déclaré.
    A Ra’anana, une banlieue chic au nord de Tel-Aviv, les projets immobiliers sont en grande partie à l’arrêt. Ron Brick, à la tête de la compagnie Liran, opérait jusqu’au 7 octobre dans ce secteur. « On était certains que les Palestiniens de Cisjordanie seraient réautorisés à revenir travailler. Mais au moment où la situation semblait devenir propice à un assouplissement des règles, il y a eu une attaque ici, à la mi-janvier, à Ra’anana. » Deux de ses anciens employés, parvenus à s’infiltrer en Israël, ont foncé dans des passants avec leur véhicule, faisant un mort et dix-sept blessés. Le chef d’entreprise se dit « pessimiste » en raison du climat de défiance profonde qui continue, selon lui, de régner : « Je me dis qu’on ne reviendra jamais à un retour des Palestiniens au grand complet. On autorisera sans doute seulement certains travailleurs, les plus âgés. Et c’est une séparation qui nous fait beaucoup de mal, à tous. La peur est là pour durer. Ces gens ont construit ce pays, et maintenant on les traite en ennemis. »

    #Covid-19#migrant#migration#israel#palestien#cisjordanie#economie#travailleurmigrant#chine#inde#srilanka#moldavie#sante#conflit#crise

    • https://fr.timesofisrael.com/malgre-une-apparente-interdiction-des-dizaines-de-milliers-de-pale

      Malgré une apparente interdiction, des dizaines de milliers de Palestiniens travailleraient en Israël
      Si le ministre de la Défense et l’armée avaient interdit l’entrée de ces travailleurs dans le pays après le 7 octobre, une chaîne de télévision dit qu’environ 2 400 entreprises ont été exemptées "à des fins humanitaires"
      (...) La Treizième chaîne a indiqué qu’une longue liste d’entreprises israéliennes sont parvenues à obtenir des exemptions à des fins « humanitaires », ce qui les autorise à employer des ouvriers et autres employés palestiniens et ce même si le travail en question n’a apparemment que peu de lien avec l’humanitaire – sont ainsi concernés des hôtels, des boulangeries ou des usines de fabrication de meubles, par exemple.

      Environ 15 000 Palestiniens de Cisjordanie et 18 500 personnes provenant de la bande de Gaza entraient en Israël, tous les jours, avant le 7 octobre. Les permis de travail avaient toutefois été gelés par le ministre de la Défense Yoav Gallant et par le chef d’état-major Herzi Halevi pour des raisons de sécurité après l’attaque dévastatrice commise par le Hamas au sein de l’État juif.
      (...) Selon la Treizième chaîne, environ 2 396 entreprises et institutions ont néanmoins obtenu des exemptions – avec des desseins qui ne peuvent parfois aucunement être qualifiés d’humanitaires.

      Des firmes israéliennes majeures, comme le géant alimentaire Osem, l’entreprise d’ameublement Aminach et la chaîne de boulangerie Berman ont réussi à obtenir les autorisations nécessaires pour faire entrer des employés palestiniens au sein de l’État juif, a annoncé le reportage.

      Des hôtels, des producteurs alimentaires, des boulangeries, des garages automobiles, une usine de fabrication de fenêtres, une société événementielle et une firme de traitement des déchets ont ainsi obtenu des permis d’entrée dans le pays pour leurs ouvriers palestiniens.

      Ce sont des dizaines de milliers de Palestiniens qui viennent donc quotidiennement dans le pays pour y travailler, a noté la chaîne.

      Tsahal a déclaré à la Treizième chaîne que c’était le ministère de l’Économie qui avait la responsabilité des exemptions délivrées aux nombreuses entreprises – ce que le ministère a nié avec vigueur.

      « La seule agence autorisée à approuver l’entrée des ouvriers de Cisjordanie est le Bureau du Coordinateur des activités gouvernementales dans les Territoires [le COGAT qui dépend du ministère de la Défense], conformément aux politiques mises en œuvre par le gouvernement », a fait savoir le ministère.

      Ni le ministère de la Défense, ni le COGAT n’ont répondu à une demande de réaction.

      Le ministère de l’Économie a déclaré être « fermement opposé à l’idée d’autoriser les ouvriers palestiniens à entrer travailler en Israël », ajoutant qu’il s’efforce actuellement « de faire venir une main-d’œuvre issue de pays pacifiques ».

      En effet, le ministre de l’Économie, Nir Barkat, s’est récemment querellé sur la question des travailleurs étrangers avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu, accusant le Premier ministre de reporter une décision du cabinet qui ouvrirait la porte à l’arrivée d’un grand nombre d’ouvriers et autres employés étrangers en remplacement des Palestiniens.

      (...) « Nous parlons aujourd’hui d’un ralentissement d’environ 50 % dans les activités du secteur de la construction », a commenté Dan Catarivas, président de la Fédération israélienne des Chambres de commerce binationales, auprès de l’AFP.

      « Mais il y a aussi un grand manque dans ce que nous appelons les secteurs ‘essentiels’ comme l’alimentation, les produits pharmaceutiques ou la maintenance des infrastructures d’assainissement, par exemple », a-t-il ajouté.

  • Le naufrage de Rohingya en Indonésie révèle une crise humanitaire grandissante
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/03/22/le-naufrage-de-rohingya-en-indonesie-revele-une-crise-humanitaire-grandissan

    Le naufrage de Rohingya en Indonésie révèle une crise humanitaire grandissante
    Par Brice Pedroletti (Bangkok, correspondant en Asie du Sud-Est)
    Le naufrage, mercredi 20 mars, d’un bateau de Rohingya au large des côtes indonésiennes, lors duquel plus d’une cinquantaine de personnes auraient péri, est un nouveau signe de la détresse de cette minorité apatride originaire de Birmanie. Plusieurs milliers de Rohingya ont pris la mer en 2023 sur des embarcations vétustes.
    Or cette crise humanitaire à bas bruit dans les eaux du détroit de Malacca et du golfe du Bengale a tout lieu de s’aggraver : la « révolution birmane » a gagné le nord-est de l’Etat de Rakhine, en Birmanie, où vivent les quelque 650 000 Rohingya restés dans ce pays après le grand exode de 2017.
    Au Bangladesh voisin, où près d’un million de Rohingya vivent dans des camps de réfugiés – dont 750 000 arrivés en 2017 après les atroces massacres perpétrés par l’armée birmane dans l’Arakan (Etat de Rakhine, selon l’appellation officielle), la situation humanitaire n’a cessé de se détériorer. Les Rohingya sont une minorité autochtone de l’Etat de Rakhine, de confession musulmane et ethniquement apparentée aux Bengalis. Mais les dictatures birmanes successives en ont fait des « immigrés illégaux », les privant en 1982 de la citoyenneté birmane.
    Les 75 survivants du 20 mars, en majorité des hommes, entassés sur la coque retournée de leur embarcation au large de Kuala Bubon, sur la côte occidentale d’Aceh (île de Sumatra), ont d’abord été secourus par des pêcheurs, avant que des sauveteurs ne recueillent le lendemain la majorité d’entre eux. Un survivant du nom de Zaned Salim a fait état de cent cinquante personnes embarquées à l’origine, dont beaucoup de femmes et d’enfants, présumés morts noyés. Ils auraient quitté un « centre de réfugiés » malaisien pour tenter de rejoindre l’Australie. Mais ce témoignage reste sujet à caution tant la méfiance règne chez ces damnés de la Terre, rejetés de toute part. La plupart des Rohingya fuient les camps du Bangladesh, mais aussi la Birmanie, pour tenter de gagner la Malaisie, jugée plus tolérante, où 108 500 d’entre eux étaient, en février, enregistrés comme demandeurs d’asile selon l’UNHCR, l’agence des Nations unies pour les réfugiés. Mais la Malaisie ne reconnaît pas ce statut et a durci, ces dernières années, sa politique anti-immigration : beaucoup de Rohingya se retrouvent dans des centres de détention pour migrants illégaux. En février, une centaine d’entre eux s’étaient d’ailleurs évadés d’un de ces centres. L’Australie, elle, envoie les rares réfugiés qui atteignent ses côtes sur l’île de Nauru, dans le Pacifique, dans un centre de traitement des demandes d’asile.
    L’afflux de bateaux de réfugiés rohingya en Indonésie a pris de l’ampleur depuis octobre 2023 : sur les 4 500 qui, selon les estimations de l’UNHCR, ont pris la mer en 2023, 1 500 Rohingya auraient, depuis, accosté sur les rivages de la province d’Aceh. Les morts présumés se comptent par centaines. Or cet afflux suscite une vague de rejet parmi les Acehnais : en novembre, près de 200 Rohingya sinistrés ont été parqués une nuit entière sur une plage de Sabang, sur l’île de Weh, au large de Banda Aceh, la capitale provinciale. Les habitants voulaient les repousser vers la mer.
    Fin décembre, une centaine d’étudiants ont manifesté et pris d’assaut un local où des familles rohingya étaient hébergées à Banda Aceh, poussant l’UNHCR à se déclarer « profondément troublée par l’attaque d’une foule sur un site abritant des familles de réfugiés vulnérables ». Les survivants du 20 mars ont eux aussi vu affluer des villageois avec des pancartes « pas de Rohingya chez nous ».Car depuis novembre, une virulente campagne de haine agrémentée de fake news dépeint sur les réseaux sociaux indonésiens, en particulier TikTok, les Rohingya comme des « voleurs », voire de la « vermine » – reprenant sans aucun recul les stéréotypes racistes et islamophobes diffusés à l’envi par l’armée birmane sur les réseaux sociaux dans les années précédant les massacres de 2016 et 2017. Selon un observateur de l’Internet indonésien consulté par Le Monde en février, certains des messages de haine diffusés à grande échelle remontent à au moins l’un des « influenceurs » de la campagne de Prabowo Subianto, le général qui a gagné l’élection présidentielle indonésienne du 14 février et est vu comme un farouche nationaliste.
    Cruelle ironie : on sait que les Acehnais, de pieux et conservateurs musulmans sunnites comme les Rohingya, ont subi pendant des décennies les exactions de l’armée indonésienne lors de leur combat pour plus d’autonomie, puis furent, après le tsunami dévastateur de 2004, sous perfusion de l’aide internationale durant dix ans. Ce manque d’empathie est dénoncé en Indonésie par des figures progressistes, et des ONG locales viennent en aide aux Rohingya en détresse. Si Djakarta met en avant ses obligations de non-refoulement des réfugiés en perdition, la marine indonésienne a été soupçonnée d’avoir fait la chasse à des bateaux de Rohingya pour qu’ils n’accostent pas.Or les raisons qui poussent les Rohingya à prendre la mer ont tout lieu de se renforcer. Au Bangladesh, les conditions se détériorent dans la trentaine de camps qui les accueille autour de Cox’s Bazar, de l’autre côté de la frontière avec la Birmanie. La criminalité s’y répand, des incendies dévastent des quartiers entiers. Les Nations unies, qui financent les camps, n’ont pu lever en 2023 que la moitié des 876 millions de dollars (809 millions d’euros) nécessaires à leur fonctionnement. Au point que le Programme alimentaire mondial a dû, en mars 2023, réduire progressivement de 12 à 8 dollars mensuels le bon alimentaire attribué à chaque résident du camp, alors même que 40 % des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition chronique. Le montant a toutefois pu être réévalué à 10 dollars en janvier.
    En Birmanie, les zones d’habitation des Rohingya, dans le nord-est de l’Etat de Rakhine, comme les villes ghettos de Maungdaw, Buthidaung, et Rathedaung, font l’objet d’intenses combats entre l’armée birmane et l’Armée de l’Arakan. Le groupe rebelle arakanais opposé à la junte a lancé en janvier une offensive massive sur les positions de l’armée, qui recule mais bombarde régulièrement les zones habitées. A Sittwe, la capitale de l’Etat de Rakhine, les combats forcent la population à s’enfuir, mais les Rohingya, pour la plupart parqués dans des camps dans la périphérie, sont à la merci de l’armée birmane. « Il ne reste que des musulmans [rohingya] dans la ville. Ils n’ont nulle part où fuir et n’ont pas de carte d’identité. Le régime les exploite, en a forcé certains à suivre un entraînement militaire », confiait récemment au site birman en exil The Irrawaddy un cadre de l’Armée de l’Arakan. L’armée rebelle s’est dite, le 4 mars, par le truchement d’un porte-parole, prête à accueillir dans les zones libérées les Rohingya qui risquent sinon d’être utilisés comme « boucliers humains » par la junte : celle-ci en aurait recruté de force plusieurs centaines, depuis l’annonce en février de la conscription obligatoire.

    #Covid-19#migrant#migration#birmanie#australie#malaisie#bangladesh#rohinhya#indonesie#refugie#conflit#sante

  • Guerre Israël-Hamas : pays hôtes des réfugiés palestiniens, le Liban et la Jordanie s’inquiètent d’une suspension des services de l’UNRWA
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/03/03/guerre-israel-hamas-pays-hotes-des-refugies-palestiniens-le-liban-et-la-jord

    Guerre Israël-Hamas : pays hôtes des réfugiés palestiniens, le Liban et la Jordanie s’inquiètent d’une suspension des services de l’UNRWA
    Par Laure Stephan (Beyrouth, Amman, envoyée spéciale)
    Dans le camp de réfugiés palestiniens Al-Hussein, à Amman, des enfants marchent vers l’école, dans le froid matinal, le long de la rue principale où les commerces sont encore endormis. Des élèves restent emmitouflés dans leurs manteaux, dans les classes de l’établissement scolaire pour filles géré par l’UNRWA, l’agence des Nations unies chargée des réfugiés palestiniens. Les salles ne sont pas équipées de chauffage, et la peinture aux murs est vétuste – depuis des années, l’agence fait face à des coupes budgétaires –, mais cela semble désormais secondaire. Depuis que seize pays donateurs ont gelé leurs financements à la suite des accusations israéliennes d’implication dans l’attaque du Hamas du 7 octobre de douze de ses employés, sur les 13 000 à Gaza, c’est la poursuite même des opérations d’éducation et de santé de l’UNRWA qui est menacée.
    L’agence, tributaire de contributions volontaires et instables, dont les quartiers généraux sont basés à Amman, navigue à vue, et a alerté contre le risque d’une cessation prochaine de ses activités dans toute la région, en l’absence de nouvelles ressources.
    La Jordanie a très vite réagi à ces coupes. Le chef de la diplomatie, Ayman Safadi, a appelé les pays boycotteurs à revoir leur décision, qu’il a décrite comme une « punition collective » de l’UNRWA entreprise « sur la base d’allégations ». Le roi Abdallah II a pris la défense de la mission de l’organisation lors de déplacements officiels dans des pays occidentaux.
    Plus de 2 millions de réfugiés palestiniens vivent dans le royaume, dont la plupart ont obtenu la nationalité jordanienne. A Amman, moins d’un sur cinq habite l’un des dix camps de réfugiés palestiniens, qui ressemblent à des quartiers populaires, intégrés à la ville et sont administrés par les autorités. « Certains y restent par attachement sentimental ou volonté de rester près de leurs familles et amis. D’autres le font car la vie y est moins chère », décrit Imad, un habitant du camp Al-Wehdat, à Amman.
    Ces camps sont « déjà considérés comme des poches de pauvreté. Si l’UNRWA cesse ses services, la situation se détériorera davantage », prédit l’avocate Samar Muhareb, à la tête de l’ONG Arab Renaissance for Democracy and Development, qui fournit une aide juridique à des réfugiés de diverses origines et travaille sur la question palestinienne. Elle ajoute : « Dans l’éventualité où ses opérations seraient transférées à d’autres agences des Nations unies, celles-ci auraient besoin de temps pour être opérationnelles. Ce scénario paraît absurde, alors que l’UNRWA existe comme agence spécialisée. Et si l’éducation ou la santé devenaient du ressort de la Jordanie, cela serait un poids supplémentaire pour le pays », qui dépend également de l’aide internationale, et accueille par ailleurs de nombreux réfugiés syriens. Les classes des écoles publiques sont surchargées, et la qualité du système éducatif s’est dégradée. L’enseignement des établissements de l’UNRWA est réputé meilleur : des élèves du camp Al-Hussein rapportent ainsi que leurs familles ont préféré les y scolariser, quand bien même elles vivent hors du camp.
    Les risques d’une détérioration sociale, attisant des troubles, sont également pris au sérieux au Liban, pays d’accueil d’environ 250 000 réfugiés palestiniens. Depuis l’exode forcé de leur terre en 1948, lors de la création d’Israël, les générations y ont fait l’expérience de fortes discriminations, avec l’interdiction d’exercer certains métiers, comme médecin, avocat ou journaliste. L’UNRWA négociait avec Beyrouth sur un assouplissement des restrictions à l’emploi et une amélioration des infrastructures des camps. Mais l’effondrement économique du pays, depuis 2019, a mis fin à ces espoirs.
    Avec le chômage et l’hyperinflation, la crise a davantage paupérisé les habitants des camps. « Les réfugiés palestiniens sont devenus totalement dépendants des services de l’UNRWA », constate Dorothee Klaus, directrice de l’agence au Liban. « Une suspension des services de l’UNRWA aurait des conséquences sociales dramatiques, et poserait des défis sécuritaires », estime Bassel Al-Hassan, directeur du comité de dialogue libano-palestinien, un bureau qui dépend du premier ministre. Les autorités craignent une déstabilisation des camps. « Nous demandons aux bailleurs de dissocier la situation au Liban de celle d’autres pays, en raison de la crise économique », plaide-t-il.

    #Covid-19#migrant#migration#gaza#israel#conflit#liban#jordanie#refugie#UNRWA#sante#pauvrete#camp#crise#exil#discrimination

  • Les Palestiniens évacués de Gaza vers la France, entre inquiétude, déception et tristesse - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/55325/les-palestiniens-evacues-de-gaza-vers-la-france-entre-inquietude-decep

    Les Palestiniens évacués de Gaza vers la France, entre inquiétude, déception et tristesse
    Par Leslie Carretero Moussa Abuzanoona Publié le : 20/02/2024 Dernière modification : 22/02/2024
    Cent-cinquante Palestiniens travaillant pour l’administration française à Gaza ont été évacués de l’enclave palestinienne par la France ces derniers mois. Mais depuis leur arrivée dans l’Hexagone, ces Gazaouis enchaînent les déceptions. Le plus compliqué à vivre pour eux est l’absence de statut administratif particulier qui aurait pu leur être accordé. Ils doivent, comme les autres exilés, déposer une demande d’asile. Avec le risque de devenir réfugié et de ne jamais pouvoir rentrer dans leur pays.
    Lundi 12 février, Paris a annoncé l’évacuation de 42 personnes de la bande de Gaza via le point de passage de Rafah vers l’Égypte : des ressortissants français, des résidents français ou encore des Gazaouis collaborateurs de l’Institut français, avec les membres de leurs familles.Quelques jours plus tôt, un professeur qui collaborait depuis 20 ans avec l’Institut français de Gaza est décédé de maladie faute de traitement du fait des « conditions sanitaires catastrophiques » sur place, selon des sources diplomatiques citées par l’AFP.En novembre dernier, Paris avait déjà fait évacuer un autre groupe de l’enclave palestinienne en proie à de violents bombardements de l’armée israélienne après l’attaque du Hamas le 7 octobre.
    Au total depuis cette date, plus de 200 personnes, dont 150 Palestiniens, ont été sorties de Gaza par les autorités françaises. Elles ont ensuite été accueillies côté égyptien par l’ambassade de France et le Consulat général de France au Caire. Puis, elles ont été transférées sur le sol français.
    C’est le cas de Yasmine*, venue avec ses enfants grâce à un visa C (tourisme) de trois mois, délivré par les autorités françaises en Égypte. À son arrivée à l’aéroport de Roissy Charles-de-Gaulle en novembre, cette femme d’une quarantaine d’années est prise en charge par l’association mandatée par l’État, France Horizons.
    Très vite, sa direction l’informe qu’elle va devoir déposer une demande d’asile dans le pays, comme n’importe quel exilé. Une mesure qui interroge. Jusque-là, selon les témoignages, la France délivrait le statut de réfugié généralement aux Palestiniens victimes de persécution en raison de leur orientation sexuelle ou à ceux menacés par le Hamas. « Sur quel fondement les autorités vont accorder leur protection à ces personnes ? Je ne comprends pas », déclare à InfoMigrants Stéphane Maugendre, avocat spécialisé en droit des étrangers. L’avoué fait là référence aux critères de la convention de Genève qui régit le droit d’asile, et qui précise les critères d’éligibilité à une protection (persécutions pour l’engagement politique, pour l’appartenance religieuse, ethnique, l’orientation sexuelle, etc.).Évacuée avec Yasmine de Gaza, Rim* n’a pas non plus eu le choix. « On m’a dit que je devais déposer un dossier » à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) pour être en règle. En effet, le visa tourisme expire au bout de trois mois et ne permet pas de demander un titre de séjour dans la foulée. La seule solution apportée par la France aux Palestiniens est donc de devenir réfugié ici. Or, « cela signifie que je ne pourrais jamais rentrer chez moi. Mais la Palestine est mon pays et je veux y vivre », insiste Rim. (...)Avoir l’asile peut entraîner des répercussions dans l’avenir. Lorsqu’une personne obtient le statut de réfugié en France, l’administration récupère son passeport et le réfugié n’a plus le droit de retourner dans son pays d’origine. S’il le fait, il perd la protection de la France et a peu de chance d’obtenir à l’avenir un autre visa pour venir sur le sol français, pour des raisons professionnelles par exemple.
    Stéphane Maugendre fustige un procédé « honteux ». « Quand on exfiltre ces gens, on va au bout du raisonnement. Le gouvernement a un pouvoir d’appréciation totale donc il pourrait très bien délivrer à ces Gazaouis évacués par ses services un titre de séjour pour raisons humanitaires [valable un an renouvelable, ndlr]. Vraisemblablement, les autorités françaises ne veulent pas leur donner un titre de séjour qui leur permettrait de prolonger leur séjour et éventuellement faire des allers retours en Palestine », estime l’avocat. Contacté à plusieurs reprises par InfoMigrants, le cabinet du ministère de l’Intérieur Gérald Darmanin a finalement répondu qu’il ne souhaitait pas « communiquer » sur cette affaire.
    La plupart des Palestiniens s’étonnent de ce traitement qui leur est réservé. Evacués par la France, ils espéraient un meilleur accueil dans le pays. « Je suis choquée et triste », affirme Yasmine. D’autant que d’après plusieurs témoignages, on leur a promis un statut spécial en France afin de pouvoir retourner légalement à Gaza à la fin de la guerre. « On pensait qu’on serait traité comme les Ukrainiens, mais tout le monde se ‘fout’ de nous », peste Rim. En 2022, lors de l’offensive russe en Ukraine, l’Union européenne avait mis en place une mesure particulière pour les Ukrainiens fuyant la guerre : la protection temporaire. Ce titre de séjour, prolongé jusqu’en 2025, permet aux quatre millions d’Ukrainiens vivant en Europe de résider en toute légalité dans les États membres, de travailler, d’accéder aux systèmes de santé et de scolarisation.
    Ce statut particulier n’a jamais été octroyé à d’autres nationalités, pourtant également en proie à des conflits comme les Afghans, les Syriens ou récemment les Palestiniens. Les Gazaouis évacués se plaignent également de leurs conditions de vie en France. Sur les 150 Palestiniens arrivés ces derniers mois, 60 ont intégré le dispositif national d’accueil (DNA), d’après les chiffres de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii). Ils sont donc logés dans des centres d’accueil souvent dans des petites communes, éloignés des centres-villes. « Je dois marcher un certain temps pour croiser des gens ou accéder à un commerce », assure Khaled*, joint par InfoMigrants. « Je m’ennuie, je n’ai rien à faire de mes journées ». Niveau financier aussi, les difficultés s’accumulent. Leur salaire est - pour l’instant - toujours versé par la France mais cet argent repose dans une banque palestinienne, inaccessible sur le sol français. Ils vivent donc de l’allocation pour demandeurs d’asile (ADA), qui s’élève à quelques centaines d’euros. Trop peu pour subvenir aux besoins de toute la famille, disent-ils. Le Comité national de soutien et d’accueil aux rescapé.e.s du génocide en Palestine (CNaSAR) récolte un peu d’argent pour aider les Palestiniens évacués à s’acheter de la nourriture ou des vêtements.
    Un quotidien qui contraste avec la vie à Gaza de cette classe moyenne. « Il y a cinq mois, j’étais salariée et maintenant, je reçois des allocations », résume amèrement Rim.

    #Covid-19#migrant#migration#france#gaza#palestine#conflit#asile#CNASAR#OFII#DNA#sante

    • Shades of Anger
      (c’était en 2011...)
      https://www.youtube.com/watch?v=m2vFJE93LTI&t=72s

      Allow me to speak my Arab tongue
      before they occupy my language as well.
      Allow me to speak my mother tongue
      before they colonise her memory as well.
      I am an Arab woman of color.
      and we come in all shades of anger.
      All my grandfather ever wanted to do
      was wake up at dawn and watch my grandmother kneel and pray
      in a village hidden between Jaffa and Haifa
      my mother was born under an olive tree
      on a soil they say is no longer mine
      but I will cross their barriers, their check points
      their damn apartheid walls and return to my homeland

      I am an Arab woman of colour and we come in all shades of anger.
      And did you hear my sister screaming yesterday
      as she gave birth at a check point
      with Israeli soldiers looking between her legs
      for their next demographic threat
      called her baby girl “Janeen”.

      And did you hear Amni Mona screaming
      behind their prison bars as they teargassed her cell
      “We’re returning to Palestine!”
      I am an Arab woman of colour and we come in all shades of anger.
      But you tell me, this womb inside me
      will only bring you your next terrorist
      beard wearing, gun waving, towelhead, sand nigger
      You tell me, I send my children out to die
      but those are your copters, your F16′s in our sky
      And let’s talk about this terrorism business for a second
      Wasn’t it the CIA that killed Allende and Lumumba
      and who trained Osama in the first place
      My grandparents didn’t run around like clowns
      with the white capes and the white hoods on their heads lynching black people

      I am an Arab woman of colour and we come in all shades of anger.
      “So who is that brown woman screaming in the demonstration?”
      Sorry, should I not scream?
      I forgot to be your every orientalist dream
      Jinnee in a bottle, belly dancer, harem girl, soft spoken Arab woman
      Yes master, no master.
      Thank you for the peanut butter sandwiches
      raining down on us from your F16′s master
      Yes my liberators are here to kill my children
      and call them “collateral damage”
      I am an Arab woman of colour and we come in all shades of anger.
      So let me just tell you this womb inside me
      will only bring you your next rebel
      She will have a rock in one hand and a Palestinian flag in the other

      I am an Arab woman of color
      Beware! Beware my anger…

      https://www.antiwarsongs.org/canzone.php?id=67746&lang=it

      #Rafeef_Ziadah #poésie #Palestine #arabe #langue #langue_arabe #poème #dommages_collatéraux #conflit #Israël #terrorisme #colère

  • Le vol de la délivrance : dans l’avion qui évacue des jeunes Gazaouis, malades et blessés, vers Abou Dhabi
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/02/24/le-vol-de-la-delivrance-dans-l-avion-qui-evacue-des-jeunes-gazaouis-malades-

    Le vol de la délivrance : dans l’avion qui évacue des jeunes Gazaouis, malades et blessés, vers Abou Dhabi
    Par Ghazal Golshiri (Envoyée spéciale à A Al-Arish et Abou Dhabi)
    Alors que le soleil se couche sur l’aéroport international d’El-Arich, dans la péninsule égyptienne du Sinaï, une dizaine d’ambulances et quelques bus sont garés côte à côte. Ce mardi 20 février, dans le hangar de la base aérienne, quelque deux cents Palestiniens, évacués de Gaza, terminent des démarches administratives avant de monter dans un Boeing 777 de la compagnie aérienne émiratie Etihad, à destination d’Abou Dhabi. Parmi eux : des enfants blessés, accompagnés d’au moins un proche, des malades atteints du cancer et des résidents des Emirats arabes unis (EAU).
    Depuis mi-novembre 2023, environ cinq cents Palestiniens de Gaza ont été accueillis et pris en charge dans la pétromonarchie du Golfe. Une goutte dans un océan de besoins, alors que selon les autorités de santé de l’enclave, la guerre a fait près de 30 000 morts et 70 000 blessés, côté palestinien. A la mi-février, seuls onze des trente-six hôpitaux de la bande de Gaza était encore en service.
    De plus en plus de rapports font état de familles qui luttent pour nourrir leurs enfants et d’un risque croissant de morts dues à la faim, notamment dans le nord de Gaza, quasiment hors d’atteinte des convois de ravitaillement. « La faim et la maladie forment une combinaison mortelle », a prévenu Mike Ryan, directeur exécutif du programme d’urgence sanitaire de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le 19 février.
    Le vol de ce 20 février entre El-Arich et Abou Dhabi est le douzième affrété par les Emirats depuis le début de la guerre, le 7 octobre 2023. (...) Quelques semaines après le début de la guerre à Gaza, les Emirats ont annoncé leur intention de recevoir mille enfants blessés de Gaza et autant de malades du cancer, de tous les âges. Les candidats à l’évacuation sont proposés par les équipes médicales dans la bande côtière, puis les noms sont soumis aux autorités israélienne et égyptienne pour validation. « Le plus grand défi est ensuite pour ces gens d’arriver au poste-frontière de Rafah, côté Gaza. Parfois, les patients sont beaucoup trop malades pour pouvoir l’atteindre. Souvent, les ambulances transportant les patients sont bloquées sur la route à cause des combats », explique Maha Barakat, la vice-ministre d’Etat au ministère des affaires étrangères émirati, qui chapeaute ces évacuations en personne.
    Certains jours, la frontière reste fermée, comme ce 20 février. Ceux qui sont évacués ce jour-là avaient quitté Gaza il y a quelques jours. « Parmi les patients, beaucoup souffrent de complications secondaires, par exemple une infection des os après une première amputation, qui, parfois, demande une amputation supplémentaire du membre affecté », regrette Maha Barakat. Dans ces vols affrétés par les Emiratis, des Gazaouis, évacués plus tôt aux Emirats, font parfois le chemin inverse et retournent à Gaza. Le 20 février, c’est le cas d’une mère de famille d’une cinquantaine d’années, souffrant de leucémie, qui, pendant deux mois, a pu être traitée à Abou Dhabi. « Contrairement aux conseils des médecins, elle a décidé de revenir auprès de ses enfants restés à Gaza, alors qu’il lui restait encore six mois de traitements », explique Maha Barakat. Elle se souvient d’une autre mère de famille qui a accompagné aux Emirats son fils, atteint de leucémie, pour qu’il y suive une chimiothérapie. Sa maladie étant trop avancée, l’enfant est mort. La mère est retournée à Gaza pour l’y enterrer. A côté de ces évacuations, les Emirats ont mis en place un hôpital de campagne de deux cents lits dans la bande de Gaza et ont construit une unité de désalinisation de l’eau de mer à la frontière entre Gaza et l’Egypte, fournissant de l’eau potable à 600 000 habitants de la bande côtière.
    Ces opérations humanitaires ne vont pas sans arrière-pensées politiques. Le massacre des Palestiniens de Gaza, retransmis en quasi direct sur la chaîne Al-Jazira et sur les réseaux sociaux, bouleverse l’opinion publique arabe. De l’Atlantique au golfe Persique, les populations exigent de leurs dirigeants qu’ils se mobilisent pour leurs frères palestiniens. L’attitude des EAU est particulièrement scrutée, en raison de l’accord de normalisation diplomatique qu’ils ont signé avec Israël, à l’été 2020. Une décision vue comme une trahison dans une large partie du monde arabe, où la Palestine constitue une cause identitaire, quasi sacrée. D’où les efforts déployés par Abou Dhabi pour venir en aide à la population de Gaza et pour le faire savoir.
    (...) Lorsque les bombardements israéliens ont commencé, les deux filles ont été privées de tout traitement. Finalement, début décembre 2023, accompagnées de leur mère et de leur sœur aînée, elles ont pu franchir le terminal de Rafah et pénétrer en Egypte. Leurs trois frères sont restés avec leur père dans le sud de Gaza. Fin janvier, dans un hôpital d’El-Arich, un médecin émirati s’intéresse au cas de May. (...) Il y a quelques jours, elle a demandé au médecin supervisant les soins de May ce qui adviendra d’elle après la guerre. Le praticien lui a dit : « Tant que la guerre se poursuit, vous restez ici et May reçoit son médicament. » Et après ? Le médecin a été franc : « Désolé ! Je n’ai pas de réponse pour vous. » Même pour les Palestiniens sortis de Gaza, l’avenir ressemble à un gigantesque point d’interrogation.

    #Covid-19#migrant#migration#gaza#egypte#Emiratsarabesunis#sante#evacuation#conflit#humanitaire#palestinien

  • #Productivisme et destruction de l’#environnement : #FNSEA et #gouvernement marchent sur la tête

    Répondre à la #détresse des #agriculteurs et agricultrices est compatible avec le respect de l’environnement et de la #santé_publique, expliquent, dans cette tribune à « l’Obs », les Scientifiques en rébellion, à condition de rejeter les mesures productivistes et rétrogrades du duo FNSEA-gouvernement.

    La #crise de l’agriculture brasse croyances, savoirs, opinions, émotions. Elle ne peut laisser quiconque insensible tant elle renvoie à l’un de nos #besoins_fondamentaux – se nourrir – et témoigne du #désarroi profond d’une partie de nos concitoyen·nes qui travaillent pour satisfaire ce besoin. Reconnaître la #souffrance et le désarroi du #monde_agricole n’empêche pas d’examiner les faits et de tenter de démêler les #responsabilités dans la situation actuelle. Une partie de son #traitement_médiatique tend à faire croire que les agriculteurs et agricultrices parleraient d’une seule voix, celle du président agro-businessman de la FNSEA #Arnaud_Rousseau. Ce directeur de multinationale, administrateur de holding, partage-t-il vraiment la vie de celles et ceux qui ne parviennent plus à gagner la leur par le travail de la terre ? Est-ce que les agriculteur·ices formeraient un corps uniforme, qui valoriserait le productivisme au mépris des #enjeux_environnementaux qu’ils et elles ne comprendraient soi-disant pas ? Tout cela est difficile à croire.

    Ce que la science documente et analyse invariablement, en complément des savoirs et des observations de nombre d’agriculteur·ices, c’est que le #modèle_agricole industriel et productiviste conduit à une #catastrophe sociale et environnementale. Que ce modèle concurrence dangereusement les #alternatives écologiquement et socialement viables. Que cette agriculture ne s’adaptera pas indéfiniment à un environnement profondément dégradé. Qu’elle ne s’adaptera pas à un #réchauffement_climatique de +4 °C pour la France et une ressource en #eau fortement diminuée, pas plus qu’à une disparition des #insectes_pollinisateurs.

    Actuellement, comme le rappelle le Haut Conseil pour le Climat (HCC), l’agriculture représente le deuxième secteur d’émissions de #gaz_à_effet_de_serre, avec 18 % du total français, derrière les transports. La moitié de ces émissions agricoles (en équivalent CO2) provient de l’#élevage_bovin à cause du #méthane produit par leur digestion, 14 % des #engrais_minéraux qui libèrent du #protoxyde_d’azote et 13 % de l’ensemble des #moteurs, #engins et #chaudières_agricoles. Le HCC rappelle aussi que la France s’est engagée lors de la COP26 à baisser de 30 % ses émissions de méthane d’ici à 2030, pour limiter le réchauffement climatique. L’agriculture, bien que répondant à un besoin fondamental, doit aussi revoir son modèle dominant pour répondre aux enjeux climatiques. De ce point de vue, ce qu’indique la science, c’est que, si l’on souhaite faire notre part dans le respect de l’accord de Paris, la consommation de #viande et de #produits_laitiers doit diminuer en France. Mais la solidarité avec nos agriculteur.ices ainsi que l’objectif légitime de souveraineté et #résilience_alimentaire nous indiquent que ce sont les importations et les élevages intensifs de ruminants qui devraient diminuer en premier.

    Côté #biodiversité, la littérature scientifique montre que l’usage des #pesticides est la deuxième cause de l’effondrement des populations d’#insectes, qui atteint 80 % dans certaines régions françaises. Les #oiseaux sont en déclin global de 25 % en quarante ans, mais ce chiffre bondit à 60 % en milieux agricoles intensifs : le printemps est devenu particulièrement silencieux dans certains champs…

    D’autres voies sont possibles

    Le paradoxe est que ces bouleversements environnementaux menacent particulièrement les agriculteur·ices, pour au moins trois raisons bien identifiées. Tout d’abord environnementale, à cause du manque d’eau, de la dégradation des sols, des événements météorologiques extrêmes (incendies ou grêles), ou du déclin des insectes pollinisateurs, qui se traduisent par une baisse de production. Sanitaires, ensuite : par leur exposition aux #produits_phytosanitaires, ils et elles ont plus de risque de développer des #cancers (myélome multiple, lymphome) et des #maladies_dégénératives. Financière enfin, avec l’interminable fuite en avant du #surendettement, provoqué par la nécessité d’actualiser un équipement toujours plus performant et d’acheter des #intrants pour pallier les baisses de production engendrées par la dégradation environnementale.

    Depuis des décennies, les #traités_de_libre-échange et la compétition intra-européenne ont privé la grande majorité des agriculteur·ices de leur #autonomie, dans un cercle vicieux aux répercussions sociales tragiques pouvant mener au #suicide. Si la FNSEA, les #JA, ou la #Coordination_rurale réclament une forme de #protectionnisme_agricole, d’autres de leurs revendications portent en revanche sur une baisse des #contraintes_environnementales et sanitaires qui font porter le risque de la poursuite d’un modèle délétère sur le long terme. Ce sont justement ces revendications que le gouvernement a satisfaites avec, en particulier, la « suspension » du #plan_Ecophyto, accueilli par un satisfecit de ces trois organisations syndicales rappelant immédiatement « leurs » agriculteurs à la ferme. Seule la #Confédération_paysanne refuse ce compromis construit au détriment de l’#écologie.

    Pourtant, des pratiques et des modèles alternatifs existent, réduisant significativement les émissions de gaz à effet de serre et préservant la biodiversité ; ils sont déjà mis en œuvre par des agriculteur·ices qui prouvent chaque jour que d’autres voies sont possibles. Mais ces alternatives ont besoin d’une réorientation des #politiques_publiques (qui contribuent aujourd’hui pour 80 % au #revenu_agricole). Des propositions cohérentes de politiques publiques répondant à des enjeux clés (#rémunération digne des agriculteur·ices non soumis aux trusts’de la grande distribution, souveraineté alimentaire, considérations climatiques et protection de la biodiversité) existent, comme les propositions relevant de l’#agroécologie, qu’elles émanent du Haut Conseil pour le Climat, de la fédération associative Pour une autre PAC, de l’IDDRI, ou encore de la prospective INRAE de 2023 : baisse de l’#élevage_industriel et du cheptel notamment bovin avec soutien à l’#élevage_extensif à l’herbe, généralisation des pratiques agro-écologiques et biologiques basées sur la valorisation de la biodiversité (cultures associées, #agro-foresterie, restauration des #haies favorisant la maîtrise des bio-agresseurs) et arrêt des #pesticides_chimiques_de_synthèse. Ces changements de pratiques doivent être accompagnés de mesures économiques et politiques permettant d’assurer le #revenu des agriculteur·ices, leur #accès_à_la_terre et leur #formation, en cohérence avec ce que proposent des syndicats, des associations ou des réseaux (Confédération paysanne, Atelier paysan, Terre de liens, Fédérations nationale et régionales d’Agriculture biologique, Réseau salariat, …).

    Nous savons donc que les politiques qui maintiennent le #modèle_agro-industriel sous perfusion ne font qu’empirer les choses et qu’une réorientation complète est nécessaire et possible pour la #survie, la #dignité, la #santé et l’#emploi des agriculteur·ices. Nombre d’enquêtes sociologiques indiquent qu’une bonne partie d’entre elles et eux le savent très bien, et que leur détresse témoigne aussi de ce #conflit_interne entre le modèle productiviste qui les emprisonne et la nécessité de préserver l’environnement.

    Une #convention_citoyenne

    Si le gouvernement convient que « les premières victimes du dérèglement climatique sont les agriculteurs », les mesures prises démontrent que la priorité gouvernementale est de sanctuariser le modèle agro-industriel. La remise en cause du plan Ecophyto, et la reprise en main de l’#Anses notamment, sont en totale contradiction avec l’urgence de s’attaquer à la dégradation environnementale couplée à celle des #conditions_de_vie et de travail des agriculteur·ices. Nous appelons les citoyen·nes et les agriculteur·rices à soutenir les changements de politique qui iraient réellement dans l’intérêt général, du climat, de la biodiversité. Nous rappelons que le sujet de l’agriculture et de l’#alimentation est d’une redoutable complexité, et qu’identifier les mesures les plus pertinentes devrait être réalisé collectivement et démocratiquement. Ces mesures devraient privilégier l’intérêt général et à long-terme, par exemple dans le cadre de conventions citoyennes dont les conclusions seraient réellement traduites dans la législation, a contrario a contrario de la précédente convention citoyenne pour le climat.

    https://www.nouvelobs.com/opinions/20240203.OBS84041/tribune-productivisme-et-destruction-de-l-environnement-fnsea-et-gouverne
    #tribune #scientifiques_en_rébellion #agriculture #souveraineté_alimentaire #industrie_agro-alimentaire

  • Vivre et lutter dans un monde toxique. #Violence_environnementale et #santé à l’âge du #pétrole

    Pour en finir avec les success stories pétrolières, voici une histoire des territoires sacrifiés à la transformation des #hydrocarbures. Elle éclaire, à partir de sources nouvelles, les #dégâts et les #luttes pour la santé au XXe siècle, du #Japon au #Canada, parmi les travailleurs et travailleuses des enclaves industrielles italiennes (#Tarento, #Sardaigne, #Sicile), auprès des pêcheurs et des paysans des « #Trente_Ravageuses » (la zone de #Fos / l’étang de# Berre, le bassin gazier de #Lacq), ou encore au sein des Premières Nations américaines et des minorités frappées par les #inégalités_environnementales en #Louisiane.
    Ces différents espaces nous racontent une histoire commune : celle de populations délégitimées, dont les plaintes sont systématiquement disqualifiées, car perçues comme non scientifiques. Cependant, elles sont parvenues à mobiliser et à produire des savoirs pour contester les stratégies entrepreneuriales menaçant leurs #lieux_de_vie. Ce livre expose ainsi la #tension_sociale qui règne entre défense des #milieux_de_vie et #profits économiques, entre santé et #emploi, entre logiques de subsistance et logiques de #pétrolisation.
    Un ouvrage d’une saisissante actualité à l’heure de la désindustrialisation des #territoires_pétroliers, des #conflits sur la #décarbonation des sociétés contemporaines, et alors que le désastre de #Lubrizol a réactivé les interrogations sur les effets sanitaires des dérivés pétroliers.

    https://www.seuil.com/ouvrage/vivre-et-lutter-dans-un-monde-toxique-collectif/9782021516081

    #peuples_autochtones #pollution #toxicité #livre

    • Ces territoires sacrifiés au pétrole

      La société du pétrole sur laquelle s’est bâtie notre prospérité ne s’est pas faite sans sacrifices. Gwenola Le Naour et Renaud Bécot, co-directeurs d’un ouvrage sur ce sujet, lèvent le voile sur les dégâts causés par cette « pétrolisation » du monde, en France et à l’étranger.

      Si le pétrole et ses produits ont permis l’émergence de notre mode de vie actuel, l’activité des raffineries et autres usines de la pétrochimie a abîmé les écosystèmes et les paysages et a des effets de long terme sur la santé humaine. Dans le livre qu’ils ont coordonné, Vivre et lutter dans un monde toxique (Seuil, septembre 2023), Gwénola Le Naour et Renaud Bécot lèvent le voile sur les dégâts causés par cette « pétrolisation » du monde, selon leurs propres mots. Ils ont réuni plusieurs études de cas dans des territoires en France et à l’étranger pour le démontrer. Un constat d’autant plus actuel que la société des hydrocarbures est loin d’être révolue : la consommation de pétrole a atteint un record absolu en 2023, avec plus de 100 millions de barils par jour en moyenne.

      À la base de votre ouvrage, il y a ce que vous appelez « la pétrolisation du monde ». Que recouvre ce terme ?
      Gwenola Le Naour1. Dans les années 1960, s’est développée l’idée que le pétrole était une énergie formidable, rendant possible la fabrication de produits tels que le plastique, les textiles synthétiques, les peintures, les cosmétiques, les pesticides, qui ont révolutionné nos modes de vie et décuplé les rendements agricoles. La pétrolisation désigne cette mutation de nos systèmes énergétiques pendant laquelle les hydrocarbures se sont imposés partout sur la planète et ont littéralement métamorphosé nos territoires physiques et mentaux.

      L’arrivée du pétrole et de ses dérivés nous est le plus souvent présentée comme une épopée, une success story. On a mis de côté la face sombre de cette pétrolisation, avec ses territoires sacrifiés comme Fos-sur-Mer, qui abrite depuis 1965 une immense raffinerie représentant aujourd’hui 10 % de la capacité de raffinage de l’Hexagone, ou Tarente, dans le sud de l’Italie, où se côtoient une raffinerie, une usine pétrochimique, un port commercial, une décharge industrielle et la plus grande aciérie d’Europe.

      Comment des territoires entiers ont-ils pu être ainsi abandonnés au pétrole ?
      Renaud Bécot2. L’industrie du pétrole et des hydrocarbures n’est pas une industrie comme les autres. Les sociétés pétrolières ont été largement accompagnées par les États. Comme pour le nucléaire, l’histoire de l’industrie pétrolière est étroitement liée à l’histoire des stratégies énergétiques des États et à la manière dont ils se représentent leur indépendance énergétique. L’État a soutenu activement ces installations destinées à produire de la croissance et des richesses. Pour autant, ces industries ne se sont pas implantées sans résistance, malgré les discours de « progrès » qui les accompagnaient.

      Des luttes ont donc eu lieu dès l’installation de ces complexes ?
      G. L. N. Dès le début, les populations locales, mais aussi certains élus, ont compris l’impact que ces complexes gigantesques allaient avoir sur leur environnement. Ces mobilisations ont échoué à Fos-sur-Mer ou au sud de Lyon, où l’installation de la raffinerie de Feyzin et de tout le complexe pétrochimique (le fameux « couloir de la chimie ») a fait disparaître les bras morts du Rhône et des terres agricoles... Quelques-unes ont cependant abouti : un autre projet de raffinerie, envisagé un temps dans le Beaujolais, a dû être abandonné. Il est en revanche plus difficile de lutter une fois que ces complexes sont installés, car l’implantation de ce type d’infrastructures est presque irréversible : le coût d’une dépollution en cas de fermeture est gigantesque et sans garantie de résultat

      Les habitants qui vivent à côté de ces installations finissent ainsi par s’en accommoder… En partie parce qu’ils n’ont pas d’autre choix, et aussi parce que les industriels se sont efforcés dès les années 1960-1970 et jusqu’à aujourd’hui de se conduire en « bons voisins ». Ils négocient leur présence en finançant par exemple des infrastructures culturelles et/ou sportives. Sans oublier l’éternel dilemme entre les emplois apportés par ces industries et les nuisances qu’elles génèrent. Dans le livre, nous avons qualifié ces arrangements à l’échelle des districts pétrochimiques de « compromis fordistes territorialisés ».

      Que recouvre ce terme de compromis ?
      R. B. En échange de l’accaparement de terres par l’industrie et du cortège de nuisances qui l’accompagne, les collectivités locales obtiennent des contreparties qui correspondent à une redistribution partielle des bénéfices de l’industrie. Cette redistribution peut être régulière (via la taxe professionnelle versée aux communes jusqu’en 2010, notamment), ou exceptionnelle, après un accident par exemple. Ainsi, en 1989, après une pollution spectaculaire qui marque les habitants vivant près de Lubrizol en Normandie, l’entreprise a versé 100 000 francs à la municipalité du Petit-Quevilly pour qu’elle plante quatre-vingts arbres dans la ville...

      Mais ce type de compromis a également été très favorable aux industries en leur offrant par exemple des allégements fiscaux de long terme, comme en Sicile près de Syracuse où se situe l’un des plus grands sites chimiques et pétrochimiques qui emploie plus de 7 000 personnes, voire une totale exonération fiscale comme en Louisiane, sur les rives du Mississippi. Des années 1950 aux années 1980, pas moins de 5 000 entreprises sur le sol américain – majoritairement pétrochimiques, pétrolières, métallurgiques ainsi que des sociétés gazières – ont demandé à bénéficier de ces exonérations, parmi lesquelles les sociétés les plus rentables du pays telles que DuPont, Shell Oil ou Exxon...

      Ces pratiques, qui se sont développées surtout lors des phases d’expansion de la pétrochimie, rendent plus difficile le retrait de ces industries polluantes. Les territoires continuent de penser qu’ils en tirent un bénéfice, même si cela est de moins en moins vrai.

      On entend souvent dire, concernant l’industrie pétrolière comme le nucléaire d’ailleurs, que les accidents sont rares et qu’on ne peut les utiliser pour remettre en cause toute une industrie… Est-ce vraiment le cas ?
      G. L. N. On se souvient des accidents de type explosions comme celle de la raffinerie de Feyzin, qui fit 18 morts en 1966, ou celle d’un stock de nitrates d’ammonium de l’usine d’engrais AZF à Toulouse en 2001, qui provoqua la mort de 31 personnes – car ils sont rares. Mais si l’on globalise sur toute la chaîne des hydrocarbures, les incidents et les accidents – y compris graves ou mortels pour les salariés – sont en réalité fréquents, même si on en entend rarement parler au-delà de la presse locale (fuites, explosions, incendies…). Sans oublier le cortège des nuisances liées au fonctionnement quotidien de ces industries, telles que la pollution de l’air ou de l’eau, et leurs conséquences sur la santé.

      Pour qualifier les méfaits des industries pétrochimiques, sur la santé notamment, vous parlez de « violence lente ». Pouvez-vous expliquer le choix de cette expression ?
      G. L. N. Cette expression, créée par l’auteur nord-américain Rob Nixon, caractérise une violence graduelle, disséminée dans le temps, caractéristique de l’économie fossile. Cette violence est également inégalitaire car elle touche prioritairement des populations déjà vulnérables : je pense notamment aux populations noires américaines de Louisiane dont les générations précédentes étaient esclaves dans les plantations…

      Au-delà de cet exemple particulièrement frappant, il est fréquent que ces industries s’installent près de zones populaires ou touchées par la précarité. On a tendance à dire que nous respirons tous le même air pollué, or ce n’est pas vrai. Certains respirent un air plus pollué que d’autres. Et ceux qui habitent sur les territoires dévolus aux hydrocarbures ont une qualité de vie bien inférieure à ceux qui sont épargnés par la présence de ces industries.

      Depuis quand la nocivité de ces industries est-elle documentée ?
      G. L. N. Longtemps, les seules mesures de toxicité dont on a disposé étaient produites par les industriels eux-mêmes, sur la base des seuils fixés par la réglementation. Pourtant, de l’aveu même de ceux qui la pratiquent, la toxicologie est une science très imparfaite : les effets cocktails ne sont pas recherchés par la toxicologie réglementaire, pas plus que ceux des expositions répétées à faibles doses sur le temps long. De plus, fixer des seuils est à double tranchant : on peut invoquer les analyses toxicologiques pour protéger les populations, l’environnement, ou les utiliser pour continuer à produire et à exposer les gens, les animaux, la nature à ces matières dangereuses. Ainsi, ces seuils peuvent être alternativement présentés comme des seuils de toxicité, ou comme des seuils de tolérance… Ce faisant, la toxicologie produit de l’imperceptibilité.

      R. B. Des études alternatives ont cependant commencé à émerger, avec des méthodologies originales. Au Canada, sur les territoires des Premières Nations en Ontario, au Saskatchewan précisément, une étude participative a été menée au cours de la décennie 2010 grâce à un partenariat inédit entre un collectif de journalistes d’investigation et un groupe de chercheurs. En distribuant très largement des kits de mesure, peu coûteux et faciles d’utilisation, elle a permis de démontrer que les populations étaient exposées aux sulfures d’hydrogène, un gaz toxique qui pénètre par les voies respiratoires. Grâce à cette démarche participative, des changements de règlementation et une meilleure surveillance des pollutions ont été obtenus. Il s’agit d’une réelle victoire qui change la vie des gens, même si l’industrie n’a pas été déplacée.

      Qu’en est-il des effets sur la santé de tous ces polluants ? Sont-ils documentés ?
      G. L. N. En France, les seuls travaux menés à ce jour l’ont été autour du gisement de gaz naturel de Lacq, exploité de 1957 à 2013 dans les Pyrénées. Une première étude, conduite en 2002 par l’université, concluait à un surrisque de cancer. Deux autres études ont été lancées plus récemment : une étude de mortalité dévoilée en 2021, qui montre une plus forte prévalence des décès par cancer, et une étude de morbidité toujours en cours. À Fos-sur-Mer, l’étude « Fos Epseal », conduite entre 2015 et 20223, s’est basée sur les problèmes de santé déclarés par les habitants. Ses résultats révèlent que près des deux-tiers des habitants souffrent d’au moins une maladie chronique – asthme, diabète –, ainsi que d’un syndrome nez-gorge irrités toute l’année qui n’avait jamais été identifié jusque-là.

      R. B. Ce que soulignent les collectifs qui évoquent des problèmes de santé liés à l’industrie pétrochimique – maladies chroniques de la sphère ORL, diabètes, cancers, notamment pédiatriques, etc. –, c’est la difficulté de prouver un lien de corrélation entre ces maladies et telle ou telle exposition toxique.

      L’épidémiologie conventionnelle ne le permet pas, en tout cas, car elle travaille à des échelles larges, sur de grands nombres, et est mal adaptée à un déploiement sur de plus petits territoires. C’est pourquoi les collectifs militants et les scientifiques qui travaillent avec eux doivent faire preuve d’inventivité, en faisant parfois appel aux sciences humaines et sociales, avec des sociologues qui vont recueillir des témoignages et trajectoires d’exposition, des historiens qui vont documenter l’histoire des lieux de production…

      Cela suppose aussi la mise au point de technologies, d’outils qui permettent de mesurer comment et quand les gens sont exposés. Cela nécessite enfin une coopération de longue haleine entre chercheurs de plusieurs disciplines, militants et populations. Car l’objectif est d’établir de nouveaux protocoles pour mieux documenter les atteintes à la santé et à l’environnement avec la participation active de celles et ceux qui vivent ces expositions dans leurs chairs.

      https://lejournal.cnrs.fr/articles/ces-territoires-sacrifies-au-petrole

  • Faire justice. #Moralisme_progressiste et #pratiques_punitives dans la lutte contre les violences sexistes

    Là où il est admis que le recours à la #police en cas de violence n’est pas la solution mais plutôt un problème supplémentaire, la tentation est de s’y substituer. Si l’intention est louable, son application l’est moins. Les mesures sont expéditives et les outils pour faire justice sont encore profondément empreints d’une philosophie punitive : menace, exclusion, harcèlement, dénonciation publique et discréditation politique. Comment sortir de cette impasse ? La question est d’autant plus difficile qu’elle surgit au moment où les forces réactionnaires mènent une large offensive contre le wokisme pour mieux protéger ceux qui organisent les violences dans nos sociétés.
    Écrit par une « militante gouine », ce livre propose une critique fine du moralisme progressiste et des pratiques punitives dans les luttes sociales. En se saisissant d’exemples concrets rencontrés au gré de son militantisme et en discutant précisément l’abolitionnisme pénal, elle pose les jalons d’une justice transformatrice inventive, capable de prendre soin des victimes et de transformer les individu.es comme les groupes.
    Endiguer les violences c’est aussi ne plus craindre le conflit, ne plus avoir peur de lutter.

    https://lafabrique.fr/faire-justice
    #justice #justice_transformatrice #livre #VSS #violences_sexistes

    voir aussi :
    https://seenthis.net/messages/1027419

    ping @_kg_

  • Antigone en Palestine
    https://laviedesidees.fr/Stephanie-Latte-Abdallah-Des-morts-en-guerre

    La rétention des dépouilles de #guerre, et donc l’empêchement des rituels funéraires, joue un rôle important et peu étudié dans le #conflit_israélo-palestinien. À propos de : Stéphanie Latte Abdallah, Des morts en guerre. Rétention des corps et figures du martyr en Palestine, Karthala

    #International #Israël #anthropologie #terrorisme #mort
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20240126_palestine-2.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20240126_palestine-2.pdf

  • « Le cimetière du droit international que représente Gaza marque la fin d’un monde »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/25/le-cimetiere-du-droit-international-que-represente-gaza-marque-la-fin-d-un-m

    Dans le conflit israélo-palestinien, qui est marqué par la violence et le poids de considérations historiques, religieuses et géopolitiques, la voix du droit demeure encore largement inaudible. Dans un monde qui renoue dangereusement avec la pure logique de puissance, la rationalité juridique est pourtant plus légitime et nécessaire que jamais.

    La requête de l’Afrique du Sud devant la Cour internationale de justice (#CIJ) [à La Haye, qui rendra sa décision le vendredi 26 janvier], qui accuse Israël de violer la Convention de 1948 sur la prévention et la répression du crime de génocide, représente, contrairement à ce qu’affirme le ministre des affaires étrangères français, Stéphane Séjourné, un rappel salutaire : ce conflit, en général, et la sécurité d’#Israël, en particulier, ne sauraient échapper aux prescriptions du droit international. L’exercice du droit à la légitime défense n’autorise pas la commission de crimes internationaux et Israël ne jouit pas de jure d’un quelconque régime d’exception.

    Plus largement, la plainte sud-africaine ouvre un chapitre exceptionnel dans le dossier juridique du #conflit_israélo-palestinien. Cette « exceptionnalité juridique » est liée à l’extrême gravité de l’accusation : dans sa requête de 84 pages et durant ses plaidoiries devant la Cour, l’Afrique du Sud démontre rigoureusement pourquoi, selon elle, Israël commet un « #génocide » – une notion particulièrement chargée qui revêt un sens juridique bien établi.

    Pretoria a notamment rappelé que plus de 23 000 #Palestiniens de #Gaza – dont une majorité de femmes et d’enfants – ont été tués, plus de 60 000 blessés, et que l’entièreté de la population gazaouie, privée d’eau, de nourriture, de médicaments et de logements, est soumise à des conditions d’existence susceptibles d’entraîner sa disparition – actes potentiellement constitutifs d’un génocide.

    Caractère plausible du risque

    Les avocats sud-africains ont en outre mis en exergue, à travers de nombreux discours de hauts responsables politiques et militaires israéliens déshumanisant la population gazaouie dans son ensemble, ce qu’ils considèrent être une intention génocidaire manifeste. Ces actes et ces discours doivent aussi, rappellent les avocats sud-africains, s’interpréter dans un continuum plus large d’exactions et de violations des droits des Palestiniens depuis plus de soixante-quinze ans – une période durant laquelle Israël a conduit une politique d’apartheid, a occupé et colonisé le territoire palestinien et a exercé un blocus total de la bande de Gaza en violation du droit international.

    Si Israël s’est efforcé de démontrer qu’il n’existe aucune intention génocidaire, et que ses opérations militaires à Gaza sont exclusivement destinées à défendre sa population contre la menace existentielle que représenterait le Hamas, l’insistance de ses dirigeants à nier l’existence d’un « peuple palestinien » et à vouloir poursuivre une guerre aux conséquences catastrophiques pour la population pourrait pousser la Cour à reconnaître le caractère plausible du risque de génocide et à ordonner des mesures conservatoires en accord avec sa jurisprudence récente concernant le Myanmar et l’Ukraine.

    A cette « exceptionnalité juridique », s’ajoute une « exceptionnalité politique » liée aux conséquences possibles de la décision de la CIJ. La reconnaissance d’un risque de génocide de la population gazaouie constituerait une onde de choc mondiale. Juridiquement, non seulement Israël pourrait être contraint de mettre un terme à ses opérations meurtrières dans la bande de Gaza, mais ses principaux alliés, notamment les Etats-Unis, devraient reconsidérer leur soutien inconditionnel à un Etat désormais suspecté de génocide. Le non-respect par Israël de la décision (obligatoire) de la Cour pourrait donner lieu à des sanctions internationales.

    Cette évolution marquerait un tournant politique majeur tant Israël bénéficie d’une impunité de facto, en dépit de sa violation manifeste du droit international. La colonisation de la Cisjordanie, le blocus total de la bande de Gaza et la privation du droit du peuple palestinien à disposer de lui-même ont été condamnés par de multiples résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale des Nations unies.

    Contestation de l’hégémonie occidentale

    Plusieurs rapports des commissions d’enquête des Nations unies ont en outre dénoncé les crimes internationaux commis par Israël à l’encontre de la population palestinienne, y compris des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. La décision de la CIJ, qui pourrait aussi inciter la Cour pénale internationale à agir avec plus de célérité, marquerait en ce sens un changement de paradigme majeur.
    Enfin, cette requête constitue une exceptionnalité « symbolique » et géopolitique en raison de l’identité des deux parties impliquées. Israël est censé offrir un Etat aux juifs victimes d’un antisémitisme séculaire dont la dimension criminelle a atteint un niveau paroxystique avec la Shoah, et l’Afrique du Sud de Nelson Mandela (1918-2013) a vaincu l’apartheid et son idéologie fondée sur le « suprémacisme blanc » et la ségrégation raciale.

    Aujourd’hui, la requête de l’Afrique du Sud porte en elle le bouleversement du monde en cours : le discours sur l’universalisme des #droits_humains et le respect du #droit_international n’est plus assumé et incarné par l’#Occident mais par une démocratie du Sud. En cela, la guerre à Gaza nourrit de manière décisive la contestation de l’hégémonie occidentale et de sa prétention au magistère moral.

    La duplicité de l’Occident dès lors qu’il s’agit de respect du droit international par Israël sape l’édifice rhétorique et juridique qu’il a lui-même forgé à la fin de la seconde guerre mondiale. Le cimetière du droit international que représente Gaza marque la fin d’un monde.

    Béligh Nabli est professeur des universités en droit public à l’UPEC-Paris XII, auteur de Relations internationales. Droit. Théorie. Pratique (Pedone, 2023).
    Johann Soufi est avocat spécialisé en droit international et chercheur associé au Centre Thucydide de l’université Paris-II-Panthéon-Assas.

  • Ami Ayalon, ancien chef du Shin Bet : « Si nous refusons la paix, ce qui nous attend sera pire que le 7 octobre »
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/24/ami-ayalon-ancien-chef-du-shin-bet-si-nous-refusons-la-paix-ce-qui-nous-atte

    Le contre-amiral, ancien chef du service de renseignement intérieur israélien, redoute que la guerre à #Gaza ne soit pas gagnable et met en garde contre l’irruption d’une nouvelle Intifada en Cisjordanie.

    Après une carrière dans l’armée, le contre-amiral Ami Ayalon a dirigé le service de renseignement intérieur israélien, le Shin Bet, entre 1996 et 2000. Il a entrepris depuis un cheminement intellectuel et politique qui l’a amené à s’interroger sur la notion d’ennemi dans le #conflit_israélo-palestinien, ainsi que sur les errances de la vision sécuritaire israélienne qui menace, selon lui, de déboucher sur une « guerre sans fin ». Agé de 78 ans, il est l’auteur de Friendly Fire : How Israel Became Its Own Worst Enemy (« Tir ami : comment Israël est devenu son propre et pire ennemi », Steerforth, 2020, non traduit).

    https://justpaste.it/g15vp

    #Israël #Palestine

  • La #Paix libérée n° 1 *
    https://bascules.blog/2024/01/11/la-paix-liberee-n-1

    Papillon-flyer d’expression populaire pour libérer la Paix en #Palestine-Israël ! Ce flyer m’a été transmis par un camarade de PEPS, Pour une Ecologie Populaire et Sociale du Tarn. Une invitation à agir pour exiger la paix libérée en Palestine-Israël ! Source : lapaixliberee@orange.fr – 09 janvier 2024 MOBILISATION MONDIALE POUR LA PALESTINE COMMENT AGIR TOUT DE […]

    #Assos,collectifs,_mouvements,... #Conflits,_guerres,_colonialisme... #Luttes #Agir_pour_la_Paix


    https://2.gravatar.com/avatar/2cef04a2923b4b5ffd87d36fa9b79bc27ee5b22c4478d785c3a3b7ef8ab60424?s=96&d=

  • Devrions-nous être “machiavéliques” ?
    https://www.frustrationmagazine.fr/machiavel

    “Machiavélique” c’est l’adjectif que l’on entend souvent pour décrire l’attitude cynique qui consiste à utiliser tous les moyens à disposition tant qu’ils permettent d’arriver à ses fins, bref un comportement immoral qui caractériserait bien notre personnel politique. Le terme provient de #Machiavel (1469-1527), penseur politique italien de la Renaissance. Celui-ci fait partie des auteurs cités […]

    #On_a_vu,_lu,_joué #conflits_sociaux #Histoire #Marxisme #Rapports_de_force #Révolte_des_ciompi

  • #Violences et fabrique de la #subalternité_foncière à #Sihanoukville, Cambodge

    Depuis le milieu des années 2010, la ville de Sihanoukville au Cambodge, principal #port du pays et petit centre de villégiature, fait l’objet d’un #développement_urbain éclair porté par la construction de nouvelles infrastructures de transport et de zones logistiques, de casinos (plus de 150 nouveaux casinos depuis 2015) et la mise en place de #mégaprojets_immobiliers à vocation touristique qui nourrissent une #spéculation_foncière galopante. Ces transformations territoriales sont notamment le fruit d’une coopération technique, politique et économique entre le Cambodge et la #Chine au nom de la #Belt_and_Road_Initiative, la nouvelle politique étrangère globale chinoise lancée en 2013 par #Xi_Jinping. Pour le gouvernement cambodgien, Sihanoukville et sa région doivent devenir, au cours de la prochaine décennie, la seconde plateforme économique, logistique et industrielle du pays après Phnom Penh, la capitale (Royal Government of Cambodia, 2015). Ce développement urbain très rapide a entraîné une évolution concomitante des logiques d’échange et de valorisation des #ressources_foncières. Comme le relève régulièrement la presse internationale, il nourrit d’importants #conflits_fonciers, souvent violents, dont pâtissent en premier lieu les habitants les plus pauvres.

    Cette recherche veut comprendre la place et le rôle de la violence dans le déploiement des mécanismes d’#exclusion_foncière à Sihanoukville. Pour reprendre les mots de Fernand Braudel (2013 [1963]), alors que ces #conflits_fonciers semblent surgir de manière « précipitée », notre recherche montre qu’ils s’inscrivent aussi dans les « pas lents » des relations foncières et de la fabrique du territoire urbain. Dans ce contexte, le jaillissement des tensions foncières convoque des temporalités et des échelles variées dont la prise en compte permet de mieux penser le rôle de la violence dans la production de l’espace.

    Les processus d’exclusion foncière au Cambodge s’inscrivent dans une trajectoire historique particulière. Le #génocide et l’#urbicide [1] #khmers_rouges entre 1975 et 1979, l’abolition de la #propriété_privée entre 1975 et 1989 et la #libéralisation très rapide de l’économie du pays à partir des années 1990 ont posé les jalons de rapports fonciers particulièrement conflictuels, tant dans les espaces ruraux qu’urbains (Blot, 2013 ; Fauveaud, 2015 ; Loughlin et Milne, 2021). Ainsi, l’#appropriation, l’#accaparement et la #valorisation des ressources foncières au Cambodge, et en Asie du Sud-Est en général, s’accompagnent d’une importante « #violence_foncière » tant physique (évictions et répression) que sociale (précarisation des plus pauvres, exclusion sociale), politique (criminalisation et dépossession des droits juridiques) et économique (dépossession des biens fonciers et précarisation).

    Cet article souhaite ainsi proposer une lecture transversale de la violence associée aux enjeux fonciers. Si la notion de violence traverse la littérature académique portant sur les logiques d’exclusion foncière en Asie du Sud-Est (Hall, Hirsch et Li, 2011 ; Harms, 2016) ou dans le Sud global plus généralement (Peluso et Lund, 2011 ; Zoomers, 2010), peu de recherches la placent au cœur de leurs analyses, malgré quelques exceptions (sur le Cambodge, voir notamment Springer, 2015). Par ailleurs, la violence est souvent étudiée en fonction d’ancrages théoriques fragmentés. Ceux-ci restent très divisés entre : 1) des travaux centrés sur le rôle de l’État et des systèmes de régulation (notamment économiques) dans le déploiement de la violence foncière (Hall, 2011 ; Springer, 2013) ; 2) des analyses politico-économiques des formes de dépossession liées aux modes de privatisation du foncier, à la propriété et à l’accumulation du capital, parfois resituées dans une lecture historique des sociétés coloniales et postcoloniales (voir par exemple Rhoads, 2018) ; 3) des approches considérant la violence comme stratégie ou outil mobilisés dans la réalisation de l’accaparement foncier et la répression des mouvements sociaux (voir par exemple Leitner and Sheppard, 2018) ; 4) des analyses plus ontologiques explorant les processus corporels, émotionnels et identitaires (comme le genre) qui découlent des violences foncières ou conditionnent les mobilisations sociales (voir par exemple Brickell, 2014 ; Schoenberger et Beban, 2018).

    Malgré la diversité de ces approches, la notion de violence reste principalement attachée au processus de #dépossession_foncière, tout en étant analysée à une échelle temporelle courte, centrée sur le moment de l’#éviction proprement dit. Dans cet article et à la suite de Marina Kolovou Kouri et al. (2021), nous défendons au contraire une approche multidimensionnelle des violences foncières analysées à des échelles temporelles et spatiales variées. Une telle transversalité semble indispensable pour mieux saisir les différentes forces qui participent de la construction des violences et de l’exclusion foncières. En effet, si les conflits fonciers sont traversés par diverses formes de violences, celles-ci ne découlent pas automatiquement d’eux et sont également déterminées par le contexte social, économique et politique qui leur sert de moule. Ces violences restent ainsi attachées aux différents #rapports_de_domination qui organisent les #rapports_sociaux en général (Bourdieu, 2018 [1972]), tout en représentant une forme d’#oppression à part entière participant des #inégalités et #injustices sociales sur le temps long (Young, 2011).

    Nous voyons, dans cet article, comment des formes de violence variées structurent les rapports de pouvoir qui se jouent dans l’appropriation et la valorisation des ressources foncières, ainsi que dans la régulation des rapports fonciers. Nous montrons que ces violences servent non seulement d’instrument d’oppression envers certains groupes de populations considérés comme « indésirables », mais aussi qu’elles les maintiennent dans ce que nous nommons une « subalternité foncière ». En prenant appui sur Chakravorty Spivak Gayatri (2005) et Ananya Roy (2011), nous définissons cette dernière comme la mise en place, sur le temps long et par la violence, d’une oppression systémique des citadins les plus pauvres par leur #invisibilisation, leur #criminalisation et l’#informalisation constante de leurs modes d’occupations de l’espace. La #subalternité foncière représente en ce sens une forme d’oppression dont la violence est l’un des dispositifs centraux.

    Cet article s’appuie sur des recherches ethnographiques menées à Phnom Penh et à Sihanoukville, entre 2019 et 2021. Elles comprennent un important travail d’observation, la collecte et l’analyse de documents officiels, de rapports techniques, d’articles de presse et de discours politiques, ainsi que la réalisation de près de soixante-dix entretiens semi-directifs (effectués en khmer principalement, parfois en mandarin, et retranscrits en anglais) auprès d’habitants de Sihanoukville, de représentants territoriaux locaux, d’experts et de membres de groupes criminels. Dans ce texte, le codage des entretiens suit la dénomination suivante : « OF » désigne les employés publics, « EX » des experts ayant une connaissance privilégiée du sujet, « RE » les résidents des zones d’habitat précaire et « F » les acteurs de la criminalité ; le numéro qui suit la lettre est aléatoire et sert à distinguer les personnes ayant répondu à l’enquête ; vient ensuite l’année de réalisation de l’entretien. De nombreux entretiens avec les habitants ont été conduits en groupe.

    https://www.jssj.org/article/violences-et-fabrique-de-la-subalternite-fonciere

    #foncier #Cambodge #Chine #violence

  • Des collections en résistance
    https://laviedesidees.fr/Des-collections-en-resistance

    Si l’art est incapable d’arrêter la guerre, il rend possible des formes de #résistance symbolique et institutionnelle, explique Marion Slitine, commissaire associée de l’exposition Palestine à l’IMA et spécialiste de la création contemporaine palestinienne. Entretien avec Marion Slitine à propos de l’exposition « Ce que la Palestine apporte au monde », à l’Institut du monde arabe, jusqu’au 31 décembre 2023.

    #Arts #conflit_israélo-palestinien #art_contemporain
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20231222_palestine-2.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20231222_palestine-2.pdf

  • Israël était au courant du projet d’attaque du Hamas depuis plus d’un an
    https://www.les-crises.fr/israel-etait-au-courant-du-projet-d-attaque-du-hamas-depuis-plus-d-un-an

    Un plan détaillé de l’attaque a été analysé par le Times. Les responsables israéliens l’ont balayé d’un revers de main, le qualifiant d’idéaliste et ont fait fi des mises en garde concrètes. Source : The New York Times, Ronen Bergman, Adam GoldmanTraduit par les lecteurs du site Les-Crises Par Ronen Bergman et Adam Goldman de […]

    #Géopolitique #Conflit_Israélo-Palestinien #Géopolitique,_Conflit_Israélo-Palestinien

  • Le Hezbollah face à la guerre de Gaza
    https://laviedesidees.fr/Le-Hezbollah-face-a-la-guerre-de-Gaza

    Le Hezbollah libanais se déclare solidaire de la cause palestinienne et fait de la lutte contre #Israël l’un de ses principes. Mais le décryptage des discours de Hassan Nasrallah, son secrétaire général, permet de comprendre pourquoi il n’engage pas ses troupes contre l’armée israélienne.

    #International #Liban #conflit_israélo-palestinien
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20231215_hezbollah.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20231215_hezbollah.pdf

  • La France augmente d’un tiers sa contribution à l’agence de l’ONU pour les réfugiés
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/12/13/la-france-augmente-d-un-tiers-sa-contribution-a-l-agence-de-l-onu-pour-les-r

    La France augmente d’un tiers sa contribution à l’agence de l’ONU pour les réfugiés
    Le Monde avec AFP
    La France va augmenter d’un tiers cette année sa contribution au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) pour la porter à 120 millions d’euros, a rapporté la cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna, à Genève. La France « s’efforcera de la maintenir à ce niveau en 2024 », a-t-elle déclaré à l’ouverture du Forum de l’ONU sur les réfugiés, que la France coparraine avec la Colombie, le Japon, la Jordanie et l’Ouganda. « La France continuera donc à soutenir le HCR, et elle a décidé de tripler, en trois ans, sa contribution financière, comme elle s’y était engagée », a insisté la ministre française.En 2022, cette contribution était de 91,6 millions d’euros, et d’environ 30 millions d’euros il y a trois ans, selon des chiffres du ministère. A l’ouverture du forum, le haut-commissaire de l’ONU pour les réfugiés, Filippo Grandi, avait rappelé que son agence avait encore besoin de 400 millions de dollars (371 millions d’euros) d’ici la fin de l’année.
    (...) Alors que les crises et les conflits se multiplient, plus de 114 millions de personnes étaient déplacées à la fin septembre dans le monde, un nombre record, selon le HCR. La population mondiale de réfugiés a doublé au cours des sept dernières années, atteignant 36,4 millions de personnes à la mi-2023, un autre record. Cela représente une augmentation de 3 % par rapport à la fin de 2022.
    « Alors que s’achève la COP28 avec un consensus appelant à une sortie des énergies fossiles, afin de permettre d’arriver au “net zéro” en 2050 comme c’est indispensable – ambition qu’il va maintenant falloir concrétiser –, je tiens aussi à rappeler que le dérèglement climatique a des conséquences très lourdes sur les mouvements migratoires », a développé Mme Colonna.
    Elle a par ailleurs appelé la communauté internationale « à lutter résolument contre les réseaux criminels » et « à nous mobiliser davantage collectivement pour éliminer la traite des êtres humains par des poursuites judiciaires, par des sanctions sévères et par le tarissement des financements de ces trafics ». La ministre a également appelé à « soutenir les pays limitrophes des zones de conflit armé, qui sont les premiers pays d’accueil ». Et « nous devons contribuer à alléger la pression qui s’exerce sur les pays d’accueil », a-t-elle dit. La ministre française a expliqué que la France « accueille 3 000 réfugiés par an dans le cadre du programme de réinstallation du HCR, et [qu’]elle maintiendra cet engagement en 2024 et 2025 ». Le programme de réinstallation du HCR permet aux réfugiés ayant trouvé refuge dans un premier pays de s’installer dans un autre pays qui a accepté de leur assurer une protection internationale et, à terme, une résidence permanente.
    Catherine Colonna a également annoncé que la France « s’engage à réinstaller en France [par le biais du] dispositif “Femmes en danger” des femmes réfugiées isolées et particulièrement vulnérables, notamment les victimes de violences, d’exploitation ou de traite des êtres humains ».

    #Covid-19#migrant#migration# france#HCR#refugie#traite#femme#crise#conflit

  • Surprise ! (écrasante) victoire du « oui » (des « oui », il y avait cinq questions) au référendum vénézuélien sur la #Guayana_Esequiba
    https://www.courrierinternational.com/article/referendum-avec-sa-promesse-d-annexion-de-l-essequibo-le-vene

    Les autorités vénézuéliennes assurent que plus de 10 millions d’électeurs ont participé, dimanche 3 décembre, au référendum organisé pour préparer la création d’un nouveau département vénézuélien appelé “Guayana Esequiba”. Le résultat du vote, qui a vu le oui l’emporter officiellement à 95,93 %, risque d’accroître les tensions avec le Guyana voisin.

    “Ce fut une victoire écrasante du oui !” C’est plein d’émotion que le président du Conseil national électoral (CNE) vénézuélien, Elvis Amoroso, a annoncé, dimanche 3 décembre, le résultat du référendum qui proposait d’annexer la région de l’#Essequibo du Guyana voisin, qui est au cœur d’une dispute historique entre les deux pays, rapporte le média progouvernemental Telesur.
    D’après les chiffres officiels, 95,93 % des plus de 10 millions de votants − 20,7 millions étaient appelés aux urnes − se seraient prononcés pour la création d’un nouveau département vénézuélien appelé “Guayana Esequiba” et pour l’octroi de la nationalité vénézuélienne à ses habitants.

    Apparemment, on ne trouve pas clairement le taux d’abstention (ou de participation), certains médias allant même jusqu’à suggérer que le chiffre de 10 millions serait le total des « oui », à diviser par 5, donc… Les témoignages locaux insistent sur les bureaux de vote vides.

    #Esequibo

  • Le dessous des images. Derniers instants avant le naufrage

    Au large de la Grèce, une équipe de garde-côtes survole et capture cette scène depuis un hélicoptère. Des centaines de migrants appellent au secours depuis un chalutier. La plupart ne survivront pas au naufrage. Mais à quoi a servi cette image ? Présenté par Sonia Devillers, le magazine qui analyse les images de notre époque.

    Ce cliché du 13 juin 2023 est repris dans toute la presse internationale. Les autorités grecques ont photographié ce bateau de pêche qu’ils savent bondé et fragile, et dont les passagers sont affamés et déshydratés. Pourtant, ils ne seront pas capables de les secourir. La responsabilité des garde-côtes sera mise en cause par médias et ONG. Arthur Carpentier, journaliste au Monde et coauteur d’une enquête sur ce naufrage, nous explique en quoi les images ont permis de reconstituer le drame. Le chercheur suisse Charles Heller nous aide à comprendre l’impact médiatique, politique et symbolique des images de migrants et de naufrages en Méditerranée.

    https://www.arte.tv/fr/videos/110342-133-A/le-dessous-des-images

    Citation de #Charles_Heller :

    « Ces #images cristallisent toutes les #inégalités et les #conflits du monde dans lequel on vit. Elles nous disent aussi la #normalisation de la #violence des #frontières, sur la large acceptation de dizaines de milliers de #morts aux frontières européennes, et en #Méditerranée en particulier »

    #naufrage #migrations #réfugiés #mer #Méditerranée #mer_Méditerranée #Grèce #reconstruction #Pylos #géolocalisation #architecture_forensique #images #mourir_en_mer #morts_en_mer #garde-côtes #Frontex #reconstitution #SAR #mer_Egée #border_forensics #domination #imaginaire #invasion #3_octobre_2013 #émoi #émotions #normalisation_de_la_violence

    ping @reka

    • Frontex report into Greek shipwreck suggests more deaths could have been prevented

      A Frontex report suggesting that many of the deaths caused by the shipwreck off the Greek coast near Pylos last June could have been prevented was released by the Aegean Boat Report NGO on their X feed yesterday evening (January 31).

      Investigations into what happened to the Adriana, an overcrowded fishing vessel carrying some 750 people from Libya to Italy that sank off the coast of Greece on June 13, are ongoing.

      However, a report produced by the European Border Agency Frontex — marked “sensitive” and dated December 1, 2023 — was posted to X (formerly known as Twitter) late on January 31.

      The report was posted by Aegean Boat Report, an organization working with migrants in the eastern Mediterranean.

      In their post on X, they thank freelance Brussels-based journalist Eleonora Vasques for “making it available to the public.” Frontex told InfoMigrants in an email that they had released the report via their “Transparency Office.” They added that the “release wass part of a Public Access to Documents request, an important process that allows us to share information with the public.”

      Vasques writes regularly for the European news portal Euractiv. One of her latest reports looks into what happened in the Cutro shipwreck off Italy almost a year ago. The story was also sourced back to an internal Frontex report, which concluded that more lives could have potentially been saved if the response from Frontex and the Italian coast guard had been different.

      https://twitter.com/ABoatReport/status/1752800986664448090

      Long and detailed report

      The 17-page Pylos report from Frontex is redacted in parts and goes into great detail about what happened and which authorities and merchant ships were involved. It also compares timelines from various authorities, NGOs and media organizations.

      In the email to InfoMigrants, Frontex continued that they “strive to make such documents available in our Public Register of Documents as promptly as possible.” The Press Spokesperson Krzysztof Borowski wrote that the “Pylos tragedy is a stark reminder of the challenges and dangers faced at sea. We at Frontex share the profound concern and sadness of the public regarding this heartbreaking event.” He finished by saying: “Our thoughts are with all those affected by this tragedy, and we remain dedicated to our mission of safeguarding lives while ensuring border security.”
      Committment to ’assess cases more thoroughly

      Although the report finds that Frontex “followed applicable procedures”, it admitted that “going forward and based on a reviewed assessment methodology ... the team … should assess similar cases more thoroughly against the need to issue a Mayday alert.”

      A Mayday alert is a radio distress signal used at sea.

      The report appears to suggest that more could have been done on the day to prevent such a huge loss of life.

      According to the Frontex report posted on X, “in the hours following the sighting of Adriana, Frontex made three attempts to follow up on the case, by suggesting additional Frontex Surveillance Aircraft (FSA) sorties.”

      Frontex writes that “no reply was received by the Greek authorities to Frontex’ repeated offers until Adriana’s shipwreck.”

      Frontex made an initial statement on June 16 expressing “shock and sadness” at the events off Pylos.
      ’Greek authorities failed to timely declare a search and rescue situation’

      Although the investigating office at Frontex underlines that it is “not in a position to conclude what caused Adriana’s capsizing and shipwreck … it appears that the Greek authorities failed to timely declare a search and rescue and to deploy a sufficient number of appropriate assets in time to rescue the migrants.”

      The report stated that Frontex “regrets the lack of information provided by the Greek authorities to its enquiry but still expects to receive updates from the national investigations in progress.”

      According to Frontex’ timeline of the incident, the agency first learned about the existence of the fishing vessel carrying migrants on June 13 at around 10:12 UTC, or around 13:12 in Greek summer time. They spotted the vessel from their aerial surveillance plane Eagle 1. About four hours later, another update was sent to the fundamental rights monitor, but according to the report, nothing “out of the ordinary” was flagged regarding the vessel at this point.

      The next paragraph jumped to June 14 at 06.19 UTC, when the fundamental rights monitor received “another update … notifying that Adriana sank overnight and a SAR [Search and Rescue] was in progress.”
      ’Serious Incident Report’ launched by Frontex on June 26

      In the following days, the Office for Fundamental Rights at Frontex monitored the aftermath of the incident, states the report.

      They studied “Frontex’ own sightings of Adriana” along with “statements by Greek officials, and initial information reported in the media.”

      Frontex launched a “Serious Incident Report (SIR) on June 26, “to clarify the role of Frontex in the incident as well as the legality and fundamental rights compliance of the assistance to the boat in distress, and the coordination and conduct of rescue operation by national authorities.”

      According to a summary of that work, the first mention of the Adriana came from the Italian control authorities in Rome at 08:01 UTC on June 13.

      At that point, Rome’s search and rescue authorities contacted Greece’s authorities and Frontex about “a fishing vessel with approximately 750 migrants on board, known to be sailing within the Greek Search and Rescue Region at 06:51 UTC.” At that point, Rome had already alerted the authorities to “reports of two dead children on board.”

      After receiving this report, Frontex wrote that it directed its plane Eagle 1, which was already in the air, to fly over the fishing vessel “even though the vessel lay outside the normal patrolling route.”

      The report said the Eagle 1 spotted the “heavily overcrowded” vessel at 09:47 UTC and informed the Greek authorities. Ten minutes later, the plane left the area due to low fuel and returned to base.
      Italian authorities report Adriana ’adrift’ long before Greek authorities do

      By 13:18, Rome’s search and rescue authorities provided an update of the situation to Greek authorities and Frontex. At that point, they said the boat was “reported adrift” and had “seven people dead on board.”

      At 14:54, Frontex reportedly received an email from the NGO Watch The Med – Alarm Phone alerting Frontex, JRCC Piraeus, the Greek Ombudsman’s Office, UNHCR and others to the new location of the fishing boat. In that email, Alarm Phone stated there were “several very sick individuals, including babies” among the approximately 750 people on board and that the boat was “not able to sail.”

      About 30 minutes later, this email was forwarded by Frontex to the Greek National Coordination Center and JRCC Piraeus, and it was sent on to the Fundamental Rights Office.

      About an hour later, Frontex contacted the Greek authorities to request an update on the situation. Frontex also offered to deploy a surveillance aircraft to check on the ship’s current position, but reports it received no reply.

      Just under two and a half hours later, the Greek authorities did request that Frontex support them “in the detection of a migrant boat within the maritime area south of Crete, as part of another SAR operation.” This turned out to be a sailing boat with about 50 people on board.
      ’No reply was received’

      Later that evening, Frontex contacted the Greek authorities twice more and said no reply was received.

      At 23:20 UTC, Frontex redirected the plane that had been helping with the fishing boat off Crete to the last known position of the fishing vessel.

      The timeline moves to June 14. At 02:46 UTC, Frontex informs the Greek authorities that its plane was headed towards the last position of the fishing vessel. It says it received no reply from the Hellenic authorities.

      Over an hour passed before the plane, this time the Heron 2, reached the “operational area” where it spotted “nine maritime assets (eight merchant vessels and one Hellenic Coast Guard patrol vessel) and two helicopters involved in a large-scale SAR operation.” At that point, states Frontex in the report “no signs of the fishing vessel were spotted.”

      At 05:31, Frontex told the Greek authorities that its plane Heron 1 was about to leave the operation, but offered Eagle 1, which was already airborne, to help with the SAR operation. The Greek authorities replied over two hours later that “no further aerial surveillance support was needed for the time being.”
      No mention of dead bodies on board in Greek timeline

      The Frontex report then includes a similar timeline from the Greek authorities. In the Greek version, there is no initial mention of dead bodies on board. They say they established contact with those on board and “no request for assistance was addressed to the Greek authorities.”

      Although the Italians reported that the vessel was already adrift around 13:18 UTC, according to the Frontex report, in the Greek version, the vessel is “still sailing with a steady course and speed” at 15:00 UTC.

      Around that same time, a Maltese flagged commercial vessel approaches the fishing boat to supply them with food and water, as requested by the Greek authorities. According to the Greek report, the people on board were repeatedly asked if they were facing “any kind of danger” or were “in need of additional support.” Their answer, according to Greece, was “they just wanted to continue sailing towards Italy.”

      30 minutes later, again according to JRCC Piraeus, via satellite phone contact, those on board said they wanted to keep sailing.

      At 18:00, the boat was approached again. According to the report, the migrants “accepted water” from the Greek-flagged commercial vessel that approached them, but “threw the rest of the supplies into the sea.” This approach and refusal of assistance carried on into the evening.
      Adriana ’still holding a steady course and speed’

      At 19:40 UTC, according to the Greek report, a Greek coast guard vessel approached the fishing vessel and “remained at a close distance in order to observe it.” It was still holding a “steady course and speed, without any indications of sailing problems.”

      It was only at 22:40 UTC, according to the Greek report, that the fishing vessel “stopped moving and informed the Greek authorities that they had an engine failure.”

      A Greek coast guard vessel then immediately approached the vessel to assess the situation. Less than an hour later — at 23:04 UTC, but 02:04 local time on June 14 — the Greek report notes that the fishing vessel “took an inclination to the right side, then a sudden inclination to the left side and again a great inclination to the right side, and eventually capsized.”

      They said "people on the external deck fell in the sea and the vessel sunk within 10-15 minutes.” At that point, the Hellenic coast guard “initiated a SAR operation.”

      The Frontex report then notes “alleged discrepancies” between the various timelines and survivor statements given to the media.

      They say that many of the survivors reported that the Greek coast guard “tied ropes onto the fishing vessel in an effort to tow it,” which allegedly caused it to destabilize and capsize.

      In the past, the Greek coast guard have tied and towed vessels successfully towards safety.

      However, while the Greek coast guard acknowledged that one rope was attached around three hours before the boat sank to ascertain passengers’ conditions, there was “no attempt to tow it.”

      The rope, say the Greeks, was removed by the migrants on board just a few minutes later and the coast guard vessel moved a distance away to continue observation.
      Was Adriana stationary prior to capsizing or not?

      The BBC and several other media outlets also reported at the time that prior to capsizing and sinking, the fishing vessel had not moved for several hours.

      This is consistent with the Frontex timeline, which mentions the Italian authorities’ warnings that the boat was adrift the day before it eventually capsized.

      Later in the report, Frontex notes that many of the “alternative and complementary timelines” put together by international NGOs and journalists are “credible” as they quote “more than one source for each statement.”

      The Frontex report looks into the question of whether or not the Adriana was drifting for several hours before sinking.

      It concludes that the Faithful Warrior, one of the merchant tankers sent to assist, was tracked between 17:00 and 20:00 and was “likely stationary or moving at extremely slow speed (less than 1 knot),” indicating that the Adriana was probably not sailing normally until shortly before it capsized as the Greek report claimed.

      The report also consulted “maritime experts to gain insight into issues pertaining to stability when a trawler of Adriana’s type is overloaded with human cargo.” Although their consultations were not precise due to a lack technical data, the experts indicated that the amount of people on board could have destabilized the boat or affected its stability.
      Testimony from survivors

      A Frontex team took testimonies from survivors after the shipwreck. They said they were told there were between 125 and 150 Syrians on board, including five women and six children.

      Around 400-425 Pakistanis were on board, the report said, most of whom were placed on the lower decks. The access ladders had been removed, making it impossible for them to exit.

      There were also between 150 and 170 Egyptians and about 10 Palestinians on board. The alleged smugglers were all said to be Egyptians and enforced discipline with pocket knives.

      Numerous fights broke out on board, particularly after food ran out a few days into sailing. At some point, the captain allegedly suffered a heart attack and the boat was “drifting without engine for extended periods of time.” On day four, June 12, six people were reported to have died, and others had resorted to drinking urine or sea water.

      On day five, June 13, some migrants said they received supplies from two vessels and “at night … were approached by a small boat that they were asked to follow.”

      They said they could not do this because of their engine malfunction. Several of the migrants also allege that attempts were made to tow the vessel — presumably by the Hellenic coast guard, they said.

      Survivors also said that at one point, a boat tied a rope to the front of the Adriana and started “making turns”. This, they said, “caused the migrants to run to one side, their vessel started rocking, and eventually capsized within 15 minutes.”

      Only people on the upper decks were able to jump into the water.
      Greek authorities leave ’detailed questions answered’

      In July, Frontex said it approached the Greek authorities with a “detailed set of questions” but most of its questions were left unanswered.

      In conclusion, the Frontex Fundamental Rights Office concluded that although Frontex “upheld” all its “applicable procedures,” in the light of the information that had already been transmitted and similar situations in which Mayday alerts had been issued, the assessment could have been different and the process for issuing Mayday alerts in the future “needs to be reviewed.”

      The report admits that “at the time of the initial sighting [of the Adriana] by Eagle 1, there was reasonable certainty that persons aboard … were threatened by grave and imminent danger and required immediate assistance.”

      They also say the “resources mobilized by the [Greek] authorities during the day … were not sufficient for the objective of rescuing the migrants.”

      Frontex adds that the Greek authorities appear to have “delayed the declaration of SAR operation until the moment of the shipwreck when it was no longer possible to rescue all the people on board.”

      https://www.infomigrants.net/en/post/54928/frontex-report-into-greek-shipwreck-suggests-more-deaths-could-have-be

  • Maladies à #prions : après le décès de plusieurs chercheurs, la sécurité des laboratoires en question
    https://archive.ph/2023.11.27-203218/https://www.lemonde.fr/sciences/article/2023/11/27/maladies-a-prions-apres-le-deces-de-plusieurs-chercheurs-la-securite-des-lab

    Où en est-on aujourd’hui ? Le moratoire est toujours en cours pour sept des neuf unités travaillant sur les prions, dans l’attente de la fin des audits internes et externes commandés, et de délibérations des instances d’hygiène et de sécurité, nous précise-t-on à la direction générale de la recherche et de l’innovation (DGRI) du ministère de la recherche. Un guide des bonnes pratiques a été rédigé à l’intention de l’ensemble des acteurs. Ce guide n’a pas repris une recommandation majeure du second rapport d’inspection qui, citant en modèle le CEA, prônait une séparation effective des chaînes de responsabilité liées à la sécurité et à la recherche « jusqu’au plus haut niveau de la hiérarchie, afin d’éviter les #conflits_d’intérêts ». De sorte que la course aux résultats scientifiques ne mette pas en péril la sécurité des agents.

    Gants anticoupure

    La direction de l’Inrae n’a pas retenu cette organisation, pourtant unanimement réclamée par les représentants du personnel chargés de la santé, de la sécurité et des conditions de travail au centre de Jouy-en-Josas, le 4 juillet 2022. Paradoxalement, alors que nombre d’équipes de recherche rongent encore leur frein dans l’attente de la levée du moratoire, l’unité concernée au laboratoire Virologie et immunologie moléculaires (VIM) de Jouy-en-Josas a repris ses activités – hors animalerie, trop vétuste.

    Pourtant, lors du comité social et économique central de l’Inrae, le 12 juillet 2022, les représentants du personnel s’y étaient unanimement opposés, s’abstenant quant à la poursuite du processus de sortie du moratoire.

    Quelques semaines auparavant, l’Inrae nous avait permis de visiter le VIM, dirigé par Pierre Sibille. Celui-ci nous avait conduits à travers son laboratoire L3 – le niveau de sécurité allant croissant de 1 à 4. Réhabilité en 2014, il forme « une boîte dans une boîte ultra-sécurisée, plus spacieuse » que celle où travaillait Emilie Jaumain lors de son accident. Il nous avait expliqué que les équipements de protection individuelle (EPI) étaient ce qui avait le plus changé depuis celui-ci. Le recours à des gants anticoupure offrant la dextérité nécessaire pour manipuler les lames de microscope et les coupes de cerveau de souris ne datait cependant que de 2021. Quant aux outils piquants ou tranchants, les pinces en plastique et les ciseaux jetables les avaient remplacés en 2020.

    L’une des questions qui taraudent les chercheurs concerne le risque de contamination par #aérosol, notamment lors d’opérations de multiplication des prions par amplification. M. Sibille nous avait assuré que cette technique dite « de PMCA », adoptée au début des années 2010, ne crée pas d’aérosols, « compte tenu des méthodes de prévention mises en place ». Elle est, selon lui, incontournable, « permettant de réduire considérablement la durée d’expérimentation et le recours aux animaux de laboratoire », même si des techniques d’amplification moins risquées sont désormais disponibles. Il avait insisté sur le coût de fonctionnement « astronomique » d’un laboratoire de type L3, estimant le budget supplémentaire postmoratoire à 200 000 euros par an pour les seuls EPI – « un surcoût que la direction générale s’est engagée à compenser pour les équipes les premières années ». Quant au microtome cryostatique, sorte de trancheuse à jambon permettant d’obtenir de très fines lames de cerveau des animaux contaminés, seules deux personnes étaient, selon lui, habilitées à utiliser cet outil à risque.

    Interdiction pour les stagiaires

    Ce genre d’arguments n’est pas de nature à rassurer l’Association Emilys. Créée en 2020 à la suite du décès d’Emilie Jaumain, elle fait figure d’aiguillon pour réclamer un plus haut niveau de sécurité au travail pour les personnes manipulant des prions et des agents pathogènes apparentés. Elle s’inquiète que toutes les leçons n’aient pas été tirées des drames survenus à l’Inrae. Elle réclame notamment « l’interdiction formelle de manipulation de ces agents infectieux mortels par des contractuels et des stagiaires ».

    Les stagiaires ? Claire Giry, qui dirige la DGRI, nous a assuré qu’ils ne pouvaient pas accéder aux installations sécurisées de type L3, même avant le moratoire, car « il faudrait un temps de formation [sur la sécurité] en général plus long que le stage lui-même ». « On est formels, insiste-t-elle, en se fondant sur ce que lui ont rapporté les tutelles de ces laboratoires. Les stagiaires n’ont pas accès aux L3 et n’ont pas manipulé ces agents. »

    Pourtant, nous avons pu recueillir plusieurs témoignages de stagiaires débutants, qui nous ont demandé de préserver leur anonymat, ayant passé plusieurs semaines au VIM de Jouy-en-Josas, dans les années 2010. Ils y ont procédé à des extractions de cerveaux d’animaux auxquels avaient été inoculés des prions pathogènes, et ont été amenés à utiliser le microtome cryostatique et à participer à des expériences visant à amplifier les prions, sans avoir bénéficié d’une formation poussée à la sécurité, avec pour protection des masques et une double paire de gants en latex. Ne possédant pas de badge en propre, ils étaient introduits dans le laboratoire sécurisé par leur tuteur, si bien qu’aucune traçabilité de leur présence ne pouvait être assurée. En 2020, un rapport interne de l’Inrae commandité par la direction après le décès d’Emilie Jaumain préconisait d’« afficher la liste des personnes autorisées et leur fonction et [de] vérifier les autorisations d’accès avec badge » au L3.

    Même si ces stagiaires ne nous ont signalé aucun accident, leur présence dans le L3 du VIM surprend d’autres experts du domaine, pour qui la manipulation de tels agents ne peut intervenir qu’au terme d’un long compagnonnage, durant lequel le tuteur a pu jauger la faculté des étudiants à appréhender le danger de telles manipulations.

    Suivi médical rétroactif

    La capacité de la DGRI à avoir un aperçu réel de l’activité de ces laboratoires pose en tout cas question. Dans un courrier à l’Association Emilys daté du 5 octobre, Claire Giry précisait que six des neuf laboratoires concernés avaient repris leurs activités. Quelques jours plus tard, ses services ne nous confirmaient la réactivation que de deux laboratoires. Pour certains d’entre eux, le blocage provient d’investissements en attente. Faudrait-il allouer des moyens humains et financiers supplémentaires aux laboratoires et aux animaleries pour les accompagner dans leurs efforts de sécurisation ? « Les organismes ne nous ont pas sollicités sur ce thème-là », note Claire Giry.

  • War-related sexual and gender-based violence in Tigray, Northern Ethiopia: a community-based study

    Introduction. #Sexual_and_gender-based_violence (#SGBV) during armed conflicts has serious ramifications with women and girls disproportionally affected. The impact of the conflict that erupted in November 2020 in Tigray on SGBV is not well documented. This study is aimed at assessing war-related SGBV in war-affected Tigray, Ethiopia.

    Methods: A community-based survey was conducted in 52 (out of 84) districts of Tigray, excluding its western zone and some districts bordering Eritrea due to security reasons. Using a two-stage multistage cluster sampling technique, a total of 5171 women of reproductive age (15-49 years) were randomly selected and included in the study. Analysis used weighted descriptive statistics, regression modelling and tests of associations.

    Results: Overall, 43.3% (2241/5171) of women experienced at least one type of gender-based violence. The incidents of sexual, physical and psychological violence, and rape among women of reproductive age were found to be 9.7% (500/5171), 28.6% (1480/5171), 40.4% (2090/5171) and 7.9% (411/5171), respectively. Of the sexual violence survivors, rape accounted for 82.2% (411/500) cases, of which 68.4% (247) reported being gang raped. Young women (aged 15-24 years) were the most affected by sexual violence, 29.2% (146/500). Commonly reported SGBV-related issues were physical trauma, 23.8% (533/2241), sexually transmitted infections, 16.5% (68/411), HIV infection, 2.7% (11/411), unwanted pregnancy, 9.5% (39/411) and depression 19.2% (431/2241). Most survivors (89.7%) did not receive any postviolence medical or psychological support.

    Conclusions: Systemic war-related SGBV was prevalent in Tigray, with gang-rape as the most common form of sexual violence. Immediate medical and psychological care, and long-term rehabilitation and community support for survivors are urgently needed and recommended.

    Keywords: community-based survey; health policy; injury; public health.

    https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37479499

    #viols #viol_de_guere #Tigray #Ethiopie #guerre #conflit_armé #femmes #filles #genre #article_scientifique #statistiques #chiffres

    Un article du Washington Post sur ce sujet (#paywall):
    https://www.washingtonpost.com/world/2023/11/26/ethiopia-tigray-rape-survivors-stigma

  • « Il est faux et anachronique de considérer le Coran comme antisémite », Meir M. Bar-Asher

    Si le Coran contient des passages polémiques sur les juifs, d’autres donnent une vision plus positive des « enfants d’Israël ». Cette ambivalence rend impossible une lecture univoque du texte sacré de l’islam, explique l’islamologue de confession juive Meir M. Bar-Asher, dans un entretien au « Monde ».
    Propos recueillis par Raphaël Buisson-Rozensztrauch


    A l’intérieur de la mosquée Al-Aqsa, sur le complexe connu par les musulmans comme Al-Haram Al-Sharif et par les juifs comme le mont du Temple, dans la vieille ville de Jérusalem, en 2017. AMMAR AWAD / REUTERS

    « La lutte du Hamas contre Israël a un aspect national et un aspect religieux, ce dernier étant le plus substantiel », assure l’islamologue et philosophe Meir M. Bar-Asher. Le mouvement islamiste palestinien, comme d’autres à travers le monde, puise dans certains textes fondamentaux de l’#islam, à commencer par le #Coran, pour alimenter sa haine anti-Israël, voire antijuifs. Néanmoins, selon ce professeur en études islamiques à l’Université hébraïque de Jérusalem – auteur, entre autres, de Les Juifs dans le Coran (Albin Michel, 2019) –, si le livre sacré de l’islam contient effectivement de nombreux passages ambigus à l’égard des #juifs, il recèle aussi plusieurs clés pour les dépasser.

    Comment avez-vous vécu personnellement les attaques terroristes du Hamas le 7 octobre contre Israël ?

    Le 7 octobre 2023, lorsque les événements se sont produits, j’étais à Paris. J’ai suivi les nouvelles de là-bas, et suis retourné en #Israël quelques jours plus tard. Comme tout le monde dans le pays, j’ai été terriblement choqué par l’atrocité des crimes du Hamas et je dois avouer que, bien que leur idéologie me soit très connue, je n’imaginais pas leurs membres susceptibles de commettre ce genre d’actes.

    On observe, depuis les attentats du 7 octobre et le début de la riposte israélienne à Gaza, une recrudescence des actes antisémites dans le monde entier, en France notamment. Y a-t-il une dimension religieuse à ce conflit ?

    Oui, absolument. La lutte du Hamas contre Israël a un aspect national et un aspect religieux, ce dernier étant le plus substantiel. Le Hamas considère que personne d’autre que les #musulmans n’a le droit de dominer la #Terre_sainte (« al-ard al-muqaddasa »). La terre leur a été donnée à la fois par #Dieu et par l’acte de #conquête sur les chrétiens, c’est-à-dire l’Empire byzantin, au début du VIIe siècle, peu après la mort de Muhammad [Mahomet]. Par le fait même de sa conquête, la terre est devenue un waqf, c’est-à-dire un territoire sacré.

    Les juifs, qui y ont vécu dans un passé très lointain, à l’époque biblique et jusqu’à la destruction du second temple (en l’an 70 de l’ère chrétienne), ont perdu le droit d’y revenir puisqu’ils ont rompu, selon le Coran, l’alliance que Dieu avait conclue avec eux. Ils ne peuvent vivre dans le pays qu’en tant que minorité « protégée » sous la domination de l’islam.

    Que dit le Coran concernant la relation des juifs à la Judée antique ?

    Cette terre a été promise aux juifs, comme précise le Coran : « Ô mon peuple, entrez dans la Terre sainte que Dieu vous assigne » (sourate 5 [La Table], 21). Mais Dieu les a abandonnés à cause de leurs péchés et a élu les #Arabes à leur place : « Vous êtes [les musulmans] la meilleure #communauté qui ait jamais été donnée comme exemple aux hommes » (sourate 3 [la Famille d’Imran], 110).

    Pourquoi la place des juifs dans le Coran constitue-t-elle un sujet toujours brûlant, selon vous ?

    Tout d’abord parce que ce sujet traite de deux #religions, chacune portée par un peuple, qui existent toujours. Ces deux peuples que sont les Arabes et les Juifs se sont combattus à divers niveaux, dans plusieurs moments de leurs histoires respectives. Les problématiques évoquées en 2019 dans mon ouvrage Les Juifs dans le Coran sont, pour certaines, cristallisées dans le #conflit_israélo-palestinien.

    Bien que ce conflit ne soit pas nécessairement d’ordre religieux, dans plusieurs périodes de leur histoire, des penseurs des deux côtés ont tenté de lui donner une dimension essentiellement religieuse ; ces penseurs ont dépeint la situation d’opposition entre Juifs et Arabes en utilisant une terminologie et une conceptualisation religieuses. C’est de cela qu’on hérite aujourd’hui, et qui rend la question si complexe.$

    Comment les juifs sont-ils nommés dans le Coran ?

    Divers termes sont employés, et chacune de ces dénominations se réfère à un aspect particulier des juifs. L’un des termes abondamment utilisé dans le Coran pour nommer les juifs est celui de Banû Israʼîl, que l’on peut traduire par « fils d’Israël » : il désigne les anciens Israélites, cités dans la Bible.

    Lorsque le Coran raconte des événements se rapportant au récit biblique, c’est presque toujours ce terme qui est utilisé pour désigner les ancêtres des juifs. C’est lui que l’on retrouve dans ce verset : « O fils d’Israël, n’oubliez pas la grâce dont je vous ai comblés en vous choisissant parmi toutes les nations. »

    Un autre terme, yahûd, désigne les juifs dans un sens plutôt péjoratif : ce terme est très répandu dans les #sourates_médinoises, donc les plus tardives du Coran, qui sont les plus hostiles aux juifs et aux chrétiens.

    Un troisième terme présent à plusieurs reprises est celui d’ahl-al-Kitâb, « peuple du Livre », qui désigne par moments juifs et chrétiens. Ce terme est tantôt positif, tantôt négatif : il évoque parfois le don de la Torah aux juifs, mais rappelle aussi « l’âne chargé de livres » qu’est le peuple juif ayant reçu le don de la révélation, tout en étant incapable de le porter convenablement.

    Quelles étaient les relations entre Juifs et Arabes dans l’Arabie préislamique ?

    Avant Muhammad [Mahomet], les juifs étaient établis dans la péninsule Arabique, principalement au sud – les juifs yéménites en seraient les descendants –, et dans le Hijaz, c’est-à-dire au nord-ouest de la péninsule où l’islam est né. On peut estimer que les juifs dominaient une grande partie de l’Arabie : ils s’appuyaient sur le royaume juif d’Himyar, établi dans l’actuel Yémen. Les rapports culturels et commerciaux entre Juifs et Arabes étaient intenses jusqu’à l’hégire [l’exil de Mahomet de La Mecque vers #Médine, en 622].

    Ces éléments sont importants, car ils constituent l’arrière-plan culturel auquel Muhammad est confronté en Arabie. Quelques chercheurs diraient même la chose suivante : Muhammad a choisi d’émigrer à Médine, une région fortement peuplée de juifs, car il comptait sur ces derniers pour le rejoindre autour d’une conception nouvelle du #monothéisme. Muhammad a sans doute estimé qu’il serait accepté par les juifs du Hijaz.

    On constate également la pensée politique fine du prophète de l’islam lorsqu’il envoie, vers l’an 616 de notre ère, un groupe de ses adeptes à destination du royaume chrétien d’Ethiopie, pour les mêmes raisons. La forte présence de juifs et de chrétiens en Arabie à l’époque de Muhammad explique l’omniprésence d’éléments bibliques, juifs ou chrétiens, dans plusieurs sourates du Coran.

    L’islam a-t-il hérité de pratiques issues du judaïsme ?

    Du point de vue philologique et historique, c’est certain. Au-delà des éléments bibliques, on peut déjà dire que l’islam, au même titre que le judaïsme, est une religion « légale », centrée sur la #loi et les #commandements, à l’inverse du christianisme. La #jurisprudence, le rôle de la Halakha (la loi et la jurisprudence juives) ou de la charia (la loi islamique) sont fondamentales dans ces deux religions, et des ressemblances s’ensuivent – mais ces dernières ont leur limite.

    Au début de la prédication de Muhammad, on perçoit chez lui un désir de se rapprocher des pratiques juives. Cependant, une fois passé le moment où la majorité des juifs refusent de le suivre, s’exprime un désir d’émancipation de l’islam par rapport au judaïsme et au christianisme. Ce qui est naturel : toute religion doit finir par affirmer son indépendance vis-à-vis des traditions passées dont elle hérite.
    Pour donner un exemple : au départ, la direction de la prière pour les musulmans est Jérusalem ; une fois consommé le divorce entre les juifs et les premiers musulmans, La Mecque devient la nouvelle direction pour la prière. Deux étapes apparaissent clairement : ressemblance, puis différenciation.

    Le Coran est-il « antisémite » ?

    Il est faux et anachronique de considérer le Coran ainsi, et certains le font dans un but de propagande contre l’islam. Tout d’abord, le terme « antisémitisme » fait référence à un phénomène bien ultérieur [le terme est apparu en Allemagne au XIXe siècle, il s’attaque aux juifs en tant que peuple et non en tant que pratiquants d’une religion].
    On peut considérer que, dans le Coran, certains versets peuvent servir à nourrir une pensée antisémite, à l’instar des « versets de la guerre » de la #sourate_9 [incitant au combat à mort contre les juifs, les chrétiens, les polythéistes et tous les « #mécréants » en général]. Mais dire explicitement que le Coran est un texte antisémite, c’est faux.

    Je vis d’ailleurs mal cette conception, même en tant que juif. Je lis le Coran depuis mon adolescence avec beaucoup d’intérêt, je l’ai appris avec des Arabes, je l’enseigne à l’université hébraïque de Jérusalem et dans d’autres endroits du monde depuis plus de trente ans… J’ai beaucoup de respect pour ce texte, qui m’a énormément appris et contient des passages extraordinaires.

    Il y a bien des extraits qui me gênent en tant que juif, mais comme ils gêneraient un chrétien, ou tout simplement un être humain ! On peut toutefois dire exactement la même chose de certains versets bibliques, qui sont violents et inacceptables, sans remettre en cause l’intérêt de ces Ecritures.

    Le Coran semble néanmoins donner une image paradoxale des juifs. Comment en sortir ?

    Lors d’un séminaire sur ce thème, un étudiant musulman chiite m’a dit la chose suivante : « Je pense que cela vaut la peine que les sages musulmans adaptent ou suppriment la sourate 9 du Coran [plus tardive, et donc polémique vis-à-vis des juifs et des chrétiens], pour aider à construire une autre image du judaïsme et faciliter la rencontre. Qu’en pensez-vous ? »

    Je lui ai répondu que je suis opposé à toute altération d’un texte canonisé. Des millions de personnes croient en la sainteté du Coran et en sa nature miraculeuse, on ne doit donc rien y changer. Ce qu’on peut changer, en revanche, c’est notre attitude face au texte.

    Le fait qu’il y ait une ambivalence du texte coranique sur ce sujet est, à mes yeux, une clé vers la solution. Le Coran s’exprime de diverses manières sur les juifs, les #chrétiens, et sur bien d’autres sujets aussi. Pour comprendre ces apparentes contradictions, il faut les ramener à leur contexte initial : les polémiques contre les juifs sont à replacer dans le contexte de la prédication de Muhammad dans une région donnée, durant une époque donnée, et ne doivent pas être considérées comme une généralisation sur les juifs. Le fait que le Coran semble paradoxal et contradictoire constitue, en vérité, un remède au littéralisme.

    Quels arguments peut-on opposer, à partir du Coran, à la haine antijuive et à la justification de violences contre les juifs ?

    Tous les stéréotypes et accusations que le Coran adresse aux juifs sont continuellement invoqués pour délégitimer les juifs et leur religion : l’accusation qu’ils ont tué des prophètes, qu’ils ont rompu l’alliance que Dieu avait conclue avec eux, qu’ils ont falsifié les Ecritures divines qui leur ont été révélées, et bien d’autres accusations. Pour autant, dans certains versets du Coran, Dieu répand aussi ses louanges sur les enfants d’Israël.
    Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Meir Bar-Asher : « Quelques versets du Coran peuvent créer une ambiance pacifique et d’autres un climat terrible »

    Ces louanges se répartissent en trois catégories :

    – la vision des enfants d’Israël comme peuple élu ;

    – la sortie d’Egypte et l’arrivée en Terre promise ;

    – l’Alliance et le don de la Torah, vue comme une source qui confirme l’islam.

    L’idée de l’élection d’Israël revient souvent dans le Coran. Tantôt cela concerne le peuple tout entier, tantôt seulement quelques personnalités ou quelques familles comme celle d’Abraham, de ‘Imrân (c’est-à-dire ‘Amram, père d’Aaron, de Moïse et de Myriam dans la Bible) ou encore certains prophètes.

    Dans certains versets coraniques, l’idée d’élection se dégage par elle-même de la grâce de Dieu envers Israël et des nombreux bienfaits que Dieu répand sur eux : « Nous avons donné aux fils d’Israël le Livre (al-kitâb), la Sagesse (al-hukm) et la Prophétie (al-nubuwwa). Nous les avons pourvus d’excellentes nourritures. Nous les avons élevés au-dessus des mondes » (45, 16). Ou encore dans un autre verset : « O mon peuple ! Souvenez-vous de la grâce de Dieu à votre égard, quand il a suscité parmi vous des prophètes ; quand il a suscité pour vous des rois ! Il vous a accordé ce qu’il n’avait donné à nul autre parmi les mondes » (5, 20).

    Aucun texte, a fortiori un texte religieux souvent difficile comme le Coran, ne se donne à lire de manière absolue, et le sens qu’on en retire dépend beaucoup du contexte que l’on prête à ces versets.

    Certaines phrases à fort potentiel polémique lorsqu’elles sont prises isolément se voient ainsi « neutralisées » quand elles sont ramenées à un contexte historique précis ; à l’inverse, des versets dont l’interprétation traditionnelle a toujours cherché à éclaircir le contexte deviennent « explosifs » quand ils sont sciemment décontextualisés pour être brandis contre les juifs et les chrétiens d’aujourd’hui.

    Raphaël Buisson-Rozensztrauch
    https://www.lemonde.fr/le-monde-des-religions/article/2023/11/26/pourquoi-il-est-faux-et-anachronique-de-considerer-le-coran-comme-antisemite