Peine de mort
Mon père, qui a passé un total de quinze ans dans les prisons israéliennes, appelle le gavage « la peine de mort. » Il a participé dans la prison de Nafha à la grève de la faim de masse en 1980 qui a duré 33 jours. Il a été soumis au gavage et il a heureusement survécu. Mais ses camarades Rasem Halawa du camp de réfugiés de Jabalia et Ali al-Jaafary du camp de Dheisheh, ont été victimes de cette pratique meurtrière qui visait à briser leur grève de la faim, et ils sont morts après avoir été soumis à cette alimentation forcée.
Les agents du service pénitentiaire israélien amplifient les pressions sur les grévistes de la faim alors que leur santé ne cesse de se détériorer. Ils les ont placés dans des cellules d’isolement sans fenêtre, gardant les mains et les jambes enchaînées pendant des dizaines d’heures, interdisant les visites des familles et des avocats, et leur niant même l’accès au sel qui est nécessaire à leur survie.
Les grévistes se sont engagés dans « une grève de la faim jusqu’à la victoire ou le martyr », de même que l’avaient fait Khader Adnan, Hana Al-Shalabi, Mahmoud Sarsak, Samer Issawi et d’autres ex-détenus qui ont été libérés après des batailles héroïques de grève de la faim contre l’IPS.
La lettre des prisonniers
Ci-dessous ma traduction d’une lettre que nos détenus ont réussi à passer en contrebande le 8 juin, appelant l’humanité, tous les gens de conscience à participer à un soutien populaire et international de leur combat pour la justice. L’ex-détenu Allam Kaaby a lu ce document lors d’une conférence de presse devant la tente de sit-in érigée devant le Comité international de la Croix-Rouge à Gaza :
Malgré les chaînes, les barreaux et les murs des prisons, ceci témoigne de la volonté de ceux qui se tiennent au bord de la mort pour le bien de notre patrie, la Palestine.
Après avoir quitté les cellules d’isolement qui ne sont plus en mesure de tolérer nos douleurs, nos maladies et nos corps usés, depuis nos lits d’hôpitaux où nous sommes attachés par des chaînes et surveillés par des chiens de garde, au milieu des geôliers qui contemplent nos monitoring cardiaques qui peuvent annoncer notre mort à tout moment, alors que nous sommes près de mourir, nous lançons notre appel qui pourrait être le dernier pour certains d’entre nous. C’est le moment de faire connaître notre volonté avant que nous embrassions notre peuple comme de dignes martyrs. Notre appel est notre voix, notre cri, notre volonté. Nous sommes les détenus administratifs en route vers l’immortalité, pour embrasser le soleil de la dignité qui pourrait marquer dans le même temps la fin de la bataille pour la dignité. Nous élevons notre voix, en espérant qu’elle atteindre notre peuple révolutionnaire.
Tout d’abord, nous vous appelons à intensifier votre soutien aux grévistes de la faim qui ne sont pas encore devenus des martyrs, aux combattants qui luttent contre notre ennemi fasciste avec leurs corps méritent de votre part une loyauté qui empêche que notre sang ne continue de couler et dont le flot ne s’arrêtera qu’à l’accomplissement de nos justes revendications.
Deuxièmement, les douleurs de la faim ont endommagé certains de nos organes, mais d’autres organes restent toujours intacts. Alors que la mort nous attend, nous déclarons que rien ne se mettra en travers du chemin de nos sacrifices, même la mort. Par conséquent, nous faisons don de nos organes encore intacts aux combattants, aux pauvres et aux opprimés qui sont dans le besoin. Nous attendons la visite du Comité international de la Croix-Rouge pour approuver ces dons.
Troisièmement, nous vous demandons de rester fidèles à notre sang et au sang de tous les martyrs qui ont sacrifié leurs vies dans notre lutte pour la Palestine. La fidélité ne se manifeste pas seulement par des mots, mais par l’action révolutionnaire qui ne connaît ni hésitation ni faiblesse.
Quatrièmement, nous vous demandons de conserver nos droits historiques et légitimes, et de ne jamais abandonner un pouce de la Palestine, du fleuve à la mer. Le droit au retour est le pont de nos droits historiques. Ces droits ne peuvent pas être restaurées sans résistance, qui est le seul langage que comprend notre ennemi.
Cinquièmement, n’oubliez pas les détenus qui resteront en vie après nous, car ceux qui sacrifient leur liberté comme un prix pour la liberté de leur peuple, méritent la liberté plutôt que la mort.
À notre digne peuple de Palestine et de la diaspora, aux hommes libres et aux combattants de la liberté à travers le monde, nous laissons nos cris perçus malgré l’obscurité des prisons israéliennes creusées pour enterrer la vie. Et aux personnes dont la conscience est morte à travers le monde, nous disons que notre peuple palestinien continuera la lutte jusqu’à la victoire. Nous faisons nos adieux avec des visages souriants.