• G20 de la santé : cynisme et indécence
    https://www.pardem.org/g20-de-la-sante-cynisme-et-indecence-0

    Avez-vous entendu parler du Sommet du G20 sur la santé qui s’est tenu le 21 mai 2021 ? Un grand moment attendu par ceux qui croyaient au ciel néolibéral et ceux qui n’y croyaient pas !
Résultats : ceux qui croyaient aux bonnes intentions du G20 sur un “droit universel à la santé” sont déçus. Les réalistes, ceux qui n’y croyaient pas parce qu’ils savent que le G20, réunion des pays néolibéraux les plus riches, poursuit son offensive économique et de propagande pour dominer le monde au dépend des peuples, n’ont pas été surpris.


    Plongée dans la nasse du G20
    Le Sommet mondial de la santé du G20, dans sa Déclaration de Rome, ne fait pas une seule fois référence au « droit universel à la santé ». Pour lui, pas question de légitimer le principe de garantir les soins de manière universelle, c’est-à-dire à tous. Car cela serait une obligation institutionnelle pour les pouvoirs publics et les États. Or, pour les pays du G20 la santé se réduit à une option charitable envers les « pauvres » et rester une machine à profit pour les multinationales.


    Certes le G20 parle d’un « accès équitable et abordable » aux outils de lutte contre la pandémie de Covid-19 (vaccins, traitements médicaux, diagnostics et outils de protection individuelle). Il confirme les principes et objectifs du marché, l’échange monétisé (vente et achat) qui n’ont rien à voir avec le droit à la santé pour tous. La déclaration insiste sur le fait que les mesures nécessaires, qui seront prises dans les mois à venir pour « promouvoir l’accès de tous aux vaccins », doivent être définies dans le cadre des traités de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et en particulier des Traités OMC-ADPIC (Accord sur les droits de propriété intellectuelle liés au commerce). L’Organisation mondiale de la santé (OMS, agence des Nations unies) est ainsi évincée.


    Rappelons que, depuis des années, plus de 100 États, des centaines de prix Nobel, des scientifiques, des personnalités du monde de la culture et des milliers d’associations, d’organisations et de syndicats demandent que la santé soit le domaine de l’Organisation des nations unies (ONU) et en particulier de son agence l’Organisation mondiale de la santé (OMS). La primauté de l’ONU et de l’OMS signifierait que les règles en la matière seraient établies conformément à la Déclaration universelle des droits de l’’Homme de 1948 et aux traités internationaux sur les droits civils, sociaux et politiques.

    Prétendre donc, comme le fait le G20, que l’objectif de la lutte mondiale contre la pandémie est de ne laisser personne de côté est un mensonge éhonté, une pure hypocrisie destinée à enfumer les peuples. La réalité est que la stratégie de lutte contre la pandémie, adoptée il y a un an et demi au nom de l’accès équitable et abordable aux vaccins et dans le respect des traités OMC/ADPIC, a privé de soins des centaines de millions de personnes exclues de la vaccination (seul 1% de la population africaine a été vacciné). Selon l’OMS, plus de la moitié de la population mondiale était, en 2020, toujours privée de couverture sanitaire de base et l’épidémie a aggravé la situation.

    Les pays du G20, chantres du néolibéralisme, maintiennent leur suprématie et leur pouvoir dans les domaines financier, technologique, scientifique, productif et commercial. Leurs entreprises privées restent les seuls propriétaires de la connaissance du vivant, les détenteurs de brevets, les producteurs et distributeurs de vaccins, les maîtres du commerce international, les fournisseurs de services médicaux, les contrôleurs des marchés de la santé, les maîtres de la digitalisation des systèmes de santé, etc.

    COVAX : nouveau nom de la charité et de la dépendance
    Le COVAX est le mécanisme de dépendance des pays du “Sud”, mis en place par les pays du Nord, en accord avec l’OMS, pour faciliter le partage de la recherche, le développement, l’achat et la distribution des vaccins en faveur des pays pauvres. Il est géré par deux organisations publiques-privées : le CEPI (Coalition for Epidemic Preparedness Innovations) et la GAVI (Global Alliance on Vaccines and Immunisation). Les vaccins sont transférés sous forme d’aide, gratuitement, aux populations des pays dits à faibles revenus, et sous forme d’aide à prix réduit pour celles des pays dits à revenus moyens. Une version payante de la charité chrétienne sans doute…


    Mais la philanthropie a des limites.
La première, c’est que les pays riches et les organismes philanthropiques privés, tels que la fondation Gates, n’ont pas alimenté les finances du COVAX comme ils l’avaient promis la main sur le cœur. COVAX devait disposer de plus de 40 milliards de dollars mais aujourd’hui, seuls 12 milliards sont arrivés dans les caisses… Entre effet d’annonce publicitaire et réalité, il y a un fossé.


    La deuxième est la préservation des brevets qui consacre la propriété privée absolue pendant 20 ans, par les multinationales pharmaceutiques, des vaccins et des dispositifs médicaux. Le but étant de maintenir la domination politique, économique et sociale des pays du Nord sur les pays du Sud par le biais de la mainmise sur la santé des milliards d’êtres humains qui les peuplent.
Les dominants le savent. Refuser la levée des brevets est un comportement cynique, voire criminel.

    Le cirque de la suspension (provisoire) des brevets
    C’était le point le plus attendu du Sommet mondial de la santé du G20. Il a officiellement choisi de ne pas prendre de décision et de reporter le débat à la réunion du Conseil général de l’OMC… qui, depuis, discutaille…


    L’Union européenne est majoritairement opposée à la suspension du régime des brevets et encore plus à son abolition. Elle cherche à déplacer le débat sur la définition d’un nouveau traité mondial de coopération en matière de surveillance et de réponse aux pandémies actuelles et futures… L’Idée de l’UE est de proposer de signer un traité mondial reprenant les grandes lignes du système de coordination intra-européenne mis en place dans le cadre de la “création” (récente) de l’Union européenne de la santé.
La vice-présidente américaine Kamala Harris s’est dite favorable à une suspension des brevets, « à condition qu’elle soit ciblée et limitée dans le temps »…

    Quant à l’Inde, la suspension lui sert à renforcer son rôle de premier producteur mondial de vaccins à faible coût par le biais de l’entreprise privée Serum Institute of India avec le soutien
de l’université d’Oxford et de Astra Zeneca. Le laboratoire a d’ailleurs signé, en 2020, un accord portant sur la production de plus de 1,2 milliard de doses de son vaccin par le Serum Institute of In-dia. La stratégie indienne d’expansion économique dans le secteur pharmaceutique se pose, évidemment, en concurrence avec la Chine.


    De son côté, l’Indonésie (autre membre du G20) a clairement exprimé sa volonté, grâce à la réduction des contraintes imposées par les brevets, de devenir le principal hub de l’Asie du Sud-Est et ce en concurrence avec la Chine et l’Inde.
Bref, la concurrence capitaliste néolibérale au sein du G20 bat son plein.
L’échec prévisible du G20 concernant une coopération mondiale effective dans la lutte conte la Co-vid-19 s’est révélé au grand jour.

    Big Pharma : des profits stratosphériques
    Les pouvoirs publics ont pratiquement financé en totalité (vaccin Astra Zeneca) et en grande partie (vaccins Pfizer, Moderna, Johnson&Johnson, etc.) la conception, le développement, la production et la commercialisation des vaccins. S’il y a des vaccins, ce n’est pas grâce à Big Pharma mais aux colossales sommes d’argent public injectées par les États (plusieurs dizaines de milliards de dol-lars), par tous les moyens possibles, dont celui décisif, des engagements garantis d’achat public de milliards de doses commandées aux entreprises.

    Ce faisant, les entreprises ont empoché le pactole et, sans investissements majeurs, ont déjà récolté des milliards de bénéfices pour les distribuer à leurs actionnaires, sans que les États, les citoyens dont l’argent public a financé les multinationales, n’aient obtenu aucun avantage financier en retour. Les gouvernements ont financé et continuent à financer les entreprises qui , elles, continuent à faire des bénéfices.
Le Sommet mondial de la santé du G20 est bien une tragique mascarade. Car il est clair que la santé des gens n’est pas la priorité des puissants du monde. La réalité d’un droit universel à la santé est inexistante.


    Qui peut croire encore que sans sortie du capitalisme néolibéral tous les peuples, nation par nation, pourront accéder aux soins de santé universels et gratuits ?

    Joël Perichaud, secrétaire national du Parti de la démondialisation, chargé des Relations internationales

    #capitalisme & #vaccination #mascarade #test_pcr #covid-19 #isolement #cas_contact #travail #économie #coronavirus #santé #surveillance #confinement #covid #sars-cov-2 #pandémie #contacttracing #isolement #G20 #Inde #Indonésie #profits #Droit_à_la_santé #OMC #ADPIC #COVAX #brevets #ue #union_européenne

  • Du vin, de la bière, un héritage colonial et un mécano fiscal

    En poussant la porte d’un caviste Nicolas, peu de clients savent qu’ils pénètrent dans une enseigne du groupe Castel, une multinationale qui s’est im- posée comme le premier négociant français de vin, troisième sur le marché international. À la tête de l’entreprise, la très discrète famille Castel compte parmi les dix premières fortunes hexagonales. Mais ce champion vinicole est aussi – et surtout – un vieil empire françafricain de la bière et des boissons gazeuses.

    Note sur : Survie : De l’Afrique aux places offshore
    L’empire Castel brasse de l’or

    https://entreleslignesentrelesmots.blog/2021/07/12/du-vin-de-la-biere-un-heritage-colonial-et-un-mecano-fi

    #castel #afrique

  • #Border_Profiteers. Corporations profiting from borders, detentions and deportations - Berlin edition

    This brochure has gathered a list of corporations that profit from deportations, from managing detention centers, from building fences, selling ships, drones or planes patrolling the Mediterranean, subcontracted security guards, providing data collection, border surveillance software, id control mechanisms, racist policy consultation, prison construction and any other form of oppression that limits peoples freedom of movement and right to stay.

    The external borders of Europe are not in Berlin, but the border regime is all around us. This regime consists of more than just the state. In capitalism, many forms of border oppression are subcontracted to corporations. Borders are very profitable. Therefore this market is dominated by huge multinational corporations. And since keywords of the European borders are militarisation and surveillance, the list of corporate border profiteers is full of the usual suspects that also profit from war, prisons and privacy infringement.

    The goal of this booklet is to promote action in Berlin and Brandenburg. Hence the focus is very much on companies that have an office in Berlin or action possibilities based on local struggles.

    List of Border Profiteers

    1. DEPORTATION COLLABORATORS
    #Lufthansa#Eurowings
    #Privilege_Style
    #Corendon_Airlines
    #Turyol / #Jalem_Tur
    #Enter_Air

    2. BORDER MILITARISATION
    #Airbus#Hensholdt
    #Otokar#Koç_Holding
    #Thales

    3. DETENTION INDUSTRY
    #European_Homecare
    #Pulsm#Morten_Group
    #Markgraf
    #Baukontor_Lange

    4. SURVEILLANCE SOFTWARE
    #Sopra_Steria
    #Cevision

    5. PRIVATE GUARDS
    #City_Schutz
    #Securitas
    #L&S_Sicherheit
    #Secura_Protect

    6. BORDER CONSULTANCY
    #McKinsey

    Quelques captures d’écran :

    https://noborderassembly.blackblogs.org/2021/04/14/new-brochure-border-profiteers

    Pour télécharger la brochure :
    https://noborderassembly.blackblogs.org/wp-content/uploads/sites/1214/2021/04/Border-Profiteers-berlin.pdf

    #profit #business #complexe_militaro-industriel #frontières #asile #migrations #réfugiés #renvois #Allemagne #compagnies_aériennes #sécurité #détention_administrative #rétention #consultants #militarisation_des_frontières #renvois #expulsions #charter #Frontex

    #no_border_assembly #rapport

  • Habitat indigne à Marseille : prison ferme et fortes amendes pour deux propriétaies
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/07/07/habitat-indigne-a-marseille-prison-ferme-et-fortes-amendes_6087396_3224.html

    Une habitante de la région parisienne marchant difficilement avec une canne, un professionnel de santé ayant pignon sur rue à Marseille : deux profils différents, mais qui, aux yeux des juges, partagent un même « appât du gain au mépris de leurs locataires ». Le tribunal correctionnel de Marseille a ainsi condamné ces deux personnes mercredi 7 juillet (pour mise en danger d’autrui, notamment) à des peines de prison ferme ainsi qu’à de fortes amendes. Des jugements perçus comme un message de sévérité lancé aux marchands de sommeil, deux ans et demi après l’effondrement de deux immeubles rue d’Aubagne (survenu le 5 novembre 2018), qui avait fait huit morts.

    #paywall

    #marseille #habitat #habitat_indigne #profiteurs

  • Action : gouache sur la Samaritaine et banderole géante sur siège de LVMH

    https://vimeo.com/570677738

    A Paris, ce samedi 3 juillet 2021, une trentaine d’activistes d’Attac ont déployé une banderole géante sur le siège de LVMH où l’on peut lire « Le Gang des Profiteurs - Faisons payer les #ProfiteursDeLaCrise ». L’objectif : dénoncer l’enrichissement indécent des milliardaires pendant la crise sanitaire, avec la complicité du gouvernement, particulièrement celui de Bernard Arnault, troisième fortune mondiale. D’autres activistes ont projeté de la gouache noire sur les vitrines de la Samaritaine et ont déployé des banderoles à l’effigie du milliardaire

     #lvmh #france #riches #capitalisme #multinationales #inégalités #bernard_arnault #économie #luxe #corruption #richesse #ATTAC

    • La droite (PS LREM LR) est scandalisée par un peu de peinture noire lavable à l’eau sur une vitrine. Par contre, le fait que Bernard Arnault vole à la France des milliards d’euros par l’intermédiaire de plus 200 filiales offshore ne les dérange pas.

    • « Attaque » à la gouache de la Samaritaine : des journalistes contre Attac. par Maxime Friot, Pauline Perrenot, mardi 6 juillet 2021
      https://www.acrimed.org/Attaque-a-la-gouache-de-la-Samaritaine-des

      Ce samedi 3 juillet, Attac menait une action pour « dénoncer l’enrichissement indécent des milliardaires pendant la crise ». Parmi eux, Bernard Arnault, ayant « vu ses avoirs personnels augmenter de 62 milliards d’euros », et son groupe LVMH, s’apprêtant à « verser 3 milliards d’euros de dividendes à ses actionnaires en 2021, soit une hausse de 25 % par rapport à l’année précédente ». En signe de contestation, Attac a ainsi déployé une banderole sur l’immeuble-siège de LVMH pointant « le gang des profiteurs », et aspergé de gouache noire la Samaritaine, magasin du même groupe de luxe. Que n’ont-ils pas fait ! Les politiques ont « condamné », de la maire de Paris à la présidente de la région Île-de-France. Mais les cris d’orfraie et les appels à la dissolution de l’association sont aussi venus… de journalistes.

      #acrimed

  • Bill Gates, un capitalisme philanthropique ? Entretien avec Radhika Desaï

    Bon mari ou pas ? Avant que sa vie privée soit étalée dans les médias, Bill Gates en était le héros.
    Dans ce récit médiatique, Gates, tout comme George Soros, reste l’exemple du « bon capitaliste » qui, fortune faite, consacre ses vieux jours à faire le bien autour de lui. Et si cette image-là était, elle aussi, complètement bidon ?
    L’analyste indienne Radhika Desaï explique en quoi sa stratégie covid et pharmaceutique en général ne fait aucun bien au tiers monde. Au contraire.

    Bill Gates semble très différent des néolibéraux traditionnels et de Trump, il apparaît comme le capitalisme à visage humain. Bien des gens sont satisfaits de voir que dans toute cette jungle, au moins Bill Gates fait un travail humanitaire essayant d’aider les gens. Est-ce réel ou encore de la cupidité ?

    Je pense que c’est de la cupidité sous couvert d’aider les gens. Vous savez, les profits ont toujours été réalisés au nom d’un plus grand bien. Dans une économie complètement néolibérale classique, vous avez un système capitaliste où les entreprises se font concurrence, mais le résultat final est, nous dit-on, le bien-être de la société. Parce que les consommateurs obtiennent ce qu’ils veulent et au prix le plus bas, etc. Dans un certain sens, l’intérêt général a toujours été la justification, en arrière-plan, du capitalisme.

    Cependant, c’est différent maintenant. Par le passé, dans la phase de libre concurrence du capitalisme classique au XIXe siècle, vers 1850, les capitalistes et l’État étaient censés être séparés. Ensuite, on a vu la taille des entreprises capitalistes augmenter et leur collaboration devenir de plus en plus étroite avec l’État. Ce que nous voyons maintenant, c’est, sans le dire ouvertement, l’exploitation ouverte de l’État à des fins de profits. Je pense qu’il en existe de nombreux modèles. Mais l’élément essentiel est que ces entreprises – sociétés pharmaceutiques ou liées à la santé ou aux services publics – prétendent travailler pour le bien-être général. Ici, s’agissant de nouveaux médicaments et de vaccins, le client final devient l’État et la chose est justifiée en disant que les gens en ont besoin, mais qu’ils n’ont pas les moyens de les acheter. Donc l’État doit les payer à leur place.
     
    Cependant, les gens les paient quand même ?
    Bien entendu, les gens les paient, car l’État les taxe ensuite afin de payer des prix excessivement élevés à ces grandes sociétés monopolistiques.
     
    Vous nous dites que l’activité actuelle de Bill Gates est le résultat d’un nouveau problème dans le système capitaliste ? Les gens n’ayant plus les moyens d’acheter il faut donc trouver de nouveaux clients ?
    Exactement. Si vous y réfléchissez, en remontant aux années 1970, le modèle d’État-providence de l’après-guerre est arrivé lorsque le capitalisme était en crise. Fondamentalement, le système productif avait atteint sa capacité maximum, mais la demande ne suivait pas, ne pouvait augmenter et il y eut une stagnation économique. Vous aviez alors deux façons d’en sortir. La solution du moindre effort aurait été d’exploiter le budget de l’État pour augmenter la demande, et répondre aux besoins non satisfaits des pays en développement. Vous auriez pu utiliser un moyen progressiste en augmentant la demande dans les pays développés, cela aurait résolu le problème et l’investissement productif. Mais cette voie n’a pas été prise.

    La voie qui a été empruntée fut le néolibéralisme. Vous désengagez l’État, vous coupez les dépenses sociales, vous ne visez plus le plein emploi, mais plutôt une faible inflation. Ceci a structurellement exacerbé le un problème sous-jacent qui persiste depuis cinquante ans : la surcapacité de production et la difficulté à vendre.

    Il y avait donc différentes façons de surmonter ce problème, mais le capitalisme a gagné du temps. D’abord en créant un endettement public, puis en créant de la dette privée. Maintenant que ces deux modèles sont un peu épuisés, où aller ? Eh bien, vous exploitez la fiscalité de l’État !
     
    Bill Gates serait une solution pour répondre à la crise ?
    Absolument. Pensez à cet « Événement 201 ». Le 18 octobre 2019, la Fondation Gates, l’école de santé publique Johns Hopkins Bloomberg et le Forum économique mondial ont organisé conjointement un événement à New York : une simulation d’épidémie de coronavirus. On a invité des personnes très influentes : ministres, anciens ministres, hauts fonctionnaires, grands PDG, organisations philanthropiques et l’armée. Ces divers intervenants ont réfléchi à la solution que pouvait adopter la communauté internationale pour réagir face à une telle crise. Évidemment, vous et moi savons que chaque fois que quelqu’un utilise le terme « communauté internationale », il représente les principales nations libérales de l’Occident, et tous ceux qui sont d’accord avec elles.

    Le scénario qu’ils avaient imaginé est très révélateur… L’économie mondiale est au plus bas et ruinée, la santé des gens est menacée, la pandémie a fait soixante-cinq millions de morts dans le monde, beaucoup de choses ne vont pas ici et là, les entreprises privées doivent se redresser en collaboration avec l’État. Mais pour eux, rien ne va vraiment très mal, ils n’ont pas conscience du type de fracture qui vient de se produire. De toute façon, leur idée dans ce scénario hypothétique est que l’État doit collaborer avec les entreprises privées pour fournir des solutions. Autrement dit, ce genre de catastrophes deviendra désormais la bonne raison permettant au secteur privé de fournir à l’État les biens dont le peuple et la société ont besoin et d’en tirer des bénéfices. Parce que le problème de la demande insuffisante reste très important. La vraie question est donc comment créer de la demande. Eh bien, une façon simple de créer de la demande sera tout simplement de vendre à l’État qui ensuite taxera les gens. Vous savez que dans l’économie néoclassique, on nous dit que nos besoins sont satisfaits en exerçant notre choix, eh bien, maintenant, dans cette période de pandémie nous n’aurons plus le choix !
     
    Dès que vous parlez de Bill Gates sur Internet, ce que j’ai fait à plusieurs reprises dans mes émissions Michel Midi, eh bien, dans les dix secondes, quelqu’un lance : « Bill Gates utilise les vaccins pour éliminer une partie des pauvres ». Pensez-vous que cette théorie du complot se trompe de débat ?
    Oui. Je n’ai aucun doute que Bill Gates est probablement assez malthusien, comme, je pense, la plupart des riches. Historiquement le meilleur moyen de blâmer les pauvres pour leur misère des pauvres, a toujours été de dire qu’ils sont trop nombreux, n’est-ce pas ? Si vous voyez ne serait-ce qu’un pauvre dans un contexte de riches, il est de trop, il ne devrait même pas être présent. Cela a toujours été ainsi et je ne doute pas que Bill Gates est un malthusien tranquille, qui pense que le monde irait mieux avec seulement la moitié de sa population.

    Quoi qu’il en soit, je ne pense pas qu’il se soucie vraiment du bien-être du monde, que ce soit avec plus ou avec moins de population. Ce qui lui importe, c’est comment créer plus de possibilités de profit. Tous les écrits sur Bill Gates et son organisation, basés sur des recherches sérieuses, le confirment : Bill Gates n’est plus un homme d’affaires, il tente aujourd’hui de résoudre le problème de la demande pour les grandes entreprises. Sa Bill and Melinda Gates Foundation et d’autres semblables réunissent PDG et gouvernements, ils concluent des accords entre eux et c’est ainsi que les entreprises vont survivre.

    Marx et Engels avaient estimé que la montée du capitalisme industriel éliminerait les effets du passé féodal comme le propriétaire foncier et le prêt d’argent, ainsi ces formes d’intérêts rentiers seraient supprimés une fois pour toutes. En réalité l’intérêt rentier renaît sous une forme beaucoup plus large et puissante, l’intérêt des rentiers est maintenant devenu le grand levier sous lequel nous vivons. Il prive notre économie productive de tout son pouvoir, il l’utilise simplement, vous savez, comme un parasite installé sur son hôte. Et dans ce scénario, bien sûr, le parasite tue l’hôte.
     
    Mon ami Johan Hoebeke m’explique que chaque fois que Bill Gates donne de l’argent, il prépare en fait de futurs investissements…
    Exactement. Comme Ronald Reagan aimait à le dire : « Un déjeuner gratuit, ça n’existe pas ». Vous pensez qu’il vous donne quelque chose pour rien, mais en fait cela prépare le profit futur. Il est remarquable de voir à quel point l’ancienne règle de droit selon laquelle les transactions devraient être exemptes de conflits d’intérêts a tout à fait disparu. Aujourd’hui, ils font ces études où ils classent les pays, en particulier ceux du tiers monde, en fonction de leur corruption. Mais la seule différence entre un pays du tiers monde et un pays comme les États-Unis ou le Canada est qu’ici la corruption est ouvertement légale. Il est parfaitement légal pour Bill Gates de rencontrer Trudeau ou Trump ou Boris Johnson, et de conclure un accord avec eux. C’est de la pure corruption, mais tout le monde l’accepte. L’organisation Transparency International ne considère pas le Royaume-Uni comme un des pays les plus corrompus du monde, c’est pourtant la réalité que nous vivons.
     
    Examinons l’activité concrète de Bill Gates, il dit qu’il fait de l’humanitaire contre la faim dans le monde, il est dans la finance et dans les entreprises pharmaceutiques, les vaccins, dans la santé en général…
    Le modèle que Bill Gates voudrait imposer à tous les pays, c’est essentiellement la médecine intensive en capital : tous les dollars doivent être disponibles pour les firmes des soins de santé : que ce soit dans un système public ou privé, ça n’a pas d’importance.
     
    C’est un grand marché !
    Les dollars disponibles pour les soins de santé devraient aller à l’achat de ces médicaments très chers et à ce matériel médical sophistiqué : donc aux intérêts privés. Le but n’est pas de produire une meilleure santé, mais de créer un marché pour les produits de ces entreprises. Qu’elles construisent des hôpitaux, dirigent des hôpitaux, fournissent des hôpitaux, cela n’a pas d’importance.
     
    Cet énorme nouveau marché, c’est une grande partie du budget des États…
    Exactement. Sous couvert de l’argument du bien-être. Par exemple, nous le savons tous, les États-Unis ont un système de santé privé. Vous devez acheter les soins de santé dont vous avez besoin, mais par le biais d’une compagnie d’assurance qui fait ensuite plus d’argent sur vous, c’est son business… Les États-Unis sont ceux qui dépensent le plus de capital pour sur la santé et ils sont parmi ceux qui ont les pires résultats et des résultats très moyens pour le segment inférieur de la population. Aux USA, vous trouvez souvent des conditions de santé du tiers monde. Des pays pauvres comme Cuba et le Vietnam ont de meilleurs résultats pour la santé.

    Donc, l’accent mis sur la médecine intensive de capital, la médecine lucrative, signifie que les résultats pour la santé sont mauvais. Je veux dire qu’un système de santé publique est vraiment nécessaire. Tout au long de la période néolibérale, nous avons réduit le personnel formé et embauché de plus en plus de personnel non formé. Cela signifie que nous n’avons pas les ressources humaines vraiment nécessaires pour produire de bons soins de santé, car ce n’est pas le modèle proposé par Bill Gates.

    Prenez la pandémie actuelle, voyez la très forte différence avec les pays qui ont bien réagi : la Chine, Cuba, le Vietnam, l’État indien du Kerala, etc. Ils ont investi dans une véritable épidémiologie à grande échelle : dès que vous apprenez qu’il y a un cas, alors un important personnel formé se rend sur place, va tracer ses contacts, les isoler et aussi soutenir ces gens ! Parce que si vous vous contentez d’enfermer quelqu’un, alors il va essayer de trouver une issue. Mais si vous dites : « Regardez, nous avons besoin que vous soyez loin de votre famille, de votre travail pour un nombre x de jours, mais nous vous traiterons et nous veillerons à ce que votre famille ne souffre pas des conséquences économiques de votre absence », alors, les gens le feront volontiers, n’est-ce pas ?
     
    Vous voulez dire que la clé est une médecine sociale ?
    Exactement. Une véritable épidémiologie à grande échelle, ça commence par des équipes qui doivent se déplacer, parfois à pied, pour trouver ces personnes. Aujourd’hui, nous n’avons absolument pas la médecine à forte intensité de travail social dont nous avons besoin. À la place, nous avons cette médecine intensive capitaliste antisociale.
     
    Bill Gates affirme aussi lutter contre la faim…
    Les organismes génétiquement modifiés (OGM) et toutes ces autres cultures à forte intensité de capital dont Bill Gates et d’autres font la promotion partout dans le monde, cela mène en fait, dans des pays comme l’Inde, à des suicides d’agriculteurs. Parce que les agriculteurs sont incités à adopter ces techniques, ils en deviennent dépendants, elles sont très chères. Mais vous savez que les prix des matières premières fluctuent beaucoup et que les agriculteurs s’endettent. Et, contrairement aux gens qui nous ont fait plonger durant la crise financière de 2008, ces pauvres agriculteurs, eux, assument la responsabilité personnelle de pour leurs dettes qui très souvent causent leur suicide. Et puis, avec ces horribles produits chimiques, en les ingérant, c’est souvent ainsi qu’ils meurent. Donc, ce type d’agriculture que Bill Gates promeut n’arrête pas la faim, il va l’augmenter, car il supprime nos cultivateurs.
     
    Bill Gates est aussi intervenu dans la finance avec le « micro-crédit »…
    La finance, c’est très intéressant. Au début des années 2000, Muhammad Yunus est devenu très célèbre avec ces microprêts, ce microcrédit… Ce qu’ils ont appelé « inclusion financière » est vraiment un moyen de ramener principalement les plus pauvres des pauvres et leurs maigres revenus dans le filet de la dette. Là où les grands capitalistes peuvent profiter de ces maigres revenus pour réaliser un profit. Car, en leur accordant un petit prêt, ils font un profit. Il n’y a pas eu d’inclusion financière. Cela a permis à Bill Gates de promouvoir cette grande catastrophe de démonétisation…
     
    En novembre 2016, le Premier ministre Modi est passé à la télévision en déclarant que tous les billets, sauf les plus petites coupures, étaient « démonétisés » avec seulement quatre heures de préavis. On ne pouvait plus payer avec eux, il fallait les apporter à la banque. Cela a conduit à des jours de chaos dans un pays où la moitié de la population n’a même pas de compte bancaire et où 90 % des paiements sont effectués en espèces.
    Ce sont en fait des moyens de piéger les agriculteurs à bas revenus pour les mettre dans le filet des grandes institutions financières.
     
    La montée de ce nouveau type de capitalisme, est-ce un signe que les temps sont très difficiles pour les néolibéraux traditionnels ?
    Je pense que oui, en fait. Vous avez mentionné les théories du complot, j’ai des amis enclins à croire certaines d’entre elles, je ne doute pas que leurs raisons soient très correctes, en tout cas, ils pensent que cette réaction à la pandémie est excessive, que c’est juste une excuse pour que l’État augmente son contrôle et sa surveillance sur nous tous. Et là, je ne doute pas que les États du monde entier en profitent pour le faire. Là où mon avis diffère du leur, c’est que les forces du grand capital, les politiciens qui sont dans leurs poches et l’État feront tout pour promouvoir les résultats qui leur sont favorables. Pour promouvoir ce modèle que j’appelle le capitalisme pseudo-philanthropique ou le néolibéralisme.
     
    Y parviendront-ils ?
    C’est loin d’être garanti. Parce que les choses se sont vraiment dégradées partout. Dans cette pandémie, personne n’écrit ce scénario. Les États-Unis sont aujourd’hui devenus ingouvernables en partie à cause de la nature de la réponse à la pandémie.
     
    Pourquoi les économies néolibérales se sont-elles écroulées de cette façon en devant fermer leurs entreprises ?
    La raison est très simple : au cours des quarante dernières années, la capacité de leur système de santé publique à faire face à tout cela a été complètement mise de côté en faveur d’une médecine intensive en capital. Et aussi parce que la capacité de l’État a disparu. Lorsque la Chine a été confrontée à la pandémie, son État avait suffisamment de capacité pour mobiliser : confinement de Wuhan, confinement du Hubei, création d’infrastructures comme les hôpitaux supplémentaires. Traitement du problème de manière décisive et rapide.
     
    En Occident, nous n’avons pas cela. Et nous avons un autre problème, constaté avec l’élection de Trump et de Johnson. Madame Merkel s’en est bien sortie, mais auparavant, comme vous le savez, elle avait également perdu une partie de sa légitimité politique avec une crise gouvernementale. Mais face au virus, l’Allemagne a connu une meilleure situation, car elle a conservé une grande partie de sa capacité à faire une médecine publique… Presque toutes les autres sociétés occidentales ont dû subir cette déchéance, car elles n’avaient pas la capacité de faire autrement. Alors elles ont dû utiliser un gros marteau au lieu d’un très fin scalpel. Quoi qu’il en soit, ce scénario n’est sous le contrôle de personne, car le capitalisme néolibéral est en crise. Alors les gens diront : « Nous aurons une autre forme de capitalisme », mais je dis, non, le capitalisme néolibéral est la seule forme de capitalisme possible en ce moment. Tout le reste sera le début d’un « non-capitalisme ». Du socialisme, j’espère ! Bien que vous pourriez avoir d’autres formes…
     
    En fait, tout le monde est maintenant socialiste en Europe ! Tout le monde dit : « Vive l’État, la fonction publique, les travailleurs ! »
    Oui. Mais ces voix qui semblent très socialistes se divisent en deux. La plus grande partie se lancera dans un capitalisme pseudo-philanthropique. Donc en collaboration avec les grandes sociétés privées. En fin de compte, nous le paierons, pour des produits de valeur douteuse et les énormes profits que les capitalistes en tireront.

    Seul un très petit nombre parlera autrement. Nous devons avoir des instruments politiques populaires au pouvoir, qui réalisent ce que le capitalisme n’est plus capable de faire. Premièrement, sauver la société de la pandémie. Deuxièmement, mettre en place une société différente. Tout le monde sait que l’ancien modèle n’est plus légitime. La pandémie l’a montré, tout le monde le sait : nous ne pouvons pas revenir à ce vieux capitalisme néolibéral, car c’est l’inégalité, le racisme, le sexisme, il n’a pas généré de bons emplois du tout, il a généré des emplois de merde pour les personnes marginalisées, etc.

    Il est clair aujourd’hui que le néolibéralisme sape le système de santé. Dans ce contexte, le capitalisme doit être pseudo-philanthropique : « Nous allons résoudre tous ces problèmes, nous allons vous donner une nouvelle forme de capitalisme ». Mais en réalité, ce sera juste une nouvelle forme de néolibéralisme : une forme de capitalisme avec un équilibre politique entre les mains du capital des entreprises privées. Lesquelles vont utiliser tous les moyens possibles – principalement ceux de l’État – pour augmenter leurs bénéfices. C’est là que le capital veut nous emmener…
     
    Et pour s’y opposer ?
    La seule façon de s’y opposer réside dans les forces politiques. Elles peuvent être initialement petites, mais je pense qu’elles peuvent aussi grandir très rapidement. Des forces politiques qui comprennent qu’il ne faut pas perpétuer les anciennes conditions. Vous ne devez pas abandonner le pouvoir aux grandes sociétés. Comprenez que ces sociétés sont si grandes et si lucratives qu’elles ont conquis des secteurs de la société qui sont des monopoles naturels. Si vous fournissez de l’électricité, de l’eau, des services de santé, des transports, si vous exploitez des ressources naturelles, ce sont tous des monopoles naturels : ne doivent-ils pas être entre les mains du public ? Aujourd’hui, nous avons une capacité sans précédent à gérer toutes ces choses grâce à la sophistication des technologies de l’information et de la communication. En réalité, toutes ces grandes entreprises sont déjà des économies géantes planifiées.
     
    « Planifiées » ! Un gros mot, nous dit-on… Pensez-vous que la seule raison pour laquelle la majorité des gens ne veulent pas passer du capitalisme à une autre société, c’est parce que les capitalistes ont réussi à les convaincre qu’il n’y a pas d’alternative ?
    Oui. Eh bien, aujourd’hui, je ne suis plus sûr que les gens croient qu’il n’y a pas d’alternative. Au Canada par exemple, un sondage récent montre que la population penche de plus en plus vers des choses ouvertement socialistes. Y compris la propriété publique des monopoles.
     
    La Fondation Bill Gates n’est pas la première dans l’histoire du capitalisme US. Celles de Rockefeller, Ford et Carnegie ont déjà joué un rôle important dans le capitalisme ?
    Absolument. Le théoricien marxiste italien Gramsci a décrit à quel point le constructeur Henry Ford avait essayé de contrôler la vie de ses travailleurs jusqu’à leurs types de divertissements. Les capitalistes ont toujours été intéressés à façonner la société. Oui, ces fondations ont toujours joué un très grand rôle dans tous les pays. Mais aux États-Unis, c’est une très forte tradition. Dans ce soi-disant modèle philanthropique, la philanthropie devient simplement un moyen pour les entreprises capitalistes de modeler les sociétés comme ils le souhaitent. Oui, c’est une longue tradition, contrôlée aujourd’hui par des sociétés plus grandes que jamais. Leur pouvoir sur les gens est encore plus important. Les sociétés sont devenues si puissantes qu’elles dominent les gouvernements.
     
    La Fondation Bill Gates a quelque chose de plus. C’est encore un pas supplémentaire par rapport aux fondations précédentes et son rôle est beaucoup plus large.
    Oui. Son rôle est beaucoup plus important à cause de la faiblesse du capitalisme. Il ne survivra que si la Fondation Bill Gates et d’autres semblables réussissent à créer une sorte de capitalisme philanthropique. Bill Gates est plus important que les fondations des Rockefeller et des Ford. À leur époque, le capitalisme en était encore à une phase relativement expansive, il était encore productivement dynamique. Ce n’est plus le cas aujourd’hui.
     
    Les médias européens défendent très fortement Bill Gates, tout comme George Soros. Ils mettent en avant la fameuse théorie du complot « Bill Gates veut éliminer une partie de l’humanité ». Mais ainsi ils cachent le rôle essentiel de Bill Gates, pas du tout philanthrope. Pourquoi ce silence ?
    Quelque chose de très décisif s’est produit au cours des cent cinquante dernières années pour les classes intellectuelles et professionnelles dont les médias sont un élément très important. Ces classes ont perdu leur sens moral, leur sens politique. Il fut un temps où être intellectuel c’était être de gauche ; aujourd’hui, c’est loin d’être le cas. Tous les partis ont été repris par les classes moyennes professionnelles. Cependant, celles-ci ont déplacé les partis de droite vers la droite, mais elles n’ont pas déplacé les partis de gauche vers la gauche, mais bien également vers la droite. Les phénomènes Blair, Schröder, Bill Clinton, etc. Leurs actions suivent fondamentalement leurs intérêts économiques. Ces classes moyennes professionnelles de droite et de gauche forment maintenant un seul establishment et c’est pourquoi ce mécontentement contre tant de décennies de néolibéralisme a – jusqu’à présent en tout cas – été capitalisé par des forces différentes. Trump et Johnson sont venus d’ailleurs.

    La classe moyenne a perdu son sens critique. C’est pourquoi tous ces médias stéréotypés et mous utilisent l’expression « théorie du complot » et la lancent à quiconque pose simplement des questions. Où est passé notre droit de poser des questions ?
     
    Pour conclure, que suggérez-vous aux progressistes pour lutter contre les illusions sur Bill Gates ?
    => Le plus important est d’être en contact avec les gens ordinaires. Marx et Engels et d’autres intellectuels de la Deuxième Internationale ne se sont pas contentés de faire des déclarations incendiaires sur la classe ouvrière, non, ils ont travaillé avec la classe ouvrière. Je pense que nous devons nous reconnecter avec le mouvement des travailleurs. Y compris les plus marginalisés, car les syndicats dans la plupart des pays sont aussi devenus des organisations relativement élitistes. Nous devons donc aller au-devant des citoyens ordinaires et soutenir intellectuellement leurs mouvements. Je pense que c’est l’élément clé.

    Quand Marx et Engels écrivaient, il n’y avait en fait pas de partis au sens où nous l’entendons aujourd’hui. Quand ils utilisaient le mot « parti », ils se référaient aux courants intellectuels. En tout cas, pour notre courant intellectuel, nous devons nous démarquer clairement de ces discours qui préparent le terrain au capitalisme pseudo-philanthropique. La clé, c’est de briser le fonctionnement de ces sociétés en « autorégulation » ; nous devons les remettre sous réglementation. Et surtout reparler de choses comme la propriété publique. Reparler du contrôle des capitaux, reparler de l’appropriation par l’État de tout le système financier. L’argent est une fonction d’État, il n’y a absolument pas besoin d’avoir un secteur financier privé. Ou alors il doit être si fortement réglementé qu’il devra se comporter comme un instrument public.

    Permettez-moi d’exposer une autre idée sur laquelle je vais probablement écrire. La gauche a également eu son propre néolibéralisme. Avec deux facteurs très importants.
    1. Un scepticisme total sur la planification et le contrôle de l’État.
    2. Un scepticisme complet sur les partis. Au lieu de planifier, on répand aujourd’hui l’idée que nous allons créer une sorte d’économie décentralisée de coopératives et de petits travailleurs collectifs sans planification globale. C’est justement ce que Marx critiquait dans le travail de Proudhon. Nous devons rejeter ce proudhonisme et l’idée qu’une économie moderne pourrait se passer de planification. Non, la planification est toujours nécessaire. Oui, vous pouvez la rendre démocratique, vous pouvez la décentraliser, vous pouvez faire toutes ces choses merveilleuses, mais il doit y avoir une sorte de planification globale !

    La deuxième illusion est que nous n’aurions pas besoin de partis. Non, nous devons avoir des partis. Encore une fois, ils peuvent être plus démocratiques, ils peuvent être responsables devant la base, etc. Mais sans une force politique capable de contrer tout ce dont dispose la classe capitaliste avec l’État, sans un instrument pour rompre ce lien et réorganiser massivement l’État en quelque chose de complètement différent, en serviteur du peuple, nous n’irons pas très loin.

    Voilà ce que nous devons garder à l’esprit pour sortir de ce terrible gâchis.

    Michel Collon & Radhika Desai . Professeure de politique à l’université de Manitoba au Canada. Auteure de Geopolitical Economy : After US Hegemony et de Globalization and Empire.
    Extrait du tome 2 de Planète malade de Michel Collon. Le tome 1 analyse d’autres aspects de Bill Gates.

    #bill_gates #Radhika_Desaï #capitalisme #néolibéraux #humanitaire #ONG #cupidité #libre_concurrence #exploitation #Etats #Profits #services_publics #médicaments #bien-être #État-providence #Crise #endettement_public #dette #dette_privée #Événement_201 #fondation_gates #Forum_économique_mondial
    #malthusianisme #pauvreté #pauvres #conflits_d’intérêts #corruption #santé #médecine #faim #ogm #micro-crédit #pandémie #médecine_publique #inégalité, #racisme #sexisme #théorie_du_complot #complotisme #autorégulation #réglementation #propriété_publique #argent #Proudhon

    Source : https://www.investigaction.net/fr/bill-gates-un-capitalisme-philanthropique-entretien-avec-radhika-des

  • Vivre et en finir avec le mépris de la vie

    Raoul Vaneigem

    https://lavoiedujaguar.net/Vivre-et-en-finir-avec-le-mepris-de-la-vie

    Retour parodique au passé

    Le crime contre l’humanité est l’acte fondateur d’un système économique qui exploite l’homme et la nature. Le cours millénaire et sanglant de notre histoire le confirme. Après avoir atteint des sommets avec le nazisme et le stalinisme, la barbarie a recouvré ses falbalas démocratiques. De nos jours, elle stagne et, refluant comme un ressac dans une passe sans issue, elle se répète sous une forme parodique.

    C’est ce ressassement caricatural que les gestionnaires du présent s’emploient à mettre en scène. On les voit nous convier benoîtement au spectacle d’un délabrement universel où s’entremêlent goulag sanitaire, chasse à l’étranger, mise à mort des vieux et des inutiles, destruction des espèces, étouffement des consciences, temps militarisé du couvre-feu, fabrique de l’ignorance, exhortation au sacrifice, au puritanisme, à la délation, à la culpabilisation.

    L’incompétence des scénaristes attitrés ne diminue en rien l’attrait des foules pour la malédiction contemplative du désastre. Au contraire ! Des millions de créatures rentrent docilement à la niche où elles se recroquevillent jusqu’à devenir l’ombre d’elles-mêmes.

    Les gestionnaires du profit sont arrivés à ce résultat auquel seule une réification absolue aurait pu prétendre : ils ont fait de nous des êtres apeurés par la mort au point de renoncer à la vie. (...)

    #Raoul_Vaneigem #vivre #humanité #barbarie #goulag_sanitaire #sacrifice #profit #mentalité_carcérale #réclusion #renversement #envoûtement #autodéfense_sanitaire #autonomie #intelligence_sensible #conscience #renaissance #éveil #individu #danser

    • « L’imagination et l’exagération, qui n’est qu’une des ressources de l’imagination, cherchent à rattraper le décalage entre la mégamachine telle qu’elle est déjà là aujourd’hui et le “focus imaginarius” vers lequel elle tend, à savoir le remplacement de l’homme, un remplacement qui équivaudrait pour ce dernier à la “fin des temps” [Zeitende]. »

      « Sa méthode : l’exagération. À ses yeux, c’est une qualité. Cette exagération se révèle indispensable, selon lui, pour faire voir ce qui n’existe éventuellement qu’à l’état d’ébauche ou de trace, ou bien ce qui est dénié, négligé, voilé. Ou pour faire entendre ce qui semble d’abord inaudible. »

      Ces commentaires sur Günther Anders pourraient s’appliquer à Vaneigem.

  • Course au #vaccin : la propriété intellectuelle, c’est le « vol » qui freine l’innovation
    https://theconversation.com/course-au-vaccin-la-propriete-intellectuelle-cest-le-vol-qui-freine

    Pourquoi ces deux Davids [BioNtech et Moderna, à l’origine de #vaccins basés sur l’ARN messager] des biotechnologies ont-ils terrassé, en matière d’innovation vaccinale contre la Covid-19, les Goliaths de l’industrie pharmaceutique ? Notre réponse : le régime légal de détention de la propriété intellectuelle freine l’innovation par les grandes entreprises.

    [...]

    Pour pasticher le père de l’anarchisme, Pierre-Joseph Proudhon, dans une société de la #connaissance, la #propriété_intellectuelle est « le #vol ». Elle dépossède en effet les chercheurs-salariés de leurs connaissances au #profit des #actionnaires des grands groupes. Cette #expropriation nuit à l’innovation car les réels détenteurs de la connaissance, à savoir les chercheurs-salariés des grandes entreprises n’ont aucune incitation à innover et les employeurs qui sont les détenteurs légaux des #brevets ne détiennent pas l’ensemble des connaissances tacites nécessaires à l’exploitation de l’invention.

  • Pour faire des économies, Carrefour remplace une partie de ses CDD par des jeunes en contrat pro | StreetPress
    https://www.streetpress.com/sujet/1618828051-economies-carrefour-remplace-cdd-jeunes-contrat-pro-supermar

    Pour aider les jeunes largement impactés par un marché de l’emploi en crise, l’État subventionne les contrats de professionnalisation. Carrefour profite de l’occasion pour remplacer ses CDD et ainsi faire des économies.

    Ève (1) n’en revient toujours pas. Depuis sept mois, elle travaillait à la caisse d’un Carrefour du Nord de la France. Son CDD s’achève dans les jours qui viennent et on lui a promis qu’il serait renouvelé. Mais son manager lui propose un drôle de deal : une prolongation au même poste… en alternance. C’est ça ou rien. « Je n’ai pas plus d’explication à te donner, ça vient de la RH », lui assure son supérieur. La jeune femme refuse finalement le contrat pro moins bien payé qui lui est proposé et se retrouve au chômage.

    #profiteurs_de_crise #salopards

  • La garantie d’emploi, un outil au potentiel révolutionnaire | Romaric Godin
    http://www.contretemps.eu/chomage-economie-garantie-emploi-depassement-capitalisme

    L’ouvrage de Pavlina Tcherneva qui inaugure la collection « Économie politique » avance une proposition qui peut paraître a priori insensée : fournir à tous les citoyens qui le souhaitent un travail rémunéré, permettant de vivre décemment. Tout l’intérêt de son propos est de montrer que, précisément, cette proposition n’a rien d’insensé, mais qu’elle est parfaitement réalisable pour peu que l’on se libère de certaines certitudes qui ne sont que des constructions politiques. L’idée que le chômage soit le mode d’ajustement « normal » de l’économie est déjà un choix politique remarquablement déconstruit par l’autrice. Source : (...)

  • Résurgence de #Covid-19 en Europe : les États protègent les profits, pas les vies - World Socialist Web Site
    https://www.wsws.org/fr/articles/2020/10/29/euro-o29.html
    https://www.wsws.org/asset/bb5323cc-305e-4b1c-9277-b22eea837ba3?rendition=image1280

    Face à la colère populaire et des appels urgents des médecins à mettre la population à l’abri pour éviter une catastrophe, les États européens annoncent soudain des #confinements nationaux.

    Mais ces annonces ne sont pas une politique permettant aux jeunes et aux travailleurs de s’abriter chez eux pour éviter de s’infecter. Tout en annonçant des confinements, les États européens conservent le même objectif qui les a poussés à déconfiner prématurément au printemps : garder les jeunes à l’école et les travailleurs au travail pour faire des #profits pour l’aristocratie financière.

    Les confinements adoptés actuellement en Europe ne stopperont ni la pandémie ni l’hécatombe. C’est aux travailleurs de l’Europe et du monde qu’il revient d’imposer une politique qui protégerait la population de la pandémie à travers une mobilisation indépendante et internationale contre les gouvernements capitalistes européens.

  • L’échec du CICE confirmé - Page 1 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/180920/l-echec-du-cice-confirme

    Outre son manque de pluralité, le dernier rapport d’évaluation du CICE confirme l’aspect médiocre en termes de résultats de cette mesure. Cet échec plaide pour un changement total de politiques de l’emploi.

    Depuis son lancement en 2013, l’efficacité du Crédit d’impôts compétitivité emploi (CICE) fait débat. Lancé sous le quinquennat Hollande, dont il marque le tournant « pro-entreprise », il a été pérennisé en 2019 par Emmanuel Macron lors de sa transformation en exonération de cotisations. Pourtant, aucun débat politique d’envergure n’a jamais été mené autour de l’évaluation de cette mesure. Or, ses effets sont très limités compte tenu des moyens engagés par l’État. Entre 2013 et 2017, 88,90 milliards d’euros ont été versés au titre du CICE aux entreprises. On devrait attendre un vrai débat démocratique face à un engagement aussi massif.

    Or, globalement, les évaluations restent non seulement incertaines et soumises au plus fort doute, mais surtout, elles ne parviennent pas à dégager un effet positif clair sur l’emploi, l’investissement et la compétitivité. Le 17 septembre, un nouveau rapport d’évaluation https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs-2020-rapport-cice2020-16septembre-final18h.pdf a été publié par France Stratégie et a confirmé ces conclusions. France Stratégie, groupe de réflexion héritier de l’ancien commissariat général au plan, directement rattaché au premier ministre, peine d’ailleurs à défendre et le CICE et la solidité des analyses qu’il publie.

    L’évaluation repose sur deux piliers. Le premier est microéconomique et cherche à identifier comment les entreprises réagissent directement au CICE. L’étude utilisée par France Stratégie a été réalisée par l’équipe dite de « Théorie et évaluation des politiques publiques (TEPP) » du CNRS. Elle confirme son analyse précédente : environ 100 000 emplois créés entre 2013 et 2016 pour 66,75 milliards d’euros d’argent public distribué. Le gain est minime et le coût astronomique : 166 875 euros par emploi et par an.

    Étrangement, la méthode défendue par un autre laboratoire, le LIEPP de Sciences-Po, n’apparaît plus dans l’évaluation. Il est vrai que ses analyses étaient beaucoup moins favorables au CICE puisqu’en 2018, il indiquait ne pas être en mesure d’identifier un effet positif de cette mesure. Lors du précédent rapport, France Stratégie avait déjà tenté de réduire la valeur de cette analyse par rapport à celle du TEPP (Mediapart avait résumé le débat dans cet article https://www.mediapart.fr/journal/france/091018/cice-une-evaluation-biaisee?onglet=full ). Le groupe d’évaluation invitait néanmoins à poursuivre les recherches. Mais cette poursuite est donc apparemment passée par l’arrêt du travail du LIEPP, ce qui confirme le caractère profondément biaisé de cette évaluation. On ne peut que s’étonner de la disparition, dans une évaluation publique, du pluralisme. Elle tend à faire croire que les résultats présentés sont « la vérité », ce qui est loin d’être le cas. Contacté, France Stratégie n’avait pas répondu à nos sollicitations sur le sujet jeudi 17 septembre. Notons néanmoins que même en choisissant soigneusement les études les plus favorables, on reste sur un résultat très mitigé.

    La deuxième méthode est macroéconomique. Elle a été réalisée par l’OFCE grâce à un modèle mathématique permettant de mesurer l’impact global sur l’économie. Les différents choix des entreprises bénéficiaires sur les salaires, l’emploi, les prix ou l’investissement ont en effet des impacts sur d’autres entreprises. Par ailleurs, le financement de cette mesure par l’État a aussi un impact macroéconomique. L’idée est de tout reprendre en utilisant une méthode contrefactuelle, autrement dit en comparant une réalité reconstituée sans CICE à une réalité avec CICE.

    Évidemment, une telle méthode doit être prise avec beaucoup de prudence, même si le modèle de l’OFCE se veut précis et moins biaisé que les modèles habituels de macroéconomie. Celui-ci repose néanmoins sur l’idée d’une possible reconstitution contrefactuelle d’une période à partir de données passées, ce qui est assez hasardeux. Par ailleurs, il repose aussi sur des choix d’hypothèses forcément contestables. France Stratégie reconnaît, au reste, ses « limites ». Ces dernières ne discréditent pas les résultats de l’évaluation, mais on aurait aimé, comme dans le domaine microéconomique, d’autres évaluations concurrentes fondées sur des hypothèses différentes.

    Le résultat présenté par l’OFCE est très optimiste. L’institut évoque 400 000 emplois créés par le CICE au niveau macroéconomique entre 2013 et 2017, sans prendre en compte les effets de son financement. Cela peut sembler beaucoup, mais il faut rappeler que sur ces cinq années ont été engagés 88,90 milliards d’euros. Cela revient donc à afficher une moyenne de création d’emplois de 80 000 emplois par an, soit un coût par emploi et par an de 44 500 euros environ. Cela représenterait un coût de 3 700 euros par mois, ce sont donc des emplois encore assez coûteux.

    Certes, il faudrait intégrer à ce coût l’effet de la croissance issue du CICE sur les recettes fiscales, ce qui en réduirait le coût réel. Mais en tout état de cause, on est dans des emplois sauvegardés et créés à des coûts proches de ce qu’aurait pu faire directement l’État. On verra que cela n’est pas neutre. Soulignons, par ailleurs, que même France Stratégie appelle à la prudence face à ses résultats qui dépassent les espérances de la Direction générale du Trésor. « Ces simulations, indicatives, souffrent de nombreuses limites », précise le rapport.

    L’OFCE a cependant proposé une autre analyse, prenant en compte les effets du financement du CICE. Ce dernier s’est fait d’abord par des hausses d’impôts, puis par une baisse des dépenses. Rappelons qu’entre 2014 et 2017, la Sécurité sociale, notamment, a été mise à rude épreuve avec un régime particulièrement sec : réduction de l’Objectif national des dépenses d’assurance-maladie, gel des salaires dans la fonction publique, réduction de l’investissement public. L’OFCE conclut qu’en net, le CICE aurait alors créé ou sauvegardé près de 160 000 emplois sur cinq ans.

    Les conclusions de l’OFCE confirment que le CICE est une méthode assez médiocre pour créer des emplois. 160 000 emplois face à une masse de 3 à 6 millions de demandeurs d’emplois, on est loin d’une solution concrète au chômage. On l’est d’autant plus que seules un quart des entreprises bénéficiaires ont créé des emplois (on ne sait pas ce qu’il est advenu de l’argent versé aux trois quarts restants) et que le seul effet identifiable concerne le secteur des services, autrement dit celui qui est le moins soumis à la concurrence internationale.

    Le deuxième « C » du CICE, celui de « compétitivité », semble avoir été un échec patent. Comme lors des précédents rapports, les évaluations sont incapables d’identifier et de quantifier un effet sur les exportations et l’investissement. Ce n’est pas un détail dans la mesure où, sans investissement, les effets du CICE restent des effets de court terme. On s’expose donc, comme dans le cas Bridgestone ou d’autres, à ce que les entreprises qui ont bénéficié de ce CICE détruisent les emplois qu’elles ont créés et même en détruisent davantage, en cas de crise.

    Et c’est bien là la vraie question que soulèvent le CICE et ses évaluations. Un effet « financé » ne veut pas dire un effet neutre. Les près de 89 milliards d’euros versés aux entreprises ont été payés par d’autres, principalement les ménages et les services publics. C’est donc là un transfert gigantesque de moyens depuis le secteur public vers le secteur privé. Or, compte tenu de l’incapacité de ce dernier à investir pour obtenir des gains de productivité permettant à l’État de « rentrer dans ses frais », la croissance économique induite par le CICE est trop faible pour aider à financer les services publics, voire à les financer davantage. C’était pourtant cela le pari du CICE, qui est aussi celui du néolibéralisme et qui est aussi une forme de « ruissellement » : l’argent transféré aux entreprises par les fenêtres devait rentrer par les caves. Cela n’a pas été le cas. Dès lors, c’est une perte sèche pour le bien commun. Comme toujours, qu’elle passe par les entreprises ou les individus, la « théorie du ruisssellement » ne se vérifie pas.

    C’est bien pour cette raison que cette mesure globalement inefficace doit amener à se poser une question simple. Les priorités de l’époque et l’évolution du capitalisme doivent-elles s’appuyer sur ce type de transfert qui ne profite que très partiellement au bien commun ? N’est-il pas temps de changer entièrement la façon d’aborder l’emploi en abandonnant l’idée que seules les entreprises créent de « bons emplois » et que, de ce fait, le chantage à l’emploi soit une des plus puissantes lois non écrites de la République ?

    L’échec du CICE ne peut qu’être un argument en faveur des projets de « garantie de l’emploi » mis en avant dans le cadre du Green New Deal aux États-Unis, où l’État (et non des entreprises) crée directement des emplois correspondant aux besoins avec des salaires décents. Plutôt que de laisser le secteur public décider des emplois qu’il crée avec l’argent public ôté aux services publics, il serait plus utile sans doute de développer ces mêmes services publics. La transition écologique et les besoins en termes de santé semblent aujourd’hui imposer un changement de stratégie. Les fermetures de sites malgré le CICE et les différentes baisses d’impôts renforcent encore cette analyse. Et c’est bien pourquoi il faut davantage qu’une évaluation souvent biaisée. Il faut un débat sur ces évaluations.

    #CICE #exonérations #fiscalité #medef #profiteurs

  • A l’Elysée, la mue « républicaine » du macronisme [avec de l’ethos de droite, du Zemmour, du Valeurs actuelles, ndc]
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/09/14/a-l-elysee-la-mue-republicaine-du-macronisme_6052101_823448.html

    La ligne dite « régalienne » prend de plus en plus de poids à la présidence de la République. Avec un objectif : mettre Emmanuel Macron en position de reconquérir les classes populaires pour 2022.

    Une image léchée, impeccable. Entre les hauts murs du Panthéon, Emmanuel Macron écoute le chœur de l’armée française chanter La Marseillaise. Le chef de l’Etat vient de présider une cérémonie de naturalisation, prétexte à vanter la République comme un « bloc », fustiger « séparatisme » et repentance. Devenir français, c’est « aimer nos paysages, notre histoire, notre culture », clame-t-il ce 4 septembre, sa voix résonnant comme dans une église. « Le sacre de Reims et la Fête de la Fédération. On ne choisit jamais une part de France, on choisit la France. » D’un bloc, toujours. Quatre jours plus tard, à l’Elysée, deux conseillers se croisent dans les couloirs du palais. « Tu as vu, lance le premier au second, le discours a plu à Eric Zemmour, il a demandé sur CNews qui en était l’auteur ! »

    En coulisses, ce discours commémoratif – également salué par Jean-Pierre Chevènement ou l’ex-plume de Nicolas Sarkozy Camille Pascal – a été l’objet d’un jeu d’influences qui en dit long sur l’évolution du quinquennat depuis trois ans. Inspirée par le conseiller mémoire, Bruno Roger-Petit, et mise en musique par la plume du président, Jonathan Guémas, tous deux tenants d’une ligne dite « régalienne » à l’Elysée, cette harangue aux accents patriotes tranche singulièrement avec l’esprit de 2017, quand le candidat d’En marche !, qui affichait optimisme et modernité, reprochait à Manuel Valls sa rigidité. Mais, à deux ans de la présidentielle, il n’est plus temps de vanter la diversité ou de prôner une vision ouverte de la société. Plutôt d’opérer la mue « républicaine » du macronisme, en lançant une offensive sur la laïcité, le communautarisme ou la sécurité.

    Une fois n’est pas coutume, le discours du Panthéon n’a pas été relu par le conseiller spécial, Philippe Grangeon. Le fait est suffisamment rare pour être noté tant ce social-démocrate, qui fut l’un des principaux artisans de l’aventure En marche !, occupe un rôle central dans le dispositif présidentiel. Mais l’ancien dirigeant de la CFDT, 63 ans, a décidé de prendre sa retraite ; il quitte le palais le 15 septembre. Celui que ses adversaires dépeignent en « libéral », représentant de la « gauche américaine », prétendument éloigné d’une vision assimilationniste de la République, aurait-il contribué à changer la tonalité du texte s’il l’avait visé ? L’éminence grise, pour qui le social est la base de tout, aura en tout cas répété jusqu’au bout qu’à ses yeux le macronisme reconnaît et respecte les diversités du pays.

    Incarnation et verticalité

    Appartenant à la même mouvance sociale-démocrate, deux anciens stratèges du quinquennat précédent, l’ancien conseiller en communication de François Hollande, Gaspard Gantzer, et l’ex-plume de Manuel Valls, Benjamin Djiane, ont bien tenté, de leur côté, de peser sur ce discours de rentrée. Dans une note envoyée à l’Elysée, trois jours avant, ils ont plaidé pour une République ouverte et capable de reconnaître ses « erreurs lourdes » dans l’histoire. Mais c’est la ligne dure qui l’a emportée. D’aucuns pointent le doigt vers Bruno Roger-Petit pour désigner l’homme se cachant derrière cette orientation.

    Cet ancien journaliste, nommé porte-parole de l’Elysée en 2017, avait été écarté de son poste un an plus tard après une conférence de presse ratée pendant l’affaire Benalla, et nommé conseiller mémoire. Ses adversaires le pensaient mis au placard. Rival de l’ancienne plume Sylvain Fort, « BRP » a entretenu des relations tendues avec les « mormons », ces jeunes conseillers ayant accompagné Emmanuel Macron dans sa conquête du pouvoir, comme Ismaël Emelien ou Sibeth Ndiaye. Imprégnés des démocrates américains, ces derniers sont d’ardents défenseurs de l’horizontalité, du progressisme et de la « start-up nation », sur fond de dépolitisation.

    A l’inverse, Bruno Roger-Petit plaide pour l’enracinement dans l’histoire, l’incarnation et la verticalité, défendant une ligne « gaullo-mitterrandienne ». Pourfendeur de « l’identité heureuse » d’Alain Juppé, inspirateur de la formule « l’art d’être français », prononcée par le chef de l’Etat après l’incendie de Notre-Dame de Paris, l’ex-journaliste aime se référer à l’entretien accordé par M. Macron en 2015 à l’hebdomadaire Le 1, dans lequel il évoquait la figure du roi, dont « l’absence » continue de hanter la démocratie française. Le président se vante de maîtriser les codes de la droite culturelle (« J’ai un ethos de droite », confie-t-il à ses proches) afin de mieux la trianguler ; « BRP » se plaît à vouloir mettre en musique cette ambition, censée contribuer à désamorcer la menace populiste.

    Le conseiller – issu de la gauche et qui se défend d’avoir viré à droite – est ainsi l’officier traitant au palais des nouveaux hussards de la droite conservatrice, qui portent selon lui « une part de l’esprit français ». En mai, il s’est ainsi félicité qu’Emmanuel Macron appelle Eric Zemmour pour réconforter le polémiste, pris à partie par un homme dans la rue. Le conseiller mémoire aime également débattre et tester ses formules avec Geoffroy Lejeune, patron de la rédaction de l’hebdomadaire droitier Valeurs actuelles. « Un journal de punks », sourit-il.

    Les adversaires de « BRP » assurent que le conseiller n’appartient pas au dispositif stratégique du chef de l’Etat, et qu’il ne faudrait pas voir en lui un nouveau Patrick Buisson, l’omniprésent « mauvais génie » de Nicolas Sarkozy. Mais ses amis, qui le décrivent comme « truculent et cultivé », croient voir sa main derrière certains arbitrages présidentiels.

    « Je m’en fous des bourgeois »

    Au palais, la ligne « régalienne » compte d’autres soutiens, qui partagent avec M. Macron l’analyse d’une cassure entre les Français et leurs élites. Comme la plume du président Jonathan Guémas, ex-collaborateur de Gérard Collomb à Lyon, marqué par son passage place Beauvau, où il a été brutalement confronté aux questions d’insécurité et de communautarisme. Avec « BRP », le jeune normalien partage parfois la table du questeur de l’Assemblée nationale Florian Bachelier, qui convie les députés par fournées à venir écouter la bonne parole de ces deux émissaires de l’Elysée. L’ex-conseiller intérieur, Laurent Hottiaux, participait de la même mouvance avant sa nomination comme préfet des Hauts-de-Seine en août. Il a été remplacé à son poste par Frédéric Rose, un expert de la lutte contre l’islamisme. Enfin, le directeur du cabinet du chef de l’Etat, Patrick Strzoda, défend lui aussi une stratégie de reconquête des classes populaires à travers ces sujets. « Je m’en fous des bourgeois, ils voteront toujours pour nous ! », a-t-il un jour glissé à un visiteur.

    Hantés par le souvenir de Lionel Jospin, qui a trébuché sur la sécurité en 2002, ces stratèges regrettent que les questions d’identité et de sécurité restent un « impensé de la deuxième gauche ». « Le pays a besoin d’ordre et de justice », explique l’un d’eux. A leurs yeux, le costume présidentiel du « prince » habité par l’histoire colle davantage aux aspirations des Français que celui du « manageur » de la start-up nation, prétexte aux procès en « déracinement ». « La demande de retour de France s’est accentuée », assure « BRP » en privé, persuadé que les questions identitaires ont pris le pas sur l’économique et le social.
    La nomination de l’ancien conseiller de Sarkozy Jean Castex, « notre Pompidou cassoulet », sourit-on à l’Elysée, ainsi que celle de figures populaires, comme Roselyne Bachelot ou Eric Dupond-Moretti, à la place de ministres experts n’ayant jamais « imprimé », ont réjoui ces conseillers. Cette nouvelle équipe, pensent-ils, saura mieux parler au cœur de la droite que le juppéiste Edouard Philippe, méfiant face aux envolées identitaires. « C’est le gouvernement de la cause du peuple », jure l’un d’eux en paraphrasant le titre d’un livre de Patrick Buisson.
    Article réservé à nos abonnés Lire aussi Macron recadre Darmanin et Dupond-Moretti après la polémique sur le terme « ensauvagement »
    La lutte d’influence sur les sujets régaliens s’est manifestée début juillet, à l’occasion du remaniement. Le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, issu du Parti socialiste, s’est ainsi récrié face à la nomination attendue de Jean-Michel Blanquer au ministère de l’intérieur en raison de ses positions intransigeantes sur l’islam. L’affaire semblait pourtant scellée, M. Macron ayant proposé de vive voix au ministre de l’éducation ce transfert place Beauvau. Nommé à la place, le transfuge de la droite Gérald Darmanin, très écouté au palais, contribue depuis à modeler tout autant le visage du macronisme, au sortir d’un été où le ministre de l’intérieur a pourfendu l’« ensauvagement » de la société.
    Beaucoup, dans l’entourage de M. Macron, se disent persuadés que la prochaine présidentielle se jouera sur les questions régaliennes. Son ancien conseiller Sylvain Fort juge ainsi qu’il n’est plus temps de s’attacher à la question de l’émancipation, centrale lors de la campagne de 2017. « La France est anxieuse de l’insécurité, de son identité », estime l’ex-plume, qui craint une République en pleine « défaisance ». « “BRP” et d’autres veulent que Macron soit le candidat de la droite populaire, comme Sarkozy l’a été », analyse un familier de l’Elysée.

    Maintenir un équilibre

    L’influence grandissante de cette ligne se lit également en miroir des départs : la quasi-totalité des « historiques », promoteurs du progressisme, ont quitté l’Elysée. Après Philippe Grangeon, mi-septembre, la secrétaire générale adjointe, Anne de Bayser, qui porte une sensibilité sociale, devrait partir elle aussi ces prochains mois, dans le sillage de l’ex-communicant Joseph Zimet, nommé en août préfet de Haute-Marne. Ce dernier, proche de Philippe Grangeon, s’affrontait durement avec Bruno Roger-Petit sur les enjeux mémoriels.
    Soucieux de maintenir un équilibre entre des conseillers « venus de tous les horizons », M. Macron a nommé fin août un nouveau communicant, Clément Leonarduzzi, formé par l’ex-conseillère de Lionel Jospin Marie-France Lavarini, avant de faire la communication des Gracques, un think tank social-démocrate. Selon nos informations, le conseiller social de l’Elysée, Pierre-André Imbert, lui aussi issu de la gauche, devrait remplacer Anne de Bayser comme secrétaire général adjoint afin de rééquilibrer la balance.

    Sur le fond, le chef de l’Etat entend assortir son offensive sécuritaire d’annonces en matière d’égalité des chances. Mais dès le 11 novembre, le président devrait être de retour au Panthéon pour célébrer « ceux de 14 » à travers la figure de l’écrivain Maurice Genevoix, qui a porté dans ses livres la mémoire des combattants français de la première guerre mondiale. Une occasion de plus de se mettre en scène au milieu des hérauts de la République.

  • La Grande Transformation (III)

    Georges Lapierre

    https://lavoiedujaguar.net/La-Grande-Transformation-III

    Aperçus critiques sur le livre de Karl Polanyi
    La Grande Transformation
    (à suivre)

    Dans son livre La Grande Transformation, Karl Polanyi nous dit que la motivation profonde de l’homme reste sociale, hier, dans les sociétés primitives, comme aujourd’hui dans le monde contemporain. Dans la société originelle, cette motivation était seulement plus visible dans la mesure où le marché (qui repose sur la recherche du profit) ne venait pas encore troubler notre perception de l’homme et de la société. Dans la société primitive, « tous les échanges s’effectuent comme des dons gratuits dont on attend qu’ils soient payés de retour, quoique pas nécessairement par le même individu — procédure minutieusement articulées et parfaitement préservées grâce à des méthodes élaborées de publicité, à des rites magiques et à la création des “dualités” (dualities) qui lient les groupes par des obligations mutuelles — et cela devrait par soi-même expliquer l’absence de gain, ou même de celle d’une richesse qui ne soit pas seulement constituée d’objets qui accroissent traditionnellement le prestige social ».

    Dans ces observations sur le fonctionnement des sociétés originelles, l’auteur fait bien la distinction entre le don lié à la conscience sociale et le prestige lié au paraître (et cela devrait par soi-même expliquer l’absence de gain, ou même de celle d’une richesse qui ne soit pas seulement constituée d’objets qui accroissent traditionnellement le prestige social). Il rejoint ainsi les conclusions auxquelles j’étais arrivé lors de mes derniers commentaires. L’activité marchande a un rapport, d’une part, avec l’intérêt particulier, le souci du gain, et, d’autre part, avec le paraître qui accroît le prestige social. (...)

    #Karl_Polanyi #échanges #paraître #prestige #profit #aliénation #État #tribut #travail #argent

  • Chômage partiel. Casino verse 655.000€ de primes à son PDG après avoir économisé des milliers d’euros
    https://www.revolutionpermanente.fr/Chomage-partiel-Casino-verse-655-000EUR-de-primes-a-son-PDG-apr

    Alors que Casino a bénéficié « d’un montant estimé à 450K€ » au titre du chômage-partiel selon la CFE-CGC, et que l’ensemble des salariés qui ont continué à travailler pendant le confinement n’ont pas pu bénéficier d’une prime, le groupe a décidé d’octroyer une prime de 655K€ à son PDG Jean-Charles Naouri.

    #profiteurs_de_guerre (puisque nous y sommes ... en guerre)

  • Asylum for Sale: Profit and Protest in the Migration Industry

    This explosive new volume brings together a lively cast of academics, activists, journalists, artists, and people directly impacted by asylum regimes to explain how current practices of asylum align with the neoliberal moment and to present their transformative visions for alternative systems and processes.

    Through essays, artworks, photographs, infographics, and illustrations, Asylum for Sale: Profit and Protest in the Migration Industry regards the global asylum regime as an industry characterized by profit-making activity: brokers who demand extortionate fees to facilitate border crossings; contractors and firms that erect walls, fences, and watchtowers while lobbying governments for bigger “security” budgets; corporations running private detention centers and “managing” deportations; private lawyers charging exorbitant fees; “expert” witnesses building their reputations in courthouses; and NGO staff establishing careers while placing asylum seekers into new regimes of monitored vulnerability.

    Asylum for Sale challenges readers to move beyond questions of legal, moral, and humanitarian obligations that dominate popular debates regarding asylum seekers. Digging deeper, the authors focus on processes and actors often overlooked in mainstream analyses and on the trends increasingly rendering asylum available only to people with financial and cultural capital. Probing every aspect of the asylum process from crossings to aftermaths, the book provides an in-depth exploration of complex, international networks, policies, and norms that impact people seeking asylum around the world. In highlighting protest as well as profit, Asylum for Sale presents both critical analyses and proposed solutions for resisting and reshaping current and emerging immigration norms.

    https://www.pmpress.org/index.php?l=product_detail&p=1097

    #livre #migrations #profit #business #migrations #asile #réfugiés #frontières #complexe_militaro-industriel #Australie #détention_administrative #rétention #Nauru #UK #Angleterre #Irlande #humanitarisme #militarisation_des_frontières #Canada #autonomie #esclavage_moderne

    ping @rhoumour @isskein @reka @karine4

  • Eric “Masks + Ventilation” Feigl-Ding sur Twitter :

    “📍HIGHWAY ROBBERY: #Remdesivir, made by GileadSciences, has now set the price ➡️ $2,300 to $3,100 per patient.

    So how much does it cost to produce each vial? ➡️ Just $1.

    US taxpayers also had paid for the drug’s NIH trial.

    Borderline criminal drug pricing. #COVID19” / Twitter
    https://twitter.com/DrEricDing/status/1291320467895320576

    #barons_voleurs #système #légal #médicaments #profits #intérêts_privés #pharma #sans_vergogne #états-unis