• « Vingt-sept de mes camarades ont été assassinés impunément » - Edgar Paéz - Investig’Action
    http://www.michelcollon.info/Entretien-avec-Edgar-Paez.html

    Dans la caractérisation de l’oligarchie colombienne, on s’aperçoit que celle-ci a été, et est toujours, l’oligarchie la plus criminelle de la région, qui a pu se maintenir et se renforcer avec le temps. Imaginez qu’en Colombie il y a eu plus de morts qu’en Chili, Argentine, Brésil… sans pourtant avoir vécu une dictature militaire ! C’est donc une oligarchie, la colombienne, qui s’est maintenue debout grâce à la violence, à la corruption et à la criminalité. Durant les 10 dernières années, il y a eu environ 500’000 morts, 50’000 desaparecidos… et cela afin de faciliter l’exploitation de toutes les ressources du pays par les multinationales.

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    En outre, ce qui caractérise le pouvoir de cette oligarchie colombienne, mais plus en général de l’oligarchie latino-américaine, c’est son lien avec l’Empire, avec l’impérialisme occidental (et notamment Etats-Unien). En effet, la Colombie est un pays totalement dépendant des Etats-Unis. C’est la raison qui explique le rôle prépondérant des multinationales dans notre pays qui contrôlent pratiquement tous les secteurs de l’économie et tous les types de ressources naturelles.

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    Ce qu’il faut retenir ici c’est que ces entreprises ne sont pas arrivées ici exclusivement avec une valise, mais aussi avec des armes, des troupes, afin de défendre leurs intérêts bien sûr. C’est là qu’apparaît le para-militarisme, instrument des multinationales pour abattre, avec tous les moyens, toute forme d’opposition à la politique d’exploitation et de pillage des ressources. La lutte des FARC (Forces Armées Révolutionnaires Colombiennes) et d’autres groupes de résistance, commencée dans les années 60, s’inscrit dans ce contexte de violence.

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    En réalité, le principal intérêt est celui d’en finir avec l’insurrection armée, ce qui permettrait d’avoir une meilleure « confianza inversionista » (par ce terme on entend l’emprise sur l’économie par des entreprises étrangères) pour que les multinationales occidentales continuent dans leur processus d’appropriation. Regardez, quand les guérillas ont vu le jour en Colombie, en 1964, la population était pour 50% urbaine et 50% rurale. Aujourd’hui, les 85% de la population est urbaine, et seulement 15% rurale. Où sont allés tous les paysans ? Pourquoi cette inversion ? Et bien, c’est l’action des multinationales ! Des milliers de paysans ont été expulsés, assassinés, emprisonnés… et cela continue aujourd’hui, malgré la rhétorique de paix. En outre, la production agricole des petits paysans est de plus en plus frappée par la production de substituts des multinationales (le lait en poudre par exemple) qui est exporté vers l’extérieur. C’est donc un modèle de développement d’exclusion, qui contraint les paysans à l’exode rural, les condamnant à vivre dans la misère extrême des (bidon)villes. On retrouve les mêmes schémas partout dans le monde, notamment en Afrique où l’exode rural a atteint des niveaux effrayants à cause des stratégies des multinationales et des politiques économiques mises en œuvre par les USA et l’Union Européenne.

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    En Colombie l’oligarchie a été tellement criminelle, tellement violente, qu’une dictature militaire formelle n’était pas nécessaire. Comme je vous l’ai dit, sans dictature militaire, on compte plus de morts que dans les pays avec.

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