Monolecte đŸ˜·đŸ€Ź

Fauteuse de merde 🐘 @Monolecte@framapiaf.org

  • Archipel des devenirs - Centre de recherche sur l’#utopie
    ▻http://archipeldevenirs.lcsp.univ-paris-diderot.fr

    La puissante et conflictuelle polyvocitĂ© de l’utopie traverse et relie des savoirs, expĂ©rimentations, histoires, communautĂ©s, critiques et dĂ©nonciations trĂšs divers. Les discours dĂ©nonciateurs, qui y voient un lieu idĂ©al, rĂȘvĂ©, figĂ©, vouĂ© dans sa forme mĂȘme Ă  l’échec, tentent d’en Ă©touffer l’effervescence. Les utopies seraient au mieux inutiles puisque impossibles, au pire dangereuses car porteuses de germes totalitaires.

    Nous considĂ©rons au contraire que l’utopie ne peut se rĂ©duire Ă  une forme de rĂȘvasserie naĂŻve qu’il faudrait soumettre aux mĂ©decins de l’ordre, seuls capables de distinguer la rĂ©alitĂ© de l’imaginaire et de sĂ©parer la pesanteur matĂ©rielle du monde de la lĂ©gĂšretĂ© dĂ©mocratique des mots. Nous rejetons cette « haine de l’utopie » et les responsabilitĂ©s qu’elle lui impute. Quoi qu’il en soit, sa tĂȘte est ailleurs et n’a pas de temps Ă  perdre – d’autant que ses projets s’étalent chaque fois sur toutes les dimensions temporelles et ne cessent de faire prolifĂ©rer des potentialitĂ©s, des lignes de fuite et des devenirs. L’utopiste ne se laisse pas distraire par les experts soucieux d’administrer le monde en fonction de ses « rĂ©alitĂ©s » et de ses seuils d’impossibilitĂ©. Il prĂ©fĂšre s’engager dans l’esquisse de nouvelles cartes du possible, expĂ©rimenter des possibilitĂ©s de vie, dĂ©codifier les parcelles de l’ordre social pour recomposer ses territoires et redĂ©finir les mots ordonnateurs des discours consensuels. Notre conviction premiĂšre est que l’utopie relĂšve de l’ordre d’une expĂ©rimentation irrĂ©ductiblement politique.

    Ainsi, l’utopie n’est pas le modĂšle de la sociĂ©tĂ© parfaite qu’il ne resterait qu’à fabriquer en pratique. Elle est traversĂ©e de tensions, de brĂšches, de dimensions non-totalisables qui ne prennent vie qu’à travers des ouvertures fragiles et des modes d’inventivitĂ© crĂ©ant de nouveaux possibles – souvent mĂȘme dans des situations morose et Ă©puisantes, dans des contextes de fatigue et de conservatisme. Elle fait jouer des excĂšs Ă  travers ses expĂ©rimentations littĂ©raires, architecturales, sociales, industrielles, cartographiques, corporelles et politiques. Elle s’insĂšre dans des paysages sociaux et politiques pour agencer des « ici et maintenant » qui ne se laissent pas rĂ©duire aux coordonnĂ©es et aux codifications de l’ordre existant, entamant des pratiques qui brisent, fracturent, reconfigurent, projettent, reterritorialisent, construisant des « paysages du possible » dissensuels et inventifs.

    Nous voudrons examiner les lieux, les dynamiques, les temps, les écritures et les politiques de ces expérimentations utopiques à travers une approche pluridisciplinaire reliant philosophie, littérature, sociologie, science politique, histoire et pratiques artistiques.