Comment interpréter ces phénomènes à l’heure où le changement climatique est dans beaucoup de têtes ? Christelle Robert, prévisionniste à Météo-France, nous aide à y voir plus clair.
Comment expliquez-vous le phénomène qui a touché le Colorado ?
C’est ce qu’on appelle un thalweg, un creux barométrique. Un axe dépressionnaire en altitude est venu bousculer une masse d’air chaud en surface sur un flux méridien (du nord au sud). C’est un peu comme si on donnait un coup de poing dans l’atmosphère. Cette rencontre entre la masse d’air froid en altitude et des couches d’air chaud en surface dans une atmosphère chaude et humide a provoqué une chute rapide de températures et des chutes de neige. C’est le même mécanisme qui est à l’origine des orages.
Est-il comparable avec les baisses de températures moins spectaculaires en France ?
Oui, c’est le même phénomène qui est à l’œuvre. Il a aussi provoqué les averses de grêle qui ont touché notamment la région de Châteauroux, dans la nuit de dimanche à lundi. Avec des cumulonimbus, des nuages normalement à durée de vie courte, qui s’auto-alimentent et créent une supercellule orageuse. On a, là, aussi un basculement entre flux zonal (d’est en ouest) et flux méridien.
Peut-on envisager un jour une baisse de 30 °C en si peu de temps en France ?
Des chutes de 20 °C sur une durée réduite, c’est déjà arrivé en France. 30 °C, je ne pense pas avoir jamais vu ça. C’est plus fréquent aux États-Unis, surtout dans ce qu’on appelle la Tornado Alley (zone où se produisent fréquemment des tornades). D’ailleurs, après cette baisse brutale des températures, le courant froid a poursuivi sa route vers le Michigan où il a provoqué une tornade.
Existe-t-il une saisonnalité pour ces phénomènes ?
Ils sont plus fréquents au printemps, une saison de plus grand contraste, avec des flux d’air chaud et d’air froid plus marqués. À l’automne, le phénomène est moindre : les mers plus chaudes sont là pour radoucir les masses d’air froid.
Faut-il voir dans ces baisses brutales de températures une conséquence du changement climatique ?
C’est à l’étude sans que l’on puisse vraiment déterminer si oui ou non le changement climatique entre ici en ligne de compte. Ce que l’on sait, par contre, c’est qu’il est à l’origine de vagues de chaleur qui vont faire que ce genre de phénomènes risque de se répéter et d’être exacerbé. Le changement climatique ne crée pas une nouvelle dynamique sur les flux méridien et zonal mais il en amplifie les effets.