• Les migrants, cibles du trafic d’organes

    Fin août, un nouveau coup de filet a eu lieu en #Egypte contre des trafiquants d’organes. Au Proche-Orient, les migrants sont devenus leurs proies privilégiées.

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2017/09/04/les-migrants-cibles-du-trafic-d-organes_5180796_1650684.html
    #trafic_d'organes #asile #migrations #réfugiés

  • *A l’Observatoire de Paris, un bureau d’enquêtes (presque) incollab le*

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2017/09/04/a-l-observatoire-de-paris-un-bureau-d-enquetes-presque-incollable_5180957_16

    Enigmes criminelles ou archéologiques, fêtes cultuelles ou curiosités profanes… A l’Observatoire de Paris, on répond à toutes les questions sur la marche du ciel.

    Lorsque la lettre, signée ­Patrick Kearney, portant l’adresse de la prison d’Etat de Mule Creek (Californie) est arrivée, Pascal Descamps a d’abord cru à une plaisanterie. Mais, vérification faite, l’auteur de ce courrier aux larges caractères manuscrits était bel et bien le célèbre tueur en série californien des années 1970. Condamné à la réclusion à perpétuité pour 21 meurtres, mais probablement responsable au total de 43, l’assassin qui exécutait ses victimes (souvent des homosexuels) dans sa voiture, avant de les violer, de les découper en morceaux et de les abandonner dans le désert, posait à l’astronome une question simple mais curieusement décalée au regard de sa ­situation personnelle. En admettant que cela soit possible, interrogeait-il depuis sa cellule, combien de temps faudrait-il à un vaisseau spatial, soumis à une accélération constante de 9,81 ms-2, pour ­atteindre la vitesse de la lumière ? Serait-ce 353 jours, 19 heures, 45 minutes et 23 secondes ?

    « Un statut d’expert »

    Responsable, et unique employé, du trop confidentiel Service de calculs astronomiques et de renseignements de l’Institut de ­mécanique céleste et de calcul des éphémérides (IMCCE) de l’Observatoire de Paris et du CNRS, Pascal Descamps a vite appris à n’être surpris de rien. Conformément à une tradition ancienne, remontant à l’époque, antérieure à 1998, où le Bureau des longitudes, créé par la Convention, avait seul en France la capacité de prévisions en matière de mouvements des corps célestes, il est chargé de ­répondre aux questions adressées à l’Observatoire de Paris par le ­public. Qu’il s’agisse de particuliers, de professionnels ou de la justice. Successeur de Patrick ­Rocher, parti à la retraite en juillet 2015, il en avait, au 1er mai, déjà traité 616, consacrant à cette activité la moitié de son travail de chercheur, là où l’administration avait prévu un tiers de mi-temps.

    C’est que, explique-t-il, donner une suite à ces sollicitations, ­reçues par la poste ou par courriel, peut être « chronophage ». Passe encore, lorsqu’il s’agit uniquement, comme six fois sur dix, de fournir une éphéméride d’heure de lever et de coucher du soleil et de la lune ou de décrire des phénomènes célestes tels que l’éclipse solaire du 21 août. Admettons également que peu de temps soit ­nécessaire pour dissiper les craintes de ceux qui, comme cette dame, s’inquiètent systématiquement de savoir si les astéroïdes ­géocroiseurs évoqués à la radio ne vont pas s’écraser incessamment sur Terre. Tout cela était prévu !

    Mais lorsque le problème touche à un point particulier de l’histoire de l’astronomie ou concerne une technique spécifique impliquant des calculs poussés, la ­réponse peut être longue à formuler. Une récente controverse à propos de la démonstration de la bissection de l’excentricité de l’orbite terrestre par l’astronome du XVIIe siècle, Jean Dominique ­Cassini (1625-1712), n’a-t-elle pas entraîné deux mois de travail pour Pascal Descamps ?

    Or, ce dernier est également tenu d’aider les lycéens à préparer leur travail d’initiative personnelle encadré (TIPE), d’indiquer aux différents cultes français qui en font la demande les dates et heures des fêtes religieuses liées aux cycles lunaire et solaire – comme le début du ramadan ou la rupture du jeûne qui dépendent de la position géographique des ­fidèles. Et de fournir, contre rétribution, aux journaux de chasse, de pêche et depuis peu d’agronomie – avec le développement de la culture du vin par « biodynamique lunaire » – les éphémérides qu’ils commandent.

    « Enfin, rappelle Pascal Descamps, l’Observatoire de Paris a un statut d’expert. Et, à ce titre, il répond à des réquisitions judiciaires. » La reconstitution d’un assassinat nocturne oblige les juges d’instruction à s’informer des phases de la Lune et des conditions d’éclairement à l’heure supposée du crime. Et il n’est pas rare que la police judiciaire veuille vérifier si un éblouissement, causé par une position particulière du Soleil, pourrait expliquer certains accidents mortels de voiture, ­d’hélicoptère ou d’avion. Dans les ­années 1990, le témoignage d’un conducteur qui avait écrasé un piéton avait ainsi été validé.

    Dans ses nouvelles fonctions, se félicite l’astronome, il y a toujours l’excitation de l’insolite. Cette ­succession d’énigmes grandes ou moins grandes, posées par des particuliers, qu’il faut s’efforcer de résoudre en glanant renseignements et astuces dans le champ fertile du savoir humain. Certes, admet le scientifique, le lot cache quelques fruits gâtés, comme ce courriel anonyme relatif à la date prochaine d’une obscure conjonction astrale liée manifestement à des actes de sorcellerie, ou cette lettre signée « Langage de velours » dont l’auteur refusait obstinément de recourir au genre féminin et s’obligeait à employer un ­curieux vocabulaire où les mots « Terre » et « galaxie » étaient remplacés par ceux, improbables, de « planétoïde » et de « galactisme ».

    Questions diverses

    Mais ces courriers recèlent aussi de véritables perles, souvent poétiques. Ecrivain de science-fiction souhaitant connaître l’effet qu’aurait la présence de deux ou trois lunes supplémentaires autour de la Terre. Violoniste désireux de débuter un concert à ­l’instant exact du crépuscule. ­Publicitaire aspirant à organiser un événement une nuit où la pleine lune serait posée juste au sommet de la tour Eiffel observée depuis le Trocadéro…

    Beaucoup de questions, précise le chercheur, proviennent d’historiens et d’archéologues qui en ­appellent aux astronomes pour associer des dates aux phénomènes célestes dont ils retrouvent les traces dans des archives. Ces derniers leur servant aussi bien de jalons pour établir des chronologies d’événements que, comme dans le cas des gravures rupestres des Pléiades de la montagne sacrée du Bego (Alpes-Maritimes) ou celui de l’alignement des fours du premier âge du fer d’Eyrein (Corrèze), d’indices de la présence d’un rituel.

    Ainsi, Pascal Descamps raconte avoir expertisé des graffitis de la cathédrale de Nevers (Nièvre) faisant allusion à une possible, mais imaginaire après vérification, éclipse du Soleil en l’an 1606. Et son prédécesseur Patrick Rocher se souvient avoir fourni des renseignements sur des questions aussi diverses que l’état de la voûte céleste au moment des expéditions de La Pérouse, la façon particulière dont était fixée l’heure du début de la journée dans la ville de Florence à l’époque de Mona Lisa, ou encore le moment des lunaisons qui marquaient, pense-t-on, le commencement des cérémonies cannibales des Taïnos des Caraïbes. En relevant la longueur des ombres sur une vieille photographie, le même spécialiste, en poste de 2002 à 2015, a réussi à découvrir à quelle ­période de l’année 1916 était survenue, dans le quartier du Montparnasse à Paris, une rencontre, longtemps inconnue des historiens, entre le peintre Picasso et le poète et romancier Max Jacob.

    La méthode n’a pas, pour autant, réponse à tout, surtout lorsque les événements recherchés remontent loin dans le passé. En raison des incertitudes de positionnement causées par le ralentissement irrégulier de la rotation de la Terre, Patrick Rocher a dû se ­contenter d’une fourchette de cent huit ans (entre 1848 et 1740 av. J.-C), pour préciser l’année d’une éclipse solaire citée dans un calendrier ­babylonien qu’une assyriologue souhaitait dater. Et selon Pascal Descamps, faute de nouvelles sources, il ne sera jamais possible de savoir quand exactement est survenue la bataille de Gabaon au cours de laquelle, comme chacun le sait, Josué a obtenu de Dieu qu’il « arrête le Soleil ».

    Mais qu’importent ces échecs ! Le métier apporte assez de satisfactions pour ne pas perdre son temps en vaines lamentations. Pascal Descamps a, par exemple, rendu récemment un petit service aux responsables d’une mosquée en construction à Clamart (Hauts-de-Seine), qui s’interrogeaient sur le meilleur moyen de déterminer la direction de La Mecque. Le défi était ici de proposer une méthode élégante par sa simplicité. Celle adoptée ne faisait ainsi appel ni à un GPS ni à une boussole, mais à la seule arme que le sage s’autorise à porter : un simple bâton fiché dans le sol dont l’ombre portée, à un certain moment, indiquait aux croyants vers où se tourner pour retrouver la ville sainte.

    Les Indiens caraïbes et la constellation du Scorpion

    « Pourriez-vous me fournir les dates des levers et des couchers ­héliaques de la constellation du Scorpion et de l’amas des Pléiades pour l’année 1650 dans les Petites Antilles ? » Telle est la question qu’a adressée Benoît Roux, doctorant à l’université de Reims-Champagne-Ardenne spécialiste des « Indiens caraïbes » du XVIIe siècle, à l’astronome Pascal Descamps. Le lever héliaque (dit du « matin ») d’un astre indique le moment de l’année où ­celui-ci devient visible avant le lever du Soleil. Très utilisé dans l’Antiquité, il était signalé dans les calendriers pour les étoiles les plus remarquables. Des sources européennes rendent compte de cette pratique chez les Amérindiens. Mais, explique Benoît Roux, « ces documents ne donnent pas de détails sur les observations ni sur la conjoncture astrale tenue pour significative ». En comparant les dates calculées par Pascal Descamps aux temps – celui de la guerre, de la pêche… – marquant la vie des Amérindiens, et aux événements climatiques saisonniers de la région, l’étudiant espère affiner la connaissance du calendrier caraïbe.