Les besoins risqués et vitaux du paresseux

/les-besoins-risques-et-vitaux-du-paress

  • Les besoins risqués et vitaux du paresseux

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2014/02/17/les-besoins-risques-et-vitaux-du-paresseux_4368134_1650684.html

    Une des particularités des paresseux à trois doigts (ou aïs) – espèce anatomiquement et écologiquement bien distincte des unaus à deux doigts – intriguait depuis longtemps les spécialistes. Pourquoi, plutôt que de se soulager du haut de la canopée, descendent-ils environ une fois par semaine de leur arbre pour déféquer, au prix d’un cérémonial épuisant (8 % de la dépense énergétique quotidienne) et fort dangereux (la prédation au sol est la cause d’un décès sur deux chez les paresseux) ? Ecologue et assistant professeur à l’université du Wisconsin à Madison (Etats-Unis), Jonathan N. Pauli pense qu’une relation mutualiste tripartite entre les paresseux et ses commensaux, papillons de nuit et algues vertes, est la clé de l’énigme.

    Pour Jonathan Pauli, c’est le signe d’une relation mutualiste à trois : « Plus il y a de papillons dans la fourrure des paresseux, plus celle-ci est riche en fertilisants et plus les algues vertes y abondent. Les algues étant parfaitement assimilables par leur organisme et trois à cinq fois plus riches en lipides que les végétaux dont ils se nourrissent, il semble donc que les paresseux cultivent les algues, par l’intermédiaire des mites qu’ils aident à coloniser leur fourrure. En se décomposant, peut-être sous l’action des champignons, les mites sont minéralisées et transformées en nutriments non organiques qui profitent aux algues. »

    Mais comment le paresseux ingère-t-il ces algues ? La question est d’autant plus délicate que les spécialistes relèvent qu’on n’a jamais aperçu l’animal en train de se nourrir de quoi que ce soit provenant de sa fourrure. « Nous n’avons pas la réponse à cette question », admet Jonathan Pauli, tout en soulignant que l’ingestion ne fait aucun doute : « En examinant le contenu de l’estomac de certains individus, nous avons pu identifier une espèce d’algue que l’on ne trouve que dans leur fourrure. Il est donc clair qu’ils l’ont consommée ! » Il est toutefois encore trop tôt pour déterminer les quantités absorbées, et valider définitivement l’idée que le bénéfice énergétique vaut bien le risque encouru.