Le calvaire d’Alice Tavares, expulsée de son logement | L’Humanité
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Tout s’effondre en 2014. Elle se fait opérer de la thyroïde et les médecins lui détectent une bactérie qui lui ronge l’estomac. Voilà des années qu’elle prend des antibiotiques sans résultat. Peu après le diagnostic de sa maladie, elle s’aperçoit que la caisse d’allocations familiales (#CAF) ne lui verse plus l’ensemble des prestations auxquelles elle peut prétendre. À l’époque, Alice a encore la charge de cinq de ses enfants. « Des fois, c’était 200 euros en moins, des fois 700 euros. Je ne comprenais pas ces écarts et la CAF ne m’a jamais donné d’explications. » Sans emploi, tributaire des allocations, elle n’arrive plus à payer son propriétaire et contracte peu à peu une #dette de loyer qui s’élève aujourd’hui à 12 000 euros.
Dès 2014, pourtant, Alice demande un #logement social auprès de la mairie de Taverny, soutenue par une assistante sociale du département. Sa demande reste lettre morte. « J’ai pris plusieurs rendez-vous avec le CCAS, avec l’adjoint au logement. Il ne se passait rien. J’ai sollicité Madame la maire, Florence Portelli (Les Républicains – NDLR). Elle n’a jamais voulu me recevoir », explique Alice, convaincue que son dossier est sur liste noire. Pourtant, en 2015, même les services hygiène et salubrité de Taverny établissent un constat dans l’appartement qui confirme « la présence d’humidité importante, consécutive à une fuite d’eau dans la salle de bains » et « (celle) d’eau stagnante au sol qui a provoqué des dégradations importantes ». L’état de santé d’Alice se détériore. L’assistante sociale l’incite à se faire opérer. Mais cette mère de huit enfants refuse à cause d’une possible expulsion. « Ça pouvait arriver à tout moment. Nous avons tout fait pour repousser l’échéance. Je ne voulais pas me retrouver à l’hôpital et voir mes enfants seuls à la rue. »
À la mairie de Taverny, Loïc Drouin, directeur de cabinet de Florence Portelli, connaît le dossier et ne ménage guère la famille Tavares : « Cette dame s’est mise en difficulté toute seule. Elle a dégradé les lieux. Nous ne refusons pas de la recevoir. On ne néglige personne mais, vu sa dette de loyer, aucun office HLM ne voudrait de son dossier. » Pourtant, ses propres services d’hygiène ont diagnostiqué un appartement en mauvais état. Connaît-il le propriétaire ? « Oui, on le connaît très bien », répond-il avant de se reprendre, « enfin, c’est un administré comme les autres ». Alors qu’Alice Tavares a été expulsée le 31 mars 2018, ce propriétaire continue de percevoir les aides au logement. Contacté par téléphone, ce retraité vivant à Agde n’a pas donné suite à nos sollicitations.
« Tous mes dossiers sont bloqués ! »
Alice a été reconnue prioritaire au titre du Dalo (droit au logement opposable) en 2017. Le préfet du Val-d’Oise a mandaté, le 11 mai dernier, le bailleur Soliha pour l’accompagner dans son relogement. Alice n’en avait pas de nouvelles, jusqu’à la semaine dernière. Au lendemain de notre appel à Soliha pour connaître l’avancée de son dossier, Alice a obtenu enfin un premier rendez-vous, fixé au mercredi 29 mai. Le début d’une solution ? Il faut l’espérer. « Tous mes dossiers sont bloqués ! peste- t-elle. Je suis en procès avec la CAF, qui me doit de l’argent mais refuse de fournir le document qui le confirme depuis trois ans. Cela me permettrait de rembourser mes impayés. Je n’ai plus d’énergie pour me battre… »
Dans la petite chambre d’hôtel, l’entretien touche à sa fin. Alice s’effondre alors, envahie par les douleurs abdominales. Elle montre une ordonnance de son médecin de l’hôpital Saint-Joseph, à Paris, datée d’août 2017, où il atteste de la nécessité d’une opération « à court terme ». Sa bactérie se mue en cancer. Il faut lui enlever l’estomac. Sauf que, à tout moment, encore une fois, Alice et sa famille risquent l’expulsion. Sans logement plus pérenne, pas d’opération possible. Les