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  • Loi « immigration » : le risque d’une généralisation des droits différenciés pour les étudiants étrangers
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    Loi « immigration » : le risque d’une généralisation des droits différenciés pour les étudiants étrangers
    Par Minh Dréan
    C’était l’une des mesures les plus décriées du plan « Bienvenue en France », présenté par l’ancienne ministre de l’enseignement supérieur Frédérique Vidal. Depuis 2019, les étudiants étrangers doivent s’acquitter de droits d’inscription plus élevés que les candidats européens. Plusieurs universités s’étaient jusqu’ici engagées à ne pas mettre en place ce principe, mais la récente loi « immigration », en inscrivant celui-ci dans le code de l’éducation, rendrait obligatoire son application.
    En déplacement au salon d’orientation postbac de Paris-La Villette, vendredi 12 janvier, Sylvie Retailleau, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, reconduite au sein du nouveau gouvernement, a assuré avoir obtenu des engagements « forts » auprès du président de la République, Emmanuel Macron. Une manière de rassurer la communauté universitaire, qui avait fermement condamné les dispositions de la loi « immigration », dont la généralisation des droits différenciés. Ceux-ci ne sont pas une nouveauté. Depuis 2019, les étudiants extracommunautaires (hors Union européenne) qui souhaitent s’inscrire à un diplôme national de licence, de master ou de cycle d’ingénieur doivent débourser 2 270 euros pour une licence et 3 770 euros pour un master, contre 170 et 243 euros pour le reste des candidats.
    Le ministère avait cependant accordé, par décret, aux facultés la possibilité d’exonérer de droits d’inscription 10 % de leurs étudiants. Un dispositif que les présidents ont massivement choisi d’utiliser en faveur des candidats extracommunautaires. Ainsi en 2023, 57 % des universités (soit 42 d’entre elles) ont exonéré l’intégralité des étudiants étrangers, selon un décompte publié par l’agence de presse spécialisée AEF. Elles sont 16 (22 %) à en exonérer une partie, selon des critères académiques, de nationalités ou linguistiques. Seules 13 universités (18 %) appliquent complètement les frais majorés.
    Selon la vice-présidente de l’université Paris-II Panthéon-Assas, Emmanuelle Chevreau, à la rentrée 2023, ces frais majorés, mis en place par l’administration précédente, ont concerné 900 étudiants – sur les 3 000 candidats étrangers accueillis. Ces derniers peuvent ensuite faire une demande d’exonération partielle. « Ensuite, 50 % des demandes sont acceptées selon des critères économiques et sociaux. Cette année, seuls 10 % des étudiants en ont fait la demande », indique-t-elle.
    En pratique, rares sont les étudiants qui payent l’intégralité des frais : sur les 96 600 étudiants inscrits à la rentrée 2021, ils ne sont même que 6 %, indique une note du service statistique et analyse de l’enseignement supérieur parue en mars 2023. Près de 17 % en sont totalement exonérés, le reste bénéficiant d’exonérations partielles, décidées par l’établissement ou via des bourses du gouvernement et d’ambassade. A l’université de Limoges, jusqu’en 2021, la présidence avait refusé de faire payer davantage aux étudiants étrangers. Mais la nouvelle équipe, elle, a fait un autre choix. « Nous avons simplement décidé de respecter la loi », souligne le vice-président de l’établissement, Laurent Bourdier, qui réfute « toute considération idéologique ».
    « Nous avons essayé de faire quelque chose d’équilibré en mettant en place plusieurs garde-fous et surtout en jouant sur le jeu des exonérations par le biais d’attribution de bourses d’excellence », détaille-t-il. Sur les 2 000 étudiants étrangers accueillis sur le campus de Limoges, seuls 420 se sont bien acquittés des frais dans leur intégralité. « Le système reste imparfait, il y a eu quelques remous, ça a été difficile d’introduire les droits d’inscription différenciés auprès de nos équipes, reconnaît M. Bourdier. Je ne minimise pas le fait qu’il s’agit de frais importants qui peuvent freiner certains candidats. »
    Ces droits différenciés avaient été présentés par le ministère comme une manne financière devant permettre un meilleur accueil de ces étudiants. « Nous avons un devoir d’exemplarité envers tous ceux qui s’acquittent de ces frais », assure le responsable. A Limoges, ce sont donc 90 000 euros qui sont consacrés à l’accompagnement « individualisé » des étudiants étrangers. Entre 600 000 et 700 000 euros sont dévolus à l’agrandissement du campus international. En tout, les droits d’inscription différenciés rapporteraient environ 900 000 euros à l’établissement.
    D’autres universités arguent qu’elles n’ont pas d’autre choix que d’appliquer ces droits. C’est le cas à l’université de Strasbourg, où pour la première fois, en 2024, l’établissement appliquera les droits différenciés pour les étudiants étrangers puisque le seuil d’exonération de 10 % devrait être dépassé. Une règle a toutefois été décidée : exonérer complètement les étudiants en licence mais faire payer ceux arrivant en master. Certaines universités résistent pourtant tant bien que mal. A Rennes-II, les candidats étrangers représentent 15 % de la population étudiante (23 000) et 85 % d’entre eux sont des étudiants extracommunautaires. Vincent Gouëset, le président de l’université, s’était opposé, dès 2019, à la mise de cette mesure en pointant du doigt la « rupture d’égalité » pour les étudiants étrangers issus de milieux défavorisés. « Le choix de ne pas appliquer ces droits différenciés nous conduit à dépasser le seuil des 10 % autorisé, c’est un choix assumé qui répond aux valeurs d’inclusion et de justice sociale portées par l’établissement, le rectorat en est informé et ne nous a rien dit », déclare le président, conscient que l’adoption de la loi sur l’immigration pourrait pousser le rectorat à lui imposer une application plus stricte des textes.

    #Covid-19#migration#migrant#france#loiimmigration#etudiant#inegalite#université

    • « Dans la logistique, la loi immigration va faire des ravages ». Billet de Pierre, ouvrier
      https://www.revolutionpermanente.fr/Dans-la-logistique-la-loi-immigration-va-faire-des-ravages-Bill

      Fin décembre, le gouvernement a imposé ce qui est sans doute la loi la plus brutale et la plus raciste de l’Histoire de la V° République. Une loi qui va avoir d’énorme conséquences dans le monde du travail et notamment la logistique. Billet de Pierre, ouvrier et délégué syndical dans le secteur de la logistique.

      L’année 2023 s’est terminée avec l’adoption de l’une des lois les plus brutales envers les immigrés que la 5eme république ait connu. La loi immigration constitue une énorme offensive réactionnaire du gouvernement, avec l’appui de la droite et de l’extrême-droite. Remise en cause du droit du sol, durcissement des conditions de regroupement familial, modification de la « régularisation par le travail » : cette loi est une attaque globale qui touche aujourd’hui des millions de personnes en France, en particulier des travailleuses et des travailleurs des secteurs les plus précaires, des salariés du bâtiment jusqu’aux ouvrières et ouvriers du nettoyage, des CDI jusqu’aux intérimaires. Ces fameux travailleurs essentiels qui font des travaux difficiles et mal payés, ce sont eux qui seront les premiers attaqués.

      Concrètement, dans l’entrepôt de logistique ou je travaille, la grande majorité de mes collègues sont issus de l’immigration. Mais ce n’est pas une réalité seulement dans mon entrepôt. Comme l’explique la sociologue du travail Carlotta Benvegnù dans un article de Socialter les salariés dans la logistique « sont aujourd’hui environ 800 000, et même 1,5 million en comptant le transport. 80 % sont des hommes, pour la plupart racisés, et la grande majorité sont des ouvriers. En 2021, 13 % des emplois ouvriers en France relevaient ainsi du secteur de la logistique ». Il faut ajouter qu’« en France, le secteur de la logistique fait un recours massif au travail temporaire, avec près d’un quart des effectifs ouvriers en intérim, auxquels s’ajoutent 10 % de contrats à durée déterminée (CDD) » d’après une étude publiée par la Dares en 2020. Ces quelques données suffisent à comprendre que, dans la logistique, c’est une majorité des ouvrières et ouvriers qui sont directement concernés par les mesures de la loi immigration.

      Alors que la loi n’est pas encore promulguée, la situation est déjà catastrophique, avec des cas variés, du travailleur sans-papiers à la personne en attente du renouvellement de carte de séjour. Comme si cela ne suffisait pas, nombre de collègues sont aussi touchés « indirectement », que cela soit pour des membres de leurs familles présents en France, des proches ou des amis. Dans ce cadre, l’annonce de la loi et le durcissement des conditions pour obtenir des papiers, titres de séjour etc. va rendre la situation plus dramatique pour ceux déjà touchés… et mettre en difficulté des travailleurs étrangers supplémentaires En d’autre terme, dans la logistique comme ailleurs, la loi immigration va faire des ravages.

      Mais la nouvelle loi alimente aussi deux mythes qu’il faut déconstruire :

      Le premier est de penser que la demande de régularisation serait plus facile en tant que travailleur. En effet, parmi les mesures de la loi, il n’y aura plus besoin du certificat de l’entreprise pour une régularisation par le travail dans les métiers « en tension », ce qui est le cas pour la logistique. Certains collègues voient ce changement comme plutôt positif puisqu’il ne sera plus nécessaire de demander ce document à son patron. Malheureusement, cette disposition s’accompagne d’une batterie de mesures rendant plus difficile l’accès à la régularisation par le travail : non seulement les autres conditions nécessaires sont durcies (notamment le nombre de mois consécutifs au travail) mais surtout le pouvoir des préfets pour valider ou non ces régularisations sera renforcé ! Il ne faut pas se faire d’illusions quant au rôle des préfets qui sont sous l’autorité directe du ministre de l’Intérieur. Tout sauf une amélioration donc…

      Le deuxième mythe, alimenté par une propagande médiatique intense et sans interruption, serait que cette loi ne concernerait que les travailleurs étrangers. Derrière ça, le gouvernement cherche à nous diviser, surtout après les récents mouvement sociaux où on a vu que les travailleurs pouvaient s’unir pour s’opposer au gouvernement notamment contre la réforme des retraites. En réalité, laisser passer cette loi qui s’attaque à des travailleurs en leur conditionnant des aides selon leur nationalité c’est ouvrir la voie à toutes les attaques qui sont déjà annoncées contre les plus précaires, sur le RSA ou l’assurance chômage, ou bien encore la « nouvelle loi travail » qui attaquera l’ensemble des travailleurs, quelque soit leur nationalité.

      Au contraire, se battre tous ensemble contre la loi immigration, c’est refuser leur jeu de la division et potentiellement infliger un recul à un gouvernement anti-travailleur, pour mieux préparer les combats à venir dans les prochains mois. Il faudra être nombreux à dénoncer cette loi dans la rue. Aussi dans nos entreprises, ça va être décisif de dénoncer la loi immigration comme on l’a fait avec notre syndicat CGT ID Logistics Région Ouest pour montrer à nos collègues qu’ils ne sont pas seuls à affronter ces attaques racistes.