Le lapin, le moine et le militaire : le procès surréaliste des manifestants de Sainte-Soline

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  • Procès des inculpés de Sainte-Soline à Niort : récit d’audience
    28 juillet 2023 - Contre Attaque
    https://contre-attaque.net/2023/07/28/proces-des-inculpes-de-sainte-soline-a-niort-recit-daudience

    (...) Néanmoins, celui que l’on nomme partout le “poète maraîcher” n’entache pas sa réputation : au cours d’un long monologue émouvant, il mêle poésie et politique. Il raconte son arrestation et la disproportion des moyens antiterroristes déployés à son encontre, la dichotomie entre les hommes cagoulés et leurs armes à feu et lui, qui dormait auprès de sa petite amie dans sa “cabane au fond du jardin”. Puis, il défend le mode de maraîchage auquel il participe, plus juste, plus équitable que l’agriculture intensive qu’il combat. Il dénonce les armes des forces de l’ordre françaises exportées à l’étranger, qui tuent et mutilent là bas, aussi. Rare événement, les juges sont à leur tour jugés : “S’acharner à traquer, enfermer et juger les militants écolos sans s’acharner à traquer, enfermer et juger les policiers qui ont mis deux personnes dans le coma, fait de vous une justice partisane.” Il ajoute que contre l’impunité, “Le privilège de l’uniforme doit être aboli”. Enfin, à la question initiale “Êtes-vous le moine ?” , il répond “Tant que l’identité des policiers ayant presque tué S. et M. ne sera pas connue, vous ne saurez pas qui est le moine.” (...)

    #Sainte-Soline

  • Le lapin, le moine et le militaire : le procès surréaliste des manifestants de Sainte-Soline | Mediapart | 28.07.23

    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/280723/le-lapin-le-moine-et-le-militaire-le-proces-surrealiste-des-manifestants-d

    Écologie — Reportage

    Quatre personnes ont été condamnées, jeudi 27 juillet, à des peines de prison [avec sursis pour les 3 premiers et aménagement pour le 4eme] à l’issue d’une longue audience sur des faits commis lors de la manifestation contre les mégabassines en mars dernier.
    [...]
    Une observatrice de la Ligue des droits l’homme vient parler de l’« usage disproportionné et indifférencié de la force » documenté dans un épais rapport publié le 10 juillet sur la stratégie de maintien de l’ordre à Sainte-Soline et dont la crédibilité est questionnée par le juge : « Êtes-vous qualifiée pour mesurer la proportionnalité ? La cause légitime-t-elle les violences ? Pourquoi n’avez-vous pas documenté les blessés chez les gendarmes ? Êtes-vous militante ? Que faisiez-vous dans une manifestation interdite ? Est-ce que nous en serions là si l’interdiction avait été respectée ? » Elle se débat et retourne sur son siège, soufflée par un débat qui est parti bien au-delà du témoignage qu’elle avait préparé.

    Loïc parle bien, jeune et élancé, avec une liasse de papiers manuscrits à la main. Il a préparé un poème pour le tribunal et développe, devant un juge qui peine à conserver sa patience, quelques explications sur la pensée anarchiste et la « destruction symbolique » comme mode d’action. Il parle bien mais c’est trop pour un seul homme. Ce moine, au milieu des black blocs plus visibles que les autres à Sainte-Soline, semble encore isolé, là, seul dans un box de tribunal, à mener et à porter sur ses épaules un procès politique qui dépasse les contours des infractions qui lui sont reprochées.

    Les réquisitions de la procureure ramènent, après des heures et des heures de débat politique, le Code pénal à l’audience. Décrivant « un moine glaçant devant un camion de gendarmerie qui flambe », elle demande une peine d’un an de prison avec aménagement pour poursuivre son travail en maison de retraite, où le recrutement est à la peine. Elles seront suivies par le tribunal dans sa décision. Loïc repart libre. Une nouvelle manifestation contre les mégabassines est prévue le 18 août dans les Deux-Sèvres. Loïc S. a interdiction de paraître dans ce département pendant trois ans.

    #sainte-soline

    • « L’effondrement du vivant et le réchauffement climatique imposent la lutte. Nous avons le devoir de combattre. Cela est opposé à la construction d’alternatives mais j’aime bien faire les deux », explique l’activiste, également maraîcher dans la Meuse et employé dans une maison de retraite où il développe, au-delà des soins quotidiens, des ateliers de jardinage avec les résident·es.

      Titulaire d’une maîtrise de droit, militant antinucléaire, il a été condamné pour avoir hacké plusieurs sites publics au début de sa vingtaine, dont celui de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra). Mais aussi pour des dégradations – qu’il conteste – lors du G20 à Hambourg (Allemagne). Avant sa dernière arrestation, il aidait un convoi de réfugié·es. Il fait mille choses. « Presque content de me reposer un peu en prison. »

      Comme les trois autres prévenus, Loïc S. a été confondu par la reconnaissance faciale – un procédé d’enquête jugé disproportionné par leurs avocats. Après trois mois d’investigation par la section de recherche de la gendarmerie de Poitiers, Loïc est finalement arrêté, le 22 juin, dans un déferlement de moyens, dont la mobilisation d’une unité de contre-terrorisme, selon ses avocats.

      À Sainte-Soline, il s’est déguisé en moine. Les enquêteurs ont compilé des images confondantes – dont une bonne part est issue de ses propres réseaux sociaux. On le voit saisir un gilet de gendarme, puis le reposer. Et sa signature « Mud Wizard » est apposée sous un tag « ACAB » (« All cops are bastards ») retrouvé sur une voiture de gendarmerie incendiée. Des faits, qui, cumulés, lui font risquer sept ans de prison.

      « Il y a une disproportion tout au long de cette affaire. […] La construction d’une figure écoterroriste fictionnelle », dénonce Me Christophe Gros, l’un de ses trois avocats lors de sa plaidoirie. « À Sainte-Soline, Loïc ne blesse personne, il ne commet aucune violence, il ne cause pas de préjudice matériel. Cela ne correspond en rien en termes de gravité criminelle.