« L’armée de terre se tient prête »

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  • A propos de la guerre qui fait rien qu’à "être à nos portes". Une analyse d’une cruelle lucidité.

    Stéphane Audoin-Rouzeau : « Sur la guerre, nous sommes aux limites d’un déni de réalité » | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/090324/stephane-audoin-rouzeau-sur-la-guerre-nous-sommes-aux-limites-d-un-deni-de

    StéphaneStéphane Audoin-Rouzeau est directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), spécialiste de la Première Guerre mondiale et président du Centre international de recherche de l’Historial de la Grande Guerre à Péronne (Somme). Il a publié l’an dernier aux Belles Lettres La Part d’ombre. Le risque oublié de la guerre.

    https://justpaste.it/bfh8n

    • un réarmement véritable n’est possible ni industriellement, ni démographiquement, ni financièrement.

      Comme au moment du Covid, l’importation croissante du vocabulaire militaire dans le champ politique permet à peu de frais d’imaginer que l’on a prise sur le réel, alors que ce n’est pas le cas. Ce discours martial se veut sans doute performatif, mais je préfère me concentrer sur l’aveu étonnant du président de la République : « Ayons l’humilité de constater qu’on a souvent eu six à douze mois de retard. »

    • on ne sait pas ce que signifie vivre dans le temps de la guerre, un temps modifié dans lequel la dimension eschatologique prend une ampleur inégalée.

      On reconnaît le droitard académique (de guerre) à des formules telles que « l’Ukraine est en train de vivre sa crise de 1917 », mais effectivement l’offensive russe de printemps va tout chambouler, ce qu’on lit peu.

      #Russie #Ukraine #guerre #discours_martial

    • « Sommes-nous prêts pour la guerre ? » : une armée presque sans défense

      Spécialiste des questions militaires, le journaliste Jean-Dominique Merchet décape les illusions de la puissance française, non sans une pointe d’humour qui traduit une lucidité bienveillante.
      Alain Beuve-Méry, 14 mars 2024

      Alors qu’Emmanuel Macron a provoqué un débat houleux en évoquant la possibilité d’envoyer des troupes occidentales en Ukraine, l’essai de Jean-Dominique Merchet, spécialiste des questions militaires et stratégiques à L’Opinion, trouve toute sa pertinence. Dans Sommes-nous prêts pour la guerre ? (Robert Laffont, 224 p. 18 €), le journaliste décortique, en neuf questions, les différents aspects de la défense civile et militaire de la France et, par extension, de l’Europe.

      Il y a des points rassurants. L’auteur rappelle ainsi que, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, la France n’a plus d’ennemis à ses frontières, que son territoire est protégé par la défense nucléaire et que « nous, Français, vivons depuis plusieurs décennies dans un incroyable confort géopolitique : celui des #guerres_choisies », autrement dit « celles que nous avons décidé de mener ». La violence sur son territoire est résiduelle.
      Certes, la France l’a éprouvée avec la série noire des années 2010 (attentats du Bataclan, de Nice), mais l’horreur évidente des 271 morts n’est pas comparable aux 900 tués quotidiens en moyenne, dans le camp français, de 1914 à 1918, pendant la première guerre mondiale. De même, l’auteur insiste sur la résilience des Français, lors de la menace terroriste, mais aussi pendant l’épreuve du Covid-19.

      Le compte n’y est pas

      En revanche, dès que les sujets militaires stricto sensu sont abordés, « on se risque sur le bizarre ». Car ce n’est pas le moindre des mérites de l’auteur d’avoir mis en exergue de chacun de ses chapitres des citations du dialoguiste Michel Audiard pour détendre l’atmosphère. Or, sur la question de l’engagement de long terme ou de la production d’armement, le compte n’y est pas ! La France, comme ses partenaires européens, a cru aux dividendes de la paix et se révèle incapable d’alimenter durablement un conflit de haute intensité. Elle pourrait « tenir 80 kilomètres de front, pas plus », précise-t-il, soit la distance séparant Dunkerque de Lille, alors que le front ukrainien s’étend sur près de 1 000 kilomètres.

      En matière d’armement, la France a privilégié la qualité (avions Rafale, canons Caesar) à la quantité, mais, au-delà d’un certain seuil d’engagement, cela ne suffit plus. « L’#armée_française, c’est l’armée américaine, mais en version bonsaï », résume-t-il. Outre les délais de fabrication des matériels ou d’approvisionnement, certains choix militaires pèsent lourd, comme le mépris à l’égard de l’artillerie, des chars ou des drones. De fait, c’est moins noble que le combat aérien.

      Enfin, outre une certaine russophilie partagée au sein des élites françaises, politiques, économiques, voire militaires, Jean-Dominique Merchet souligne une erreur de diagnostic centrale : la Russie de Poutine est une puissance profondément révisionniste [sic], qui honnit les valeurs occidentales et qui entend récupérer les territoires qu’elle a perdus, dans l’histoire longue comme récente.
      « Sommes-nous prêts pour la guerre ? », de Jean-Dominique Merchet, Robert Laffont, 224 p., 18 €.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/03/14/sommes-nous-prets-pour-la-guerre-une-armee-presque-sans-defense_6221905_3232