Comprendre et agir, appel à un autre Maroc : créer les conditions d’un nouveau mouvement social | Contretemps
▻http://www.contretemps.eu/interventions/comprendre-agir-appel-autre-maroc-cr%C3%A9er-conditions-nouveau-mouvemen
Dépasser le clivage entre islamistes et gauchistes
À la suite du Mouvement du 20 Février, nous appelons à la refonte du paysage politique marocain sur d’autres bases que la simple opposition entre pseudo-conservateurs islamistes et pseudo-modernistes de gauche.
Perçu comme une dichotomie fondamentale de l’espace politique marocain, le clivage entre islamistes et gauchistes s’est largement imposé aux acteurs sociaux au cours des décennies postindépendances.
Pourtant, en fondant leurs oppositions sur la base de différences d’éthique et de valeurs, les deux dynamiques négligent les possibles convergences de leurs bases sociales.
Ainsi, une partie de la gauche marocaine s’est radicalisée en rejetant tout héritage culturel issu de l’Islam, amalgamé au despotisme, au « sous-développement » et à l’opposition à la Modernité. Inversement, une partie des mouvements islamistes s’est attachée à construire un référentiel unique de valeurs dans le but d’uniformiser l’espace social.
Largement exacerbée par le régime d’Hassan II, cette différenciation a également été amplifiée par un contexte international marqué par la théorie du choc des civilisations. Cette dernière agit soit de manière directe en construisant un « nous » contre un « eux », soit de manière plus insidieuse à travers les valeurs normatives de l’universalité et de la modernité face auxquelles tout modèle alternatif est voué à la stigmatisation.
Pourtant, l’opposition entre islamistes et gauchiste n’est ni un fait allant naturellement de soi, ni une norme historiquement ancrée dans la nature de l’opposition au Maroc.
Ainsi, les exemples ne manquent pas pour démontrer la non-évidence de cette dichotomie. Citons dans ce cadre, la coexistence, au sein du Mouvement national, des différentes tendances, allant du salafisme de Allal El Fassi au modernisme de Hassan El Ouazzani, l’existence au sein même de l’UNFP d’une large tendance islamiste18, ou encore le militantisme passé de certains leaders islamistes actuels au sein des organisations d’extrême-gauche des années 197019.