demandes d’asile et mesures d’éloignement en baisse

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  • Chiffres de l’immigration en 2020 : demandes d’asile et mesures d’éloignement en baisse
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    La crise sanitaire due au Covid-19 a rendu imprévisible un sujet que le gouvernement veut pourtant maîtriser fermement : l’immigration. Jeudi 21 janvier, le ministère de l’intérieur a rendu publics les chiffres de l’année 2020 sur la question. Bien que ceux-ci soient provisoires, une tendance non équivoque se dégage : une écrasante majorité des indicateurs sont à la baisse. « 2020 : une année totalement atypique, de rupture », souligne-t-on place Beauvau. Parmi les sujets politiquement sensibles pour le gouvernement : celui de la demande d’asile. Jusqu’en 2019, elle continuait d’augmenter en France et les autorités ne cachaient pas leur volonté d’enrayer la tendance. En 2020, sous l’effet de la crise sanitaire, qui a limité les passages aux frontières et provoqué le ralentissement, voire l’arrêt, de certains services de l’Etat lors du premier confinement, la demande d’asile a fortement chuté. Une situation semblable à celle du reste de l’Union européenne (UE).
    En France, 81 669 nouvelles demandes de protection ont été introduites en préfecture dans les guichets uniques des demandeurs d’asile, contre 138 420 en 2019 (- 41 %). Côté ministère de l’intérieur, on reste prudent sur les évolutions futures de cette tendance : « Le Covid peut avoir un effet de ralentissement des déplacements ou provoquer au contraire une fuite » des pays. De leur côté, les services de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra), chargés d’examiner les demandes, ont enregistré 95 600 dossiers en 2020 et concluent à une baisse de 28 % par rapport à 2019. Cette différence de chiffres tient principalement au fait que l’Ofpra prend en compte dans ses statistiques les cas dits des « réadmissions éteintes ». Il s’agit des personnes dont la demande d’asile relevait, en 2019, d’un autre Etat membre de l’UE au titre du règlement de Dublin, mais dont la France est devenue responsable, en 2020, dès lors qu’aucun renvoi vers le pays en question n’est intervenu entre six et dix-huit mois après leur arrivée.
    Alors que le débat sur les conditions d’accueil des demandeurs d’asile a été prégnant ces dernières semaines et que les campements se reconstituent inlassablement depuis 2015, ce ralentissement n’a pas permis de rectifier le tir. A ce jour, seul un demandeur d’asile sur deux est hébergé le temps que son dossier soit étudié, le dispositif national d’accueil (DNA) étant saturé – 4 500 places supplémentaires doivent être créées en 2021. Pour Didier Leschi, directeur de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, c’est également sur l’intégration qu’il faut travailler, justifiant la situation par « une forte présence indue de réfugiés dans le DNA ».Depuis plusieurs années, le gouvernement tente de fluidifier la prise en charge des demandeurs d’asile en accélérant le délai de traitement des dossiers. La crise sanitaire a largement freiné le processus : le délai moyen d’examen des demandes devant l’Ofpra est passé de 161 jours en 2019 à 262 jours en 2020. En cause : une « diminution de l’activité décisionnelle de l’ordre d’un quart puisque, en raison principalement de l’interruption des entretiens d’asile durant le premier confinement, on a rendu environ 90 000 décisions en 2020, contre plus de 120 000 en 2019, explique Julien Boucher, directeur de l’Ofpra. Le mouvement que nous engageons pour diminuer les stocks de demandes en instance va permettre de reprendre la trajectoire de baisse des délais d’instruction. »En 2020, comme en 2019, les demandeurs d’asile proviennent en premier lieu d’Afghanistan (8 886 demandes) puis du Bangladesh (4 345). Le Pakistan s’est placé en troisième position avec 3 426 demandes. L’Albanie et la Géorgie, qui occupaient le haut du tableau ces dernières années, disparaissent des dix premières nationalités qui demandent l’asile. Place Beauvau, on veut y voir « le résultat d’un effort politique lié à la grande qualité de la coopération » avec ces Etats, considérés comme des pays d’origine sûrs, et pour lesquels la France voulait réduire les arrivées.
    En tête des demandes de protection depuis 2018, les autorités scrutent particulièrement la demande afghane. En 2020, « elle ne baisse que de 15 %, les Afghans continuent de venir en France après avoir été déboutés dans d’autres pays européens », note Didier Leschi. Parmi les demandeurs d’asile primo-arrivants, la part des personnes relevant du règlement de Dublin – soit celles dont la demande d’asile relève d’un autre Etat de l’UE – reste stable. Elle était de 25 % en 2019 et baisse légèrement à 21 % en 2020, d’après les chiffres du ministère. En revanche, « l’effet de la crise a augmenté le nombre de cas Dublin qui sont retombés dans la procédure de droit commun [passant sous la responsabilité de la France] », précise-t-on au ministère.Au total, 24 118 personnes ont bénéficié d’une protection (décisions de l’Ofpra et de la Cour nationale du droit d’asile confondues), soit un taux de réponses positives de 24 %. En 2019, elles étaient plus de 36 000 à se voir octroyer le statut de réfugié ou la protection subsidiaire, soit une baisse de 33,5 % entre les deux années.Un autre effet imprévu du Covid-19 sur les chiffres de l’immigration risque d’inquiéter le gouvernement et en premier lieu le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, qui revendique une ligne stricte : celui du départ des étrangers en situation irrégulière. A cet égard, les retours forcés ont drastiquement chuté, passant de 18 906 en 2019 à 9 111 en 2020 (- 52 %). Parmi tous les renvois, ce sont ceux vers les pays tiers (hors UE) qui diminuent le plus, avec une baisse de 62 %. Dans l’entourage du ministre, on tient à insister sur « une augmentation des interpellations de personnes en situation irrégulière depuis cet été ». Différentes justifications liées à la crise sanitaire sont évoquées : des centres de rétention administrative – dont l’activité a été drastiquement réduite pendant le premier confinement – qui tournent au ralenti, un trafic aérien perturbé, les difficultés à obtenir un laissez-passer consulaire avec les autorités des pays tiers… Le ministre a notamment multiplié les visites au Maroc et en Tunisie pour mettre en œuvre sa ligne de fermeté.

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