La métaphore du contrat, par Yves Jeanneret et et Valérie Patrin-Leclère
▻http://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2004-1-page-133.htm
“Passe-t-on contrat lorsque l’on communique ? L’idée traverse les disciplines. Parler de contrat, c’est penser la communication en termes d’institution sociale. C’est interroger la relation entre le texte et son interprétation. C’est convoquer une anthropologie. Il est question de contrat dans la théorie des genres, la psychologie cognitive, la grammaire des récits.
Les Sic sont particulièrement concernées par cette métaphore juridique. Elle y circule sous une forme générique (le contrat de communication), autant que spécifiée (contrat médiatique, contrat énonciatif, contrat de lecture). La notion traverse les espaces scientifique et professionnel, autorisant des usages théoriques, pragmatiques, marchands. On mobilise des contrats de communication pour décrire les genres médiatiques, pour former aux techniques de communication, pour réaliser la médiation scientifique. On utilise les contrats de lecture dans les études de positionnement de presse, dans le planning stratégique, dans le traitement documentaire. Même s’il s’agit de postures et de pratiques diverses, la convergence n’est ni fortuite ni anecdotique. Elle est symptomatique de cette tentative qui anime les Sic de modéliser le processus de communication, de l’expliquer en le rendant explicite. Une tentative qui se joue ici entre efficacité et apories.”
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“La notion de CL [Contrat de Lecture] désigne donc une situation marchande que les offreurs cherchent à démonétariser symboliquement. Le « contrat » a la vertu de transformer la consommation en communication. La métaphore personnifie l’organisation. Elle donne un corps — une main qui signe, une conscience qui tient ses engagements — à la personne morale désincarnée. C’est sans doute là une des raisons majeures de l’extension de la métaphore. À l’heure de la « responsabilité » d’entreprise, l’engagement contractuel devient une norme.”