Ce mois-ci dans le Diplo, un article titré « Le Hezbollah maître du jeu libanais ». La moitié des citations sont de Lokman Slim, ce qui garantit sur le sujet un manque total de sérieux. Et, non, ce n’est pas en précisant « connu pour ses positions critiques envers le parti » que ça rend plus crédible ce qu’il dit (si tu ne connais pas, une rapide recherche sur Seenthis te donnera des infos intéressantes).
L’article, derrière l’absolument dégueulasse intertitre « Intervenir pour défendre le “vrai islam” », reprend l’approximation sur le mausolée de Sayyida Zaynab, que j’ai déjà abordé ici :
▻http://seenthis.net/messages/416460
On retrouve d’ailleurs ici un mensonge classique depuis 2012 : Nasrallah prenait bien soin d’expliquer la présence de membres du Hezbollah pour protéger le mausolée de Sayyida Zaynab (haut lieu de pèlerinage chiite) par le fait que, si le tombeau était détruit, alors il y aurait une conflagration confessionnelle totalement incontrôlable, et que cette protection était nécessaire justement pour éviter que ça dégénère immédiatement en fitna. On peut bien prétendre que ce discours est un alibi, mais le fait est que, contrairement à ce qu’ont colporté les médias Hariri, Nasrallah avait un discours officiel destiné clairement à prévenir le glissement confessionnel sur la question de Zaynab.
Le "vrai islam" revient dans une citation :
« Son intervention en Syrie est alors devenue une entreprise sacrée, visant à défendre ce qu’il considère comme le vrai islam, face aux groupes rebelles comme Daesch. »
Alors certes, je ne me fais pas trop d’illusions sur ce qui peut circuler chez les membres d’un parti militaro-religieux comme le Hezbollah, mais pourquoi se contenter de ces raccourcis qui vont toujours dans le même sens caricatural, alors que le chef du parti, ainsi que ses médias officiels, prennent un soin particulier à ne pas dénoncer ses ennemis comme « sunnites », mais comme « takfiris », c’est-à-dire comme ultra-sectaires et intolérants, et à rappeler que les sunnites eux-mêmes sont ses premières victimes.
Toute cette seconde partie (là où l’on introduit Slim, curieusement) tient absolument à se concentrer sur l’« exacerbation des tensions communautaires » et à largement en faire un processus mental chiite.
Ce qui mène à une phrase que j’ai dû relire pour la comprendre :
…des affrontements éclataient entre des forces sunnites et Saraya al-Mouqawama, les « brigades de la résistance » liées au Hezbollah. « Les éléments sunnites ont coupé l"autoroute qui mène au Sud… »
Comme les brigades de la résistance sont largement sunnites (ce sont justement des brigades qui permettent aux non-chiites de participer à la Résistance avec le Hezbollah), je n’ai pas compris qui étaient « les éléments sunnites ». L’article aurait pu évoquer dans ce cas « des éléments proches du courant du Futur » et « des éléments proches du Hezbollah » plutôt que de privilégier l’habituel angle confessionnel, surtout dans une situation où tous ces gens sont grosso modo tous sunnites…
Évidemment, toute cette partie sur l’exacerbation sectaire repose lourdement sur l’influence supposée de la guerre en Syrie, et non comme une manœuvre démarrée au Liban, sciemment, dès le lendemain de la guerre israélienne de 2006, comme je l’avais documenté à partir du Cablegate :
►https://blog.mondediplo.net/2013-06-24-Au-Liban-ce-que-devoilent-les-cables-de-Wikileaks
L’encadré « Un futur président sous contrôle » s’aligne sur les lubies 14 Mars façon L’Orient le Jour, expliquant que c’est le Hezbollah qui bloque la Présidentielle.